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Document 62014CJ0167

Sentencia del Tribunal de Justicia (Sala Cuarta) de 15 de octubre de 2015.
Comisión Europea contra República Helénica.
Incumplimiento de Estado — Directiva 91/271/CEE — Tratamiento de las aguas residuales urbanas — Sentencia del Tribunal de Justicia por la que se declara el incumplimiento — No ejecución — Artículo 260 TFUE, apartado 2 — Sanciones pecuniarias — Cantidad a tanto alzado y multa coercitiva.
Asunto C-167/14.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:684

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

15 octobre 2015 (*)

«Manquement d’État – Directive 91/271/CEE – Traitement des eaux urbaines résiduaires – Arrêt de la Cour constatant un manquement – Inexécution – Article 260, paragraphe 2, TFUE – Sanctions pécuniaires – Somme forfaitaire et astreinte»

Dans l’affaire C‑167/14,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, introduit le 7 avril 2014,

Commission européenne, représentée par MM. G. Zavvos et E. Manhaeve, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mme E. Skandalou, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de la troisième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, MM. J. Malenovský, M. Safjan, Mmes A. Prechal et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juillet 2015,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour:

–        de constater que, en n’ayant pas pris toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE;

–        de condamner la République hellénique à verser à la Commission une astreinte d’un montant de 47 462,40 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à compter de la date du prononcé du présent arrêt jusqu’au jour où sera exécuté l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642);

–        de condamner la République hellénique à verser à la Commission la somme forfaitaire de 5 191,20 euros par jour, à compter de la date du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), jusqu’à celle du présent arrêt ou jusqu’à celle de la complète exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), si la mise en œuvre de ce dernier intervient plus tôt,

–        de condamner la République hellénique aux dépens.

 Le cadre juridique

2        La directive 91/271/CEE du Conseil, du 21 mai 1991, relative au traitement des eaux urbaines résiduaires (JO L 135, p. 40) concerne, selon son article 1er, la collecte, le traitement et le rejet des eaux urbaines résiduaires ainsi que le traitement et le rejet des eaux usées provenant de certains secteurs industriels. Elle vise à protéger l’environnement contre une détérioration due au rejet des eaux urbaines résiduaires.

3        L’article 2 de cette directive définit les «eaux urbaines résiduaires» comme étant «les eaux ménagères usées ou le mélange des eaux ménagères usées avec des eaux industrielles usées et/ou des eaux de ruissellement». Ce même article définit également l’équivalent habitant (ci-après l’«EH») comme étant «la charge organique biodégradable ayant une demande biochimique d’oxygène en cinq jours (DB05) de 60 grammes d’oxygène par jour».

4        L’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, premier tiret, de ladite directive prévoit que «[l]es États membres veillent à ce que toutes les agglomérations soient équipées de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires [...] au plus tard le 31 décembre 2000 pour celles dont [l’EH] est supérieur à 15 000».

5        L’article 4 de la même directive dispose:

«1.      Les États membres veillent à ce que les eaux urbaines résiduaires qui pénètrent dans les systèmes de collecte soient, avant d’être rejetées, soumises à un traitement secondaire ou à un traitement équivalent selon les modalités suivantes:

–        au plus tard le 31 décembre 2000 pour tous les rejets provenant d’agglomérations ayant un EH de plus de 15 000,

[...]

3.      Les rejets des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires visées aux paragraphes 1 et 2 répondent aux prescriptions de l’annexe I point B. [...]

4.      La charge exprimée en EH est calculée sur la base de la charge moyenne maximale hebdomadaire qui pénètre dans la station d’épuration au cours de l’année, à l’exclusion des situations inhabituelles comme celles qui sont dues à de fortes précipitations.»

6        L’annexe I de la directive 91/271 porte sur les prescriptions relatives aux eaux urbaines résiduaires. Cette annexe I énonce, à son point B, intitulé «Rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires dans les eaux réceptrices»:

«1.      Les stations d’épuration des eaux usées sont conçues ou modifiées de manière que des échantillons représentatifs des eaux usées entrantes et des effluents traités puissent être obtenus avant rejet dans les eaux réceptrices.

2.      Les rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires, traités conformément aux articles 4 et 5 de la présente directive, répondent aux prescriptions figurant au tableau 1.

[...]»

7        L’annexe I de cette directive prévoit, à son point D, intitulé «Méthodes de référence pour le suivi et l’évaluation des résultats»:

«1.      Les États membres veillent à ce que soit appliquée une méthode de surveillance qui corresponde au moins aux exigences décrites ci-dessous.

Des méthodes autres que celles prévues aux points 2, 3 et 4 peuvent être utilisées, à condition qu’il puisse être prouvé qu’elles permettent d’obtenir des résultats équivalents.

[...]

2.      Des échantillons sont prélevés sur une période de 24 heures, proportionnellement au débit ou à intervalles réguliers, en un point bien déterminé à la sortie et, en cas de nécessité, à l’entrée de la station d’épuration, afin de vérifier si les prescriptions de la présente directive en matière de rejets d’eaux usées sont respectées.

[...]

3.      Le nombre minimum d’échantillons à prélever à intervalles réguliers au cours d’une année entière est fixé en fonction de la taille de la station d’épuration:

[...]

–        EH compris entre 10 000 et 49 999: 12 échantillons [...].

[...]

4.      On considère que les eaux usées traitées respectent les valeurs fixées pour les différents paramètres si, pour chaque paramètre considéré individuellement, les échantillons prélevés montrent que les valeurs correspondantes sont respectées, en fonction des dispositions suivantes:

a)      pour les paramètres figurant au tableau 1 et à l’article 2, point 7, le nombre maximal d’échantillons qui peuvent ne pas correspondre aux valeurs en concentration et/ou aux pourcentages de réduction indiqués au tableau 1 et à l’article 2, point 7 est précisé au tableau 3;

[...]»

 L’arrêt Commission/Grèce

8        À la suite de nombreux échanges de lettres avec les autorités grecques au sujet de la transposition de la directive 91/271 dans l’ordre juridique grec, la Commission a, le 9 juillet 2004, adressé à la République hellénique une lettre de mise en demeure dans laquelle elle faisait valoir que 30 agglomérations dont l’EH était supérieur à 15 000 n’étaient équipées ni de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires répondant aux prescriptions de l’article 3 de cette directive ni de systèmes de traitement des mêmes eaux satisfaisant aux prescriptions de l’article 4 de ladite directive.

9        Jugeant les explications des autorités grecques insatisfaisantes pour 24 des agglomérations mentionnées au point précédent du présent arrêt, la Commission a, le 13 juillet 2005, adressé à la République hellénique un avis motivé, en l’invitant à s’y conformer dans un délai de deux mois à compter de sa réception. Les autorités grecques ont répondu à cet avis par lettre du 19 septembre 2005.

10      Considérant que la République hellénique ne satisfaisait toujours pas à ses obligations résultant de la directive 91/271, la Commission a décidé d’introduire un recours en manquement devant la Cour, qui a fait l’objet de l’affaire C‑440/06.

11      Dans son arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), la Cour a jugé que, en ne veillant pas à ce que les agglomérations d’Artemida, de Chrysoupoli, d’Igoumenitsa, d’Héraklion (Crète), de Katerini, de Koropi, de Lefkimmi, de Litochoro (Piérie), de Malia, de Markopoulo, de Mégare, de Nea Kydonia (Crète), de Naupacte, de Nea Makri, de Parikia (Paros), de Poros-Galatas, de Rafina, de Thessalonique (zone touristique), de Tripoli, de Zante, d’Alexandria (Émathie), d’Édessa et de Kalymnos soient équipées, selon le cas, de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires répondant aux prescriptions de l’article 3 de ladite directive, et/ou de systèmes de traitement des eaux urbaines résiduaires satisfaisant aux prescriptions de l’article 4 de la même directive, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu desdits articles.

 La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

12      Par lettre du 9 novembre 2007, la Commission a demandé à la République hellénique des informations sur les mesures prises aux fins de l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642).

13      Par lettres du 22 janvier et du 13 octobre 2008, les autorités grecques ont informé les services de la Commission des mesures qu’elles avaient adoptées.

14      Estimant que, douze agglomérations n’étant pas équipées des systèmes de collecte et de traitement requis aux articles 3 et 4 de la directive 91/271, la République hellénique ne s’était pas pleinement conformée à l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), la Commission a, par sa lettre du 1er décembre 2008, mis en demeure la République hellénique de présenter ses observations dans un délai de deux mois.

15      Les autorités grecques ont répondu à la lettre de la Commission par plusieurs lettres.

16      Estimant qu’il ressortait des réponses desdites autorités que, dans neuf agglomérations, il n’avait pas été remédié au manquement constaté, la Commission a, le 25 février 2011, adressé à la République hellénique une lettre de mise en demeure complémentaire l’invitant à lui présenter ses observations dans un délai de deux mois à compter de la réception de cette lettre.

17      Par plusieurs lettres ainsi qu’à l’occasion de deux réunions à Athènes avec les services de la Commission, les autorités grecques ont informé la Commission de l’évolution de la situation.

18      La Commission, considérant que la mise en conformité avec l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) faisait encore défaut pour six des vingt-trois agglomérations, à savoir les agglomérations de Lefkimmi, de Markopoulo, de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida, a introduit le présent recours.

19      La République hellénique demande à la Cour:

–        de rejeter le recours dans son intégralité,

–        à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de condamnation au paiement d’une astreinte journalière et d’une somme forfaitaire,

–        à titre infiniment subsidiaire, de réduire au minimum, d’une part, le montant de l’astreinte journalière proposé par la Commission compte tenu du degré d’avancement de l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) et, d’autre part, le montant de la somme forfaitaire proposé par la Commission en le fixant à 2 181 000 euros,

–        de condamner la Commission aux dépens.

 Sur le manquement

 Argumentation des parties

20      En ce qui concerne l’agglomération de Lefkimmi, la Commission observe que la République hellénique, bien qu’ayant indiqué que les installations étaient achevées, a reconnu que, à la date du 30 mars 2013, celles-ci n’avaient pas encore été mises en service.

21      Quant à l’agglomération de Markopoulo, la Commission soutient que les exigences visées aux articles 3 et 4 de la directive 91/271 ne sont pas respectées par la République hellénique dès lors que seule la première phase des travaux a été achevée, que les eaux urbaines résiduaires ne sont que partiellement collectées et traitées et qu’aucun échantillon pouvant attester de progrès accomplis ne lui a encore été produit. En effet, les informations fournies par la République hellénique ne constitueraient pas des résultats officiels. Bien plus, elles ne consisteraient qu’en un échantillonnage non conforme à l’exigence, prévue à l’annexe I, point D, 3, de cette directive pour les agglomérations dont l’EH est compris entre 10 000 et 49 999, de prélever des échantillons à intervalles réguliers au cours d’une année entière. La Commission fait valoir que la seconde phase des travaux est la plus délicate et que l’inachèvement des installations a pour conséquence grave que la totalité des eaux urbaines résiduaires de cette agglomération n’est pas encore collectée et, partant, soumise à un traitement secondaire.

22      En outre, la Commission relève qu’il est constant que les agglomérations de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida ne disposent pas de systèmes de collecte ou de traitement des eaux urbaines résiduaires conformes à ladite directive.

23      La République hellénique fait observer, sur un plan général, que la Commission a été informée, systématiquement, dans le cadre d’une coopération loyale et de bonne foi avec ses services, des mesures d’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) et que celle-ci a suivi un cours normal.

24      Cet État membre soutient que l’agglomération de Lefkimmi a construit les infrastructures requises de telle sorte qu’elle est désormais complètement couverte par des réseaux de collecte et dispose d’une station d’épuration des eaux résiduaires qui fonctionne depuis le mois de novembre 2013.

25      La République hellénique ajoute que l’agglomération de Markopoulo dispose d’une station d’épuration des eaux urbaines résiduaires, qui est en service depuis le 23 décembre 2013, et d’un nouveau réseau de collecte de ces eaux. À l’audience, la République hellénique a indiqué que la seconde phase des travaux de construction de ce réseau avait été réalisée et achevée au mois d’avril 2015. Elle a précisé que les résultats de prélèvements d’échantillons récents pouvaient être transmis prochainement.

26      En ce qui concerne l’agglomération de Koropi, les travaux relatifs à la construction d’un réseau de collecte des eaux usées et d’une installation de traitement de celles-ci se poursuivraient. S’agissant de l’agglomération de Nea Makri, le projet de systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires aurait été approuvé. Les travaux de construction devraient débuter prochainement. En revanche, pour les agglomérations de Rafina et d’Artemida, aucun accord n’aurait été trouvé par les autorités locales compétentes sur le lieu de construction d’une station commune d’épuration des eaux urbaines résiduaires.

27      À cet égard, la République hellénique fait valoir que le fait que la procédure n’ait pas encore été achevée tient non pas à des raisons liées à la négligence ou au refus de l’administration de respecter les obligations qui lui incombent, mais à la circonstance que le choix dudit lieu est complexe en ce que, d’une part, il requiert la coopération de plusieurs ministères, administrations décentralisées, régions et municipalités conjointement compétents, et, d’autre part, il s’inscrit dans un contexte marqué par les réticences, parfois très vives, de la population locale à accepter les sites proposés pour le traitement des eaux urbaines résiduaires.

 Appréciation de la Cour

28      Afin de déterminer si la République hellénique a adopté toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), il convient de vérifier si cette dernière a pleinement respecté les articles 3 et 4 de la directive 91/271, plus particulièrement en équipant les agglomérations concernées de systèmes de collecte des eaux urbaines résiduaires répondant aux prescriptions de l’article 3 de cette directive et/ou de systèmes de traitement des mêmes eaux satisfaisant aux prescriptions de l’article 4 de ladite directive.

29      En ce qui concerne la procédure en manquement au titre de l’article 260, paragraphe 2, TFUE, il y a lieu de retenir comme date de référence pour apprécier l’existence d’un tel manquement celle de l’expiration du délai fixé dans la lettre de mise en demeure émise en vertu de cette disposition (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 27).

30      En l’occurrence, la Commission ayant envoyé à la République hellénique une lettre de mise en demeure complémentaire, conformément à la procédure prévue à l’article 260, paragraphe 2, TFUE, la date de référence mentionnée au point précédent du présent arrêt est celle de l’expiration du délai fixé dans cette lettre, à savoir le 25 avril 2011.

31      Or, il est constant que, à cette date, les agglomérations de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida n’étaient pas encore équipées de systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires.

32      S’agissant de l’agglomération de Lefkimmi, il résulte de l’aveu même de la République hellénique que, à la date du 25 avril 2011, les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires n’étaient pas encore en place.

33      Quant à l’agglomération de Markopoulo, il est constant qu’elle ne disposait pas, à la même date, d’une station d’épuration des eaux urbaines résiduaires en service.

34      Ainsi, à l’expiration du délai fixé dans la lettre de mise en demeure complémentaire, les agglomérations de Koropi, de Nea Makri, de Rafina, d’Artemida, de Lefkimmi et de Markopoulo n’étaient pas encore équipées, conformément aux articles 3 et 4 de la directive 91/271, de systèmes de collecte ou de traitement des eaux urbaines résiduaires.

35      S’agissant de l’argumentation de la République hellénique tirée des difficultés auxquelles elle aurait été confrontée pour mettre les équipements des agglomérations en cause en conformité avec ladite directive, il convient de relever que, un État membre ne pouvant exciper de dispositions, de pratiques ou de situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit de l’Union, une telle argumentation ne saurait prospérer (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 29).

36      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en n’ayant pas pris toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

 Sur les sanctions pécuniaires

 Sur l’astreinte

 Argumentation des parties

37      La Commission propose à la Cour, conformément à l’article 260, paragraphe 2, TFUE et sur la base de sa communication du 13 décembre 2005, intitulée «Mise en œuvre de l’article [260 TFUE]» [SEC(2005) 1658], telle que mise à jour par la communication C(2012) 6106 final de la Commission du 31 août 2012, intitulée «Mise à jour des données utilisées pour le calcul des sommes forfaitaires et des astreintes que la Commission proposera à la Cour de justice dans le cadre de procédures d’infraction» (ci-après la «communication de la Commission du 13 décembre 2005»), de sanctionner l’absence d’exécution en cause, notamment, par une condamnation au paiement d’une astreinte.

38      Or, en vertu du point 6 de la communication de la Commission du 13 décembre 2005, cette dernière se fonderait sur trois critères fondamentaux pour déterminer le montant à proposer, à savoir la gravité de l’infraction, la durée de celle‑ci et la nécessité d’assurer l’effet dissuasif de la sanction elle‑même.

39      S’agissant de la gravité de l’infraction constatée, la Commission soutient que, vu, en premier lieu, l’importance des règles de l’Union qui font l’objet de l’infraction, en deuxième lieu, les conséquences de cette dernière sur les intérêts généraux et particuliers, tels que, notamment, le bon état écologique et chimique des eaux de surface, la préservation des écosystèmes aquatiques et terrestres, ou la pratique d’activités de loisirs liées à ces écosystèmes, en troisième lieu, la circonstance atténuante des progrès accomplis jusqu’à présent mais aussi la circonstance aggravante de l’incertitude quant à une exécution complète de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), en quatrième lieu, la clarté des dispositions enfreintes et, en dernier lieu, le comportement infractionnel répété de la République hellénique en matière de respect de la réglementation de l’Union dans le domaine des eaux résiduaires urbaines, un coefficient de gravité de 6 est approprié.

40      En ce qui concerne la durée de l’infraction, la Commission fait valoir que la décision d’engager la présente procédure a été prise le 20 novembre 2013, soit 73 mois après le prononcé de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à savoir le 25 octobre 2007, ce qui justifierait l’application du coefficient maximal de 3.

41      Quant au coefficient afférent à la capacité de paiement de l’État membre poursuivi, appelé facteur «n», cette institution rappelle que la communication de la Commission du 13 décembre 2005 fixe celui‑ci à 4,12 pour la République hellénique.

42      La Commission relève que, selon la formule mentionnée dans cette communication, l’astreinte journalière est égale au forfait de base uniforme, de 640 euros, multiplié par le coefficient de gravité, le coefficient de durée et le facteur «n». Ainsi, en l’espèce, elle propose une astreinte journalière de 47 462,40 euros (640 x 6 x 3 x 4,12).

43      Toutefois, cette institution estime qu’il convient de réduire progressivement l’astreinte en fonction des progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642). Dès lors, elle propose d’appliquer, conformément au point 13.2 de la communication de la Commission du 13 décembre 2005, une astreinte journalière décroissante dont le montant effectif doit être calculé à la fin de chaque période de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’EH des agglomérations dont les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires ont été mis en conformité à la fin de la période considérée par rapport au nombre d’EH des agglomérations ne disposant pas de tels systèmes au jour du prononcé du présent arrêt. D’après les chiffres reçus par la Commission avant la décision de former le présent recours, le nombre d’EH relatifs aux agglomérations ne disposant pas de systèmes de collecte et de traitement conformes aux articles 3 et 4 de la directive 91/271 s’élèverait à un total de 124 000, qui se répartirait entre les six agglomérations concernées, à raison de 20 000 EH pour Koropi, de 25 000 EH pour Nea Makri, de 18 000 EH pour Rafina, de 28 000 EH pour Artemida, de 16 000 EH pour Lefkimmi et de 17 000 EH pour Markopoulo. À l’audience, la Commission a reconnu que les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires de l’agglomération de Lefkimmi avaient été, entre-temps, mis en conformité avec les exigences découlant des articles 3 et 4 de la directive 91/271 et que, dès lors, il ne restait que cinq agglomérations ne disposant pas d’installations conformes à ces articles.

44      La République hellénique soutient que ni la gravité, ni la durée de l’infraction, ni la coopération et la diligence dont elle a fait preuve au cours de la procédure, ni les progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) ne justifient l’imposition d’une astreinte dans la présente affaire. À titre subsidiaire, la République hellénique conteste la méthode de calcul des montants proposés.

45      Cet État membre considère que l’astreinte de 47 462,40 euros demandée par la Commission est excessivement élevée et disproportionnée par rapport à la gravité de l’infraction dont les conséquences sur l’environnement, qui n’ont pas été évaluées concrètement, sont hypothétiques. Par ailleurs, désormais, seules quatre agglomérations, à savoir celles de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida, n’auraient pas achevé les travaux de mise en conformité avec la directive 91/271. À cet égard, ledit État membre relève que les eaux urbaines résiduaires de ces quatre agglomérations, qui ne disposent pas actuellement de stations d’épuration, ne sont pas rejetées directement et sans contrôle dans des eaux réceptrices, mais sont collectées dans des systèmes de réservoirs et de fosses septiques, puis sont acheminées par camions-citernes dans des stations d’épuration des eaux résiduaires voisines qui fonctionnent, afin d’y être traitées. Par conséquent, il n’y aurait pas de rejet d’eaux usées non traitées dans des eaux de surface.

46      Par ailleurs, compte tenu des circonstances de l’espèce, ladite astreinte serait également disproportionnée au regard de la durée de l’infraction, ainsi que de la capacité de paiement de la République hellénique, laquelle aurait diminué au cours de la crise économique traversée par cette dernière. La République hellénique réfute également les affirmations de la Commission selon lesquelles, d’une part, elle a manqué, dans le passé, de manière répétée, à ses obligations en matière de traitement des eaux urbaines résiduaires et, d’autre part, sa condamnation au paiement d’astreintes est justifiée par le grand nombre d’affaires la concernant qui portent sur la non-exécution d’arrêts rendus par la Cour.

 Appréciation de la Cour

47      Selon une jurisprudence constante, l’infliction d’une astreinte ne se justifie, en principe, que pour autant que perdure le manquement tiré de l’inexécution d’un précédent arrêt jusqu’à l’examen des faits par la Cour (arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 47).

48      En l’espèce, il est constant que, à la date de l’audience, les agglomérations de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida n’étaient pas encore équipées, conformément aux articles 3 et 4 de la directive 91/271, de systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires. Pour ce qui est de l’agglomération de Markopoulo, à supposer même que, ainsi que l’allègue la République hellénique sans en justifier, la seconde phase des travaux de construction du système de collecte ait été achevée au mois d’avril 2015, ce que la Commission conteste, il y a lieu de constater que, à la date de l’audience, la République hellénique n’était pas en mesure de rapporter la preuve qu’elle avait, conformément à l’annexe I, point D, 3, de cette directive, prélevé des échantillons à intervalles réguliers, notamment à partir du mois d’avril 2015. Or, une telle circonstance, eu égard notamment à l’annexe I, point B, 2, et point D, 2 et 4, sous a), est de nature à empêcher qu’il soit vérifié si les rejets provenant des stations d’épuration des eaux urbaines résiduaires répondent aux prescriptions visées à l’article 4, paragraphe 3, de ladite directive. Quant à l’agglomération de Lefkimmi, il importe de relever que, à la date de l’audience, elle n’était plus visée par les griefs de la Commission.

49      Dans ces conditions, la Cour considère que la condamnation de la République hellénique au paiement d’une astreinte constitue un moyen financier approprié afin d’assurer l’exécution complète de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) (voir arrêt Commission/Belgique, C‑533/11, EU:C:2013:659, point 66).

50      Néanmoins, il ne saurait être a priori exclu que, au jour du prononcé du présent arrêt, l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) ait été exécuté de manière complète. Ainsi, l’astreinte ne doit être infligée que dans l’hypothèse où le manquement persisterait à la date de ce prononcé (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 51).

51      Il est de jurisprudence constante que l’astreinte doit être arrêtée en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement modifie son comportement et mette fin à l’infraction incriminée (voir arrêt Commission/Grèce, C‑369/07, EU:C:2009:428, point 113 et jurisprudence citée).

52      Dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation en la matière, il incombe à la Cour de fixer l’astreinte de sorte que celle-ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (voir, notamment, arrêts Commission/Belgique, C‑533/11, EU:C:2013:659, point 68, et Commission/Suède, C‑243/13, EU:C:2014:2413, point 50).

53      Les propositions de la Commission concernant l’astreinte ne sauraient lier la Cour et ne constituent qu’une base de référence utile. De même, des lignes directrices telles que celles contenues dans les communications de la Commission ne lient pas la Cour, mais contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par la Commission elle-même lorsque cette institution fait des propositions à la Cour. En effet, dans le cadre d’une procédure fondée sur l’article 260, paragraphe 2, TFUE, relative à un manquement qui persiste dans le chef d’un État membre nonobstant le fait que ce même manquement a déjà été constaté à l’occasion d’un premier arrêt rendu au titre de l’article 226 CE ou de l’article 258 TFUE, la Cour doit demeurer libre de fixer l’astreinte infligée au montant et sous la forme qu’elle considère adéquats pour inciter cet État membre à mettre fin à l’inexécution des obligations découlant de ce premier arrêt de la Cour (voir arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 52).

54      Aux fins de la fixation du montant de l’astreinte, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de cette dernière, en vue d’une application uniforme et effective du droit de l’Union, sont, en principe, la gravité de l’infraction, sa durée et la capacité de paiement de l’État membre en cause. Pour l’application de ces critères, il y a lieu de tenir compte, en particulier, des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts privés et publics ainsi que de l’urgence qu’il y a à ce que l’État membre concerné se conforme à ses obligations (voir, en ce sens, arrêts Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 53, et Commission/Suède, C‑243/13, EU:C:2014:2413, point 51).

55      En premier lieu, en ce qui concerne la gravité de l’infraction, il convient de rappeler que la directive 91/271 vise à protéger l’environnement (voir arrêt Commission/Belgique, C‑533/11, EU:C:2013:659, point 55). L’absence ou l’insuffisance de systèmes de collecte ou de traitement des eaux urbaines résiduaires sont susceptibles de porter atteinte à l’environnement et doivent être considérées comme particulièrement graves (voir, par analogie, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 54). S’agissant de la circonstance invoquée par la République hellénique, selon laquelle les eaux usées des agglomérations de Koropi, de Nea Makri, de Rafina et d’Artemida seraient acheminées et traitées dans des stations d’épuration voisines, si elle est susceptible, en principe, de constituer une circonstance atténuante, elle ne saurait, en l’occurrence, être prise en compte dès lors qu’elle est contestée par la Commission et que la République hellénique n’a apporté aucun élément de preuve à l’appui de son allégation.

56      Il y a lieu de relever que, en l’espèce, le nombre d’agglomérations pour lesquelles la République hellénique n’a pas fourni, à la date de l’audience, la preuve de l’existence de systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires conformes à la directive 91/271, soit cinq, est significatif. Toutefois, ce nombre est nettement moins élevé que celui des agglomérations ne disposant pas d’installations conformes, mentionnées dans l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à savoir vingt-trois (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 55).

57      En l’occurrence, l’importance de l’atteinte à l’environnement est fonction, dans une large mesure, du nombre d’agglomérations visées par le manquement reproché. Dès lors, cette atteinte est moins importante que celle résultant du manquement initial constaté dans l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 56).

58      Par ailleurs, il convient également de prendre en compte les efforts accomplis par la République hellénique et reconnus par la Commission dans la perspective de l’exécution complète des obligations découlant de la directive 91/271.

59      En deuxième lieu, s’agissant de la durée de l’infraction, celle-ci doit être évaluée en prenant en considération le moment auquel la Cour apprécie les faits et non pas celui où cette dernière est saisie par la Commission. Or, en l’espèce, la durée de l’infraction, à savoir presque huit ans à compter de la date du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), est considérable.

60      En troisième lieu, en ce qui concerne la capacité de paiement de l’État membre en cause, il y a lieu de tenir compte des arguments de la République hellénique, selon lesquels son produit intérieur brut (PIB) de l’année 2010, qui a été pris en compte pour le calcul du facteur «n» par la Commission dans sa communication C(2012) 6106 final, a entre-temps diminué. À cet égard, il échet de relever que le facteur «n» retenu pour la République hellénique par la Commission dans ladite communication, à savoir 4,12, a été fixé à 3,68 dans la communication C(2014) 6767 final de la Commission, du 17 septembre 2014, intitulée «Mise à jour des données utilisées pour le calcul des sommes forfaitaires et des astreintes que la Commission proposera à la Cour de justice dans le cadre de procédures d’infraction». En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il convient de prendre en compte l’évolution récente du PIB d’un État membre telle qu’elle se présente à la date de l’examen des faits par la Cour (voir, en ce sens, arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 58).

61      En outre, la Commission a proposé à la Cour de réduire progressivement l’astreinte en fonction des progrès réalisés dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642).

62      Il convient de rappeler, à cet égard, que, même si, pour garantir l’exécution complète de l’arrêt de la Cour, l’astreinte doit être exigée dans son intégralité jusqu’à ce que l’État membre ait pris toutes les mesures nécessaires pour mettre fin au manquement constaté, dans certains cas spécifiques, toutefois, une sanction qui tient compte des progrès éventuellement réalisés par l’État membre dans l’exécution de ses obligations peut être envisagée (voir arrêt Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 60).

63      En l’espèce, la Commission suggère de prendre en considération, pour le calcul du montant de l’astreinte, la réduction progressive du nombre d’EH non conformes aux exigences de la directive 91/271, ce qui permettrait de tenir compte des progrès réalisés par la République hellénique dans l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) et du principe de proportionnalité.

64      Il appert que, à la date de l’audience, soit le 1er juillet 2015, le nombre d’EH des agglomérations ne disposant pas de systèmes de collecte et de traitement des eaux résiduaires urbaines était de 108 000.

65      Compte tenu de l’ensemble des circonstances de la présente affaire, la Cour considère comme appropriée l’imposition d’une astreinte dégressive d’un montant de 20 000 euros par jour.

66      Quant à la périodicité de l’astreinte, conformément à la proposition de la Commission, étant donné que la fourniture de la preuve de la conformité avec la directive 91/271 peut exiger un certain délai et afin de tenir compte des progrès éventuellement réalisés par l’État membre défendeur, il est approprié que l’astreinte soit calculée sur la base de périodes de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’EH des agglomérations dont les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires ont été mis en conformité avec l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) (voir, en ce sens, arrêt Commission/Belgique, C‑533/11, EU:C:2013:659, point 73).

67      Il convient donc de condamner la République hellénique à payer à la Commission, sur le compte «Ressources propres de l’Union européenne», une astreinte de 3 640 000 euros par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à compter de la date du prononcé du présent arrêt, et jusqu’à l’exécution complète de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), dont le montant effectif doit être calculé à la fin de chaque période de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’EH des agglomérations dont les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires ont été mis en conformité avec l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) à la fin de la période considérée par rapport au nombre d’EH des agglomérations ne disposant pas de tels systèmes au jour du prononcé du présent arrêt.

 Sur la somme forfaitaire

 Argumentation des parties

68      La Commission demande à la Cour d’enjoindre à la République hellénique de verser la somme forfaitaire journalière de 5 191,20 euros, dont le montant résulte de la multiplication du forfait de base uniforme, fixé à 210 euros, par le coefficient de gravité de 6 et par le facteur «n» de 4,12, à compter de la date du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), jusqu’à la date du présent arrêt ou jusqu’à celle où sera exécuté l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), si la mise en œuvre de ce dernier intervient plus tôt.

69      La République hellénique fait valoir qu’elle a déjà effectué toutes les démarches nécessaires à l’exécution complète de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642) en coopérant systématiquement et loyalement avec les services de la Commission, si bien que, à ce jour, seule une proportion réduite de cet arrêt n’a pas été exécutée. Dès lors, elle n’aurait pas à verser la somme forfaitaire proposée par la Commission.

70      En tout état de cause, il appartiendrait à la Cour d’apprécier si, dans une conjoncture économique extrêmement difficile, les conditions objectives permettent de prononcer une condamnation au paiement d’une somme forfaitaire telle que celle proposée par la Commission ou si, au contraire, elles plaident pour une exonération complète de la République hellénique.

71      En outre, la République hellénique est d’avis que, si une telle condamnation est prononcée, la date à prendre en considération pour le calcul du montant de la somme forfaitaire ne saurait coïncider avec la date du prononcé de l’arrêt qui a constaté le premier manquement puisque l’exécution de cet arrêt ne pouvait intervenir que postérieurement à cette date, après l’écoulement d’un délai raisonnable.

 Appréciation de la Cour

72      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que la Cour est habilitée, dans l’exercice du pouvoir d’appréciation qui lui est conféré dans le domaine considéré, à imposer, de façon cumulative, une astreinte et une somme forfaitaire (arrêt Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, point 113).

73      La condamnation au paiement d’une somme forfaitaire et la fixation du montant éventuel de cette somme doivent, dans chaque cas d’espèce, demeurer fonction de l’ensemble des éléments pertinents ayant trait tant aux caractéristiques du manquement constaté qu’à l’attitude propre à l’État membre concerné par la procédure initiée sur le fondement de l’article 260 TFUE. À cet égard, celui-ci investit la Cour d’un large pouvoir d’appréciation afin de décider de l’infliction ou non d’une telle sanction et de déterminer, le cas échéant, son montant (voir arrêt Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, point 114).

74      Dans le présent litige, l’ensemble des éléments juridiques et factuels ayant abouti à la constatation du manquement considéré, notamment le nombre relativement élevé d’agglomérations ne disposant toujours pas de systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires conformes à la date de l’audience, ainsi que la circonstance qu’ont déjà été prononcés deux autres arrêts, les arrêts Commission/Grèce (C‑119/02, EU:C:2004:385) et Commission/Grèce (C‑517/11, EU:C:2013:66), constatant le manquement de la République hellénique à ses obligations en matière de traitement des eaux urbaines résiduaires, constituent un indicateur de ce que la prévention effective de la répétition future d’infractions analogues au droit de l’Union est de nature à requérir l’adoption d’une mesure dissuasive, telle que la condamnation au paiement d’une somme forfaitaire (voir, en ce sens, arrêts Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 74, ainsi que Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, points 115 et 116).

75      Dans ces circonstances, il appartient à la Cour, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer le montant de cette somme forfaitaire de sorte qu’elle soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée à l’infraction commise (voir arrêts Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 75, et Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, point 117).

76      Figurent notamment au rang des facteurs pertinents à cet égard des éléments tels que la gravité de l’infraction constatée et la période durant laquelle celle-ci a persisté depuis le prononcé de l’arrêt l’ayant constatée (voir arrêts Commission/Grèce, C‑378/13, EU:C:2014:2405, point 76, et Commission/Italie, C‑196/13, EU:C:2014:2407, point 118).

77      Les circonstances de l’espèce devant être prises en compte ressortent notamment des considérations figurant aux points 55 à 60 du présent arrêt, relatives à la gravité et à la durée de l’infraction ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre en cause.

78      S’agissant de la gravité de l’infraction en cause, il y a lieu, toutefois, de relever que le nombre d’agglomérations ne disposant pas de systèmes conformes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires faisant l’objet de l’infraction reprochée était, en moyenne, pendant la période comprise entre la date du prononcé de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à savoir le 25 octobre 2007, et celle du prononcé du présent arrêt, nettement plus élevé que le nombre retenu au point 56 du présent arrêt aux fins du calcul de l’astreinte. Dès lors, conformément aux considérations énoncées au point 57 du présent arrêt selon lesquelles l’importance de l’atteinte à l’environnement est fonction, dans une large mesure, du nombre d’agglomérations visées par le manquement reproché, il y a lieu de considérer cette infraction comme étant plus grave aux fins du calcul de la somme forfaitaire qu’aux fins de la fixation de l’astreinte.

79      Eu égard à l’ensemble de ces éléments, la Cour considère qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en fixant à 10 millions d’euros le montant de la somme forfaitaire que la République hellénique devra acquitter.

80      Il convient, par conséquent, de condamner la République hellénique à payer à la Commission, sur le compte «Ressources propres de l’Union européenne», la somme forfaitaire de 10 millions d’euros.

 Sur les dépens

81      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et le manquement ayant été constaté, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:

1)      En n’ayant pas pris toutes les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 260, paragraphe 1, TFUE.

2)      Dans le cas où le manquement constaté au point 1 persiste au jour du prononcé du présent arrêt, la République hellénique est condamnée à payer à la Commission européenne, sur le compte «Ressources propres de l’Union européenne», une astreinte de 3 640 000 euros par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à compter de la date du prononcé du présent arrêt, et jusqu’à l’exécution complète de l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), dont le montant effectif doit être calculé à la fin de chaque période de six mois en réduisant le montant total relatif à chacune de ces périodes d’un pourcentage correspondant à la proportion représentant le nombre d’équivalents habitants des agglomérations dont les systèmes de collecte et de traitement des eaux urbaines résiduaires ont été mis en conformité avec l’arrêt Commission/Grèce (C‑440/06, EU:C:2007:642), à la fin de la période considérée, par rapport au nombre d’équivalents habitants des agglomérations ne disposant pas de tels systèmes au jour du prononcé du présent arrêt.

3)      La République hellénique est condamnée à payer à la Commission européenne, sur le compte «Ressources propres de l’Union européenne», la somme forfaitaire de 10 millions d’euros.

4)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.

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