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Document 62016CC0314
Opinion of Advocate General Bot delivered on 7 September 2017.#European Commission v Czech Republic.#Failure of a Member State to fulfil obligations — Transport — Directive 2006/126/EC — Driving licences — Definitions of categories C1, C and D1.#Case C-314/16.
Conclusions de l'avocat général M. Y. Bot, présentées le 7 septembre 2017.
Commission européenne contre République tchèque.
Manquement d’État – Transports – Directive 2006/126/CE – Permis de conduire – Définitions des catégories C1 et C ainsi que D1.
Affaire C-314/16.
Conclusions de l'avocat général M. Y. Bot, présentées le 7 septembre 2017.
Commission européenne contre République tchèque.
Manquement d’État – Transports – Directive 2006/126/CE – Permis de conduire – Définitions des catégories C1 et C ainsi que D1.
Affaire C-314/16.
Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section
ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:652
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. YVES BOT
présentées le 7 septembre 2017 ( 1 )
Affaire C‑314/16
Commission européenne
contre
République tchèque
« Manquement d’État – Directive 2006/126/CE – Transports – Permis de conduire – Extension des définitions des catégories C1 et C ainsi que limitation de la définition de la catégorie D1 »
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1. |
Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que :
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2. |
Dans les présentes conclusions, nous indiquerons les raisons pour lesquelles nous pensons que ce recours en manquement est fondé. |
I. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
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3. |
Aux termes des considérants 1, 2 et 12 de la directive 2006/126 :
[...]
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4. |
Cette directive dispose, à son article 1er, paragraphe 1, intitulé « Modèle de permis » : « 1. Les États membres établissent le permis de conduire national d’après le modèle communautaire figurant à l’annexe I, conformément aux dispositions de la présente directive. Le signe distinctif de l’État membre délivrant le permis figure dans l’emblème dessiné à la page 1 du modèle communautaire de permis de conduire. » |
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5. |
L’article 4, paragraphes 1 et 4, de ladite directive, intitulé « Catégories, définitions et âges minimums », énonce : « 1. Le permis de conduire prévu à l’article 1er autorise la conduite des véhicules à moteur des catégories définies ci-après. Il peut être délivré à partir de l’âge minimum indiqué pour chaque catégorie. Le terme “véhicule à moteur” désigne tout véhicule pourvu d’un moteur de propulsion et circulant sur route par ses moyens propres à l’exception des véhicules qui se déplacent sur rails. [...] 4. Automobiles :
[...]
[...]
[...]
[...]
[...] » |
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6. |
Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous a), de la directive 2006/126, intitulé « Délivrance, validité et renouvellement » : « 1. Le permis de conduire est uniquement délivré aux demandeurs qui :
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7. |
L’article 16 de cette directive, intitulé « Transposition », dispose : « 1. Les États membres adoptent et publient, au plus tard le 19 janvier 2011, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à l’article 1er, paragraphe 1, à l’article 3, à l’article 4, paragraphes 1, 2 et 3, et paragraphe 4, points b) à k), [...]. Ils communiquent immédiatement le texte de ces dispositions à la Commission. 2. Ils appliquent ces dispositions à partir du 19 janvier 2013. [...] » |
B. Le droit tchèque
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8. |
L’article 80a, paragraphe 1er, sous g), h) et i), de la Zákon č. 361/2000 Sb. o provozu na pozemních komunikacích a o změnách některých zákonů (loi no 361/2000 Rec. relative à la circulation sur les voies de communication terrestres et portant modification de certaines lois), telle que modifiée en dernier lieu ( 4 ), prévoit : « 1) Dans la catégorie [...]
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II. La procédure précontentieuse
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9. |
Par lettre du 11 juillet 2014, la Commission a adressé à la République tchèque une lettre de mise en demeure, dans laquelle elle appelait l’attention de cet État membre sur le fait que certaines dispositions de sa législation interne, et spécialement celles concernant la définition des catégories C1, C et D1 des permis de conduire, n’étaient pas conformes à la directive 2006/126. |
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10. |
Après avoir examiné les arguments avancés par la République tchèque, figurant dans la réponse en date du 8 octobre 2014, la Commission a émis, par lettre du 27 février 2015, un avis motivé. Elle a également invité la République tchèque à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de sa réception. Ce délai a été prolongé jusqu’au 27 mai 2015, à la demande de la République tchèque. |
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11. |
Par lettre du 22 mai 2015, la République tchèque a répondu à l’avis motivé en indiquant, au sujet de la définition des catégories C, C1 et D1 de véhicules, que, « afin d’écarter tout risque d’équivoque et de ménager une plus grande certitude juridique, la République tchèque accepte d’apporter aux dispositions juridiques en vigueur des modifications partielles qui devraient répondre aux exigences de la Commission ». |
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12. |
En l’absence de communication relative à l’adoption éventuelle des modifications ainsi envisagées et considérant que, en tout état de cause, les manquements reprochés persistaient à la date de l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, la Commission a saisi la Cour de la présente requête. |
III. Argumentation des parties
A. La Commission
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13. |
Au soutien de son recours, la Commission expose deux moyens. |
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14. |
Par le premier moyen, elle fait valoir que, à l’article 4, paragraphe 4, de la directive 2006/126, les définitions des catégories C1 et C de véhicules sont expressément distinguées de celles des catégories D1 et D, et que le droit tchèque n’aurait pas repris cette condition ainsi formulée : « automobiles autres que celles des catégories D1 ou D ». Cette omission aurait pour conséquence que, dans cet État membre, le titulaire d’un permis de catégorie C1 ou C serait autorisé à conduire un véhicule construit pour le transport de huit passagers au maximum, indépendamment du fait qu’il a été conçu pour le transport de voyageurs ou de marchandises, alors que cette directive exige un permis de conduire de catégorie D1 ou D si le véhicule est conçu et construit pour le transport de passagers. |
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15. |
La Commission illustre les conséquences d’une telle omission, en prenant l’exemple de minibus de grand confort ou de voitures particulières blindées conçus pour le transport de passagers. En raison de leurs caractéristiques techniques (pas plus de huit passagers, masse supérieure à 3500 kg et longueur inférieure ou égale à huit mètres), ils pourraient être conduits par le titulaire d’un permis de la catégorie C1 alors qu’un permis de la catégorie D1 devrait être exigé du fait du transport de personnes. |
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16. |
Par son second moyen, la Commission affirme que, tandis que l’article 4, paragraphe 4, sous h), de la directive 2006/126 définit la catégorie D1 comme comprenant les automobiles « conçues et construites pour le transport d’au maximum 16 passagers outre le conducteur », le droit tchèque, en imposant un nombre minimal de huit personnes, aurait introduit une condition supplémentaire, contraire à l’article 4, paragraphe 4, sous h), de cette directive. |
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17. |
Au soutien de ces deux moyens, la Commission explique que, traditionnellement, la catégorie C regroupe des automobiles destinées au transport de marchandises, tandis que la catégorie D regroupe des automobiles destinées au transport de passagers. Cela n’empêcherait toutefois pas que les automobiles de la catégorie C puissent également transporter des passagers. Il s’agira surtout, dans ce cas, de l’équipe transportée en vue de la manutention de la charge du véhicule. |
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18. |
Comme certaines caractéristiques techniques des catégories C et C1 sont identiques à celles des catégories D1 et D, la Commission souligne la nécessité de réserver à ces dernières les véhicules conçus pour le transport de personnes. |
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19. |
La Commission se prévaut de l’historique législatif de la réglementation de l’Union relative au permis de conduire. Elle fait valoir que :
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20. |
La Commission mentionne encore le fait que la définition des catégories aurait été légèrement modifiée dans la directive 2006/126. Le législateur de l’Union y aurait ajouté le nombre maximal autorisé de passagers pouvant être transportés dans les automobiles des catégories C et C1, ce nombre correspondant à l’équipe susceptible d’être véhiculée principalement aux fins de la manutention de la charge. L’expression « transport de marchandises » ne figurerait pas textuellement dans les dispositions qui définissent les catégories C. Cependant, il ressortirait de l’annexe II, intitulée « Exigences minimales pour les examens de conduite », que les véhicules des catégories C sont principalement destinés au transport de marchandises et les véhicules des catégories D au transport de passagers. En outre, la directive 2006/126 aurait supprimé la limite minimale de huit passagers pour les automobiles de catégorie D1. Ainsi, cette catégorie serait seulement définie par le nombre maximal de passagers, qui ne peut être supérieur à seize, et par la longueur maximale du véhicule, fixée à huit mètres. |
B. La République tchèque
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21. |
La République tchèque considère que la requête de la Commission n’est pas fondée et demande à la Cour de la rejeter. Elle soutient que la méthode qu’elle a choisie aboutit à une transposition appropriée et compréhensible des dispositions en cause, garantissant l’objectif poursuivi par la directive 2006/126. |
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22. |
Cette partie estime, d’une part, que, conformément au droit de l’Union, elle n’était pas tenue de procéder à une transposition littérale des dispositions de cette directive et qu’elle pouvait faire le choix de clarifier les critères objectifs qui permettent de distinguer les différentes catégories de véhicules, pourvu que ce choix aboutisse au résultat attendu. |
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23. |
Elle considère, d’autre part, que le législateur de l’Union a défini les catégories de véhicules à l’article 4, paragraphe 4, de ladite directive par des caractéristiques techniques qui se chevauchent, sans faire référence au transport de marchandises et de personnes, tout en laissant aux États membres le soin de distinguer ces catégories, comme l’indiqueraient les termes « automobiles autres que celles des catégories D1 ou D ». La République tchèque aurait dès lors procédé à une délimitation, au niveau national, des catégories de véhicules Cl, C, et D1, précise, compréhensible et, dans la pratique, impropre à susciter tout litige, satisfaisant à l’objectif, fixé par le droit de l’Union, de distinguer les catégories de véhicules selon l’objet du transport ( 8 ). Elle justifie ainsi son choix d’avoir distingué la catégorie D1 par le nombre de passagers pouvant être transportés (seuil à plus de huit). |
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24. |
La République tchèque souligne en effet que la variété des critères distinctifs, comme celui de la masse du véhicule (catégories C et C1), la longueur du véhicule (catégorie D1), ou encore le nombre maximal ou minimal de personnes transportées (C, C1, D, D1), conduit à des chevauchements qui créent des incompréhensions ou des confusions dès lors qu’un seul véhicule peut relever de plusieurs catégories. |
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25. |
Elle précise, également, que, en l’absence de distinction, la catégorie d’automobiles Dl (automobiles d’une longueur maximale de huit mètres pouvant transporter seize passagers au maximum) absorberait de facto les catégories Cl et C. Il pourrait également être déduit que la conduite d’un camion de moins de huit mètres relèverait du permis de conduire de la catégorie D1 et, seulement parce qu’il dépasserait huit mètres, relèverait du permis de conduire de la catégorie C1. |
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26. |
Dans son mémoire en duplique, la République tchèque relève que la justification donnée par la Commission, selon laquelle les véhicules des catégories C sont « principalement destinés au transport de marchandises » et les véhicules des catégories D sont « principalement destinés au transport de passagers » ( 9 ), serait fondamentalement incertaine et d’application pratique litigieuse. Selon la République tchèque, le terme « principalement » ménagerait une possibilité de s’écarter de la règle, d’autant plus que la classification stricte des véhicules selon l’un ou l’autre de ces critères ne serait pas toujours possible et que, en outre, au fil du temps, il pourrait y avoir des changements du mode d’utilisation principal des véhicules. |
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27. |
La République tchèque est également en désaccord avec l’allégation de la Commission selon laquelle la transposition en droit tchèque mènerait à une limitation inacceptable de la définition de la catégorie de véhicules D1. La Commission ferait valoir à tort que les minibus de grand confort ou les voitures particulières blindées, qui peuvent accueillir un maximum de huit passagers outre le chauffeur, relèveraient de la catégorie de véhicules D1, selon la directive 2006/126. |
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28. |
Selon la République tchèque, la catégorie de véhicules D1 représente un sous-ensemble de la catégorie de véhicules D, comme cela ressort de sa dénomination et de l’historique législatif de la définition des catégories de véhicules au niveau de l’Union européenne. Il s’agirait d’une version « allégée » de la catégorie D et donc d’une partie déterminée des véhicules de catégorie D pour lesquels, au vu de leurs caractéristiques, la détention d’une version allégée du permis de conduire de catégorie D suffirait. Dès lors que le seuil relatif au nombre de personnes pouvant être transportées figure dans la définition de la catégorie D ( 10 ), il doit être repris dans la catégorie D1. En deçà, les véhicules ne pourraient relever que de la catégorie C, ou éventuellement C1. |
IV. Notre analyse
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29. |
La discussion porte sur le contenu des dispositions de la directive 2006/126 définissant deux catégories principales de véhicules (C, D) et leurs sous-catégories (C1, D1) ainsi que, pour l’essentiel, sur leur finalité qui ne figure pas expressément à l’article 4, paragraphe 4, sous d), f), h) et j) de ce texte, à savoir opérer une distinction entre les véhicules chargés de transporter les personnes et les autres. |
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30. |
À l’instar de la Commission, il nous paraît nécessaire d’exposer quels sont le sens et la portée de l’exclusion des catégories D et D1, retenue comme premier critère distinctif des catégories C et C1, en replaçant celle-ci dans son contexte ( 11 ) et en rappelant les objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 12 ). |
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31. |
Les dispositions de la directive 2006/126 sont issues de la refonte de la directive 91/439, justifiée par les modifications de cette dernière intervenues à plusieurs reprises. |
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32. |
Cette directive a abrogé la directive 80/1263, qui avait organisé la mise en place d’un permis de conduire communautaire aux fins d’assurer la reconnaissance réciproque par les États membres des permis de conduire nationaux ainsi que l’échange des permis de titulaires qui transfèrent leur résidence normale ou leur lieu de travail d’un État membre à un autre. |
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33. |
Dans cette directive, le législateur européen a défini différentes catégories de véhicules non tractés, désignées par des lettres allant de A à D, et distinguées les unes par rapport aux autres selon différents critères. |
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34. |
Ainsi, à l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive étaient classés dans un ordre croissant les véhicules à deux ou trois roues (catégorie A), puis les automobiles autres que celles de cette catégorie avec une limite de poids (3500 kg) et un nombre de places assises limité (huit maximum outre le siège du conducteur), relevant de la catégorie B. |
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35. |
Les autres véhicules étaient distingués de cette catégorie en raison des caractéristiques suivantes :
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36. |
Le modèle de permis de conduire, figurant en annexe I de la directive 80/1263, contenait les termes de ces dispositions. |
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37. |
L’annexe II de cette directive, intitulée « Exigences minimales pour les examens de conduite », ne prévoyait pas de conditions particulières pour l’examen théorique, permettant de différencier les permis selon la catégorie de véhicules C ou D. |
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38. |
À compter du 1er juillet 1996, date de la mise en application de la directive 91/439, le législateur a fait le choix de distinguer les catégories C et D d’une manière différente, avec un objectif précis. |
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39. |
En effet, ainsi qu’il résulte de ses troisième, quatrième et cinquième considérants, cette directive constitue une deuxième étape, après celle franchie en 1980, consistant à harmoniser les catégories et sous-catégories de véhicules, ainsi que les conditions minimales de délivrance du permis de conduire, et à rappeler le caractère impératif des dispositions communes ( 13 ). C’est dans ces conditions que les sous-catégories C1 et D1 ont été créées à l’article 3, paragraphe 2, de ladite directive. |
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40. |
La distinction entre la catégorie C ou D de véhicules, justifiée par le transport de marchandises et de passagers dans la directive 80/1263, ne figure plus dans les mêmes termes dans le texte de la directive 91/439. La catégorie D est réservée aux « automobiles affectées au transport de personnes » et la catégorie C, comme la sous-catégorie C1, est définie par défaut : « automobiles autres que celles de la catégorie D ». |
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41. |
Cependant, cette distinction est matérialisée, pour la première fois, dans le modèle de permis de conduire, figurant en annexe I de cette directive. On y voit, en face de C, le pictogramme de deux camions ou poids lourds. C1 est inscrit à côté de celui de moindre dimension. En face de D figure le pictogramme de deux bus, pour D1 le bus est de longueur inférieure. |
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42. |
En annexe II de ladite directive sont énoncées les conditions requises pour la conduite des véhicules avec des prescriptions spécifiques pour chaque catégorie de véhicules dont les véhicules C et D, avec une liste particulière réservée à la catégorie D : « 5.5. Catégorie D Les conducteurs de véhicules de cette catégorie devront faire preuve de la connaissance :
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43. |
La volonté de maintenir la catégorie spécifique de véhicule « affecté au transport de personnes » exclusivement (ou autrement dit « catégorie D ») ressort clairement du choix des termes des nouvelles dispositions issues de la directive 91/439. |
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44. |
En effet, la catégorie C est désormais définie par défaut au regard de la catégorie D, et non pas de la catégorie B ( 14 ) en raison de la masse des véhicules visés. Il est aussi tenu compte de la nécessité de ne pas limiter au seul transport de marchandises les véhicules de la catégorie C. Le transport de personnes, pour lequel des véhicules sont exclusivement conçus, continue à justifier l’existence d’une catégorie spécifique (D). |
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45. |
Les mêmes critères sont déclinés pour la définition des catégories C1 et D1, qui correspondent à des véhicules ayant la même fonction mais de moindre dimension (cas dans lesquels la masse ou le nombre de passagers est limité). La masse du véhicule est discriminante dans les catégories ( 15 ) C et C1 tandis que, pour les catégories D et D1, il s’agit du nombre de passagers, respectivement plus de huit ( 16 ) ou plus de huit sans excéder seize. |
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46. |
La directive 2006/126 est venue affiner la définition de ces différentes catégories ( 17 ), sans toutefois modifier la distinction principale de la catégorie D, réservée au transport de personnes. |
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47. |
En effet, l’exclusion de la catégorie D dans la définition des catégories C et C1 est maintenue et complétée par l’ajout de la catégorie D1. Le modèle de permis de conduire contient les mêmes pictogrammes que ceux décrits au point 41 des présentes conclusions ( 18 ). De plus, les spécifications figurant dans son annexe II ( 19 ), auxquelles s’est référé également le gouvernement tchèque dans son mémoire en défense ( 20 ), sont concordantes. |
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48. |
L’objectif poursuivi est précisé au considérant 12 de ladite directive aux termes duquel « [l]es définitions des catégories devraient refléter davantage les caractéristiques techniques des véhicules concernés ainsi que les aptitudes nécessaires à la conduite des véhicules ». |
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49. |
Ainsi, s’agissant des exigences minimales pour les examens de conduite et de l’épreuve de contrôle des connaissances, les dispositions spécifiques de la directive 2006/126 concernant les catégories C et D ainsi que leurs sous-catégories illustrent, à nouveau, la distinction fondée sur l’objet principal du transport :
[...] 4.2. Contrôle obligatoire des connaissances générales sur les dispositions additionnelles suivantes concernant les catégories C, CE, D et DE : [...]
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50. |
Il en va de même s’agissant de l’épreuve de contrôle des aptitudes et des comportements :
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51. |
De plus, selon la même logique, s’agissant des aptitudes et comportement à tester en ce qui concerne les catégories C et D et leurs sous-catégories, il est précisé :
[...]
[...] 8.2. Manœuvres spéciales à tester en relation avec la sécurité routière : [...]
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52. |
Il ne fait aucun doute, à la lecture des dispositions de la directive 2006/126, prises dans leur ensemble, que les définitions des catégories de véhicules s’articulent sur la distinction du transport de personnes, sans changement depuis 1980. Il s’agit d’un critère clair et précis, qui justifie l’exclusion des catégories D1 ou D dans la définition des catégories C et C1. Même si le choix d’une formulation abrégée peut être discuté ( 22 ), celle-ci ne nous paraît pas laisser de place à l’équivoque. |
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53. |
Par conséquent, le choix du législateur de l’Union de préciser le nombre maximal de personnes susceptibles d’être transportées dans des camions (catégories C ou C1), comme dernier critère pour ces véhicules, n’est pas de nature à créer une confusion. |
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54. |
Ce choix n’est pas non plus de nature à atténuer la portée de l’ajout des termes « autres que les catégories D1 ou D » au début de l’article 4, paragraphe 4, sous d) ou f), de cette directive selon le même procédé que celui retenu à l’article 3 de la directive 91/439. En effet, son importance se déduit de l’exigence que le conducteur d’un véhicule de cette catégorie justifie de connaissances relatives au transport de passagers, à leur confort et à leur sécurité. |
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55. |
C’est pourquoi, en raison de l’impérieuse nécessité de garantir la sécurité routière des personnes ( 23 ), et ce de manière uniforme au sein de l’Union, nous soutenons, ainsi que la Commission l’a allégué à juste titre à l’appui de sa requête, que la reprise textuelle des dispositions claires et précises de ladite directive s’impose ( 24 ). En outre, la transposition littérale permet, dans ce cas particulier, de satisfaire à un autre objectif primordial, recherché depuis la première directive 80/1263, celui de faciliter la libre circulation et la liberté d’établissement des personnes, en procédant à l’harmonisation des règles relatives au permis de conduire. |
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56. |
Il s’ensuit qu’il ne peut être admis que le choix de critères différents aboutisse à un résultat contraire à celui visé par la directive 2006/126, à savoir que le transport exclusif de personnes puisse être assuré par des chauffeurs, autorisés à conduire des véhicules de catégorie C ou C1, auxquels il aura été demandé de justifier principalement de connaissances en ce qui concerne la réception, le transport et la livraison des marchandises, le chargement et l’arrimage de la charge ainsi que le déchargement. |
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57. |
Or, l’exemple donné par la Commission illustre parfaitement les conséquences du choix opéré par le législateur tchèque en fixant un seuil à plus de huit personnes pour la catégorie D1 ( 25 ) : un minibus, d’une longueur inférieure à huit mètres qui sert à transporter moins de huit personnes, relève de la catégorie C ou C1 alors que les exigences requises sont celles relatives au transport de personnes. |
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58. |
L’argumentation du gouvernement tchèque qui ne prend pas en considération la particularité du véhicule, en ce qu’il ne sert pas au transport de marchandises, n’est donc pas convaincante. Le croisement de l’ensemble des caractéristiques techniques des véhicules, retenues dans la directive 2006/126, est également vain dès lors que celles-ci correspondent à l’usage auquel ces véhicules sont destinés. Ainsi, la catégorie C, traditionnellement réservée aux poids lourds, est définie secondairement par la masse du véhicule, le nombre de passagers étant équivalent à celui de la catégorie B. La catégorie D est définie uniquement par un seuil de passagers et sa sous-catégorie D1 est distinguée par le nombre maximal de personnes transportées et par la longueur du véhicule construit à cette fin. |
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59. |
L’ensemble de ces développements nous conduisent à considérer que, en n’excluant pas les véhicules D et D1 des catégories C et C1, et en ajoutant à la catégorie D1 un seuil de huit passagers, la République tchèque a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 4, paragraphe 4, sous d), f) et h), de la directive 2006/126. |
V. Dépens
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60. |
En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour de justice, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République tchèque et celle-ci ayant succombé, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens. |
VI. Conclusion
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61. |
Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit :
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ANNEXE : Tableau récapitulatif du contenu des principales directives relatives au permis de conduire
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Directive 80/1263Article 3, paragraphe 1 |
Directive 91/439Article 3, paragraphes 1 et 2 |
Directive 2006/126Article 4, paragraphe 4, sous d), f), h) et j) |
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C |
Automobiles « affectées au transport de marchandises »> 3 500 kg |
Automobiles « autres que celles de la catégorie D »> 3 500 kg |
Automobiles « autres que celles des catégories D1 ou D »> 3 500 kg« conçues et construites pour le transport de huit passagers au maximum outre le conducteur » |
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C1 |
Sans objet |
Automobiles « autres que celles de la catégorie D »> 3 500 kg et ≤ 7 500 kg |
Automobiles « autres que celles des catégories D1 ou D »> 3 500 kg et ≤ 7 500 kg« conçues et construites pour le transport de huit passagers au maximum outre le conducteur » |
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D |
Automobiles « affectées au transport de personnes »Plus de huit places assises outre le conducteur |
Automobiles « affectées au transport de personnes »Plus de huit places assises outre le conducteur |
Automobiles « conçues et construites pour le transport de plus de huit passagers outre le conducteur » |
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D1 |
Sans objet |
Automobiles « affectées au transport de personnes »> huit et ≤ seize places assises, outre le conducteur |
Automobiles « conçues et construites pour le transport d’au maximum 16 passagers outre le conducteur »Longueur : 8 m maximum |
( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) JO 2006, L 403, p. 18.
( 3 ) JO 1991, L 237, p. 1.
( 4 ) Il s’agit d’une des mesures nationales d’exécution notifiées à la Commission comme assurant la transposition de la directive 2006/126, telle que modifiée par la directive 2009/113/CE de la Commission du 25 août 2009 (JO 2009, L 223, p. 31) et par la directive 2011/94/UE de la Commission du 28 novembre 2011 (JO 2011, L 314, p. 31).
( 5 ) Première directive du Conseil du 4 décembre 1980, relative à l’instauration d’un permis de conduire communautaire (JO 1980, L 375, p. 1).
( 6 ) Directive du Conseil du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (JO 1991, L 237, p. 1).
( 7 ) Voir point 5 du mémoire en réplique.
( 8 ) Voir points 19 et 20 du mémoire en défense.
( 9 ) Voir point 7 de ce mémoire en duplique.
( 10 ) « [P]our le transport de plus de huit passagers outre le conducteur » à l’article 4, paragraphe 4, sous j), de la directive 2006/126.
( 11 ) Voir tableau récapitulatif en annexe des présentes conclusions.
( 12 ) Conformément à la méthode d’analyse préconisée par la Cour, voir arrêt du 26 octobre 2006, Commission/Espagne (C‑36/05, EU:C:2006:672, points 24 et 25).
( 13 )
( 14 ) Relèvent de cette catégorie les véhicules dont la masse maximale n’excède pas 3500 kg.
( 15 ) Qui constitue le second critère pour ces catégories, comme dans la directive 80/1263.
( 16 ) Ce seuil de plus de huit personnes est également à mettre en relation avec le plafond figurant dans la catégorie B.
( 17 ) Voir considérant 2 de cette directive.
( 18 ) Modèle reconduit par la directive 2011/94.
( 19 ) Extraits, cités aux points 49 à 51 des présentes conclusions, mis en italique par nos soins.
( 20 ) Voir points 15 à 17 de ce mémoire en défense.
( 21 ) Règlement du Conseil du 20 décembre 1985 concernant l'appareil de contrôle dans le domaine des transports par route (JO 1985, L 370, p. 8).
( 22 ) Ne faudrait-il pas, pour lever tout doute, privilégier à l’avenir les termes « autres que celles qui sont affectées au transport de personnes exclusivement » ?
( 23 ) Voir point 51 de l’arrêt du 22 mai 2014, Glatzel (C‑356/12, EU:C:2014:350), et jurisprudence citée) : « À cet égard, selon la jurisprudence constante de la Cour, l’amélioration de la sécurité routière constitue un objectif d’intérêt général de l’Union (voir en ce sens, notamment, arrêts du 5 octobre 1994, van Schaik, C‑55/93, EU:C:1994:363, point 19 ; du 21 mars 2002, Cura Anlagen, C‑451/99, EU:C:2002:195, point 59 ; du 15 mars 2007, Commission/Finlande, C‑54/05, EU:C:2007:168, point 40 ; du 10 février 2009, Commission/Italie, C‑110/05, EU:C:2009:66, point 60 ; du 22 octobre 2009, Commission/Portugal, C‑438/08, EU:C:2009:651, point 48 ; du 11 mars 2010, Attanasio Group, C‑384/08, EU:C:2010:133, point 50 ; du 19 mai 2011, Grasser, C‑184/10, EU:C:2011:324, point 26, ainsi que du 13 octobre 2011, Apelt, C‑224/10, EU:C:2011:655, point 47) ». Voir, également, sur la finalité de la directive 2006/126, rappelée très récemment, arrêt du 26 avril 2017, Popescu (C‑632/15, EU:C:2017:303, point 40).
( 24 ) Cas à distinguer des hypothèses dans lesquelles la Cour a énoncé que « la transposition en droit interne d’une directive [...] peut, en fonction de son contenu, se satisfaire d’un contexte juridique général, dès lors que celui-ci assure effectivement la pleine application de la directive d’une façon suffisamment claire et précise, afin que, au cas où la directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s’en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales ». Voir arrêt du 9 avril 1987, Commission/Italie (363/85, EU:C:1987:196, point 7 et jurisprudence citée).
( 25 ) Alors qu’il avait été supprimé par la directive 2006/126 pour être remplacé par la longueur du véhicule.