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Document 62021CC0212

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 15 décembre 2022.
Banque européenne d'investissement (BEI) et Commission européenne contre ClientEarth.
Pourvoi – Environnement – Convention d’Aarhus – Règlement (CE) no 1367/2006 – Article 2, paragraphe 1, sous f) – Notion de “droit de l’environnement” – Article 2, paragraphe 1, sous g) – Notion d’“acte administratif” – Article 10, paragraphe 1 – Réexamen interne d’actes administratifs – Délibération du conseil d’administration de la Banque européenne d’investissement (BEI) approuvant le financement d’un projet de centrale électrique biomasse – Rejet de la demande de réexamen interne de cette délibération comme étant irrecevable – Indépendance de la BEI dans le domaine de ses opérations financières – Article 271, sous c), TFUE – Portée.
Affaires jointes C-212/21 P et C-223/21 P.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:1003

 CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 15 décembre 2022 ( 1 )

Affaires jointes C‑212/21 P et C‑223/21 P

Banque européenne d’investissement (BEI) (C‑212/21 P)

et

Commission européenne (C‑223/21 P)

contre

ClientEarth

« Pourvoi – Environnement – Convention d’Aarhus – Règlement no 1367/2006 – Réexamen d’actes administratifs au regard du droit de l’environnement – Banque européenne d’investissement – Octroi de prêt – Compétences des juridictions de l’Union »

I. Introduction

1.

Les organisations de protection de l’environnement peuvent‑elles contester l’octroi de prêts par la Banque européenne d’investissement [(BEI) ou ci-après la « Banque ») en raison de la violation de dispositions relevant du droit de l’environnement ? Tel est l’objet du présent pourvoi.

2.

En vue de mettre en œuvre la convention d’Aarhus ( 2 ), l’Union européenne a en effet créé, avec le règlement dit d’Aarhus ( 3 ), une procédure de réexamen grâce à laquelle les organisations de protection de l’environnement en particulier peuvent contester la violation de dispositions du droit de l’environnement de l’Union par ses institutions et organes.

3.

ClientEarth, une organisation non gouvernementale active dans le domaine de l’environnement, a demandé sur ce fondement que la Banque réexamine la délibération du conseil d’administration de la BEI relative à l’autorisation du financement d’une centrale de production d’électricité à partir de biomasse en Espagne (ci-après la « délibération litigieuse »). La Banque a toutefois refusé de procéder au réexamen au motif que la délibération litigieuse ne serait pas un acte administratif dans le domaine du droit de l’environnement ayant un effet juridiquement contraignant et extérieur (ci-après la « lettre attaquée »).

4.

Le Tribunal de l’Union européenne, dans son arrêt du 27 janvier 2021, ClientEarth/BEI (T‑9/19, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:42), s’est limité à l’examen de la motivation de la lettre attaquée. Il a en revanche rejeté sans examen au fond l’argument de la Banque selon lequel la demande de réexamen interne de la délibération litigieuse serait déjà irrecevable parce qu’elle ne serait pas compatible avec l’indépendance de la BEI dans le domaine de ses opérations financières, étant donné que cet argument ne serait pas contenu dans cette motivation.

5.

L’argument susmentionné de la Banque devrait cependant être examiné d’office étant donné qu’il touche à la question de la compétence des juridictions de l’Union en ce qui concerne le présent litige. En outre, les objections aux constatations du Tribunal quant à la motivation de la lettre attaquée doivent être examinées.

II. Le cadre juridique

A.   La convention d’Aarhus

6.

L’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus prévoit que les parties veillent à ce que les membres du public puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement. En vertu de l’article 9, paragraphe 4, de cette convention, ces procédures doivent offrir des recours suffisants et effectifs, et doivent être objectives, équitables et rapides sans que leur coût soit prohibitif.

B.   Le règlement d’Aarhus

7.

Le règlement d’Aarhus met en œuvre, notamment, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus pour les institutions ou organes de l’Union.

8.

L’article 2, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus définit diverses notions :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a)

[...]

c)

“institutions et organes [de l’Union]”, toute institution, tout organe, toute agence ou tout office publics créés en vertu ou sur la base du traité, [...]

f)

“droit de l’environnement”, toute disposition législative [de l’Union] qui, indépendamment de sa base juridique, contribue à la poursuite des objectifs de la politique de [l’Union] dans le domaine de l’environnement tels que prévus par le traité : la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement, la protection de la santé des personnes, l’utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles et la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement ;

g)

“ acte administratif”, toute mesure de portée individuelle au titre du droit de l’environnement arrêtée par une institution ou un organe [de l’Union] et ayant un effet juridiquement contraignant et extérieur ;

h)

[...] »

9.

L’article 10 du règlement d’Aarhus prévoit une procédure de réexamen interne :

« 1.   Toute organisation non gouvernementale satisfaisant aux critères prévus à l’article 11 est habilitée à introduire une demande de réexamen interne auprès de l’institution ou de l’organe [de l’Union] qui a adopté un acte administratif au titre du droit de l’environnement ou, en cas d’allégation d’omission administrative, qui était censé avoir adopté un tel acte.

[...] La demande précise les motifs de réexamen.

2.   L’institution ou organe [de l’Union] visé(e) au paragraphe 1 prend en considération toutes les demandes de ce type [...]. L’institution ou organe [de l’Union] motive sa position par écrit [...]

3.   [...] »

10.

L’article 12, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus fait référence à la possibilité d’un recours devant les juridictions de l’Union :

« L’organisation non gouvernementale ayant introduit la demande de réexamen interne en vertu de l’article 10 peut saisir la Cour de justice conformément aux dispositions pertinentes du traité. »

11.

La procédure de réexamen est précisée dans les considérants 19 à 21 du règlement d’Aarhus :

« 19.

Pour garantir des voies de recours adéquates et efficaces, y compris celles ouvertes devant la Cour de justice [de l’Union européenne] en vertu des dispositions pertinentes du traité, il convient que l’institution ou l’organe [de l’Union] à l’origine de l’acte à contester ou, en cas d’allégation d’omission administrative, de l’omission, ait la possibilité de réexaminer sa décision, ou, dans le cas d’une omission, d’agir.

20.

Les organisations non gouvernementales s’occupant de la protection de l’environnement qui satisfont à certains critères, permettant en particulier de s’assurer qu’il s’agit d’organisations indépendantes et responsables qui ont démontré que leur objectif premier est de promouvoir la protection de l’environnement, devraient être habilitées à demander, lorsqu’une institution ou un organe [de l’Union] adopte un acte au titre du droit de l’environnement ou omet d’agir à ce titre, le réexamen interne, au niveau [de l’Union], dudit acte ou de ladite omission par l’institution ou l’organe en cause.

21.

Lorsque de précédentes demandes de réexamen interne n’ont pas abouti, l’organisation non gouvernementale concernée devrait pouvoir saisir la Cour de justice conformément aux dispositions pertinentes du traité. »

C.   Les dispositions spéciales relatives à la BEI

12.

L’article 271 TFUE contient des dispositions spéciales quant aux compétences de la Cour en ce qui concerne la BEI :

« La Cour de justice de l’Union européenne est compétente, dans les limites ci‑après, pour connaître des litiges concernant :

[...]

c)

les délibérations du conseil d’administration de la Banque européenne d’investissement. Les recours contre ces délibérations ne peuvent être formés, dans les conditions fixées à l’article 263, que par les États membres ou la Commission, et seulement pour violation des formes prévues à l’article 19, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts de la Banque ;

[...] »

13.

En vertu de l’article 308 TFUE, la BEI est dotée de la personnalité juridique distincte de celle de l’Union. Elle est gérée et dirigée par ses propres organes. Elle est dotée de ses propres ressources et de son propre budget.

14.

Les missions de la BEI sont précisées à l’article 309 TFUE :

« La Banque européenne d’investissement a pour mission de contribuer, en faisant appel aux marchés des capitaux et à ses ressources propres, au développement équilibré et sans heurt du marché intérieur dans l’intérêt de l’Union. À cette fin, elle facilite, par l’octroi de prêts et de garanties, sans poursuivre de but lucratif, le financement des projets ci-après, dans tous les secteurs de l’économie :

a)

projets envisageant la mise en valeur des régions moins développées ;

b)

projets visant la modernisation ou la conversion d’entreprises ou la création d’activités nouvelles induites par l’établissement ou le fonctionnement du marché intérieur, qui, par leur ampleur ou par leur nature, ne peuvent être entièrement couverts par les divers moyens de financement existant dans chacun des États membres ;

c)

projets d’intérêt commun pour plusieurs États membres, qui, par leur ampleur ou par leur nature, ne peuvent être entièrement couverts par les divers moyens de financement existant dans chacun des États membres.

Dans l’accomplissement de sa mission, la Banque facilite le financement de programmes d’investissement en liaison avec les interventions des fonds structurels et des autres instruments financiers de l’Union. »

15.

Les statuts de la BEI sont posés dans le protocole no 5 au TUE et TFUE.

16.

D’après l’article 9, paragraphe 1, des statuts de la BEI, le Conseil d’administration contrôle la saine administration de la Banque et assure la conformité de la gestion de la Banque avec les dispositions des traités et des statuts et les directives générales fixées par le Conseil des gouverneurs. Il décide de l’octroi de financements et fixe les taux d’intérêt pour les prêts.

17.

L’article 19 des statuts de la BEI contient diverses prescriptions procédurales :

« [...]

2.   Lorsque les demandes sont adressées par l’intermédiaire de la Commission, elles sont soumises pour avis à l’État membre sur le territoire duquel l’investissement sera réalisé. Lorsqu’elles sont adressées par l’intermédiaire de l’État, elles sont soumises pour avis à la Commission. Lorsqu’elles émanent directement d’une entreprise, elles sont soumises à l’État membre intéressé et à la Commission.

Les États membres intéressés et la Commission doivent donner leur avis dans un délai de deux mois au maximum. À défaut de réponse dans ce délai, la Banque peut considérer que l’investissement en cause ne soulève pas d’objections.

3.   Le conseil d’administration statue sur les opérations de financement qui lui sont soumises par le comité de direction.

[...]

5.   En cas d’avis négatif du comité de direction, le conseil d’administration ne peut accorder le financement en cause qu’à l’unanimité.

6.   En cas d’avis négatif de la Commission, le conseil d’administration ne peut accorder le financement en cause qu’à l’unanimité, l’administrateur nommé sur désignation de la Commission s’abstenant de prendre part au vote.

7.   En cas d’avis négatif du comité de direction et de la Commission, le conseil d’administration ne peut pas accorder le financement en cause.

[...] »

18.

L’article 27, paragraphe 1, des statuts de la BEI règle la compétence juridictionnelle :

« Les litiges entre la Banque, d’une part, et, d’autre part, ses prêteurs, ses emprunteurs ou des tiers sont tranchés par les juridictions nationales compétentes, sous réserve des compétences attribuées à la Cour de justice de l’Union européenne. [...] »

19.

La déclaration des principes et normes en matière sociale et environnementale, approuvée par le conseil d’administration le 3 février 2009 (ci‑après la « déclaration de 2009 »), et la stratégie en matière d’action pour le climat, visant à mobiliser des financements à l’appui de la transition vers une économie sobre en carbone et capable de résister aux changements climatiques, adoptée par la BEI le 22 septembre 2015 (ci-après la « stratégie climat »), définissent les objectifs de l’activité de prêt et les critères d’éligibilité pour les projets portant sur l’environnement. Ils incluent en particulier le respect par les projets financés du droit de l’environnement de l’Union.

III. Les faits

20.

Le financement litigieux concerne un projet portant sur la construction dans la commune de Curtis (Teixeiro), dans la province de de la Corogne (Espagne), d’une centrale biomasse de production d’électricité d’une capacité d’environ 50 mégawatts, alimentée par les déchets forestiers collectés dans un rayon de 100 kilomètres (ci-après le « projet Curtis »).

21.

Après diverses étapes procédurales, le conseil d’administration de la BEI a approuvé par la délibération litigieuse du 12 avril 2018 la proposition de financement sous la forme d’un prêt.

22.

Par lettre du 13 avril 2018, la BEI a communiqué au promoteur du projet la délibération litigieuse et a signalé que l’approbation préliminaire du financement du projet Curtis ne créait aucune obligation pour la BEI d’accorder le prêt, mais permettait (seulement) au promoteur du projet de prendre les mesures nécessaires à la formalisation du prêt.

23.

Le 28 juin 2018, la délibération litigieuse a été publiée sur le site Internet de la BEI.

24.

Le détail des modalités et des conditions du financement du projet Curtis a été négocié entre le promoteur du projet et les différents bailleurs qui comptaient, outre la BEI, une banque commerciale, un organisme de crédit à l’exportation, une banque nationale de promotion économique et un prêteur mezzanine. Une fois les modalités définitives convenues entre toutes les parties et les divers rapports d’audit achevés, le résultat des négociations et de la procédure d’audit a été présenté au comité de direction de la BEI dans une note finale qui a été approuvée par ce dernier le 16 juillet 2018.

25.

Le 23 juillet 2018, les services de la BEI ont signé un accord interne sur les modalités du contrat de financement du projet Curtis. La documentation contractuelle y afférente a été signée le 25 juillet 2018.

26.

Le premier décaissement lié au financement de la BEI a été effectué le 29 août 2018. Il était prévu que la construction du projet Curtis soit achevée avant la fin de l’année 2019. Comme la BEI l’a indiqué lors de l’audience devant le Tribunal, en réponse à une question, l’exécution du projet Curtis se déroule depuis lors normalement.

27.

Le 9 août 2018, ClientEarth a introduit auprès de la Banque une demande de réexamen interne de la délibération litigieuse, conformément à l’article 10 du règlement d’Aarhus.

28.

Par la lettre attaquée du 30 octobre 2018, signée par sa secrétaire générale et la cheffe adjointe de son service juridique, la BEI a informé ClientEarth du rejet de sa demande. Celle-ci serait irrecevable parce qu’elle ne concernerait pas un acte juridique susceptible de faire l’objet d’un réexamen interne, à savoir un « acte administratif » au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus.

29.

Dans la lettre attaquée, la BEI a fait valoir, premièrement, que la délibération litigieuse ne produit pas d’effet juridiquement contraignant et extérieur, et ne pouvait pas créer de droits pour les tiers. Il s’agirait simplement d’un acte interne, au sens des articles 9 et 19 des statuts de la BEI, indispensable pour pouvoir signer le contrat de financement en cause. Elle ne contiendrait cependant pas nécessairement une signature et ne créerait, pour la contrepartie, aucun droit à exiger une telle signature. La délibération litigieuse ne pourrait pas être comparée à une décision d’attribution en matière de marchés publics, car elle n’aurait pas relevé d’une procédure régie par le droit des marchés publics ou comparable à un appel d’offres public. Elle relèverait au contraire du pouvoir commercial et politique discrétionnaire dont la BEI bénéficie en vertu des traités et de ses statuts.

30.

Deuxièmement, la délibération litigieuse n’aurait pas été adoptée « au titre du droit de l’environnement » au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus.

31.

Troisièmement, la lettre attaquée se penche sur l’argument tiré de ce que la BEI se serait engagée à promouvoir les objectifs environnementaux dans le cadre du déploiement de ses propres ressources. Cet engagement ne suffirait pas pour conclure que la BEI approuve ipso facto le financement du projet Curtis ou tout autre financement de projet sur le fondement de la législation environnementale de l’Union. Un tel argument étendrait artificiellement les limites de la « législation de l’Union » au-delà du champ d’application du règlement d’Aarhus et d’une manière incompatible avec le rôle institutionnel et la mission statutaire de la BEI.

IV. La procédure juridictionnelle

32.

ClientEarth a formé un recours contre la lettre attaquée auprès du Tribunal. La BEI, soutenue par la Commission européenne, s’est opposée à ce recours.

33.

Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a déclaré la nullité de la lettre attaquée.

34.

À cet égard, le Tribunal a tout d’abord rejeté comme étant irrecevable le moyen de défense selon lequel la demande de réexamen interne de la délibération litigieuse serait irrecevable notamment parce qu’elle serait incompatible avec l’indépendance de la BEI dans le domaine de ses opérations financières. Cet argument ne serait mentionné dans la lettre attaquée que de manière « vague et générale » en tant que partie de la motivation expliquant pourquoi la délibération litigieuse n’est pas un acte administratif (voir en particulier les points 90 à 92 de l’arrêt attaqué).

35.

Le Tribunal a ensuite constaté que la BEI avait à tort dénié à la délibération litigieuse son caractère de droit de l’environnement (points 117 et suivants de l’arrêt attaqué) ainsi que son caractère juridiquement contraignant et son effet extérieur (points 149 et suivants de l’arrêt attaqué).

36.

La BEI (affaire C‑212/21 P) et la Commission (affaire C‑223/21 P) ont formé un pourvoi.

37.

La BEI conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

1)

déclarer le pourvoi recevable et fondé ;

2)

annuler dans son intégralité l’arrêt attaqué tel qu’il figure au dispositif de cet arrêt ;

3)

rejeter le recours dans l’hypothèse où la Cour estime que le litige est en l’état d’être jugé ;

4)

condamner ClientEarth aux dépens exposés par les deux parties, nés de la procédure de pourvoi ainsi que de la procédure en première instance.

38.

La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour :

1)

annuler l’arrêt attaqué ;

2)

condamner ClientEarth aux dépens.

39.

ClientEarth conclut, quant à elle, à ce qu’il plaise à la Cour :

1)

rejeter les deux pourvois ; et

2)

condamner la BEI et la Commission aux dépens.

40.

Les parties ont présenté des observations écrites et ont participé à l’audience qui s’est tenue le 20 octobre 2022.

V. L’appréciation en droit

41.

Il convient d’examiner tout d’abord l’argumentation de la Banque et de la Commission en ce sens qu’un réexamen des délibérations du conseil d’administration de la BEI quant à l’octroi de prêts est presque entièrement soustrait au contrôle juridictionnel et qu’il n’y aurait de ce fait, dans la présente affaire, pas de compétence de la Cour (voir sous A). Nous examinerons ensuite si le Tribunal a jugé à bon droit que la délibération litigieuse du conseil d’administration de la BEI est un acte administratif au titre du droit de l’environnement (voir sous B).

A.   Sur la compétence de la Cour

42.

La Banque et la Commission s’opposent avec insistance au fait que le Tribunal, aux points 86 à 92 de l’arrêt attaqué, a rejeté en tant qu’extension illégale de la motivation de la lettre attaquée leur argumentation tenant à la fonction et au rôle de la BEI, consacrés par le droit primaire.

43.

Le Tribunal a constaté à juste titre, aux points 89 et 90 de l’arrêt attaqué, que la motivation contenue dans la lettre attaquée n’avance pas ces arguments de manière autonome. La Banque n’avait au contraire évoqué cette réflexion qu’en passant afin de démontrer que la délibération litigieuse n’est pas un acte administratif au titre du droit de l’environnement. Le Tribunal a par conséquent logiquement constaté au point 91 qu’une prise en compte de cette argumentation, en tant que motivation autonome de la lettre attaquée, constituerait une substitution a posteriori illégale de la motivation ( 4 ).

44.

Cela ne signifie toutefois pas que cette argumentation de la Banque et de la Commission est sans importance dans la présente procédure. Contrairement à ce qu’estime la Banque, les juridictions de l’Union ne sont certes pas autorisées à se saisir d’office de toute violation du droit primaire ( 5 ). L’argumentation quant à la fonction de la BEI soulève néanmoins des doutes quant au pouvoir des juridictions de l’Union à même de connaître du présent litige. De tels doutes peuvent, voire doivent, être examinés d’office par ces juridictions conformément à l’article 150 du règlement de procédure de la Cour et à l’article 129 du règlement de procédure du Tribunal ( 6 ).

45.

Le Tribunal ne s’est en l’espèce pas exprimé sur cette question et part par conséquent éventuellement du principe que sa compétence découle de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE ( 7 ) étant donné que ClientEarth est destinataire de la lettre attaquée.

46.

Dans la présente affaire, l’examen de la compétence des juridictions de l’Union est cependant nécessaire parce que l’article 271 TFUE contient des dispositions particulières quant à leur compétence pour certaines procédures auxquelles la BEI participe. Il convient par conséquent d’examiner tout d’abord si la lettre attaquée est, eu égard au contexte réglementaire du règlement d’Aarhus, un acte attaquable et, ensuite, si les dispositions particulières citées, relatives à la BEI, y changent quelque chose. Cette question doit être distinguée de celle de savoir si la délibération litigieuse est un acte administratif au titre du droit de l’environnement, question sur laquelle nous nous pencherons ci-après dans la section B.

1. Le caractère attaquable de la lettre attaquée

47.

Sont susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation, au titre de l’article 263 TFUE, tous les actes adoptés par les institutions et organes de l’Union, indépendamment de leur forme, produisant des effets juridiques obligatoires ( 8 ) et de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique ( 9 ). À cette fin, les effets de l’acte en cause doivent être appréciés à l’aide de critères objectifs comme son contenu, en tenant compte, le cas échéant, du lien entre l’adoption de l’acte et les pouvoirs de l’institution qui en est l’auteur ( 10 ).

48.

La lettre attaquée a rejeté une demande de réexamen au titre de l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus. En vertu de cette disposition, certaines organisations non gouvernementales sont habilitées à introduire une demande motivée de réexamen interne auprès de l’institution ou de l’organe de l’Union qui a adopté un acte administratif au titre du droit de l’environnement.

49.

Il ressort du considérant 19 du règlement d’Aarhus que ce réexamen sert à garantir des voies de recours adéquates et efficaces, notamment par des procédures devant la Cour. Le droit à un réexamen appartient, d’après l’article 10, paragraphe 1, et le considérant 20 du règlement d’Aarhus, à certaines organisations non gouvernementales. Lorsque la demande n’a pas été accueillie, l’organisation non gouvernementale concernée devrait, d’après l’article 12 et le considérant 21, être en mesure d’engager une procédure juridictionnelle devant la Cour conformément aux dispositions applicables du TFUE.

50.

La procédure de réexamen en vertu des articles 10 et 12 du règlement d’Aarhus permet ainsi de surmonter les obstacles d’une action collective dans le domaine du droit de l’environnement contre l’acte juridique examiné et qui découlent de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

51.

En vertu de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, les personnes physiques et morales ne peuvent former de recours que contre les actes dont elles sont destinataires ou qui les concernent directement et individuellement ainsi que contre les actes réglementaires qui les concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution. Une organisation de protection de l’environnement n’est cependant, en règle générale, pas affectée directement et individuellement par un acte juridique dont elle demande le réexamen et ne pourrait par conséquent pas satisfaire aux exigences de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

52.

Du fait de la demande de réexamen, le service compétent de l’Union adresse cependant une décision à l’organisation de protection de l’environnement demanderesse, que cette dernière peut ensuite contester auprès des juridictions de l’Union. La procédure de réexamen au titre de l’article 10 à 12 du règlement d’Aarhus crée ainsi les conditions procédurales pour que les organisations de protection de l’environnement puissent indirectement attaquer devant les tribunaux les actes administratifs au titre du droit de l’environnement.

53.

La Cour a expressément confirmé cet effet de la procédure de réexamen et n’a à cette occasion pas exprimé de doutes qu’elle serait compatible avec les prescriptions de l’article 263 TFUE ( 11 ). Le législateur a entretemps même fortement étendu l’application de cette procédure et a invoqué à cette occasion cette jurisprudence ( 12 ).

54.

Avec cette procédure de réexamen interne et l’option de former ultérieurement un recours, l’Union met en œuvre l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. D’après cette disposition, les parties veillent à ce que les membres du public qui répondent aux critères éventuels prévus par le droit interne puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement.

55.

Par la lettre attaquée, la Banque a rejeté une demande de ClientEarth visant au réexamen de la délibération litigieuse du conseil d’administration de la BEI. La Banque n’a certes pas considéré que la demande était infondée, mais qu’elle était irrecevable parce que la délibération litigieuse n’est pas un acte administratif au titre du droit de l’environnement au sens de l’article 10 du règlement d’Aarhus. Un tel rejet de la demande pour irrecevabilité doit toutefois, en principe, être tout aussi attaquable qu’un rejet pour défaut de fondement.

56.

Si l’institution ou l’organe concerné refuse en effet à tort le réexamen, il serait porté atteinte au droit de l’organisation non gouvernementale au réexamen fondé par l’article 10 du règlement d’Aarhus. D’après la jurisprudence relative aux actes attaquables, ses intérêts seraient violés de manière caractérisée par une modification de sa situation juridique, et ce concrètement par le rejet de sa demande de réexamen.

57.

La lettre attaquée de la Banque est ainsi en principe un acte attaquable en vertu de l’article 263 TFUE.

2. La limitation des compétences des juridictions de l’Union par l’article 271 TFUE

58.

L’article 271, sous c), TFUE modifie cependant le système des voies de recours contre les délibérations du conseil d’administration de la BEI. D’après cette disposition, les recours contre ces délibérations ne peuvent être formés, dans les conditions fixées à l’article 263 TFUE, que par les États membres ou la Commission, et seulement pour violation des formes prévues à l’article 19, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts de la BEI ( 13 ).

59.

Nous exposerons ci-après que cette restriction du contrôle juridictionnel fait obstacle à un recours au titre de l’article 12 du règlement d’Aarhus ayant pour objet un réexamen au fond d’une délibération du conseil d’administration de la BEI (voir sous a). L’objet du présent recours est cependant simplement la qualification juridique de la délibération litigieuse avec pour objectif son réexamen interne par la Banque. L’article 271, sous c), TFUE ne fait pas obstacle à un réexamen interne (voir sous b).

a) Pas de contrôle au fond de la délibération litigieuse par les juridictions de l’Union

60.

Sur le plan formel, le recours ne vise certes pas une délibération du conseil d’administration de la BEI au sens de l’article 271, sous c), TFUE, mais, indirectement, elle touche bel et bien à une telle délibération car la lettre attaquée rejette la demande de ClientEarth de réexaminer la délibération litigieuse du conseil d’administration. L’objet de la demande de réexamen concerne, d’après l’article 10 du règlement d’Aarhus, la réévaluation de l’acte juridique dont le réexamen est demandé ( 14 ). La demande vise donc – selon les termes de la Cour – à faire constater une illégalité ou l’absence de bien-fondé de l’acte concerné ( 15 ).

61.

Si la Banque avait motivé le rejet de la demande par la lettre attaquée en soutenant que la délibération litigieuse était légale et bien fondée, le présent recours viserait ainsi indirectement à faire examiner par le juge ces constatations, et ainsi la légalité et le bien-fondé de la délibération litigieuse.

62.

Un tel contrôle au fond indirect des délibérations du conseil d’administration de la BEI par les juridictions de l’Union est incompatible avec l’article 271, sous c), TFUE ( 16 ), car, dans les cas couverts par cette disposition, les compétences des juridictions de l’Union sont nettement restreintes par rapport à celles qui existent au titre de l’article 263 TFUE.

63.

Ces restrictions concernent tout d’abord le cercle des requérants potentiels. Tandis que l’article 263, quatrième alinéa, TFUE autorise les recours de toute personne physique ou morale remplissant les conditions, les délibérations du conseil d’administration de la BEI ne peuvent, en vertu de l’article 271, sous c), TFUE, être expressément attaquées que par les États membres ou la Commission. La possibilité que d’autres personnes forment un recours est ainsi exclue.

64.

L’article 271, sous c), TFUE restreint en outre, même pour les recours des États membres et de la Commission, les pouvoirs de contrôle au fond des juridictions de l’Union.

65.

L’article 263, deuxième alinéa, TFUE autorise les recours pour incompétence, violation des formes substantielles, violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir.

66.

Les délibérations du conseil d’administration de la BEI ne peuvent au contraire, en vertu de l’article 271, sous c), TFUE, faire l’objet d’un recours que pour violation des formes prévues à l’article 19, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts de la BEI. D’après cette disposition, la Banque doit informer les États membres et la Commission des demandes de financement. En cas d’avis négatif de la Commission ou du comité de direction, le conseil d’administration de la BEI ne peut accorder le financement en cause qu’à l’unanimité ; en cas de double avis négatif, le financement ne peut pas être accordé. Étant donné qu’il s’agit à cet égard de droit procéduraux de la Commission et des États membres représentés au sein du conseil d’administration, il est en outre juste de n’autoriser que ceux-ci à former un recours.

67.

D’après l’argumentation de la Banque et de la Commission, la limitation du contrôle juridictionnel des financements par la BEI s’explique par le fait que, pour les financements, elle agit comme les autres banques opérant sur le marché ( 17 ). Ces autres banques ne seraient cependant soumises, en ce qui concerne leurs décisions de financement, à aucun contrôle juridictionnel.

68.

Les restrictions du contrôle juridictionnel doivent également couvrir le droit de recours prévu à l’article 12 du règlement d’Aarhus. Cette réglementation autorise les recours d’après les dispositions pertinentes du traité, c’est-à-dire en particulier un recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE. La Banque souligne cependant à juste titre que l’article 271, sous c), TFUE est, lui aussi, une disposition pertinente. Étant donné qu’elle exclut un contrôle juridictionnel des délibérations du conseil d’administration sur initiative des organisations de protection de l’environnement et interdit par ailleurs aussi un contrôle au fond de ces décisions par les juridictions de l’Union, l’article 12 du règlement d’Aarhus ne peut pas permettre indirectement de tels contrôles.

69.

L’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus ne peut pas non plus être opposé à cette interprétation de l’article 12 du règlement d’Aarhus, ce dernier étant supposé mettre en œuvre la première norme citée ( 18 ). Il est vrai que l’article 9, paragraphe 3, ne prévoit pas d’exception pour la BEI. Cet engagement de droit international public de l’Union doit aussi en principe, et contrairement à ce qu’estime la Commission, être pris en compte lors de l’interprétation du droit dérivé et en particulier d’une disposition qui – comme l’article 12 du règlement d’Aarhus – vise à mettre en œuvre un tel engagement ( 19 ). Les prescriptions de l’article 271, sous c), TFUE font cependant partie du droit primaire et priment par conséquent sur les engagements de droit international public de l’Union ( 20 ), ce que la Banque souligne à juste titre.

70.

Si la Banque avait rejeté la demande de réexamen au motif que la délibération litigieuse était, de son avis, légale et bien fondée, les juridictions de l’Union ne seraient par conséquent pas autorisées à statuer sur un recours de ClientEarth contre cette décision.

b) Le contrôle de la qualification juridique de la délibération litigieuse par les juridictions de l’Union

71.

La compétence des juridictions de l’Union pour le présent recours n’est toutefois pas exclue par l’article 271, sous c), TFUE.

72.

En effet, dans les faits, le recours ne vise pas indirectement la délibération litigieuse car il n’est pas question de statuer sur le point de savoir si cette délibération était légale ou bien fondée. Le recours porte au contraire sur la qualification juridique de la délibération litigieuse par la Banque et donc sur la constatation qu’il ne s’agit pas d’un acte administratif au titre du droit de l’environnement au sens du règlement d’Aarhus.

73.

Le fait qu’il n’y a pas là de contestation indirecte de la délibération litigieuse ressort déjà de la circonstance que l’existence de ladite délibération ne sera pas affectée par l’issue du présent recours et n’est même pas indirectement mise en doute dans la présente procédure. S’il était fait droit au présent recours, cela pourrait uniquement conduire à ce que la Banque soit tenue de procéder à un réexamen interne de la délibération litigieuse. Cela ne préjuge pas de la question de savoir si le résultat de ce réexamen peut être attaqué devant les tribunaux.

74.

Soustraire le présent recours au champ d’application de l’article 271, sous c), TFUE correspond au demeurant au droit fondamental à la protection juridictionnelle effective au titre de l’article 47, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). En effet, le droit à un réexamen interne en vertu de l’article 10 du règlement d’Aarhus est un droit garanti par le droit de l’Union de sorte que le présent recours relève du champ de protection de ce droit fondamental. L’article 47 de la Charte ne peut certes pas fonder de compétence de la Cour lorsque les traités l’excluent ( 21 ). Une restriction de cette protection juridique, comme celle contenue à l’article 271, sous c), TFUE, doit toutefois, du fait de l’article 47 de la Charte, être interprétée étroitement ( 22 ).

75.

Un tel réexamen interne est en outre compatible avec la fonction et le rôle de la Banque.

76.

ClientEarth oppose à juste titre à la Banque que cette dernière ne démontre pas à suffisance son allégation selon laquelle le risque d’un réexamen et les retards qui y sont liés entraveraient de manière inappropriée son activité de financement, voire les rendraient même impossible. Le déroulement de la procédure entre le moment de la délibération litigieuse et celui de l’accord de financement ( 23 ) démontre au contraire qu’en cas de publication rapide de la délibération, la Banque aurait disposé d’environ deux mois pour le réexamen interne.

77.

Cette assertion est également contredite par la pratique de la Banque car, dans les faits, il lui arrive déjà de réexaminer ses financements sur la base de plaintes – également en ce qui concerne les aspects tenant au droit de l’environnement. C’est ce qu’elle a déclaré au médiateur européen en 2008 ( 24 ). Même les objections relatives à l’environnement vis-à-vis du financement litigieux faisaient déjà l’objet d’un tel réexamen ( 25 ). L’application de cette procédure peut d’ailleurs être contrôlée par le médiateur ( 26 ). Le comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus (Aarhus Convention Compliance Committee, ci-après le « comité d’examen d’Aarhus ») ( 27 ) peut lui aussi examiner l’activité de financement de la BEI ( 28 ).

78.

Contrairement à ce qu’estime la Banque, le réexamen interne a, même en l’absence de contrôle juridictionnel ultérieur, une valeur propre. D’après le considérant 19 du règlement d’Aarhus, les institutions et organes devraient en effet avoir l’opportunité de réexaminer leur décision initiale. Dans le considérant 20 du règlement d’Aarhus, le droit des organisations de protection de l’environnement à un réexamen interne est par ailleurs reconnu.

79.

Le droit à un réexamen interne est en outre une forme spéciale du principe de participation du public, à la base de la convention d’Aarhus ( 29 ) et du droit de l’environnement de l’Union. Cette procédure permet en effet à certaines parties du public, à savoir les organisations de protection de l’environnement, de faire valoir, en motivant leur demande, des objections à la mesure en cause et de participer ainsi à son amélioration. Un réexamen interne peut ainsi même être avantageux pour la Banque, car les problèmes affectant les financements et tenant au droit de l’environnement toucheront en effet régulièrement aussi aux aspects économiques d’un projet.

80.

Il y a par ailleurs lieu de partir du principe que la conscience d’un risque d’un réexamen ultérieur contribuera à faire en sorte que les aspects tenant au droit de l’environnement du projet en cause seront examinés avec encore plus de minutie avant que la décision de financement ne soit prise. Un tel examen préalable plus approfondi peut lui-même réduire le risque d’être surpris par des objections liées à une demande de réexamen et simplifier un traitement rapide des demandes de réexamen.

81.

Enfin, cette interprétation de l’article 271, sous c), TFUE rapproche au moins le contrôle de la Banque des exigences de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. Il semble certes douteux que le réexamen interne des financements atteigne le niveau de protection juridique effective exigé à l’article 9, paragraphe 4, dans le champ d’application de la convention et puisse ainsi être reconnu comme une procédure administrative pour contester les actes au sens de l’article 9, paragraphe 3 ( 30 ). Un réexamen interne vaut toutefois toujours mieux qu’une absence totale de contrôle.

82.

L’article 271, sous c), TFUE ne fait ainsi pas obstacle à la mise en œuvre par les juridictions de l’Union d’un éventuel droit, au titre de l’article 10 du règlement d’Aarhus, à un réexamen interne de délibérations du conseil d’administration de la BEI.

83.

Dans cette mesure, le présent recours est donc recevable et le Tribunal a admis à juste titre sa propre compétence. Il y a par conséquent lieu de décider si la BEI a rejeté, à bon droit ou non, la demande de réexamen comme étant irrecevable.

B.   Sur les moyens de pourvoi

84.

Les moyens de pourvoi de la Banque et de la Commission concernent non seulement la capacité des délibérations du conseil d’administration de la BEI à être contrôlées, mais également la question de savoir si la délibération litigieuse est un acte administratif au titre du droit de l’environnement au sens de l’article 10 du règlement d’Aarhus. Si l’on devait être en présence d’un acte administratif, la procédure de réexamen interne au titre de l’article 10 serait, d’après les réflexions développées jusqu’à maintenant, applicable, bien que le résultat de ce réexamen, du fait de l’article 271, sous c), TFUE, ne puisse pas être contesté devant les tribunaux conformément à l’article 12 du règlement d’Aarhus.

85.

Il convient d’entendre par acte administratif, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus, toute mesure de portée individuelle au titre du droit de l’environnement (voir sous 2), arrêtée par une institution ou un organe de l’Union (voir sous 1) et ayant un effet juridiquement contraignant et extérieur (voir sous 3).

1. Action administrative de la BEI ?

86.

La Banque et la Commission contestent tout d’abord que la délibération litigieuse soit un acte administratif, car la BEI aurait agi en tant que Banque et non en tant qu’autorité publique.

87.

Pour autant que cette argumentation vise de nouveau à soutenir que le rôle et la fonction spécifiques de la BEI s’opposent à un contrôle par les juridictions de l’Union, il y a lieu de renvoyer aux développements sur la compétence desdites juridictions de l’Union.

88.

Cette argumentation est en outre surprenante car, d’après l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, devraient pouvoir être contestés non seulement les actes et les omissions des autorités allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement, mais également les actes et les omissions des particuliers.

89.

Vue à la lumière du considérant 18 du règlement d’Aarhus, l’argumentation de la Banque et de la Commission semble cependant quelque plus plausible : d’après cette disposition, ce règlement n’est supposé couvrir, dans le contexte de la mise en œuvre de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, que les actes et les omissions des autorités publiques.

90.

Cette idée se retrouve également dans la définition des services dont les actes peuvent faire l’objet d’un réexamen interne. D’après l’article 10, paragraphe 1, et l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus, il s’agit des institutions et des organes de l’Union, ce qui recouvrerait sans le moindre doute possible aussi la BEI ( 31 ). L’article 2, paragraphe 1, sous c), du règlement d’Aarhus définit cependant ces services comme étant toute institution, tout organe, toute agence ou tout office publics créés en vertu ou sur la base du traité. La qualification des services couverts comme étant « publics » a été reprise par le législateur dans le considérant 7 du règlement d’Aarhus. D’après cette disposition, la notion d’« autorité publique » est définie de manière large, l’idée de base étant que les particuliers et leurs organisations devraient toujours jouir de droits particuliers lorsque l’autorité publique (« öffentliche Autorität », « public authority ») est exercée.

91.

La Banque et la Commission partent en ce sens, à juste titre, du principe que la BEI, dans le cadre d’un financement organisé contractuellement, n’exerce pas d’autorité publique au sens de pouvoirs de contrainte étatiques.

92.

La BEI a cependant – comme dans d’autres contextes ( 32 ) – une double nature : elle agit certes comme une partie privée, mais elle remplit à cette occasion des missions publiques. En effet, d’après l’article 309 TFUE, elle est supposée contribuer au développement équilibré et sans heurt du marché intérieur dans l’intérêt de l’Union. Il faut voir là aussi l’exercice de l’autorité publique.

93.

Étant donné que la BEI assume, ce faisant, par son activité de financement, des missions publiques et exerce une autorité publique, elle est une institution publique au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous c), du règlement d’Aarhus.

94.

Cette interprétation de l’article 2, paragraphe 1, sous c), du règlement d’Aarhus assure que ce règlement met en œuvre correctement l’article 2, point 2, sous c), de la convention d’Aarhus, car ClientEarth souligne à juste titre que, d’après cette disposition, les institutions des organisations d’intégration régionale qui – comme l’Union – sont des parties contractantes de la convention doivent être considérées comme des autorités publiques.

95.

La Banque n’a ainsi pas contesté vis-à-vis du Comité de conformité d’Aarhus que la convention lui est applicable ( 33 ), et elle indique, dans une publication relative à sa propre procédure de traitement des plaintes, que son action peut être contestée devant ce comité ( 34 ).

96.

Il faut donc rejeter l’argumentation de la Banque et de la Commission selon laquelle la BEI n’aurait pas agi en tant qu’autorité publique lors de l’adoption de la délibération litigieuse.

2. La mesure au titre du droit de l’environnement

97.

La Banque et la Commission contestent également que la délibération litigieuse soit une mesure au titre du droit de l’environnement.

98.

En vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus, seules les mesures au titre du droit de l’environnement peuvent être des actes administratifs. L’article 10 quant à lui autorise uniquement de demander le réexamen interne d’actes administratifs au titre du droit de l’environnement.

99.

L’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus définit le droit de l’environnement comme toute disposition de l’Union qui, indépendamment de sa base juridique, contribue à la poursuite des objectifs de la politique de l’Union dans le domaine de l’environnement : la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement, la protection de la santé des personnes, l’utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles et la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement.

100.

Le conseil d’administration de la BEI a adopté la délibération litigieuse sur le fondement de l’article 9, paragraphe 1, et de l’article 19, paragraphe 3, des statuts de la BEI qui ne contiennent aucune indication affirmant qu’ils sont supposés contribuer à la réalisation des objectifs de la politique de l’environnement de l’Union.

101.

Le Tribunal a cependant constaté, aux points 122 à 124 de l’arrêt attaqué, que la déclaration de 2009 et la stratégie climat ( 35 ) doivent être assimilées aux dispositions du droit de l’environnement au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus. En effet, la Banque assurerait avec ces critères que son activité de financement contribue aux objectifs de l’Union en matière d’environnement.

102.

Par conséquent, au point 140 de l’arrêt attaqué, le Tribunal résume son appréciation à ce sujet de la délibération litigieuse en ce sens que la constatation qui y est contenue et selon laquelle le projet Curtis satisfaisait à certains critères d’éligibilité de nature environnementale de la BEI devait être considérée comme une mesure au titre du droit de l’environnement.

103.

La Banque et la Commission y opposent que ces critères, déjà par leur forme, ne sont pas des dispositions juridiques au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus (voir sous b) ; ces critères ne seraient du moins pas juridiquement contraignants (voir sous c).

104.

Il n’est cependant, selon nous, pas nécessaire de trancher ces questions difficiles dans le cadre de la présente affaire car la notion de « mesure au titre du droit de l’environnement » doit être interprétée à l’aune des objectifs de politique environnementale du droit de l’Union et de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus en ce sens qu’elle recouvre toute mesure qui porte éventuellement atteinte au droit de l’environnement (voir sous a).

a) La violation du droit de l’environnement

105.

D’après sa signification, la notion de « mesure au titre du droit de l’environnement » ne semble couvrir que les actes qui ont été fondés sur des bases relevant du droit de l’environnement ou qui les mettent en œuvre. Interprétée ainsi, elle laisse entendre qu’il existe des mesures relevant d’autres domaines du droit qui ne sont pas des mesures au titre du droit de l’environnement. Le facteur décisif serait ainsi en fait le point de savoir si les critères de décision sur lesquels la délibération repose sont de nature environnementale.

106.

Cette interprétation conduirait cependant au résultat paradoxal que des mesures ayant un objectif relevant du droit de l’environnement seraient soumises à un contrôle plus strict en ce qui concerne le respect du droit de l’environnement que des mesures ne poursuivant pas un tel objectif. Il est à cet égard à craindre que ces dernières mesures puissent porter plus sévèrement atteinte à l’environnement que les premières étant donné qu’il sera vraisemblablement accordé plus d’attention à l’environnement en cas d’objectif relevant du droit de l’environnement, qu’en l’absence d’un tel objectif.

107.

À tout le moins, les actes de l’Union qui peuvent porter atteinte à l’environnement doivent par conséquent être également considérés comme des mesures au titre du droit de l’environnement au sens de la définition en vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus et donc comme des mesures qui, indépendamment de leur base juridique, contribuent à la poursuite des objectifs de la politique environnementale de l’Union.

108.

Lorsque l’on interprète la notion de « mesures au titre du droit de l’environnement » ainsi, la procédure de réexamen du règlement d’Aarhus se rapproche de son objectif de mettre en œuvre l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. Comme le reconnaît aussi le considérant 18 du règlement d’Aarhus, cette disposition n’exige pas seulement le contrôle des mesures qui contribuent à la réalisation d’objectifs environnementaux, mais au contraire exige aussi la possibilité de contrôler les actes qui peuvent porter atteinte au droit de l’environnement ( 36 ).

109.

Par ailleurs, d’après le considérant 9 du règlement no 2021/1767 ( 37 ), le législateur a clarifié, à l’article 1er, paragraphe 1, de ce règlement, que la notion de « mesure au titre du droit de l’environnement » doit être comprise ainsi – il ne l’a cependant fait qu’après que l’arrêt attaqué a été rendu.

110.

Cette interprétation correspond en outre à l’importance que le droit primaire accorde à la protection de l’environnement. L’article 191, paragraphe 2, TFUE oblige certes l’Union à respecter un niveau élevé de protection dans l’exercice des compétences au titre du droit de l’environnement, mais, en vertu de l’article 11 TFUE, les exigences de la protection de l’environnement doivent en outre être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques de l’Union. L’article 37 de la Charte, que l’Union doit toujours respecter, exige quant à lui d’intégrer un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité de l’environnement dans la politique de l’Union. Il appartient ainsi à l’ensemble des institutions et organes de respecter le droit de l’environnement, indépendamment du point de savoir si des compétences relevant du droit de l’environnement sont exercées ou non.

111.

La Banque affirme certes à juste titre que le droit de l’environnement de l’Union, en général, ne crée pas d’obligations que les banques devraient respecter lors du financement de projets. Ces obligations reposent en fait en règle générale sur les opérateurs des projets.

112.

La BEI est néanmoins soumise, en tant qu’institution de l’Union en ce qui concerne le respect du droit de l’Union, à des obligations plus étendues que les autres banques ( 38 ). Il serait incompatible avec sa mission de contribuer aux objectifs de l’Union ( 39 ), que son activité de financement puisse saper les objectifs de l’Union, par exemple en finançant des projets violant le droit de l’environnement de l’Union. Il est inutile de statuer dans la présente affaire sur la question de savoir si la Banque jouit en ce sens d’une marge d’appréciation ou si elle ne doit refuser un financement qu’en cas de violations manifestes. La délibération litigieuse est en effet déjà une mesure au titre du droit de l’environnement dès lors qu’il est possible que le droit de l’environnement de l’Union soit violé.

113.

L’objection de la Banque selon laquelle l’organisation non gouvernementale en cause devrait directement contester le projet critiqué, par exemple par un recours contre l’autorisation du projet, ne saurait cependant convaincre. En dépit d’une jurisprudence pertinente de la Cour ( 40 ), il n’est en effet pas garanti qu’un tel recours soit même possible et efficace devant les juridictions nationales compétentes.

114.

La présente procédure ne porte pas sur le point de savoir dans quelle mesure les objections concrètement invoquées par ClientEarth concernent le respect du droit de l’environnement de l’Union ou d’autres aspects étant donné que la lettre attaquée ne contient pas d’indications à ce sujet. Il n’est par conséquent pas non plus nécessaire de juger si de tels autres aspects sont l’objet de « dispositions » au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus.

115.

Il serait par conséquent selon nous utile que la Cour substitue les considérations qui précédent aux réflexions du Tribunal sur la question de savoir si les critères de décision de la déclaration de 2009 et de la stratégie climat doivent être considérés comme étant du droit de l’environnement.

116.

Ce n’est que dans l’hypothèse où la Cour devrait ne pas suivre cette approche que nous nous pencherons ci-après sur les objections de la Banque et de la Commission aux réflexions susmentionnées du Tribunal.

b) Le droit de l’environnement uniquement sous la forme d’une loi

117.

La Commission et la Banque défendent le point de vue selon lequel seuls les actes législatifs au sens de l’article 289, paragraphe 3, TFUE, c’est-à-dire les actes juridiques adoptés par procédure législative, pourraient être considérés comme étant du droit de l’environnement.

118.

L’opinion de la Banque et de la Commission semble, au vu de certaines versions linguistiques du règlement d’Aarhus, pouvoir être défendue, car la version en langue anglaise de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus recourt, pour la notion en langue allemande de « Rechtsvorschriften », à la notion de « legislation » et il est aussi question dans la version en langue française de « disposition législative ». La notion de « Rechtsvorschriften » employée dans la version en langue allemande n’est cependant pas limitée aux lois au sens formel. Elle recouvre au contraire toutes les règles juridiquement contraignantes et elle peut donc aussi inclure les critères de la Banque qui n’ont pas été adoptés en tant que lois formelles.

119.

Compte tenu de ces différences entre les versions en langues allemande, anglaise et française de l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus, il y a lieu de rappeler que les différentes versions linguistiques des dispositions du droit de l’Union doivent être interprétées de façon uniforme ( 41 ), aucune version linguistique ne pouvant jouir de primauté sur les autres ( 42 ). En cas de disparité entre les diverses versions linguistiques d’un texte du droit de l’Union, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation ( 43 ).

120.

La procédure de réexamen interne vise – comme précédemment indiqué ( 44 ) – à la mise en œuvre de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. Cette convention est, d’après l’article 22 dans les versions en langues anglaise, française et russe, contraignante. Dans les deux langues officielles de l’Union précitées, il est question – à la différence de ce qui est le cas dans le règlement d’Aarhus – non pas de lois formelles, mais seulement de dispositions juridiques, ( 45 ) tandis que la version en langue russe semble plutôt parler de dispositions législatives formelles ( 46 ).

121.

Le point décisif est cependant que l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, dans le contexte général de la convention, est supposé contribuer à protéger efficacement l’environnement. Il est sans importance aux fins de cet objectif de savoir si les exigences au titre du droit de l’environnement sont posées dans des lois formelles ou dans d’autres dispositions juridiques. En conséquence, les versions en langues anglaise et française du considérant 18 du règlement d’Aarhus parlent d’une manière générale du droit de l’environnement ( 47 ).

122.

Ce qui importe est donc de savoir non pas sous quelle forme ont été fixés les critères écologiques appliqués par le conseil d’administration de la Banque dans la délibération litigieuse, mais leur caractère juridiquement contraignant.

c) Le caractère contraignant des critères d’éligibilité

123.

La Banque et la Commission contestent en outre le caractère contraignant des critères d’éligibilité.

124.

Aux points 124 et 140 de l’arrêt attaqué, le Tribunal place les critères appliqués par la BEI sur le même plan que les dispositions du droit de l’environnement de l’Union au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus, car ils constitueraient le cadre de l’activité de la BEI dans le domaine de l’octroi de prêts aux fins de la réalisation des objectifs environnementaux de l’Union.

125.

Les principes et normes en matière sociale et environnementale de la BEI posés dans la déclaration de 2009 contiennent des objectifs de grande envergure. La BEI « exige que tous les projets qu’elle finance soient recevables sur le plan environnemental et social » ( 48 ). En outre, la « BEI refuse de financer les projets qui ne respectent pas les obligations environnementales et sociales décrites dans la Déclaration. Sont notamment visés les projets qui enfreignent les dispositions pertinentes de la législation environnementale et sociale nationale et européenne en vigueur. » ( 49 )

126.

La BEI désigne certes la déclaration de 2009 non comme un acte juridique mais comme une « déclaration », ( 50 ) mais, compte tenu de la formulation contraignante des critères indiqués, elle a restreint son pouvoir d’appréciation lors du financement par son propre engagement. Cet engagement doit pouvoir lui être opposé sur le fondement des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime, du moins jusqu’à ce qu’elle modifie ou abandonne explicitement ces critères ( 51 ).

127.

Par voie de conséquence, les critères d’éligibilité qui contiennent des obligations suffisamment claires sont du moins contraignants et constituent donc vis-à-vis de la Banque des dispositions juridiques au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous f), du règlement d’Aarhus.

128.

L’argumentation de la Banque et de la Commission selon laquelle les critères d’éligibilité ne seraient pas contraignants est ainsi non fondée et doit par conséquent être rejetée.

3. Le caractère juridiquement contraignant et l’effet extérieur de la délibération litigieuse

129.

La Banque et la Commission contestent enfin que la délibération litigieuse soit juridiquement contraignante et ait des effets extérieurs.

130.

La Tribunal a constaté à ce sujet, au point 170 de l’arrêt attaqué, que la délibération litigieuse ne contient certes, en ce qui concerne l’octroi d’un prêt, pas d’obligation juridique étant donné que d’autres aspects techniques, économiques et financiers du projet devaient encore être examinés. Elle déploierait cependant certains effets juridiques extérieurs définitifs vis-à-vis des tiers et en particulier vis-à-vis du promoteur du projet puisqu’elle constatait l’éligibilité du projet à un financement par la BEI eu égard à ses aspects écologiques et sociaux. Elle permettait ainsi au promoteur du projet d’entreprendre les étapes suivantes nécessaires à la formalisation du prêt.

131.

Le caractère juridiquement contraignant et l’effet extérieur font partie de la définition de l’acte administratif d’après l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus. Le législateur s’oriente, avec ces deux éléments, à la distinction entre mesures définitives et mesures préparatoires dans l’application de l’article 263 TFUE. Ainsi, constituent en principe des actes attaquables les mesures qui fixent définitivement la position d’une institution au terme d’une procédure administrative et qui visent à produire des effets de droit obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer la décision finale, et qui n’ont pas de tels effets ( 52 ).

132.

Étant donné que la délibération litigieuse ne faisait que préparer l’accord de financement et ne créait encore aucun droit à l’octroi du financement, la Banque et la Commission partent du principe qu’il en allait d’une mesure intermédiaire qui ne peut pas être attaquée.

133.

Cette approche quant à la délibération litigieuse est cependant trop superficielle.

134.

Le motif de la distinction entre les décisions définitives et les mesures intermédiaires repose en effet sur la circonstance qu’un recours en annulation contre des actes exprimant une opinion provisoire pourrait obliger le juge de l’Union à porter une appréciation sur des questions sur lesquelles l’institution concernée n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer. De tels recours auraient pour conséquence une anticipation des débats au fond et une confusion des différentes phases des procédures administrative et judiciaire. Admettre un tel recours serait donc incompatible avec les systèmes de répartition des compétences entre l’administration et le juge de l’Union et des voies de recours, prévus par le traité, ainsi qu’avec les exigences d’une bonne administration de la justice et d’un déroulement régulier de la procédure administrative ( 53 ).

135.

Ce risque de confusion des différentes phases n’existe toutefois pas en cas de contestation de la délibération litigieuse. La délibération litigieuse exprimait en effet l’opinion définitive du conseil d’administration. Elle était donc contraignante au sein de la Banque en ce sens qu’elle aurait lié ses services lors des décisions ultérieures en ce qui concerne le financement. Une dérogation aurait supposé que le conseil d’administration reprenne la procédure et adopte une autre décision.

136.

En outre, la délibération litigieuse était, contrairement à ce qui pourrait sembler au premier abord, du moins susceptible de porter atteinte aux intérêts du promoteur du projet. Elle contraignait en effet le promoteur, en ce qui concerne les aspects écologiques et sociaux du projet, à suivre certaines modalités de conduite du projet et restreignait ainsi sa liberté organisationnelle.

137.

On ne saurait enfin non plus opposer au caractère attaquable de la délibération litigieuse la circonstance que l’on pourrait à titre alternatif attaquer l’accord de financement. Il est certes vrai que, dans certains cas, un recours contre la décision clôturant la procédure offre une protection juridictionnelle suffisante ( 54 ). Il n’est toutefois pas clair si la procédure de réexamen interne au titre de l’article 10 du règlement d’Aarhus permettrait à la Banque de remettre en cause son accord de financement avec le promoteur du projet, et donc un contrat. Il est par conséquent plus utile de procéder au réexamen avant la conclusion de cet accord.

138.

Il y a lieu de noter, pour être complet, que l’article 271, sous c), TFUE ne joue, contrairement à ce qu’estiment la Banque et la Commission, aucun rôle pour la question du caractère juridiquement contraignant et de l’effet extérieur de la délibération litigieuse. Comme l’indique à juste titre ClientEarth, ces questions doivent en effet être distinguées de celle de savoir à quel point une mesure peut être contrôlée par les tribunaux.

139.

Le Tribunal a ainsi constaté à juste titre que la délibération litigieuse est une mesure juridiquement contraignante ayant des effets extérieurs au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus. Les objections à ce sujet de la Banque et de la Commission doivent donc être rejetées.

4. Conclusion

140.

Il y a lieu de retenir, en résumé, que le moyen de pourvoi de la Banque et de la Commission est infondé et doit donc être rejeté.

VI. Les dépens

141.

Lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens (article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure).

142.

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

143.

ClientEarth ayant conclu à la condamnation des requérantes au pourvoi aux dépens et celles-ci ayant succombé en leur moyen, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par ClientEarth du fait des pourvois.

VII. Conclusion

144.

Nous suggérons par conséquent à la Cour de statuer comme suit :

1)

Les pourvois sont rejetés.

2)

La Banque européenne d’investissement et la Commission européenne supportent, outre leurs propres dépens, les dépens exposés par ClientEarth du fait du pourvoi.


( 1 ) Langue de l’original : l’allemand.

( 2 ) Décision du Conseil du 17 février 2005 relative à la conclusion, au nom de la Communauté européenne, de la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement – Convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO 2005, L 124, p. 1) (ci-après la « convention d’Aarhus »).

( 3 ) Règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO 2006, L 264, p. 13, ci-après le « règlement d’Aarhus »).

( 4 ) Arrêts du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e. a. (C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 61), et du 24 janvier 2013, Frucona Košice/Commission (C‑73/11 P, EU:C:2013:32, point 88).

( 5 ) Arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink‘s France (C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67), et du 10 décembre 2013, Commission/Irlande e.a. (C‑272/12 P, EU:C:2013:812, point 28).

( 6 ) Voir arrêts du 11 juillet 1990, Neotype Techmashexport/Commission et Conseil (C‑305/86 et C‑160/87, EU:C:1990:295, point 18) ; du 2 mai 2006, Regione Siciliana/Commission (C‑417/04 P, EU:C:2006:282, point 36) ; du 29 novembre 2007, Stadtwerke Schwäbisch Hall e. a./Commission (C‑176/06 P, non publié, EU:C:2007:730, point 18), et du 5 décembre 2019, Commission/Espagne (Plans de gestion des déchets) (C‑642/18, EU:C:2019:1051, point 19).

( 7 ) Suivant l’arrêt du Tribunal du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI (T‑461/08, EU:T:2011:494, points 35 et suiv.).

( 8 ) Arrêts du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e. a./Commission (C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 54), et du 12 juillet 2022, Nord Stream 2/Parlement et Conseil (C‑348/20 P, EU:C:2022:548, point 62).

( 9 ) Arrêts du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e. a./Commission (C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 54), et du 26 janvier 2010, Internationaler Hilfsfonds/Commission (C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 51).

( 10 ) Arrêts du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, point 47), et du 12 juillet 2022, Nord Stream 2/Parlement et Conseil (C‑348/20 P, EU:C:2022:548, point 63).

( 11 ) Arrêts du 12 septembre 2019, TestBioTech e. a./Commission (C‑82/17 P, EU:C:2019:719, points 37 et 38), ainsi que du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission (C‑784/18 P, non publié, EU:C:2020:630, points 63 et 64). L’arrêt du 6 octobre 2021, ClientEarth/Commission (C‑458/19 P, EU:C:2021:802), le présuppose également.

( 12 ) Notes 13 et 14 aux considérants 14 et 15 du règlement (UE) 2021/1767 du Parlement européen et du Conseil, du 6 octobre 2021, modifiant le règlement no 1367/2006 (JO 2021, L 356, p. 1).

( 13 ) Si l’article 271, sous c), TFUE était applicable au présent litige, il n’y aurait en outre dès le départ pas de compétence du Tribunal en vertu de l’article 256, paragraphe 1, TFUE ; voir arrêt du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI (T‑461/08, EU:T:2011:494, point 39).

( 14 ) Arrêts du 12 septembre 2019, TestBioTech e. a./Commission (C‑82/17 P, EU:C:2019:719, point 37), et du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission (C‑784/18 P, non publié, EU:C:2020:630, point 63).

( 15 ) Arrêts du 12 septembre 2019, TestBioTech e. a./Commission (C‑82/17 P, EU:C:2019:719, point 38), et du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission (C‑784/18 P, non publié, EU:C:2020:630, point 64).

( 16 ) Si l’article 271, sous c), TFUE était applicable au présent litige, il n’y aurait déjà pas de compétence du Tribunal en vertu de l’article 256, paragraphe 1, TFUE ; voir arrêt du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI (T‑461/08, EU:T:2011:494, point 39).

( 17 ) Voir également arrêts du 3 mars 1988, Commission/BEI (Impôt communautaire) (85/86, EU:C:1988:110, point 28), et du 10 juillet 2003, Commission/BEI (OLAF) (C‑15/00, EU:C:2003:396, point 101).

( 18 ) Voir, en particulier, considérants 3 et 18 ainsi que article 1er, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus et arrêt du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission (C‑784/18 P, non publié, EU:C:2020:630, point 88).

( 19 ) Voir arrêts du 24 novembre 1992, Poulsen et Diva Navigation (C‑286/90, EU:C:1992:453, point 9) ; du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 291) ; du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e. a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 123) ; du 11 juillet 2018, Bosphorus Queen Shipping (C‑15/17, EU:C:2018:557, point 44), et du 3 septembre 2020, Mellifera/Commission (C‑784/18 P, non publié, EU:C:2020:630, point 77), ainsi que spécifiquement en ce qui concerne la convention d’Aarhus, arrêts du 8 mars 2011, Lesoochranárske zoskupenie (C‑240/09, EU:C:2011:125, point 50) ; du 12 mai 2011, Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland, Landesverband Nordrhein-Westfalen (C‑115/09, EU:C:2011:289, point 41), et du 15 janvier 2013, Križan e. a. (C‑416/10, EU:C:2013:8, point 77).

( 20 ) Arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 282).

( 21 ) Arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e. a./Parlement et Conseil (C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 97).

( 22 ) Voir, en ce sens, arrêt du 28 mars 2017, Rosneft (C‑72/15, EU:C:2017:236, point 74). Voir aussi arrêt du 20 décembre 2017, Protect Natur-, Arten- und Landschaftsschutz Umweltorganisation (C‑664/15, EU:C:2017:987, point 45).

( 23 ) Voir points 21 à 25 des présentes conclusions.

( 24 ) Protocole d’accord entre le médiateur européen et la Banque européenne d’investissement du 9 juillet 2008 relatif à l’information sur les politiques, les normes et les procédures de la Banque, et au traitement des plaintes, notamment des plaintes introduites par les non‑ressortissants et les non‑résidents de l’Union européenne (https://www.ombudsman.europa.eu/en/document/fr/3809).

( 25 ) Rapport du 6 septembre 2021, Curtis biomass power generation plant (Plainte no SG/E/2019/04).

( 26 ) Voir, par exemple, décision du médiateur européen du 18 février 2013 dans l’affaire 48/2012/MHZ – Allégation de traitement incorrect d’une plainte à la BEI et décision du 27 avril 2022 sur la manière dont la Banque européenne d’investissement (BEI) a tenu compte de l’impact environnemental du gazoduc transadriatique et du gazoduc transanatolien avant de financer ces projets (affaire 2030/2020/NH).

( 27 ) Voir, à ce sujet, nos conclusions dans l’affaire Edwards (C‑260/11, EU:C:2012:645, point 8) ainsi que les conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Gemeinde Altrip e. a. (C‑72/12, EU:C:2013:422, point 101) ; de l’avocat général Jääskinen dans les affaires jointes Conseil e.a./Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht (C‑401/12 P bis C‑403/12 P, EU:C:2014:310, point 114) et dans les affaires jointes Conseil et Commission/Stichting Natuur en Milieu et Pesticide Action Network Europe (C‑404/12 P et C‑405/12 P, EU:C:2014:309, point 23), ainsi que de l’avocat général Bobek dans l’affaire Folk (C‑529/15, EU:C:2017:1, point 86) et dans l’affaire Stichting Varkens in Nood e. a. (C‑826/18, EU:C:2020:514, point 77).

( 28 ) BEI, Politique de traitement des plaintes du Groupe BEI (2018, p. 5) ; voir, par exemple, Conclusions et recommandations du Comité de conformité du 3 avril 2009, Civic Alliance for the Protection of the Bay of Vlora (Albania)/Communauté européenne (ACCC/C/2007/21, ECE/MP.PP/C.1/2009/2/Add.1, point 26).

( 29 ) Voir, en particulier, considérants 8 et 9 du préambule ainsi que articles 6 à 8 de la convention d’Aarhus.

( 30 ) Voir Conclusions et recommandations du Comité de conformité du 29 avril 2008, Wium‑Andersen/Danemark (ACCC/C/2006/18, ECE/MP.PP/2008/5/Add.4, points 28 et 33).

( 31 ) Arrêts du 3 mars 1988, Commission/BEI (Impôt communautaire) (85/86, EU:C:1988:110, point 24), et du 10 juillet 2003, Commission/BEI (OLAF) (C‑15/00, EU:C:2003:396, point 75).

( 32 ) Arrêts du 3 mars 1988, Commission/BEI (Impôt communautaire) (85/86, EU:C:1988:110, points 29 et 30), ainsi que du 10 juillet 2003, Commission/BEI (OLAF) (C‑15/00, EU:C:2003:396, point 102).

( 33 ) Conclusions et recommandations du Comité de conformité du 3 avril 2009, Civic Alliance for the Protection of the Bay of Vlora (Albania)/Communauté européenne (ACCC/C/2007/21, ECE/MP.PP/C.1/2009/2/Add.1, point 26).

( 34 ) BEI, Politique de traitement des plaintes du Groupe BEI (2018, p. 1).

( 35 ) Voir point 19 des présentes conclusions.

( 36 ) Voir, en ce sens, arrêts du 20 décembre 2017, Protect Natur-, Arten- und Landschaftsschutz Umweltorganisation (C‑664/15, EU:C:2017:987, point 47), et du 8 novembre 2022, Deutsche Umwelthilfe (Réception des véhicules à moteur) (C‑873/19, EU:C:2022:857, point 68).

( 37 ) Cité à la note 12 des présentes conclusions.

( 38 ) Voir points 92 et 93 des présentes conclusions.

( 39 ) Arrêts du 3 mars 1988, Commission/BEI (Impôt communautaire) (85/86, EU:C:1988:110, points 29 et 30), et du 10 juillet 2003, Commission/BEI (OLAF) (C‑15/00, EU:C:2003:396, point 102).

( 40 ) Voir, en particulier, arrêt du 20 décembre 2017, Protect Natur-, Arten- und Landschaftsschutz Umweltorganisation (C‑664/15, EU:C:2017:987).

( 41 ) Arrêts du 27 octobre 1977, Bouchereau (30/77, EU:C:1977:172, points 13 et 14) ; du 27 mars 1990, Cricket St Thomas (C‑372/88, EU:C:1990:140, point 19), et du 6 octobre 2021, Consorzio Italian Management et Catania Multiservizi (C‑561/19, EU:C:2021:799, point 43).

( 42 ) Arrêts du 27 mars 1990, Cricket St Thomas (C‑372/88, EU:C:1990:140, point 18), et du 26 janvier 2021, Hessischer Rundfunk (C‑422/19 et C‑423/19, EU:C:2021:63, point 65).

( 43 ) Arrêts du 1er mars 2016, Kreis Warendorf et Osso (C‑443/14 et C‑444/14, EU:C:2016:127, point 27), et du 24 février 2022, Tiketa (C‑536/20, EU:C:2022:112, point 27).

( 44 ) Voir point 69 des présentes conclusions.

( 45 ) En anglais : « provisions of its national law », en français : « dispositions du droit national ».

( 46 ) « положения национального законодательства ».

( 47 ) En anglais : « law relating to the environment », en français : « droit de l’environnement ».

( 48 ) Point 1 du préambule.

( 49 ) Point 6 du préambule.

( 50 ) Point 6 du préambule.

( 51 ) Voir arrêts du 26 juin 1975, Commission/Conseil (70/74, EU:C:1975:93, point 20/23) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e. a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 211), et du 16 février 2017, H&R ChemPharm/Commission (C‑95/15 P, non publié, EU:C:2017:125, point 57).

( 52 ) Voir arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 10) ; du 22 juin 2000, Pays-Bas/Commission (C‑147/96, EU:C:2000:335, points 26 et 27), et du 6 mai 2021, ABLV Bank e. a./BCE (C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369, point 39).

( 53 ) Arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 20) ; du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission (C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 51), et du 15 mars 2017, Stichting Woonlinie e. a./Commission (C‑414/15 P, EU:C:2017:215, point 45), ainsi que Stichting Woonpunt e. a./Commission (C‑415/15 P, EU:C:2017:216, point 45).

( 54 ) Arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 12) ; du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission (C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 53), et du 15 mars 2017, Stichting Woonlinie e. a./Commission (C‑414/15 P, EU:C:2017:215, point 46) et Stichting Woonpunt e. a./Commission (C‑415/15 P, EU:C:2017:216, point 46).

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