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Document 52017IE2837

Avis du Comité économique et social européen sur la «Politique économique de la zone euro (2017)» (supplément d’avis)

JO C 81 du 2.3.2018, p. 216–221 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

2.3.2018   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 81/216


Avis du Comité économique et social européen sur la «Politique économique de la zone euro (2017)»

(supplément d’avis)

(2018/C 081/31)

Rapporteur:

Petr ZAHRADNÍK

Corapporteur:

Javier DOZ ORRIT

Décision de l’Assemblée plénière

27.4.2017

Base juridique

Article 29, point A), des modalités d’application du règlement intérieur

Compétence

Section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale»

Adoption en section spécialisée

5.10.2017

Adoption en session plénière

19.10.2017

Session plénière no

529

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

158/4/6

Préambule

Le présent avis s’inscrit dans un ensemble plus large de quatre avis du Comité économique et social européen (CESE) sur l’avenir de l’économie européenne (approfondissement de l’Union économique et monétaire et politique économique de la zone euro, union des marchés des capitaux et avenir des finances de l’Union européenne)  (1) . Cet ensemble d’avis relève du processus d’élaboration du livre blanc sur l’avenir de l’Europe lancé récemment par la Commission européenne et prend en compte le discours sur l’état de l’Union en 2017 prononcé par le président Juncker. Conformément à la résolution du CESE sur l’avenir de l’Europe  (2) et à ses avis antérieurs sur l’achèvement de l’Union économique et monétaire (UEM)  (3) , ces quatre avis soulignent que la gouvernance de l’Union a besoin d’une vision commune allant bien au-delà des approches et des mesures techniques, et qui est avant tout une question de volonté politique et de perspective commune.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Les présentes conclusions et recommandations sont formulées en vue de compléter l’avis ECO/423, avec lequel le présent avis est en plein accord et sur lequel il s’appuie. Elles sont également cohérentes avec les trois autres avis sur le thème de l’avenir économique de l’Europe mentionnés dans préambule.

1.2.

Le CESE salue les progrès réalisés dans le développement d’une politique économique de la zone euro et suit de près les facteurs qui conditionnent son évolution. Toutefois, il attache une importance toute particulière à ceux de ces éléments qui associent l’environnement de la zone euro aux questions budgétaires et au renforcement de son cadre institutionnel.

1.3.

Pour le CESE, il est primordial que la zone euro soit dotée de politiques économiques au dosage équilibré, dont les composantes monétaires, budgétaires et structurelles soient correctement interconnectées. Ce facteur gagne actuellement en importance, avec le regroupement prévu de ces politiques parallèlement à l’évolution de l’économie.

1.4.

Le CESE est en désaccord avec le rejet, par le Conseil européen, de l’idée d’une orientation budgétaire positive et l’invite à reconsidérer cette conclusion à laquelle il est parvenu. C’est notamment le probable abandon, par la Banque centrale européenne, de sa politique d’assouplissement quantitatif qui vient renforcer les arguments en faveur de la mise en œuvre de l’idée d’une orientation budgétaire positive. Dans le même temps, le CESE reconnaît que la portée d’une orientation budgétaire positive doit être bien ciblée, de façon à ne pas accroître le niveau encore élevé de la dette publique, et centrée sur des domaines susceptibles d’apporter des avantages manifestes à long terme.

1.5.

Le CESE constate l’amélioration de la situation économique dans la zone euro, et recommande, afin de maintenir et de renforcer cette tendance, de prendre des mesures décisives pour stimuler l’investissement et mener des réformes structurelles qui favorisent à la fois une augmentation de la productivité et la création d’emplois de qualité. L’application des réformes structurelles devrait intervenir de manière plus conforme aux processus qui sous-tendent le semestre européen. Le CESE recommande en outre que la nécessité de mener des réformes structurelles soit envisagée à l’échelle de la zone euro ou de l’Union européenne dans son ensemble, et non simplement sous la forme de mesures structurelles isolées dans les différents États membres.

1.6.

Le CESE soutient fermement un renforcement de la cohésion dans la zone euro sous la double forme de l’intensification de la coordination des politiques économiques et budgétaires et de l’amélioration de l’intermédiation financière, grâce au parachèvement de l’union financière et au souci d’accroître l’influence de la zone euro dans l’économie mondiale. Pour répondre à ces défis, le CESE recommande de consolider en conséquence son cadre institutionnel.

1.7.

Le CESE estime que l’euro est la monnaie de toute l’Union européenne; il souhaite que l’amélioration de la conjoncture économique dans l’Union européenne ouvre la possibilité d’élargir à nouveau la zone euro, ce dont l’on attend des retombées mutuellement positives tant pour les États qui font actuellement partie de la zone euro, que pour les nouveaux membres.

1.8.

Le CESE constate que, en raison du «Brexit» et du manque de prévisibilité de l’actuelle administration américaine, il importe d’être dûment attentif aux évolutions de la situation politique et économique à l’échelle mondiale.

1.9.

Le CESE est conscient que, dans le cadre défini par les règles actuelles, les possibilités d’améliorer le fonctionnement de la zone euro se heurtent à certaines limites (en particulier pour les mesures de nature structurelle); pour certains aspects plus fondamentaux (comme l’amélioration de son cadre institutionnel ou la mise en place de nouveaux instruments budgétaires), il s’impose toutefois d’adopter de nouvelles règles.

1.10.

Dans le contexte des prochaines recommandations de politique économique pour l’année 2018, le CESE souligne la nécessité de lancer un débat sur:

la création d’une union budgétaire,

le renforcement de la responsabilité de chacun des États membres concernant ses obligations par rapport à la zone euro,

la nécessité de procéder à des réformes structurelles dans le cadre de la plateforme que constitue semestre européen,

un nouveau renforcement de la coordination et de la gouvernance économiques,

l’amélioration du système d’intermédiation financière d’une manière qui conduise à un renforcement des investissements productifs à long terme, conformément aux objectifs de développement durable des Nations unies (ODD), en faisant jouer le rôle de la Banque européenne d’investissement, du Fonds européen d’investissement ou du Fonds européen pour les investissements stratégiques 2.0,

l’accroissement de l’influence de la zone euro à l’échelle mondiale.

1.11.

Le CESE est conscient de la forte nécessité de faire en sorte que l’augmentation des activités d’investissement se reflète de manière visible dans l’évolution correspondante des salaires et la poursuite de la baisse du taux de chômage. Il conviendrait également de s’employer à remédier aux déséquilibres évoqués dans l’avis, lesquels pourraient constituer un obstacle majeur à la croissance à long terme s’ils persistent et ne sont pas corrigés.

1.12.

Pour faire en sorte que les citoyens apportent leur soutien capital au projet de relance de la zone euro et de mise en œuvre, dans son cadre, des réformes structurelles, il y a également lieu de consolider leur dimension sociale et d’introduire, pour sa gouvernance, des modalités démocratiques et transparentes visant à garantir une prospérité économique et un niveau de vie élevé.

2.   Contexte

2.1.

Dans le cadre du processus périodique du semestre européen, la Commission européenne a publié en novembre 2016 des documents relatifs à la recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro, ainsi qu’une communication intitulée «Pour une orientation positive de la politique budgétaire de la zone euro». Le CESE a consacré à ces documents son avis ECO/423, qu’il a adopté lors de sa session plénière de février 2017. Depuis, l’évolution de la politique économique de l’Union européenne, ainsi que les actions engagées par certains États membres ont considérablement modifié la situation. Le présent supplément d’avis vise à mener une réflexion sur les plus importants de ces développements:

projet de recommandation du Conseil concernant la politique économique de la zone euro (mars 2017),

prévisions économiques de printemps (mai 2017),

communication sur les recommandations par pays pour 2017 (mai 2017).

En parallèle, au cours de la même période ont été publiés un livre blanc sur l’avenir de l’Europe et un document de réflexion sur l’approfondissement de l’Union économique et monétaire et le financement futur de l’Union européenne, qui ont également été évoqués par Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, dans son discours sur l’état de l’Union de septembre 2017. L’on a pu observer, en outre, une évolution visible du mode de fonctionnement de la zone euro sur le plan budgétaire. La teneur du présent avis tient donc compte de l’évolution économique en 2018 et traduit les propositions du CESE sur les recommandations concernant la politique économique de la zone euro pour 2018.

2.2.

L’actuelle reprise économique est légèrement plus rapide que prévu; la zone euro a néanmoins toujours besoin d’investissements plus vigoureux, qui pourraient également être favorisés par un coup de pouce budgétaire modéré, de manière à ne pas aggraver le niveau de la dette publique à long terme. Les effets de la crise et des politiques mises en place continuent de peser lourdement sur le chômage, la pauvreté et les inégalités, et sont également une source de disparités économiques et sociales entre États membres. Il est donc essentiel de doper les perspectives de croissance par un soutien accru aux investissements dans la zone euro, assorti d’une politique sociale qui infléchisse la pauvreté et les inégalités. Selon les prévisions économiques de printemps de la Commission européenne, les investissements accompagnés d’une évolution correspondante des salaires et d’une poursuite de la baisse du chômage, contribuant ainsi au renforcement de la demande intérieure, constituent un facteur clef pour la durabilité de la reprise économique.

2.3.

La cohésion de la zone euro doit par ailleurs être renforcée. Cette évolution pourrait être facilitée par le parachèvement de l’union financière — qui pourrait être réalisé dans le cadre des règles actuelles — et par les effets bénéfiques qui en sont attendus pour les investissements, tandis qu’un nouveau renforcement de la coordination des politiques économiques et budgétaires qui mette l’accent sur des capacités budgétaires pour la zone euro et la création d’un budget autonome qui lui serait propre, ainsi que la mise en place une architecture institutionnelle plus solide pour la zone euro, qui rendrait possibles une meilleure représentation interne et externe et une plus grande responsabilisation de ses différents membres, requièrent l’adoption de nouvelles règles.

2.4.

L’un des scénarios du livre blanc sur l’avenir de l’Europe envisage la possibilité d’une Europe à plusieurs vitesses, où l’une des grandes lignes de partage serait justement la zone euro. Dans ce contexte, le CESE soutient néanmoins l’idée que l’euro est la monnaie de toute l’Union européenne. Il serait dès lors souhaitable de prendre des mesures qui inciteraient les États qui ne sont pas membres de la zone euro à considérer qu’y adhérer constitue l’une des priorités de leurs politiques nationales.

2.5.

Les prévisions d’hiver et de printemps de la Commission européenne sont axées sur une situation caractérisée par une «forte incertitude» en ce qui concerne les risques, tant internes qu’externes, qui pèsent sur la croissance du fait de facteurs géopolitiques, commerciaux et financiers. Dans ses prévisions de printemps, la Commission a fait part de sa préoccupation quant à l’évolution de la situation aux États-Unis et au Royaume-Uni («Brexit»), qui pourrait affecter la (modeste) reprise européenne. Le gouvernement du président Trump, qui est encore moins prévisible qu’il ne paraissait initialement, considère que la persistance d’un fort excédent du compte de transactions courantes de la balance des paiements de l’Allemagne et de la zone euro fait problème. Ce point de vue pourrait amener les États-Unis à adopter des mesures néfastes de politique commerciale, susceptibles d’avoir des effets dommageables pour l’Union européenne et la zone euro. Le retrait du Royaume-Uni de l’Union recèle lui aussi son lot d’inconnues: la longueur du prélude aux négociations n’augure rien de bon quant à leur issue finale, tandis que les élections de juin laissent présager de possibles complications et retards dans la progression de ces tractations.

2.6.

Les plus récentes prévisions économiques de printemps de la Commission européenne invitent à penser que la recommandation de la Commission et l’avis du CESE (ECO/423) allaient dans le bon sens quand ils défendaient de donner en 2017 une orientation positive à la politique budgétaire de la zone euro dans son ensemble — proposition que rejette à présent la recommandation du Conseil du 10 mars 2017. Le CESE exprime son désaccord avec la décision du Conseil européen et estime que les risques qui se sont fait jour depuis, tout comme les prévisions économiques de printemps de la Commission, confirment qu’il est opportun de maintenir une orientation positive de la politique budgétaire.

3.   Observations générales

3.1.

L’importance que l’Union économique et monétaire revêt parmi les priorités essentielles de l’intégration européenne a été soulignée à l’occasion de la commémoration du soixantième anniversaire de la signature des traités de Rome et des débats sur l’avenir de l’Union européenne. Il a également été déclaré que, malgré les problèmes qui restent encore sans solution, ce serait faire fausse route que d’adopter une attitude trop défensive en ce qui concerne la zone euro. En lieu et place, il serait préférable d’embrasser une vision plus ambitieuse de son avenir et d’œuvrer en faveur de mesures concrètes pour mieux tirer parti de son potentiel. Le CESE souscrit à cette position.

3.2.

S’agissant de la prospérité économique de l’Union européenne et de la juste redistribution des revenus et des richesses qu’elle crée, l’avis ECO/423 souligne qu’il importe, pour un dosage équilibré des politiques économiques, de recourir à des instruments monétaires, budgétaires et structurels et de prendre des mesures axées sur l’amélioration du fonctionnement et de l’efficacité des marchés financiers, grâce notamment à une réglementation adéquate qui empêche certaines institutions financières d’adopter des comportements risqués irresponsables. Le CESE a la conviction que les évolutions observées ces derniers mois ont, à bien des égards, renforcé l’importance de cet aspect.

3.3.

Le CESE soutient pleinement l’achèvement et l’approfondissement de l’Union économique et monétaire d’ici 2025. En ce sens, le présent avis est cohérent avec l’ensemble formé par les autres avis consacrés par le Comité à l’avenir économique de l’Europe, mentionnés dans le préambule. Le CESE est convaincu qu’une attention particulière devrait être accordée avant tout aux aspects suivants:

3.3.1.

un renforcement et une coordination accrus des politiques budgétaire, économique et structurelle afin d’instaurer un dosage efficace de ces politiques, y compris en ce qui concerne les efforts visant à consacrer spécifiquement une ligne budgétaire conséquente à la zone euro dans le budget de l’Union européenne. Le document de réflexion sur l’approfondissement de l’Union économique et monétaire utilise, pour la première fois à un niveau politique aussi élevé, l’expression «union budgétaire». Une «union budgétaire» dans un environnement économique et monétaire homogène et au sein d’un marché intérieur qui fonctionne bien comporterait également une politique budgétaire (ce qui veut dire une politique fiscale et de dépense) commune ou étroitement coordonnée permettant de soutenir une fiscalité équitable et une stratégie systématique et efficace en matière de fraude et d’évasion fiscales;

3.3.2.

la responsabilité de chaque acteur pris isolément est un facteur essentiel pour améliorer la situation économique dans la zone euro, dans le cadre d’une vision complexe de la gouvernance économique de l’Union européenne, et en particulier du processus du semestre européen; dans tous les mécanismes de gouvernance économique existants, il conviendrait de maintenir, voire de renforcer, la responsabilité propre à chacun des États membres, de même que leurs obligations, notamment en assurant un suivi objectif et en appliquant toutes les mesures préventives et correctives, ainsi que, s’il y a lieu, des sanctions;

3.3.3.

les conseils de la productivité sont recommandés en tant qu’instrument adéquat, fondé sur une participation active de tous les partenaires sociaux pertinents, qui peut faciliter la mise en œuvre de réformes structurelles qui non seulement renforcent les capacités économiques des différents États membres, mais qui contribuent aussi de manière substantielle à améliorer le fonctionnement et l’homogénéité du marché unique dans son ensemble en éliminant certains obstacles et barrières réglementaires, sans préjudice de l’acquis en matière de droits sociaux et du travail;

3.3.4.

améliorer nettement l’efficacité de l’intermédiation financière en faisant appel à la palette complète des acteurs des marchés financiers conformément à la vision de l’union bancaire et de l’union des marchés des capitaux; la priorité dans le cadre de cette amélioration devrait porter sur les investissements productifs et non sur l’accroissement de la taille du secteur financier virtuel;

3.3.5.

pour une Union économique et monétaire forte et respectée dans le contexte des mutations à l’œuvre dans l’économie mondiale, la question de sa représentation extérieure s’avère également très importante; il est crucial non seulement que les différents États membres parviennent à une position consensuelle à l’égard de leurs partenaires internationaux dans les instances où l’Union européenne parle d’une seule voix, mais aussi de prendre des mesures afin de se doter d’une structure institutionnelle appropriée qui fasse écho à cet intérêt commun sur la scène mondiale (4);

3.3.6.

en outre, il aurait fallu envisager la possibilité d’élargir le périmètre actuel de la zone euro dans des cas où il apparaît judicieux de le faire; certains États, en particulier en Europe centrale et orientale, affichent des indicateurs de performance économique très positifs et font l’objet d’une évaluation très favorable dans le cadre du semestre européen; tout indique qu’ils pourraient être en situation de soutenir le fonctionnement de la zone euro et d’en renforcer le poids au sein de l’Union européenne;

3.3.7.

enfin, gagner le soutien des citoyens en faveur du nouveau projet d’Union économique et monétaire exige de mettre en place de nouveaux instruments de manière à garantir que les décisions relevant de la gouvernance économique soient démocratiques et que le marché unique soit complété par un socle social fort.

3.4.

Le CESE considère qu’il est tout à fait fondamental, pour le fonctionnement de la zone euro, d’encourager une hausse des investissements et d’engager et mettre en œuvre des réformes structurelles qu’il aurait été possible de promouvoir davantage encore dans le processus du semestre européen, à la faveur notamment du cadre offert par le marché unique. Les investissements financés par la Banque européenne d’investissement, le Fonds européen d’investissement ou le Fonds européen pour les investissements stratégiques affichent des résultats positifs, y compris pour des projets régionaux indispensables. Cependant, leur volume n’est toujours pas suffisant pour combler le déficit qui, s’agissant d’investir, est apparu en premier lieu au cours de la période de la crise. Ces instruments devraient contribuer à créer un système suffisamment robuste pour permettre un partage des sources de financement publiques et privées. Pour ce système, l’on devrait pouvoir recourir à la flexibilité offerte par le pacte de stabilité et de croissance pour pouvoir appliquer la règle d’or qui veut que l’on effectue les investissements et les dépenses courantes en rapport de manière à obtenir des bénéfices et des effets futurs. L’on devrait clairement réorienter les réformes structurelles pour qu’elles ne soient plus axées sur les différents États membres pris individuellement mais sur le fonctionnement global du marché unique.

3.4.1.

L’objectif des réformes structurelles devrait être avant tout d’éliminer les déséquilibres existants et de créer les conditions propices à un développement à long terme, conformément à la notion de développement durable (ODD) de l’ONU. Parmi ces déséquilibres figurent les disparités croissantes dans l’Union européenne et au sein même des États membres. Les réformes structurelles devraient conduire à l’adoption de mesures qui tiennent compte de l’environnement paneuropéen, et pas seulement des besoins partiels spécifiques aux différents États membres.

3.4.2.

Dans le contexte de l’Union européenne, les réformes devraient être conçues non seulement en fonction des priorités politiques nationales, mais aussi envisagées sous l’angle de l’Union dans son ensemble, c’est-à-dire dans la perspective de projets stratégiques susceptibles de devenir une source stable de valeur ajoutée dans l’Union.

3.4.3.

Il conviendrait également que les réformes structurelles aillent de pair avec la promotion d’emplois de qualité, en mettant l’accent sur des niveaux de rémunération adéquats et sur le plein respect de la justice sociale.

3.4.4.

De nombreuses réformes restent nécessaires pour améliorer les réglementations de manière à pouvoir soutenir le développement des entreprises et assurer une protection adéquate pour les citoyens. Parmi les exemples de domaines dans lesquels il convient de mener des réformes structurelles, on peut citer les règles relatives à la création d’entreprise, l’octroi de permis de construire, l’obtention de crédits, le paiement des impôts, les échanges commerciaux par-delà les frontières, l’enregistrement des biens immobiliers, ou encore l’harmonisation des politiques fiscales, qui favoriseront le bon fonctionnement du marché intérieur et y limiteront dans le même temps les cas de concurrence préjudiciable. L’environnement public et politique (c’est-à-dire l’efficacité et l’intégrité du secteur public, la sécurité et la stabilité tout au long du cycle de vie des projets) joue aussi un rôle important. C’est tout spécialement sous l’angle de l’acceptation de ces réformes par le public qu’il conviendrait de mettre en avant à quel point l’action sous-jacente à la mise en œuvre de ces réformes est compliquée et que leurs résultats macroéconomiques dépendent du bon fonctionnement de nombreux processus complexes à un niveau microéconomique. En expliquer toutes les ramifications constitue une condition préalable importante pour obtenir l’adhésion du public à ces réformes. Ce soutien exige qu’il soit décidé des instruments créés pour aider la zone euro à fonctionner à l’avenir d’une manière légitime et démocratique qui trouve le juste équilibre entre leur aspect économique et social.

3.4.5.

Il serait possible de consolider les connexions entre les réformes structurelles nécessaires, le semestre européen, le cadre pluriannuel de mise en œuvre des Fonds ESI (ou, plus généralement, du budget de l’Union européenne) et une zone euro plus développée et plus efficace. Le renforcement des connexions entre les réformes structurelles et le budget de l’Union européenne en vue d’encourager la convergence à moyen et à long terme est étroitement lié à la limitation anticipée de la politique d’assouplissement quantitatif de la BCE, lorsqu’une politique monétaire resserrée ouvrira une plus grande marge pour l’utilisation des recettes fiscales.

3.5.

Dans le même temps, il convient de déployer de nouveaux efforts pour assurer une convergence vers le haut des niveaux de vie, des normes sociales et des niveaux de salaires, au sein de chacun des États membres tout comme entre eux, s’agissant d’une condition minimale indispensable pour renforcer la confiance dans l’Union européenne et garantir l’avenir de l’Europe. Le socle européen des droits sociaux devrait favoriser cette convergence.

3.5.1.

Ce contexte invite à penser qu’il est nécessaire de mettre en place des politiques qui renforcent la demande intérieure dans l’Union européenne et la zone euro en général, et notamment dans les pays qui affichent en particulier des excédents élevés de balance courante et commerciale, de sorte à assurer un rééquilibrage au sein de la zone euro et par rapport au reste du monde.

3.5.2.

Les États membres de l’Union européenne ne devraient pas fonder leurs stratégies de compétitivité sur l’hypothèse selon laquelle le niveau des salaires restera bas. Un dosage efficace de politiques économiques devrait permettre de relancer l’activité d’investissement dans les infrastructures et l’augmentation des dépenses consacrées à l’éducation, à la recherche, à la formation professionnelle et aux compétences devrait se traduire par une augmentation de la productivité et une croissance plus forte des salaires et des revenus, reflétant également l’évolution du cycle de vie, l’évolution des carrières et l’adaptation au coût de la vie. Néanmoins, le CESE respecte les spécificités de chaque État membre ainsi que sa responsabilité première de les gérer grâce aux méthodes modernes de négociation collective.

3.5.3.

La situation du marché du travail dans un certain nombre de pays de la zone euro indique que les réformes structurelles en souffrance dans ce domaine devraient s’attacher à réduire les niveaux élevés d’emplois temporaires et à temps partiel contraints et d’emplois faiblement rémunérateurs, et à promouvoir des postes de travail de qualité pour une main-d’œuvre mieux formée et plus compétente. Ce nouveau type de réforme du travail devrait se fonder sur un dialogue social et des négociations collectives robustes, sur la base de l’autonomie des partenaires sociaux. Cela permettrait non seulement d’améliorer la justice sociale mais aussi de stimuler la productivité de l’économie.

3.6.

Le cadre réglementaire actuel permet en particulier de mettre en œuvre des mesures destinées à réaliser des réformes structurelles et renforcer la coordination de la politique économique et budgétaire; elles pourraient encore être renforcées par le prochain cadre financier pluriannuel, pour la période après 2020. En revanche, pour resserrer encore les liens de la zone euro avec une politique budgétaire commune ou pour renforcer la représentation commune de la zone euro sur la scène mondiale, il est nécessaire de mettre en place des règles entièrement nouvelles.

4.   Observations particulières

4.1.

Pour les raisons évoquées dans le présent avis, le CESE invite la Commission européenne et le Conseil à intégrer une orientation budgétaire positive adéquate dans les recommandations concernant la politique économique de la zone euro pour 2018. Cette proposition est particulièrement cruciale pour répondre à la nécessité de bénéficier d’une croissance économique à la fois suffisante et durable et d’assurer un dosage efficace entre les politiques économique et monétaire, dont le caractère expansionniste ne peut pas se prolonger indéfiniment.

4.2.

Nous pensons que, dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’investissement pour l’Europe, auquel nous souscrivons, la priorité devrait être accordée à des projets qui respectent les objectifs de développement durable et tiennent compte de la responsabilité sociale et environnementale.

4.3.

Le CESE a la conviction que les évolutions les plus récentes du modèle de la politique économique de l’Union européenne au cours des derniers mois écoulés, témoignent très clairement d’un soutien politique grandissant en faveur de l’approche qui aboutit à la création d’une union budgétaire sur la base de la plateforme que constitue la zone euro; à cet égard, le CESE préconise un suivi particulièrement vigilant de ces évolutions et est pleinement disposé à participer au processus qui a pour objet de renforcer l’importance des considérations budgétaires, car elles constituent une condition sine qua non si l’on veut créer un environnement plus homogène pour la zone euro; il est crucial aussi de se montrer attentif à la manière dont ces évolutions trouveront un écho dans de possibles modifications des structures et régimes institutionnels.

4.4.

Le CESE persiste à croire qu’au moment où l’approfondissement de l’Union économique et monétaire figure à nouveau parmi les grandes priorités, il est très important de ne pas sous-estimer les processus liés à un fonctionnement plus efficace et opérant du marché unique. Un marché unique efficace et opérationnel constitue l’une des conditions essentielles pour qu’il soit possible ne serait-ce que d’entamer la réflexion sur une Union économique et monétaire approfondie. Cette Union ne pourra donner tous les avantages escomptés que si l’ouverture et la libéralisation du marché unique se poursuivent à l’avenir, que l’on en renforce l’homogénéité et que l’on élimine les protections nationales, visibles ou cachées, qui y font obstacle.

4.5.

Le CESE souscrit au point de vue selon lequel l’environnement d’une Union économique et monétaire approfondie doit également être en concordance avec le processus d’intermédiation financière. Les éléments de l’union financière qui polarisent tout particulièrement l’attention sont l’union bancaire et l’union des marchés des capitaux. La première est avant tout affaire de stabilité et de prévisibilité des comportements dans le secteur bancaire. Elle doit aussi pouvoir compter sur des ressources financières suffisantes pour gérer d’éventuelles défaillances bancaires. La seconde, quant à elle se comprend comme un élargissement des possibilités d’allocation de ressources financières et en est encore à un stade précoce de son développement. Un fonctionnement amélioré de l’intermédiation financière, pour sa part, devrait être plus visible dans le domaine de l’investissement productif.

4.6.

L’avenir de l’Union européenne dépend également de son intégration accrue et du renforcement de son rôle sur la scène internationale. Il s’agit, particulièrement à l’heure actuelle, d’une des rares priorités essentielles et d’une question d’intérêt commun pour tous les États membres de l’Union européenne. Pour atteindre cet objectif, il peut s’avérer profitable de renforcer la représentation commune de cette dernière sur la scène internationale tout en promouvant et respectant, à ce même niveau, les valeurs, principes et politiques communs tels que, par exemple, la liberté et l’égalité politique et économique et la justice sociale, les bienfaits de la libre entreprise pour le commerce et l’investissement, la mise en place des conditions nécessaires à un cadre de concurrence ouvert et équitable, ainsi que l’élimination des pratiques illicites et frauduleuses des entreprises, par exemple le contournement des régimes fiscaux ou des procédures de passation de marchés publics; par ailleurs, le respect des droits civils et sociaux et des exigences élémentaires en matière environnementale apparaît comme absolument essentiel.

Bruxelles, le 19 octobre 2017.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Cet ensemble se compose des avis du CESE sur les thèmes «Politique économique de la zone euro (2017) (supplément d’avis)», «Union des marchés des capitaux: réexamen à mi-parcours» (voir page 117 du présent Journal officiel), «Approfondissement de l’UEM d’ici à 2025» (voir page 124 du présent Journal officiel) et «Les finances de l’UE à l’horizon 2025» (voir page 131 du présent Journal officiel).

(2)  Résolution du CESE, JO C 345 du 13.10.2017, p. 11.

(3)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 10, et JO C 332 du 8.10.2015, p. 8.

(4)  Pour de plus amples détails, voir par exemple JO C 177 du 18.5.2016, p. 16.


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