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Document 52009IE1471

    Avis du Comité économique et social européen sur le thème Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable (avis d’initiative)

    JO C 318 du 23.12.2009, p. 52–56 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    23.12.2009   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 318/52


    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable» (avis d’initiative)

    2009/C 318/10

    Rapporteure: Mme Nicole PRUD'HOMME

    Le 26 février 2009, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l’article 29, paragraphe 2 de son règlement intérieur, d’élaborer un avis d’initiative sur le thème

    «Travail et pauvreté: vers une approche globale indispensable».

    La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 1er septembre 2009. (rapporteure: Mme Nicole PRUD’HOMME).

    Lors de sa 456e session plénière des 30 septembre 2009 et 1er octobre 2009 (séance du 30 septembre 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 173 voix pour, 2 voix contre et 7 abstentions.

    1.   Recommandations

    La pauvreté au travail représente, tant pour le salarié que pour certains travailleurs indépendants, un sujet complexe qui fait appel à de nombreux critères interconnectés. Il doit être adopté une approche globale pour trouver les mécanismes efficaces pour surmonter les défis.

    1.1

    Au cœur du projet européen, placer l’objectif de l’emploi de qualité pour tous au cœur du projet européen.

    1.2

    Faire de la question des travailleurs pauvres un thème de traitement régulier dans le cadre du dialogue social européen.

    1.3

    Achever rapidement la mise au point des outils de connaissance pour apprécier toujours plus finement ces situations, dans leurs divergences mais aussi leurs convergences européennes.

    1.4

    Étudier et établir de nouvelles combinaisons entre protection sociale et emploi, permettant notamment d’assurer des revenus décents pour tout travailleur et de créer ainsi les conditions pour couvrir ses besoins essentiels (logement, soins de santé, enseignement, pour lui-même et ses enfants, etc.).

    1.5

    Assurer une formation initiale et continue performante pour des emplois de qualité. Prendre des mesures à divers niveaux (national, régional) dans le but de créer un environnement qui évite les départs précoces des jeunes.

    1.6

    Continuer les efforts et débats autour de la flexicurité, pour trouver ce nouvel équilibre entre flexibilité (souplesse nécessaire pour les entreprises) et moyens réels de plus de sécurité (protection pour les travailleurs) qui empêchent l’accroissement de la pauvreté active et visent à son éradication.

    1.7

    Envisager dans le cadre de l’année 2010, proclamée par la Commission, Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, une communication d’information et de mobilisation sur ces questions au niveau de l’Union européenne comme à celui des États membres.

    2.   Contexte

    2.1

    Au niveau de l’UE, il s’est développé tout un ensemble de travaux savants, de propositions, et d’innovations qui, orientés vers les «travailleurs pauvres», démontrent que l’activité n’est pas nécessairement une protection contre la pauvreté, en particulier dans le contexte socio-économique actuel.

    2.2

    Dans sa «Proposition de rapport conjoint 2009 sur la protection sociale et l’inclusion sociale» (1), fondé sur les nouveaux rapports stratégiques nationaux, la Commission a précisé combien les sujets des travailleurs pauvres et de l’emploi de qualité étaient d’importance. Le sujet et les problèmes concrets qu’il désigne s’inscrivent en bonne place des préoccupations et des actions menées à l’échelle communautaire en termes d’«inclusion active». Il y a là un double souci de lutte contre le dénuement et de soutien au développement d’emplois de qualité pour tous.

    2.3

    Le thème redouble d’importance dans le contexte de crise: considérable regain du chômage et tensions accrues sur les finances publiques. Il importe toutefois de s’extraire de la conjoncture immédiate pour considérer le sujet comme devant être traité certes dans les circonstances actuelles extraordinaires, mais aussi comme un sujet structurel, au cœur des évolutions positives à souhaiter en matière de protection sociale et de politique de l’emploi, sur le moyen comme sur le long terme.

    2.4

    La Commission, qui travaille à la production d’un document sur le travail et la pauvreté, a proclamé 2010 Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. En effet, près de 80 millions de personnes dans l’UE, c’est-à-dire 16 % de ses habitants, sont directement concernées par la pauvreté. Parmi elles, un nombre conséquent se trouvent en situation de «pauvreté active». 8 % des travailleurs vivent sous le seuil de pauvreté (2).

    2.5

    Dans son avis sur l’«Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (2010)» (3), le Comité a précisé qu’en complément de l’indicateur habituel de pauvreté monétaire relative, d’autres indicateurs de pauvreté, démontrant sa persistance et les véritables privations sont nécessaires afin de rendre pleinement compte du phénomène. Au-delà des raffinements techniques, les comparaisons, désormais permises par un accord européen sur une définition, dessinent un portrait clair des tendances.

    3.   Définition

    3.1

    Parler de «travailleur pauvre» exige d’abord que l’on explicite tout à la fois les deux termes, à savoir «travailleur» et «pauvre». La «pauvreté» d’un travailleur dépend, d’une part, du revenu personnel qu’il a obtenu pendant la durée de son contrat de travail (rémunération du travail) et, d’autre part, des ressources matérielles globales de sa famille. Le travail renvoie à l’activité professionnelle individuelle. La pauvreté renvoie à l’insuffisance des ressources du ménage pris dans son ensemble. On peut dans certains cas basculer rapidement d’une situation et/ou d’une impression de non-pauvreté à une situation de pauvreté.

    3.2

    La pauvreté se définit au niveau du ménage, mais l’activité se définit au niveau des individus. On mêle donc deux niveaux d’analyse. La pauvreté active dépend, d’abord, de la situation d’emploi et des caractéristiques de l’emploi des individus et, ensuite, du niveau de vie du ménage auquel ils appartiennent. Cette double appréciation induit des difficultés. On peut être très faiblement rémunéré mais ne pas compter parmi les pauvres (parce que les autres ressources familiales sont plus conséquentes). À l’inverse, on peut être recensé comme pauvre bien qu’ayant un niveau de rémunération proche du salaire mensuel moyen du pays et considéré comme suffisant au sein de la société à laquelle on appartient. On peut être actif inoccupé (au chômage) et être indemnisé largement au-dessus du seuil de pauvreté. On peut, au contraire, être actif très occupé, mais très faiblement rémunéré, avec de nombreuses personnes à charge, et, en conséquence, se trouver sous le seuil de pauvreté.

    3.3

    Il s’ensuit que la prise en compte politique des travailleurs pauvres relève à la fois des politiques de l’emploi, des politiques d’assistance et d’assurance sociales, et des politiques familiales.

    3.4

    Dans le cadre de la stratégie européenne pour l’emploi, elle-même intégrée à la stratégie de Lisbonne, la diminution du nombre de travailleurs pauvres est devenue une priorité de l’Union. Il a donc fallu, à partir de 2003, bâtir un indicateur pour évaluer et comparer. En juillet 2003, dans le cadre de ses travaux relatifs au processus communautaire d’inclusion sociale, le comité de la protection sociale de l’Union européenne a adopté un indicateur commun destiné à évaluer la proportion de «travailleurs pauvres» au sein de l’Union européenne ainsi que quelques-unes des principales caractéristiques sociodémographiques de ceux-ci.

    3.5

    Selon cette définition du Comité de la protection sociale, le «travailleur pauvre» est une personne qui, durant l’année de référence, est «principalement au travail» (comme salarié ou indépendant) et vit au sein d’un ménage dont le revenu total est inférieur à 60 % du revenu médian national. Il doit avoir été en emploi plus de la moitié de l’année. Précisément, l’indicateur «risque de pauvreté au travail» identifie comme travailleur toute personne ayant été en emploi pendant au moins sept mois sur les douze mois de la période de référence (4).

    4.   Évaluation statistique

    4.1

    La Commission a publié fin 2008 son rapport annuel sur les tendances sociales dans les États membres dans le cadre des objectifs communs de la stratégie de l’Union en matière de protection sociale et d’inclusion sociale (voir annexe) (5). Il en ressort que, fin 2006, 16 % des Européens sont exposés au risque de pauvreté. L’Union compte 8 % de travailleurs vivant en deçà du seuil de pauvreté. Les chiffres varient entre 4 % ou moins (République tchèque, Belgique, Danemark, Pays-Bas et Finlande) et 13 % ou 14 % (respectivement en Pologne et en Grèce) (6). La pauvreté des travailleurs est liée aux bas salaires (définis comme les salaires inférieurs à 60 % du salaire médian), au faible niveau de qualification, aux emplois précaires, à la faible rémunération de certains indépendants et au travail à temps partiel, souvent non souhaité. Cette forme de pauvreté est également liée au statut économique des autres membres du ménage. Dans les foyers avec enfants, note la Commission, le modèle familial à un seul revenu ne suffit plus à mettre le ménage à l’abri de la pauvreté.

    4.2

    L’indicateur de pauvreté monétaire relative est souvent critiqué car il n’approuve pas vraiment la diversité des situations de dénuement. La pauvreté des revenus n’est naturellement qu’un élément de la pauvreté. D’autres indicateurs sont en cours de développement au sein de l’Union, fournissant une image différente, et complémentaire, des réalités de la pauvreté.

    4.3

    À côté des mesures de pauvreté monétaire se développent ainsi des mesures de pauvreté en «conditions de vie». À l’échelle européenne est ainsi mesurée la «privation matérielle» (voir annexe). L’indicateur rend compte de la proportion de personnes vivant dans des ménages ne disposant pas d’au moins trois des neuf éléments suivants: 1) capacités à satisfaire des dépenses imprévues, 2) une semaine de vacances par an, 3) capacités de payer ses prêts, 4) un repas avec viande, poulet ou poisson au moins tous les deux jours, 5) un logement au chauffage adéquat, 6) une machine à laver, 7) une télévision couleur, 8) un téléphone, 9) une voiture personnelle. Tous ces éléments de conditions matérielles sont naturellement discutables comme indicateurs. C’est leur agrégation qui donne une image intéressante. Le taux de privation connaît de larges écarts, de 3 % au Luxembourg à 50 % en Lettonie. Ces écarts sont bien plus importants que les écarts de pauvreté monétaire (de 10 % à 21 %).

    4.4

    L’approche par la privation matérielle transforme radicalement le classement des États membres quand il s’agit de pauvreté. Mais il s’agit bien là de pauvreté en général et non des seuls travailleurs pauvres. Il faudra bientôt pouvoir fournir ce qu’est la situation des travailleurs pauvres, dans chacun des pays, en termes de privation matérielle. Car, fondamentalement, la pauvreté active n’est pas seulement un problème de faiblesse des revenus, mais aussi une question de qualité de vie (professionnelle, familiale, sociale).

    5.   Des facteurs de la pauvreté active

    5.1

    Un des premiers facteurs conduisant à la pauvreté active est la précarité du statut de travailleur. De nombreux acteurs, dont la Confédération européenne des syndicats et les syndicats européens s’inquiètent d’une précarisation accrue du travail. Avec plus de 19,1 millions de contrats à durée déterminée (7) et environ 29 millions de faux indépendants (principalement dans le BTP), ce sont près de 48,1 millions de travailleurs dont le statut se caractérise par un certain niveau d’instabilité. Certes cette population est très hétérogène, au sein des pays voire à plus forte raison entre les pays, mais l’ordre de grandeur est bien celui de dizaines de millions d’actifs confrontés à certaines formes de précarité, pouvant les conduire à la pauvreté active.

    5.2

    Les employeurs soulignent la complexité de cette question de la pauvreté active, en remarquant d’abord le lien entre le risque de pauvreté et le niveau d’éducation. Les systèmes d’éducation et de formation doivent être plus efficaces et équitables. Il est, en outre, essentiel de «rendre le travail rémunérateur» (8), à savoir assurer un équilibre efficace entre les régimes fiscaux et les systèmes de sécurité sociale.

    5.3

    La pauvreté active repose sur la faiblesse de la rémunération du travail (qui est souvent inadéquate par rapport à la tâche accomplie) et sur les mutations du modèle familial. Les évolutions familiales, qui affectent à des degrés divers les différents États membres, se caractérisent partout par une instabilité accrue, par des séparations plus nombreuses, et par la croissance du nombre de familles monoparentales, par construction mono-actives et davantage exposées au risque de pauvreté. Le Rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale 2007  (9) de la Commission indiquait déjà que si l’emploi est le meilleur rempart contre la pauvreté, il ne peut pas être la seule sauvegarde. D’où des actions nécessaires relevant de la solidarité à entreprendre ou à renforcer en direction des familles, des femmes, des jeunes, des étudiants, et des personnes handicapées et âgées, migrants, catégories les plus vulnérables. Il est d’ailleurs à souligner combien la pauvreté active est un déterminant de la pauvreté des enfants.

    5.4

    La hausse du coût des transports, du logement, des soins de santé, etc. tend également à fragiliser les travailleurs. Elle affecte particulièrement les travailleurs proches du salaire minimum et les classes moyennes inférieures puisqu’ils sont le plus souvent situés en périphérie des zones d’emploi.

    5.5

    La pauvreté active peut être conséquence du faible niveau de compétences ou d’instruction d’une personne, de son manque de compétences requises pour un travail au salaire adéquat ou de conditions de travail inadaptées. Les groupes vulnérables sont le plus souvent les travailleurs âgés, les jeunes, les femmes, les familles nombreuses, les personnes handicapées, les travailleurs qui ont interrompu tôt leur scolarité et les migrants. Il est ainsi essentiel d’assurer à toute personne handicapée des conditions d’accueil adapté dans l’emploi et d’assurer à chaque enfant un bon départ dans la vie grâce à une scolarisation précoce mais également en s’attaquant au problème de l’abandon scolaire, dont le taux, actuellement de 15 % en Europe, est encore trop élevé.

    5.6

    Plus au fond et très souvent, la pauvreté active est une résultante du sous-emploi. La pauvreté au travail représente, tant pour le salarié que pour certains travailleurs indépendants, un sujet complexe qui fait appel à de nombreux critères interconnectés. Il doit être adopté une approche globale pour trouver les mécanismes efficaces pour surmonter les défis. Sans politiques globales de croissance et d’adaptation à la mondialisation et maintenant de relance face à la crise, il ne peut y avoir de programmes efficaces de lutte contre la pauvreté active.

    6.   Propositions pour une approche globale de la lutte contre le travail pauvre

    6.1

    Il s’agit en premier lieu de réfléchir en termes macro-économiques afin de lutter contre le travail pauvre. Ce ne sont pas en effet des mesures ponctuelles qui peuvent valablement enrayer la dynamique, notamment dans le contexte de crise. L’emploi et l’activité indépendante, plus précisément l’emploi de qualité pour tous, doit être la priorité de toutes les institutions européennes.

    6.2

    Des indicateurs fiables. La dynamique de construction d’indicateurs communs et fiables en ce qui concerne les travailleurs pauvres doit se poursuivre. De grands progrès ont été permis grâce à l’investissement européen et à la méthode ouverte de coordination. Il importe désormais d’aller plus loin et d’enrichir la connaissance par des batteries de données plus fournies, tenant compte simultanément de la proportion des travailleurs pauvres, de l’intensité de cette pauvreté, de l’inégalité de répartition des revenus parmi les pauvres (au sein des pays et entre les pays).

    6.3

    Techniquement, sur ces questions statistiques, il importe de disposer de données nationales, à partir d’un seuil national, mais aussi de données pleinement européennes, à partir d’un seuil européen. Ceci permettrait d’autres classements et d’autres visions que celle aujourd’hui fournie par le seul indicateur qui a été établi.

    6.4

    Des rémunérations justes et décentes, appuyées sur un dialogue social renforcé. La lutte contre la pauvreté active doit également passer par une politique salariale ambitieuse. Il faut démultiplier et soutenir toutes les initiatives allant dans le sens de la formule inflation+participation adéquate aux gains de productivité du secteur considéré. A ce titre, les négociations salariales, clé de voûte du dialogue social doivent jouer un rôle prépondérant dans la lutte contre la pauvreté active. Au niveau de la branche, au niveau national ou européen, il n’existe pas de véritable incidence pécuniaire pour les entreprises quand les négociations se déroulent bien et donc pas de «prime» au vrai dialogue social. Les progrès autour du travail décent passent par le dialogue social, par l’investissement des partenaires sociaux, par la responsabilité des entreprises, et par les mesures incitatives et correctrices des pouvoirs publics, et actuellement, le rôle des banques auprès des PME. La lutte contre le travail non-déclaré constitue un outil déterminant dans la lutte contre le travail pauvre. D’une part, parce qu’il touche les populations les plus vulnérables (migrants, précaires) mais également parce qu’il peut mener à des situations de quasi esclavage contraire à la Charte des droits fondamentaux.

    6.5

    Des mécanismes favorisant l’entrepreneuriat et le travail indépendant. De nombreux entrepreneurs et travailleurs indépendants souffrent de la pauvreté au travail, surtout au début de la création de leur entreprise. Il convient de prévoir des mécanismes de soutien car plusieurs de ces PME deviennent par la suite des créateurs d’emplois. Bien que 80 % de la croissance économique provienne du secteur des PME, beaucoup d’entrepreneurs, en lançant leur activité, ne s’attribuent qu’un salaire très faible ou même aucun salaire, exposant leurs familles au risque de la pauvreté.

    6.6

    Des systèmes de formation ajustés. La formation tout au long de la vie en particulier pour les salariés les moins qualifiés est une condition essentielle dans l’optique d’une amélioration des compétences et d’un accès à un emploi avec un salaire décent pour ces travailleurs.

    6.7

    Une protection sociale adaptée. La lutte contre la pauvreté active passe par une rationalisation des dispositions à l’œuvre. Les prestations d’assistance doivent pouvoir se combiner plus efficacement avec de nouveaux services de garde d’enfants et d’aide à la mobilité (comme le travail, la mobilité doit aussi payer) qui permettent aux travailleurs pauvres de recouvrer une activité mieux rémunérée.

    6.8

    En matière de logement, alors qu’il apparaît dans certains pays qu’une partie non négligeable des sans-abri se trouvent être en situation d’activité professionnelle, il importe de mobiliser les ressources du logement social pour que priorité soit faite à ceux qui sont insérés par le travail mais qui risquent leur emploi et leur stabilité relative par la faible qualité, voire par l’absence de logement.

    6.9

    Prendre en compte l’environnement du travail, et le travail. Concrètement, puisque la pauvreté au travail est pour partie importante liée aux conditions de l’activité professionnelle, il est fondamental d’agir sur des leviers liés à l’environnement du travail: les aides à la mobilité choisie, l’accès à des repas dans des conditions financières ajustées, les conditions de logement, les modes d’accueil pour les enfants. Par ailleurs, l’entreprise qui a fourni le travail devrait être en situation d’examiner par quelles mesures donner à leur contrat de travail de plus grandes conditions de sécurité, et comment ses travailleurs pourraient progresser et augmenter leurs qualifications.

    6.10

    Informer et mobiliser. Enfin, dans le cadre de l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, la mobilisation de l’opinion publique et des médias s’impose. Analyser le phénomène des travailleurs pauvres, parler des situations humaines dégradantes qu’il engendre et mobiliser les citoyens européens pourraient rompre la détresse dans laquelle se trouvent certains actifs et ainsi contribuer à leur rendre une dignité compromise. Plutôt qu’une communication de compassion, il faut envisager une communication de mobilisation en faveur du travail de qualité, pour tous, afin de promouvoir un modèle social européen éthiquement supérieur.

    Bruxelles, le 30 septembre 2009.

    Le Président du Comité économique et social européen

    Mario SEPI


    (1)  COM(2009) 58 final.

    (2)  Eurostat, Statistics in focus, 46/2009.

    (3)  Avis du CESE du 29.5.2008 sur la «Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (2010)», rapporteur: M. PATER, corapporteure: Mme KOLLER, (JO C 224 du 30 août 2008).

    (4)  Pour plus de précisions et pour des développements conséquents, voir Guillaume ALLÈGRE, «Working poor in the EU: an exploratory comparative analysis», document de travail OFCE, no 2008-35, novembre 2008; Sophie PONTHIEUX, «Les travailleurs pauvres comme catégorie statistique. Difficultés méthodologiques et exploration d’une notion de pauvreté en revenu d’activité», document de travail INSEE, no F0902, mars 2009.

    (5)  Rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale 2008. http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/joint_reports_fr.htm.

    Voir toutes les données et tous les dossiers issus des travaux de la méthode ouverte de coordination: http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/the_process_fr.htm. Pour une perspective européenne récente, avec des portraits de la situation et des préoccupations dans certains des pays de l’Union, voir Hans-Jürgen Andreß, Henning Lohmann (dir.), The Working Poor In Europe. Employment, Poverty and Globalization, Cheltenham, Edward Elgar, 2008.

    (6)  Précisons que la pauvreté monétaire se mesure relativement aux échelles nationales. Si le seuil de pauvreté était européen, le classement des pays serait totalement bouleversé…

    (7)  Enquête européenne sur les forces de travail – résultats de l’année 2008; http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_OFFPUB/KS-QA-09-033/EN/KS-QA-09-033-EN.PDF (en anglais).

    (8)  «Rendre le travail rémunérateur» – Étude entreprise par le Comité de l’emploi et le Comité de la protection sociale sur l’interaction entre les systèmes fiscaux et de sécurité sociale. Voir également l’avis du CESE «Protection sociale: rendre le travail rémunérateur», rapporteure Mme St HILL (JO C 302 du 7 décembre 2004).

    (9)  http://ec.europa.eu/employment_social/spsi/joint_reports_fr.htm#2007.


    Annexe

    Graphique 1. Pauvreté des travailleurs dans l’Union européenne en 2006

    Image

    Graphique 2. La «privation matérielle» dans l’Union

    Part des personnes vivant dans un ménage ne disposant pas d’au moins trois des éléments listés (2006, en %)

    Image


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