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Document 52016AE3098

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie» [COM(2016) 196 final — 2016/0105 (COD)] et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour enregistrer les données relatives aux entrées et aux sorties des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne ainsi que les données relatives aux refus d’entrée les concernant, portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives et portant modification du règlement (CE) n° 767/2008 et du règlement (UE) n° 1077/2011» [COM(2016) 194 final — 2016/0106 (COD)]

JO C 487 du 28.12.2016, p. 66–69 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

28.12.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 487/66


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2016/399 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie»

[COM(2016) 196 final — 2016/0105 (COD)]

et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour enregistrer les données relatives aux entrées et aux sorties des ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne ainsi que les données relatives aux refus d’entrée les concernant, portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives et portant modification du règlement (CE) no 767/2008 et du règlement (UE) no 1077/2011»

[COM(2016) 194 final — 2016/0106 (COD)]

(2016/C 487/10)

Rapporteur:

M. Cristian PÎRVULESCU

Consultation

Parlement européen, 9 mai 2016

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

9 septembre 2016

Adoption en session plénière

21 septembre 2016

Session plénière no

519

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

155/2/0

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) considère que le système d’entrée/sortie (Entry/Exit System — EES), dans sa nouvelle forme, est indispensable, dans la mesure où il apporte une valeur ajoutée en matière de sécurité au niveau européen. Comme il le fait dans les autres domaines d’action politique et de réglementation, le Comité promeut, au moyen de ses avis, une approche équilibrée, qui permet de concilier l’exigence de sécurité et la bonne application de la législation, sans jamais déroger aux valeurs fondamentales prônées par l’Union européenne.

1.2.

Le Comité considère que la mise en œuvre du nouveau système d’entrée/sortie doit s’accompagner de campagnes de sensibilisation visant à en expliquer le fonctionnement le plus clairement possible, en mettant l’accent sur la protection des données à caractère personnel. Il recommande d’organiser des campagnes d’information et d’éducation à l’intention tant des autorités que des ressortissants des pays tiers.

1.3.

Le Comité juge nécessaire de prévoir une information et une formation adéquates du personnel intervenant dans l’exploitation du système. Il recommande que le processus de formation de ce personnel reçoive un soutien financier et institutionnel approprié.

1.4.

Le Comité estime que le respect des droits fondamentaux devra faire l’objet d’un contrôle permanent effectué par les institutions spécialisées de l’Union européenne, mais auquel pourront également être associées les organisations de la société civile au niveau européen et à l’échelon national.

1.5.

S’agissant des données à caractère personnel, le Comité insiste sur la nécessité que les droits relatifs à leur accès, à leur rectification et à leur suppression soient clairement définis et garantis.

1.6.

Le Comité recommande de procéder, après la mise en place du système, à une enquête similaire à celle effectuée dans le cadre du projet pilote, afin de pouvoir évaluer dans les conditions réelles l’impact du système sur les voyageurs.

2.   Introduction: contexte et arguments justifiant l’instauration d’un nouveau système d’entrée/sortie de l’Union européenne

2.1.

Dans la mesure où on estime qu’en 2025 le nombre de franchissements réglementaires des frontières sera de 887 millions, dont un tiers concernant des déplacements de ressortissants de pays tiers voyageant dans l’espace Schengen pour une visite de courte durée, il y a lieu de procéder à une modernisation des frontières qui permettra de gérer conjointement et efficacement les flux de voyageurs.

2.2.

Le champ d’application du nouveau EES couvre le franchissement des frontières par tous les ressortissants de pays tiers qui pénètrent dans l’espace Schengen pour un séjour de courte durée (90 jours maximum sur une période de 180 jours), qu’ils soient soumis à l’obligation d’obtention d’un visa, exemptés de celle-ci ou, le cas échéant, en possession d’un visa d’itinérance (jusqu’à un an).

2.3.

La mise en place de l’EES vise à: 1) lutter contre les retards enregistrés dans le processus de vérification aux frontières et améliorer la qualité de ces vérifications pour les ressortissants de pays tiers; 2) garantir l’identification systématique et fiable des personnes qui dépassent la durée de séjour autorisée; 3) renforcer la sécurité intérieure, ainsi que la lutte contre le terrorisme et la grande criminalité.

2.4.

En février 2013, la Commission a présenté une série de propositions législatives sur les frontières intelligentes, en vue de moderniser la gestion des frontières extérieures de l’espace Schengen. Depuis 2013, plusieurs changements ont eu lieu qui ont facilité la conception et la mise en œuvre de l’EES:

2.4.1.

le système d’information sur les visas (VIS) est devenu pleinement opérationnel et la vérification biométrique des titulaires de visas par consultation du VIS aux frontières extérieures de Schengen est désormais obligatoire;

2.4.2.

les dialogues avec les pays des Balkans occidentaux et les pays situés à la frontière orientale et sud-orientale de l’Union européenne au sujet de la libéralisation du régime des visas ont été conclus ou accélérés, ce qui entraînera une augmentation de la proportion des voyageurs exemptés de l’obligation de visa entrant dans l’Union européenne;

2.4.3.

le Fonds pour la sécurité intérieure (ISF-B) a été adopté; celui-ci a alloué 791 millions d’EUR au développement des frontières intelligentes;

2.4.4.

l’agenda européen en matière de migration a défini la gestion des frontières comme étant l’un des quatre piliers pour une meilleure gestion des migrations;

2.4.5.

l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne relatif à la directive sur la conservation des données a apporté des précisions juridiques sur les conditions et les garanties à respecter en ce qui concerne le stockage et l’utilisation des données de l’EES.

3.   Observations générales concernant l’instauration d’un nouveau système d’entrée/sortie de l’Union européenne

3.1.

Le Comité juge nécessaire de passer d’un système non intégré et pesant, fondé sur l’apposition par le personnel affecté aux frontières d’un cachet sur les documents de voyage, à un système quasi automatisé, facilitant l’accès des ressortissants de pays tiers. Dans ce cas, la valeur ajoutée des efforts déployés par l’Union européenne est évidente. L’Union européenne a besoin d’un système de frontières qui permette à la fois de faire face à la mobilité accrue et de garantir la sécurité sur le territoire de l’Union, d’un système qui facilite la mobilité sans mettre à mal les droits fondamentaux.

3.2.

Le Comité se félicite que ce système ait fait l’objet d’un projet pilote et que les effets de l’utilisation des différents dispositifs d’identification biométriques sur les ressortissants en provenance de pays tiers aient pu être observés en pratique (voir l’étude publiée à l’issue du projet pilote) (1). Les résultats du sondage effectué montrent que les répondants ont largement confiance en la fiabilité des technologies biométriques et reflètent le consensus existant entre les experts s’agissant des moyens d’identification biométriques les plus sûrs et les plus fiables pour déterminer l’identité d’une personne.

3.3.

Il convient de saluer la participation de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui a réalisé, auprès des ressortissants de pays tiers qui ont expérimenté le système, un sondage d’opinion portant sur divers dispositifs biométriques qui pourraient être utilisés, afin d’enquêter, dans différents types de sites (aéroports, gares et trains, ports et frontières maritimes, points de franchissement d’une frontière routière) et dans des conditions variées, sur les éléments d’identification biométriques des ressortissants de pays tiers, tous les dispositifs utilisés dans le cadre de cette expérience étant déjà disponibles sur le marché (2).

3.4.

Les résultats de l’enquête montrent que le prélèvement des données biométriques est considéré comme humiliant par certains groupes de personnes, en moyenne par 45 % des sondés (Amérique du Nord: 30 %, Europe: 43 %, Amérique latine et Caraïbes: 46 %, Asie: 52 % et Afrique: 58 %) (3). S’agissant du type de données biométriques prélevées, le scan de l’iris est considéré par la plupart des répondants (32 %) comme vraiment humiliant, suivi par la reconnaissance faciale (26,2 %). Il est en outre pertinent de souligner qu’une proportion considérable des personnes interrogées (44,3 %) estime que l’utilisation de ce système produira moins de discriminations.

3.5.

À de nombreuses reprises, le Comité a cherché à promouvoir, au moyen de ses avis, une approche équilibrée, qui permette de concilier les exigences de sécurité et la bonne application de la législation, sans jamais déroger aux valeurs prônées par l’Union, ni à sa vision d’un espace à la fois libre, ouvert et sûr.

3.6.

Il est de la plus haute importance pour l’Union européenne et ses États membres de faciliter le système d’entrée/sortie de manière à attirer davantage de visiteurs — des touristes aux hommes d’affaires et aux professionnels — plutôt que de les décourager. Le Comité a donc attiré l’attention sur les évolutions préoccupantes observées dans plusieurs États membres qui tendent à se montrer de plus en plus réticents à accueillir des ressortissants de pays tiers. «Le Comité craint qu’il ne faille pas s’attendre à ce que l’on permette aux ressortissants des pays tiers l’accès aux États membres de l’Union, si dans le même temps, certains États membres menacent des ressortissants d’autres pays membres de l’Union de les expulser vers leur pays d’origine parce qu’ils sont au chômage ou que nous leur en avons tout simplement interdit l’entrée.» (4)

3.7.

Dans un avis précédent consacré aux «frontières intelligentes», le CESE a souhaité «souligner que l’identité de l’Union européenne est explicitement et implicitement associée à l’ouverture et à l’interconnexion, non seulement à l’intérieur, mais aussi au-delà de ses frontières. L’Union européenne constitue une espace culturel, social, politique et économique dynamique, et la mobilité transfrontalière s’avère essentielle pour maintenir son importance sur la scène internationale. Dans cet esprit, les institutions européennes et les États membres devraient s’assurer que les nouveaux systèmes n’aient pas d’incidence sur les voyages dans l’Union européenne des ressortissants de pays tiers, ni sur leur volonté de s’y rendre» (5).

3.8.

Dans le même avis, le Comité a souligné l’importance de protéger les droits fondamentaux, d’assurer la non-discrimination et de garantir par des moyens procéduraux et institutionnels l’intégrité et l’utilisation adéquate des données collectées et stockées dans le système.

3.9.

La mesure dans laquelle les États membres doivent contribuer, sur le plan budgétaire et institutionnel, à la mise en œuvre de ce système reste incertaine. Il convient de clarifier ce point et de trouver des solutions pour obtenir de la part des États membres un engagement ferme à coopérer et à contribuer à la mise en œuvre du système.

3.10.

Le Comité attire l’attention sur les expériences similaires menées dans des pays qui ont mis en œuvre des systèmes du même type. Les attentes des citoyens et de toutes les parties intéressées doivent être ajustées en fonction des capacités du système à atteindre tous les objectifs fixés.

4.   Observations spécifiques

4.1.

En ce qui concerne les éléments d’identification biométriques, le Comité accueille favorablement la réduction du nombre d’empreintes digitales de 10 à 4, un nombre minimal nécessaire qui, associé à l’identification faciale, permet d’obtenir des données pertinentes.

4.2.

S’agissant des données à caractère personnel, le Comité insiste sur la nécessité que les droits relatifs à leur accès, à leur rectification et à leur suppression soient clairement définis et garantis.

4.3.

Il est absolument essentiel que, lorsqu’elles mettent en œuvre l’EES, les autorités compétentes veillent au respect de la dignité humaine et de l’intégrité des personnes dont les données sont demandées et s’attachent à éviter toute discrimination fondée sur le sexe, la couleur de peau, l’origine ethnique ou sociale, les caractéristiques génétiques, la langue, les convictions religieuses ou philosophiques, les opinions politiques, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, le handicap, l’âge ou encore l’orientation sexuelle.

4.4.

La mise en œuvre de l’EES a un impact considérable sur l’exercice des droits prévus par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne: le droit à la dignité humaine (article 1), l’interdiction de l’esclavage et du travail forcé (article 5), le droit à la liberté et à la sûreté (article 6), le respect de la vie privée et familiale (article 7), la protection des données à caractère personnel (article 8), le droit à la non-discrimination (article 21), les droits de l’enfant (article 24), les droits des personnes âgées (article 25), les droits des personnes handicapées (article 26) et le droit à un recours effectif (article 47). Le Comité estime que le respect des droits fondamentaux devra faire l’objet d’un contrôle permanent effectué par les institutions spécialisées de l’Union européenne, mais auquel pourront également être associées les organisations de la société civile au niveau européen et à l’échelon national.

4.5.

Bien que le projet pilote qui a permis de tester le fonctionnement du système sur plusieurs sites n’ait suscité aucune résistance ni réticence significative de la part des utilisateurs, les résultats de l’enquête réalisée par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne donnent à penser que son utilisation présentera des difficultés pour certaines catégories de personnes et qu’il sera perçu négativement par la population. Il est possible qu’aux réticences de ces catégories de personnes viennent s’ajouter celles de certains par rapport au prélèvement des données biométriques, que ce soit pour des raisons culturelles ou religieuses ou par méfiance quant à la manière dont ces données seront utilisées et protégées par les autorités.

4.6.

Dans ce contexte, le Comité considère que la mise en œuvre de ce système doit s’accompagner de campagnes de sensibilisation visant à en expliquer le fonctionnement le plus clairement possible, en mettant l’accent sur la protection des données à caractère personnel. Toutes les mesures de précaution relatives au prélèvement, au stockage et à l’utilisation des données doivent être communiquées au public de manière à surmonter les réticences éventuelles et à faciliter une mobilité sans entraves.

4.7.

Le Comité juge nécessaire de prévoir une information et une formation adéquates du personnel intervenant dans l’exploitation du système. Comme il ressort également du projet pilote, le personnel affecté aux frontières a lui-même insisté sur la nécessité de prévoir une formation afin de pouvoir se familiariser avec les nouveaux équipements et processus (6). Les États membres sont quant à eux responsables du bon fonctionnement du système. À cet égard, il convient de viser des règles et des procédures qui donnent la possibilité de préciser la responsabilité des États membres en cas de préjudices résultant du non-respect des dispositions du règlement.

4.8.

Le Comité considère que la communication des données à caractère personnel recueillies par les États membres grâce à l’EES ou leur mise à la disposition d’un pays tiers, d’une organisation internationale ou d’une entité de droit privé établie ou non dans l’Union doivent être limitées et pleinement justifiées.

4.9.

Le Comité estime que les autorités désignées et Europol ne devraient demander à accéder à l’EES que lorsqu’ils ont des motifs raisonnables de croire que cet accès leur fournira des informations qui contribueront de manière significative à la prévention ou à la détection d’infractions terroristes ou d’autres infractions pénales graves, ou encore aux enquêtes en la matière. L’utilisation de l’EES aura une valeur ajoutée pour l’activité policière, mais il importe d’en réglementer strictement l’accès.

4.10.

Le Comité se félicite que les coûts escomptés du système aient été revus nettement à la baisse (passant de 1,1 milliard à 480 millions d’EUR).

Bruxelles, le 21 septembre 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes», Rapport sur les conclusions techniques du projet pilote, 2015, vol. 1.

(2)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes» — Annexes, novembre 2015, p. 307-335.

(3)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes» — Annexes, novembre 2015, p. 322.

(4)  Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Faire de l’Europe ouverte et sûre une réalité» [COM(2014) 154 final] (JO C 451 du 16.12.2014, p. 96).

(5)  Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour l’enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne» [COM(2013) 95 final — 2013/0057 (COD)], sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 562/2006 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/sortie (EES) et le programme d’enregistrement des voyageurs (RTP)» [COM(2013) 96 final — 2013/0060 (COD)] et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un programme d’enregistrement des voyageurs» [COM(2013) 97 final — 2013/0059 (COD)] (JO C 271 du 19.9.2013, p. 97).

(6)  Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, Projet pilote «Frontières intelligentes», Rapport sur les conclusions techniques du projet pilote, 2015, vol. 1, p. 14.


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