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Document 62016CC0266

    Conclusions de l'avocat général M. M. Wathelet, présentées le 10 janvier 2018.
    Western Sahara Campaign UK contre Commissioners for Her Majesty's Revenue and Customs et Secretary of State for Environment, Food and Rural Affairs.
    Demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Administrative Court).
    Renvoi préjudiciel – Accord de partenariat entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc dans le secteur de la pêche – Protocole fixant les possibilités de pêche prévues par cet accord – Actes de conclusion de l’accord et du protocole – Règlements répartissant les possibilités de pêche fixées par le protocole entre les États membres – Compétence juridictionnelle – Interprétation – Validité au regard de l’article 3, paragraphe 5, TUE et du droit international – Applicabilité dudit accord et dudit protocole au territoire du Sahara occidental et aux eaux adjacentes.
    Affaire C-266/16.

    Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2018:1

    CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. MELCHIOR WATHELET

    présentées le 10 janvier 2018 ( 1 )

    Affaire C‑266/16

    Western Sahara Campaign UK,

    The Queen

    contre

    Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs,

    Secretary of State for Environment, Food and Rural Affairs,

    [demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative)], Royaume-Uni]

    « Renvoi préjudiciel – Accord de partenariat entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc dans le secteur de la pêche – Protocole fixant les possibilités de pêche prévues par l’accord – Actes approuvant la conclusion de l’accord et du protocole – Règlements répartissant les possibilités de pêche fixées par le protocole entre les États membres – Validité au regard de l’article 3 TUE et du droit international – Application au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes »

    Table des matières

     

    I. Introduction

     

    II. Le cadre juridique

     

    A. L’accord de pêche

     

    B. Le protocole de 2013

     

    C. Le règlement no 764/2006

     

    D. La décision 2013/785/UE

     

    E. Le règlement no 1270/2013

     

    III. Le litige au principal et les questions préjudicielles

     

    IV. La procédure devant la Cour

     

    V. Sur les troisième et quatrième questions préjudicielles

     

    A. Sur la compétence de la Cour

     

    B. Sur le fond

     

    1. Observations liminaires

     

    2. L’invocabilité des règles du droit international afin de contester la validité des actes contestés

     

    a) Principes généraux

     

    b) Sur l’invocabilité des règles de droit international applicables à la conclusion d’accords internationaux visant l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental

     

    1) Le droit à l’autodétermination

     

    i) Le droit à l’autodétermination fait partie des droits de l’homme

     

    ii) Le droit à l’autodétermination en tant que principe du droit international général, du droit international conventionnel et obligation erga omnes

     

    – L’Union est liée par le droit à l’autodétermination

     

    – Le droit à l’autodétermination est une règle du droit international qui, du point de vue de son contenu, est inconditionnelle et suffisamment précise

     

    – La nature et l’économie du droit à l’autodétermination ne s’opposent pas au contrôle juridictionnel des actes contestés

     

    2) Le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles

     

    3) Les règles du droit international humanitaire applicables à la conclusion des accords internationaux visant l’exploitation des ressources naturelles du territoire occupé

     

    3. Sur la validité du règlement no 764/2006, de la décision 2013/785 et du règlement no 1270/2013 ainsi que sur la compatibilité de l’accord de pêche et du protocole de 2013 avec les règles invocables du droit international auxquelles renvoie l’article 3, paragraphe 5, TUE

     

    a) Sur le respect, par les actes contestés, du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination ainsi que de l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation de ce droit et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation

     

    1) Sur l’existence d’une volonté libre du peuple du Sahara occidental de poursuivre par les actes contestés son développement économique et de disposer de ses richesses et de ses ressources naturelles

     

    2) Sur l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation

     

    3) Les accords internationaux applicables au Sahara occidental auraient-ils été conclus avec le Royaume du Maroc sur la base d’un autre titre que son affirmation de souveraineté sur ce territoire ?

     

    i) Le Royaume du Maroc en tant que puissance administrante de facto du Sahara occidental

     

    ii) Le Royaume du Maroc en tant que puissance occupante du Sahara occidental

     

    – Sur l’applicabilité du droit international humanitaire au Sahara occidental

     

    – Sur l’existence d’une occupation militaire au Sahara occidental

     

    – Sur la capacité de la puissance occupante de conclure des accords internationaux applicables au territoire occupé et sur les conditions de légalité auxquelles est soumise la conclusion de pareils accords

     

    b) Sur le respect, par les actes contestés, du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et des règles du droit international humanitaire applicables à l’exploitation des ressources naturelles du territoire occupé

     

    1) Le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles

     

    2) L’article 55 du règlement de La Haye de 1907

     

    3) Sur le respect, par les actes contestés, du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et de l’article 55 du règlement de La Haye de 1907

     

    c) Sur les limitations à l’obligation de non-reconnaissance

     

    4. Résumé

     

    VI. Sur la demande du Conseil de limiter temporairement les effets de la déclaration d’invalidité

     

    VII. Conclusion

    I. Introduction

    1.

    La présente demande de décision préjudicielle porte sur la validité de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc ( 2 ) (ci-après l’« accord de pêche »), du protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de pêche ( 3 ) (ci-après le « protocole de 2013 »), et du règlement (UE) no 1270/2013 du Conseil, du 15 novembre 2013, relatif à la répartition des possibilités de pêche au titre du protocole de 2013 ( 4 ), en ce qu’ils instaurent et mettent en œuvre une exploitation par l’Union européenne et le Royaume du Maroc des ressources maritimes biologiques du Sahara occidental.

    2.

    Il s’agit de la première demande préjudicielle en validité visant des accords internationaux conclus par l’Union, ainsi que leurs actes de conclusion. En ce sens, elle pose des questions de droit nouvelles, à la fois sur la compétence de la Cour pour se prononcer sur la validité des accords internationaux conclus par l’Union, sur les conditions que les particuliers doivent satisfaire afin d’invoquer des règles du droit international dans le cadre de l’examen de la validité de ces accords internationaux, ainsi que sur l’interprétation de ces règles. Ces questions sont d’une importance primordiale en ce qui concerne le contrôle juridictionnel de l’action extérieure de l’Union et le processus de décolonisation du Sahara occidental qui est en cours depuis les années 1960.

    3.

    Certes, plusieurs des réponses à apporter à ces questions auront des ramifications politiques. Toutefois, comme l’a jugé la Cour internationale de justice, « le fait qu’une question juridique présente également des aspects politiques, “comme c’est, par la nature des choses, le cas de bon nombre de questions qui viennent à se poser dans la vie internationale”, ne suffit pas à la priver de son caractère de “question juridique” et à “enlever à la Cour une compétence qui lui est expressément conférée par son [s]tatut […]”. Quels que soient les aspects politiques de la question posée, la Cour ne saurait refuser un caractère juridique à une question qui l’invite à s’acquitter d’une tâche essentiellement judiciaire […] » ( 5 ).

    II. Le cadre juridique

    A. L’accord de pêche

    4.

    L’accord de pêche fait suite à une série d’accords conclus à partir de 1987 dans le domaine de la pêche entre l’Union et le Royaume du Maroc. Sa conclusion a été approuvée au nom de la Communauté par le règlement no 764/2006. Conformément à l’article 17 de ce règlement, il est entré en vigueur le 28 février 2007 ( 6 ).

    5.

    Aux termes de son préambule et des articles 1er et 3, l’accord de pêche instaure un partenariat ayant pour but de contribuer à la mise en œuvre efficace de la politique de la pêche du Royaume du Maroc et, plus largement, à la préservation ainsi qu’à l’exploitation durables et responsables des ressources maritimes biologiques, au moyen de règles relatives à la coopération économique, financière, technique et scientifique entre les parties, aux conditions d’accès des navires de pêche battant pavillon d’un État membre de l’Union aux zones de pêche marocaines, aux modalités de contrôle des activités de pêche dans ces zones, ainsi qu’à la coopération entre les entreprises du secteur de la pêche.

    6.

    L’article 2, intitulé « Définitions », prévoit ce qui suit :

    « Aux fins du présent accord, du protocole ainsi que de l’annexe, on entend par :

    a)

    “zone de pêche marocaine”, les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc ;

    […] »

    7.

    L’article 5, intitulé « Accès des navires communautaires aux pêcheries dans les zones de pêche marocaines », dispose :

    « 1.   Le Maroc s’engage à autoriser des navires [de l’Union] à exercer des activités de pêche conformément au présent accord, protocole et annexe compris.

    […]

    4.   [L’Union] s’engage à prendre toutes les dispositions adéquates pour assurer le respect par ses navires des dispositions du présent accord comme la législation régissant la pêche dans les eaux relevant de la juridiction du Maroc, conformément à la convention des Nations unies sur le droit de la mer. »

    8.

    L’article 7, intitulé « Contrepartie financière », énonce :

    « 1.   [L’Union] octroie au Maroc une contrepartie financière conformément aux termes et aux conditions définis dans le protocole et l’annexe. Cette contrepartie est définie à partir de deux composantes relatives, respectivement :

    a)

    une compensation financière relative à l’accès des navires communautaires aux zones de pêche marocaines, et, sans préjudice des redevances dues par les navires communautaires pour la redevance des licences ;

    b)

    un appui financier de [l’Union] à l’instauration de la politique nationale de la pêche fondée sur une pêche responsable et l’exploitation durable des ressources halieutiques dans les eaux marocaines.

    2.   La composante de la contrepartie financière mentionnée au paragraphe 1, sous b), est déterminée d’un commun accord et conformément aux dispositions établies dans le protocole en fonction de l’identification, par les deux parties, des objectifs à réaliser dans le cadre de la politique sectorielle de la pêche au Maroc et d’une programmation annuelle et pluriannuelle afférente à sa mise en œuvre. »

    9.

    L’article 11, intitulé « Zone d’application », prévoit ce qui suit :

    « Le présent accord s’applique, d’une part, aux territoires où s’applique le traité [FUE], dans les conditions prévues par ledit traité, et, d’autre part, au territoire du Maroc et aux eaux sous juridiction marocaine. »

    10.

    L’article 13, intitulé « Règlement des différends », prévoit que « [l]es parties contractantes se consultent en cas de différends concernant l’interprétation ou l’application du présent accord ».

    11.

    Selon l’article 16, « [l]e protocole et l’annexe avec ses appendices font partie intégrante du présent accord ». Ce protocole et cette annexe avec ses appendices avaient été conclus pour une période de quatre ans ( 7 ). Ils ne sont donc plus en vigueur, mais ils sont remplacés par le protocole de 2013 et son annexe avec ses appendices.

    B. Le protocole de 2013

    12.

    Le 18 novembre 2013, l’Union et le Royaume du Maroc ont signé le protocole de 2013 qui fixe les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de pêche. Il est entré en vigueur le 15 juillet 2014 ( 8 ).

    13.

    Son article 1er, intitulé « Principes généraux », dispose ce qui suit :

    « Le protocole, avec l’annexe et ses appendices, fait partie intégrante de l’accord [de pêche] […] qui s’inscrit dans le cadre de l’accord [d’association]. […]

    La mise en œuvre du présent protocole se fait conformément […] à l’article 2 du même accord relatif au respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l’homme ».

    14.

    L’article 2, intitulé « Période d’application, durée et possibilités de pêche », prévoit :

    « Dès son application et pour une période de quatre années, les possibilités de pêche accordées au titre de l’article 5 de l’accord de pêche sont fixées dans le tableau joint au présent protocole.

    Le paragraphe 1 s’applique sous réserve des dispositions des articles 4 et 5 du présent protocole.

    […] »

    15.

    Aux termes de l’article 3, intitulé « Contrepartie financière » :

    « 1.   La valeur totale annuelle estimée du protocole se chiffre à 40000000 EUR pour la période visée à l’article 2. Ce montant est réparti comme suit :

    a)

    30000000 EUR au titre de la contrepartie financière visée à l’article 7 de l’accord de pêche, affectée comme suit :

    i)

    16000000 EUR en tant que compensation financière pour l’accès à la ressource ;

    ii)

    14000000 EUR en tant qu’appui à la politique sectorielle de la pêche au Maroc ;

    b)

    10000000 EUR correspondant au montant estimé des redevances dues par les armateurs au titre des licences de pêche délivrées en application de l’article 6 de l’accord de pêche et selon les modalités prévues au chapitre I, sections D et E de l’annexe au présent protocole.

    […]

    4.   La contrepartie financière telle que visée au paragraphe 1 a) est versée au nom du trésorier général du Royaume du Maroc sur un compte ouvert auprès de la Trésorerie générale du Royaume du Maroc, dont les références sont communiquées par les autorités marocaines.

    5.   Sous réserve des dispositions de l’article 6 du présent protocole, l’affectation de cette contrepartie relève de la compétence exclusive des autorités du Maroc. »

    16.

    L’article 6, intitulé « Appui à la politique sectorielle de la pêche au Maroc », dispose ce qui suit :

    « 1.   La contrepartie financière visée à l’article 3, paragraphe 1 a) (ii) du présent protocole contribue au développement et à la mise en œuvre de la politique sectorielle de la pêche au Maroc dans le cadre de la stratégie “Halieutis” de développement du secteur de la pêche.

    2.   L’affectation et la gestion par le Maroc de cette contribution est fondée sur l’identification par les deux parties, d’un commun accord au sein de la commission mixte, des objectifs à réaliser et de la programmation annuelle et pluriannuelle y afférente[,] et ce conformément à la stratégie “Halieutis”, et sur une estimation de l’impact attendu des projets à réaliser.

    […]

    6.   Selon la nature des projets et la durée de leur réalisation, le Maroc présentera en commission mixte, un rapport sur la mise en œuvre des projets arrivés à terme dans le cadre de l’appui sectoriel prévu au titre du présent protocole, incluant ses retombées économiques et sociales attendues, notamment les effets sur l’emploi, les investissements, et tout impact quantifiable des actions réalisées ainsi que leur distribution géographique. Ces données seront élaborées sur la base d’indicateurs à définir de manière plus détaillée en commission mixte.

    7.   En outre, le Maroc présentera avant l’expiration du protocole, un rapport final sur la mise en œuvre de l’appui sectoriel prévu au titre du présent protocole, incluant les éléments repris aux paragraphes précédents.

    8.   Les deux parties poursuivront le suivi de la mise en œuvre de l’appui sectoriel, si nécessaire, au-delà de l’expiration du présent protocole, ainsi que, le cas échéant, en cas de sa suspension selon les modalités prévues dans le présent protocole.

    […] »

    C. Le règlement no 764/2006

    17.

    Aux termes de son considérant 1er, « [l’Union] et le Royaume du Maroc ont négocié et paraphé un accord de partenariat dans le secteur de la pêche accordant aux pêcheurs de [l’Union] des possibilités de pêche dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc ».

    18.

    Selon son article 1er, « [l’accord de pêche] est approuvé au nom de [l’Union] ».

    D. La décision 2013/785/UE

    19.

    Conformément à son considérant 2, « [l]’Union a négocié avec le Royaume du Maroc un nouveau protocole accordant aux navires de l’Union des possibilités de pêche dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc en matière de pêche ».

    20.

    Aux termes de son article 1er, « [l]e protocole [de 2013] est approuvé au nom de l’Union ».

    E. Le règlement no 1270/2013

    21.

    Conformément à son considérant 2, « [l]’Union a négocié avec le Royaume du Maroc un nouveau protocole à l’accord de partenariat accordant aux navires de l’Union des possibilités de pêche dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc en matière de pêche. Le nouveau protocole a été paraphé le 24 juillet 2013».

    22.

    L’article 1er, paragraphe 1, répartit entre les États membres les possibilités de pêche fixées par le protocole de 2013. Selon cette répartition, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord bénéficie d’un quota de 4525 tonnes dans la zone de pêche pélagique industrielle.

    III. Le litige au principal et les questions préjudicielles

    23.

    Western Sahara Campaign UK (ci-après « WSC ») est une organisation bénévole indépendante établie au Royaume-Uni ayant pour but de promouvoir la reconnaissance du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination.

    24.

    Elle a présenté deux recours connexes contre les Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs (administration fiscale et douanière, Royaume-Uni) et le Secretary of State for Environment, Food and Rural Affairs (ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, Royaume-Uni).

    25.

    L’administration fiscale et douanière est la partie défenderesse dans le premier recours par lequel WSC conteste le traitement tarifaire préférentiel accordé aux produits originaires du Sahara occidental, certifiés en tant que produits originaires du Royaume du Maroc. Le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales est la partie défenderesse dans le second recours par lequel WSC conteste la possibilité offerte au ministre par les actes contestés de délivrer des licences pour pêcher dans les eaux adjacentes au Sahara occidental.

    26.

    Dans ces recours, WSC conteste la légalité de l’accord euro-méditerranéen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres et le Royaume du Maroc, signé à Bruxelles le 26 février 1996 (JO 2000, L 70, p. 2, ci-après l’« accord d’association » et de l’accord de pêche en ce qu’ils s’appliquent au Sahara occidental. Selon WSC, ces accords sont invalides au motif qu’ils sont contraires aux principes généraux du droit de l’Union et à l’article 3, paragraphe 5, TUE, qui oblige l’Union à respecter le droit international. Dans ce contexte, WSC estime que lesdits accords conclus dans le contexte d’une occupation illégale violent plusieurs règles du droit international, dont notamment le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination, l’article 73 de la charte des Nations unies, le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et les règles du droit international humanitaire applicables aux occupations militaires.

    27.

    L’administration fiscale et douanière et le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales rétorquent que WSC n’a pas qualité pour invoquer les règles du droit international afin de contester la validité desdits accords et que, de toute façon, ses recours qui visent à contester devant les juridictions anglaises la politique du Royaume du Maroc à l’égard du Sahara occidental ne sont pas susceptibles de règlement par voie judiciaire. Sur le fond, ils soutiennent que rien dans lesdits accords ne permettrait de conclure que l’Union a reconnu ou prêté assistance à la violation de normes impératives du droit international. De plus, ils sont d’avis que le fait que le Royaume du Maroc continue à occuper le Sahara occidental ne fait pas obstacle à la conclusion avec lui d’un accord d’exploitation des ressources naturelles de ce territoire et que, de toute façon, les parties auxdits accords reconnaissent que cette exploitation doit bénéficier au peuple de ce territoire.

    28.

    Dans ce contexte, la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative), Royaume-Uni] estime que « [les institutions de l’Union] n’ont pas toujours le droit d’être indifférent[e]s à la question de savoir où se situent les frontières souveraines d’un État tiers, surtout lorsqu’il y a occupation illégale du territoire d’un autre État » ( 9 ) sous peine de violation des principes de la charte des Nations unies et des principes qui s’imposent à l’Union, et ce peu importe la large marge d’appréciation dont disposent les institutions de l’Union dans le domaine des affaires étrangères.

    29.

    Ladite juridiction est d’avis que même si le Royaume du Maroc prétend que le Sahara occidental fait partie de son territoire souverain, cette revendication n’est pas reconnue par la communauté internationale en général, ni par l’Union en particulier. Au contraire, la juridiction de renvoi estime que la présence du Royaume du Maroc est une occupation qu’elle qualifie même d’« occupation continue » ( 10 ). La question serait donc de savoir s’il est légitime pour une organisation comme l’Union, qui respecte les principes de la charte des Nations unies, de conclure avec un État tiers un accord concernant un territoire situé à l’extérieur des frontières reconnues de cet État.

    30.

    À cet égard, ladite juridiction estime que, bien que les institutions de l’Union ne commettraient pas une erreur manifeste en concluant que l’occupation continue du territoire du Sahara occidental par le Royaume du Maroc ne fait pas obstacle, au regard du droit international, à la conclusion de tout accord pour l’exploitation des ressources naturelles du territoire concerné, la question de fond qui se pose est celle de savoir si les accords spécifiques concernés sont contraires à certains principes du droit international et s’il a été suffisamment tenu compte de la volonté de la population du Sahara occidental et de ses représentants reconnus.

    31.

    Selon ladite juridiction, il existe des arguments pour conclure que les institutions de l’Union ont commis une erreur manifeste d’appréciation dans leur application du droit international, en ce sens que lesdits accords ont été conclus sans que le Royaume du Maroc reconnaisse sa qualité de puissance administrante et respecte aussi bien les obligations découlant de l’article 73 de la charte des Nations unies, que l’obligation de promouvoir l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.

    32.

    Dans ces circonstances, la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative), Royaume-Uni] a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

    « 1)

    Dans [l’accord d’association], les références au « Maroc » figurant aux articles 9, 17 et 94 du protocole no 4, renvoient-elles uniquement au territoire souverain du Maroc, tel que reconnu par les Nations unies et l’Union, excluant ainsi que des produits originaires du Sahara occidental soient admis à l’importation dans l’Union en exemption de droits de douane, comme le prévoit l’accord d’association ?

    2)

    Si des produits originaires du Sahara occidental peuvent être admis à l’importation dans l’Union européenne en exemption de droits de douane en vertu de l’accord d’association, cet accord est-il valide, compte tenu des dispositions de l’article 3, paragraphe 5, [TUE], qui imposent l’obligation de contribuer au respect de tout principe pertinent du droit international et au respect des principes de la charte des Nations unies, et compte tenu de la mesure dans laquelle l’accord d’association a été conclu au bénéfice du peuple sahraoui, en son nom, conformément à sa volonté, ou en consultation avec ses représentants reconnus ?

    3)

    L’accord [de pêche] (tel qu’approuvé et mis en œuvre par le règlement no 764/2006, la décision 2013/785 et le règlement no 1270/2013) est-il valide, compte tenu des dispositions de l’article 3, paragraphe 5, [TUE], qui imposent l’obligation de contribuer au respect de tout principe pertinent du droit international et au respect des principes de la charte des Nations unies et compte tenu de la mesure dans laquelle l’accord de pêche a été conclu au bénéfice du peuple sahraoui, en son nom, conformément à sa volonté, ou en consultation avec ses représentants reconnus ?

    4)

    La partie requérante a-t-elle le droit de contester la validité d’actes de l’Union au motif que l’Union aurait violé le droit international, compte tenu en particulier :

    a)

    du fait que, bien qu’elle ait, en vertu du droit national, qualité pour contester en justice la validité des actes de l’Union en cause, elle ne fait valoir aucun droit au titre du droit de l’Union ; et

    b)

    du principe établi dans l’affaire de l’or monétaire pris à Rome en 1943 (CIJ Recueil, 1954, p. 19) selon lequel la Cour internationale de justice ne saurait faire de constatations qui remettent en cause la conduite, ou qui portent atteinte aux droits, d’un État qui n’est pas partie à la procédure devant elle et qui n’a pas consenti à être lié par ses décisions ? »

    33.

    Par ordonnance du 23 novembre 2016, la juridiction de renvoi a joint la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader) comme partie intéressée à la procédure pendante devant elle.

    IV. La procédure devant la Cour

    34.

    La demande de décision préjudicielle a été déposée au greffe de la Cour le 13 mai 2016. Les gouvernements espagnol, français et portugais ainsi que le Conseil et la Commission européenne ont déposé des observations écrites.

    35.

    Par lettre du 17 janvier 2017, la Cour a interrogé la juridiction de renvoi afin de savoir si, compte tenu l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), la juridiction de renvoi souhaitait maintenir ou retirer ses première et deuxième questions préjudicielles.

    36.

    Par lettre du 3 février 2017, la juridiction de renvoi a retiré ses première et deuxième questions préjudicielles en estimant qu’une réponse ne lui était plus nécessaire.

    37.

    Par lettre du 17 février 2017, la Cour a invité les parties de l’affaire au principal ainsi que les intervenants à s’exprimer devant elle sur l’incidence éventuelle de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), sur la réponse à la troisième question préjudicielle et à répondre à une série de questions dans un délai de trois semaines, ce que WSC, la Comader, les gouvernements espagnol et français ( 11 ) ainsi que le Conseil et la Commission ont fait.

    38.

    Une audience s’est tenue le 6 septembre 2017, lors de laquelle WSC, la Comader, les gouvernements espagnol et français ainsi que le Conseil et la Commission ont présenté leurs observations orales.

    V. Sur les troisième et quatrième questions préjudicielles

    39.

    Par sa troisième question, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur la validité de l’accord de pêche, tel qu’il a été approuvé par le règlement no 764/2006 et mis en œuvre par le protocole de 2013 (approuvé par la décision 2013/785) ainsi que le règlement no 1270/2013, compte tenu, d’une part, de l’article 3, paragraphe 5, TUE, imposant à l’Union l’obligation de « contribue[r] au strict respect […] du droit international [et] au respect des principes de la charte des Nations unies » et, d’autre part, de la mesure dans laquelle cet accord a été conclu au bénéfice du peuple sahraoui, en son nom, conformément à sa volonté et/ou en consultation avec ses représentants reconnus.

    40.

    Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur les conditions d’invocabilité du droit international dans le cadre du contrôle juridictionnel des actes de l’Union par une demande de décision préjudicielle en validité.

    41.

    À mon avis, ces questions préjudicielles sont étroitement liées et doivent être examinées ensemble.

    A. Sur la compétence de la Cour

    42.

    La troisième question préjudicielle cible l’accord de pêche (tel que complété par le protocole de 2013) et invite la Cour à se prononcer sur la validité de cet accord international conclu par l’Union. Toutefois, elle fait également référence aux actes d’approbation et de mise en œuvre de cet accord adoptés par le Conseil.

    43.

    Le Conseil est d’avis que la Cour n’est pas compétente pour statuer, à titre préjudiciel, sur la validité de l’accord de pêche, puisque, en tant qu’accord international, il ne serait pas un acte pris par les institutions au sens de l’article 267, premier alinéa, sous b), TFUE. Selon le Conseil, la validité d’un accord international conclu par l’Union ne peut être examinée qu’avant la conclusion de celui-ci, par la procédure d’avis instaurée par l’article 218, paragraphe 11, TFUE. À titre subsidiaire, le Conseil, rejoint par la Commission et les gouvernements espagnol et français, estime qu’il peut être considéré que la demande de décision préjudicielle porte en réalité sur la validité des actes ayant approuvé la conclusion de l’accord de pêche et du protocole de 2013, à savoir le règlement no 764/2006 et la décision 2013/785.

    44.

    À mon avis, cette exception d’incompétence doit être rejetée pour les raisons suivantes.

    45.

    Aux termes de l’article 267, premier alinéa, sous b), TFUE, la Cour est compétente pour statuer à titre préjudiciel « sur la validité et l’interprétation des actes pris par les institutions […] de l’Union ».

    46.

    Il est de jurisprudence constante que, aux fins de cette disposition, un accord international conclu par l’Union constitue, « en ce qui [la concerne], un acte pris par une des institutions [de l’Union] » au sens de l’article 267 TFUE ( 12 ). Sur cette base, la Cour a souvent eu l’opportunité d’interpréter, à titre préjudiciel, des dispositions de tels accords conclus par l’Union ( 13 ) dont d’ailleurs l’accord de pêche ( 14 ).

    47.

    De plus, selon la Cour, le contrôle préjudiciel de validité s’étend à tout acte des institutions « sans exception aucune » ( 15 ), le traité FUE ayant « d’une part, à ses articles 263 et 277, et, d’autre part, à son article 267, établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer le contrôle de la légalité des actes de l’Union, en le confiant au juge de l’Union » ( 16 ).

    48.

    Cela étant, les accords internationaux conclus par l’Union relèvent à la fois de l’ordre juridique international, puisque conclus avec un tiers, et de l’ordre juridique de l’Union.

    49.

    Si dans l’ordre juridique international, la nullité d’un accord international ne peut intervenir que pour un des motifs limitativement énumérés aux articles 46 à 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités, conclue à Vienne le 23 mai 1969 ( 17 ) (ci-après la « convention de Vienne sur le droit des traités »), il ressort de l’article 218, paragraphe 11, TFUE que « [l]es dispositions d’un […] accord [conclu par l’Union] doivent […] être pleinement compatibles avec les traités [UE et FUE] ainsi qu’avec les principes constitutionnels qui en découlent » ( 18 ).

    50.

    C’est pour éviter le plus possible les complications juridiques et de politique internationale qu’impliquerait une incompatibilité avec les traités UE et FUE d’un accord international conclu par l’Union qui resterait valide en droit international que les auteurs desdits traités ont créé la procédure préventive d’avis prévue aujourd’hui à l’article 218, paragraphe 11, TFUE.

    51.

    Afin de fonder sa compétence pour apprécier la compatibilité des accords internationaux dans le cadre de la procédure d’avis, la Cour s’est d’ailleurs appuyée sur le fait que cette compétence lui était de toute façon conférée en vertu des articles 258, 263 et 267 TFUE. En effet, elle a jugé que « [l]a question de savoir si la conclusion d’un accord déterminé relève ou non des compétences de [l’Union] et si, le cas échéant, ces compétences ont été exercées de manière conforme aux dispositions du traité [étaient] en principe susceptibles d’être soumises à la Cour de justice, soit directement, au titre de l’article [258 TFUE] ou de l’article [263 TFUE], soit par la procédure préjudicielle » ( 19 ).

    52.

    La Cour est donc compétente pour examiner « toutes les questions susceptibles de soulever des doutes quant à la validité matérielle ou formelle de l’accord [international] au regard des traités [UE et FUE] » ( 20 ).

    53.

    En ce sens, pour éviter les complications susmentionnées, lorsque la Cour a rendu un avis négatif sur la compatibilité avec les traités UE et FUE d’un accord international « envisagé », celui-ci ne peut entrer en vigueur, à moins qu’il ait été modifié au préalable ( 21 ). De toute façon, la Cour pourra contrôler ex post la compatibilité ( 22 ) matérielle ou formelle de l’accord avec les traités UE et FUE si elle est saisie d’un recours en annulation ou d’un renvoi préjudiciel en validité.

    54.

    Il résulte de ce qui précède que la Cour est compétente pour contrôler la validité de l’acte du Conseil approuvant la conclusion d’un accord international ( 23 ), ce qui inclut le contrôle de la légalité interne de cette décision au regard de l’accord en cause ( 24 ). Dans ce contexte, la Cour peut contrôler la légalité de l’acte du Conseil (en ce compris les dispositions de l’accord international dont il approuve la conclusion) au regard des traités UE et FUE ainsi que des principes constitutionnels qui en découlent, dont le respect des droits fondamentaux ( 25 ) et du droit international ( 26 ) conformément à l’article 3, paragraphe 5, TUE.

    55.

    Par voie de conséquence, la Cour est compétente pour annuler (dans le cas d’un recours en annulation) ou déclarer invalide (dans le cas d’une demande de décision préjudicielle) la décision du Conseil approuvant la conclusion de l’accord international en cause ( 27 ) et pour déclarer l’incompatibilité de cet accord avec les traités UE et FUE, ainsi qu’avec les principes constitutionnels qui en découlent.

    56.

    Dans ces cas de figure, l’accord international continue à lier les parties en droit international et il incombe aux institutions de l’Union d’éliminer les incompatibilités entre cet accord et les traités UE et FUE ainsi qu’avec les principes constitutionnels qui en découlent ( 28 ). Si l’élimination des incompatibilités s’avère impossible, ils doivent dénoncer l’accord ou s’en retirer ( 29 ), conformément à la procédure prévue aux articles 56 et 65 à 68 de la convention de Vienne sur le droit des traités ( 30 ) et, en l’occurrence, à l’article 14 de l’accord de pêche. En ce sens, l’analogie peut être faite avec l’article 351 TFUE qui vise la même situation à l’égard des traités conclus par les États membres avant leur adhésion à l’Union.

    57.

    Enfin, il convient de préciser que le principe énoncé par la Cour internationale de justice dans l’affaire de l’or monétaire pris à Rome en 1943 ( 31 ) et visé par la quatrième question préjudicielle, selon lequel cette juridiction ne peut exercer sa compétence pour trancher un différend entre deux États lorsque, pour le faire, elle doit examiner la conduite d’un État tiers qui n’est pas partie à la procédure ( 32 ), n’est pas, comme le soutiennent le Conseil et la Commission, pertinent en l’occurrence. En effet, ce principe, qui figure dans le statut de la Cour internationale de justice, n’existe pas dans le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et, de toute façon, ne pourrait exister en droit de l’Union puisqu’il exclurait d’office la possibilité de contrôler la compatibilité avec les traités UE et FUE des accords internationaux conclus par l’Union sans la participation à la procédure devant elle de l’État tiers qui a signé l’accord avec l’Union.

    58.

    Eu égard à ces considérations, les questions préjudicielles cherchent à établir :

    la validité du règlement no 764/2006, en ce qu’il approuve l’accord de pêche « accordant aux pêcheurs de [l’Union] des possibilités de pêche dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » ( 33 ) ;

    la validité de la décision 2013/785, en ce qu’elle approuve le protocole de 2013 « accordant aux navires de l’Union des possibilités de pêche dans les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc en matière de pêche » ( 34 ) et fixant la contrepartie financière pour cette exploitation ;

    la validité du règlement no 1270/2013, en ce qu’il répartit entre les États membres les possibilités de pêche au titre du protocole de 2013, et

    la compatibilité de l’accord de pêche et du protocole de 2013 avec les traités UE et FUE ainsi qu’avec les principes constitutionnels qui en découlent, dont notamment la protection des droits fondamentaux et le respect du droit international que l’article 3, paragraphe 5, TUE impose à l’action extérieure de l’Union.

    59.

    Pour la suite, je me référerai à l’ensemble de ces actes comme les « actes contestés ».

    B. Sur le fond

    1.   Observations liminaires

    60.

    Tant pour les parties au litige au principal que pour les intervenants devant la Cour, les actes contestés sont applicables au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes. Toutefois, cette constatation ne ressort pas de façon évidente du libellé de l’accord de pêche et du protocole de 2013. En effet, aucune de leurs dispositions ne mentionne expressément le Sahara occidental.

    61.

    Il convient donc d’examiner d’abord si les actes contestés sont applicables au Sahara occidental parce que, dans le cas contraire, leur validité ne pourrait être contestée au regard des normes invoquées par la juridiction de renvoi et WSC ( 35 ).

    62.

    À mon avis, une interprétation de l’accord de pêche et du protocole de 2013 conforme aux règles d’interprétation des traités énoncées à l’article 31 de la convention de Vienne sur le droit des traités aboutit à la conclusion qu’ils sont bien applicables au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes, et ce pour les raisons qui suivent.

    63.

    Selon l’article 31, paragraphe 1, de cette convention, « un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but ». Selon son paragraphe 2, « le contexte comprend, outre le texte, préambule et annexes inclus[,] tout accord ayant rapport au traité et qui est intervenu entre toutes les parties à l’occasion de la conclusion du traité ». Le contexte comprend donc le protocole de 2006 qui n’est plus en vigueur mais dont la teneur était, en substance, en ce qui concerne le champ d’application de l’accord de pêche, identique à celle du protocole de 2013.

    64.

    L’article 31, paragraphe 3, de ladite convention impose également de tenir compte, en même temps que du contexte, notamment, « [d]e tout accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l’interprétation du traité ou de l’application de ses dispositions ». Par conséquent, pour interpréter le champ d’application de l’accord de pêche, il faut prendre en compte les dispositions pertinentes du protocole de 2013.

    65.

    En l’occurrence, conformément à son article 11, l’accord de pêche s’applique, en ce qui concerne le Royaume du Maroc, « au territoire du Maroc et aux eaux sous juridiction marocaine ». L’article 2, sous a), de cet accord définit les termes « zone de pêche marocaine » dans laquelle s’effectue l’exploitation halieutique prévue dans cet accord comme « les eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » ( 36 ).

    66.

    Ces termes sont spécifiés aux appendices 2 et 4 de l’annexe au protocole de 2013. À la demande de la Cour, la Commission a produit six cartes qui démontrent l’étendue des zones de pêches conformément aux spécifications données à ces appendices :

    Image

    67.

    Comme il ressort de ces cartes, la zone de pêche no 3 (cat. 3 : pêche artisanale au sud) s’étend au sud du parallèle 30°40’00”N et au‑delà de 3 milles marins ; la zone de pêche no 4 (cat. 4 : pêche démersale) s’étend au sud du parallèle 29°N et au-delà de l’isobathe de 200 mètres pour les chalutiers et au-delà de 12 milles marins pour les palangriers ; la zone de pêche no 5 (cat. 5 : pêche thonière) couvre toute la zone atlantique du Maroc au-delà de 3 milles marins, à l’exception du périmètre de protection situé à l’est de la ligne joignant les points 33°30’N/7°35’W et 35°48’N/6°20’W, et la zone de pêche no 6 (cat. 6 : pêche pélagique industrielle) s’étend au sud du parallèle 29°N et au-delà de 15 milles marins pour les chalutiers congélateurs et au-delà de 8 milles marins pour les chalutiers RSW ( 37 ).

    68.

    En ce qui concerne cette dernière zone de pêche, il ressort du procès-verbal de la troisième commission mixte de l’accord de pêche, qui s’est réunie à Bruxelles les 17 et 18 mars 2008, que l’Union et le Royaume du Maroc ont convenu que l’activité de cette zone ne pouvait opérer qu’au sud du parallèle 26°07’N. En effet, le chapitre III de l’annexe au protocole de 2013 ainsi que l’appendice 4 à cette annexe permettent au Royaume du Maroc de modifier unilatéralement ces coordonnées géographiques à condition de communiquer toute modification à la Commission un mois à l’avance.

    69.

    La limite méridionale de ces zones de pêche n’est précisée ni dans l’accord de pêche ni dans le protocole de 2013 ( 38 ). Étant donné que la frontière entre le Sahara occidental et le Royaume du Maroc se situe au parallèle 27°42’N (Pointe Stafford) ( 39 ), c’est uniquement la zone de pêche no 6 qui couvre, par accord ultérieur entre l’Union et le Royaume du Maroc, explicitement les eaux adjacentes au Sahara occidental. Toutefois, il apparaît des cartes produites par la Commission que les zones de pêche nos 3 à 5 vont jusqu’à la frontière maritime entre la République islamique de Mauritanie et le Sahara occidental couvrant ainsi les eaux adjacentes à ce dernier.

    70.

    Par ailleurs, les quantités de captures par zone de pêche fournies par la Commission lors de l’audience confirment que l’accord de pêche et le protocole de 2013 s’appliquent presque exclusivement aux eaux adjacentes au Sahara occidental ( 40 ). Selon les chiffres de la Commission, les captures effectuées dans la seule zone de pêche no 6 représentent environ 91,5 % des captures totales effectuées dans le cadre de l’accord de pêche et du protocole de 2013. Ceci démontre clairement que l’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013 aux eaux adjacentes au Sahara occidental est exactement ce que les parties ont envisagé dès le départ.

    71.

    En ce qui concerne l’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013 sur la terre ferme, l’article 3, paragraphe 1, sous a), ii), du protocole de 2013 prévoit qu’une partie de la contrepartie financière payée par l’Union au Royaume du Maroc et équivalente à 14 millions d’euros est versée en tant qu’appui à la politique sectorielle de la pêche au Royaume du Maroc, ce qui, selon le Conseil et la Commission, inclut des investissements en infrastructure faits sur le territoire du Sahara occidental. De plus, le chapitre X de l’annexe du protocole de 2013 prévoit qu’une partie des captures doit être débarquée dans les ports marocains, ce qui, selon le Conseil et la Commission, inclut les ports du Sahara occidental. Enfin, l’accord de pêche et le protocole de 2013 doivent, selon le Conseil et la Commission, bénéficier au peuple du Sahara occidental, ce qui constitue en soi une application sur la terre ferme de cet accord et de ce protocole.

    72.

    En deuxième lieu, la constatation que l’accord de pêche est applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes est soutenue par sa genèse. En effet, comme le relève la Commission, l’accord de pêche tire son origine des accords de pêche conclus avec le Royaume du Maroc par le Royaume d’Espagne avant son adhésion à l’Union ( 41 ) qui visaient les eaux adjacentes au Sahara occidental en tant qu’eaux sous juridiction marocaine ( 42 ). Je relève également que les accords de pêche conclus entre l’Union et le Royaume du Maroc à partir de 1988 ont déjà donné lieu à plusieurs affaires concernant la pêche dans les eaux adjacentes au Sahara occidental ( 43 ). En ce sens, j’estime que, comme leurs prédécesseurs, l’accord de pêche et le protocole de 2013 ne font que reprendre et poursuivre les activités de pêche du Royaume d’Espagne déjà existantes dans les eaux adjacentes au Sahara occidental avant l’adhésion de cet État membre à l’Union.

    73.

    En troisième et dernier lieu, l’article 31, paragraphe 4, de ladite convention donne une importance primordiale aux intentions des parties en précisant qu’« [u]n terme sera entendu dans un sens particulier s’il est établi que telle était l’intention des parties ». À mon avis, l’intention de l’Union et du Royaume du Maroc était que l’accord de pêche soit applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes en tant qu’eaux sous souveraineté ou juridiction marocaine. En 1976, le Royaume du Maroc a annexé la partie du Sahara occidental qui se trouve au nord de la ligne droite partant du point d’intersection de la côte atlantique avec le parallèle 24°N et se dirigeant vers le point d’intersection du parallèle 23°N avec le méridien 13°W ( 44 ), conformément à la convention relative au tracé de la frontière d’État établie entre la République islamique de Mauritanie et le Royaume du Maroc, conclue à Rabat le 14 avril 1976 ( 45 ). L’annexion du Sahara occidental par le Royaume du Maroc a été complétée en 1979 par le rattachement de la partie méridionale du Sahara occidental ( 46 ) que cette convention avait octroyée à la République islamique de Mauritanie. Le Royaume du Maroc considère ainsi que le Sahara occidental relève de sa souveraineté et que, par conséquent, les eaux y adjacentes sont couvertes par le champ d’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013.

    74.

    En ce qui concerne l’Union, il relève clairement des déclarations faites par plusieurs États membres au sein du Conseil lors de l’approbation du protocole de 2013 que tant celui-ci que l’accord de pêche sont applicables au Sahara occidental ( 47 ). C’était d’ailleurs la raison pour laquelle, comme l’expliquent la juridiction de renvoi et la Commission, le Parlement européen avait, dans un premier temps, bloqué la renégociation du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de pêche. C’est pour cette même raison que le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède ont voté contre l’approbation de la conclusion de ce protocole, que le Royaume des Pays-Bas ( 48 ), la République de Finlande et le Royaume-Uni se sont abstenus et que la République fédérale d’Allemagne, l’Irlande ainsi que la République d’Autriche ont exprimé des réserves ( 49 ).

    75.

    Dans ce contexte, contrairement à l’accord d’association ayant fait l’objet de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), l’intention des parties me paraît manifestement établie : l’accord de pêche et le protocole de 2013 sont applicables au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes. Il incombe donc à la Cour d’examiner si cette intention, mise en œuvre par les actes contestés, affecte leur légalité au regard de l’article 3, paragraphe 5, TUE et des règles du droit international invoquées par WSC.

    2.   L’invocabilité des règles du droit international afin de contester la validité des actes contestés

    a)   Principes généraux

    76.

    L’argumentation de WSC vise, en substance, à mettre en cause les actes contestés sous deux aspects. En premier lieu, WSC soutient que l’Union ne peut légalement conclure avec le Royaume du Maroc des accords applicables au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes. En second lieu, même à supposer que l’Union puisse légalement conclure pareils accords, WSC soutient que les actes contestés sont, quant à leur contenu, invalides au regard de l’article 3, paragraphe 5, TUE et du droit international. Pour les besoins de son argumentation, WSC invoque plusieurs règles du droit international, dont notamment le droit des peuples à l’autodétermination, l’article 73 de la charte des Nations unies, le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et le droit international humanitaire en ce que ses règles visent la conclusion des accords internationaux applicables aux territoires occupés et l’exploitation de leurs ressources naturelles. Lors de l’audience, elle a précisé qu’elle ne contestait pas la validité des actes contestés au regard du droit international de la mer.

    77.

    Dans ce contexte, sur la base des principes énoncés dans l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, la Comader, les gouvernements espagnol, français et portugais, le Conseil ainsi que la Commission contestent la possibilité de WSC d’invoquer ces règles de droit international.

    78.

    Il convient de rappeler que, selon les points 51 à 55 de l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), l’invocabilité des règles de droit international conventionnel est soumise aux conditions suivantes : l’Union doit être liée par celles-ci ; leur contenu doit être inconditionnel et suffisamment précis, et, enfin, leur nature et leur économie ne doivent pas s’opposer au contrôle juridictionnel de l’acte contesté.

    79.

    Aux termes des points 101 à 103 et 107 de l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), l’invocabilité des règles de droit international coutumier est soumise aux conditions suivantes : celles-ci doivent être susceptibles de mettre en cause la compétence de l’Union pour adopter l’acte contesté et ce dernier doit être susceptible d’affecter des droits que le justiciable tire du droit de l’Union ou de créer à son égard des obligations au regard de ce droit.

    80.

    À mon avis, si les particuliers doivent satisfaire à certaines conditions afin de pouvoir invoquer les règles du droit international dans le cadre du contrôle juridictionnel des actes de l’Union, les principes énoncés dans cet arrêt ne sont pas automatiquement transposables à la présente affaire. En effet, ces principes visent le contrôle juridictionnel des actes unilatéraux de droit dérivé purement internes (règlements, directives, etc.) ( 50 ) alors que, comme le relève la Commission ( 51 ), la présente affaire pose la question distincte de la validité d’un accord international conclu par l’Union au travers de l’acte approuvant sa conclusion (droit dérivé conventionnel) ( 52 ).

    81.

    À cet égard, il convient de rappeler que la qualité de membre de l’Organisation des Nations unies (ONU) est réservée aux États ( 53 ). N’étant pas membre de l’ONU, l’Union n’est pas partie au statut de la Cour internationale de justice, comme le prévoit pour les membres de l’ONU, l’article 93 de la charte des Nations unies. De plus, l’article 34 du statut de la Cour internationale de justice restreint aux seuls États la possibilité de se présenter devant elle.

    82.

    Il s’ensuit que le contrôle de l’action extérieure de l’Union ne relève pas de la compétence d’une juridiction internationale ni même de la Cour internationale de justice. Par conséquent, même dans l’hypothèse où son action violerait les normes impératives du droit international au sens de l’article 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités ou les obligations du droit international coutumier dites « erga omnes » ( 54 ), aucune juridiction internationale ne serait compétente pour statuer sur pareille violation.

    83.

    Toutefois, certains accords internationaux permettent à l’Union de « se soumettre aux décisions d’une juridiction créée ou désignée en vertu de tels accords, pour ce qui concerne l’interprétation et l’application de leurs dispositions », faculté que lui reconnaît la jurisprudence de la Cour ( 55 ).

    84.

    Tel n’est pas le cas de l’accord de pêche dont l’article 13, intitulé « Règlement des différends », prévoit que « [l]es parties contractantes se consultent en cas de différends concernant l’interprétation ou l’application du présent accord ». Dès lors qu’il n’a pas créé une juridiction, indépendante et impartiale, compétente pour résoudre les éventuels différends nés dans le cadre de l’accord de pêche, leur règlement dépend de la bonne volonté des parties, chacune d’elles pouvant donc facilement le bloquer ( 56 ).

    85.

    Si donc la Cour est, par défaut, la seule juridiction compétente pour contrôler l’action extérieure de l’Union et vérifier que cette action contribue « au strict respect […] du droit international [et] au respect des principes de la charte des Nations unies » ( 57 ), il n’est guère étonnant qu’elle ait jugé que « l’exercice des compétences dévolues aux institutions de [l’Union] dans le domaine international ne saurait être soustrait au contrôle juridictionnel de validité » ( 58 ).

    86.

    Dans ce contexte, si les particuliers doivent remplir certaines conditions pour pouvoir invoquer le droit international afin de contester la compatibilité d’un accord international conclu par l’Union avec l’article 3, paragraphe 5, TUE, ces conditions ne peuvent être telles qu’elles rendent en pratique impossible un contrôle juridictionnel effectif de l’action extérieure de l’Union.

    87.

    Or, tel serait, à mon avis, le cas si les principes énoncés dans le cas de figure visé dans l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), étaient transposés tels quels au contrôle de validité des actes contestés.

    88.

    En effet, certaines des règles du droit international invoquées dans la présente affaire sont à la fois des règles du droit coutumier et des règles du droit conventionnel, puisqu’elles ont été codifiées dans plusieurs traités et conventions internationales, alors que d’autres règles, comme le droit à l’autodétermination, font partie du droit international général ( 59 ) et, à ce titre, ne relèvent pas exclusivement du droit international conventionnel ou coutumier dont l’invocabilité a été traitée par la Cour dans son arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864).

    89.

    De plus, si c’est dans le but de ne pas exclure d’office l’invocabilité des règles du droit international coutumier que la Cour a établi des conditions d’invocabilité différentes de celles du droit international conventionnel, il serait contraire à ce même objectif, comme le proposent le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, les gouvernements espagnol, français et portugais ainsi que le Conseil et la Commission, de subordonner l’invocabilité des règles du droit international général aux conditions d’invocabilité des règles du droit international coutumier, dans le cas où elles remplissent les conditions d’invocabilité énoncées pour les règles du droit international conventionnel.

    90.

    Pareille solution exclurait d’office l’invocabilité pour les particuliers de règles, pourtant essentielles, du droit international, telles que les normes impératives du droit international général ou les obligations du droit international dites « erga omnes », et ce pour les raisons suivantes.

    91.

    Tout d’abord, selon la première des conditions d’invocabilité des règles du droit international coutumier retenue par la Cour dans le cas où l’acte contesté est un acte de droit dérivé unilatéral purement interne, les règles invoquées doivent être susceptibles de mettre en cause la compétence de l’Union pour adopter cet acte. Je rappelle qu’était en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), ainsi que dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts cités au point 107 de cet arrêt, la compétence de l’Union pour adopter l’acte contesté, dont il était allégué qu’il produisait des effets extraterritoriaux.

    92.

    Dans la présente affaire, personne ne conteste la compétence ( 60 ) de l’Union pour conclure l’accord de pêche et le protocole de 2013 ou d’adopter le règlement no 764/2006, la décision 2013/785 et le règlement no 1270/2013. Au contraire, WSC conteste la compatibilité de l’accord de pêche et du protocole de 2013 avec le droit primaire de l’Union ainsi que la légalité interne du règlement no 764/2006, de la décision 2013/785 et du règlement no 1270/2013. Il serait absurde de limiter le contrôle des actes contestés uniquement à la seule question de compétence de l’Union et d’exclure d’office leur contrôle matériel à l’égard des normes les plus essentielles du droit international qui sont invoquées dans la présente affaire.

    93.

    Ensuite, l’application de la seconde condition d’invocabilité des règles du droit international coutumier dans le cadre d’une affaire comme celle en cause s’avère encore plus problématique. Selon cette condition, l’acte contesté doit être susceptible d’affecter des droits que le justiciable tire du droit de l’Union ou de créer à son égard des obligations au regard de ce droit ( 61 ).

    94.

    En l’occurrence, les actes contestés ne confèrent des droits et des obligations qu’à l’Union et au Royaume du Maroc. En effet, je ne vois aucune disposition dans ces actes qui créerait des droits ou des obligations à l’égard des particuliers, autres que, potentiellement (mais j’en doute), les armateurs de l’Union dont les navires détiennent une licence de pêche délivrée dans le cadre de l’accord de pêche. Dès lors, à supposer même qu’une catégorie de particuliers puisse déclencher le contrôle juridictionnel des actes contestés selon cette condition, elle se composerait exclusivement de ceux qui profitent de l’accord de pêche et n’ont donc aucun intérêt à le contester en justice.

    95.

    Enfin, pourquoi limiter le contrôle juridictionnel « au point de savoir si les institutions de l’Union, en adoptant l’acte en cause, ont commis des erreurs manifestes d’appréciation quant aux conditions d’application de ces principes » ( 62 ), lorsque ces principes revêtent « le même degré de précision qu’une disposition d’un accord international » ( 63 ) en raison de leur codification ?

    96.

    En conclusion sur ce point, j’estime que dans le cadre du contrôle juridictionnel des accords internationaux conclus par l’Union ainsi que des actes de l’Union qui approuvent ou mettent en œuvre pareils accords, l’invocabilité des règles du droit international doit être soumise certes à certaines conditions, mais indépendamment de leur appartenance formelle à une ou plusieurs sources du droit international selon la classification faite à l’article 38, paragraphe 1, du statut de la Cour internationale de justice. Ces conditions sont celles énoncées aux points 53 à 55 de l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), selon lesquels l’Union doit être liée par la règle invoquée, dont le contenu doit être inconditionnel et suffisamment précis et, enfin, dont la nature et l’économie ne s’opposent pas au contrôle juridictionnel de l’acte contesté.

    97.

    C’est en référence à ces principes que j’examinerai l’invocabilité des règles du droit international invoquées par WSC qui sont pertinentes dans la présente affaire.

    b)   Sur l’invocabilité des règles de droit international applicables à la conclusion d’accords internationaux visant l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental

    98.

    Par les actes contestés, l’Union a conclu avec le Royaume du Maroc et mis en œuvre un accord international qui prévoit l’exploitation par l’Union des ressources halieutiques du Sahara occidental. Dans ce contexte, j’examinerai l’invocabilité des règles du droit international qui pourraient mettre en cause tant la conclusion avec le Royaume du Maroc d’un accord international applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes que l’exploitation des ressources naturelles de ce territoire. Ce faisant, je prends en compte les faits que, le Royaume du Maroc se considère le souverain du Sahara occidental, que du point de vue des institutions de l’Union, le Royaume du Maroc est la puissance administrante de facto du Sahara occidental et que pour la juridiction de renvoi et WSC, il est la puissance occupante du Sahara occidental.

    1) Le droit à l’autodétermination

    i) Le droit à l’autodétermination fait partie des droits de l’homme

    99.

    D’emblée, je considère que le droit à l’autodétermination n’est pas soumis aux conditions d’invocabilité des règles du droit international parce qu’il fait partie des droits de l’homme.

    100.

    Comme la Cour l’a jugé aux points 284 et 285 de l’arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461), le respect des droits de l’homme constitue une condition de la légalité des actes de l’Union et des mesures incompatibles avec le respect de ceux-ci ne sauraient être admises dans l’ordre juridique de l’Union. Ainsi, les obligations qu’impose un accord international ne sauraient avoir pour effet de porter atteinte aux principes constitutionnels des traités UE et FUE, tels que l’article 3, paragraphe 5, TUE et l’article 21 TUE, selon lesquels l’action extérieure de l’Union doit respecter les droits de l’homme. Il incombe donc à la Cour d’assurer ce respect dans le cadre du système complet de voies de recours qu’établissent les traités UE et FUE.

    101.

    Selon une jurisprudence constante de la Cour, « les droits fondamentaux font partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect. À cet effet, la Cour s’inspire des traditions constitutionnelles communes aux États membres ainsi que des indications fournies par les instruments internationaux concernant la protection des droits de l’homme auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré » ( 64 ).

    102.

    Tous les États membres (et le Royaume du Maroc) sont parties au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) ( 65 ) et au pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ( 66 ), signés à New York le 16 décembre 1966, dont l’articler 1er commun dispose ce qui suit :

    « 1.   Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

    2.   Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l’intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance.

    3.   Les États parties au présent [p]acte, y compris ceux qui ont la responsabilité d’administrer des territoires non autonomes et des territoires sous tutelle, sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et de respecter ce droit, conformément aux dispositions de la [c]harte des Nations [u]nies. » ( 67 )

    103.

    De plus, le titre VIII de l’acte final d’Helsinki de 1975, intitulé « Égalité de droits des peuples et droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », auquel se réfère l’article 21, paragraphe 2, sous c), TUE et auquel tous les États membres sont parties, consacre le droit à l’autodétermination dans des termes presque identiques à ceux de l’article 1er commun au PIDESC et au PIDCP. Ce titre dispose ce qui suit :

    « Les États participants respectent l’égalité de droits des peuples et leur droit à disposer d’eux-mêmes, en agissant à tout moment conformément aux buts et aux principes de la [c]harte des Nations [u]nies et aux normes pertinentes du droit international, y compris celles qui ont trait à l’intégrité territoriale des États.

    En vertu du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, tous les peuples ont toujours le droit, en toute liberté, de déterminer, lorsqu’ils le désirent et comme ils le désirent, leur statut politique interne et externe, sans ingérence extérieure, et de poursuivre à leur gré leur développement politique, économique, social et culturel.

    Les États participants réaffirment l’importance universelle du respect et de l’exercice effectif par les peuples de droits égaux et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, pour le développement de relations amicales entre eux de même qu’entre tous les États ; ils rappellent également l’importance de l’élimination de toute violation de ce principe, quelque forme qu’elle prenne. »

    104.

    Le droit à l’autodétermination est donc un droit de l’homme qui a été reconnu comme tel par plusieurs instances et instruments internationaux, ainsi que par la doctrine ( 68 ). Selon la Cour internationale de justice, les bénéficiaires de ce droit sont les peuples des territoires non autonomes au sens de l’article 73 de la charte des Nations unies et ceux qui sont soumis à la « subjugation » ( 69 ), à la domination ou à l’exploitation étrangères ( 70 ).

    ii) Le droit à l’autodétermination en tant que principe du droit international général, du droit international conventionnel et obligation erga omnes

    105.

    De toute façon, en tant que règle du droit international général ( 71 ) et obligation erga omnes ( 72 ) qui est codifiée dans plusieurs instruments internationaux conventionnels ( 73 ), le droit à l’autodétermination remplit les critères d’invocabilité énoncés au point 96 des présentes conclusions, à savoir qu’il lie l’Union, que son contenu est inconditionnel et suffisamment précis et que sa nature et son économie ne s’opposent pas au contrôle juridictionnel des actes contestés.

    – L’Union est liée par le droit à l’autodétermination

    106.

    Comme la Cour l’a jugé dans son arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), l’Union est liée par le droit à l’autodétermination qui est un droit opposable erga omnes ainsi qu’un des principes essentiels du droit international ( 74 ). À ce titre, « [il] fait partie des règles de droit international applicables dans les relations entre l’Union et le Royaume du Maroc » ( 75 ).

    107.

    En effet, le droit à l’autodétermination est consacré à l’article 1er, paragraphe 2, de la charte des Nations unies ( 76 ). Or, l’article 3, paragraphe 5, TUE, l’article 21, paragraphe 1, TUE, l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), et les articles 23 TUE et 205 TFUE obligent l’Union à respecter les principes de la charte des Nations unies. La déclaration no 13 sur la politique étrangère et de sécurité commune, annexée à l’acte final de la conférence intergouvernementale qui a adopté le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007, énonce que « l’Union européenne et ses États membres demeureront liés par les dispositions de la [c]harte des Nations unies » ( 77 ).

    108.

    En outre, le droit à l’autodétermination figure parmi les principes de l’acte final d’Helsinki auxquels se réfère l’article 21, paragraphe 2, sous c), TUE ( 78 ).

    109.

    Enfin, comme il ressort de l’article 1er du protocole de 2013, sa mise en œuvre est soumise au respect des principes démocratiques et des droits de l’homme, ce qui inclut le respect du droit des peuples à l’autodétermination.

    – Le droit à l’autodétermination est une règle du droit international qui, du point de vue de son contenu, est inconditionnelle et suffisamment précise

    110.

    Comme la Cour l’a jugé au point 55 de l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864), « [cette] condition est remplie lorsque la disposition invoquée comporte une obligation claire et précise qui n’est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte ultérieur ».

    111.

    Comme le démontrent les points 90, 92 et 93 de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), où la Cour a appliqué ce droit au Sahara occidental et à son peuple sans émettre aucun doute sur son contenu ou sa portée, le droit à l’autodétermination remplit cette condition.

    112.

    Le fait que la Cour internationale de justice ait jugé que la construction d’un mur par Israël dans le territoire de la Cisjordanie constituait une violation du droit du peuple palestinien à l’autodétermination parce qu’il équivaudrait à une annexion de facto ( 79 ), démontre qu’il s’agit d’un droit dont le contenu est suffisamment clair et précis pour être appliqué.

    113.

    En effet, son contenu est suffisamment détaillé dans plusieurs instruments.

    114.

    À cet égard, la Cour internationale de justice a fondé, dans l’article 1er, paragraphe 2, de la charte des Nations unies, l’existence d’un « droit à l’indépendance au bénéfice des peuples des territoires non autonomes et de ceux qui étaient soumis à la subjugation, à la domination ou à l’exploitation étrangères » ( 80 ).

    115.

    Le contenu de ce droit est précisé par l’article 1er commun au PIDESC et au PIDCP ( 81 ) et les modalités de sa mise en œuvre détaillées dans plusieurs résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU, dont notamment les résolutions 1514 (XV), 1541 (XV) et 2625 (XXV) auxquelles s’est souvent référée la Cour internationale de justice ( 82 ).

    116.

    À cet égard, la résolution 1514 (XV) déclare ce qui suit :

    « 1.

    La sujétion des peuples à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la [c]harte des Nations [u]nies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiales.

    2.

    Tous les peuples ont le droit de libre détermination ; en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et poursuivent librement leur développement économique, social et culturel.

    […]

    4.

    Il sera mis fin à toute action armée et à toutes mesures de répression, de quelque sorte qu’elles soient, dirigées contre les peuples dépendants, pour permettre à ces peuples d’exercer pacifiquement et librement leur droit à l’indépendance complète, et l’intégrité de leur territoire national sera respectée.

    […] »

    117.

    La résolution 1541 (XV) établit les principes qui doivent guider les puissances administrantes dans l’exercice de leurs obligations découlant de l’article 73 de la charte des Nations unies. Il convient de noter que le principe VI prévoit que le droit à l’autodétermination est considéré comme ayant été exercé quand le territoire non autonome devient État indépendant et souverain ou quand il s’associe librement à un État indépendant ou quand il s’est intégré à un État indépendant.

    118.

    En ce qui concerne l’intégration à un État indépendant, le principe IX, sous b), prévoit que « [l]’intégration doit résulter du désir librement exprimé des populations du territoire, pleinement conscientes du changement de leur statut, la consultation se faisant selon des méthodes démocratiques et largement diffusées, impartialement appliquées et fondées sur le suffrage universel des adultes. L’[ONU] pourra, quand elle le jugera nécessaire, contrôler l’application de ces méthodes. »

    119.

    Enfin, la résolution 2625 (XXV) contient la déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la charte des Nations unies. Sous son titre « Le principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes », cette résolution impose à tous les États « le devoir de favoriser, conjointement avec d’autres États ou séparément, la réalisation du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, conformément aux dispositions de la [c]harte des Nations unies ».

    120.

    Elle impose également aux États « le devoir de s’abstenir de recourir à toute mesure de coercition qui priverait les peuples mentionnés ci-dessus dans la formulation du présent principe de leur droit à disposer d’eux-mêmes, de leur liberté et de leur indépendance ».

    121.

    En ce qui concerne plus particulièrement les territoires non autonomes, comme le Sahara occidental, cette résolution prévoit qu’ils possèdent « un statut séparé et distinct de celui du territoire de l’État qui l’administre ; ce statut séparé et distinct en vertu de la [c]harte [des Nations unies] existe aussi longtemps que le peuple […] du territoire non autonome n’exerce pas son droit à disposer de lui-même conformément à la [c]harte et, plus particulièrement, à ses buts et principes » ( 83 ).

    122.

    Enfin, dans ses dispositions générales, la résolution 2625 (XXV) déclare que « [l]es principes de la [c]harte qui sont inscrits dans la présente [d]éclaration constituent des principes fondamentaux du droit international, et demande en conséquence à tous les États de s’inspirer de ces principes dans leur conduite internationale et de développer leurs relations mutuelles sur la base du respect rigoureux desdits principes ».

    123.

    Il résulte de ce qui précède que le droit à l’autodétermination n’est subordonné, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte ultérieur.

    124.

    En l’occurrence, comme l’ont jugé la Cour internationale de justice et la Cour, le peuple du Sahara occidental bénéficie du droit à l’autodétermination ( 84 ).

    – La nature et l’économie du droit à l’autodétermination ne s’opposent pas au contrôle juridictionnel des actes contestés

    125.

    Au point 89 de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), la Cour a jugé que « la prise en compte [du droit à l’autodétermination] s’imposait au Tribunal » dans le cadre du recours en annulation de l’accord d’association introduit par le Front Polisario. Il s’ensuit que la nature et l’économie de ce droit ne s’opposent pas au contrôle juridictionnel des actes de l’Union.

    126.

    En effet, l’article 103 de la charte des Nations unies dispose qu’« [e]n cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations [u]nies en vertu de la présente [c]harte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront ».

    127.

    De plus, selon la Cour internationale de justice, « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes […] est un droit opposable erga omnes » ( 85 ). Cela implique que « de telles obligations, par leur nature même, “concernent tous les États” et, “[v]u l’importance des droits en cause, tous les États peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés” » ( 86 ). En ce sens, la Cour internationale de justice a jugé que « tous les États sont dans l’obligation de ne pas reconnaître la situation illicite découlant de la [violation d’une obligation erga omnes]. Ils sont également dans l’obligation de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de la situation créée par cette [violation]. II appartient par ailleurs à tous les États de veiller, dans le respect de la [c]harte des Nations [u]nies et du droit international, à ce qu’il soit mis fin aux entraves, résultant de la [violation], à l’exercice par le peuple [concerné, en l’occurrence le peuple palestinien] de son droit à l’autodétermination » ( 87 ).

    128.

    Enfin, le droit à l’autodétermination est souvent cité comme norme impérative du droit international dont la violation peut entraîner la nullité d’un traité international conformément à l’article 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités ( 88 ). Il convient de souligner que, lors de la procédure d’avis consultatif devant la Cour internationale de justice dans l’affaire du Sahara occidental, le Royaume d’Espagne a reconnu que le droit à l’autodétermination constituait en soi une norme impérative du droit international ( 89 ), alors que le Royaume du Maroc a reconnu la qualité de norme impérative au principe de décolonisation dont l’autodétermination est une modalité ( 90 ).

    129.

    Il en découle que, loin de s’opposer à un contrôle juridictionnel, l’économie et la nature du droit à l’autodétermination imposent à la Cour de vérifier que, par les actes contestés, l’Union a respecté ce droit, n’a pas reconnu une situation illicite découlant d’une violation de ce droit et n’a pas prêté aide ou assistance au maintien de pareille situation ( 91 ).

    2) Le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles

    130.

    Le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles garantit le droit souverain de chaque État et de chaque peuple de disposer librement des richesses et des ressources naturelles de son territoire dans l’intérêt du développement national et du bien-être de son peuple ( 92 ). Il est un principe du droit international coutumier ( 93 ) qui en tant que tel lie l’Union.

    131.

    Comme l’a fait observer le secrétaire général adjoint aux affaires juridiques de l’ONU, conseiller juridique, Hans Corell dans sa lettre datée du 29 janvier 2002, adressée au président du Conseil de sécurité de l’ONU, « [la] portée et [les] incidences juridiques précises [du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles] demeurent discutables » ( 94 ).

    132.

    En effet, son avis juridique atteste de cette difficulté puisqu’il utilise différents termes pour caractériser ce qu’est une exploitation de ressources naturelles au bénéfice du peuple du territoire non autonome. En effet, il parle d’une exploitation qui n’est pas faite « au mépris des besoins et intérêts de la population [du territoire non autonome], sans qu’elle en bénéficie » ( 95 ) ou d’une exploitation « au bénéfice des peuples [des territoires non autonomes], en leur nom, ou en consultation avec leurs représentants » ( 96 ) et conclut qu’une exploitation ne peut être entreprise « au mépris des intérêts et de la volonté du peuple [du territoire non autonome] » ( 97 ).

    133.

    Cela étant, malgré la variation de terminologie, il est certain qu’au minimum, l’exploitation de ressources naturelles doit être faite au bénéfice du peuple du territoire non autonome, ce qui suffit à confier à ce critère du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles un caractère suffisamment clair et précis.

    134.

    Il est également apte à fonder un contrôle juridictionnel des actes contestés. En effet, le Parlement avait initialement bloqué l’adoption du protocole finalement conclu en 2013 en estimant qu’il ne prévoyait pas de garanties suffisantes pour assurer que l’exploitation halieutique des ressources naturelles du Sahara occidental par les navires de l’Union serait faite au bénéfice du peuple de ce territoire. De plus, le Conseil et la Commission admettent que le critère du bénéfice pour le peuple du Sahara occidental est une condition de légalité des accords, conclus entre l’Union et le Royaume du Maroc, qui visent ce territoire.

    3) Les règles du droit international humanitaire applicables à la conclusion des accords internationaux visant l’exploitation des ressources naturelles du territoire occupé

    135.

    Pour la juridiction de renvoi, WSC ainsi que l’administration fiscale et douanière et le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales, la présence du Royaume du Maroc au Sahara occidental est une occupation ( 98 ).

    136.

    À cet égard, je relève que la question de savoir si le Royaume du Maroc est ou non la puissance occupante du Sahara occidental et s’il a conclu l’accord de pêche et le protocole de 2013 en cette qualité est une question d’interprétation du droit international à laquelle les conditions de son invocabilité en droit de l’Union ne s’appliquent pas.

    137.

    Toutefois, si le Royaume du Maroc est la puissance occupante du Sahara occidental (question à laquelle je reviendrai ultérieurement ( 99 )), les règles du droit international humanitaire, codifiées dans le règlement annexé à la convention de La Haye du 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre (ci-après le « règlement de La Haye de 1907 ») et dans la convention de Genève, du 12 août 1949, relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre (ci-après la « convention IV de Genève »), qui concernent la conclusion des accords internationaux applicables au territoire occupé (article 43 du règlement de La Haye de 1907 et article 64, second alinéa, de la convention IV de Genève) et l’exploitation des ressources naturelles de ce territoire (article 55 du règlement de La Haye de 1907), doivent être invocables.

    138.

    En effet, ces dispositions remplissent alors les critères d’invocabilité du droit international énoncés au point 96 des présentes conclusions.

    139.

    En premier lieu, les dispositions du règlement de La Haye de 1907 et de la convention IV de Genève constituent des principes intransgressibles et opposables erga omnes du droit international coutumier ( 100 ) et en tant que tels lient l’Union.

    140.

    En deuxième lieu, leur contenu est suffisamment précis et inconditionnel en ce que les obligations qu’il impose aux puissances occupantes ne sont subordonnées, dans leur exécution ou dans leur effets, à l’intervention d’aucun acte ultérieur.

    141.

    En troisième et dernier lieu, leur nature et leur économie en tant que règles intransgressibles ne s’opposent pas à un contrôle juridictionnel des actes contestés, et notamment du règlement no 764/2006, de la décision 2013/785 et du règlement no 1270/2013, en ce qu’ils approuvent et mettent en œuvre une exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental convenue entre l’Union et le Royaume du Maroc. Or, l’Union est dans l’obligation de ne pas reconnaître la situation illicite découlant d’une violation de ces dispositions et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de la situation créée par cette violation ( 101 ).

    142.

    Ayant déterminé les règles du droit international invocables, je vais maintenant examiner la compatibilité des actes contestés avec ces règles.

    3.   Sur la validité du règlement no 764/2006, de la décision 2013/785 et du règlement no 1270/2013 ainsi que sur la compatibilité de l’accord de pêche et du protocole de 2013 avec les règles invocables du droit international auxquelles renvoie l’article 3, paragraphe 5, TUE

    a)   Sur le respect, par les actes contestés, du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination ainsi que de l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation de ce droit et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation

    143.

    Par son arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), la Cour a jugé que l’accord d’association conclu entre l’Union et le Royaume du Maroc, qui selon son libellé s’applique au « territoire du Royaume du Maroc », n’est pas applicable au territoire du Sahara occidental puisque pareille application serait incompatible avec le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination ainsi qu’avec les articles 29 (application territoriale des traités) et 34 (principe de l’effet relatif des traités selon lequel les traités ne doivent ni nuire ni profiter aux tiers sans leur consentement) de la convention de Vienne sur le droit des traités ( 102 ).

    144.

    Selon le Conseil et la Commission, la présente affaire doit être distinguée de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973) en ce que, contrairement à l’accord d’association, l’accord de pêche et le protocole de 2013 sont applicables au Sahara occidental. En effet, selon leur lecture de cet arrêt, le problème de l’accord d’association était qu’il était appliqué au Sahara occidental sans y être juridiquement applicable, du fait que pareille application serait incompatible avec le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination ainsi qu’avec les articles 29 (application territoriale des traités) et 34 (principe de l’effet relatif des traités selon lequel les traités ne doivent ni nuire ni profiter aux tiers sans leur consentement) de la convention de Vienne sur le droit des traités. C’est sur la base de cette argumentation que la solution envisagée par le Conseil et la Commission, afin de rendre l’application de l’accord d’association au Sahara occidental conforme à l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973), serait d’étendre son champ d’application par accord sous forme d’échange de lettres entre l’Union et le Royaume du Maroc pour couvrir expressément le Sahara occidental.

    145.

    Je ne suis pas persuadé par cette argumentation. Si l’application au Sahara occidental d’un accord international conclu avec le Royaume du Maroc dont le champ d’application territorial ,n’inclut pas explicitement ce territoire était incompatible avec le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination, un accord international qui, comme l’accord de pêche et le protocole de 2013, est applicable au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes ( 103 ) et autorise une exploitation par l’Union ( 104 ) des ressources halieutiques du Sahara occidental le serait a fortiori aussi.

    146.

    Cet argument a fortiori me paraît suffisant pour constater une violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination. Par souci d’être complet, je voudrais ajouter que les actes contestés ne respectent pas le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination en ce qu’ils ne correspondent ni à une poursuite libre de son développement économique ni à une disposition libre de ses richesses et de ses ressources naturelles ( 105 ) et que, de toute façon, même s’ils ne violaient pas en eux-mêmes le droit à l’autodétermination, ils ne respecteraient pas l’obligation de l’Union de ne pas reconnaître une situation illicite découlant de la violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation ( 106 ).

    1) Sur l’existence d’une volonté libre du peuple du Sahara occidental de poursuivre par les actes contestés son développement économique et de disposer de ses richesses et de ses ressources naturelles

    147.

    L’inexistence d’une pareille volonté me paraît attestée par les faits suivants ( 107 ), dont la substance a été plaidée par WSC devant la juridiction de renvoi et a été rappelée par cette dernière ( 108 ).

    148.

    Le 20 décembre 1966, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la résolution 2229 (XXI) sur la question de l’Ifni et du Sahara espagnol, dans laquelle elle a « [r]éaffirm[é] le droit inaliénable d[u] peupl[e] [...] du Sahara espagnol à l’autodétermination » et a invité le Royaume d’Espagne, en sa qualité de puissance administrante, à arrêter le plus tôt possible « les modalités de l’organisation d’un référendum qui sera[it] tenu sous les auspices de l’[ONU] afin de permettre à la population autochtone du territoire d’exercer librement son droit à l’autodétermination ».

    149.

    Le 20 août 1974, le Royaume d’Espagne a informé l’ONU qu’il se proposait d’organiser, sous les auspices de celle-ci, un référendum au Sahara occidental ( 109 ).

    150.

    En mai 1975, malgré les difficultés rencontrées, la mission de visite de l’ONU au Sahara occidental « a été en mesure de conclure, après son séjour dans le territoire, que la majorité de la population à l’intérieur du Sahara espagnol était manifestement en faveur de l’indépendance » ( 110 ).

    151.

    Le 16 octobre 1975, la Cour internationale de justice, à la suite d’une demande présentée par l’Assemblée générale de l’ONU dans le cadre de ses travaux relatifs à la décolonisation du Sahara occidental, a rendu un avis consultatif selon lequel, d’une part, le Sahara occidental n’était pas un territoire sans maître (terra nullius) au moment de la colonisation par le Royaume d’Espagne et, d’autre part, même si certains éléments montraient l’existence, au moment de la colonisation espagnole, de liens juridiques d’allégeance entre le sultan du Maroc et certaines des tribus vivant sur le territoire du Sahara occidental, ils n’établissaient l’existence d’aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara occidental et le Royaume du Maroc ( 111 ). La Cour n’a donc pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU quant à la décolonisation du Sahara occidental et en particulier l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire ( 112 ).

    152.

    Dans un discours prononcé le jour de la publication dudit avis consultatif, « le roi du Maroc a considéré que “le monde entier a[vait] reconnu que le Sahara [occidental] était en [la] possession” du Royaume du Maroc et qu’il lui “incomb[ait] de récupérer pacifiquement ce territoire” », en appelant, à cette fin, à l’organisation d’une marche qui a réuni 350000 personnes, dite « marche verte » ( 113 ).

    153.

    Saisi par le Royaume d’Espagne, le Conseil de sécurité de l’ONU a demandé au secrétaire général de l’ONU, K. Waldheim, d’établir un rapport sur les résultats de ses consultations avec les parties concernées, dont notamment le Royaume du Maroc ( 114 ).

    154.

    La thèse de ce dernier, décrite dans ce rapport, était qu’un referendum n’était pas nécessaire parce que la Cour internationale de justice avait reconnu les liens historiques d’allégeance entre le sultan du Maroc et les tribus vivant traditionnellement sur le territoire du Sahara occidental et que, de toute façon, « les populations du territoire avaient déjà exercé en fait leur droit à l’autodétermination et s’étaient déclarées en faveur du retour du territoire au Maroc », la preuve la plus récente étant « le serment d’allégeance au roi du Maroc prononcé au nom des tribus sahraouies par [M. Khatri Ould Said a Ould El Jomaini], président de la Djemââ [ ( 115 )] » au cours d’une cérémonie ayant eu lieu le 4 novembre 1975 au palais d’Agadir ( 116 ).

    155.

    Suite aux protestations du Royaume d’Espagne contre la marche verte, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté, le 6 novembre 1975, la résolution 380 (1975) sur le Sahara occidental, dans laquelle il a « [d]éplor[é] l’exécution de la marche » annoncée et a « [d]emand[é] au [Royaume du] Maroc de retirer immédiatement du territoire du Sahara occidental tous les participants à [cette] marche ». Le Royaume du Maroc s’est conformé à cette demande quelques jours plus tard.

    156.

    Pendant la crise provoquée par la marche verte, le Royaume d’Espagne, le Royaume du Maroc et la République islamique de Mauritanie se sont engagés dans des négociations trilatérales qui ont abouti, le 14 novembre 1975, à la déclaration de principes de l’Espagne, du Maroc et de la Mauritanie au sujet du Sahara occidental ( 117 ) (ci-après l’« accord de Madrid »). Aux termes de cet accord, « l’Espagne procédera[it] immédiatement à l’instauration d’une administration temporaire dans le territoire [du Sahara occidental], à laquelle participeront le Maroc et la Mauritanie en collaboration avec la Djemââ, et à laquelle ser[aient] transmis les responsabilités et les pouvoirs [qu’elle avait sur ce territoire en qualité de puissance administrante] », ce qui a été fait.

    157.

    Ledit accord prévoyait également que « [l]a présence espagnole prendra[it] définitivement fin avant le 28 février 1976 » et que « [l]’opinion de la population sahraouie, exprimée par l’intermédiaire de la Djemââ, sera[it] respectée ».

    158.

    Par la suite, il est apparu que ledit accord était accompagné par une série d’accords entre ces trois pays, formellement nommés « actes de conversations », visant à régler certains aspects économiques du transfert de l’administration du Sahara occidental, dont notamment les droits de pêche dans les eaux adjacentes à ce territoire ( 118 ). L’existence de ces accords ainsi que le fait qu’ils visaient la pêche ont été confirmés par le ministre des Affaires étrangères du Royaume d’Espagne, M. Oreja Aguirre, lors du débat parlementaire sur la ratification de l’accord de pêche entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc de 1977 ( 119 ). Selon lui, il s’agissait de « lignes de conduite [ou] de directives » ( 120 ).

    159.

    L’existence d’un accord sur les droits de pêche dans les eaux adjacentes au Sahara occidental ainsi que le fait que son existence n’ait pas été communiquée au secrétaire général de l’ONU sont également confirmés par les câbles diplomatiques du secrétaire d’État des États-Unis ( 121 ).

    160.

    Le 28 novembre 1975, 67 membres de la Djemââ, dont son vice-président, réunis à El Guelta Zemmur (Sahara occidental) ont unanimement déclaré que la Djemââ, n’étant pas élue démocratiquement par le peuple du Sahara occidental, ne pourrait décider de son autodétermination. Ils ont unanimement décidé sa dissolution définitive ( 122 ).

    161.

    Le 10 décembre 1975, l’Assemblée générale de l’ONU a fait voter deux résolutions sur la question du Sahara occidental dont le contenu n’est pas identique ( 123 ), parce qu’il n’y avait pas de consensus sur les conséquences à déduire de l’accord de Madrid. En ce sens, la résolution 3458 A (XXX) ne fait aucune référence à cet accord et se réfère au Royaume d’Espagne « en tant que [p]uissance administrante » du Sahara occidental ( 124 ), alors que la résolution 3458 B (XXX) « prend acte » ( 125 ) de cet accord et ne se réfère pas à une puissance administrante mais aux « parties à l’accord de Madrid du 14 novembre 1975 » ( 126 ) et à « l’administration intérimaire » ( 127 ).

    162.

    Il convient toutefois de noter que parmi les 144 États participants à la 2435e séance plénière de l’Assemblée générale, 88 ont voté pour la résolution 3458 A (XXX), aucun contre, 41 se sont abstenus et 15 n’ont pas voté. Les États membres actuels de l’Union ont voté pour cette résolution, à l’exception de la République portugaise et du Royaume d’Espagne qui se sont abstenus ainsi que de la République de Malte qui n’a pas voté. Le Royaume du Maroc n’a pas voté non plus.

    163.

    Plus contestée, la résolution 3458 B (XXX) n’a été approuvée que par 56 États, alors que 42 États ont voté contre, 34 se sont abstenus et 12 n’ont pas voté. Seuls 11 des États membres actuels de l’Union ont voté pour cette résolution ( 128 ), 10 ont voté contre ( 129 ), 6 se sont abstenus ( 130 ) et un n’a pas voté ( 131 ). Le Royaume du Maroc a voté pour.

    164.

    Malgré leurs divergences, les deux résolutions « réaffirme[nt] le droit inaliénable du peuple du Sahara [occidental] à l’autodétermination » ( 132 ) conformément à la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU et elles convergent sur le fait que ce droit doit être exercé de façon libre ( 133 ).

    165.

    De plus, la résolution 3458 A (XXX) prévoit que le droit à l’autodétermination doit être exercé « sous la supervision de l’[ONU] » et « [p]rie le [s]ecrétaire général, agissant en consultation avec le [g]ouvernement espagnol, en tant que [p]uissance administrante, […] de prendre les dispositions nécessaires à la supervision de l’acte d’autodétermination » ( 134 ).

    166.

    Dans le même esprit, la résolution 3458 B (XXX) prévoit l’exercice par le peuple du Sahara occidental de son droit à l’autodétermination « au moyen d’une consultation libre organisée avec le concours d’un représentant de l’[ONU] désigné par le [s]ecrétaire général » ( 135 ).

    167.

    Dès la fin de 1975, le Royaume d’Espagne a entamé le retrait de son administration du Sahara occidental. Tandis que les troupes espagnoles se retiraient, les forces marocaines et mauritaniennes pénétraient le territoire du Sahara occidental. En certains endroits, il y a eu affrontement armé entre leurs forces et celles du Front populaire pour la libération de la saguia-el-hamra et du rio de oro (Front Polisario) ( 136 ).

    168.

    Lors d’une conférence de presse en février 1976, M. Olof Rydbeck, ambassadeur suédois auprès de l’ONU et envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, a déclaré que « telle qu’elle [était], la situation militaire [au Sahara occidental] rend[ait] une consultation utile des Sahraouis très difficile, voire impossible » ( 137 ).

    169.

    Par son mémorandum du 25 février 1976 adressé au secrétaire général de l’ONU, le Royaume d’Espagne l’a informé qu’il avait décidé de mettre définitivement fin à sa présence au Sahara occidental le lendemain (26 février 1976) et qu’une séance de la Djemââ avait été convoquée pour ce jour au cours de laquelle le gouverneur espagnol, agissant en qualité de membre de l’administration provisoire, informerait celle-ci de cette décision ( 138 ).

    170.

    Le 26 février 1976, le Royaume d’Espagne a mis définitivement fin à sa présence sur le territoire du Sahara occidental et par sa lettre datée de ce jour adressée au secrétaire général de l’ONU s’est déclaré « dégagé[] de toute responsabilité de caractère international en ce qui concerne l’administration [du Sahara occidental] en cessant de participer à l’administration provisoire qui y a été mise en place » ( 139 ) et a affirmé que « [l]a décolonisation du Sahara occidental sera achevée lorsque la population sahraouie aura pu faire connaître ses vues de manière valable » ( 140 ).

    171.

    Le même jour, malgré sa dissolution décidée par 67 de ses membres, la Djemââ a approuvé « [la] réintégration [du Sahara occidental] au Maroc et à la Mauritanie » et a « exprim[é] ainsi l’opinion unanime des populations sahraouies et de toutes les tribus dont elle est l’émanation et le représentant authentique et légitime » ( 141 ). Du point de vue du Royaume du Maroc, cette décision est la concrétisation de la disposition de l’accord de Madrid selon laquelle « [l]’opinion de la population sahraouie, exprimée par l’intermédiaire de la Djemââ, sera respectée ».

    172.

    En ce qui concerne cette réunion de la Djemââ, ni le Royaume d’Espagne ni l’ONU ne l’ont reconnue comme l’exercice du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination, conforme aux résolutions 3458 A et B (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU ( 142 ).

    173.

    Selon le mémorandum daté du 25 février 1975 que le Royaume d’Espagne a adressé au secrétaire général de l’ONU, « cette séance ne [tiendra] pas lieu de consultation populaire telle que celle-ci est prévue dans les accords de Madrid du 14 novembre 1975 et dans la résolution 3458 B (XXX) de l’Assemblée générale, à moins que les conditions nécessaires ne soient remplies, y compris, en particulier, la présence d’un représentant de l’[ONU] nommé par [le secrétaire général] conformément au paragraphe 4 de la résolution susmentionnée » ( 143 ).

    174.

    Dans sa réponse au mémorandum du 25 février 1975 du Royaume d’Espagne, le secrétaire général de l’ONU a rappelé les paragraphes 7 et 8 de la résolution 3458 A (XXX) ainsi que le paragraphe 4 de la résolution 3458 B (XXX) et a conclu comme suit :

    « Il apparaît, d’après les paragraphes cités ci-dessus, que ni le [g]ouvernement espagnol, en sa qualité de [p]uissance administrante, ni l’administration intérimaire, dont [le Royaume d’]Espagne est membre, n’ont pris les mesures nécessaires pour assurer aux populations du Sahara occidental l’exercice du droit à l’autodétermination. En conséquence, même si le temps l’avait permis et si les éclaircissements nécessaires avaient été fournis concernant la réunion de la Djemââ dont vous m’avez fait savoir hier que votre gouvernement n’était pas informé, la présence à cette réunion d’un représentant de l’[ONU] nommé par moi ne constituerait pas en soi une application des résolutions de l’Assemblée générale mentionnées ci-dessus » ( 144 ).

    175.

    Le 14 avril 1976, le Royaume du Maroc a conclu avec la République islamique de Mauritanie un traité de partition du territoire du Sahara occidental ( 145 ) et a formellement annexé les provinces qui lui ont été attribuées par ce traité ( 146 ).

    176.

    Un conflit armé avait entre-temps éclaté dans cette région entre le Royaume du Maroc, la République islamique de Mauritanie et le Front Polisario.

    177.

    En mai 1979, la République islamique de Mauritanie a informé le secrétaire général de l’ONU qu’elle était disposée à appliquer les dispositions des résolutions 3458 A (XXX) et 3458 B (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU et à étudier les voies et les moyens de parvenir à l’exercice du droit à l’autodétermination au Sahara occidental ( 147 ). Toutefois, « [d]epuis juillet 1978, le [g]ouvernement marocain a[vait] à plusieurs reprises déclaré qu’il ne céderait aucune de “ses provinces sahariennes recouvrées” et qu’il n’accepterait pas la création d’un mini-État contrôlé par le Front [Polisario] dans le secteur mauritanien du Sahara occidental » ( 148 ).

    178.

    Le 10 août 1979, la République islamique de Mauritanie a conclu un accord de paix avec le Front Polisario, en vertu duquel elle a renoncé à toute revendication territoriale sur le Sahara occidental ( 149 ). Le Royaume du Maroc a immédiatement pris le contrôle du territoire évacué par les forces mauritaniennes ( 150 ) et a procédé à son annexion ( 151 ).

    179.

    Le 21 novembre 1979, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté la résolution 34/37 sur la question du Sahara occidental, dans laquelle elle a « [r]éaffirm[é] le droit inaliénable du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et à l’indépendance, conformément à la [c]harte de l’[ONU] [...] et aux objectifs de [s]a résolution 1514 (XV) », elle a « [d]éplor[é] vivement l’aggravation de la situation découlant de la persistance de l’occupation du Sahara occidental par le Maroc », a « [d]emand[é] instamment au Maroc de s’engager lui aussi dans la dynamique de la paix et de mettre fin à l’occupation du territoire du Sahara occidental » et a « [r]ecommand[é] à cet effet que le [Front Polisario], représentant du peuple du Sahara occidental, participe pleinement à toute recherche d’une solution politique juste, durable et définitive de la question du Sahara occidental, conformément aux résolutions et déclarations de l’[ONU] » ( 152 ).

    180.

    Le conflit armé entre le Royaume du Maroc et le Front Polisario s’est poursuivi jusqu’à ce que, le 30 août 1988, les parties acceptent dans le principe des propositions de règlement émanant notamment du secrétaire général de l’ONU et prévoyant en particulier la proclamation d’un cessez-le-feu ainsi que l’organisation d’un référendum d’autodétermination sous le contrôle de l’ONU ( 153 ).

    181.

    Depuis cette époque, aucun progrès tendant à permettre au peuple du Sahara occidental d’exercer son droit à l’autodétermination n’a été enregistré. Comme l’a relevé le secrétaire général de l’ONU dans son dernier rapport sur le Sahara occidental, « [l]a difficulté [dans la recherche d’une solution] provient essentiellement de la divergence de vues et d’interprétation entre les parties quant à l’histoire du conflit et aux documents qui s’y rattachent. Le Maroc maintient que le Sahara occidental fait déjà partie du territoire national et que les négociations ne peuvent porter que sur sa proposition de statut autonome sous souveraineté marocaine, étant entendu que l’Algérie doit prendre part à ces négociations. Le Front Polisario soutient que, l’Assemblée générale ayant défini le Sahara occidental comme un territoire non autonome, il revient à la population autochtone de décider de son avenir dans le cadre d’un référendum où l’indépendance serait un choix possible, que toutes les propositions et idées avancées par l’une quelconque des parties doivent être débattues et que seuls le Maroc et lui-même doivent participer aux négociations » ( 154 ).

    182.

    Il découle de l’ensemble de ces faits que, au lieu de pouvoir exercer son droit à l’autodétermination selon les indications données par la Cour internationale de justice dans son avis consultatif sur le Sahara occidental ( 155 ), le peuple du Sahara occidental a été, jusqu’à présent, privé de l’opportunité même d’exercer ce droit dans les conditions prévues par les résolutions 1514 (XV), 1541 (XV), 2625 (XXV) et 3458 A et B (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU, par une série de mesures aboutissant à la partition du territoire du Sahara occidental en 1976 et son annexion en 1976 et 1979. Le fait que certaines de ces mesures soient imputables à plusieurs États ne diminue en rien l’existence et la gravité de la violation du droit de ce peuple à l’autodétermination.

    183.

    De plus, alors que ces résolutions prévoient que le droit à l’autodétermination implique le choix libre entre trois options ( 156 ) dont l’indépendance ( 157 ), l’association avec un autre État indépendant et l’intégration à un État indépendant, ainsi que l’organisation d’un référendum ( 158 ) (au lieu d’une consultation de la Djemââ), le Royaume du Maroc a procédé à l’intégration du Sahara occidental à son territoire par partition et annexion, sans consultation du peuple du Sahara occidental et sans la supervision de l’ONU.

    184.

    En ce sens, la prestation de serment d’allégeance au roi du Maroc prononcé au nom des tribus sahraouies par le président de la Djemââ, le 4 novembre 1975, et la réunion de la Djemââ du 26 février 1976, non reconnues par l’ONU et le Royaume d’Espagne en tant que puissance administrante du Sahara occidental et membre de l’administration intérimaire de celui-ci, ne constituent pas la consultation du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination requise par les résolutions 1514 (XV), 1541 (XV), 2625 (XXV) et 3458 A et B (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU.

    185.

    Il résulte de ce qui précède que le Sahara occidental a été intégré au Royaume du Maroc sans que le peuple de ce territoire ait librement exprimé sa volonté à cet égard. L’accord de pêche et le protocole de 2013 étant conclus par le Royaume du Maroc sur la base de l’intégration unilatérale du Sahara occidental à son territoire et de l’affirmation de sa souveraineté sur ce territoire, il est clair que le peuple du Sahara occidental n’a pas librement disposé de ses ressources naturelles, comme l’imposent l’article 1er commun au PIDESC et au PIDCP, le paragraphe 2 de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU et le titre VII de l’acte final d’Helsinki de 1975.

    186.

    De ce fait, l’exploitation halieutique des eaux adjacentes au Sahara occidental instaurée et mise en œuvre par les actes contestés ne respecte pas le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination ( 159 ).

    2) Sur l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation

    187.

    Même si la Cour jugeait que les actes contestés ne violent pas par eux-mêmes le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et que la violation de ce droit n’est pas imputable à l’Union mais exclusivement au Royaume du Maroc, il n’en demeurerait pas moins que les actes contestés ne respecteraient pas l’obligation de l’Union de ne pas reconnaître une situation illicite découlant de la violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation ( 160 ).

    188.

    Comme il ressort de leur libellé, l’accord de pêche et le protocole de 2013 couvrent le Sahara occidental et les eaux adjacentes à celui-ci comme un accord qui serait exclusivement applicable au territoire reconnu comme territoire souverain du Royaume du Maroc par la communauté internationale.

    189.

    Il convient de souligner à cet égard que, comme l’a jugé la Cour permanente de justice internationale, « la faculté de contracter des engagements internationaux est précisément un attribut de la souveraineté de 1’État » ( 161 ) sur le territoire qui est visé par ces engagements.

    190.

    Cela vaut également pour les accords internationaux qui concernent la mer. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour internationale de justice, « les droits sur la mer dérivent de la souveraineté de 1’État côtier sur la terre, principe qui peut être résumé comme suit : “la terre domine la mer” […] C’est donc la situation territoriale terrestre qu’il faut prendre pour point de départ pour déterminer les droits d’un État côtier en mer » ( 162 ).

    191.

    Toujours, selon la Cour internationale de justice, « [i]l est bien établi que “[l]e titre d’un État sur […] la zone économique exclusive est fondé sur le principe selon lequel la terre domine la mer du fait de la projection des côtes ou des façades côtières” […]. Ainsi que la Cour l’a exprimé […], “la terre est la source juridique du pouvoir qu’un État peut exercer dans les prolongements maritimes” […] » ( 163 ).

    192.

    Si, donc, la terre domine la mer, il n’y a aucun doute que, comme le soutient la Comader, le Royaume du Maroc a conclu l’accord de pêche en se considérant le souverain du Sahara occidental, ayant les droits et obligations sur les eaux adjacentes à ce territoire que le droit international confère à l’État côtier ( 164 ). En effet, comme l’a proclamé le roi Mohammed VI à l’occasion du 39e anniversaire de la marche verte, « je dis non à la tentative visant à modifier la nature de ce conflit régional en le présentant comme une affaire de décolonisation. En effet, le Maroc dans son Sahara, n’a jamais été une puissance d’occupation ou une puissance administrante. Il exerce plutôt les attributs de sa souveraineté sur sa terre » ( 165 ).

    193.

    De ce fait, il convient d’écarter l’argument du Conseil et de la Commission selon lequel, en se référant aux « eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc », les actes contestés ne comportent aucune reconnaissance à la prétention de souveraineté du Royaume du Maroc sur le territoire du Sahara occidental et à la souveraineté ou à la juridiction que cet État prétend exercer sur les eaux adjacentes à ce territoire.

    194.

    En premier lieu, la négociation et la conclusion avec le Royaume du Maroc d’un accord international applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes constituent en elles-mêmes une reconnaissance de jure de l’intégration ( 166 ) du Sahara occidental au Royaume du Maroc par l’annexion opérée en 1976 et 1979, ce qui implique la reconnaissance de sa souveraineté sur le territoire, les eaux intérieures et la mer territoriale du Sahara occidental, ainsi que des droits souverains et de la juridiction que le droit international confère à l’État côtier sur les zones maritimes qui se trouvent au-delà de la mer territoriale.

    195.

    Je rappelle que, dans l’affaire du Timor-Oriental qui opposait la République portugaise (en tant que puissance administrante expulsée du Timor-Oriental par la République d’Indonésie) au Commonwealth d’Australie (en tant que pays tiers qui avait conclu avec la République d’Indonésie un accord international applicable au Timor-Oriental), le Commonwealth d’Australie avait considéré que le début des négociations pour la conclusion du traité de 1989 concernant le Timor Gap « signifi[ait] la reconnaissance de jure par l’Australie de l’intégration du Timor-Oriental dans l’Indonésie » ( 167 ).

    196.

    Le fait qu’un accord de pêche applicable sur un territoire et ses zones maritimes est apte à constituer la preuve d’une reconnaissance de souveraineté est démontré par l’histoire même du Sahara occidental. Je rappelle à cet égard que le Royaume du Maroc avait apporté comme preuve de sa souveraineté sur le Sahara occidental les accords internationaux qu’il avait conclus avec plusieurs États, dont notamment des accords de commerce et de pêche conclus avec le Royaume d’Espagne depuis 1767 ( 168 ).

    197.

    Or, comme l’a jugé la Cour internationale de justice, l’annexion d’un territoire dont le peuple bénéficie du droit à l’autodétermination alors que ce peuple n’a pas encore exercé ce droit, constitue une violation de l’obligation de respecter ledit droit ( 169 ). Par conséquent, un tiers viole son obligation de ne pas reconnaître une situation illicite résultant d’une violation dudit droit lorsqu’il reconnaît de jure par la conclusion d’un accord international l’annexion de pareil territoire.

    198.

    En second lieu, les termes « eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » ne suffisent pas pour exclure la reconnaissance de jure de la souveraineté du Royaume du Maroc sur le Sahara occidental, cela pour deux raisons principales.

    199.

    La première est que l’accord de pêche et le protocole de 2013 ne sont pas uniquement applicables aux eaux adjacentes au Sahara occidental mais également à son territoire ( 170 ). En ce sens, l’emploi des termes « eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » ne peut exclure la reconnaissance de jure de la souveraineté du Royaume du Maroc sur le territoire du Sahara occidental, et donc la violation du droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination.

    200.

    La seconde raison concerne l’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013 aux eaux adjacentes au Sahara occidental. Contrairement à ce que soutient la Commission, l’expression « eaux sous juridiction marocaine » ( 171 ), reprise des accords de pêche conclus entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc avant l’adhésion du Royaume d’Espagne à l’Union, ne permet pas d’identifier les eaux adjacentes au Sahara occidental sans reconnaître les droits souverains et la juridiction que le Royaume du Maroc prétend exercer sur ces eaux en tant qu’État côtier ( 172 ). Comme le principe que la terre domine la mer, la reconnaissance de souveraineté sur la terre implique la reconnaissance de droits souverains sur la mer et vice versa.

    201.

    À cet égard, il convient de souligner que les accords de pêche conclus par le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc datent d’avant la ratification de la convention des Nations unies sur le droit de la mer, conclue à Montego Bay le 10 décembre 1982 ( 173 ) (ci-après la « CNUDM ») par l’Union ( 174 ), ses États membres et le Royaume du Maroc, alors que l’accord de pêche en cause dans la présente affaire a été signé et ratifié sous l’empire de cette convention qui « l’emporte, entre les États Parties, sur les [c]onventions de Genève du 29 avril 1958 sur le droit de la mer » ( 175 ).

    202.

    La convention sur la pêche et la conservation des ressources biologiques de la haute mer et la convention sur la haute mer, faites à Genève le 29 avril 1958, ne prévoyaient pas le droit des États d’établir une zone économique exclusive (ZEE), mais l’article 2 de cette dernière convention disposait qu’aucun État ne pourrait prétendre soumettre la haute mer à sa souveraineté et que la liberté de la haute mer comportait la liberté de la pêche. De plus, selon son article 6, les navires en haute mer se trouvaient sous la juridiction exclusive de l’État de leur pavillon.

    203.

    Ce contexte juridique, dans lequel les termes « eaux sous juridiction marocaine » (« aguas bajo jurisdicción marroquí ») avaient un sens, non seulement n’existe plus entre l’Union et le Royaume du Maroc, mais il a été remplacé par la CNUDM. La phrase « eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » doit donc être appréciée à la lumière du régime juridique instauré par la CNUDM qui a consacré en droit international le concept de la ZEE, déjà existant dans la pratique des États.

    204.

    Cette lecture de l’accord de pêche à la lumière de la CNUDM est confirmée tant par le considérant 2 de l’accord de pêche ( 176 ) que par l’article 5, paragraphe 4, de cet accord, qui se réfère à la législation marocaine « régissant la pêche dans les eaux relevant de la juridiction du Maroc, conformément à la [CNUDM] ».

    205.

    Or, selon la CNUDM, les eaux intérieures d’un État et sa mer territoriale constituent les eaux sous sa souveraineté ( 177 ) alors que la ZEE relève « [de] la juridiction » de l’État côtier ( 178 ). En ce sens, la première partie de la phrase utilisée par les actes contestés « eaux relevant de la souveraineté et de la juridiction du Royaume du Maroc » vise les eaux intérieures et la mer territoriale du Royaume du Maroc (eaux relevant de sa souveraineté), alors que la seconde se réfère à sa ZEE (eaux relevant de sa juridiction).

    206.

    Toutefois, comme l’admet la Commission au point 14 de ses réponses aux questions écrites posées par la Cour, contrairement à la ZEE établie par la République arabe sahraouie démocratique (entité non reconnue par l’Union et ses États membres), la ZEE marocaine actuelle, établie en 1981 avant même la ratification de la CNUDM par le Royaume du Maroc, ne couvre pas les eaux adjacentes au Sahara occidental qui sont visées par les zones de pêche nos 3 à 6 de l’accord de pêche ( 179 ), raison pour laquelle le conseil de gouvernement du Royaume du Maroc a d’ailleurs adopté, le 6 juillet 2017, le projet de loi no 38-17 modifiant et complétant la loi no 1-18 instituant une zone économique exclusive de 200 milles marins au large des côtes du Maroc et du Sahara occidental ( 180 ).

    207.

    Dans ces conditions, la pêche « dans les eaux relevant de la juridiction du Maroc, conformément à la [CNUDM] » ( 181 ) devrait s’arrêter au parallèle 27°42’N qui sert tant de limite extérieure de la ZEE marocaine actuelle ( 182 ) que de frontière entre le Royaume du Maroc et le Sahara occidental ( 183 ). Or, les zones de pêche nos 3 à 6 couvrent essentiellement les eaux au sud de cette frontière qui sont adjacentes au Sahara occidental.

    208.

    Comme l’admet la Commission, la pêche dans une ZEE est un droit souverain de l’État côtier ( 184 ). Par conséquent, en concluant l’accord de pêche visant les eaux qui constitueraient la ZEE du Sahara occidental, l’Union reconnaît de jure que le Royaume du Maroc exerce dans ces eaux un droit souverain.

    209.

    Enfin, contrairement à ce que relève la Commission, les termes « eaux sous juridiction » et « eaux relevant de la souveraineté et de la juridiction » ne sont pas propres aux actes contestés, ce qui permettrait de croire qu’ils viseraient la situation particulière du Sahara occidental. Au contraire, il s’agit de descriptions classiques du champ d’application des accords de pêche conclus par l’Union ( 185 ) et, en ce sens, ils visent aussi bien les eaux intérieures et la mer territoriale du pays tiers (eaux relevant de sa souveraineté) que sa ZEE (eaux relevant de sa juridiction).

    210.

    Par conséquent, contrairement à ce que soutiennent le Conseil et la Commission, l’utilisation de l’expression « eaux relevant de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc » constitue une reconnaissance de l’exercice des droits souverains par le Royaume du Maroc sur le Sahara occidental et les eaux y adjacentes. Cette reconnaissance sera encore plus claire lors de l’entrée en vigueur du projet de loi no 38-17 par lequel le Royaume du Maroc établira une ZEE sur les eaux adjacentes au Sahara occidental.

    211.

    De plus, par les actes contestés, l’Union a prêté aide et assistance au maintien de la situation illicite découlant de la violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination. Cette aide prend la forme de bénéfices économiques (notamment la contrepartie financière) que l’accord de pêche et le protocole de 2013 confèrent au Royaume du Maroc ( 186 ).

    212.

    Étant donné que l’affirmation de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental résulte d’une violation du droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination pour les raisons que j’ai évoquées aux points 147 à 186 des présentes conclusions, l’Union a manqué à son obligation de ne pas reconnaître la situation illicite découlant de la violation du droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination par le Royaume du Maroc, ainsi qu’à celle de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation ( 187 ). De ce fait, dans la mesure où ils s’appliquent au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes, l’accord de pêche et le protocole de 2013 sont incompatibles avec l’article 3, paragraphe 5, TUE, l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, et les articles 23 TUE et 205 TFUE, qui imposent à l’Union l’obligation que son action extérieure protège les droits de l’homme et respecte strictement le droit international.

    213.

    Le règlement no 764/2006, la décision 2013/785 et le règlement no 1270/2013 sont dès lors contraires à l’article 3, paragraphe 5, TUE, à l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, à l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, et aux articles 23 TUE et 205 TFUE, en ce qu’ils approuvent et mettent en œuvre l’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013 au territoire du Sahara occidental et aux eaux adjacentes.

    3) Les accords internationaux applicables au Sahara occidental auraient-ils été conclus avec le Royaume du Maroc sur la base d’un autre titre que son affirmation de souveraineté sur ce territoire ?

    214.

    L’analyse qui précède est fondée sur l’affirmation par le Royaume du Maroc de sa souveraineté sur le Sahara occidental, qui lui aurait permis de conclure avec l’Union l’accord de pêche et le protocole de 2013.

    215.

    Toutefois, comme l’a dit la Comader lors de l’audience, quelle que soit la vision du Royaume du Maroc sur cette question, celui-ci accepte que l’Union et ses États membres puissent avoir une vision différente.

    216.

    Je vais donc étudier la question de savoir si la conclusion de l’accord de pêche et du protocole de 2013 pourrait se justifier sur la base d’un autre titre que le Royaume du Maroc pourrait avoir à l’égard du Sahara occidental, qui lui donnerait ce que la Commission a appelé, lors de l’audience, le « pouvoir de conclure des traités »(treaty-making power) engageant le territoire non autonome du Sahara occidental.

    217.

    À cet égard, le gouvernement français, la Commission et le Conseil soutiennent que le Royaume du Maroc est la « puissance administrante de facto » du Sahara occidental, ce qui permettrait la conclusion des accords internationaux applicables au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes sans violation du droit de son peuple à l’autodétermination.

    218.

    En revanche, WSC soutient qu’en étant la puissance occupante du Sahara occidental ( 188 ), le Royaume du Maroc ne peut conclure aucun accord international applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes.

    219.

    Les gouvernements espagnol et portugais n’ont pas pris position sur cette question, le gouvernement espagnol se bornant à dire que le Royaume du Maroc n’est pas la puissance occupante du Sahara occidental, sans toutefois préciser en quelle qualité il pourrait alors conclure des accords internationaux applicables à ce territoire et aux eaux y adjacentes.

    220.

    Cette question de l’existence en droit international d’une base juridique qui permettrait à l’Union de conclure avec le Royaume du Maroc des accords internationaux applicables au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes est une question d’interprétation du droit international à laquelle les conditions d’invocabilité du droit international ne sont pas applicables.

    i) Le Royaume du Maroc en tant que puissance administrante de facto du Sahara occidental

    221.

    À mon avis, il faut écarter la thèse du gouvernement français, du Conseil et de la Commission, selon laquelle le Royaume du Maroc est la « puissance administrante de facto » du Sahara occidental. Il convient de souligner que ni le gouvernement espagnol ni le gouvernement portugais n’ont adopté ces termes.

    222.

    Il résulte du libellé de l’article 73 de la charte des Nations unies que par la notion de « puissance administrante », on entend « [l]es [m]embres des Nations [u]nies qui ont ou qui assument la responsabilité d’administrer des territoires [non autonomes] ». Le Royaume du Maroc n’avait pas la responsabilité d’administrer le Sahara occidental lors de son adhésion à l’ONU en 1956 et n’a jamais assumé pareille responsabilité puisqu’il se considère comme le souverain de ce territoire ( 189 ).

    223.

    Par ailleurs, la notion de « puissance administrante de facto » n’existe pas en droit international et a été utilisée pour la première fois par la Commission lors de la réponse donnée en son nom par la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, vice-présidente de la Commission, Mme Catherine Ashton, aux questions parlementaires portant les références E-001004/11, P-001023/11 et E‑002315/11 ( 190 ).

    224.

    En effet, le Conseil et la Commission n’ont pas pu donner un seul autre exemple où ce terme a été utilisé pour décrire la relation entre un État et un territoire non autonome. Il convient de souligner à cet égard que dans le cas contemporain et très similaire de l’annexion du Timor-Oriental par la République d’Indonésie, le terme de « puissance administrante de facto » n’a pas été utilisé pour décrire la qualité de cet État dans son lien avec le rapport au Timor-Oriental. Au contraire, la Cour internationale de justice a qualifié d’occupation l’intervention militaire de la République d’Indonésie au Timor-Oriental ( 191 ).

    225.

    Le fait que, par l’accord de Madrid, le Royaume du Maroc soit devenu membre de l’administration intérimaire du Sahara occidental ne pourrait non plus lui donner le statut de puissance administrante apte à conclure des accords internationaux applicables au Sahara occidental sans violer le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination. En effet, d’une part, la légitimité de l’accord de Madrid est fortement contestée ( 192 ), ce qui est confirmé par le fait que la résolution 3458 B (XXX), qui prend acte dudit accord, n’a été approuvée que par 56 États, alors que plusieurs États membres de l’Union ont voté contre ou se sont abstenus ( 193 ). D’autre part, comme il ressort du paragraphe 4 de la résolution 3458 B (XXX), l’Assemblée générale de l’ONU n’a pris acte de l’accord de Madrid et de l’existence de l’administration intérimaire que dans la mesure où cette administration était censée prendre toute mesure nécessaire afin de permettre au peuple du Sahara occidental d’exercer son droit à l’autodétermination. En ce sens, même les États qui ont voté pour cette résolution, dont notamment les États-Unis, ne reconnaissent pas au Royaume du Maroc la qualité de puissance administrante mais reconnaissent le fait que le Royaume du Maroc ait placé le Sahara occidental sous son « contrôle administratif » (administrative control) ( 194 ). Dans ce contexte, la conclusion des accords internationaux, et d’autant plus des accords d’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental comme l’accord de pêche, dépasse amplement l’interprétation, même la plus large, qui pourrait être donnée au mandat confié à l’administration intérimaire du Sahara occidental dont le Royaume du Maroc était membre.

    226.

    En tout état de cause, il n’appartient qu’à la seule Assemblée générale de l’ONU de reconnaître un territoire comme non autonome et partant, d’identifier sa puissance administrante ( 195 ).

    227.

    Les deux exemples donnés par la Commission et visant les îles Cocos (Keeling) et la Nouvelle-Guinée occidentale ( 196 ) confirment ce rôle privilégié de l’Assemblée générale de l’ONU. Dans le cas des îles Cocos (Keeling), le Royaume-Uni avait retiré ces îles de la colonie de Singapour et les avait placées sous l’autorité du Commonwealth d’Australie ( 197 ). Même si l’Assemblée générale de l’ONU n’avait pas donné son autorisation préalable à ce transfert, le Commonwealth d’Australie a continué la pratique du Royaume-Uni consistant à fournir à l’ONU les renseignements prévus à l’article 73, sous e), de la charte des Nations unies à partir de 1957 ( 198 ), et l’Assemblée générale a approuvé ce transfert par la suite en faisant figurer le Commonwealth d’Australie comme la puissance administrante des îles Cocos (Keeling) dans sa liste des territoires non autonomes ( 199 ).

    228.

    En ce qui concerne la Nouvelle-Guinée occidentale, dont la puissance administrante était le Royaume des Pays-Bas, contrairement à ce que soulève la Commission, le transfert de ce territoire par le Royaume des Pays-Bas à l’Autorité exécutive temporaire des Nations unies et par celle-ci à la République d’Indonésie a été effectué par traité international qui n’est entré en vigueur qu’après son approbation par l’Assemblée générale de l’ONU ( 200 ).

    229.

    En l’occurrence, alors que le Sahara occidental a été reconnu dès 1960 par l’Assemblée générale de l’ONU en tant que territoire non autonome ( 201 ), celle-ci n’a jamais reconnu la qualité de puissance administrante (de jure ou de facto) au Royaume du Maroc et continue même, aujourd’hui encore, à faire figurer le Royaume d’Espagne en tant que telle dans sa liste des territoires non autonomes et des puissances administrantes ( 202 ).

    230.

    Cette conclusion est renforcée par la lettre datée du 29 janvier 2002, adressée au président du Conseil de sécurité par le secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, conseiller juridique, Hans Corell selon laquelle « [l]’[a]ccord de Madrid ne prévoyait pas de transfert de souveraineté sur le territoire ni ne conférait à aucun des signataires le statut de puissance administrante, statut que l’Espagne ne pouvait d’ailleurs unilatéralement transférer » ( 203 ). De plus, même s’il a noté que « le Maroc administre seul le territoire du Sahara occidental depuis [1976] », ce qui est un fait incontestable, il a ajouté que « [t]outefois, le Maroc ne figur[e] pas comme puissance administrante du territoire sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU, [et par conséquent,] ne communique pas de renseignements sur le territoire en vertu de l’alinéa e de l’[a]rticle 73 de la [c]harte des Nations [u]nies » ( 204 ).

    231.

    Pour le reste, le secrétaire général adjoint aux affaires juridiques a analysé par analogie la légalité des décisions qu’auraient prises les autorités marocaines concernant l’offre et la signature de contrats de prospection des ressources minérales au Sahara occidental passés avec des sociétés privées étrangères, sur la base des principes applicables aux pouvoirs et aux responsabilités des puissances administrantes sur les activités ayant trait aux ressources minérales des territoires non autonomes ( 205 ). Il a fondé cette analogie avec le régime juridique applicable aux puissances administrantes sur l’idée que, le Sahara occidental étant un territoire non autonome et que ce régime existant pour le bénéfice de son peuple, le Royaume du Maroc devrait au minimum faire face aux mêmes obligations qu’une puissance administrante.

    232.

    Toutefois, cette lettre ne pourrait aucunement servir de base pour fonder l’existence, en droit international, de la notion de « puissance administrante de facto » notamment en ce qui concerne la question de la conclusion des accords internationaux qui, contrairement à la signature de contrats avec des sociétés privées, est « un attribut de la souveraineté » ( 206 ).

    233.

    Enfin, il convient de noter que la capacité de la puissance administrante de conclure des accords internationaux applicables au territoire non autonome et portant sur des éléments essentiels du droit des peuples, dont le droit à l’autodétermination et le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles, est restreinte à partir du moment où « [l’]activité [d’un mouvement de libération nationale] a eu une portée internationale » ( 207 ). Par conséquent, même si on reconnaissait au Royaume du Maroc la qualité de puissance administrante, sa capacité de conclure des accords internationaux applicables au Sahara occidental aurait été « restreinte » ( 208 ).

    ii) Le Royaume du Maroc en tant que puissance occupante du Sahara occidental

    234.

    La juridiction de renvoi et le WSC considèrent que le Royaume du Maroc occupe le Sahara occidental. Toutefois, contrairement à la juridiction de renvoi, WSC estime qu’en tant que puissance occupante, le Royaume du Maroc ne peut en aucun cas conclure avec l’Union un accord international applicable au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes.

    235.

    En ce qui concerne les institutions de l’Union, il y a une différence importante entre les positions du Conseil et de la Commission. En effet, le Conseil nie catégoriquement l’application au Sahara occidental des règles du droit international visant les occupations militaires, alors que la Commission ne l’exclut pas en soutenant que les régimes juridiques applicables aux puissances administrantes et aux puissances occupantes ne sont pas mutuellement exclusifs.

    236.

    Je ne partage pas la thèse de WSC car, sous certaines conditions, une puissance occupante peut conclure des accords internationaux applicables au territoire occupé. Est-ce le cas en l’occurrence ?

    – Sur l’applicabilité du droit international humanitaire au Sahara occidental

    237.

    Les dispositions du droit international humanitaire (ou droit des conflits armés) pertinentes pour l’analyse qui suit sont les articles 42 et 43 du règlement de La Haye de 1907, les articles 2 et 64 de la convention IV de Genève, et l’article 1er, paragraphe 4, du premier protocole additionnel du 8 juin 1977 aux conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux ( 209 ) (ci-après le « protocole additionnel I ») ( 210 ).

    238.

    Il convient de noter d’emblée que, comme l’a jugé la Cour internationale de justice, « [les règles fondamentales du droit international humanitaire dont le règlement de La Haye de 1907] s’imposent d’ailleurs à tous les États, qu’ils aient ou non ratifié les instruments conventionnels qui les expriment, parce qu’elles constituent des principes intransgressibles du droit international coutumier » ( 211 ) et « incorporent des obligations revêtant par essence un caractère erga omnes » ( 212 ).

    239.

    En effet, aux termes de l’article 1er de la convention IV de Genève, disposition commune aux quatre conventions de Genève, « [l]es Hautes Parties contractantes s’engagent à respecter et à faire respecter la présente convention en toutes circonstances » ( 213 ).

    240.

    Selon la Cour internationale de justice, « [i]l résulte de cette disposition l’obligation de chaque État partie à cette convention, qu’il soit partie ou non à un conflit déterminé, de faire respecter les prescriptions des instruments concernés » ( 214 ).

    241.

    En ce sens, conformément à l’article 3, paragraphe 5, TUE, agissant dans le strict respect du droit international, l’Union est dans l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation de ces règles et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation ( 215 ).

    242.

    La convention IV de Genève est applicable dès lors que deux conditions sont remplies, à savoir l’existence d’un conflit armé (que l’état de guerre ait ou non été reconnu) et la survenance de ce conflit entre deux parties contractantes ( 216 ). Selon la Cour internationale de justice, « [l]e deuxième alinéa de l’article 2 n’a pas pour objet de restreindre le champ d’application de la convention ainsi fixé par l’alinéa premier, en excluant de ce champ d’application les territoires qui ne relèveraient pas de la souveraineté de l’une des parties contractantes. Il tend seulement à préciser que, même si l’occupation opérée au cours du conflit a eu lieu sans rencontrer de résistance militaire, la convention demeure applicable » ( 217 ).

    243.

    De plus, l’article 1er, paragraphe 4, du protocole additionnel I étend l’application des quatre conventions de Genève de 1949 aux « conflits armés dans lesquels les peuples luttent contre la domination coloniale et l’occupation étrangère […] dans l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » ( 218 ). Cela est le cas du peuple du Sahara occidental qui n’a pas encore exercé ce droit et se trouve dans une procédure de décolonisation ( 219 ).

    244.

    Il résulte de ce qui précède que le conflit armé qui a eu lieu au Sahara occidental entre 1976 et 1988 est un conflit armé international, ce qui rend le règlement de La Haye de 1907 applicable au Sahara occidental.

    – Sur l’existence d’une occupation militaire au Sahara occidental

    245.

    Dans ce contexte, il convient d’examiner si la présence du Royaume du Maroc au Sahara occidental est une occupation au sens de l’article 42 du règlement de La Haye de 1907, que l’Union ne peut reconnaître ou y prêter aide ou assistance. Selon cette disposition, « [u]n territoire est considéré comme occupé lorsqu’il se trouve placé de fait sous l’autorité de l’armée ennemie ».

    246.

    À cet égard, il convient d’abord de souligner que l’existence d’une occupation est une question de fait ( 220 ). La juridiction de renvoi ainsi que l’administration fiscale et douanière et le ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales estiment que le Sahara occidental se trouve sous occupation marocaine ( 221 ), ce qui est confirmé par la résolution 34/37 de l’Assemblée générale de l’ONU ( 222 ) à laquelle s’est référée la Cour aux points 35 et 105 de son arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973).

    247.

    En outre, l’existence d’une occupation marocaine au Sahara occidental est largement reconnue ( 223 ), et cela même par M. Hans Corell ( 224 ) qui, en tant que secrétaire général adjoint aux affaires juridiques de l’ONU et conseiller juridique, avait rendu la consultation juridique sur la légalité de la décision qu’auraient prise les autorités marocaines de passer avec des sociétés étrangères des contrats de prospection des ressources minérales au Sahara occidental ( 225 ).

    248.

    Enfin, selon la Cour internationale de justice, afin de savoir si « un État dont les forces militaires sont présentes sur le territoire d’un autre État du fait d’une intervention est une “puissance occupante” au sens où l’entend le jus in bello, [il faut examiner] s’il existe des éléments de preuve suffisants démontrant que [l’] autorité [de l’armée ennemie] se trouvait effectivement établie et exercée dans les zones en question par l’État auteur de l’intervention » ( 226 ).

    249.

    Tel est clairement le cas pour la plus grande partie du Sahara occidental qui s’étend à l’ouest du mur de sable édifié et surveillé par l’armée marocaine et qui se trouve sous l’autorité du Royaume du Maroc depuis son annexion en deux étapes (en 1976 et en 1979 ( 227 )). Elle a été administrée de façon structurée ( 228 ) par le Royaume du Maroc depuis cette époque, sans le consentement du peuple du Sahara occidental qui n’a pas encore exercé son droit à l’autodétermination ( 229 ).

    250.

    Il convient, par ailleurs, de noter que l’existence d’une occupation ne se limite pas au territoire continental, mais s’étend également aux eaux intérieures et à la mer territoriale ( 230 ). Une ZEE ne relevant pas de la souveraineté de l’État côtier, une occupation ne s’étend pas à celle-ci, mais la puissance occupante du territoire côtier, en l’occurrence le Royaume du Maroc, peut exercer dans cette zone la juridiction que le droit de la mer confère au territoire côtier ( 231 ).

    – Sur la capacité de la puissance occupante de conclure des accords internationaux applicables au territoire occupé et sur les conditions de légalité auxquelles est soumise la conclusion de pareils accords

    251.

    En ce qui concerne la capacité d’une puissance occupante de conclure des accords internationaux applicables au territoire occupé, il convient de noter qu’il résulte de l’article 43 du règlement de La Haye de 1907 ( 232 ) et de l’article 64, second alinéa, de la convention IV de Genève ( 233 ) que la puissance occupante peut promulguer des lois afin d’assurer la vie publique et l’administration régulière du territoire occupé ( 234 ). Comme l’observe la Commission, ce pouvoir légal dont dispose la puissance occupante dans ce territoire occupé inclut la capacité de conclure des accords internationaux applicables audit territoire ( 235 ). À cet égard, il convient de noter que la Cour internationale de justice n’a pas exclu d’office la possibilité pour les tiers de conclure des accords internationaux applicables à un territoire non autonome occupé uniquement avec la puissance administrante qui n’exerce plus sa mission à cause de l’intervention militaire ( 236 ).

    252.

    Toutefois, en concluant un accord international applicable au territoire occupé, la puissance occupante doit agir en sa qualité de puissance occupante et non en tant que souverain du territoire occupé ( 237 ), car l’annexion d’un territoire occupé est strictement interdite ( 238 ).

    253.

    En ce sens, par exemple, la Confédération suisse a conclu avec l’Autorité provisoire de la coalition ( 239 ) agissant expressément au nom de la République d’Irak un accord sur la garantie des risques à l’exportation ( 240 ), en estimant qu’« un État occupant dispose du pouvoir légal dans le pays qu’il occupe (article 43 de la convention de La Haye de 1907) [ce qui] signifie en particulier que la puissance occupante peut promulguer des lois ou conclure des accords internationaux au nom de l’État occupé » ( 241 ). Cette pratique était soutenue par les résolutions 1483 (2003) du 23 mai 2003 ( 242 ) et 1511 (2003) du 16 octobre 2003 ( 243 ) du Conseil de sécurité de l’ONU.

    254.

    Il ressort clairement du libellé de cet accord-cadre que celui-ci n’a pas été conclu avec les puissances occupantes de la République d’Irak, mais avec l’Autorité de coalition provisoire qui « en application des lois et coutumes de la guerre […] a[vait] temporairement force d’autorité gouvernementale en Irak » ( 244 ). Il n’y avait donc pas de question de reconnaissance par la Confédération suisse d’une situation illicite résultant d’une violation des normes intransgressibles du droit international coutumier qui incorporent des obligations erga omnes.

    255.

    En l’occurrence, le libellé de l’accord de pêche et du protocole de 2013 n’indique pas explicitement qu’ils ont été conclus avec le Royaume du Maroc en sa qualité de puissance occupante du Sahara occidental. Au contraire, selon toute apparence, le Royaume du Maroc a conclu ces accords comme le souverain du Sahara occidental. Par conséquent, contrairement à ce que prétend la Commission au point 139 de ses observations, l’article 43 du règlement de La Haye de 1907 et l’article 64, alinéa 2, de la convention IV de Genève n’autorisent pas la conclusion de l’accord de pêche et du protocole de 2013 sous la forme et de la manière selon lesquelles ils ont été conclus, même si le Royaume du Maroc devrait être considéré comme la puissance occupante du Sahara occidental.

    b)   Sur le respect, par les actes contestés, du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et des règles du droit international humanitaire applicables à l’exploitation des ressources naturelles du territoire occupé

    1) Le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles

    256.

    Le Sahara occidental est un territoire non autonome en cours de de décolonisation. À ce titre, l’exploitation de ses richesses naturelles relève de l’article 73 de la charte des Nations unies et du principe coutumier de souveraineté permanente sur les ressources naturelles ( 245 ). De plus, la CNUDM prévoit dans la résolution III annexée à l’acte final de la troisième conférence des Nations unies sur le droit de la mer que « dans le cas d’un territoire dont le peuple n’a pas accédé à la pleine indépendance ou à un autre régime d’autonomie reconnu par les Nations unies, ou d’un territoire sous domination coloniale, les dispositions relatives à des droits ou intérêts visés dans la [CNUDM] sont appliquées au profit du peuple de ce territoire dans le but de promouvoir sa prospérité et son développement ».

    257.

    Dans ce contexte, l’exploitation de ressources naturelles d’un territoire non autonome, y inclus l’exploitation halieutique des eaux adjacentes à ce territoire, doit bénéficier à son peuple ( 246 ).

    2) L’article 55 du règlement de La Haye de 1907

    258.

    Étant la puissance occupante du Sahara occidental ( 247 ), le Royaume du Maroc est tenu par l’article 55 du règlement de La Haye de 1907 qui concerne l’exploitation de la propriété publique du pays occupé. Selon cet article, « [l]’État occupant ne se considérera que comme administrateur et usufruitier des édifices publics, immeubles, forêts et exploitations agricoles appartenant à l’État ennemi et se trouvant dans le pays occupé. Il devra sauvegarder le fonds de ces propriétés et les administrer conformément aux règles de l’usufruit ».

    259.

    À l’instar de la Commission, j’estime que l’article 55 du règlement de La Haye de 1907 peut également être appliqué à l’exploitation des stocks halieutiques de zones maritimes situées au large des côtes du territoire occupé.

    260.

    L’usufruit est le droit d’user des choses (jus utendi) d’autrui et d’en percevoir les fruits (jus fruendi), sans en altérer la substance ( 248 ). Cela implique que la puissance occupante ne peut disposer des biens publics du pays occupé mais qu’elle peut les exploiter, percevoir et vendre leurs fruits, ainsi qu’utiliser les profits générés par la disposition des fruits de cette exploitation, sans toutefois que cette exploitation gaspille, abandonne ou détruise la valeur économique des biens en cause ou aille au-delà de ce qui est nécessaire ou habituel ( 249 ).

    261.

    Le libellé de l’article 55 ne prévoit aucune limitation spécifique quant aux fins de la disposition des fruits de l’exploitation de la propriété publique ( 250 ). Toutefois, il a été jugé que « les articles 53, 55 et 56 [du règlement de La Haye de 1907] concernant la propriété publique, montrent clairement que, d’après les lois de la guerre, l’économie d’un pays occupé [ne] doit supporter [que] les frais d’occupation […] ; de plus ceux-ci ne doivent lui incomber que dans la mesure où elle peut raisonnablement y pourvoir » ( 251 ).

    262.

    En outre, une exploitation de la propriété publique pour satisfaire les besoins du peuple du territoire occupé est permise par l’article 55 du règlement de La Haye de 1907, d’autant plus dans le cadre d’une occupation prolongée ( 252 ).

    263.

    Ainsi, lors de l’occupation de l’Irak, les États-Unis d’Amérique, le Royaume-Uni et les membres de la coalition ont immédiatement accepté que « le pétrole de l’Irak soit protégé et utilisé au bénéfice du peuple iraquien » ( 253 ) et ont, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1483 (2003) du Conseil de sécurité de l’ONU, établi le Fonds de développement pour l’Irak ( 254 ) pour y verser tous les produits des ventes à l’exportation de pétrole, de produits pétroliers et de gaz naturel de l’Irak dans l’attente de la constitution d’un gouvernement iraquien représentatif et reconnu par la communauté internationale.

    3) Sur le respect, par les actes contestés, du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et de l’article 55 du règlement de La Haye de 1907

    264.

    Il convient de relever d’abord que le droit international humanitaire, dont l’article 55 du règlement de La Haye de 1907, constitue une lex specialis par rapport aux autres règles du droit international, y inclus les droits de l’homme, qui peuvent être également applicables au même contexte factuel ( 255 ).

    265.

    Certes, la Cour internationale de justice a jugé en ce qui concerne le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles que « rien […] ne laisse entendre qu’[il] soi[t] applicable[] au cas particulier du pillage et de l’exploitation de certaines ressources naturelles par des membres de l’armée d’un État intervenant militairement sur le territoire d’un autre État » ( 256 ).

    266.

    Toutefois, la présente affaire ne concerne pas un cas de pillage et d’exploitation de ressources naturelles par des individus membres de l’armée, mais une politique officielle et systématique d’exploitation des ressources halieutiques ( 257 ) mise en place conjointement par le Royaume du Maroc et l’Union.

    267.

    En ce sens, certaines situations peuvent relever exclusivement du droit international humanitaire ; ou exclusivement du droit applicable à l’exploitation des ressources naturelles des territoires non autonomes ; alors que d’autres situations peuvent relever à la fois de ces deux branches du droit international ( 258 ).

    268.

    Comme l’observe la Commission au point 43 de ses réponses aux questions écrites posées par la Cour, les régimes juridiques applicables aux territoires non autonomes et aux territoires occupés ne sont pas mutuellement exclusifs. De plus, en ce qui concerne la présente affaire, le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles et l’article 55 du règlement de La Haye de 1907 convergent sur un point, à savoir celui selon lequel l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental (en tant que territoire non autonome et territoire occupé) ne peut pas être faite au bénéfice économique du Royaume du Maroc (outre les frais d’occupation dans la mesure où le Sahara occidental peut raisonnablement y pourvoir), mais doit l’être au bénéfice du peuple du Sahara occidental.

    269.

    À cet égard, il convient de rappeler que tant le Conseil que la Commission sont d’accord pour dire que l’exploitation des zones de pêche situées au large des côtes du Sahara occidental doit bénéficier au peuple de ce territoire, tout en considérant que les dispositions de l’accord de pêche ainsi que du protocole de 2013 sont de nature à garantir que tel est bien le cas.

    270.

    Je ne partage pas cette thèse pour les raisons suivantes.

    271.

    Il faut noter que l’accord de pêche prévoit une exploitation durable (en anglais « sustainable exploitation ») des stocks halieutiques ( 259 ) et, en ce sens, ne mène pas à l’épuisement de cette ressource. À ce titre, l’accord de pêche paraît à première vue conforme tant aux règles de l’usufruit auxquelles se réfère l’article 55 du règlement de La Haye de 1907 ( 260 ) qu’au principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles. En effet, une exploitation des eaux adjacentes au Sahara occidental qui épuiserait les stocks halieutiques ne saurait être considérée comme étant au bénéfice du peuple de ce territoire.

    272.

    Cependant, il ressort de l’article 2 du règlement no 764/2006, des fiches techniques des zones de pêche nos 3 à 6 ( 261 ) et des informations données par la Commission lors de l’audience ( 262 ), que la majorité de l’exploitation prévue dans l’accord de pêche et le protocole de 2013 vise presque exclusivement les eaux adjacentes au Sahara occidental. En effet, les captures effectuées dans la seule zone de pêche no 6 (qui ne couvre que les eaux adjacentes au Sahara occidental) représentent environ 91,5 % des captures totales effectuées dans le cadre de l’exploitation halieutique instaurée par l’accord de pêche et le protocole de 2013.

    273.

    Si, donc, l’accord de pêche s’applique presque exclusivement au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes, il s’ensuit que la contrepartie financière versée au Royaume du Maroc par l’Union conformément à l’article 7 de l’accord de pêche, devrait également, comme l’acceptent le Conseil et la Commission, bénéficier presque exclusivement au peuple du Sahara occidental (sauf si elle est utilisée pour couvrir les frais de l’occupation dans la mesure où ce territoire peut raisonnablement y pourvoir ( 263 )).

    274.

    Toutefois, l’article 3, paragraphe 1, du protocole de 2013 dispose que la contrepartie financière annuelle de 40 millions d’euros est divisée en deux sous-parties, une de 30 millions d’euros versée au titre de l’article 7 de l’accord de pêche (16 millions d’euros en tant que compensation financière pour l’accès à la ressource et 14 millions d’euros en tant qu’appui à la politique sectorielle de la pêche au Maroc) et une de 10 millions d’euros correspondant au montant estimé des redevances dues par les armateurs européens au titre des licences de pêche délivrées en application de l’article 6 de l’accord de pêche.

    275.

    Conformément à l’article 3, paragraphe 4, du protocole de 2013, cette contrepartie est versée au nom du trésorier général du Royaume du Maroc sur un compte ouvert auprès de la Trésorerie générale du Royaume du Maroc (alors que dans le cas de l’occupation de l’Irak les produits des ventes du pétrole étaient versés au Fonds de développement pour l’Irak).

    276.

    En ce qui concerne son affectation, l’article 3, paragraphe 5, et l’article 6, paragraphe 1, du protocole de 2013 prévoient que la contrepartie financière annuelle de 40 millions d’euros relève de la compétence exclusive des autorités marocaines, mais pour les 14 millions d’euros (appui à la politique sectorielle de la pêche au Maroc), ils instaurent un mécanisme de suivi et de supervision par l’Union au sein d’une commission mixte, de son utilisation par les autorités marocaines.

    277.

    Or, conformément à l’article 5, paragraphe 6, du protocole de 2013, ce mécanisme ne permet que le suivi général des « retombées économiques et sociales attendues [de l’accord de pêche], notamment les effets sur l’emploi, les investissements, et tout impact quantifiable des actions réalisées ainsi que leur distribution géographique ».

    278.

    Selon la Commission, ce mécanisme de suivi lui a permis de s’assurer que pour la période de validité du protocole de 2013 (2014-2018), 54 millions d’euros ont été ou seront utilisés pour la construction de halles de nouvelle génération, de locaux de pêcheurs, ainsi que de points de débarquement aménagés et aquacoles, et que environ 80 % des projets financés par cette aide se situent au Sahara occidental.

    279.

    À mon avis, il ressort de ces éléments que ni l’accord de pêche ni le protocole de 2013 ne contiennent les garanties juridiques nécessaires afin que l’exploitation halieutique satisfasse aux exigences du critère qui impose que celle-ci soit au bénéfice du peuple du Sahara occidental.

    280.

    En premier lieu, le protocole de 2013 ne contient aucun engagement de la part du Royaume du Maroc d’utiliser la contrepartie financière versée par l’Union pour le bénéfice du peuple du Sahara occidental de façon proportionnelle aux quantités des captures effectuées dans les eaux adjacentes au Sahara occidental. Au contraire, alors que 91,5 % des captures sont effectuées dans la seule zone de pêche no 6 (qui ne couvre que les eaux adjacentes au Sahara occidental), 35 % seulement de la contrepartie financière (14 sur 40 millions d’euros) relèvent du mécanisme de suivi instauré par l’article 6 du protocole de 2013.

    281.

    En deuxième lieu, il n’y a aucune preuve que les 14 millions d’euros soient véritablement utilisés au bénéfice du peuple du Sahara occidental. Au contraire, les éléments fournis par la Commission démontrent que sur 160 millions d’euros à verser sur une période de quatre ans (2014-2018), seuls 54 millions d’euros (soit 33,75 %) ont été utilisés pour le développement des projets, dont 80 % se sont situés au Sahara occidental.

    282.

    En troisième lieu, le fait que 80 % des projets qui bénéficient de ces 54 millions d’euros se situent au Sahara occidental ne veut rien dire en soi. Ce qui importe est de connaître la partie de ce montant de 54 millions d’euros qui est affectée au financement des projets situés au Sahara occidental, mais la Commission n’a pas fourni cette information.

    283.

    Enfin, il convient de relever que l’article 49, paragraphe 6, de la convention IV de Genève interdit à la puissance occupante de procéder « au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle » ( 264 ). Toutefois, il n’y a aucune disposition dans l’accord de pêche et le protocole de 2013 qui obligerait le Royaume du Maroc à ce que la partie de la contrepartie financière, correspondant à l’exploitation halieutique des zones de pêche situées au large des côtes du Sahara occidental, soit utilisée de façon qui bénéficierait surtout aux « Sahraouis originaires du territoire » ( 265 ) ou aux « populations sahraouies originaires du territoire » ( 266 ).

    284.

    Par exemple, la fiche technique pour la zone de pêche no 6 (pêche pélagique industrielle) prévoit une obligation d’embarquement aux navires de l’Union de 2 à 16 « marins marocains » en fonction de la jauge du navire ( 267 ), alors que cette zone de pêche vise exclusivement les eaux adjacentes au Sahara occidental.

    285.

    Par conséquent, je considère que les dispositions de l’accord de pêche et le protocole de 2013 ne donnent aucune garantie que l’exploitation halieutique des eaux adjacentes au Sahara occidental se fasse pour le bénéfice du peuple de ce territoire. En ce sens, les actes contestés ne respectent ni le principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles ( 268 ), ni l’article 55 du règlement de La Haye de 1907, ni l’obligation de l’Union de ne pas reconnaître une situation illicite découlant de la violation de ces dispositions et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation.

    286.

    Il résulte de ce qui précède que, en ce qu’ils s’appliquent au territoire du Sahara occidental et eaux adjacentes à celui-ci, l’accord de pêche et le protocole de 2013 sont incompatibles avec l’article 3, paragraphe 5, TUE, l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, et les articles 23 TUE et 205 TFUE, qui imposent à l’Union l’obligation que son action extérieure respecte strictement le droit international.

    287.

    Le règlement no 764/2006, la décision 2013/785 et le règlement no 1270/2013 sont contraires à l’article 3, paragraphe 5, TUE, à l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, à l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, et aux articles 23 TUE et 205 TFUE, en ce qu’ils approuvent et mettent en œuvre l’application de l’accord de pêche et du protocole de 2013 au territoire du Sahara occidental et aux eaux adjacentes à celui-ci.

    c)   Sur les limitations à l’obligation de non-reconnaissance

    288.

    À cet égard, lors de l’audience, tant la Comader que la Commission ont soutenu que l’obligation de ne pas reconnaître une situation illicite, découlant d’une violation de règles erga omnes du droit international et de l’obligation ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation, ne peut mener à une interdiction de conclusion des accords internationaux promouvant le développement économique du peuple du Sahara occidental, puisque pareille interdiction se ferait finalement à son détriment.

    289.

    Ils invoquent ainsi le point 125 de l’avis consultatif sur la Namibie ( 269 ), où la Cour internationale de justice avait jugé que « la non-reconnaissance de l’administration sud-africaine dans le territoire ne devrait pas avoir pour conséquence de priver le peuple namibien des avantages qu’il peut tirer de la coopération internationale » ( 270 ).

    290.

    À mon avis, cette limitation à l’obligation de non-reconnaissance n’a aucune incidence dans la présente affaire.

    291.

    En premier lieu, la Commission a déjà essayé d’utiliser le même point 125 de l’avis consultatif sur la Namibie pour justifier l’acceptation par les autorités douanières britanniques des certificats de circulation des produits agricoles originaires du territoire chypriote occupé qui avaient été émis par ladite « République turque de Chypre du Nord », entité non reconnue par l’Union et ses États membres ( 271 ). Toutefois, la Cour a rejeté cette approche en jugeant qu’aucune analogie ne pouvait être faite entre la situation de la Namibie et l’occupation militaire qui continue à exister en Chypre du Nord ( 272 ). À mon avis, il en va de même dans la présente situation.

    292.

    En second lieu, la limitation de l’obligation de non-reconnaissance, établie par la Cour internationale de justice au point 125 de son avis consultatif sur la Namibie pour ne pas priver le peuple namibien des avantages qu’il pouvait tirer de la coopération internationale, ne pourrait justifier la conclusion d’accords internationaux commerciaux. D’une part, la conclusion de pareils accords était couverte par l’obligation de non-reconnaissance ( 273 ). D’autre part, les exemples des avantages dont le peuple namibien devait pouvoir continuer à bénéficier sont loin d’inclure les accords internationaux commerciaux. En effet, les exemples donnés par la Cour internationale de justice visent l’inscription des naissances, des mariages ou des décès à l’état civil, « dont on ne pourrait méconnaître les effets qu’au détriment des habitants du territoire » ( 274 ).

    4.   Résumé

    293.

    Il découle de ce qui précède que les actes contestés, qui sont applicables au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes en ce qu’ils relèvent de la souveraineté ou de la juridiction du Royaume du Maroc, violent l’obligation de l’Union de respecter le droit du peuple de ce territoire à l’autodétermination ainsi que son obligation de ne pas reconnaître une situation illégale découlant d’une violation de ce droit et de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de cette situation. De plus, en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental, les actes contestés ne mettent pas en place les garanties nécessaires pour assurer que cette exploitation se fasse au bénéfice du peuple de ce territoire.

    VI. Sur la demande du Conseil de limiter temporairement les effets de la déclaration d’invalidité

    294.

    Le Conseil a demandé à la Cour « de limiter temporairement les effets de la déclaration d’invalidité [du règlement no 764/2006, de la décision 2013/785 et du règlement no 1270/2013] de manière à permettre à l’Union de prendre les mesures qui s’imposent à elle conformément aux obligations qui lui incombent en vertu du droit international » ( 275 ).

    295.

    Sans motiver plus avant sa demande, le Conseil demande par là que les effets des actes contestés soient maintenus pendant une période de temps limitée, comme cela a été fait, par exemple, dans l’arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461) ( 276 ). Il convient toutefois de souligner que le protocole de 2013, qui fait partie de l’accord de pêche ( 277 ) et est indispensable pour sa mise en œuvre, arrivera à échéance le 14 juillet 2018 ( 278 ). La période entre le prononcé de l’arrêt en 2018 et l’expiration de ce protocole étant particulièrement brève, je ne suis pas convaincu que le maintien des effets des actes contestés aurait du sens. De toute façon, les raisons qui ont motivé le maintien des effets de l’acte contesté pour une période de trois mois dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461) ( 279 ), ne sont pas présentes en l’occurrence.

    VII. Conclusion

    296.

    Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre d’abord à la quatrième et ensuite à la troisième question préjudicielle posées par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre administrative), Royaume-Uni] de la manière suivante :

    1).

    a)

    Dans le cadre du contrôle juridictionnel des accords internationaux conclus par l’Union européenne ainsi que des actes de l’Union qui approuvent ou qui mettent en œuvre pareils accords, l’invocabilité des règles du droit international est soumise aux conditions suivantes indépendamment de leur appartenance à une ou plusieurs sources du droit international : l’Union doit être liée par la règle invoquée, son contenu doit être inconditionnel et suffisamment précis et, enfin, sa nature et son économie ne doivent pas s’opposer au contrôle juridictionnel de l’acte contesté.

    b)

    Le principe énoncé par la Cour internationale de justice dans l’affaire de l’or monétaire pris à Rome en 1943, selon lequel elle ne peut exercer sa juridiction à l’égard d’un État qui n’est pas partie dans la procédure pendante devant elle sans son consentement, n’est pas applicable au contrôle juridictionnel des accords internationaux conclus par l’Union européenne ainsi que des actes de l’Union qui approuvent ou qui mettent en œuvre pareils accords.

    2.

    a)

    L’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc et le protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par cet accord sont incompatibles avec l’article 3, paragraphe 5, TUE, l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, et les articles 23 TUE et 205 TFUE, en ce qu’ils s’appliquent au territoire du Sahara occidental et aux eaux y adjacentes.

    b)

    Le règlement (CE) no 764/2006 du Conseil, du 22 mai 2006, relatif à la conclusion de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc, la décision 2013/785/UE du Conseil, du 16 décembre 2013, relative à la conclusion, au nom de l’Union européenne, du protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc et le règlement (UE) no 1270/2013 du Conseil, du 15 novembre 2013, relatif à la répartition des possibilités de pêche au titre du protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc sont invalides.


    ( 1 ) Langue originale : le français.

    ( 2 ) JO 2006, L 141, p. 4. La conclusion de cet accord a été approuvée par le règlement (CE) no 764/2006 du Conseil, du 22 mai 2006, relatif à la conclusion de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc (JO 2006, L 141, p. 1).

    ( 3 ) JO 2013, L 328, p. 2. La conclusion de ce protocole a été approuvée par la décision 2013/785/UE du Conseil, du 16 décembre 2013, relative à la conclusion, au nom de l’Union européenne, du protocole entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc (JO 2013, L 349, p. 1).

    ( 4 ) JO 2013, L 328, p. 40.

    ( 5 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 41).

    ( 6 ) Voir JO 2007, L 78, p. 31.

    ( 7 ) Voir article 1er, paragraphe 1, du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc (JO 2006, L 141, p. 9).

    ( 8 ) JO 2014, L 228, p. 1.

    ( 9 ) Voir arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin), point 39. Il s’agit de l’arrêt de la juridiction de renvoi sur lequel elle a fondé sa demande de décision préjudicielle.

    ( 10 ) Voir arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin), points 40, 43, 48 et 49.

    ( 11 ) Une prorogation du délai d’une semaine a été accordée au gouvernement français.

    ( 12 ) Arrêt du 30 avril 1974, Haegeman (181/73, EU:C:1974:41, point 4). Voir également, en ce sens, arrêts du 30 septembre 1987, Demirel (12/86, EU:C:1987:400, point 7) ; du 15 juin 1999, Andersson et Wåkerås-Andersson (C‑321/97, EU:C:1999:307, point 26), et du 25 février 2010, Brita (C‑386/08, EU:C:2010:91, point 39).

    ( 13 ) Plus récemment, voir arrêt du 28 mars 2017, Rosneft (C‑72/15, EU:C:2017:236, points 108 à 117).

    ( 14 ) Voir arrêt du 9 octobre 2014, Ahlström e.a. (C‑565/13, EU:C:2014:2273).

    ( 15 ) Voir arrêt du 13 décembre 1989, Grimaldi (C‑322/88, EU:C:1989:646, point 8). Voir également, en ce sens, arrêts du 11 mai 2006, Friesland Coberco Dairy Foods (C‑11/05, EU:C:2006:312, point 36), et du 13 juin 2017, Florescu e.a. (C‑258/14, EU:C:2017:448, point 30).

    ( 16 ) Arrêt du 28 mars 2017, Rosneft (C‑72/15, EU:C:2017:236, point 66 et jurisprudence citée). C’est moi qui souligne.

    ( 17 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 1155, p. 331.

    ( 18 ) Voir avis 1/15 (Accord PNR UE-Canada), du 26 juillet 2017 (EU:C:2017:592, point 67).

    ( 19 ) Avis 1/75 (Arrangement OCDE – Norme pour les dépenses locales), du 11 novembre 1975 (EU:C:1975:145).

    ( 20 ) Avis 1/15 (Accord PNR UE-Canada), du 26 juillet 2017 (EU:C:2017:592, point 70).

    ( 21 ) Voir arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 309) et article 218, paragraphe 11, TFUE.

    ( 22 ) Je parle de « compatibilité » et non pas de « validité » pour éviter la confusion avec les raisons de nullité des traités qui sont limitativement énumérées aux articles 46 à 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités.

    ( 23 ) Voir arrêt du 9 août 1994, France/Commission (C‑327/91, EU:C:1994:305, points 13 à 17) où la Cour a jugé que le recours en annulation introduit par la République française devait cibler l’acte par lequel la Commission avait autorisé la conclusion de l’accord international en cause plutôt que l’accord lui-même.

    ( 24 ) Voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 289) qui renvoie à l’arrêt du 10 mars 1998, Allemagne/Conseil (C‑122/95, EU:C:1998:94).

    ( 25 ) Voir arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, points 283, 284, 289, 304, 308, 316 et 326).

    ( 26 ) Voir article 3, paragraphe 5, TUE et arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 101 et jurisprudence citée).

    ( 27 ) Voir Etienne, J., « L’accord de pêche CE-Maroc : quels remèdes juridictionnels européens à quelle illicéité internationale ? », Revue belge de droit international, 2010, p. 77 à 107, spéc. p. 104 et 105.

    ( 28 ) Voir, en ce sens, arrêt du 22 décembre 2008, Régie Networks (C‑333/07, EU:C:2008:764, point 124 et jurisprudence citée).

    ( 29 ) Voir, en ce sens, arrêts du 14 septembre 1999, Commission/Belgique (C‑170/98, EU:C:1999:411, point 42), ainsi que du 4 juillet 2000, Commission/Portugal (C‑84/98, EU:C:2000:359, point 40).

    ( 30 ) Cette procédure prévoit la notification d’un instrument ayant pour objet de déclarer la nullité du traité ou la décision de s’en retirer. Si une objection est soulevée par l’autre partie et que les parties ne peuvent arriver à une solution, il est prévu de soumettre le différend à la Cour internationale de justice ou à un tribunal arbitral ad hoc. Il en va de même pour la convention de Vienne sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales, conclue à Vienne le 21 mars 1986, qui n’est toutefois pas encore en vigueur (voir ses articles 65 à 68). Comme les organisations internationales ne peuvent saisir la Cour internationale de justice, cette convention prévoit que la saisine de cette juridiction peut se faire par la procédure d’avis instaurée par l’article 96 de la charte des Nations unies. Si l’Assemblée générale de l’ONU ou son Conseil de sécurité ne font pas droit à la demande d’activer cette procédure, le différend peut être soumis à une procédure d’arbitrage.

    ( 31 ) CIJ Recueil 1954, p. 19.

    ( 32 ) Comme la Cour internationale de justice l’a rappelé, « l’un des principes fondamentaux [de son] [s]tatut est qu’elle ne peut trancher un différend entre des États sans que ceux-ci aient consenti à sa juridiction » [Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt (CIJ Recueil 1995, p. 90, point 26 et jurisprudence citée)].

    ( 33 ) Voir premier considérant et article 1er du règlement no 764/2006.

    ( 34 ) Voir considérant 2 et article 1er de la décision 2013/785.

    ( 35 ) Voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973).

    ( 36 ) Voir, également, considérant 1 du règlement no 764/2006.

    ( 37 ) Voir appendice 2 de l’annexe au protocole de 2013.

    ( 38 ) Voir appendice 4 de l’annexe du protocole de 2013.

    ( 39 ) Voir Bennafla, K., « Illusion cartographique au Nord, barrière de sable à l’Est : les frontières mouvantes du Sahara occidental », L’Espace politique, 2013, point 212, accessible sur le site Internet http://espacepolitique.revues.org/2644.

    ( 40 ) Selon la Commission, les captures effectuées sont réparties entre les six zones de pêche établies par l’accord de pêche et le protocole de 2013 de la manière suivante : 1138 tonnes dans la zone de pêche no 1 ; 406 tonnes dans la zone de pêche no 2 ; 191 tonnes dans la zone de pêche no 3 ; 5035 tonnes dans la zone de pêche no 4 ; 234 tonnes dans la zone de pêche no 5 ; et 75686 tonnes dans la zone de pêche no 6. Même si toutes les tonnes pêchées n’ont pas la même valeur, il est manifeste que l’accord de pêche et le protocole de 2013 s’appliquent presque exclusivement aux eaux adjacentes au Sahara occidental.

    ( 41 ) L’existence d’un lien direct entre l’accord de pêche en cause dans l’affaire au principal et les accords de pêche conclus entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc est confirmée par l’acte relatif aux conditions d’adhésion du Royaume d’Espagne et de la République portugaise et aux adaptations des traités (JO 1985, L 302, p. 23) dont « les articles 167, paragraphe 3, et 354, paragraphe 3 […] en ce qu’ils se réfèrent aux activités de pêche, imposent au Conseil de réserver les activités de pêche auxquelles se livraient l’Espagne et le Portugal sur la base des accords de pêche qu’ils avaient conclus avant leur adhésion [à l’Union] » (arrêt du 8 mars 1995, Hansa-Fisch/Commission, T‑493/93, EU:T:1995:47, point 37).

    ( 42 ) Voir accord de coopération en matière de pêche maritime entre le gouvernement du Royaume d’Espagne et le gouvernement du Royaume du Maroc, signé à Rabat le 17 février 1977 (qui n’est jamais entré en vigueur), et protocole d’accord transitoire en matière de pêche maritime, signé à Rabat le 29 juin 1979 (BOE no 253 du 22 octobre 1979, p. 24551), qui parlent de la zone de pêche au sud du Cap Noun (ce cap se situe au parallèle 29°N, ce qui correspond à la ligne de base pour les zones de pêche nos 4 et 6 de l’accord de pêche) et qualifient cette zone d’eaux sous juridiction marocaine (« aguas bajo jurisdicción marroquí »). Voir également accord du 1er août 1983 de coopération sur la pêche maritime entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc (BOE no 243 du 11 octobre 1983, p. 27588) dont l’article 1er se réfère aux eaux sous juridiction marocaine (« aguas bajo jurisdicción marroquí »). Son annexe II différencie également deux zones de pêche, une au nord et une au sud du Cap Noun. Celle du sud couvrait les eaux adjacentes au Sahara occidental.

    ( 43 ) Voir arrêt du 9 octobre 2014, Ahlström e.a. (C‑565/13, EU:C:2014:2273, point 17). Voir, également, ordonnance du 30 avril 1999, Pescados Congelados Jogamar/Commission (T‑311/97, EU:T:1999:89, point 6) relative à un navire de pêche d’un armateur espagnol arraisonné par un patrouilleur marocain et détourné vers le port de la ville d’El Aaiun située au Sahara occidental.

    ( 44 ) Voir dahir portant loi no 1-76-468 du 6 août 1976 modifiant le dahir no 1-59-351 du 2 décembre 1959 relatif à la division administrative du Royaume, Bulletin officiel du Royaume du Maroc, no 3328, p. 914.

    ( 45 ) Voir convention relative au tracé de la frontière d’État établie entre la République islamique de Mauritanie et le Royaume du Maroc, signée à Rabat le 14 avril 1976, Annuaire de l’Afrique du Nord, 1976, vol. 15, p. 848 et 849, et dahir no 1-76-380 du 16 avril 1976 portant ratification et publication de cette convention, Bulletin officiel du Royaume du Maroc, no 3311-bis, p. 499.

    ( 46 ) Voir dahir no 2-79-430 du 14 août 1979 modifiant et complétant les articles 1er et 2 du dahir no 1-59-351 du 2 décembre 1959 relatif à la division administrative du Royaume, Bulletin officiel du Royaume du Maroc, no 3485, p. 489.

    ( 47 ) Disponibles sur le site Internet du Conseil (http://register.consilium.europa.eu/doc/srv?l=EN&f=ST%2015723%202013%20ADD%201).

    ( 48 ) Selon le Royaume des Pays-Bas, « [l]e protocole de 2013 ne se réfère pas explicitement au Sahara occidental mais permet son application aux zones maritimes adjacentes au Sahara occidental qui ne relèvent ni de la souveraineté ni de la juridiction du Royaume du Maroc » (« The protocol does not explicitly refer to […] Western Sahara, but allows for its application to maritime areas adjacent to […] Western Sahara that are not under the sovereignty or juridiction of Morocco »). Voir déclaration du Royaume des Pays-Bas contenue dans le document du Conseil 15723/13 Add 1 du 14 novembre 2013 disponible sur le site Internet du Conseil http://register.consilium.europa.eu/doc/srv?l=EN&f=ST%2015723%202013%20ADD%201. Souligné par mes soins.

    ( 49 ) Voir déclarations contenues dans le document du Conseil 15723/13 Add 1 du 14 novembre 2013 disponible sur le site Internet du Conseil http://register.consilium.europa.eu/doc/srv?l=EN&f=ST%2015723%202013%20ADD%201.

    ( 50 ) Voir points 48, 74, 84, 102 de l’arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864) où la Cour parle de la « légalité », de l’« invalidité » ou de la « validité d’un acte de l’Union, tel que la directive 2008/101 ». Souligné par mes soins.

    ( 51 ) Voir points 23 et 24 de ses réponses aux questions écrites posées par la Cour.

    ( 52 ) Voir, en ce sens, la distinction entre le contrôle de validité des accords internationaux conclus par l’Union (en ce compris au regard du droit international auquel renvoie l’article 3, paragraphe 5, TUE) et le contrôle de validité des actes internes de l’Union au regard du droit international faite dans Lenaerts, K., Maselis, I., et Gutman, K., EU Procedural Law, Oxford University Press, Oxford, 2014, § 10.05 et 10.08.

    ( 53 ) Voir articles 3 à 6 de la charte des Nations unies.

    ( 54 ) Pour la notion d’obligations erga omnes, voir avis consultatif du 9 juillet 2004 sur les conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 155). Cette notion a été également reconnue par la Cour au point 88 de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973).

    ( 55 ) Avis 2/15 (Accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 298 et jurisprudence citée).

    ( 56 ) Voir, en ce sens, ordonnance du 30 avril 1999, Pescados Congelados Jogamar/Commission (T‑311/97, EU:T:1999:89, point 12) : « Par lettre du 29 juillet 1997, ainsi que lors d’une réunion tenue le même jour entre M. Gallimore, chargé d’affaires de la délégation de la Commission à Rabat, et M. Rhanmi, secrétaire général du ministère de la Pêche marocain, les autorités [de l’Union] ont convoqué une session extraordinaire de la commission mixte prévue à l’article 10 de l’accord [de pêche UE-Maroc de 1996]. Cette invitation a été répétée à plusieurs reprises. Néanmoins, les autorités marocaines ont chaque fois rejeté l’invitation, considérant qu’il n’y avait pas violation de l’accord. » C’est moi qui souligne.

    ( 57 ) Article 3, paragraphe 5, TUE. C’est moi qui souligne. Voir, également, l’article 21, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, l’article 21, paragraphe 2, sous b) et c), TUE, les articles 23 TUE et 205 TFUE. La Cour a jugé que loin d’être programmatiques, ces dispositions imposent, entre autres, le respect des droits de l’homme et du droit international « à toute action de l’Union, y compris dans le domaine de la PESC » (voir arrêt du 14 juin 2016, Parlement/Conseil, C‑263/14, EU:C:2016:435, point 47).

    ( 58 ) Arrêt du 9 août 1994, France/Commission (C‑327/91, EU:C:1994:305, point 16).

    ( 59 ) Voir Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif (CIJ Recueil 2010, p. 403, point 79).

    ( 60 ) Pour une lecture très flexible de cette condition mais pas vraiment soutenue par le libellé du point 107 dudit arrêt, voir Lenaerts, K., « Direct applicability and direct effect of international law in the EU legal order », publié dans Govaere, I., Lannon, E., van Elsuwege, P., et Adam, S. (eds), The European Union in the World: Essays in Honour of Marc Maresceau, Brill, Leyde, 2013, p. 45 à 64, spéc. p. 61.

    ( 61 ) Le critère ressemble beaucoup à celui de la qualité et de l’intérêt à agir qui dans le contexte d’un renvoi préjudiciel ne devraient, à mon avis, être appréciés qu’à l’égard du droit national.

    ( 62 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 110).

    ( 63 ) Arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 110).

    ( 64 ) Arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 283 et jurisprudence citée). Souligné par mes soins. Le fait que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne soit devenue obligatoire en 2009 n’exclut pas la pertinence de la référence aux instruments internationaux qui lient tous les États membres.

    ( 65 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 993, p. 3.

    ( 66 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 999, p. 171.

    ( 67 ) C’est moi qui souligne.

    ( 68 ) Voir point 1 de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux approuvée par la résolution de l’Assemblée générale de l’ONU 1514 (XV) du 20 décembre 1960 ; avis no 2 de la Commission d’arbitrage de la Conférence européenne pour la paix en Yougoslavie [composée de MM. Robert Badinter, président du Conseil constitutionnel français, Roman Herzog, président de la Bundesverfassungsgericht (Cour constitutionnelle fédérale, Allemagne), Aldo Corasaniti, président de la Corte costituzionale (Cour constitutionnelle, Italie), Francisco Tomás y Valiente, président du Tribunal Constitucional (Cour constitutionnelle, Espagne) et Mme Irène Pétry (présidente de la Cour d’arbitrage belge)], 1993, International Law Reports, vol. 92, p. 168 à 169, points 2 et 3 ; Gros-Espiell, H.,Le droit à l’autodétermination : Application des résolutions de l’ONU, 1980, E/CN.4/Sub.2/405/Rev.1., point 57) ; Doehring, K., « Self-Determination », publié dans Simma, B. (ed.), The Charter of the United Nations: A Commentary, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2002, vol. 1, p. 48 à 53 ; Dobelle, J.-F., « Article 1, paragraphe 2 », publié dans Cot, J.-P., Pellet, A., et Forteau, M., La Charte des Nations unies : commentaire article par article, 3e éd., Economica, Paris, 2005, p. 337 à 356, spéc. p. 340 à 341 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 51 ; Saxer, U., Die international Steuerung der Selbstbestimmung und der Staatssentstehung, Springer, Heidelberg, 2010, p. 238 à 249 ; Oeter, S., « Self-Determination », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G., et Paulus, A. (eds), The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. I, p. 313 à 333, spéc. p. 322 ; Crawford, J., « Third Party Obligations with respect to Israeli Settlements in the Occupied Palestinian Territories », avis juridique du 24 janvier 2012, point 26, disponible sur le site Internet (https://www.tuc.org.uk/sites/default/files/tucfiles/LegalOpinionIsraeliSettlements.pdf).

    ( 69 ) Probablement traduit du terme anglais « subjugation ».

    ( 70 ) Voir Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif (CIJ Recueil 2010, p. 403, point 79 et jurisprudence citée).

    ( 71 ) Voir Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif (CIJ Recueil 2010, p. 403, point 79).

    ( 72 ) Voir Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt, CIJ Recueil 1995, p. 90, point 29, et Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 88 et 156).

    ( 73 ) Voir par exemple article 1er, paragraphe 2, de la charte des Nations unies et article 1er commun au PIDESC et PIDCP.

    ( 74 ) Point 88 de cet arrêt.

    ( 75 ) Point 89 de cet arrêt.

    ( 76 ) « Les buts des Nations [u]nies sont les suivants : […] [d]évelopper entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde ; […] ». C’est moi qui souligne.

    ( 77 ) C’est moi qui souligne. L’utilisation du participe « lié » est significative puisque l’Union n’est pas partie à la charte des Nations unies.

    ( 78 ) Voir titre VIII intitulé « Égalité des droits des peuples et droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ».

    ( 79 ) Voir Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 121 et 122).

    ( 80 ) Voir Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif (CIJ Recueil 2010, p. 403, point 79 et jurisprudence citée).

    ( 81 ) Voir points 102 à 103 des présentes conclusions, ainsi que Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 88).

    ( 82 ) Voir Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif (CIJ Recueil 1971, p. 16, point 52) ; Sahara occidental, avis consultatif (CIJ Recueil 1975, p. 12, points 55 à 58), et Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 88). Voir également, en ce sens, Oeter, S., « Self-Determination », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G., et Paulus (eds), A., The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. I, p. 313 à 333, spéc. p. 320 et 321, et Dobelle, J.-F., « Article 1, paragraphe 2 », publié dans Cot, J.-P., Pellet, A., et Forteau, M., La Charte des Nations unies : commentaire article par article, 3e éd., Economica, Paris, 2005, p. 337 à 356.

    ( 83 ) Voir également, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973, points 90 à 92).

    ( 84 ) Voir Sahara occidental, avis consultatif (CIJ Recueil 1975, p. 12) et arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973).

    ( 85 ) Voir Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt (CIJ Recueil 1995), p. 90, point 29, et Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 88 et 156).

    ( 86 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 155). Voir également, en ce sens, Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited, deuxième phase, arrêt (CIJ Recueil 1970, p. 32, point 33).

    ( 87 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 159). À mon avis, cette obligation de non-reconnaissance est, en soi, un principe du droit international qui remplit les critères d’invocabilité énoncés au point 96 des présentes conclusions.

    ( 88 ) Voir arrêt du 25 juin 1985 no 1981 de la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie) dans l’affaire Yasser Arafat, Rivista di Diritto Internazionale, 1986, p. 885 à 889 ; ordonnance du 26 octobre 2004 du Bundesverfassungsgericht (Cour constitutionnelle fédérale, Allemagne), 2 BvR 955/00, 1038/01, point 97 ; opinion individuelle de M. Ammoun, vice-président, Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif (CIJ Recueil 1971, p. 16, 77 et 78) ; Commission du droit international, « Projet d’articles sur le droit des traités et commentaires », Annuaire de la Commission du droit international, 1966, vol. II, p. 270 [p. 248 dans la version anglaise] ; Commission du droit international, « Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite et commentaires », Annuaire de la Commission du droit international, 2001, vol. II, deuxième partie, p. 91 [p. 85 dans la version anglaise] ; point 3.2 de l’exposé écrit du Royaume des Pays-Bas, Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif (CIJ Recueil 2010, p. 403) ; Cassese, A., Self-Determination of Peoples: A Legal Reappraisal, Cambridge University Press, Cambridge, 2005, p. 133 et 136 ; Raič, D., Statehood and the Law of Self-Determination, Kluwer Law International, Alphen-sur-le-Rhin, 2012, p. 218 et 219 ; Oeter, S., « Self-Determination », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G., et Paulus, A. (eds), The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. I, p. 313 à 333, p. 316.

    ( 89 ) Voir CIJ Mémoires, Sahara occidental, vol. I, p. 207, point 344.

    ( 90 ) Voir CIJ Mémoires, Sahara occidental, vol. V, p. 179. Le Royaume du Maroc a insisté sur l’intégrité de son territoire pour fonder sa revendication du territoire du Sahara occidental, mais la Cour internationale de justice a rejeté sa thèse, en jugeant que le peuple du Sahara occidental jouissait pleinement du droit à l’autodétermination.

    ( 91 ) La jurisprudence de la Cour internationale de justice citée au point 127 des présentes conclusions se réfère également à l’obligation des États de veiller à ce qu’il soit mis fin aux entraves à l’exercice du droit d’un peuple à l’autodétermination. Il n’est pas nécessaire que je m’y réfère ici.

    ( 92 ) Voir résolution 1803 (XVII) de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 93 ) Voir Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt (CIJ Recueil 2005, p. 168, point 244).

    ( 94 ) S/2002/161, point 14.

    ( 95 ) S/2002/161, point 14

    ( 96 ) S/2002/161, point 24.

    ( 97 ) S/2002/161, point 25.

    ( 98 ) Voir points 27, 44.1 et 47.4 de la demande de décision préjudicielle, ainsi que points 40, 43, 48 et 49 de l’arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin).

    ( 99 ) Voir points 234 à 255 des présentes conclusions.

    ( 100 ) Voir point 238 des présentes conclusions.

    ( 101 ) Voir point 127 des présentes conclusions.

    ( 102 ) Voir points 87, 92, 93, 97, 106 à 108, 114, 116, 123 et 125.

    ( 103 ) Voir points 60 à 74 des présentes conclusions.

    ( 104 ) Voir, en ce sens, arrêt du 9 octobre 2014, Ahlström e.a. (C‑565/13, EU:C:2014:2273, point 33).

    ( 105 ) Voir article 1er commun au PIDESC et au PIDCP, point 2 de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU et titre VIII de l’acte final d’Helsinki de 1975.

    ( 106 ) Voir Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 159).

    ( 107 ) Pour un exposé complet des faits, voir Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 203 à 225 ; Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1980, vol. II, p. 105 à 117.

    ( 108 ) Voir points 12 à 18 de l’arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin).

    ( 109 ) L’idée d’un référendum n’a pas été accueillie avec enthousiasme par le Royaume du Maroc. Lors d’une discussion privée avec M. Kissinger, secrétaire d’État des États-Unis, le roi du Maroc, Hassan II, lui a déclaré ce qui suit : « J’ai dit [au ministre espagnol des Affaires étrangères] que je suis d’accord que l’Espagne reste mais je ne suis pas d’accord que le Sahara occidental devienne indépendant. Je préfère la présence de l’Espagne à l’autodétermination pour 30000 personnes. » M. Kissinger a répondu : « [Le président algérien] m’a demandé hier ce que je pensais de cela et j’ai dit : auto-détermination pour 30-40 000 personnes qui ne savent même pas où ils habitent ? ». Voir mémorandum de conversation (Rabat, 15 octobre 1974, 13h15), publié dans Burton, M. F., Foreign Relations of the United States, 1969-1976, United States Government Printing Office, Washington, 2014, vol. E-9, partie 1 (Documents sur l’Afrique du Nord, 1973-1976), p. 258 à 261, spéc. p. 258.

    ( 110 ) Voir rapport du 10 octobre 1975 de la Mission de visite des Nations unies au Sahara espagnol, publié dans le « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/10023/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. III, p. 12 à 133, point 229.

    ( 111 ) Voir Sahara occidental, avis consultatif (CIJ Recueil 1975, p. 12, point 162).

    ( 112 ) Voir Sahara occidental, avis consultatif (CIJ Recueil 1975, p. 12, point 162).

    ( 113 ) Voir point 30 de l’arrêt du 21 décembre 2016, Conseil/Front Polisario (C‑104/16 P, EU:C:2016:973).

    ( 114 ) Voir résolution 379 (1975) du 2 novembre 1975 du Conseil de sécurité de l’ONU.

    ( 115 ) Établie en 1967 par l’administration espagnole, la Djemââ était un organe consultatif composé de 103 membres dont les maires de villes importantes, 40 chefs de tribus (cheikhs), 40 représentants de groupes familiaux et 16 représentants de groupes professionnels. Voir rapport du 10 octobre 1975 de la Mission de visite des Nations unies au Sahara espagnol publié dans le « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/10023/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. III, p. 12 à 133, points 126 à 142.

    ( 116 ) Voir rapport du 8 novembre 1975 établi par le Secrétaire général en application de la résolution 379 (1975) sur la situation concernant le Sahara occidental (S/11874), point 17. Voir également, procès-verbal de la 1854e séance du Conseil de sécurité qui a eu lieu le 6 novembre 1975 (S/PV.1854), points 47 et 48.

    ( 117 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 988, p. 259.

    ( 118 ) Selon les termes de ces accords, les délégations espagnole, marocaine et mauritanienne ont convenu de la reconnaissance de droits de pêche dans les eaux adjacentes au Sahara occidental en faveur de 800 bateaux espagnols pour une durée de 20 ans selon les mêmes conditions que celles existant le 14 novembre 1975. Voir Cortes, Diario de sesiones del Congreso de los diputados, 1978, no 15, p. 498 (discours de M. Manuel Marín González, député du Partido Socialista Obrero Español, par la suite vice-président et président intérimaire de la Commission européenne). Voir également, en ce sens, Dessaints, J., « Chronique politique Maroc », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1975, vol. 14, p. 457 à 476, spéc. p. 463 ; Alemany Torres, F., « Acuerdo de pesca con Marruecos », El País,8 février 1978.

    ( 119 ) Voir Cortes, Diario de sesiones del Congreso de los diputados, 1978, no 15, p. 522 et 546.

    ( 120 ) Voir Cortes, Diario de sesiones del Congreso de los diputados, 1978, no 15, p. 546.

    ( 121 ) Voir câble 1975MADRID08029 du 15 novembre 1975 de l’ambassadeur W. Stabler au ministre H. Kissinger (« [le ministre M. Esteban] Herrera a également dit que des “accords-cadres” ont été élaborés avec le Maroc et la Mauritanie sur d’autres matières pertinentes : […] et les droits de pêche ») ; câble 1975STATE276309 du 21 novembre 1975 du ministre H. Kissinger à la Mission permanente des États-Unis d’Amérique à l’ONU (« [selon l’ambassadeur marocain M. Abdelhadi Boutaleb] copie de l’accord sera déposée par les signataires auprès du secrétaire général [de l’ONU] K. Waldheim mais la version déposée ne comportera pas les accords subsidiaires donnant à l’Espagne des droits de pêche dans les eaux du Sahara occidental et 35 % de participation espagnole dans les mines de phosphate »). Les câbles diplomatiques sont disponibles sur le site Internet https://wikileaks.org/.

    ( 122 ) Voir « Document historique d’El Guelta (Sahara occidental) signé le 28 novembre 1975 par 67 membres de l’Assemblée générale sahraouie, 3 membres sahraouis des Cortes (Parlement espagnol), les représentants des autres membres de la Djemââ et par plus de 60 Chioukhs et notables des tribus sahraouies », annexé à la lettre datée du 9 décembre 1975, adressée au secrétaire général de l’ONU par le représentant permanent de l’Algérie auprès de l’ONU (S/11902).

    ( 123 ) Voir résolutions 3458 A et B (XXX) du 10 décembre 1975.

    ( 124 ) Voir paragraphe 8 de cette résolution.

    ( 125 ) Voir paragraphe 1 de cette résolution.

    ( 126 ) Voir paragraphe 3 de cette résolution.

    ( 127 ) Voir paragraphe 4 de cette résolution.

    ( 128 ) Les neuf États membres de l’époque plus le Royaume d’Espagne et la République de Malte.

    ( 129 ) La République de Bulgarie, la République tchèque, la République de Chypre, la République de Pologne, et la République slovaque qui à l’époque composaient la Tchécoslovaquie, ainsi que la République slovène et la République de Croatie (en tant qu’États fédéraux de la Yougoslavie) et l’Estonie, la République de Lettonie et la République de Lituanie (en tant qu’États fédéraux de l’URSS).

    ( 130 ) La République hellénique, la Hongrie, la République d’Autriche, la République portugaise, la Finlande et le Royaume de Suède.

    ( 131 ) La Roumanie.

    ( 132 ) Paragraphe 1 de la résolution 3458 A (XXX). Voir également, en ce sens, paragraphe 2 de la résolution 3458 B (XXX).

    ( 133 ) Voir paragraphe 7 de la résolution 3458 A (XXX) et paragraphe 4 de la résolution 3458 B (XXX).

    ( 134 ) Voir paragraphes 7 et 8 de cette résolution.

    ( 135 ) Voir paragraphe 4 de cette résolution.

    ( 136 ) Voir « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 203 à 225, point 44 ; Dessaints, J., « Chronique politique Maroc », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1975, vol. 14, p. 457 à 476, spéc. p. 464.

    ( 137 ) Voir Keesing’s Record of World Events,13 février 1976, p. 27746.

    ( 138 ) « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 203 à 225, point 45.

    ( 139 ) Cela ne s’avère pas tout à fait exact. Le Royaume d’Espagne continue en effet à administrer l’espace aérien du Sahara occidental qui fait partie du secteur « OCE » de la « région d’information de vol » [Flight Information Region (FIR)] des îles Canaries. Voir cartes publiées sur le site Internet de l’ENAIRE (http://www.enaire.es/csee/ccurl/130/603/fir_canarias.swf).

    ( 140 ) Lettre datée du 26 février 1976, adressée au secrétaire général par le représentant permanent de l’Espagne auprès de l’ONU (S/11997).

    ( 141 ) La motion du 27 février 1976 votée par la Djemââ, Annuaire de l’Afrique du Nord, 1976, vol. 15, p. 847 et 848. Par son message au secrétaire général de l’ONU, M. Khatri Ould Said a Ould El Jomaini, président de la Djemââ, lui annonçait que « la Djemââ sahraouie, se réunissant en session extraordinaire aujourd’hui, jeudi 26 février 1976, à El Aaiun, a approuvé à l’unanimité la réintégration du [t]erritoire du Sahara au Maroc et à la Mauritanie conformément aux réalités historiques et aux liens qui ont toujours uni la population sahraouie à ces deux pays ». Voir « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 203 à 225, point 51.

    ( 142 ) Selon le secrétaire d’État des États-Unis, M. Cyrus Vance, « Waldheim [m’]a dit que […] le roi Hassan estime que le problème a été résolu et que le critère d’autodétermination a été rempli par la consultation de l’Assemblée sahraouie. Toutefois, ni l’Espagne, ni l’Algérie ne l’acceptent, tout en indiquant que [le roi] Hassan n’a consulté qu’une assemblée croupion composée des larbins marocains [a rump assembly consisting of Moroccan stooges] ». Voir télégramme du secrétaire d’État Vance à l’ambassade des États-Unis au Maroc du 20 mai 1977 publié dans Burton, M. F., Foreign Relations of the United States, 1977-1980, United States Government Printing Office, Washington, 2017, vol. XVII, partie 3 (Documents sur l’Afrique du Nord), p. 507 à 508, spéc. p. 508.

    ( 143 ) Cette même question a été reposée au sein du Parlement espagnol lors du débat sur la ratification de l’accord de pêche entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc de 1977 au cours duquel le ministre des Affaires étrangères du Royaume d’Espagne, M. Oreja Aguirre, a affirmé que l’Espagne ne reconnaissait pas la souveraineté du Royaume du Maroc sur le Sahara occidental et que le procès de décolonisation du Sahara occidental ne sera achevé qu’au moment où le peuple originaire de ce territoire exercera son droit à l’autodétermination conformément à la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU. Voir Cortes, Diario de sesiones del Congreso de los diputados, 1978, no 15, p. 522 et 523. Voir également, en ce sens, « Contestacíon del Gobierno a la pregunta formulada por don Gregorio Lopez Raimundo, del Grupo Parlamentario Mixto del, sobre política espanola hacia el Sahara », Boletin oficial de las Cortes generales, Série D, 23 septembre 1983, p. 223 et 224.

    ( 144 ) « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/31/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 203 à 225, point 46.

    ( 145 ) Voir convention relative au tracé de la frontière d’État établie entre la République islamique de Mauritanie et le Royaume du Maroc, signée à Rabat le 14 avril 1976, Annuaire de l’Afrique du Nord, 1976, vol. 15, p. 848 et 849.

    ( 146 ) Voir point 73 des présentes conclusions et documents y cités. Le 14 avril 1976, le Royaume du Maroc et la République islamique de Mauritanie ont signé l’accord de coopération pour la mise en valeur des territoires sahariens récupérés (Annuaire de l’Afrique du Nord, 1976, vol. 15, p. 849 et 850) qui prévoyait la participation de la République islamique de Mauritanie dans le capital social de la Société Fos Bucraâ (qui exploitait les phosphates du Sahara occidental) et une coopération dans le domaine de la pêche.

    ( 147 ) Voir lettre datée du 23 mai 1979 adressée par le chargé d’affaires par intérim de la mission permanente de la Mauritanie auprès de l’ONU à son secrétaire général (A/34/276).

    ( 148 ) « Rapport du comité spécial chargé d’étudier la situation en ce qui concerne l’application de la déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » (A/34/23/Rev.1), Documents officiels de l’Assemblée générale, 1977, vol. II, p. 105 à 117, point 32. Selon ce rapport, « le roi Hassan II a déclaré que “la solution de paix retenue ne devra [pas] […] entraîner la création d’un État étranger entre le Maroc et la Mauritanie” » (point 32).

    ( 149 ) Voir accord mauritano-sahraoui, signé à Alger le 10 août 1979, annexé à la lettre datée du 18 août 1979, adressée au secrétaire général de l’ONU par le représentant permanent de la République islamique de Mauritanie auprès de l’ONU (A/34/427).

    ( 150 ) Voir Hodges, T., « The Western Sahara,», Chicago Review Press, Chicago, 1984, p. 12.

    ( 151 ) Voir point 73 des présentes conclusions et documents cités.

    ( 152 ) 85 États ont voté pour, 6 contre, 41 se sont abstenus et 20 n’ont pas voté. Les États membres actuels de l’Union ont voté pour ou se sont abstenus. Voir également en ce sens le paragraphe 3 de la résolution 35/19 de l’Assemblée générale de l’ONU (88 États ont voté pour, 8 contre, 43 se sont abstenus et 15 n’ont pas voté).

    ( 153 ) Voir résolution 621 (1988) du 20 septembre 1988 du Conseil de sécurité de l’ONU et résolution 43/33 du 22 novembre 1988 de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 154 ) Rapport du 10 avril 2017 du secrétaire général de l’ONU sur la situation concernant le Sahara occidental (S/2017/307), point 82.

    ( 155 ) Je note avec intérêt que, après la cessation de ses fonctions, l’ambassadeur néerlandais, M. Peter van Walsum, envoyé spécial de l’ONU pour le Sahara occidental (2005-2008) a reconnu que « sur la base de l’avis consultatif de la Cour internationale de justice, le Front Polisario a la position la plus forte en droit international ». Voir van Walsum, P., « The question of Western Sahara », 16 décembre 2012, et « The question of Western Sahara (II) », 7 février 2013, publiés sur son site Internet http://www.petervanwalsum.com/the-question-of-western-sahara/.

    ( 156 ) Voir principe VI de la résolution 1541 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 157 ) Voir paragraphes 3 et 4 de la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU ; Bedjaoui, M., « Article 73 », publié dans Cot, J.-P., Pellet, A., et Forteau, M., La Charte des Nations unies : commentaire article par article, 3e éd., Economica, Paris, 2005, p. 1751 à 1767, spéc. p. 1761 ; Fastenrath, U., « Chapter XI Declaration Regarding Non-self-governing Territories », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G., et Paulus, A. (eds), The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. II, p. 1829 à 1839, spéc. p. 1834 et 1835.

    ( 158 ) Voir résolution 2351 (2017) du Conseil de sécurité de l’ONU qui « rappell[e] et réaffirm[e] toutes ses résolutions antérieures sur le Sahara occidental » et « décide de proroger le mandat de la [Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO)] ». Voir également, en ce sens, résolution 2229 (XXI) du 20 décembre 1966 de l’Assemblée générale de l’ONU, paragraphes 4 et 5 ; résolution 621 (1988) du 20 septembre 1988 du Conseil de sécurité de l’ONU, paragraphe 2, ainsi que la résolution 43/33 du 22 novembre 1988 de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 159 ) Voir Crawford, J., « Third Party Obligations with respect to Israeli Settlements in the Occupied Palestinian Territories », avis juridique du 24 janvier 2012, point 131, disponible sur le site Internet https://www.tuc.org.uk/sites/default/files/tucfiles/LegalOpinionIsraeliSettlements.pdf.

    ( 160 ) Voir Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 159).

    ( 161 ) Affaire du Vapeur Wimbledon (Royaume-Uni e.a. c. Allemagne), arrêt du 17 août 1923 (CPJI Série A, no 1, p. 25).

    ( 162 ) Délimitation maritime et questions territoriales entre Qatar et Bahreïn, fond, arrêt, (CIJ Recueil 2001, p. 40, point 185). Voir également, en ce sens, Plateau continental de la mer du Nord, arrêt (CIJ Recueil 1969, p. 3, point 96) ; Plateau continental de la mer Égée, arrêt (CIJ Recueil 1978, p. 3, point 86) ; Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt (CIJ Recueil 2009, p. 61, point 77), ainsi que Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), arrêt (CIJ Recueil 2012, p. 624, point 140).

    ( 163 ) Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), arrêt (CIJ Recueil 2012, p. 624, point 140 et jurisprudence citée).

    ( 164 ) Voir, en ce sens, point 73 des présentes conclusions et législation marocaine citée.

    ( 165 ) Discours de Sa Majesté le roi Mohammed VI à l’occasion du 39e anniversaire de la marche verte, 6 novembre 2014, disponible sur le site Internet (http://www.sahara.gov.ma/blog/messages-royaux/discours-de-sa-majeste-le-roi-mohammed-vi-a-loccasion-du-39eme-anniversaire-de-la-marche-verte/).

    ( 166 ) Au sens que ce terme a dans le contexte de l’exercice du droit à l’autodétermination. Voir principes VI, VIII et IX qui doivent guider les États membres de l’ONU pour déterminer si l’obligation de communiquer des renseignements, prévue à l’alinéa e) de l’article 73 de la charte des Nations unies, leur est applicable, approuvés par la résolution 1541 (XV) de l’Assemblée générale de l’ONU (voir points 117 et 118 des présentes conclusions).

    ( 167 ) Voir Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt, CIJ, Recueil 1995, p. 90, point 17 (c’est moi qui souligne). Voir, également, point 69 du mémoire en défense du Commonwealth d’Australie déposé dans cette affaire. La Cour internationale de justice n’a pas statué sur le fond de cette affaire en jugeant que l’absence au litige de la République d’Indonésie ne lui permettait pas d’exercer sa compétence.

    ( 168 ) Voir Sahara occidental, avis consultatif (CIJ Recueil 1975, p. 12, points 108 à 127, et, notamment, points 109, 110, 113 et 121).

    ( 169 ) Voir Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 121 et 122).

    ( 170 ) Voir point 71 des présentes conclusions.

    ( 171 ) Article 11 de l’accord de pêche.

    ( 172 ) Voir Cortes, Diario de sesiones del Congreso de los diputados, 1978, no 15, p 523, 546 et 547 (discours de M. Oreja Aguirre, ministre des Affaires étrangères) sur l’accord de coopération en matière de pêche maritime entre le gouvernement du Royaume du Maroc et le gouvernement du Royaume d’Espagne, signé à Rabat le 17 février 1977, et « Contestacíon del Gobierno a la pregunta formulada por don Gregorio Lopez Raimundo, del Grupo Parlamentario Mixto del, sobre política espanola hacia el Sahara », Boletin oficial de las Cortes generales, Série D, 23 septembre 1983, p. 224, sur tous les accords de pêche conclus jusqu’à cette époque entre le Royaume d’Espagne et le Royaume du Maroc.

    ( 173 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 1834, p. 3.

    ( 174 ) Voir décision 98/392/CE du Conseil, du 23 mars 1998 (JO 1998, L 179, p. 1).

    ( 175 ) Voir article 311, paragraphe 1, de la CNUDM. Les conventions de Genève sur le droit de la mer sont la convention sur la mer territoriale et la zone contiguë, faite à Genève, le 29 avril 1958 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 516, p. 205), la convention sur la haute mer, faite à Genève, le 29 avril 1958 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 450, p. 11), la convention sur la pêche et la conservation des ressources biologiques de la haute mer, faite à Genève, le 29 avril 1958 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 559, p. 258), ainsi que la convention sur le plateau continental, faite à Genève, le 29 avril 1958 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 499, p. 311).

    ( 176 ) « V[u] les dispositions de la convention des Nations unies sur le droit de la mer ».

    ( 177 ) Voir article 2, paragraphe 1, de la CNUDM, selon lequel « [l]a souveraineté de l’État côtier s’étend, au-delà de son territoire et de ses eaux intérieures et, dans le cas d’un État archipel, de ses eaux archipélagiques, à une zone de mer adjacente désignée sous le nom de mer territoriale ».

    ( 178 ) Voir article 55 de la CNUDM, selon lequel « [l]a [ZEE] est une zone située au-delà de la mer territoriale et adjacente à celle-ci, soumise au régime juridique particulier établi par [les articles 55 à 75 de ladite convention], en vertu duquel les droits et la juridiction de l’État côtier et les droits et libertés des autres États sont gouvernés par les dispositions pertinentes de la [c]onvention ». C’est moi qui souligne.

    ( 179 ) Voir articles 8 et 9 du dahir no 1-81-179 du 8 avril 1981 portant promulgation de la loi no 1-81 instituant une zone économique exclusive de 200 milles marins au large des côtes marocaines, Bulletin officiel du Royaume du Maroc, no 3575, p. 232, et article 4 du décret no 2-75-311 du 21 juillet 1975 déterminant les lignes de fermeture de baies sur les côtes marocaines et les coordonnées géographiques de la limite des eaux territoriales et de la zone de pêche exclusive marocaines, Bulletin officiel du Royaume du Maroc, no 3276, p. 996. Selon ces dispositions la ZEE marocaine ne s’étend pas au sud du Cap Juby/Pointe Stafford, ce qui correspond à la frontière entre le Royaume du Maroc et le Sahara occidental.

    ( 180 ) Voir « Domaine maritime : Le Conseil de gouvernement adopte deux projets de lois », Huffington Post Maroc, le 7 juillet 2017, et accessible sur le site Internet http://www.huffpostmaghreb.com/2017/07/07/loi-domaine-maritime-_n_17422798.html. Selon le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Royaume du Maroc, la création d’une ZEE au large des côtes du Sahara occidental était nécessaire pour « cimenter la tutelle juridique du Maroc sur ces eaux et barrer la route à toutes les allégations remettant en cause la souveraineté du Royaume sur cet espace ».

    ( 181 ) Voir article 5, paragraphe 4, de l’accord de pêche.

    ( 182 ) Voir note en bas de page 179.

    ( 183 ) En ce sens, je ne comprends pas pourquoi l’Union verse au Royaume du Maroc plusieurs millions d’euros par an à titre de contrepartie financière pour pouvoir pêcher dans les eaux adjacentes au Sahara occidental sur lesquelles le Royaume du Maroc n’a établi aucune zone maritime, ni bien sûr de ZEE, alors que les instruments qu’il a déposés à l’ONU conformément à l’article 75, paragraphe 2, de la CNUDM n’incluent pas les eaux adjacentes au Sahara occidental dans les zones maritimes marocaines.

    ( 184 ) Voir article 56, paragraphe 1, sous a), de la CNUDM (« [d]ans la [ZEE], l’État côtier a […] des droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles, biologiques ou non biologiques, des eaux surjacentes aux fonds marins, des fonds marins et de leur sous-sol […] »). C’est moi qui souligne.

    ( 185 ) Voir, par exemple, article 5, paragraphe 4, de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République des Seychelles (JO 2006, L 290, p. 2) ; article 2, point a), et article 11, de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République islamique de Mauritanie (JO 2006, L 343, p. 4) ; article 2, sous a), et article 11, de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et la République de Guinée-Bissau pour la période du 16 juin 2007 au 15 juin 2011 (JO 2007, L 342, p. 5) ; article 2, sous c), de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la République de Côte d’Ivoire et la Communauté européenne (JO 2008, L 48, p. 41) ; article 1er, sous f), de l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable entre l’Union européenne et la République du Sénégal (JO 2014, L 304, p. 3).

    ( 186 ) Voir article 7 de l’accord de pêche ainsi qu’article 3, paragraphes 1, 4 et 5, et article 6 du protocole de 2013. Ces dispositions n’assurent pas que la contrepartie financière bénéficie au peuple du Sahara occidental de manière proportionnée aux quantités de captures effectuées dans les eaux adjacentes au Sahara occidental. Voir points 271 à 285 des présentes conclusions.

    ( 187 ) Voir Milano, E., « The New Fisheries Partnership Agreement between the EC and Morocco: Fishing too South? », Anuario español de derecho internacional, 2006, vol. 22, p. 413 à 457, spéc. p. 442 à 447, et Dawidowicz, M., « Trading Fish or Human Rights in Western Sahara? Self-Determination, Non-Recognition and the EC-Morocco Fisheries Agreement », publié dans French, D. (ed.), Statehood, Self-Dtermination and Minorities: Reconciling Tradition and Modernity in International Law, Cambridge University Press, Cambridge, 2013, p. 250 à 276.

    ( 188 ) La juridiction de renvoi partage cette appréciation. Il en va de même de l’administration fiscale et douanière et du ministre de l’Environnement, de l’Alimentation et des Affaires rurales. Voir points 27 et 44.1, 47.4 de la décision de demande préjudicielle ainsi que points 40, 43, 48 et 49 de l’arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin). La Commission n’exclut pas que le Royaume du Maroc pourrait être considéré comme puissance occupante du Sahara occidental. Voir point 43 de ses réponses aux questions écrites posées par la Cour.

    ( 189 ) Voir point 192 des présentes conclusions. Voir Milano, E., « The New Fisheries Partnership Agreement between the EC and Morocco: Fishing too South? », Anuario español de derecho internacional, 2006, vol. 22, p. 413 à 457, spéc. p. 430.

    ( 190 ) JO 2011, C 286 E, p. 1. D’après cette réponse, « [s]elon la position des Nations unies en la matière, à laquelle l’UE adhère, le Sahara occidental est considéré comme un “territoire non autonome” et le Maroc est de facto sa puissance administrante ».

    ( 191 ) Voir Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt, CIJ Recueil 1995, p. 90, point 13. Dans cette affaire, la République portugaise avait soutenu que, malgré l’occupation du Timor-Oriental par la République d’Indonésie, le Commonwealth d’Australie ne pouvait conclure un traité international applicable au Timor-Oriental qu’avec la République portugaise vu sa qualité de puissance administrante de ce territoire. Il n’est donc guère étonnant que, dans ses observations écrites déposées dans le cadre de la présente affaire, le gouvernement portugais n’ait pas pris position sur la validité des actes contestés en se bornant à dire que leur validité ne pouvait être jugée dans le cadre de l’article 3, paragraphe 5, TUE et que les règles du droit international invoquées par WSC n’étaient pas invocables. Il n’a pas non plus répondu aux questions qui lui ont été adressées par la Cour, ni participé lors de l’audience.

    ( 192 ) Voir arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin), point 40, et résolution 3458 A (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU qui ne mentionne pas cet accord et se réfère au Royaume d’Espagne comme la puissance administrante. Voir également en ce sens Brownlie, I., African Boundaries: a Legal and Diplomatic Encyclopaedia, C. Hurst & Company, Londres, 1979, p. 149 à 158, selon lequel « [e]n 1976, l’Espagne a transféré le territoire du Sahara espagnol au Maroc et à la Mauritanie et une partition a été organisée [….] Étant donné que la légitimité de l’arrangement de partition est mise en doute et est dépourvue de base légale, les frontières du Sahara occidental méritent d’être examinées » (p. 149) (« In 1976 Spain transferred the territorry of Spanish Sahara to Morocco and Mauritania and a partition was arranged […] Since the legitimacy of the partition arrangement is in question and lacks a legal basis, the frontiers of Western Sahara merit examination »). Selon le même auteur, « [i]l est risqué d’accepter le fait accompli (si c’est ce qu’il est) créé par l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie tant que la situation politique n’évolue pas. La non-reconnaissance de ce résultat par les autres États a une base en droit international. » (p. 157) [« Until the political situation evolves further, it is unsafe to accept the fait accompli (if that is what it is) arranged by Spain, Morocco and Mauritania. Non-recognition of the outcome by other States has a basis in International Law. »]. Voir enfin Soroeta Liceras, J., « La posicíon de la Unión Europea en el conflicto del Sahara Occidental, una muestra palpable (más) de la primacía de sus intereses económicos y políticos sobre la promoción de la democracia y de los derechos humanos », Revista de Derecho Comunitario Europeo, 2009, vol. 34, p. 823 à 864, à p. 832, et Saul, B., « The Status of Western Sahara as Occupied Territory under International Humanitarian Law and the Exploitation of Natural Ressources », Sydney Law School Legal Studies Research Paper, no 15/81 (septembre 2015), p. 18.

    ( 193 ) Voir point 163 des présentes conclusions. Au contraire, la résolution 3458 A (XXX), qui n’a pas reconnu l’accord de Madrid, a été approuvée par 88 États, sans aucun vote à son encontre, les États membres actuels de l’Union européenne votant en faveur de cette résolution, à l’exception du Royaume d’Espagne et de la République portugaise qui se sont abstenus ainsi que la République de Malte qui n’a pas voté.

    ( 194 ) Voir, par exemple, Burton, M. F., Foreign Relations of the United States, 1977-1980, United States Government Printing Office, Washington, 2017, vol. XVII, partie 3 (Documents sur l’Afrique du Nord), p. 90, 371, 372 et 575.

    ( 195 ) Voir Bedjaoui, M., « Article 73 », publié dans Cot, J.-P., Pellet, A. et Forteau, M., La Charte des Nations unies : commentaire article par article, 3e éd., Economica, Paris, 2005, p. 1751 à 1767, spéc. p. 1763 ; Fastenrath, U., « Chapter XI Declaration Regarding Non-self-governing Territories », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G., et Paulus, A. (eds), The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. II, p. 1829 à 1839, spéc. p. 1836. Voir également, en ce sens, point 3 de la résolution 742 (VIII), du 27 novembre 1953, de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 196 ) Voir point 57 des réponses de la Commission aux questions écrites posées par la Cour.

    ( 197 ) Voir loi sur les îles Cocos de 1955 (Cocos Islands Act 1955) et ordonnance en conseil sur les îles Cocos de 1955 (Cocos Islands Order in Council 1955, SI 1955/1642). Voir, en ce sens, Kerr, A., A Federation in These Seas, Attorney General’s Department of the Commonwealth of Australia, 2009, p. 271 à 273 et 308 à 310 ; Spagnolo, B., The Continuity of Legal Systems in Theory and Practice, Hart Publishing, Oxford, 2015, p. 62.

    ( 198 ) Voir Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations unies, supplément no 2 (1955-1959), vol. 3, point 6.

    ( 199 ) Voir Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations unies, supplément no 3 (1959-1966), vol. 3, point 215. Voir également, en ce sens, résolution 39/30 de l’Assemblée générale de l’ONU qui se réfère au Commonwealth d’Australie comme la puissance administrante.

    ( 200 ) Voir articles I et XXVII de l’accord entre la République d’Indonésie et le Royaume des Pays-Bas concernant la Nouvelle-Guinée occidentale (Irian occidental), signé au siège de l’ONU, à New York, le 15 août 1962, Recueil des traités des Nations unies, vol. 437, p. 274. Voir également, en ce sens, résolution 1752 (XVII) de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 201 ) Voir Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations unies, supplément no 3 (1959-1966), vol. 3, points 52 à 55.

    ( 202 ) Voir rapport du 3 février 2017 du secrétaire général de l’ONU sur les renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en application de l’article 73 de la Charte des Nations unies, point e) (A72/62).

    ( 203 ) S/2002/161, point 6.

    ( 204 ) S/2002/161, point 7.

    ( 205 ) S/2002/161, points 8 et 21.

    ( 206 ) Affaire du Vapeur Wimbledon (Royaume-Uni e.a. c. Allemagne), arrêt du 17 août 1923 (CPJI Série A, no 1, p. 25).

    ( 207 ) Voir affaire de la délimitation de la frontière maritime entre la Guinée-Bissau et le Sénégal, sentence du 31 juillet 1989, Recueil des sentences arbitrales, vol. XX, p. 119 à 213, points 51 et 52. La validité de cette sentence a été confirmée par la Cour internationale de justice (voir Sentence arbitrale du 31 juillet 1989, arrêt (CIJ Recueil 1991, p. 53). Selon le tribunal arbitral, les activités du mouvement de libération nationale « ont une portée sur le plan international à partir du moment où elles constituent dans la vie institutionnelle de l’État territorial un événement anormal qui le force à prendre des mesures exceptionnelles, c’est-à-dire lorsque, pour dominer ou essayer de dominer les événements, il se voit amené à recourir à des moyens qui ne sont pas ceux qu’on emploie d’ordinaire pour faire face à des troubles occasionnels ». L’existence d’un conflit armé qui a éclaté entre le Front Polisario et les armées marocaines et mauritaniennes fait que ce critère est rempli.

    ( 208 ) Voir affaire de la délimitation de la frontière maritime entre la Guinée-Bissau et le Sénégal, sentence du 31 juillet 1989, Recueil des sentences arbitrales, vol. XX, p. 119 à 213, point 52.

    ( 209 ) Recueil des traités des Nations unies, vol. 1125, p. 3.

    ( 210 ) De toute façon, ces règles remplissent les critères d’invocabilité énoncés au point 96 des présentes conclusions pour les mêmes raisons que celles données au point 139 des présentes conclusions.

    ( 211 ) Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif (CIJ Recueil 1996, p. 226, point 79). Voir également, en ce sens, jugement du 1er octobre 1946 du Tribunal militaire international de Nuremberg dans l’affaire États-Unis d’Amérique e.a. c/ Goering e.a., publié dans Trial of the Major War Criminals before the International Military Tribunal (Nuremberg, 14 November 1945 – 1 October 1946), 1947, p. 171 à 341, spéc. p. 253 et 254 ; Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 89 et 157).

    ( 212 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 157).

    ( 213 ) C’est moi qui souligne. Tous les États membres de l’Union et le Royaume du Maroc sont parties à ces conventions et au protocole additionnel I. De plus, par déclaration unilatérale du 23 juin 2015 déposée auprès du Conseil fédéral suisse en sa qualité de dépositaire des conventions de Genève, qui a été notifiée aux États parties à ces conventions, le Front Polisario s’est engagé à appliquer les quatre conventions de Genève de 1949 et le protocole additionnel I de 1977 dans le conflit l’opposant au Royaume du Maroc.

    ( 214 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 158).

    ( 215 ) Voir point 127 des présentes conclusions.

    ( 216 ) Voir article 2 de cette convention, ainsi que Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 95).

    ( 217 ) Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 95).

    ( 218 ) Article 1er, paragraphe 4, du protocole additionnel I et commentaires du Comité international de la Croix-Rouge (CIRC) de 1987, point 114. Voir également en ce sens Roberts, A., « What is military occupation? », British Yearbook of International Law, 1985, vol. 55, p. 249 à 305, spéc. p. 254 et 255.

    ( 219 ) Voir David, É., Principes de droit des conflits armés, 5e éd., Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 189 et 190 ; Milanovic, M., « The Applicability of the Conventions to “Transnational” and “Mixed” Conflicts », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 27 à 50, point 43 ; Saul, B., « The Status of Western Sahara as Occupied Territory under International Humanitarian Law and the Exploitation of Natural Resources », Sydney Law School Legal Studies Research Paper, No 15/81, septembre 2015, p. 5 et 6.

    ( 220 ) Voir jugement du 31 mars 2003 de la chambre de première instance du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie dans l’affaire Le Procureur c/ Mladen Naletilić et Vinko Martinović (no IT-98-34-T), point 211 ; Stato maggiore della difesa, Manuale di diritto umanitario, 1991, vol. I, point 32 ; Federal Ministry of Defence of the Federal Republic of Germany, Humanitarian Law in Armed Conflicts Manual, 1992, point 526 ; Cabinet du Juge-Avocat général du Canada, Law of Armed Conflict, 2001, point 1203(1) ; UK Ministry of Defence, The Manual of the Law of Armed Conflict, Oxford University Press, Oxford, 2004, point 11.2 ; Ministerio de defensa, El derecho de los conflictos armados, 2e éd., Centro Geográfico del Ejército, Madrid, 2007, vol. I, p. 2-20 ; U.S. Department of Defense, Law of War Manual, 2015, p. 744 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 42, point 96 ; Sassòli, M., « The Concept and the Beginning of Occupation », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1389 à 1419, point 8.

    ( 221 ) Voir points 27, 44.1 et 47.4 de la décision de demande préjudicielle ainsi que points 40, 43, 48 et 49 de l’arrêt du 19 octobre 2015 dans l’affaire Western Sahara Campaign UK, R (on the application of) v HM Revenue and Customs [2015] EWHC 2898 (Admin).

    ( 222 ) Voir paragraphes 5 et 6. 85 États ont voté pour, 6 contre, 41 se sont abstenus et 20 n’ont pas voté. Les États membres actuels de l’Union ont voté pour ou se sont abstenus. Voir également en ce sens résolution 35/19 de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 223 ) Voir, notamment, Roberts, A., « What is military occupation? », British Yearbook of International Law, 1985, vol. 55, p. 249 à 305, spéc. p. 280 à 281 ; Gasser, H. P., « The Conflict in Western Sahara – An Unresolved Issue from the Decolonization Period », Yearbook of International Humanitarian Law, 2002, vol. 5, p. 375 à 380, spéc. p. 379 ; Arai-Takahashi, Y., The Law of Occupation: Continuity and Change of International Humanitarian Law, and its Interaction with International Human Rights Law, Martinus Nijhoff, La Haye, 2009, p. 140 ; Chinkin, C., « Laws of occupation », publié dans Botha, N., Olivier, M., et van Tonder, D. (eds), Multilateralism and International Law with Western Sahara as a Case Study, VerLoren van Themaat Centre, Pretoria, 2010, p. 197 à 221, spéc. p. 197 à 200 ; Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 171 ; Fastenrath, U., « Chapter XI Declaration Regarding Non-self-governing Territories », publié dans Simma, B., Khan, D.-E., Nolte, G. et Paulus, A., (eds), The Charter of the United Nations: A Commentary, 3e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, vol. II, p. 1829 à 1839, spéc. p. 1837 ; Koutroulis, V., « The application of international humanitarian law and international human rights law in prolonged occupation: only a matter of time? », International Review of the Red Cross, 2012, vol. 94, p. 165 à 205, spéc. p. 171 ; David, É., Principes de droit des conflits armés, 5e éd., Bruylant, Bruxelles, 2012, p. 192 ; Ruiz Miguel, C., « La responsabilité internationale et les droits de l’homme : le cas du Sahara occidental », Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux, 2013, vol. 11, p. 105 à 130, spéc. p. 107 ; Dawidowicz, M., « Trading Fish or Human Rights in Western Sahara? Self-Determination, Non-Recognition and the EC-Morocco Fisheries Agreement », publié dans French, D. (ed.), Statehood, Self-Dtermination and Minorities: Reconciling Tradition and Modernity in International Law, Cambridge University Press, Cambridge, 2013, p. 250 à 276 ; Bothe, M., « The Administration of Occupied Territory », publié dans Clapham, A., Gaeta, P. et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1455 à 1484, spéc. p. 1459 ; Kontorovich, E., « Economic Dealings with Occupied Territories », Columbia Journal of Transnational Law, 2015, vol. 53, p. 584 à 637, spéc. p. 611 et 612 ; Saul, B., « The Status of Western Sahara as Occupied Territory under International Humanitarian Law and the Exploitation of Natural Ressources », Sydney Law School Legal Studies Research Paper, no 15/81 (septembre 2015). Voir également arrêt du 15 juin 2017 de la High Court of South Africa (Haute Cour de l’Afrique du Sud) dans l’affaire no 1487/17, The Saharawi Arab Democratic Republic and Front Polisario v The Owner and charterers of the MV “NM CherryBlossom”, point 29.

    ( 224 ) Voir Corell, H., « Western Sahara – status and resources », New Routes, 2010, vol. 15, p. 10 à 13, spéc. p. 11.

    ( 225 ) Voir lettre datée du 29 janvier 2002, adressée au président du Conseil de sécurité par le secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, conseiller juridique (S/2002/161).

    ( 226 ) Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt (CIJ Recueil 2005, p. 168, point 173). Le même principe s’applique à l’occupation des territoires non autonomes en vertu de l’article 1er, paragraphe 4, du protocole additionnel I.

    ( 227 ) Je rappelle que la République islamique de Mauritanie s’est retirée du Sahara occidental le 14 août 1979 après avoir signé un accord de paix avec le Front Polisario. Le jour même, le Royaume du Maroc a annexé la partie du Sahara occidental initialement occupée par la République islamique de Mauritanie. Cette dernière a reconnu cette « occupation par la force » par la déclaration de son Premier ministre, en date du 14 août 1979, annexée à la lettre datée du 18 août 1979, adressée au secrétaire général de l’ONU par le représentant permanent de la République islamique de Mauritanie auprès de l’ONU (A/34/427).

    ( 228 ) Pour un rapport détaillé de la mise du Sahara occidental sous autorité marocaine, voir Dessaints, J., « Chronique politique Maroc », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1975, vol. 14, p. 457 à 476, spéc. p. 463 à 465 ; Santucci, J.-C., « Chronique politique Maroc », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1976, vol. 15, p. 357 à 379, spéc. p. 359 à 361.

    ( 229 ) Je souligne également que, même s’il était considéré valide, l’accord de Madrid n’autorisait en rien une présence militaire marocaine sur le territoire du Sahara occidental sans le consentement de son peuple, consentement qui n’a jamais été donné.

    ( 230 ) Voir Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 47 et 48 ; Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 55 ; Sassòli, M., « The Concept and the Beginning of Occupation », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1389 à 1419, point 15.

    ( 231 ) Voir Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 55.

    (

    232

    )

    « L’autorité du pouvoir légal ayant passé de fait entre les mains de l’occupant, celui-ci prendra toutes les mesures qui dépendent de lui en vue de rétablir et d’assurer, autant qu’il est possible, l’ordre et la vie publics en respectant, sauf empêchement absolu, les lois en vigueur dans le pays. »

    (

    233

    )

    « La [p]uissance occupante pourra toutefois soumettre la population du territoire occupé à des dispositions qui sont indispensables pour lui permettre de remplir ses obligations découlant de la présente [c]onvention, et d’assurer l’administration régulière du territoire ainsi que la sécurité soit de la [p]uissance occupante, soit des membres et des biens des forces ou de l’administration d’occupation ainsi que des établissements et des lignes de communications utilisés par elle. »

    ( 234 ) Voir Sassòli, M., « Legislation and Maintenance of Public Order and Civil Life by Occupying Powers », European Journal of International Law, 2005, vol. 16, p. 661 à 694 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 115 et 116 ; Arai-Takahashi, Y., The Law of Occupation: Continuity and Change of International Humanitarian Law, and its Interaction with International Human Rights Law, Martinus Nijhoff, La Haye, 2009, p. 120 et 121.

    ( 235 ) Voir Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 83 à 86 ; Bothe, M., « The Administration of Occupied Territory », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1455 à 1484, point 98.

    ( 236 ) Voir Timor-Oriental (Portugal c. Australie), arrêt (CIJ Recueil 1995, p. 90, points 13 et 32). Si la Cour n’a pas exercé sa compétence dans cette affaire, c’était parce qu’elle aurait dû se prononcer sur la licéité de l’intégration du Timor-Oriental à la République d’Indonésie. Cependant, cela ne l’a pas empêché de qualifier d’occupation l’intervention militaire indonésienne (voir point 13 de l’arrêt), ce qui est d’ailleurs une question de fait (voir point 246 des présentes conclusions).

    ( 237 ) Voir Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 85 ; Bothe, M., « The Administration of Occupied Territory », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1455 à 1484, point 98.

    ( 238 ) Voir article 4 du protocole additionnel I ; article 47 de la convention IV de Genève ; sentence du 18 avril 1925 dans l’affaire de la dette publique ottomane (Bulgarie, Irak, Palestine, Transjordanie, Grèce, Italie et Turquie), Recueil des sentences arbitrales, vol. 1, p. 529 à 614, spéc. p. 555 ; jugement du 10 mars 1948 du Tribunal militaire no I dans l’affaire RuSHA (États-Unis d’Amérique c/ Greifelt e.a.), Trials of War Criminals before the Nuerenberg Military Tribunals, U.S. Government Printing Office, Washington, 1950, vol. V, p. 154 ; Oppenheim, L., « The Legal Relations between an Occupying Power and the Inhabitants », Law Quarterly Review, 1917, vol. 33, p. 363, 364 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 49 à 51 ; David, É., Principes de droit des conflits armés, 5e éd., Bruylant, Bruxelles, 2012, p. 582 et 583 ; Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 85 ; Bothe, M., « The Administration of Occupied Territory », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1455 à 1484, point 10.

    ( 239 ) Il s’agit de l’autorité d’occupation établie en Irak par les États-Unis d’Amérique et leur coalition afin de gouverner le pays entre 2003 et 2004.

    ( 240 ) Voir accord-cadre entre l’Autorité provisoire de la coalition (l’« Autorité ») qui, en application des lois et coutumes de la guerre ainsi que des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies, notamment la résolution 1483 (2003), a temporairement force d’autorité gouvernementale en Irak, la Trade Bank of Iraq (TBI), instituée en vertu du règlement no 20 de l’Autorité, et le Bureau pour la garantie contre les risques à l’exportation (GRE), agissant pour le compte de la Confédération suisse, signé à Rome le 5 décembre 2003, Recueil systématique du droit fédéral, 0.946.144.32.

    ( 241 ) Note du 15 décembre 2003 de la Direction du droit international public de la Confédération suisse, reproduite dans Ferraro, T. (éd.), Rapport des experts du CIRC, « Occupation and other forms of administration of foreign territory », 2012, p. 59. Voir également, en ce sens, Caflisch, L., « La pratique suisse en matière de droit international public 2003 », Revue suisse de droit international et de droit européen, 2004, vol. 5, p. 661 à 719, spéc. p. 663 et 664.

    ( 242 ) Voir paragraphe 4, selon lequel le Conseil de sécurité « [a demandé] à l’Autorité [provisoire de la coalition], conformément à la [c]harte des Nations [u]nies et aux dispositions pertinentes du droit international, de promouvoir le bien-être de la population iraquienne en assurant une administration efficace du territoire, notamment en s’employant à rétablir la sécurité et la stabilité et à créer les conditions permettant au peuple iraquien de déterminer librement son avenir politique ». C’est moi qui souligne.

    ( 243 ) Voir paragraphe 1, selon lequel le Conseil de sécurité « [a réaffirmé] la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Irak et [a] soulign[é] dans ce contexte que l’Autorité provisoire de la coalition (l’Autorité) exerce à titre temporaire les responsabilités, pouvoirs et obligations au regard du droit international applicable qui sont reconnus et énoncés dans la résolution 1483 (2003), jusqu’à ce qu’un gouvernement représentatif internationalement reconnu soit mis en place par le peuple iraquien et assume les responsabilités de l’Autorité ». Souligné par mes soins.

    ( 244 ) Voir titre de l’accord-cadre (Recueil systématique du droit fédéral, 0.946.144.32).

    ( 245 ) Voir Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt (CIJ Recueil 2005, p. 168, point 244).

    ( 246 ) Voir points 130 à 134 des présentes conclusions.

    ( 247 ) Voir points 245 à 249 des présentes conclusions.

    ( 248 ) Voir « Iustiniani Institutiones », Livre II, chapitre IV « (De usu fructu), principium », publié dans Krueger, P. (ed.), Corpus Iuris Civilis, Weidmann, Berlin, 1889, vol. I ; U.S. Department of State, « Memorandum of Law on Israel’s right to develop new oil field in Sinai and the Gulf of Suez », 1er octobre 1976, International Law Materials, 1977, vol. 16, p. 733 à 753, spec. p. 736 ; Ministry of Foreign Affairs of Israel, « Memorandum of Law on the Right to develop new oil fields in Sinai and the Gulf of Suez », 1er août 1977, International Law Materials, 1978, vol. 17, p. 432 à 444, point 2 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 214 ; Van Engeland, A., « Protection of Public Property », publié dans Clapham, A., Gaeta, P., et Sassòli, M. (eds), The 1949 Geneva Conventions: A commentary, Oxford University Press, Oxford, 2015, p. 1535 à 1550, points 20 à 22.

    ( 249 ) Voir Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 215 ; Cabinet du Juge-Avocat général du Canada, Law of Armed Conflict, 2001, point 1243 ; UK Ministry of Defence, The Manual of the Law of Armed Conflict, Oxford University Press, Oxford, 2004, point 11.86 ; U.S. Department of Defense, Law of War Manual, 2015, p. 793.

    ( 250 ) Voir Ministry of Foreign Affairs of Israel, « Memorandum of Law on the Right to develop new oil fields in Sinai and the Gulf of Suez », 1er août 1977, International Law Materials, 1978, vol. 17, p. 432 à 444, point 12 ; Cassese, A., « Powers and Duties of an Occupant in Relation to Land and Natural Resources », publié dans Cassese, A., Gaeta, P., et Zappalà, S. (eds), The Human Dimension of International Law: Selected Papers of Antonio Cassese, 2008, Oxford University Press, Oxford, p. 250 à 271, spéc. p. 258 ; Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 217.

    ( 251 ) Jugement du 1er octobre 1946 du Tribunal militaire international de Nuremberg dans l’affaire États-Unis d’Amérique e.a. c/ Goering e.a. publié en Trial of the Major War Criminals before the International Military Tribunal (Nuremberg, 14 November 1945 – 1 October 1946), 1947, p. 171 à 341, spéc. p. 239. Voir également, en ce sens, U.S. Department of State, « Memorandum of Law on Israel’s right to develop new oil field in Sinai and the Gulf of Suez », 1er octobre 1976, International Law Materials, 1977, vol. 16, p. 733 à 753, spéc. p. 743 ; Ministry of Foreign Affairs of Israel, « Memorandum of Law on the Right to develop new oil fields in Sinai and the Gulf of Suez », 1er août 1977, International Law Materials, 1978, vol. 17, p. 432 à 444, spéc. p. 437.

    ( 252 ) Voir U.S. Department of State, « Memorandum of Law on Israel’s right to develop new oil field in Sinai and the Gulf of Suez », 1er octobre 1976, International Law Materials, 1977, vol. 16, p. 733 à 753, spéc. p. 743 à 745 ; Cassese, A., « Powers and Duties of an Occupant in Relation to Land and Natural Resources », publié dans Cassese, A., Gaeta, P., et Zappalà, S. (eds), The Human Dimension of International Law: Selected Papers of Antonio Cassese, 2008, Oxford University Press, Oxford, p. 250 à 271, spéc. p. 257 et 261 ; Benvenisti, E., The International Law of Occupation, 2e éd., Oxford University Press, Oxford, 2012, p. 82.

    ( 253 ) Voir lettre datée du 8 mai 2003, adressée au président du Conseil de sécurité par les Représentants permanents des États-Unis d’Amérique et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord auprès de l’Organisation des Nations unies (S/2003/538).

    ( 254 ) Voir règlement du 15 juin 2003, de l’Autorité provisoire de la coalition no 2 sur le Fonds de développement pour l’Irak.

    ( 255 ) Voir Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif (CIJ Recueil 1996, p. 226, point 25) ; Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, points 105 et 106).

    ( 256 ) Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt (CIJ Recueil 2005, p. 168, point 244).

    ( 257 ) Voir, en ce sens, Dinstein, Y., The International Law of Belligerent Occupation, Cambridge University Press, Cambridge, 2009, p. 219 et 220.

    ( 258 ) Voir Conséquences juridiques de 1’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif (CIJ Recueil 2004, p. 136, point 106) ; Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt (CIJ Recueil 2005, p. 168, points 216, 217 et 220).

    ( 259 ) Voir préambule ainsi que l’article 1er, l’article 3, paragraphe 1, et les articles 4, 8 et 9 de l’accord de pêche. Voir également, en ce sens, les articles 4 et 5 du protocole de 2013.

    ( 260 ) Voir points 258 et 260 des présentes conclusions.

    ( 261 ) Ces fiches se trouvent à l’appendice 2 de l’annexe à l’accord de pêche. Conformément à l’article 16 de l’accord de pêche, l’annexe avec ses appendices fait partie intégrante de l’accord.

    ( 262 ) Voir point 70 des présentes conclusions.

    ( 263 ) Voir point 261 des présentes conclusions. Le dossier ne contient aucun élément à cet égard puisqu’en estimant que le Royaume du Maroc est la « puissance administrante de facto » du Sahara occidental, les institutions de l’Union ne se sont pas posé la question.

    ( 264 ) Pareil transfert constitue une infraction grave du protocole additionnel I [voir article 85, paragraphe 4, sous a), de ce protocole] ainsi qu’un crime de guerre [article 8, paragraphe 2, sous b), viii), du statut de Rome de la Cour pénale internationale, Recueil des traités des Nations unies, vol. 2187, p. 3]. Il faut noter que le Royaume du Maroc a signé mais n’a pas pas ratifié le statut de Rome.

    ( 265 ) Voir paragraphe 7 de la résolution 3458 A (XXX) de l’ Assemblée générale de l’ONU.

    ( 266 ) Voir paragraphes 2 et 4 de la résolution 3458 B (XXX) de l’Assemblée générale de l’ONU.

    ( 267 ) Voir appendice 2 à l’annexe au protocole de 2013.

    ( 268 ) Voir Milano, E., « The New Fisheries Partnership Agreement between the EC and Morocco: Fishing too South? », Anuario español de derecho internacional, 2006, vol. 22, p. 413 à 457, spéc. p. 435 à 442 ; Soroeta Liceras, J., « La posicíon de la Unión Europea en el conflicto del Sahara Occidental, una muestra palpable (más) de la primacía de sus intereses económicos y políticos sobre la promoción de la democracia y de los derechos humanos », Revista de Derecho Comunitario Europeo, 2009, vol. 34, p. 823 à 864, spéc. p. 829 à 837 et p. 844 à 847 ; Corell, H., « The legality of exploring and exploiting natural resources in Western Sahara », publié dans Botha, N., Olivier, M., et van Tonder, D. (eds), Multilateralism and International Law with Western Sahara as a Case Study, VerLoren van Themaat Centre, Pretoria, 2010, p. 231 à 247, spéc. p. 242 ; Etienne, J., « L’accord de pêche CE-Maroc : quels remèdes juridictionnels européens à quelle illicéité internationale », Revue belge de droit international, 2010, p. 77 à 107, spéc. p. 86 à 88 ; Saul, B., « The Status of Western Sahara as Occupied Territory under International Humanitarian Law and the Exploitation of Natural Ressources », Sydney Law School Legal Studies Research Paper, no 15/81 (septembre 2015), p. 29 à 31. Voir également, en ce sens, « Avis juridique du bureau du conseiller juridique de l’Union africaine sur la légalité au regard du droit international, notamment des résolutions de l’ONU et des décisions de l’Organisation de l’unité africaine et de l’Union africaine, des décisions qu’auraient prises les autorités marocaines ou tout autre État, groupe d’États, entreprise étrangère ou autre entité concernant l’exploration ou l’exploitation de ressources naturelles renouvelables ou non ou toute autre activité économique au Sahara occidental », annexée à la lettre datée du 9 octobre 2015, adressée au président du Conseil de sécurité par le représentant permanent du Zimbabwe auprès de l’ONU (S/2015/786).

    ( 269 ) En 1970, l’Afrique du Sud n’avait pas encore retiré son administration de la Namibie, et ce malgré le fait que l’Assemblée générale de l’ONU avait mis fin à son mandat sur ce territoire que la Société des Nations lui avait conféré, qu’elle avait elle-même directement assumé la responsabilité d’administrer la Namibie et que le Conseil de sécurité de l’ONU avait demandé à l’Afrique du Sud de retirer immédiatement son administration de Namibie. Il convient de rappeler que, comme sur son territoire propre, l’Afrique du Sud avait mis en place en Namibie le régime d’apartheid. Pour ces raisons, par sa résolution 276 (1970), le Conseil de sécurité a déclaré que « la présence continue des autorités sud-africaines en Namibie est illégale et qu’en conséquence toutes les mesures prises par le [g]ouvernement sud-africain au nom de la Namibie ou en ce qui la concerne, après la cessation du [n]andat, sont illégales » (paragraphe 2). Il a également demandé « à tous les États, en particulier ceux qui ont des intérêts économiques et autres en Namibie, de s’abstenir de toutes relations avec le [g]ouvernement sud-africain qui sont incompatibles avec le paragraphe 2 de la présente résolution » (paragraphe 5). Par la suite, le Conseil de sécurité a soumis à la Cour internationale de justice la question de savoir quelles étaient les conséquences pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie, nonobstant sa résolution 276 (1970).

    ( 270 ) Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif (CIJ Recueil 1971, p. 16).

    ( 271 ) Voir arrêt du 5 juillet 1994, Anastasiou e.a. (C‑432/92, EU:C:1994:277, point 35).

    ( 272 ) Voir arrêt du 5 juillet 1994, Anastasiou e.a. (C‑432/92, EU:C:1994:277, point 49).

    ( 273 ) Voir Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif (CIJ Recueil 1971, p. 16, point 125).

    ( 274 ) Voir Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif (CIJ Recueil 1971, p. 16, point 124).

    ( 275 ) Voir point 59 de ses observations écrites.

    ( 276 ) Voir points 373 à 376 de cet arrêt.

    ( 277 ) Voir article 16 de l’accord de pêche et article 1er, premier alinéa, du protocole de 2013.

    ( 278 ) Voir article 2, premier alinéa, du protocole de 2013.

    ( 279 ) Voir points 373 et 374 de cet arrêt. La Cour s’est référée au risque que les sujets de mesures restrictives prennent des dispositions visant à éviter que des mesures de gel de fonds puissent leur être appliquées de nouveau ainsi qu’à la possibilité que, malgré les vices de procédure constatés dans son arrêt, l’imposition de mesures restrictives aux requérants s’avère justifiée.

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