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Document 52009AE0333

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE

JO C 218 du 11.9.2009, p. 30–35 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

11.9.2009   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 218/30


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE»

COM(2008) 627 final — 2008/0190 (COD)

2009/C 218/06

Le 30 octobre 2008, le Conseil a décidé, conformément à l’article 47, paragraphe 2, première et troisième phrases et à l’article 95 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la:

«Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements, modifiant les directives 2005/60/CE et 2006/48/CE et abrogeant la directive 2000/46/CE»

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 3 février 2009 (rapporteur: M. MORGAN).

Lors de sa 451e session plénière des 25 et 26 février 2009 (séance du 26 février 2009), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 156 voix pour, 1 voix contre et 10 abstentions

1.   Résumé et conclusions

1.1

Avec l’application progressive du traitement électronique de l’information aux services financiers, l’on pourrait conclure que la monnaie électronique est déjà réalité. Les chèques sont lus et triés électroniquement, tandis que les cartes de crédit et de débit sont lues électroniquement par les distributeurs automatiques de billets, les terminaux des points de vente et d’autres types de dispositifs de paiement. Toutes ces applications reposent sur des avoirs disponibles sur un compte bancaire qui peuvent être limités par les dépôts ou arrêtés par la banque (par exemple pour les cartes de crédit). Dans tous les cas, la banque a conduit une enquête visant à déterminer la solvabilité et la bona fides de son client, et lui a délivré carnet de chèque, cartes de crédit et de débit en conséquence. L’accès à ce système de crédit électronique dépend de la solvabilité. De nombreuses catégories de population – les personnes ne bénéficiant pas ou peu des services bancaires – n’ont pas la faculté d’y participer.

1.2

Cependant, la monnaie électronique est tout autre chose. Elle ne dépend pas du crédit. Elle requiert un prépaiement. Le prépaiement est alors converti en substitut électronique à l’argent liquide, stocké sur un support électronique qui est géré par un émetteur de monnaie électronique. Le support électronique qui renferme le prépaiement peut soit être portable – il prend en général la forme d’une carte prépayée – soit consister en un enregistrement en ligne accessible par internet. La monnaie électronique autorise des paiements sans espèces pour des montants (en général) peu élevés, dans des environnements divers tels que les points de vente ou bien en ligne au moyen de communications par téléphone portable ou internet. La possession de monnaie électronique n’est pas directement liée à la solvabilité. La seule condition requise est la capacité à s’acquitter du prépaiement.

1.3

La monnaie électronique ne sera jamais à même de satisfaire tous les besoins que l’argent satisfait. Elle ne remplacera probablement pas le bas de laine rempli de billets de 500 euros mais elle devrait être capable de gérer les transactions pour lesquelles nous transportons des pièces et des billets sur nous. Malgré ce, son adoption a jusqu’à présent progressé très lentement. Les initiatives couronnées de succès ont toutes été en lien avec les développements de la société de l’information. Les progrès de la monnaie électronique devraient aller de pair avec ceux de la société de l’information. Elle devrait être la monnaie de la société de l’information. Son adoption future dépendra des initiatives entrepreneuriales et de l’innovation technique dans la société de l’information. Cette directive a pour objectif d’éliminer les obstacles à l’invention et à l’innovation. Le CESE souscrit à cet objectif.

1.4

À la fin des années 1990, la Commission européenne s’est rendu compte que les émetteurs de monnaie électronique se limitaient aux établissements de crédit, et elle a cherché à élargir le champ des entreprises susceptibles d’offrir ces services. En vue de développer le marché, la Commission a instauré la directive sur la monnaie électronique (2000/46/CE) afin de faciliter l’accès au marché de la monnaie électronique à des établissements autres que des établissements de crédit.

1.5

L'objectif de la directive sur la monnaie électronique était de créer un régime réglementaire approprié à l'échelle de risque que présentaient les nouveaux établissements de monnaie électronique et sous lequel l'innovation et la technologie pourraient s'épanouir. Il n'en a pas résulté un grand succès. La monnaie électronique est toujours loin d'apporter tous les bénéfices potentiels que l'on en attendait, et elle n'est toujours pas considérée comme une alternative crédible à l'argent liquide.

1.6

En conséquence la Commission a entrepris un examen approfondi des développements de la monnaie électronique. Elle en a conclu que certaines dispositions de la directive sur la monnaie électronique avaient été préjudiciables au développement du marché de la monnaie électronique en freinant l'innovation technologique. La consultation et l'évaluation ont dégagé deux problèmes principaux. Le premier tient au manque de clarté de la définition de la monnaie électronique et du champ d'application de la directive. Le second est lié au cadre juridique, sous la forme du régime prudentiel et de l'application de la législation antiblanchiment aux services de monnaie électronique. Cet exercice a débouché sur la conclusion suivante: la plupart des dispositions de la directive sur la monnaie électronique doivent être modifiées, raison pour laquelle il a été décidé de remplacer la directive existante par une nouvelle directive dont la proposition, COM(2008) 627 final, fait l'objet du présent avis.

1.7

Cette directive vise à permettre la mise au point de nouveaux services de monnaie électronique innovants et sûrs, à ouvrir le marché à de nouveaux acteurs et à favoriser une concurrence réelle et efficace entre tous les acteurs de ce marché. Aux yeux du CESE, cette initiative arrive à point nommé, dans la mesure où la participation des consommateurs à la société de l’information s’est accrue de manière exponentielle depuis la fin de la dernière décade, et où il existe une demande latente et non satisfaite en équipements de monnaie électronique conviviaux pour les consommateurs. La directive vise à éliminer les obstacles rencontrés par les initiatives entrepreneuriales qui peuvent satisfaire à cette demande.

1.8

L’introduction d’un nouveau régime réglementaire dans le secteur financier est un problème potentiel eu égard à la crise du système bancaire et à la préoccupation générale vis-à-vis de l’inefficacité de la régulation des banques. En dépit de ces considérations, le CESE se félicite de ce que le régime proposé soit adéquat et proportionné. Les nouvelles règles ne s’appliquent pas aux banques, qui ont été les établissements responsables de la crise du crédit; la diminution du capital initial exigé ne sert qu’à réduire les barrières à l’entrée; les fonds propres d’un établissement de monnaie électronique seront proportionnels à ceux des banques et les fonds représentant les créances des utilisateurs seront protégés spécifiquement, ne pouvant être investis que dans un éventail limité d’investissements; enfin, les sommes d’argent impliquées sont de minimis. Si les établissements de monnaie électronique devaient devenir une réelle force sur le marché des paiements, il y aurait lieu de modifier certaines dispositions de la directive à la lumière de l’expérience.

1.9

Le CESE nourrit certaines préoccupations en rapport avec la protection des consommateurs et il appelle la Commission à effectuer des changements dans la directive concernant les limites à l’investissement des fonds de trésorerie, la conversion immédiate des sommes reçues en monnaie électronique, la protection des fonds propres dans le cas des établissements hybrides ainsi qu’à supprimer les frais afférents à la résiliation anticipée des contrats portant sur la monnaie électronique.

1.10

L’argent liquide est anonyme. De simples transactions en espèces ne dévoilent pas l’identité de la personne qui effectue le paiement. Les systèmes à monnaie électronique peuvent être anonymes ou bien nominatifs. Le plafond de stockage relevé à 500 euros devrait rendre la monnaie électronique plus attractive aux yeux des utilisateurs potentiels, notamment les personnes qui ne bénéficient pas ou peu des services bancaires. Alors que, rationnellement, ces limites ne devraient pas représenter un risque de blanchiment d’argent disproportionné en comparaison de ce qui est possible avec des montants élevés en espèce, quelques réserves demeurent vis-à-vis du plafond proposé.

1.11

Les pièces et les billets ont un coût de production de même qu’un coût de gestion pour les banques et les commerçants. Il ne fait aucun doute que la population de l’UE demeure profondément attachée aux espèces en tant que moyen de paiement et de réserve de fonds. En cette époque d’incertitude, l’on assiste à une forte augmentation du nombre de billets de banque en circulation.

1.12

La directive à elle seule ne renversera pas cette tendance. Elle éliminera en revanche les obstacles entravant l’innovation économique et technologique. Aucune autorité ne peut imposer l’utilisation de la monnaie électronique au grand public. Les banques sont en mesure de jouer un rôle pilote, mais à l’exception de la Belgique et de sa carte Proton, elles n’ont guère accompli de progrès. Les cartes de transport, de téléphonie ou le commerce sur internet démontrent clairement que les applications de la société de l’information tendent à étendre l’utilisation de la monnaie électronique. De plus, celle-ci est souvent le produit d’une autre activité de sorte que l’émetteur peut souvent être un établissement hybride et ne pas se consacrer uniquement à la monnaie électronique. Ce lien entre la monnaie électronique et d’autres modèles d’entreprises est considéré comme capital pour l’émergence de la monnaie électronique. La directive a été élaborée de façon à favoriser de tels développements et recueille à ce titre le soutien du CESE.

1.13

Une préoccupation essentielle porte sur le développement de la réglementation antiblanchiment d’argent. Le CESE ne peut accepter que deux directives établissent des limites contradictoires. Cette situation crée une confusion juridique inacceptable. Si les limites posées par la directive à l’examen doivent l’emporter, alors la directive antiblanchiment d’argent doit être modifiée.

1.14

Le CESE appelle vivement tous les États membres à adopter des politiques positives lors de la mise en œuvre de la nouvelle directive. Il importe que les règlements soient développés en consultation avec l’industrie et qu’ils soient conçus de telle sorte qu’ils ne représentent pas une charge onéreuse ni pour les émetteurs de monnaie électronique ni pour leurs clients alors que les sommes d’argent en jeu sont minimes. Selon l’approche qu’elles adopteront, les autorités nationales seront en position de favoriser ou limiter cette industrie naissante. Le CESE est convaincu que cette activité devrait être soutenue dans tous les États membres.

1.15

Cette directive est importante. Elle a des implications potentielles d’une portée considérable. Le CESE appelle les acteurs présents et potentiels sur la scène de la monnaie électronique à réévaluer leurs atouts, leurs faiblesses, les opportunités qui se présentent à eux ainsi que les menaces auxquelles ils sont confrontés à la lumière de cette directive. Ce marché se voit donner une seconde chance.

2.   Introduction

2.1

Les paragraphes 2.2, 2.3 et 2.4 décrivent les principales caractéristiques de la monnaie électronique et son lien avec la société de l'information. Il existe un certain nombre d'exemples illustrant la façon dont la participation des consommateurs à la société de l'information conduit à l'adoption de la monnaie électronique.

2.2

L’utilisation de la carte RFID (1) en est un cas typique. La puce RFID pouvant enregistrer des valeurs monétaires, l’une de ses applications courantes est le paiement de l’accès aux systèmes de transport. Hong Kong a introduit la carte «Octopus» en 1997. Il s’agit d’une carte à puce prépayée sans contact et rechargeable. Outre le fait qu’elle est utilisée comme système de paiement dans la quasi-totalité des transports public hongkongais, cette carte sert aussi au paiement dans les commerces de proximité, les supermarchés, les établissements de restauration rapide, les parcmètres, les distributeurs automatiques, etc. Les cartes sont utilisées par 95 % de la population hongkongaise âgée de 16 à 65 ans. Cet exemple montre en quoi le fait que le consommateur s’implique dans une application de la société de l’information conduit à étendre le développement de la monnaie électronique. À Londres, l’usage de la carte RFID sans contact «Oyster» est maintenant généralisé dans les transports publics. Les utilisateurs anticipent désormais son extension aux kiosques à journaux, commerces de proximité et établissements de restauration rapide qui s’agglutinent autour des nœuds de transport et des gares. De tels développements sont certainement à attendre tant au Royaume-Uni que dans d’autres États membres dans la mesure où les cartes RFID viennent à être largement adoptées.

2.3

Un autre exemple plus répandu est le compte de téléphonie mobile prépayé qui peut d’ores et déjà être utilisé pour payer des activités aussi diverses que les services d’aide téléphonique dédiés aux problèmes informatiques, la participation à des concours, les dons caritatifs, les jeux interactifs, les divertissements pour adultes ou les services d’information. À l’instar des cartes de transport prépayées, les comptes de téléphonie prépayés sont définis comme étant de la monnaie électronique quand la valeur monétaire qui y est stockée commence à être acceptée par des entreprises autres que les transports ou l’opérateur de téléphonie.

2.4

Internet promeut aussi la monnaie électronique, parce que la monnaie électronique peut satisfaire deux besoins importants. La plupart des applications mettant en relation les entreprises et les consommateurs sur internet supposent une opération de crédit. Les personnes vivant à l’écart des services bancaires en sont totalement exclues puisqu’elles ne possèdent pas de carte de crédit ou de débit. En utilisant une carte de monnaie électronique, elles peuvent profiter des bienfaits d’internet. Les transactions de consommateur à consommateur ont aussi enregistré une croissance significative sur internet, stimulées par les sociétés de vente aux enchères telles qu’eBay. Il n’est pas possible de mener une transaction de consommateur à consommateur au moyen d’une carte de crédit ou de débit. Le paiement doit être effectué en monnaie électronique sécurisée. Cela explique l’émergence de systèmes tels que PayPal (2) qui a eu une relation symbiotique avec eBay.

2.5

Les cartes de transport, de téléphonie ou le commerce sur internet démontrent que les applications de la société de l’information augmentent l’utilisation de la monnaie électronique. Elles montrent aussi que la monnaie électronique peut être le sous-produit d’une autre entreprise, de sorte que l’émetteur de monnaie électronique peut souvent être une structure hybride. Ce lien entre la monnaie électronique et une autre activité est perçu comme crucial pour l’émergence de la monnaie électronique. La directive a été élaborée en conséquence.

2.6

Les établissements de crédit tels que les banques possèdent tous les attributs nécessaires pour émettre de la monnaie électronique et ils opèrent sous des régimes réglementaires appropriés. Dans une certaine mesure, les établissements de crédit ont pris l’initiative. En Belgique, la carte Proton est le produit d’un consortium bancaire. Cette carte combine une carte de débit avec une fonction de monnaie sur carte, et son utilisation est répandue parmi les clients des banques en Belgique. Il est envisageable que davantage de cartes de ce type, combinant plusieurs usages et dotées d’une fonction de monnaie électronique sans contact s’appuyant sur la technologie RFID, soient mises en circulation. Malgré ce, il y a un conflit d’intérêts évident entre la monnaie électronique et d’autres gammes de produits que proposent les établissements de crédit, telles que les cartes de crédit et de débit.

2.7

Il ressort des chiffres concernant le faible nombre d’établissements de monnaie électronique disposant d’un agrément complet (20 établissements de monnaie électronique et 127 établissements bénéficiant d’une exemption) et le faible volume de monnaie électronique émis (la monnaie électronique actuellement en circulation représente 1 milliard d’euros, contre plus de 600 milliards d’euros d’espèces) que ce mode de paiement ne s’est pas encore vraiment implanté dans la plupart des États membres. En outre, le volume des espèces en circulation a augmenté continuellement depuis l’introduction de l’euro en 2002.

2.8

En conséquence la Commission a entrepris un examen approfondi des développements de la monnaie électronique. La consultation et l’évaluation ont dégagé deux problèmes principaux ayant trait à la directive sur la monnaie électronique actuelle. Le premier tient au manque de clarté de la définition de la monnaie électronique et du champ d’application de la directive. Le second est lié au cadre juridique, sous la forme du régime prudentiel et de l’application des réglementations antiblanchiment aux services de monnaie électronique.

2.9

De plus, la directive sur les services de paiement 2007/64/CE entrera en vigueur en novembre 2009. La pertinence de la directive sur les services de paiement tient à ce qu’elle met en place un régime spécial pour les établissements de paiement, analogue à celui qui couvre les établissements de monnaie électronique. La directive sur les services de paiement n’est pas compatible avec la directive sur la monnaie électronique, et si le régime prévu par la directive sur la monnaie électronique n’est pas révisé, il en résultera une incertitude juridique accrue.

2.10

Il ressort de ce qui précède que la plupart des dispositions de la directive sur la monnaie électronique doivent être modifiées, et il a donc été décidé de remplacer la directive existante par une nouvelle directive dont la proposition fait l’objet du présent avis.

3.   Contenu essentiel de la directive

3.1   La directive vise à permettre la mise au point de nouveaux services de monnaie électronique innovants et sûrs, à ouvrir le marché à de nouveaux acteurs et à favoriser une concurrence réelle et efficace entre tous les acteurs de ce marché. L’on s’attend à ce que l’innovation sur le marché des paiements ait des effets bénéfiques tangibles pour les consommateurs, les entreprises, et l’économie en général, tandis que des solutions créatives seront source de progrès en matière de rapidité des paiements, de facilité d’utilisation et de nouvelles fonctionnalités pour la société de l’information du XXIe siècle.

3.2   La définition de la monnaie électronique est clarifiée: les termes «monnaie électronique» désignent une valeur monétaire représentant une créance sur l’émetteur qui est stockée sous une forme électronique et émise contre la remise de fonds (article 2.2). Ils ne s’appliquent pas aux instruments prépayés à but unique (circuit fermé) dont l’usage est restreint (articles 1.3 et 1.4).

3.3   Le champ d’application de la nouvelle directive facilite l’entrée sur le marché, car il couvre les émetteurs de titres électroniques polyvalents (circuit ouvert) tels que les cartes RFID ou les cartes de téléphonie mobile et englobe aussi la monnaie électronique sur serveur.

3.4   Les activités des établissements de monnaie électronique sont définies de façon plus exhaustive dans les articles 8 et 9. Elles comportent deux dimensions. La première établit qu’un éventail plus large de services de paiement, tels que définis dans l’annexe de la directive sur les services de paiement, sont susceptibles d’être proposés, y compris l’octroi de crédits, la prestation de services annexes ou l’exploitation du système de paiement. La seconde reconnaît aux émetteurs de monnaie électronique la possibilité d’entreprendre d’autres activités telles que la vente de détail ou les télécommunications dans le cadre normal de leurs activités. Dans ces derniers cas de figure, il ne sera désormais plus nécessaire de créer un établissement de monnaie électronique indépendant. Il sera en revanche nécessaire que les fonds de monnaie électronique soient protégés conformément aux dispositions de la directive sur les services de paiement. L’autorisation d’établissements de monnaie électroniques hybrides de ce type devrait encourager l’accroissement de l’émission de monnaie électronique.

3.5   Les droits au remboursement sont un élément de la protection des consommateurs. Ils sont clarifiés dans l’article 5: les États membres veillent à ce que les émetteurs de monnaie électronique remboursent à la demande du titulaire, à tout moment et à la valeur nominale, la valeur monétaire de la monnaie électronique qu’ils détiennent. Cette disposition cause des problèmes aux opérateurs de téléphonie mobile dans les cas où le prépaiement est destiné aux services de téléphonie assortis d’une option d’utilisation dans le commerce de détail, mais ces services sont désormais couverts par les dispositions de l’article 5.

3.6   Le régime prudentiel suit généralement les dispositions des articles pertinents de la directive sur les services de paiement. Il y a toutefois des dispositions particulières visant à rendre le régime proportionnel aux risques encourus. Un certain nombre d’aspects entrent en ligne de compte.

3.6.1

La directive sur la monnaie électronique stipule qu’un établissement de monnaie électronique doit disposer d’un capital initial s’élevant à un million d’euros. Ce montant est désormais perçu comme excessif au regard des risques encourus et comme un obstacle à la création de PME innovantes dans le domaine de la monnaie électronique. Dans le nouveau projet, le capital initial requis est ramené à 125 000 euros.

3.6.2

Outre le capital initial, les établissements de monnaie électronique doivent détenir des fonds propres proportionnels à leurs engagements en circulation. Dans la directive sur la monnaie électronique, le pourcentage était de 2 %. La nouvelle exigence s’élève à 5 %; elle diminue lorsque le volume augmente, et s’applique au montant le plus élevé entre la monnaie électronique en circulation et le volume des paiements mensuel.

3.6.3

Il existe des limites à l’investissement des fonds propres représentant la monnaie électronique en circulation, mais seulement dans le cas où l’émetteur entreprend une activité autre qu’une activité de paiement (article 9).

3.6.4

En matière de lutte contre le blanchiment, les modifications proposées à la troisième directive sur le blanchiment d’argent sont cohérentes avec les besoins des entreprises et les pratiques du secteur. Le plafond portant sur le montant de monnaie électronique susceptible d’être échangé en une fois contre espèces est relevé de 150 euros à 500 euros (article 16).

3.6.5

La directive sur la monnaie électronique autorisait les États membres à exempter certains établissements de bon nombre d’exigences d’autorisation afin de favoriser l’entrée sur le marché et l’innovation venant de nouveaux acteurs. Ces exemptions étaient appliquées de manière non homogène par les États membres, créant ainsi des conditions de concurrence non équitables pour les acteurs du marché. Le nouveau régime prévoit toujours des exemptions (article 10) mais, comme stipulé dans les articles pertinents de la directive sur les services de paiement, les établissements de monnaie électronique bénéficiant d’une exemption ne doivent pas exercer leurs activités dans plusieurs États membres. Autrement dit: pas de passeport lorsque les exemptions s’appliquent.

4.   La perspective économique et sociale

4.1   Le CESE porte beaucoup d'intérêt aux avancées qui vont dans le sens des objectifs de la stratégie de Lisbonne. Cette directive mérite notre soutien car elle appuie la réalisation des objectifs de croissance et d'emploi de Lisbonne au moyen, entre autres, de l'innovation technologique, de l'initiative entrepreneuriale, de la créativité sur l'internet et de la création de PME, conduisant au développement de la société de l'information du XXIe siècle.

4.2   L'introduction d'un nouveau régime réglementaire dans le secteur financier est un problème potentiel eu égard à la crise du système bancaire et à la préoccupation générale vis-à-vis de l'inefficacité de la régulation des banques. En dépit de ces considérations, le CESE estime que le régime proposé est adéquat et proportionné, pour les raisons suivantes:

les réglementations sont conçues pour les PME innovantes du secteur des paiements. La récente crise bancaire a été provoquée par les risques de crédit auxquels les banques se sont exposées. Les établissements de monnaie électronique n’auront pas la possibilité d’accorder des crédits reposant sur les fonds des utilisateurs, de telle sorte qu’il n’y ait pas là une source de risque;

conformément à l’exigence de fonds propres (cf. paragraphes 3.6.1 et 3.6.2 ci-dessus), le capital initial de 125 000 euros doit croître proportionnellement au volume de monnaie en circulation. La diminution du capital initial exigé ne sert qu’à réduire les barrières à l’entrée. La directive spécifie des exigences en capital significatives pour des fonds propres plus importants;

les fonds propres d’un établissement de monnaie électronique seront proportionnels à ceux des banques et les fonds représentant les créances des utilisateurs seront protégés spécifiquement en ne pouvant être investis que dans un éventail limité d’instruments;

les sommes d’argent impliquées sont de minimis. Si les établissements de monnaie électronique devaient devenir une réelle force sur le marché des paiements, il y aurait lieu de modifier certaines dispositions de la directive à la lumière de l’expérience.

4.3   Le CESE nourrit certaines préoccupations en rapport avec la protection des consommateurs et il appelle la Commission à effectuer les changements suivants dans la directive:

4.3.1

Les limitations à l’investissement du fonds de trésorerie ne s’appliquent à l’heure actuelle qu’aux établissements de monnaie électronique hybrides. Pour une sécurité accrue des clients, ces dispositions devraient s’appliquer à toutes les institutions de monnaie électronique.

4.3.2

Les établissements de monnaie électronique ne peuvent pas détenir de fonds de clients en dépôt. Les sommes reçues doivent être immédiatement converties en monnaie électronique. Cette mesure de protection n’est pas clairement précisée dans la directive.

4.3.3

L’article 9 devrait être modifié de façon à rendre explicite l’exigence selon laquelle les fonds propres en rapport avec l’encours des engagements en monnaie électronique doivent être spécifiquement protégés dans le cas des établissements hybrides.

4.3.4

L’article 5.4 permet qu’aucun frais ne soit facturé pour le remboursement à la date d’échéance d’un contrat, cependant que l’article 5.5 autorise à facturer des frais en cas de résiliation anticipée. Il conviendrait de retirer cette dernière disposition car il n’y a pas de distinction entre le remboursement en cours de contrat ou à son échéance, et il est vraisemblable que cela résulte en un modèle de résiliation de contrat qui ira à l’encontre de l’exigence prudentielle de connaissance du client.

4.4   Les attitudes envers l’argent liquide diffèrent d’une culture à l’autre au sein de l’UE, tout comme les attitudes envers la technologie. Les taux de pénétration d’internet et du courrier électronique peuvent fournir quelques indications sur l’acceptation probable de la monnaie électronique. La démographie des secteurs de la vente au détail et des services sera un autre facteur. Les grandes entreprises sont probablement plus enclines à adopter la monnaie électronique en tant qu’utilisateurs précoces. C’est pour ces raisons et d’autres qui tiennent à la psyché des États membres qu’il serait peu judicieux de s’attendre à un taux de pénétration uniforme de la monnaie électronique à travers l’UE.

4.5   Des vingt et quelques établissements de monnaie électronique accrédités à ce jour, quinze l’ont été au Royaume-Uni. La politique positive de l’Autorité des services financiers (Financial Services Authority ou FSA) du Royaume-Uni envers la monnaie électronique a contribué à ce résultat. La FSA a en particulier consulté l’industrie pour s’assurer de ce que la réglementation britannique était utilisable dans la pratique. Ce en quoi elle a réussi. Le CESE appelle vivement tous les États membres à adopter des politiques aussi positives à l’égard de la nouvelle directive. De telles politiques devraient contribuer à accroître l’acceptation de la monnaie électronique à travers l’UE.

4.6   Une préoccupation essentielle a trait au développement de la réglementation antiblanchiment d’argent. La troisième directive antiblanchiment d’argent comportait un article qui conférait aux États membres la liberté de ne pas appliquer les mesures d’obligation de vigilance à l’égard de la clientèle ou de les reporter, pour ce qui est de la monnaie électronique, lorsque le montant stocké n’excède pas 150 euros pour un support non rechargeable, ou 2 500 euros par année civile pour un support rechargeable. Les plafonds équivalents tant dans la directive des services de paiement que dans la proposition de révision de la directive sur la monnaie électronique s’élèvent respectivement à 500 et 3 000 euros. Le CESE ne peut accepter que deux directives établissent des limites contradictoires. Si les limites posées par la directive à l’examen doivent l’emporter, alors la directive antiblanchiment d’argent doit être modifiée.

4.7   L’argent liquide est anonyme. De simples transactions en espèces ne dévoilent pas l’identité de la personne qui effectue le paiement. Les systèmes à monnaie électronique peuvent être anonymes ou bien nominatifs. La mise en œuvre de la directive sur la monnaie électronique par les États membres a souvent poussé l’identification personnelle du client (principe de bonne connaissance de la clientèle) à l’extrême, ce qui constitue un problème. Pour les transactions à faible valeur, beaucoup d’utilisateurs souhaiteront conserver leur anonymat. L’un des éléments de la mise en œuvre de la directive sur la monnaie électronique au Royaume-Uni consistait précisément à ce que les mesures d’identification personnelle du client n’entrent pas en jeu jusqu’à ce que le client ait atteint un niveau substantiel d’activité. Le plafond de stockage relevé à 500 euros devrait rendre la monnaie électronique plus attractive aux yeux des utilisateurs potentiels, notamment les personnes qui ne bénéficient pas ou peu des services bancaires. Alors que, rationnellement, ces limites ne devraient pas représenter un risque de blanchiment d’argent disproportionné en comparaison de ce qui est possible avec des montants élevés en espèce, quelques réserves demeurent vis-à-vis du plafond proposé.

4.8   La monnaie électronique favorise l’inclusion financière. Dans une société où les paiements par carte de crédit ou de débit deviennent de plus en plus la norme, la possibilité d’acquérir contre espèces une carte qui peut ensuite être utilisée dans les transactions de crédit ou de débit est potentiellement très alléchante. Certains groupes de la société pourraient tout particulièrement bénéficier de ce dispositif. Ces groupes englobent les immigrés, les personnes qui ne bénéficient pas ou peu des services bancaires, et dans certains cas, les jeunes et les personnes handicapées. Le CESE s’inquiète de ce que du point de vue de la protection des consommateurs, ces groupes sont aussi les plus vulnérables. Les États membres devraient tenir compte de ces vulnérabilités lorsqu’ils mettront en œuvre la directive.

Bruxelles, le 26 février 2009.

Le Président

du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  La RFID (identification par radiofréquences) utilise une puce électronique qui peut être incorporée dans différents supports tels que les étiquettes d’articles ou les cartes d’identité personnelles. La puce est lue par un lecteur sans fil, et la carte doit seulement effleurer le lecteur. Cette application est décrite comme étant «sans contact». Les cartes d’accès aux bâtiments telles que celles utilisées au CESE sont des cartes RFID.

(2)  PayPal a débuté en tant qu’établissement de monnaie électronique régulé par l’Autorité des services financiers (Financial Services Authority) du Royaume-Uni. Il s’est depuis converti en établissement de crédit et est désormais domicilié à Luxembourg.


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