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Document 52010IE1169

    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Relance économique: état des lieux et initiatives concrètes» (avis d'initiative)

    JO C 48 du 15.2.2011, p. 57–64 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    15.2.2011   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 48/57


    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Relance économique: état des lieux et initiatives concrètes» (avis d'initiative)

    2011/C 48/11

    Rapporteur: M. Lars NYBERG

    Le Comité économique et social européen a décidé, le 18 mars 2010, conformément à l'article 29, paragraphe 2, du règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur le thème:

    «Relance économique: état des lieux et initiatives concrètes» (avis d'initiative).

    La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 20 juillet 2010.

    Lors de sa 465e session plénière des 15 et 16 septembre 2010 (séance du 16 septembre 2010), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 146 voix pour, 45 voix contre et 16 abstentions.

    1.   Conclusions et recommandations

    1.1   La crise financière de 2008 et la crise économique qui en a résulté ont atteint des proportions jamais connues depuis la seconde guerre mondiale. Au début de l'année 2010, alors que sont apparus les signes de sortie de cette récession, une crise des obligations d'État a éclaté, cette fois à l'échelle européenne et non mondiale. La nécessité de décharger les budgets publics des coûts résultant de l'aide aux banques et des autres mesures discrétionnaires, la hausse du chômage et les mesures d'austérité supplémentaires adoptées dans plusieurs pays représentent, dans leur ensemble, une menace pour la croissance économique. Dans ce contexte, le CESE juge nécessaire de réfléchir à des actions politiques visant non seulement à relancer l'économie, mais plus encore à empêcher l'Europe de sombrer dans une nouvelle récession.

    1.2   En 2009, l'UE a connu une croissance négative de -4,1 %. Avant la crise des obligations d'État qui a éclaté au printemps, les prévisions de croissance pour 2010 se situaient à 0,7 %. Le chômage devrait se maintenir autour de 10 % en 2010, tandis que le taux de participation au marché du travail devrait baisser de 2 %. Le déficit budgétaire moyen, qui était de 2,3 % en 2008, a atteint 6,8 % en 2009 et devrait s'élever à 7,5 % en 2010. Durant la crise financière, des dépenses publiques massives ont permis de maintenir la liquidité des marchés financiers. La crise a été précédée par une explosion du crédit aux acteurs privés qui depuis a été supplantée par le problème des énormes besoins de financement de dettes publiques. Dans le même temps, afin d'augmenter la demande, le secteur privé a toujours besoin de crédit. La situation économique varie fortement d'un État membre à l'autre. Les déficits publics sont les plus importants en Grèce, dans d'autres pays méditerranéens, au Royaume-Uni et en Irlande. Le taux de chômage est le plus élevé dans les pays baltes et en Espagne. En même temps, les pays baltes ont réussi à réduire leurs déficits publics considérables et à stopper la croissance négative en très peu de temps grâce à des mesures économiques draconiennes.

    1.3   Une stratégie d'entrée

    À la lumière des profonds changements économiques qui se sont opérés au cours des dernières décennies, il serait inapproprié de parler d'une «stratégie de sortie». Il nous appartient de trouver de nouvelles initiatives économiques et politiques afin d'élaborer une feuille de route pour la société à venir, c'est-à-dire une «stratégie d'entrée».

    1.4   Rôle essentiel de la consommation privée pour la demande globale

    En raison de l'effet restrictif, sur l'ensemble de l'économie européenne, des propositions visant à réduire les déficits publics les plus importants, la croissance auto-entretenue est devenue une perspective plus éloignée. Le CESE souligne que la demande globale et en particulier la consommation privée jouent un rôle essentiel pour maintenir la croissance. Pour que les aides économiques aient un réel effet sur la croissance, elles doivent être ciblées sur les groupes à faible revenu. Étant donné que ces groupes consomment une part importante de leurs revenus, on risque moins de voir disparaître ces aides en épargne supplémentaire. Si nous parvenons à inverser le mouvement d'une prédominance du travail vers une prédominance du capital, qui s'étend sur plusieurs décennies, nous disposerons d'une source pour la croissance de demain. Les investissements et les exportations jouent certes un rôle important, mais étant donné que la consommation privée représente près de 60 % du PIB, son évolution est essentielle pour assurer la croissance, en particulier dans la situation actuelle.

    1.4.1   Estimation de l'impact des plans d'austérité

    Un taux de chômage élevé, un faible taux de participation au marché du travail, des hausses de salaire modérées, des coupes dans les dépenses publiques, des augmentations d'impôts et de nouveaux plans d'austérité sont autant d'éléments qui réduiront les possibilités de croissance. Dans ces circonstances, la Commission devrait de toute urgence évaluer les effets restrictifs de tous ces facteurs et avancer des propositions de mesures compensatoires afin de maintenir la croissance. La croissance est une condition préalable à la réalisation des autres objectifs de la politique économique. Nous ne pouvons rester inactifs en attendant que les effets restrictifs des programmes d'austérité se concrétisent.

    1.5   Mesure du développement de la compétitivité

    Parmi les objectifs de politique économique, la balance des opérations courantes n'a pas été appréciée à sa juste valeur. Vu les déficits et les excédents présents depuis longtemps dans certains pays, il était évident que les problèmes auxquels l'UE a été confrontée lors de la crise économique du printemps 2010 allaient apparaître tôt ou tard. Le CESE voudrait souligner qu'il est nécessaire de réduire les écarts considérables entre les balances des opérations courantes. La place centrale revient alors à l'objectif de compétitivité, mesurée par l'indicateur du coût unitaire du travail en termes réels, qui prend en compte les évolutions des salaires et de la productivité. Au cours de la dernière décennie, l'Irlande, la Grèce, l'Italie, l'Espagne et le Portugal ont vu leur compétitivité baisser, en moyenne, de 10 %. Les difficultés budgétaires étaient inévitables.

    1.5.1   Inclusion de la balance des opérations courantes dans le pacte de stabilité et de croissance

    Lorsque les évolutions des salaires et de la productivité varient d'un État à l'autre au sein d'une même zone monétaire, la seule façon de remédier aux difficultés consiste à modifier les salaires relatifs ou à augmenter la productivité dans les pays qui accusent un retard. Le CESE propose dès lors que la Commission effectue un contrôle des balances des opérations courantes, à l'instar de celui qui existe pour le déficit budgétaire et la dette publique. Pour rendre ce contrôle formel, on pourrait modifier les règles régissant le pacte de stabilité et de croissance. Il convient d'examiner minutieusement les balances des opérations courantes, ainsi que les facteurs sous-jacents tels que les évolutions des salaires et de la productivité dans l'ensemble des 27 États membres, et de prévoir un pouvoir d'intervention plus important dans les pays de la zone euro. Ainsi, des éléments d'économie réelle seraient introduits dans le pacte de stabilité et de croissance.

    1.5.2   Statistiques sur le crédit privé et la part de la dette publique détenue à l'étranger

    Il convient que le débat sur le pacte de stabilité et de croissance porte également sur de nouveaux instruments statistiques relatifs au crédit privé et à la part de la dette publique détenue à l'étranger.

    1.6   Régulation et pratiques de surveillance plus efficaces dans le secteur financier

    En ce qui concerne le secteur financier, le maintien d'une partie du capital bancaire entre les mains de l'État pourrait être une solution efficace permettant de suivre le secteur bancaire de l'intérieur. L'expérience de 2010 dans le domaine des finances montre que la surveillance et la réglementation financières proposées ne sont pas suffisantes. Il convient d'adopter des règles et des pratiques de surveillance plus efficaces, en particulier après le comportement du secteur financier au cours de la crise grecque, afin de changer ce comportement et de trouver de nouveaux moyens de financer la dette publique.

    1.7   Investissements publics dans l'infrastructure et l'énergie

    Les investissements devraient être consacrés, principalement, à la protection de l'environnement et aux mesures de lutte contre le changement climatique. Le CESE est favorable aux instruments fiscaux permettant d'inciter le marché à réduire les émissions dangereuses. Alors que les investissements des entreprises sont insuffisants, le secteur public devrait intervenir pour investir dans les infrastructures et l'énergie. Le pacte de stabilité et de croissance révisé prévoit que les investissements n'entrent pas dans le calcul d'un déficit excessif.

    1.8   Politiques actives du marché de l'emploi

    Les politiques du marché du travail devraient être axées sur la recherche de nouvelles compétences et de nouveaux emplois. Il est également nécessaire de relever le niveau général de l'enseignement. La stratégie UE 2020 est importante pour la réalisation de cet objectif. Une des mesures indispensables pour augmenter le taux d'emploi consiste à instaurer des services d'accueil à l'enfance de haute qualité et un congé parental suffisamment long et bien rémunéré.

    1.9   Stratégie d'entrée pour la politique familiale et le développement des compétences

    Lorsque que les besoins à couvrir en matière d'allocations de chômage diminuent, les mêmes ressources publiques devraient servir à financer la politique familiale et le développement des compétences. La politique «de sortie» se transformera ainsi en politique «d'entrée». L'architecture des systèmes de protection sociale doit être source de bien-être et d'emploi, dans la mesure, bien sûr, des possibilités financières.

    1.10   Nouvelles sources de recettes: taxes sur les transactions financières et sur le CO2

    Les taxes sur les transactions financières et sur le dioxyde de carbone représentent de nouvelles sources possibles de recettes publiques. En plus de produire des recettes, elles contribuent à tempérer la logique à court terme qui domine le marché financier et à améliorer notre environnement.

    1.11   Permettre à la BEI d'émettre des euro-obligations

    Un autre moyen pour le secteur public de récolter de nouveaux capitaux sans dépendre totalement du secteur financier privé consiste à permettre à la BEI d'émettre des euro-obligations, ou plutôt des obligations de l'UE couvrant l'ensemble des 27 États membres. Il convient de trouver des ressources financières en amont, par exemple, auprès d'institutions de retraite professionnelle (IRP) de telle sorte que la BEI devienne une interface entre ces ressources financières et ses propres investissements. Les euro-obligations sont également des instruments à considérer pour les placements à long terme.

    2.   État des lieux  (1)

    2.1   La crise financière de 2008 et la crise économique qui en a résulté ont atteint des proportions jamais connues depuis la seconde guerre mondiale. Lorsqu'au début de l'année 2010, l'on a vu apparaître des signes de sortie de cette récession, une crise de la dette publique a éclaté, cette fois à l'échelle européenne et non mondiale. La nécessité de décharger les budgets publics du soutien apporté aux banques et aux autres secteurs et les coûts des autres mesures discrétionnaires, la hausse du chômage et les mesures d'austérité supplémentaires adoptées dans plusieurs pays représentent, dans leur ensemble, une menace pour la croissance économique. Dans ce contexte, le CESE juge nécessaire de rechercher des mesures politiques visant non seulement à relancer l'économie mais plus encore à empêcher l'Europe de sombrer dans une nouvelle récession.

    2.2   Croissance négative

    2.2.1   Lors de l'adoption du plan européen pour la relance économique, en décembre 2008, les prévisions de croissance économique pour 2009 tournaient autour de 0 %. Le taux de croissance réellement enregistré a été de -4,1 %. Le plan était basé sur des prévisions trop optimistes, mais sans les incitations budgétaires, la situation aurait pu être bien pire.

    2.2.2   L'ampleur des aides économiques accordées par les États membres a été plus importante que les 1,2 % du PIB prévus. Pour 2009 et 2010, le montant des aides pourrait représenter 2,7 % du PIB. Les besoins manifestés dans les États membres ont dépassé les prévisions en matière d'aide, mais compte tenu de l'évolution de la croissance, les mesures sont toutefois restées très limitées.

    2.2.3   Les mesures de relance n'ont pas uniquement été financées par les budgets publics. La BCE et les autres banques centrales ont réduit quasiment à zéro les taux d'intérêt et ont augmenté les liquidités dans le système économique à des niveaux sans précédent. Certains États membres ont également injecté des sommes colossales d'argent public pour sauver des banques. Néanmoins, ces actions n'ont pas suffi à empêcher une croissance négative en 2009, ce qui démontre la gravité de la crise économique et financière.

    2.2.4   Avant la crise du printemps 2010, les prévisions de croissance pour cette année-là étaient de 0,7 %. Ce chiffre est inférieur à ceux de nos principaux concurrents internationaux. Parmi les éléments positifs, on note un redressement des indicateurs de confiance, une reprise de la croissance dans les autres parties du monde, et un retour du commerce international quasiment à son rythme antérieur. Parmi les éléments négatifs, on remarque que les investissements des entreprises ont continué à baisser au quatrième semestre 2009, que la production industrielle ne présente aucun signe d'amélioration sensible, que la récente augmentation de la demande a pour seul motif la constitution de stocks, que le taux extrêmement faible d'utilisation des capacités propres n'incite pas à investir, que l'état du secteur bancaire ne laisse pas vraiment de marge de manœuvre pour accroître les investissements, et par-dessus tout que le marché des obligations d'État est perturbé.

    2.3   Échanges commerciaux

    Le commerce international s'est effondré au cours du quatrième trimestre 2008. Si l'année précédente, le volume des échanges avait augmenté de 20 %, il a chuté de 12 % en 2008, et a continué de baisser durant les trimestres suivants. Le recul le plus important pour un trimestre donné par rapport au même trimestre de l'année précédente avoisinait les 30 %. Au quatrième trimestre 2009, la tendance s'est inversée, avec une hausse de 4 %. Les chiffres concernant l'Union européenne étaient quasiment identiques. La baisse a été légèrement plus élevée pour les échanges intra-européens que pour ceux entre l'UE et le reste du monde.

    2.4   Marché du travail

    2.4.1   L'on s'attend encore à une aggravation des effets de la crise en ce qui concerne le chômage, car ceux-ci se font généralement sentir avec du retard par rapport aux évolutions de l'économie réelle. En 2010, le taux de chômage dans l'UE devrait s'élever à 10 %, soit une hausse de 3 % en une année, et varier considérablement d'un État membre à l'autre.

    2.4.2   Le chômage ne représente qu'une des conséquences de la crise, la diminution du taux de participation au marché du travail en étant une autre. Cette diminution se chiffre à environ 2 % de la population active. En outre, de nombreuses personnes ont accepté de réduire leurs heures de travail afin de préserver des emplois, ce qui correspond à une diminution supplémentaire de 1 % de la population active. Lors d'une reprise économique, ce dernier paramètre est probablement le premier à revenir à la normale. La croissance doit être suffisamment élevée, faute de quoi ce sera une «croissance sans emplois».

    2.5   Déficits publics

    Le déficit budgétaire moyen, qui était de 2,3 % du PIB en 2008, a atteint 6,8 % en 2009 et devrait s'élever à 7,5 % en 2010. Cette détérioration n'est pas liée uniquement à l'application des mesures de soutien actives mais aussi à l'augmentation des dépenses et à la baisse des recettes fiscales obtenues par le biais des stabilisateurs automatiques. Selon l'OCDE, ces mesures de protection sociale ont permis de sauver plus d'emplois en Europe que dans d'autres économies.

    2.6   Marché financier

    2.6.1   Même en 2010, la situation du marché financier reste incertaine. Il n'existe aucun élément permettant de déterminer si la faiblesse persistante du taux d'investissement est due à un manque continu de liquidités, à la prudence des établissements de crédit, ou à une demande insuffisante de la part du secteur industriel.

    2.6.2   Afin que la reprise économique soit durable, il est nécessaire que le marché du crédit délaisse les opérations à très court terme pour les transactions à plus long terme. Cette idée est davantage approfondie dans un avis du CESE concernant la taxe sur les transactions financières (2).

    2.6.3   À compter de 2006 et jusqu'au déclenchement de la crise financière, le crédit privé a connu une forte expansion (3). La dette privée a doublé dans la zone euro, ainsi qu'aux États-Unis. Les dépenses privées étaient élevées, ce qui a créé d'importants déficits des opérations courantes dans certains pays. En 2009, cette explosion du crédit s'est estompée pour être en partie remplacée par la dette publique. D'importants déficits budgétaires se maintiendront dans les années à venir. Cependant, pour que la reprise soit effective, il est nécessaire d'augmenter la demande du secteur privé. Dans les deux cas, le crédit est indispensable.

    2.6.4   Les fonds de pension ont été touchés par la chute des cours boursiers, de l'ordre de 24 % en termes réels pour 2009 (4). Le niveau de revenu des retraités est menacé, ce qui aura un impact sur les possibilités d'augmenter la demande privée. Les droits des fonds de pension s'inscrivent dans le long terme, alors que les placements des capitaux de ces fonds s'effectuent sur des durées bien plus courtes. Dès lors, des instruments financiers à plus long terme sur les marchés financiers sont indispensables, tant pour les fonds de pension que pour les autres institutions de retraite, telles que les sociétés d'assurance.

    2.7   Spécificités par pays

    2.7.1   Parmi les grands États membres, les baisses les plus fortes du PIB ont été enregistrées en Allemagne et au Royaume-Uni. En ce qui concerne les plus petits des États membres, les trois pays baltes ont connu les chutes les plus importantes en 2009. Ces baisses sont survenues après un certain nombre d'années de croissance très forte du PIB. Pendant ces années, les augmentations salariales avaient également été très élevées, supérieures à l'accroissement de la productivité, mais les pays baltes, et en particulier la Lituanie, ont réagi très rapidement à la crise en réduisant les salaires. Durant l'année 2009, les hausses des salaires les plus importantes ont été enregistrées en Grèce, sans qu'il n'y ait d'augmentation de productivité à l'appui. La Pologne a constitué, en 2009, une exception par rapport à tous les autres pays, avec un taux de croissance positif de 1,7 %. Ceci s'explique en partie par les investissements publics et la consommation privée accrus et des performances plutôt satisfaisantes en matière d'emploi.

    2.7.2   Les plus importantes baisses du taux d'emploi en 2009 se sont également produites dans les pays baltes, suivis de la Bulgarie et de l'Espagne. Si aucun État membre n'a réussi à maintenir son taux d'emploi, il n'a chuté que de 0,4 % en Allemagne. En 2009, le taux de chômage le plus élevé était affiché en Lettonie (21,7 %), suivie de la Lituanie, de l'Estonie, de l'Espagne, de la Slovaquie et de l'Irlande.

    2.7.3   Durant la crise des obligations d'État en 2010, la Grèce s'est avérée connaître un déficit public d'environ 13 % du PIB, ce qui a donné lieu à des attaques spéculatives contre l'euro. Un déficit semblable est apparu au Royaume-Uni. En Espagne, le déficit a atteint des proportions non viables quasiment «du jour au lendemain». Pour combler les déficits importants et résorber les dettes publiques de grande ampleur, des mesures d'austérité ont été adoptées dans ces trois pays, ainsi que notamment au Portugal, en Italie et en Irlande.

    3.   Initiatives concrètes pour relancer l'économie

    3.1   Une «stratégie d'entrée» et non une «stratégie de sortie»

    3.1.1   L'on a beaucoup parlé d'une stratégie de sortie, qui consiste à retirer toute aide publique supplémentaire à l'économie. Les raisons juridiques sont la règle des 3 % maximum pour les déficits budgétaires et la limite de 60 % du PIB pour la dette publique. Comme la Commission l'a indiqué à juste titre dans sa communication intitulée «Europe 2020», «il serait préférable d'attendre que la reprise économique puisse être considérée comme autosuffisante pour abandonner les mesures d'aide» (5)«préférable d'attendre que la reprise économique s'auto-entretienne pour abandonner les incitations budgétaires». Étant donné toutes les incertitudes qui pèsent sur nos économies, il sera très difficile de déterminer à quel moment la reprise deviendra «auto-entretenue». L'effet restrictif des propositions visant à réduire les déficits publics très élevés sur l'ensemble de l'économie européenne a fait de la croissance «auto-entretenue» une perspective encore plus éloignée. En outre, une stratégie de sortie de ce type sous-entend la possibilité de revenir, après l'abandon des mesures de soutien, à la situation d'avant la crise, ce qui ne peut être le cas.

    3.1.2   Premièrement, de nombreuses réformes du secteur financier sont en cours d'application ou d'élaboration. L'on peut espérer qu'elles contribueront à rendre ce dernier plus transparent et plus résistant face aux crises. Deuxièmement, il convient également de réformer d'autres secteurs de l'économie, si l'on ne veut pas courir un risque certain de voir réapparaître les problèmes que nous avons connus ces dernières années.

    3.1.3   En menant une réflexion sur les évolutions économiques survenues au cours des dernières décennies, nous devrions envisager de nouvelles initiatives économiques et politiques qui seraient à même de rendre l'économie moins vulnérable. Il ne peut s'agir d'une «stratégie de sortie», car l'élaboration d'une feuille de route pour une stratégie de sortie revient à déterminer le devenir de la société, et ainsi à définir une stratégie d'entrée.

    3.2   Demande globale

    3.2.1   En théorie, il existe deux manières de générer la croissance économique: produire davantage avec la même technologie, ou améliorer la technologie afin de mieux exploiter les ressources productives disponibles. En fonction de la conjoncture économique, l'une ou l'autre méthode sera privilégiée. Durant une période d'expansion, toutes les ressources sont utilisées et la seule manière de renforcer la croissance consiste à investir dans des méthodes de production innovantes. Lors d'une récession, comme celle qui a commencé en 2008, beaucoup de ressources restent inexploitées alors qu'elles pourraient être mises à profit. La politique doit donc consister à stimuler la demande. Malheureusement, la demande globale n'est plus reconnue en tant que véritable moteur de la croissance économique.

    3.2.2   Les mesures visant à stimuler la demande doivent non seulement avoir un effet direct sur la consommation et l'investissement, mais aussi contribuer à renforcer la confiance des consommateurs et des investisseurs. À l'instar des stabilisateurs automatiques qui interviennent lors de récessions, une confiance accrue peut s'avérer efficace dans un contexte de reprise économique: elle peut accroître l'effet des mesures publiques et rendre la reprise auto-entretenue. Pour qu'il en soit ainsi, c'est non seulement le montant des aides qui importe, mais aussi les groupes auxquels ces aides sont destinées. Les groupes à faibles revenus consomment une plus grande partie de leurs revenus que les groupes à revenus élevés. Par conséquent, plus l'aide accordée à la première catégorie sera importante, moins la proportion de cette aide absorbée par l'épargne sera grande.

    3.2.3   Le plan initial de relance économique pourrait s'avérer moins efficace que prévu étant donné qu'un grand nombre de mesures adoptées par les États membres avaient déjà été programmées auparavant et n'ont donné aucune impulsion supplémentaire à la croissance. Au printemps 2010, la Commission a souligné à juste titre que les mesures visant à stimuler la croissance doivent être efficaces sur le plan social. La croissance prévue pour 2010 est inférieure à 1,5 %, ce qui représente, selon beaucoup d'économistes, le taux de croissance potentiel de l'UE. Cependant, même si la croissance atteignait 1,5 %, la réduction du taux de chômage et des déficits budgétaires ne serait pas assez rapide.

    3.2.4   Le CESE entend souligner que la demande globale joue un rôle essentiel pour initier la croissance, et attire en particulier l'attention sur l'importance de la consommation privée.

    3.2.5   Il est tout aussi important d'accroître les investissements. Le pacte de stabilité et de croissance révisé prévoit la possibilité de reporter l'ajustement budgétaire en cas de déficit public excessif si les dépenses supplémentaires ont été encourues à des fins d'investissement. L'investissement n'est toutefois pas l'unique instrument permettant de renforcer la croissance.

    3.2.6   L'augmentation des exportations ne suffit pas non plus. Les échanges commerciaux de l'UE s'opèrent principalement entre les États membres. Le commerce extérieur, c'est-à-dire les exportations vers d'autres parties de l'économie mondiale, s'élève depuis longtemps à quelque 10 % du PIB de l'UE. Même si le commerce européen constitue un tiers du commerce mondial, si l'on exclut les échanges qui s'opèrent à l'intérieur de l'Union, la part de l'UE se réduit à 16 %. Le commerce joue un rôle important et sert notamment d'indicateur de compétitivité globale. L'augmentation des exportations de l'UE vers le reste du monde est certes un signe positif, mais elle ne remédie pas vraiment aux insuffisances des investissements ni à la détérioration du marché du travail.

    3.2.7   Selon l'OIT (6), depuis plus d'une décennie, le capital a pris le pas sur le travail dans le monde entier. Entre 1999 et 2007, la part des profits dans l'UE 27 est passée de 37 à 39 % du PIB. Au deuxième semestre 2008, elle a brusquement chuté à 36 %, mais a augmenté au cours de l'année 2009 pour atteindre de nouveau les 37 % (7). Cela signifie que les inégalités dans la répartition des revenus se creusent de plus en plus.

    3.2.8   La consommation privée représente la plus grande part du PIB. Cette part varie largement en fonction des mesures prises par les entités publiques ou privées dans le cadre du système politique propre à chaque pays. Néanmoins, une variation de la part de la consommation privée dans le PIB peut également indiquer une évolution dans la répartition des revenus. En 2008, la consommation ne représentait que 58 % du PIB de l'UE, contrairement à 60 % en 2005 et 61 % en 2000. Même s'il s'agit d'un changement minime sur une longue période, cela montre qu'il existe une marge de manœuvre pour utiliser l'augmentation de la consommation privée comme moyen de stimuler la demande globale (8), qui est particulièrement importante dans la situation économique actuelle.

    3.2.9   Cependant, en 2010, le taux de chômage élevé et la réduction du taux de participation au marché du travail, combinés à des hausses de salaire très modestes, ne laissent présager aucune augmentation de la consommation, plutôt au contraire. Dans le contexte actuel, il ne semble donc pas approprié de réduire le soutien public. Ce constat étant fait, l'on peut dire que la situation actuelle (en 2010), caractérisée par d'importantes coupes dans les dépenses publiques et une hausse des recettes fiscales, est extrêmement problématique du point de vue de la politique économique. Ces réductions inévitables de la demande globale dues aux restrictions budgétaires sont de toute évidence de nature procyclique dans le sens où elles réduisent les possibilités de croissance. L'effet de la baisse des revenus des employés du secteur public notamment induira dans l'ensemble de l'économie une diminution de la demande. Ainsi la croissance ne pourra-t-elle pas atteindre son taux potentiel.

    3.2.9.1   Il est dans l'intérêt de l'UE de disposer d'estimations sur les effets restrictifs que pourraient avoir ces nouvelles coupes dans les budgets publics, qui ont été adoptées de manière drastique. Il serait tout aussi intéressant pour l'UE que les pays qui ne sont pas confrontés à cette situation extrêmement difficile prennent des mesures compensatoires, c'est-à-dire destinées à augmenter la demande globale. La Commission doit de toute urgence estimer son ampleur, et présenter ensuite des propositions en conséquence. Bien que la Commission prévoie de procéder à cette évaluation dans le cadre des prévisions économiques en novembre 2010, cela sera trop tard. Au cours du premier trimestre 2010, la croissance était proche des prévisions, à savoir 0,7 %; mais c'était avant les plans d'austérité. Nous ne pouvons rester inactifs en attendant que les effets restrictifs des programmes d'austérité se manifestent.

    3.2.9.2   Le CESE estime que la situation économique actuelle appelle de nouveaux débats. Il convient de conserver la limite de 3 % pour les déficits publics, tout en l'associant à une discussion sur les vastes différences en matière de déficits, étant donné que les pays connaissant des déficits très importants doivent consolider leurs finances publiques de manière définitive. Les exigences pour les pays se situant à la limite des 3 % (ou légèrement au-dessus) devraient être plus souples. Lorsqu'il reste possible de financer les déficits à un taux d'intérêt relativement bas, il est dans notre intérêt d'éviter temporairement les mesures budgétaires excessivement restrictives. Une relecture du pacte de stabilité et de croissance révisé en 2005 indique que cela va dans le sens des modifications apportées à l'époque, en particulier en ce qui concerne les investissements publics et les périodes soumises au risque de récession.

    3.3   Retour de la balance des opérations courantes à l'ordre du jour des responsables politiques

    3.3.1   Depuis longtemps, la stabilité des prix, la croissance économique et le plein emploi sont les principaux objectifs de la politique économique au service de la prospérité et du bien-être. L'équilibre budgétaire et la dette publique sont des objectifs intermédiaires destinés à garantir que les objectifs réels soient atteints. Deux objectifs ont été perdus de vue depuis un moment. Le premier est la répartition équitable des revenus; le second est la balance des opérations courantes. L'importance de ce dernier s'est estompée. C'était une erreur. Dans un marché unique doté d'une monnaie unique, cet objectif est fondamental.

    3.3.2   Si l'on considère la balance des opérations courantes, c'est-à-dire la balance commerciale avec les autres pays, ce qui allait se passer dans la zone euro devient évident. À l'heure actuelle et depuis un certain temps, la Grèce connaît un grand déficit des opérations courantes. L'Allemagne, les Pays-Bas et la Suède ont longtemps eu des excédents. D'autre part, la plupart des pays méditerranéens enregistrent des déficits, bien que le plus grand déficit soit observé en Bulgarie.

    3.3.3   À court terme, les déficits ou excédents des opérations courantes ne posent aucun problème, même quand ils sont importants. Le problème se pose lorsqu'ils se maintiennent durant plusieurs années ou lorsque les capitaux importés ne sont pas investis comme il se doit et que, de ce fait, les augmentations éventuelles en matière de productivité ne sont pas réalisées. À l'intérieur de la zone euro, la Grèce, le Portugal, l'Espagne, l'Italie et l'Irlande ont enregistré des déficits considérables pratiquement depuis l'introduction de l'euro. En dehors de la zone euro, les pays baltes ainsi que la Bulgarie ont connu des déficits extrêmement élevés. Des déficits importants ne peuvent être transformés en excédents que grâce à une politique économique extrêmement stricte, comme celle menée en 2009 par l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie.

    3.3.4   Après avoir constaté l'ampleur des différences existant entre les différents États membres, le CESE entend souligner qu'il est indispensable de réduire la plupart de ces écarts. Dans cette optique, il convient d'accorder une place centrale à l'objectif de compétitivité. La compétitivité est mesurée par le coût unitaire du travail en termes réels, qui représente l'effet combiné de l'évolution des salaires et de la productivité. Au sein de la zone euro, l'Allemagne et l'Autriche ont notamment réussi à renforcer leur compétitivité, grâce à leurs faibles coûts unitaires du travail en termes réels. D'un autre côté, depuis 2008, les niveaux de salaire en Allemagne ont augmenté plus rapidement que la productivité, ce qui a placé le pays dans une situation moins avantageuse sur le plan de la compétitivité. Au cours de la dernière décennie, l'Irlande, la Grèce, l'Italie, l'Espagne et le Portugal ont vu leur compétitivité baisser, en moyenne, de 10 % (9). Lorsque la compétitivité est en baisse sur une longue période, cela peut engendrer des difficultés budgétaires. Ce phénomène est devenu clairement visible en 2010, mais sa cause principale, à savoir les évolutions en matière de compétitivité, n'a pas attiré l'attention qu'elle méritait.

    3.3.5   Sachant que les variations des taux de change ne font plus partie de la panoplie d'instruments de la zone euro, l'évolution de la compétitivité relative, accompagnée d'un niveau de prix plus élevé par rapport aux autres pays, devrait être évaluée en termes de «taux de change réels». Lorsque les évolutions des salaires et de la productivité varient d'un État à l'autre au sein d'une même zone monétaire, il n'y a que deux façons de remédier aux difficultés: modifier les salaires relatifs entre les pays ou augmenter la productivité grâce aux investissements dans les pays qui accusent un retard. Il serait en effet absurde de demander aux pays qui enregistrent un bon taux d'évolution de la productivité de stopper cette progression.

    3.3.6   L'expérience de la crise qui a éclaté au printemps 2010 démontre qu'Eurostat devrait exercer des responsabilités de contrôle vis-à-vis des instituts nationaux de statistiques. Des données statistiques exactes acquièrent toute leur importance si les chiffres concernant l'évolution des balances des opérations courantes, des salaires et de la productivité servent de base pour de nouveaux débats politiques au niveau européen.

    3.3.7   Le CESE propose que les objectifs de l'équilibre budgétaire et de la dette publique soient complétés par un troisième objectif: celui de la balance des opérations courantes. Il n'est pas envisageable dans ce cas d'utiliser un indice unique. Un excédent des opérations courantes dans certains pays correspond toujours à un déficit des opérations courantes dans d'autres pays. Le problème se pose quand l'écart est trop important ou trop soudain, ou lorsque les capitaux importés ne sont pas utilisés pour réaliser des investissements productifs.

    3.3.8   Le CESE propose dès lors que la Commission effectue un contrôle des balances des opérations courantes, à l'instar de celui qui existe pour le déficit budgétaire et la dette publique. Cette idée a désormais également été avancée par la Commission dans ses orientations économiques et dans un document sur la consolidation de la reprise économique. Ces questions sont par ailleurs examinées par la cellule de crise spéciale dirigée par M. VAN ROMPUY, président du Conseil européen.

    3.3.9   Le CESE souhaite que ces propositions acquièrent davantage de force. Le nouvel objectif en matière d'opérations courantes devrait être envisagé sous le même angle que les deux objectifs inscrits dans le pacte de stabilité et de croissance. La Commission devrait examiner minutieusement les balances des opérations courantes, ainsi que les évolutions sous-jacentes en matière de salaires et de la productivité dans l'ensemble des 27 États membres. S'agissant des pays de la zone euro, elle devrait disposer d'un pourvoir d'action plus important dans les cas où ces évolutions sont négatives, comme pour la dette publique et les déficits budgétaires. L'action européenne devrait porter sur l'orientation à donner aux changements politiques et non sur leur mise en pratique. Cet aspect incombera toujours aux États membres, conformément au principe de subsidiarité. Une simple modification des règles régissant le pacte de stabilité et de croissance permettrait d'y introduire des éléments d'économie réelle, ou en d'autres termes, des aspects macroéconomiques.

    3.3.10   La crise a montré que d'autres aspects du pacte de stabilité et de croissance doivent également être développés davantage. Il convient qu'outre les statistiques ordinaires publiées conformément au pacte de stabilité et de croissance, l'on publie également des statistiques sur le crédit privé et la part de la dette publique détenue à l'étranger. Ces nouvelles données pourraient servir de système d'alerte précoce et de moyen de pression sur les pays dont la situation économique est problématique.

    3.4   Autres domaines-clés pour une nouvelle économie européenne

    3.4.1   Aides financières publiques, réglementation financière

    3.4.1.1   Un soutien considérable a été octroyé à des secteurs entiers de l'économie, notamment la construction automobile, pour éviter que la crise n'ait des conséquences désastreuses pour eux. La réglementation européenne «normale» en matière d'aides d'État, qui aurait dû freiner ces aides, n'a pas été appliquée dans cette situation.

    3.4.1.2   C'est le secteur financier qui a bénéficié du soutien le plus spectaculaire. Dans quelques pays européens ainsi qu'aux États-Unis, certaines banques ont été en partie nationalisées. Il y aura certainement, tôt ou tard, un retournement de la politique dans ce domaine, mais cela peut prendre quelques années. Même dans une perspective à plus long terme, le fait de laisser une partie de capital bancaire entre les mains de l'État pourrait constituer un élément efficace d'une politique financière nationale afin de suivre le secteur bancaire de l'intérieur.

    3.4.1.3   Certains acteurs du secteur financier, ayant bénéficié d'une aide sans précédent de la part des gouvernements, ont ensuite participé aux attaques spéculatives sur le marché des obligations d'État dans la zone euro durant la crise grecque. Le marché financier a voulu s'emparer du pouvoir décisionnel des responsables politiques. Suite à l'émergence d'une crise extrêmement grave, ces derniers ont repris leur pouvoir. On peut reprocher aux responsables politiques de ne pas avoir agi avant l'apparition d'une crise profonde, tant lors de la crise financière que lors de la crise des obligations d'État. Nous avons là la preuve que la réglementation et la surveillance financière proposées ne sont pas suffisantes. Il est nécessaire d'adopter des règles et des pratiques de surveillance plus efficaces pour changer le comportement des institutions financières et trouver de nouveaux moyens de financer la dette publique.

    3.4.2   Une économie plus respectueuse de l'environnement

    À long terme, les investissements devront être principalement consacrés à la protection de l'environnement et aux mesures de lutte contre le changement climatique. Il convient d'initier dès à présent les modifications dans la composition du portefeuille d'investissements. La Commission est d'avis que la volonté de changement semble être plus marquée chez nos concurrents internationaux. Une telle évolution en matière d'investissements revêt une importance vitale, non seulement pour des raisons environnementales, mais également pour la compétitivité globale de l'Europe. De nouveaux emplois pourront dès lors être créés pour remplacer ceux qui disparaissent. Ainsi, le développement durable sur le plan économique pourra aller de pair avec le développement durable sur le plan environnemental et social. Tout comme la Commission dans sa proposition relative aux grandes orientations des politiques économiques, le CESE se montre favorable aux instruments fiscaux permettant d'inciter le marché à réduire les émissions dangereuses.

    3.4.3   Infrastructures et énergie

    Alors que les investissements des entreprises sont insuffisants, le secteur public devrait intervenir pour réaliser des investissements publics. Cela est nécessaire à la fois pour stimuler la croissance et en raison du caractère urgent des investissements dans les infrastructures et l'énergie. La nouvelle réticence du secteur bancaire à prendre des risques pour fournir du crédit aux entreprises est particulièrement problématique pour les PME. Malgré les problèmes actuels liés aux obligations d'État, celles-ci continuent à bénéficier d'un taux d'intérêt avantageux dans la plupart des pays, ce qui favorise les investissements publics. Le pacte de stabilité et de croissance révisé prévoit en effet que les investissements n'entrent pas dans le calcul d'un déficit excessif.

    3.4.4   Politiques actives du marché du travail

    Les politiques de l'emploi doivent être actives et ne peuvent se limiter à apporter un soutien financier aux chômeurs. De nombreux programmes de reconversion, de différents types, ont été mis en place aussi bien à l'attention des chômeurs que des travailleurs actifs. Dans cette optique, l'objectif de l'«enseignement pour tous» fixé par le trio de la présidence tournante Espagne-Belgique-Hongrie dans son programme de travail est prometteur. Une politique d'insertion ne consiste pas seulement à offrir aux citoyens la possibilité d'obtenir un travail, mais aussi à leur permettre de jouer un rôle plus actif dans la société.

    3.4.4.1   Fixer un objectif pour un taux d'emploi supérieur, comme le prévoit la stratégie UE 2020, ne peut suffire. Pour accroître le taux d'emploi, il convient de mettre en place quelques politiques fondamentales.

    Les politiques en matière de développement des compétences en font partie et la formation tout au long de la vie est un élément indispensable à cet égard. Un des principaux problèmes consiste à déterminer qui doit payer: la société, les employeurs ou les employés? D'une certaine façon, chacune de ces trois parties prenantes doit contribuer au financement.

    La pierre angulaire de ces politiques est la qualité générale de l'enseignement: il est indispensable de relever le niveau global des connaissances en Europe.

    Une des mesures indispensables pour augmenter le taux d'emploi consiste à mettre en place des services d'accueil à l'enfance de haute qualité et peu coûteux, tout en instaurant un congé parental suffisamment long et bien rémunéré pour constituer une incitation à avoir des enfants.

    Il existe de nombreux obstacles qui peuvent empêcher une personne de poser sa candidature à un emploi. Si l'on veut augmenter le taux de participation au marché du travail, il peut être nécessaire de prévoir des mesures spécifiques pour chaque type de désavantage.

    3.4.5   Politiques sociales

    3.4.5.1   Dans un rapport (10) sur la protection sociale et l'insertion sociale, la Commission reconnaît que les systèmes de protection sociale ont joué un rôle essentiel dans l'atténuation des effets économiques et sociaux de la crise. On estime que pendant la crise, les dépenses sociales sont passées en moyenne de 28 à 31 % du PIB des États membres. Lorsque les besoins à couvrir en matière d'allocations de chômage diminuent, les mêmes ressources publiques devraient servir à financer la politique familiale et le développement des compétences. Il s'agit là d'un exemple illustrant comment une «stratégie de sortie» peut se transformer en «stratégie d'entrée».

    3.4.5.2   Selon la Commission, il est important d'offrir aux citoyens une aide au revenu appropriée ainsi qu'un accès au marché du travail et à des services sociaux de qualité. Les mesures que l'UE peut prendre sur le plan social ne peuvent que compléter, de façon limitée, les politiques sociales nationales. L'UE a mis en place plusieurs instruments visant à encourager l'échange d'expériences entre les États membres: analyse comparative, évaluation par les pairs, méthode ouverte de coordination. Aucun de ces instruments n'a apporté les résultats escomptés. L'UE ne peut pas forcer les États membres à suivre les exemples de bonne pratique. Toutefois, le fait de désigner les «mauvais élèves» pourrait contribuer à sensibiliser davantage le public à l'existence d'écarts entre les pays.

    3.4.5.3   Les mesures d'austérité doivent être raisonnables. Nous ne pouvons pas permettre que les systèmes de sécurité sociale soient sacrifiés sur l'autel de l'équilibre budgétaire. La crise à mis à jour les déficiences résiduelles des systèmes sociaux. L'architecture des systèmes de protection sociale doit être source de bien-être et d'emploi. Cependant, les systèmes de protection sociale sont aussi soumis à des contraintes, et doivent rester dans les limites des possibilités financières.

    3.4.6   Nouvelles sources de recettes  (11)

    3.4.6.1   Dans un avis sur la stratégie post-Lisbonne, le CESE a mentionné, comme nouvelle source de recettes publiques, l'introduction d'une taxe sur les transactions financières et d'une taxe sur le dioxyde de carbone. Ces taxes seraient doublement bénéfiques: non seulement elles produiraient des recettes, mais elles contribueraient également à tempérer la logique à court terme qui domine le marché financier et à améliorer notre environnement. Actuellement, il est indispensable de rechercher de nouvelles sources de revenu afin de résorber les vastes déficits budgétaires des États membres. Il est préférable d'instaurer des taxes sur les transactions financières et le dioxyde de carbone plutôt que d'augmenter les impôts existants, tels que l'impôt sur le travail et la TVA. De telles augmentations d'impôts auraient pour conséquence de réduire la demande globale, ce qui dans le contexte actuel n'est pas souhaitable.

    3.4.6.2   Les euro-obligations constituent un autre nouveau mode de financement public. Il s'agit pour le secteur public d'un moyen de récolter des fonds sans être totalement dépendant du secteur financier privé. Les euro-obligations joueraient le rôle de catalyseur direct des ressources financières, en attirant par exemple les fonds de pension cherchant à effectuer des placements à long terme. On pourrait également envisager la possibilité d'ouvrir la BEI aux placements privés à long terme, afin de trouver de nouvelles sources de financement pour la BEI. Cette dernière deviendrait donc une interface entre ces nouvelles ressources financières et ses propres investissements. Les placements à long terme permettraient ensuite de réaliser des investissements publics à long terme, par exemple dans les infrastructures. Les euro-obligations constituent un «concept» qu'il convient d'étendre à tous les États membres de l'UE. Ici, le bénéfice serait de nouveau double: on réduirait ainsi également les possibilités de spéculation sur le marché financier contre la dette publique des États.

    Bruxelles, le 16 septembre 2010.

    Le président du Comité économique et social européen

    Mario SEPI


    (1)  Sur la base des documents suivants de la Commission: rapport de suivi sur la mise en œuvre du plan européen pour la relance économique et prévisions intermédiaires de février 2010.

    (2)  Voir l'avis Taxe sur les transactions financières.

    (3)  Centre d'études politiques européennes, no 202, février 2010.

    (4)  OCDE(2009), Les pensions dans les pays de l'OCDE 2009.

    (5)  COM(2010)2020, point 4.1

    (6)  OIT: Rapport mondial sur les salaires - actualisation 2009, novembre 2009.

    (7)  Eurostat, Euro-indicateurs 61/2010, 30 avril 2010.

    (8)  Les chiffres sont calculés à partir des données d'Eurostat. Les différences entre les États membres sont étonnamment grandes, allant de 46 % en Suède à 75 % en Grèce, par exemple. La plupart des pays ont enregistré des réductions minimes de la part de la consommation dans le PIB mais pour certains d'entre eux, les changements ont été spectaculaires. Au Royaume-Uni, cette part a chuté de 72 à 60 % en 8 ans, ce qui est difficile à expliquer.

    (9)  Crisis in the eurozone and how to deal with it (Crise dans la zone euro: quelles solutions?), Centre d'études politiques européennes, février 2010.

    (10)  Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Proposition de rapport conjoint 2010 sur la protection sociale et l'inclusion sociale, COM(2010) 25 final.

    (11)  Voir les avis du CESE sur le thème «Taxe sur les transactions financières» et sur «Les implications de la crise de la dette publique pour la gouvernance de l'UE».


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