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Document 52009DC0212

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, Comité économique et social européen et au Comité des régions - Réutilisation des informations du secteur public: réexamen de la directive 2003/98/CE [SEC(2009) 597]

/* COM/2009/0212 final */

52009DC0212

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, Comité économique et social européen et au Comité des régions - Réutilisation des informations du secteur public: réexamen de la directive 2003/98/CE [SEC(2009) 597] /* COM/2009/0212 final */


[pic] | COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES |

Bruxelles, le 7.5.2009

COM(2009) 212 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EU ROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Réutilisation des informations du secteur public: Réexamen de la directive 2003/98/CE

[SEC(2009) 597]

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AUPARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉENET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Réutilisation des informations du secteur public: Réexamen de la directive 2003/98/CE

1. INTRODUCTION

La présente communication est destinée à examiner l'application de la directive concernant la réutilisation des informations du secteur public (ISP)[1] et à mettre en évidence le potentiel de réutilisation de ces informations à l'ère du numérique. Les informations du secteur public constituent la source d'information la plus abondante d'Europe. Parmi ces informations figurent les cartes et les images par satellite, la législation et la jurisprudence, les statistiques et les registres des sociétés, de la population et des brevets. Les ISP constituent la matière première d'une grande variété de produits et services proposés aux Européens dans leur vie de tous les jours, tels que les systèmes de navigation embarqués, les prévisions météorologiques ou les services financiers et produits d'assurance.

La valeur du marché des informations du secteur public dans l'UE est estimée à 27 milliards d'EUR[2], soit quatre fois celle du marché des services mobiles en itinérance[3]. Cela illustre l'importance cruciale que revêtent les informations du secteur public en tant que moteur de l'activité économique à l'ère du numérique. Le fait de continuer à accroître l'utilisation de cette ressource va, par conséquent, contribuer directement aux objectifs d'amélioration de la compétitivité et de création d'emplois que s'est fixés l'UE.

La directive ISP supprime les principaux obstacles à la réutilisation dans le marché intérieur, qui sont les pratiques discriminatoires, les marchés monopolistiques et le manque de transparence. Des progrès ont été accomplis depuis son adoption, mais les États membres doivent néanmoins prendre d'autres mesures pour que la totalité du potentiel des informations du secteur public pour l'économie de l'UE puisse être exploité.

La présente communication est accompagnée d'un document de travail des services de la Commission qui étaye l'analyse et les conclusions.

2. RÉUTILISATION DES ISP AU SERVICE DE L'INNOVATION ET DE LA CROISSANCE

L'internet a radicalement modifié la manière dont les entreprises et les particuliers peuvent avoir accès aux informations du secteur public et les réutiliser. Il est possible de réutiliser un contenu disponible sous forme numérique de différentes manières, en le combinant avec des informations de sources diverses et en lui ajoutant de la valeur. On peut citer les exemples des services de navigation, des informations en temps réel sur le trafic, des prévisions météorologiques envoyées directement sur un téléphone portable et des services de notation de crédit. Ces produits et services fondés intégralement ou en partie sur les informations du secteur public permettent de créer de nouvelles entreprises et de nouveaux emplois et offrent aux consommateurs un choix plus étendu et un meilleur rapport qualité-prix. Ils concernent souvent plusieurs États membres, puisque le besoin d'informations ne s'arrête pas aux frontières.

Pour certains services qui ont recours aux ISP, comme les systèmes de navigation autonomes, la demande est telle que les ventes ont triplé entre 2006 et 2007 (31 millions de dispositifs vendus) et on s'attend à voir ce chiffre plus que doubler en 2012 pour passer à 68 millions d'unités[4]. Ce domaine fait partie des secteurs de l'électronique de loisirs dont la croissance est la plus rapide. Nokia, le plus grand fabricant de téléphones portables au monde, a déboursé près de 6 milliards d'EUR pour acquérir Navteq, numéro un mondial de la cartographie numérique.

Le marché continue à évoluer et les fonctions de navigation de base seront améliorées grâce à l'intégration de couches supplémentaires d'informations apportant une certaine valeur ajoutée, telles que des informations sur le trafic permettant aux automobilistes d'anticiper les embouteillages, des prévisions météorologiques relatives à la destination et des informations sur les possibilités de stationnement ou sur les solutions de rechange dans le domaine des transports publics.

Même si la réutilisation des ISP s'intensifie, la majeure partie du potentiel existant n'est toujours pas exploitée en raison de la manière dont les organismes publics gèrent leurs ressources d'information. Cela s'explique notamment par le fait que la préférence est donnée à la récupération des coûts à court terme plutôt qu'aux bénéfices pour l'économie dans son ensemble. Cette attitude est souvent due à la pression exercée sur les organismes du secteur public afin qu'ils financent une partie de leurs activités. Elle peut avoir pour conséquences un développement de la concurrence entre le secteur public et le secteur privé, des conditions de tarification et d'autorisation restrictives et l'octroi de droits exclusifs.

Il existe en outre des obstacles pratiques à la réutilisation des ISP, tels que le manque d'information sur les ISP disponibles. Dans d'autres cas, les organismes du secteur public ne sont guère favorables à l'idée d'une éventuelle réutilisation commerciale ou n'ont pas conscience de son potentiel économique.

Selon une étude de l'Office of Fair trading (organisme britannique chargé de la concurrence)[5], pour l'économie britannique, on peut évaluer à 500 millions de livres par an le coût des occasions manquées en raison de la manière dont les organismes publics fournissent les ISP. La situation de l'UE contraste nettement avec celle des États-Unis, où la réutilisation est vivement encouragée. Dans ce pays, les particuliers comme les entreprises disposent de droits étendus en ce qui concerne l'accès électronique aux ISP et bénéficient de possibilités de réutilisation commerciale considérables. Les ISP fédérales ne sont pas couvertes par les droits d'auteur et leur utilisation n'est soumise à aucune restriction. De plus, les redevances de réutilisation n'excèdent pas les coûts marginaux de reproduction et de diffusion.

3. MISE EN œUVRE DE LA DIRECTIVE ISP

La directive relative aux informations du secteur public a été approuvée en novembre 2003. Elle harmonise les conditions de base concernant la manière dont ces informations peuvent être mises à la disposition des réutilisateurs, dans un souci d'encourager l'apparition, dans toute la Communauté, de produits et services fondés sur les ISP et d'éviter les distorsions de concurrence. Elle prévoit des dispositions réglementaires relatives à la non-discrimination, à la tarification, aux accords d'exclusivité, à la transparence, aux licences et à des outils pratiques permettant de trouver et de réutiliser facilement les documents publics. Une période de transition avait été prévue pour les accords d'exclusivité existants; elle a expiré le 31.12.2008. Les États membres ont toute latitude pour aller au-delà des normes minimales prévues par la directive.

Tous les États membres ont mis en œuvre la directive, même si quatre d'entre eux seulement ont respecté l'échéance du 1.7.2005. La Commission a ouvert 18 procédures d'infraction à l'encontre d'États membres[6] et la Cour européenne de justice a prononcé 4 arrêts pour défaut de mise en œuvre de la directive[7]. La directive a été mise en œuvre de différentes manières selon les États membres.

1) Onze États membres ont adopté des mesures spécifiques pour la réutilisation des informations du secteur public (BE, DE, GR, ES, IE, IT, CY, LU, MT, RO, UK).

2) Quatre ont eu recours à une combinaison de nouvelles mesures concernant spécifiquement la réutilisation et de mesures législatives antérieures à la directive (DK, AT, SI, SE) et huit ont adapté leur cadre législatif concernant l'accès aux documents de sorte qu'il couvre aussi la réutilisation des informations du secteur public (BG, CZ, FI, FR, LV, LT, NL, PT).

3) Quatre États membres ont uniquement notifié à la Commission des mesures ne comportant pas de dispositions spécifiques en ce qui concerne la réutilisation (EE, HU, PL, SK).

La Commission surveille la mise en œuvre et l'application de la directive grâce à une analyse de conformité très complète. Elle a en outre mis en place une coopération administrative très étroite. Cela a conduit à des modifications législatives rapides dans de nombreux États membres tels que le Danemark, la Grèce, l'Irlande, Malte et la Suède qui, à l'origine, avaient notifié des mesures de mise en œuvre insuffisantes.

La Commission a également recours à une politique de réutilisation pour appliquer les principes de ladite directive à ses propres documents. La décision 2006/291/CE, Euratom de la Commission[8] va au-delà de la directive en appliquant des tarifs fondés sur les coûts marginaux et ne les dépassant pas, et en rendant tous les documents réutilisables. Parmi les exemples figurent les données statistiques d'EUROSTAT, les mémoires de traduction de la Commission, la base de données juridique EUR-Lex et les études. Les informations de la Commission sont souvent disponibles en 22 ou même 23 langues, ce qui leur confère une valeur ajoutée exceptionnelle, notamment dans le cas des outils de traduction automatique.

4. INCIDENCE ET CHAMP D'APPLICATION DE LA DIRECTIVE ISP .

4.1. Modifications introduites par la directive

La directive apporte des éclaircissements sur le cadre juridique relatif à la réutilisation des ISP dans le marché unique, où des règles et pratiques très différentes étaient en vigueur selon les États membres. Les exemples suivants illustrent les effets de la directive.

1 ) Nouvelle législation favorable à la réutilisation: En Belgique, la directive a fondamentalement modifié l'approche de la réutilisation commerciale des informations du secteur public, qui était auparavant interdite et est désormais encouragée.

2) Les accords d'exclusivité conclus par des organismes du secteur public ont été supprimés dans certains États membres tels que les Pays-Bas et la Suède (dans ce dernier cas, c'est la Commission qui a suscité ce changement à la suite d'une plainte). Les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont effectué des études poussées pour recenser les accords d'exclusivité conclus entre le gouvernement central et les autorités locales. La Lettonie a lancé une procédure visant à garantir que tous les droits exclusifs accordés sont conformes à la directive et que les autorités chargées de la concurrence ont été consultées au préalable.

3) Tarification Les Pays-Bas ont annoncé qu'ils s'acheminaient vers une tarification inférieure ou égale aux seuls coûts marginaux, conformément au préambule de la directive qui recommande l'adoption de ce type d'approche. Dans d'autres États membres, les organismes du secteur public sont passés à un régime de coûts marginaux, comme le service espagnol du cadastre, ou ont réduit leur prix de manière spectaculaire, comme l'agence autrichienne de cartographie. Ces approches ont considérablement accru le nombre et la diversité des réutilisateurs.

L'agence autrichienne de cartographie (BEV) a procédé à des réductions de prix pouvant aller jusqu'à 97 % pour certains ensembles de données. Par conséquent, l'utilisation de ces informations a explosé, avec des augmentations de 7 000 % dans certains cas. De nouveaux utilisateurs issus des PME et de nouveaux secteurs de réutilisation (tels que la santé et l'agriculture) sont entrés en scène. La baisse des prix a été compensée par l'énorme accroissement de la demande et le chiffre d'affaires total de BEV est resté stable.

4) Des mécanismes de résolution des conflits relatifs à la réutilisation des informations du secteur public ont été mis en place, par exemple en France, en Slovénie et au Royaume-Uni, et leur utilisation illustre le bien-fondé de dispositifs de règlement de litiges et de médiation qui soient rapides et peu onéreux. En France, la CADA (Commission d’accès aux documents administratifs) a traité 53 affaires relatives à la réutilisation des ISP en 2007.

5) Des portails web relatifs aux ISP disponibles , conçus comme des outils permettant la recherche, l'utilisation et l'échange d'informations ont été créés, par exemple en Slovénie et au Royaume-Uni.

Au Royaume-Uni, l'«Office of Public Sector Information» a facilité la réutilisation des informations du secteur public au fil des ans. Il a lancé les licences en ligne du gouvernement, dont on dénombre actuellement 15 000 détenteurs, et gère le «Information Fair Trader Scheme», un système qui garantit que les organismes du secteur public respectent les exigences en matière d'équité et de transparence. Son site web, qui fournit de nombreuses informations sur les ISP disponibles et propose un «service de déblocage» pour aider à résoudre les problèmes liés à la réutilisation, figure à la neuvième place du classement des sites gouvernementaux les plus visités.

4.2. Des études et des consultations confirment l'incidence de la directive

Dans l'étude consacrée à l'évaluation de l'incidence de la directive dans les trois principaux secteurs des ISP – géographique, météorologique et juridico-légal – les différents indicateurs suivis pour mesurer la réutilisation des ISP font apparaître une croissance du marché ainsi qu'une augmentation de la réutilisation dans tous ces secteurs ces dernières années[9].

Dans le secteur des informations géographiques, les volumes de téléchargement d'ISP avaient augmenté d'environ 350 % en 2007 par rapport à 2002 et, en Allemagne uniquement, le marché était estimé à 1,5 milliard d''euros, soit une hausse de 50 % depuis 2000[10].

Les instituts météorologiques nationaux ont signalé des augmentations des volumes de téléchargement de 70 % entre 2002 et 2007, et le marché des données météorologiques de l'UE était estimé à 530 milliards d'EUR en 2006, soit une hausse de 60 % depuis 1998.

Dans les secteurs de l'information géographique et météorologique, les plaintes le plus souvent exprimées par les réutilisateurs concernent les prix élevés, le caractère restrictif des conditions de licence et la discrimination. Dans le secteur de l'information météorologique, en particulier, les réutilisateurs qui ont des difficultés à obtenir des ISP européennes ont recueilli des données provenant d'autres sources (États-Unis ou sources privées) ou ont complètement renoncé à la mise en place de services spécifiques.

Dans le secteur de l'information juridico-administrative , la majorité des détenteurs de contenu ont apporté des modifications non négligeables à leur politique en matière de données au cours des dernières années et proposent désormais leurs informations gratuitement sur l'internet. Ce changement favorise une forte croissance du marché. Les détenteurs de contenu indiquent qu'une hausse de 40 % a été enregistrée sur le marché depuis 2002 et les réutilisateurs confirment également un accroissement constant des revenus. Pour les réutilisateurs de ce secteur, la principale préoccupation est le manque d''information concernant le type d'ISP disponible et l'endroit où les trouver.

En France, le secteur de l'information juridique est l'un des plus dynamiques du marché de l'information numérique professionnelle, avec une forte croissance du marché (17 % en 2007) due aux services à forte valeur ajoutée[11].

Pour les besoins de ce réexamen, la Commission a consulté les États membres et les parties intéressées[12]. Les participants estiment que la directive ISP a eu des effets positifs sur la réutilisation des ISP. Toutefois, aussi bien les représentants des parties intéressées que ceux des États membres indiquent que le potentiel des ISP n'a pas encore été totalement exploité. Les organismes du secteur public ne sont pas toujours conscients de leurs responsabilités et des possibilités qui s'offrent à eux et les entreprises privées n'ont qu'une connaissance limitée de leurs droits et de la disponibilité des ISP.

Les réutilisateurs proposent de modifier la directive afin de rendre ses dispositions plus strictes. Ils proposent, par exemple, d'étendre le champ d'application de la directive de manière à obliger les organismes publics à autoriser la réutilisation, d'imposer la tarification fondée sur les coûts marginaux, d'exiger des régulateurs indépendants et/ou des mécanismes de résolution de conflits, de clarifier les missions de service public, d'établir des listes/inventaires nationaux des ressources et d'obliger les États membres à présenter des rapports annuels à la Commission. Enfin, ils souhaitent obtenir des précisions sur certains termes de la directive qu'ils jugent trop ambigus, tels que les définitions des documents, des missions de service public, de la tarification fondée sur les coûts marginaux ou du retour sur investissement raisonnable.

La majorité des États membres ayant participé à la consultation estiment qu'il est prématuré de modifier la directive et préfèrent qu'un délai supplémentaire soit accordé pour permettre sa totale mise en œuvre. Les organismes du secteur public jugent que le cadre actuel fourni par la directive donne satisfaction.

4.3. Champ d'application de la directive

L'article 13 de la directive ISP prévoit que la Commission procède à un réexamen portant notamment sur le champ d'application de la directive. Dans la pratique, il s'agit d'examiner si le champ d'application de la directive devrait à l'avenir être étendu aux organismes culturels, d'enseignement et de recherche, ainsi qu'aux radiodiffuseurs publics, qui en sont actuellement exclus.

Les participants à la consultation ont souligné le potentiel de réutilisation que présentent les informations détenues par les organismes culturels, d'enseignement et de recherche, et par les radiodiffuseurs publics. Certaines parties concernées se sont déclarées favorables à une extension du champ d'application en indiquant qu'elle aurait un effet positif sur le développement du marché du contenu en Europe.

Les États membres (à l'exception de la Lettonie et la Lituanie) et les parties intéressées représentant les secteurs exclus estiment toutefois qu'au stade actuel, le champ d'application ne devrait pas être étendu car les charges administratives et les coûts associés ne seraient pas compensés par les avantages potentiels. Ils font observer qu'une grande partie des données détenues par ces institutions sont également soumises à des droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers et qu'elles n'entreraient pas, par conséquent, dans le champ d'application de la directive. Cet argument est étayé par les résultats d'une étude récente qui a conclu que, pour le moment, le champ d'application de la directive ne devrait pas être étendu au secteur culturel[13].

La Commission encourage les secteurs exclus à appliquer les principes de la directive ISP, notamment en ce qui concerne la transparence, la non-discrimination et l'absence d'accords d'exclusivité, lorsqu'ils autorisent la réutilisation de leurs ressources d'information.

L'une des questions qui suscite un certain intérêt est la disponibilité d'informations scientifiques payées par des fonds publics. Ces informations devraient être largement disponibles et utilisables par tous afin qu'elles soient de la plus grande utilité possible pour la recherche et l'innovation, conformément à la communication de la Commission sur l'information scientifique à l'ère numérique[14].

Le contenu appartenant au domaine public est un autre sujet de préoccupation. Dans une récente communication intitulée «Le patrimoine culturel de l'Europe à portée de clic»[15], la Commission a souligné qu'il était important «que les œuvres qui sont dans le domaine public restent accessibles après un changement de format. En d'autres termes, les œuvres qui sont dans le domaine public devraient y rester une fois numérisées et être rendues accessibles par l'internet.» Il existe cependant, parmi les institutions culturelles, une certaine tendance à rendre payants l'accès ou la réutilisation de contenu numérisé relevant du domaine public. Cette attitude pourrait conduire à une privatisation du contenu relevant du domaine public à l'ère numérique, au lieu de favoriser l'accessibilité et l'utilisation les plus larges possibles pour les particuliers et les entreprises. La Commission suivra de près l’évolution en la matière.

5. QUELLES MESURES PRENDRE?

La directive ISP a été mise en œuvre par de nombreux États membres avec un retard considérable. L'interdiction des accords d'exclusivité n'est devenue pleinement applicable qu'à partir du 1.1.2009. Par conséquent; on ne connaît pas encore toutes les incidences de la directive dans sa forme actuelle.

De ce fait, la Commission n'a pas l'intention, au stade actuel, de proposer de modifications à apporter à la directive. Elle procédera à un autre réexamen au plus tard en 2012, lorsque davantage d'éléments concernant l'incidence, les effets et l'application de la directive devraient être disponibles, et elle en communiquera les résultats au Parlement européen et au Conseil. C'est à ce stade que des modifications législatives éventuelles seront envisagées , s'il existe toujours des entraves au potentiel de réutilisation.

Dans l'intervalle, la façon dont les États membres gèrent leurs ressources ISP sur le marché peut être grandement améliorée. La Commission souhaite que les domaines suivants fassent l'objet d'une attention particulière:

1) Mise en œuvre et application totales de la directive ISP

Il s'agit de la première étape essentielle pour lever les obstacles qui s'opposent à la réutilisation des ISP, tels que les marchés monopolistiques et le traitement discriminatoire. La Commission continuera à vérifier si les États membres satisfont à leurs obligations et à prendre des mesures contre ceux qui enfreignent les dispositions de la directive.

2) Mettre fin aux accords d'exclusivité

Tous les accords d'exclusivité existants devaient prendre fin au plus tard le 31 décembre 2008 sauf s'il peut être démontré qu'ils sont nécessaires pour la prestation d'un service d'intérêt général et bénéficient, à ce titre, d'un régime d'exception[16]. Toutefois, il a été constaté que des accords d'exclusivité sont encore en vigueur dans les États membres. La Commission contrôlera très attentivement le respect de cette obligation. Elle lancera un exercice destiné à déterminer la portée de ces accords à l'été 2009.

3) Tarification

Les organismes du secteur public devraient adopter une attitude transparente en ce qui concerne la base de calcul qu'ils utilisent, en respectant le plafond de redevances fixé par la directive. Les calculs ne devraient pas être fondés sur le chiffre d'affaires total de l'organisme du secteur public, mais sur les différents éléments ou bases de données concernés.

Plusieurs travaux, dont une récente étude de l'université de Cambridge, indiquent que la gratuité ou des redevances limitées au montant des coûts marginaux (coûts de reproduction et de diffusion des documents) contribuent à une réutilisation maximale des ISP et que les bénéfices économiques et sociaux compensent très largement les bénéfices financiers immédiats de la récupération des coûts[17]. La directive ISP recommande ce type d'approche dans son préambule. La tarification fondée sur les coûts marginaux constitue aussi l'un des principes essentiels de la recommandation du conseil de l'OCDE relative à un accès élargi et une exploitation plus efficace concernant les informations du secteur public[18].

En outre, la tâche consistant à poursuivre l'analyse du bien-fondé économique de la tarification en fonction des coûts marginaux est une des priorités de la Commission pour l'avenir, et elle sera exécutée en coopération avec les États membres et les parties intéressées.

4) Mesures visant à faciliter la réutilisation

En vertu de l'article 3 de la directive, les organismes du secteur public doivent veiller à ce que lorsque les documents sont réutilisables (c'est-à-dire disponibles pour toute utilisation autre que les missions de service public pour lesquelles ils ont été produits à l'origine), ces documents puissent être réutilisés à des fins commerciales ou non commerciales. Les organismes du secteur public doivent, lorsqu'ils facilitent la réutilisation, respecter pleinement les règles européennes et nationales sur la protection des données.

Les organismes du secteur public sont encouragés à identifier leurs ressources d'information et à les rendre facilement et rapidement disponibles sous des formats stables. À cet égard, les inventaires de ressources d'information et les portails ISP nationaux sont des outils importants. La coopération entre le secteur public et le secteur privé est essentielle et il convient de stimuler le partenariat et l'innovation.

La Commission s'emploiera à promouvoir l'échange de bonnes pratiques par des mesures facilitant la réutilisation entre États membres, notamment par l'intermédiaire du groupe d'experts ISP. Grâce à des projets tels que la plateforme ISP, elle favorisera la sensibilisation et contribuera au déploiement des politiques de réutilisation.

5) Garantir une concurrence loyale entre les organismes du secteur public et les réutilisateurs.

Les organismes du secteur public doivent garantir des conditions de licences équitables pour les réutilisateurs privés – en évitant la discrimination, les subventions croisées et les accords d'exclusivité – même s'ils sont en concurrence avec des réutilisateurs sur le marché.

La directive laisse aux États membres le soin de définir les missions de service public des organismes du secteur public. Cependant, dans certains cas, la frontière entre les missions de service public et les activités commerciales des organismes du secteur public est assez floue. Il existe également des cas dans lesquels la définition des missions de service public est telle que ces dernières couvrent une vaste gamme d'activités et occupent la quasi-totalité du marché des services ISP à valeur ajoutée. Ces circonstances peuvent rapidement conduire à des situations de subventions croisées, dans lesquelles un organisme du secteur public utilise ses données «brutes» pour fournir d'autres services à valeur ajoutée, dans des conditions plus favorables que celles qui sont offertes à ses concurrents. Il est alors très difficile aux réutilisateurs privés de faire concurrence aux organismes du secteur public.

Afin de garantir la non-discrimination et d'assurer une concurrence loyale, conformément à l'article 10, paragraphe 2 de la directive, si les organismes du secteur public réutilisent leurs propres documents pour produire des services à valeur ajoutée concurrents de ceux d'autres réutilisateurs, les conditions tarifaires et autres doivent être identiques pour tous. La séparation comptable entre les missions de service public et les activités commerciales des organismes du secteur public constitue un moyen d'atteindre cet objectif. En outre, même si les États membres peuvent définir les missions de service public des organismes du secteur public, ils doivent tenir compte de certains critères et limitations imposés par la législation communautaire telle qu'elle a été interprétée par la Cour de justice[19]. La Commission encourage les États membres à définir les missions de service public de manière à permettre une réutilisation maximale des ISP. Elle assurera la promotion des bonnes pratiques et suivra l'évolution de la situation dans ce domaine.

Les règles de concurrence peuvent aussi, le cas échéant, jouer un rôle important et complémentaire dans la libération du potentiel de réutilisation des ISP, en faisant en sorte que tous les acteurs potentiels du marché aient la possibilité de réutiliser des informations sur une base non discriminatoire, conformément aux dispositions de la directive.

6) Résolution des conflits

Les réutilisateurs sont souvent dépendants de leurs sources et ne souhaitent pas élever de plaintes à l'encontre des organismes du secteur public, qui peuvent être leurs uniques fournisseurs d'ISP. Les procédures judiciaires peuvent être longues et onéreuses. Il convient donc de mettre en place des mécanismes de résolution des conflits qui soient efficaces, peu onéreux et indépendants. Quelques États membres tels que la France, la Slovénie et le Royaume-Uni ont établi des mécanismes de ce type, ce qui a conduit à une augmentation du nombre de plaintes. La directive prévoit que des voies de recours doivent être disponibles mais elle laisse les États membres décider des modalités pratiques. La Commission encourage les États membres à mettre en place des mécanismes de traitement des plaintes relatives aux ISP et elle suivra l'évolution de la situation en la matière.

Récapitulatif des principales actions

Les États membres:

- veillent à une mise en œuvre et à une application totales et correctes de la directive

- mettent fin aux accords d'exclusivité , comme le prévoit la directive

- appliquent des modèles d'octroi de licences et de tarification qui facilitent la réutilisation des ISP

- garantissent une concurrence loyale entre les organismes du secteur public et les réutilisateurs

En outre, ils sont encouragés à promouvoir l'identification de leurs ressources d'information et à les rendre facilement disponibles et à mettre en place des mécanismes de résolution des conflits rapides et peu onéreux .

La Commission:

- surveille attentivement la mise en œuvre et l'application de la directive

- examine les accords d'exclusivité (2009-10 ) en particulier

- analyse le bien-fondé économique de l'approche fondée sur les coûts marginaux

- encourage l'échange de bonnes pratiques (politiques proactives en matière de réutilisation, missions de service public, résolution de conflits)

- procède à un autre réexamen au plus tard en 2012 , accompagné le cas échéant d'une proposition relative à des modifications de la directive.

6. CONCLUSIONS

La directive ISP a introduit les conditions de base qui permettent de faciliter la réutilisation des ISP dans toute l'UE. Depuis son adoption, des progrès ont été accomplis. En effet, l'utilisation commerciale des ISP a été autorisée; des monopoles ont été brisés, des conditions d'échange équitables ont été introduites, les prix ont baissé et la transparence a augmenté. Toutefois, les progrès de la directive et sa mise en œuvre sont inégaux dans les différents États membres.

De gros obstacles subsistent. Il s'agit, par exemple, des tentatives faites par les organismes de secteur public pour obtenir une récupération des coûts maximale au lieu de songer aux bénéfices pour l'économie dans son ensemble, de la concurrence entre le secteur public et le secteur privé, de problèmes pratiques qui s'opposent à la réutilisation, tels que le manque d'information sur les ISP disponibles, et l'état d'esprit de certains organismes du secteur public qui n'ont pas conscience du potentiel économique en jeu.

Il faut procéder à un travail de suivi et d'évaluation concernant ces problèmes et les progrès réalisés par les États membres pour y remédier avant que la Commission puisse envisager des modifications législatives de la directive ISP.

Les efforts des États membres doivent maintenant être axés sur une mise en œuvre et une application totales et correctes de la directive, sur la suppression des accords d'exclusivité, sur l'application de modèles d'octroi de licences et de tarification qui facilitent la réutilisation des ISP, sur la garantie de conditions de licences équitables pour les organismes du secteur public qui réutilisent leurs propres documents comme pour les autres réutilisateurs, et sur la promotion de mécanismes de résolution des conflits rapides et peu onéreux.

La Commission procédera à un autre réexamen au plus tard en 2012, lorsque davantage d'éléments concernant l'incidence, les effets et l'application de la directive seront disponibles, et c'est à ce stade que des modifications législatives éventuelles seront envisagées, en tenant compte des progrès réalisés dans l'intervalle par les États membres.

[1] Directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 novembre 2003 sur la réutilisation des informations du secteur public, JO L 345 du 31.12.2003, p. 90.

[2] Étude MEPSIR (Measuring European Public Sector Information Resources ), Helm et al ., 6/2006.

[3] Estimée à 6,5 milliards d'EUR en 2007; communication de la Commission du 23.9.2008 relative aux conclusions du réexamen du fonctionnement du règlement (CE) n° 717/2007, COM(2008) 579 final.

[4] http://www.instat.com/press.asp?ID=2343&sku=IN0804074ID, 25.6.2008.

[5] The commercial use of public information (CUPI), OFT, 12/2006 .

[6] Le défaut de communication des mesures de transposition concernait initialement BE, CZ, DE, GR, ES, IT, CY, LV, LT, LU, MT, NL, AT, PT et HU et la non-conformité des mesures nationales de transposition à la directive vise actuellement IT, PL et SE.

[7] Concernant AT, BE, ES et LU.

[8] JO L 107 du 20.4.2006, p. 38.

[9] Assessment of the Re-use of Public Sector Information (PSI) in the Geographical Information, Meteorological Information and Legal Information sectors, MICUS, 12/2008.

[10] Idem.

[11] SERDA- GFII, Communiqué de presse du 27 janvier 2009.

[12] Les résultats des consultations et les différentes contributions sont disponibles à l'adresse suivante: http://ec.europa.eu/information_society/policy/psi/index_en.htm.

[13] Évaluation de l’impact économique et social du domaine public dans la société de l’information, Rightscom, 4/2009

[14] COM(2007) 56 final.

[15] COM(2008) 513 final.

[16] Article 11, paragraphes 2 et 3, de la directive.

[17] Models of Public Sector Information Provision via Trading Funds, Newbery et al ., 2/2008.

[18] C(2008)36, 6/2008.

[19] Le terme «mission de service public» est étroitement lié aux services publics ou services d'intérêt général, et dans certaines langues (comme le français), ces termes sont interchangeables. La Cour de justice a cherché à déterminer, au cas par cas, si certaines activités dans les États membres peuvent être considérées comme de tels services et a établi certains critères, tels que l'universalité et la continuité du service, l'uniformité des tarifs et les conditions équitables.

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