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Document 52007AE0801

Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE afin d'intégrer les activités aériennes dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre COM(2006) 818 final — 2006/0304 (COD)

JO C 175 du 27.7.2007, p. 47–52 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

27.7.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 175/47


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE afin d'intégrer les activités aériennes dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre»

COM(2006) 818 final — 2006/0304 (COD)

(2007/C 175/13)

Le 8 février 2007, le Conseil a décidé, conformément à l'article 175, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la proposition susmentionnée.

La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», chargée d'élaborer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 mai 2007 (rapporteur: M. ADAMS).

Lors de sa 436e session plénière des 30 et 31 mai 2007 (séance du 31 mai), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 50 voix pour, 8 voix contre et 4 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité salue la proposition de directive, qui adopte une approche soigneusement réfléchie et pragmatique afin d'atténuer et de compenser la croissance rapide du volume de gaz à effet de serre émis par le secteur de l'aviation.

1.2

L'intégration de l'aviation dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission est de nature à renforcer ce système et le renforce dans sa position de modèle-phare pour la lutte contre les émissions de CO2 dans le monde.

1.3

La proposition est réaliste. Elle reconnaît la force de la pression qu'exercent le monde politique, les milieux économiques et les consommateurs en faveur de la poursuite du développement des voyages et du transport aériens, tout en utilisant le mécanisme de marché que constitue le système d'échange de quotas d'émission afin de compenser l'un des principaux impacts externes nuisibles produits par le secteur de l'aviation.

1.4

La proposition n'en est pas moins fragile. Sa réussite ou son échec sont liés à ceux du système d'échange de quotas d'émission, qui a été critiqué par de nombreuses parties prenantes, doit encore faire ses preuves et est lui-même tributaire d'une attribution équitable des quotas de CO2, d'investissements imaginatifs et innovants dans la réduction des émissions de CO2 et de l'application des plans nationaux d'allocation par les États membres.

1.5

Le Comité se félicite que le système inclue tous les vols en provenance ou à destination de l'Europe à partir de 2012 mais estime que la date de départ devrait être fixée à 2011 comme pour les opérateurs européens.

1.6

Le Comité note que la directive permet d'intégrer dans le système des crédits résultant de projets «externes» flexibles menés dans le cadre de la mise en œuvre conjointe de Kyoto ou de mécanismes de développement propre (MOC/MDC). Il est positif d'appuyer la réduction du carbone ainsi que les programmes d'énergies renouvelables et d'efficacité énergétique dûment certifiés dans les pays en développement, pour autant que des procédures d'audit strictes soient maintenues.

1.7

Le Comité reconnaît que le dossier est complexe mais estime que la proposition est quelque peu opaque et ne présente pas clairement les avantages qu'elle apporte. Elle fait appel, de différentes manières et à plusieurs niveaux, à l'UE dans son ensemble, aux États membres, à différents secteurs économiques et à la population. Il convient en particulier de souligner le potentiel positif de la directive pour appuyer et renforcer le système d'échange de quotas d'émission. Le Comité note également que d'autres services de la Commission, en particulier ceux en charge des transports, de l'énergie et de la recherche, devront apporter un soutien actif et complémentaire à cette proposition.

1.8

Par conséquent, le CESE émet les recommandations suivantes:

1.8.1

Il convient de profiter de l'intégration de l'aviation dans le système d'échange de quotas d'émission afin de réviser ce dispositif, de corriger les erreurs qui y existent et de le renforcer sur ses points faibles, afin de permettre l'émergence d'un marché effectif et efficace pour l'échange de carbone; il s'agit là d'un élément essentiel pour conforter l'engagement pris par l'UE de réduire les émissions de CO2 de 20 % d'ici à 2020.

1.8.2

Les plafonds d'émission devraient être abaissés, afin d'imposer à l'aviation des ajustements plus comparables à ceux qui sont demandés aux autres industries actuellement couvertes par le système d'échange de quotas d'émission.

1.8.3

Il conviendrait de supprimer ou de réduire de manière significative l'attribution gratuite de quotas aux opérateurs, en imposant que tous les quotas, ou du moins de la majorité d'entre eux, soient mis aux enchères.

1.8.4

Il y a lieu d'appliquer une limite commune sur l'achat de crédits des systèmes MOC/MDC, afin d'assurer que les réductions d'émissions s'effectuent pour une grande part au sein de l'UE.

1.8.5

La manière de présenter à l'opinion publique l'impact de la directive devrait faire l'objet d'une planification préalable. Cette démarche aura non seulement pour effet de sensibiliser davantage la population à l'impact de l'aviation sur les changements climatiques mais devrait également encourager une plus grade ouverture quant aux implications financières du système pour les clients et les opérateurs et minimiser le risque d'effets d'aubaine.

1.8.6

Les États membres devraient être invités à compenser volontairement les émissions produites par les vols de chefs d'État, de chefs de gouvernement ou de ministres, qui font actuellement l'objet d'une exemption pour des raisons administratives (vols opérés, pour la plupart, par des unités militaires), afin de montrer un exemple positif.

1.8.7

Il faudrait également accorder une très haute priorité aux travaux complémentaires sur les mesures de réduction du carbone qui ne relèvent pas du système d'échange de quotas d'émission. Parmi celles-ci figurent la suppression des obstacles juridiques qui empêchent d'édicter des dispositions fiscales et réglementaires, en particulier sur le carburant d'aviation, la limitation des émissions d'oxydes d'azote, l'amélioration de la gestion du trafic aérien et la recherche visant à une efficacité accrue des moteurs et cellules d'avion.

2.   Introduction

2.1

L'aviation a été et reste une partie intégrante et essentielle de l'économie mondiale en expansion. À bien des égards, son histoire a été celle d'une réussite exemplaire. Depuis 1960, le secteur a crû au rythme annuel moyen de 9 %, soit à un taux 2,4 fois supérieur à la croissance du PIB mondial. Cet essor se poursuit et si les tendances actuelles se maintiennent, le transport aérien doublera d'ici à 2020.

2.2

Il était inévitable que ce succès crée des problèmes, comme la croissance des aéroports et leur impact au niveau local; dans le contexte des changements climatiques, l'attention se porte toutefois de plus en plus sur la contribution que l'aviation apporte au réchauffement de la planète, par ses émissions de gaz à effet de serre et autres rejets. L'aéronautique, en tant que secteur de services, représente environ 0,6 % de la valeur ajoutée économique de l'UE mais intervient pour 3,4 % de ses émissions de gaz à effet de serre. Dans l'Union, les émissions provenant de l'aviation ont augmenté de 87 % depuis 1990, tandis que le volume total de gaz à effet de serre qui y ont été émis diminuait de 3 % au cours de la même période.

2.3

Dès les origines, les vols internationaux ont été exemptés de la taxe sur les carburants; ils ne sont pas non plus couverts par les objectifs du protocole de Kyoto. Étant donné la longue durée de vie des aéronefs et en l'état actuel des perspectives d'amélioration de l'efficacité technique et opérationnelle, la montée en puissance de l'aviation impliquera que ses émissions de gaz à effet de serre continueront à augmenter, sapant les efforts déployés dans d'autres secteurs où des réductions sont opérées. Bien que dans l'ensemble, l'aviation ait connu de grandes améliorations sur le plan de la réglementation, de la coordination et de l'exécution en ce qui concerne la sûreté et la sécurité, il s'est avéré difficile de parvenir à un consensus international sur les questions environnementales qui peuvent également avoir un impact sur les intérêts commerciaux.

2.4

Depuis quelque temps déjà, la Commission cherche un moyen d'encourager ou d'imposer une réduction des émissions de gaz à effet de serre de l'aviation. En 2005, elle a adopté une communication intitulée «Réduction de l'impact de l'aviation sur le changement climatique» (1). Dans l'avis qu'il a adopté en avril 2006 sur ce texte (2), le CESE a conclu qu'il était nécessaire de prendre des mesures politiques supplémentaires afin de contrôler l'impact de l'aviation sur les changements climatiques et a notamment recommandé que l'aviation soit incluse dans le système communautaire d'échange des quotas d'émission. Le Conseil «Environnement», le Conseil européen et le Parlement européen ont arrêté des positions semblables. La Commission propose à présent la directive qui est à l'examen dans le cadre du présent avis et inclut l'aviation dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre.

3.   Résumé de la proposition de directive

3.1

L'introduction de la proposition de directive à l'étude relève que, d'ici à 2012, la croissance des émissions de l'aviation pourrait annihiler plus d'un quart de la contribution environnementale réalisée par l'UE dans le cadre du protocole de Kyoto. Il s'avère difficile de parvenir à un consensus international sur les mesures à prendre mais la proposition de directive entend constituer un modèle en la matière au niveau mondial; c'est d'ailleurs la seule initiative qui permet cette possibilité.

3.2

La proposition à l'examen vise à modifier la directive 2003/87/CE sur les échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre de manière à inclure le secteur de l'aviation dans le système communautaire. Une analyse d'impact accompagnant la proposition arrive à la conclusion que si l'échange de quotas d'émission est la solution la plus efficace pour réduire l'impact de l'aviation sur le climat, les «répercussions sur le taux de croissance prévu de la demande», et donc sur le volume d'émissions «seraient limitées» (3). Il convient dès lors de comprendre que cette proposition n'a pas été conçue afin de limiter, comme une fin en soi, la croissance du secteur de l'aviation mais dans le but de veiller à ce que certains de ses effets nuisibles sur l'environnement soient compensés par des actions réalisées principalement dans d'autres secteurs économiques.

3.3

Actuellement, le système communautaire d'échange de quotas d'émission (4) couvre quelque 12 000 installations industrielles à haute densité énergétique qui sont responsables de la moitié des rejets totaux de CO2 dans l'UE. La proposition prévoit que les compagnies aériennes recevront des quotas échangeables, leur permettant d'émettre certaines quantités de CO2 chaque année, avec un plafond global fixé à la moyenne annuelle des émissions générées par le secteur de l'aviation au cours des trois années 2004-2006. Les opérateurs peuvent vendre leurs de quotas excédentaires ou en acheter des suppléments sur le marché d'échange des quotas d'émission, par exemple auprès d'installations industrielles qui ont réduit leurs rejets ou de projets d'énergie propre dans des pays tiers, dans le respect des mécanismes du protocole de Kyoto.

3.4

La directive proposée couvrira les émissions des vols intracommunautaires à partir de 2011 et de tous ceux à destination et en provenance d'aéroports de l'UE à partir de 2012. Elle concernera les exploitants d'aéronefs tant européens qu'étrangers. Selon les estimations, la proposition pourrait, d'ici à 2020, majorer de 1,8 à 9 euros le prix d'un billet aller-retour intra-européen, tandis que l'augmentation serait plus importante pour les vols long-courrier, par exemple de 8 à 40 euros pour un billet aller-retour à New-York. Une telle majoration n'ayant qu'un impact fort modeste sur le secteur du transport aérien, qui est caractérisé par l'élasticité de ses tarifs, on estime que le système aura un effet limité sur sa croissance.

3.5

Il convient de noter que la Commission reconnaît que l'intégration de l'aviation dans le système d'échange de quotas d'émission n'est que l'une des mesures envisageables qui doivent être prises au niveau international pour lutter contre l'impact croissant des émissions du secteur de l'aviation sur le climat. Elle propose d'avancer des propositions au sujet des émissions d'oxydes d'azote après une analyse d'impact prévue pour 2008. Par ailleurs, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a l'intention de présenter des propositions supplémentaires lors de son assemblée en septembre 2007, bien que des éléments semblent indiquer que des pressions croissantes s'exercent pour affaiblir et saper l'initiative de l'UE.

4.   Observations générales

4.1

Le CESE se félicite que l'intégration de l'aviation dans le système d'échange de quotas d'émission constitue le premier pas qui soit posé au niveau international pour amener les transports aériens à payer une partie des coûts environnementaux qu'ils externalisent depuis leur avènement. Il salue également l'inclusion des opérateurs non européens. En outre, le système proposé imposera aux aéronefs peu économes en carburant de disposer d'un plus gros volume de permis, ce qui encouragera quelque peu l'efficacité technique et opérationnelle. Étant donné qu'elles ont un facteur de charge en moyenne 10 % plus élevé que les compagnies «historiques», la proposition aura un impact quelque peu réduit pour les compagnies à bas prix, tout en encourageant l'ensemble d'entre elles à liquider à bas prix les dernières places libres dans leurs appareils.

4.2

Le Comité reconnaît que les mesures concernant l'efficacité des trajectoires de vol, les carburants de substitution, l'amélioration de la conception des appareils et l'augmentation des facteurs de charge contribueront toutes d'une manière ou d'une autre à réduire la croissance des émissions de gaz à effet de serre. On fera néanmoins remarquer que depuis 1990, la plupart de ces initiatives ont été activement mises en œuvre dans l'aviation et que les émissions ont pourtant augmenté de 85 % depuis lors, ce chiffre continuant de grimper en raison de l'accroissement considérable du nombre de passagers et des volumes de fret qui sont transportés par voie aérienne.

4.3

La directive à l'étude propose de lutter contre la contribution croissante de l'aviation aux changements climatiques en intégrant ce secteur dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission. Ce dispositif constitue au plan international le seul mécanisme de régulation et de compensation des émissions de CO2 qui soit lié au marché et présente une certaine envergure mais il a connu d'importants problèmes de démarrage au cours de sa phase d'essai qui prend fin en 2007. Ces difficultés résultent avant tout d'une attribution trop généreuse de quotas par les États membres. Afin que le système communautaire d'échange de quotas d'émission atteigne son objectif et devienne un instrument de marché réduisant les rejets de CO2, il est essentiel que la Commission, avec le soutien de tous les États membres, fassent preuve de détermination quand ils fixent et appliquent les quotas de CO2, ainsi qu'au moment de les faire respecter.

4.4

Dans la pratique, l'inclusion de l'aviation dans le système d'échange des quotas d'émission pourrait être très bénéfique pour ce dispositif. L'aviation est moins sensible aux prix que la plupart des activités fondées sur des processus industriels et la production d'énergie, qui sont actuellement responsables de la majorité des émissions de CO2. À mesure que la part de CO2 provenant de l'aviation augmentera, comme elle fera inévitablement, un montant considérable de nouveaux fonds entrera dans le système d'échange de quotas, fournissant une source d'investissements pour des économies de carbone supplémentaires dans d'autres secteurs. Si l'aviation elle-même n'a qu'une faible marge de manœuvre pour réaliser de telles réductions, elle peut devenir un vecteur de ressources qui permettront à d'autres secteurs de les réaliser.

4.5

Par exemple, la Commission estime que la directive entraînera une réduction nette de 183 millions de tonnes de CO2 d'ici à 2020 par rapport à un scénario basé sur le statu quo. Les projections concernant le prix du carbone durant cette période sont imprécises et dépendent de la fermeté affichée dans l'attribution aux entreprises mais dans l'hypothèse où le secteur de l'aviation achèterait 100 millions de tonnes au cours de cette période à un prix moyen de 30 euros, ce sont en principe 3 milliards d'euros qui seraient injectés dans les réductions de CO2.

4.6

En 2007, le Comité a lancé un vaste programme qui vise à encourager dans la société civile les actions et les meilleures pratiques en ce qui concerne les changements climatiques et dont la limitation de l'accroissement des émissions de gaz à effet de serre fait partie intégrante. S'il reconnaît que d'un point de vue pragmatique, la proposition à l'examen représente la meilleure approche pour intégrer l'aviation dans une stratégie de réduction du carbone, le Comité se doit toutefois de souligner que la directive proposée ne fera pratiquement rien pour limiter les émissions sans cesse grandissantes de gaz à effet de serre produites par le secteur du transport aérien. Un tel état de chose entraîne un grand problème de «présentation»: alors que l'activité aéronautique constitue déjà la source d'émissions de gaz à effet de serre qui affiche la croissance la plus rapide en Europe, la directive fait preuve de complaisance envers cette industrie, en insistant sur sa croissance sans lui imposer de limiter ses émissions. Il s'agira de faire comprendre à l'opinion que la directive peut mobiliser des ressources considérables, qui seront utilisées pour des réductions compensatoires des émissions de CO2.

5.   Observations particulières

5.1

La directive proposée emploie une terminologie inexacte lorsqu'elle affirme que son objectif est de réduire les émissions du secteur de manière significative. Étant donné que les compagnies aériennes peuvent acheter des quotas au tarif du «marché» pour couvrir leurs émissions qui excèdent le plafond qui leur a été attribué, l'impact du texte sur la réduction des gaz à effet de serre émis par l'aviation sera minime, puisqu'on estime qu'il pourrait entraîner une diminution nette de 3 % d'ici à 2020, soit moins d'une année de croissance des émissions de gaz à effet de serre qui sont imputables au secteur. Les chiffres de la Commission elle-même montrent que la légère hausse des coûts des vols n'aura que peu d'effet sur la demande de transport aérien.

5.2

En distribuant gratuitement aux compagnies aériennes la grande majorité des quotas de départ et en les autorisant à effectuer des achats supplémentaires dans le système général d'échange des quotas d'émission (qui est ouvert et non fermé, par exemple au transport aérien, ou aux transports en général), la Commission accepte le statu quo et ne fait pas grand chose pour peser sur la croissance soutenue et rapide d'un secteur aéronautique émetteur de gaz à effet de serre. Il faut toutefois comprendre que le cœur du problème est qu'à l'heure actuelle, une telle restriction s'avère inacceptable sur le plan politique et économique. Soucieuse de faire un tant soit peu avancer les choses, la Commission a calculé qu'en plus d'induire quelques stimulations de l'efficacité interne au secteur, l'intégration de l'aviation dans le système d'échange de quotas produira également, en compensant la hausse des émissions de CO2 dans l'aviation par des réductions dans d'autres secteurs, une véritable impulsion au marché, avec les ressources nécessaires, pour la réalisation de recherches supplémentaires et de nouvelles applications visant à réduire le CO2 ailleurs.

5.3

La Commission note que dans un système d'échange des quotas qui serait «fermé», c'est-à-dire limité au secteur de l'aviation seul, leur prix se situerait dans une fourchette de 114 à 325 euros par tonne, à comparer aux 30 euros estimés pour le dispositif proposé. Un tel système fermé majorerait probablement le prix des billets d'un montant de 8 à 30 euros pour un vol de courte distance. Alors que d'aucuns verront là une manière plus réaliste d'influer sur la demande tout en encourageant une utilisation efficace des carburants et en promouvant la recherche sur la réduction maximale des émissions, il n'est guère vraisemblable qu'une telle démarche soit soutenue à l'échelon de l'UE où l'on observe des priorités divergentes en matière de transports. Un système fermé ou limité au secteur des transports rendrait un consensus mondial encore plus improbable.

5.4

Dans la proposition de directive, la Commission reconnaît, tout en décidant de ne pas en tenir compte, que selon des analyses bien étayées, les émissions d'aéronefs sont deux à quatre fois plus nuisibles pour le climat que celles des autres industries (5), du fait avant tout du site de la plupart de ces rejets, dans les couches supérieures de l'atmosphère, et des effets des émissions autres que le CO2, telles que les traînées de condensation et les oxydes d'azote. Il s'impose de prendre des mesures supplémentaires pour réduire ou compenser les émissions d'oxydes d'azote.

5.5

Alors que les compagnies aériennes bénéficient déjà de l'exemption de la taxe sur le carburant d'aviation, la distribution gratuite des quotas initiaux de carbone accroîtra encore les avantages que l'État leur octroie par rapport aux autres secteurs des transports. Il se pourrait que les opérateurs se servent de l'instauration du système d'échange de quotas d'émission pour procéder à une augmentation générale des prix. En présentant clairement au public l'incidence financière réelle du système sur les coûts du secteur, la Commission pourrait atténuer les risques de profits injustifiés.

5.6

Il convient de réfléchir plus avant aux exemptions proposées dans la directive. Par exemple, celle dont bénéficient les chefs d'État, les chefs de gouvernement et les ministres est particulièrement malvenue, car cette catégorie de personnes devrait montrer l'exemple. En dépit des considérations administratives motivant cette exemption (vols opérés, pour la plupart, par des unités militaires), il convient d'inviter les États membres à compenser volontairement ces émissions, comme certains ont déjà décidé de le faire.

5.7

Étant donné que la Commission a opté pour un système ouvert à base compensatoire, il semble difficilement justifiable de ne pas aligner plus étroitement l'année de référence du système sur celle de l'engagement pris actuellement par l'UE pour la première phase du protocole de Kyoto (réduction de 8 % entre 2008 et 2012 par rapport aux niveaux de 1990) et les engagements à venir (par exemple, une réduction de 30 % par rapport aux niveaux de 1990 d'ici à 2020). Le choix de 2005 comme année de référence donne au secteur un «point de départ» environ deux fois plus élevé que celui retenu à Kyoto. Bien évidemment, compte tenu du fait que l'aviation est le premier secteur des transports à être intégré dans le système communautaire d'échange de quotas d'émission, il est tout à fait justifié de procéder aux premières allocations selon les principes qui ont présidé à l'instauration de ce système.

5.8

Il est peu probable que la directive à l'étude produise un quelconque effet significatif pour ralentir la croissance du total des émissions de l'aviation. Qu'elle puisse stabiliser les émissions nettes de CO2 grâce au système d'échange de quotas d'émission et, ce faisant, fournir également des moyens financiers pour des réductions supplémentaires contribue cependant grandement à justifier le coût et la complexité administrative de sa mise en œuvre. La directive proposée va au-delà de la feuille de vigne apposée sur le bilan environnemental du secteur de l'aviation: elle est susceptible de susciter, de manière bénéfique, une prise de conscience plus poussée dans l'opinion publique, de fournir un volume appréciable de ressources nouvelles pour réduire les rejets carbone et d'offrir un instrument d'internalisation de ces coûts environnementaux externes que le secteur de l'aviation a pu ignorer jusqu'ici.

Bruxelles, le 31 mai 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  COM(2005) 459 final du 27 septembre 2005.

(2)  NAT/299 «Le changement climatique/Impact de l'aviation».

(3)  Résumé de l'analyse d'impact, paragraphe 5.3.1.

(4)  Pour une brève description du système d'échange de quotas d'émission, voir l'annexe 1.

(5)  Résumé à l'attention des décideurs du GIEC 2007, The science of climate change («La science des changements climatiques»)

http://www.ipcc.ch/pub/sarsum1.htm.


ANNEXE I

à l'avis du Comité

Les amendements suivants ont été rejetés par l'assemblée, tout en ayant recueilli plus d'un quart des voix exprimées:

Paragraphe 1.8.2

Modifier comme suit:

«1.8.2

Les plafonds d'émission fixés devraient être abaissés, afin d'imposer à l'aviation des ajustements plus comparables à ceux qui sont demandés aux autres industries actuellement couvertes par le système communautaire d'échange de quotas d'émission».

Résultat du vote

Voix pour: 18

Voix contre: 33

Abstentions: 9

Paragraphe 1.8.3

Modifier comme suit:

«1.8.3

Il conviendrait de supprimer ou de réduire de manière significative l L'attribution gratuite de quotas aux opérateurs, en imposant que tous les quotas, ou du moins de la majorité d'entre eux, soient mis aux enchères devrait être fixée dans le cadre des règles et des documents d'orientation régissant le système communautaire d'échange de quotas d'émission».

Résultat du vote

Voix pour: 13

Voix contre: 24

Abstentions: 6


ANNEXE II

En 2005, l'Union européenne a instauré un marché paneuropéen des émissions de dioxyde de carbone pour les grandes industries émettrices de gaz à effet de serre. Il s'agit là d'un dispositif précurseur d'un mécanisme qui en vertu du protocole de Kyoto, fonctionnera sur des bases analogues à partir de 2008 entre ses signataires. Le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre a vocation à préparer les pays européens à Kyoto.

Le principe sur lequel repose le système consiste à octroyer à des secteurs industriels spécifiques des quotas d'émission de gaz à effet de serre, appelés «quotas communautaires», par le biais de plans nationaux d'allocation (PNA) supervisés par la Commission européenne. Ces quotas peuvent être échangés. La première phase du système communautaire d'échange de quotas d'émission couvre la période 2005-2007, tandis que la deuxième phase coïncide avec la première période d'engagement du protocole de Kyoto, qui va de 2008 à 2012.

La première phase du système communautaire d'échange de quotas d'émission concerne 7 300 entreprises et 12 000 installations dans les secteurs de l'industrie lourde de l'UE, notamment les unités de production d'énergie, les raffineries de pétrole, les producteurs de fer et d'acier, de pâte à papier et de papier, ainsi que de ciment, de verre, de chaux, de briques et de céramique.

Le système communautaire d'échange de quotas d'émission impose à chaque pays de l'UE des objectifs annuels en matière d'émissions de dioxyde de carbone (CO2), en fonction desquels ils répartissent chacun leur allocation nationale entre entreprises dont les usines et les unités de production sont les principaux émetteurs de dioxyde de carbone (unités de production d'énergie, fabricants de matériaux de construction et autres entreprises de l'industrie lourde).

Chaque quota communautaire donne à son propriétaire le droit d'émettre une tonne de dioxyde de carbone. Les entreprises qui n'utilisent pas tous leurs quotas, c'est-à-dire qui émettent moins qu'elles n'en ont le droit, peuvent les vendre. Les sociétés qui dépassent leur objectif d'émission doivent compenser leurs émissions excédentaires en acquérant des quotas communautaires, ou payer une amende de 40 euros par tonne.

Afin d'assurer la gestion des échanges de quotas et de vérifier qui en est propriétaire, le système d'échange de quotas d'émission prévoit que chaque État membre de l'UE crée un registre national des quotas d'émission qui reprend les comptes de toutes les entreprises participant au système.

Le marché fonctionne par l'intermédiaire de courtiers et de sites de transactions électroniques, où les quotas communautaires sont achetés et vendus au jour le jour. Les échanges portent avant tout sur les contrats à terme de quotas communautaires, c'est-à-dire les quotas d'émission à fournir pour une date à venir, qui correspond à la fin de l'année calendrier du quota concerné.


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