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Document 52014XC1219(06)

Državne potpore – Francuska Državna potpora SA.38544 (2014/C) (ex 2014/N) — Izvanredni i privremeni paket potpore za restrukturiranje – Kem One SAS — Poziv na podnošenje primjedbi u skladu s člankom 108. stavkom 2. Ugovora o funkcioniranju Europske unije Tekst značajan za EGP

SL C 460, 19.12.2014, p. 40–54 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

19.12.2014   

HR

Službeni list Europske unije

C 460/40


DRŽAVNE POTPORE – FRANCUSKA

Državna potpora SA.38544 (2014/C) (ex 2014/N)

Izvanredni i privremeni paket potpore za restrukturiranje – Kem One SAS

Poziv na podnošenje primjedbi u skladu s člankom 108. stavkom 2. Ugovora o funkcioniranju Europske unije

Tekst značajan za EGP

(2014/C 460/04)

Dopisom od 01.10.2014., koji je u nastavku ovog sažetka priložen u vjerodostojnoj jezičnoj verziji, Komisija je obavijestila Francusku Republiku o svojoj odluci da pokrene postupak, predviđen člankom 108. stavkom 2. Ugovora o funkcioniranju Europske unije, koji se odnosi na prethodno navedene mjere.

Zainteresirane strane mogu u roku od jednog mjeseca od dana objave ovog sažetka i dopisa u nastavku podnijeti primjedbe o mjeri u pogledu koje Komisija pokreće postupak, na sljedeću adresu:

Commission européenne

Direction générale Concurrence

Greffe des Aides d’État

B-1049 BRUXELLES

Telefaks: + 32.2.296.12.42

Francuska Republika bit će obaviještena o tim primjedbama. Povjerljivo postupanje s identitetom zainteresirane strane koja podnosi primjedbe može se zatražiti u pisanom obliku, navodeći razloge zahtjeva.

TEKST SAŽETKA

Poduzetnik Kem One SAS, koji je u sudskom stečajnom postupku od 27. ožujka 2013., od Fonda za gospodarski i socijalni razvoj (ESDF) primio je zajam u vrijednosti 30 milijuna EUR, potporu u vrijednosti 15 milijuna EUR, povratne predujmove u vrijednosti 80 milijuna EUR te otpis socijalnih i poreznih obveza u vrijednosti 42 milijuna EUR.

U pogledu uvjeta zajma francuska nadležna tijela smatraju da je država Francuska djelovala kao privatni ulagatelj u tržišnom gospodarstvu. U pogledu ostalih mjera ona smatraju da jedan dio navedenih mjera sadržava elemente potpore. Budući da se poduzetnik tijekom primjene tih mjera nalazio u sudskom stečajnom postupku, Komisija treba analizirati i kompatibilnost primijenjenih mjera sa zahtjevima smjernica EU-a za potpore za sanaciju i restrukturiranje iz 2004.

Komisija u ovoj fazi sumnja u učinkovitost svih navedenih mjera te poziva francuska nadležna tijela i sve zainteresirane strane da dostave svoje komentare i objašnjenja u pogledu sljedećih točaka:

usklađenost zajma ESDF-a i ostalih mjera s načelima ulagatelja i/ili zajmodavca u tržišnom gospodarstvu (osobito u pogledu razina povrata i osiguranja zajma ESDF-a) i kvantitativno određivanje dijela koji se odnosi na potporu za svaku mjeru;

kompatibilnost mjera sa smjernicama iz 2004., a Komisija posebno očekuje prijedloge kompenzacijskih mjera i objašnjenja o načinu izračuna vlastitog doprinosa te o načinima ponovne uspostave dugoročne održivosti poduzeća.

U skladu s člankom 14. Uredbe Vijeća (EZ) br. 659/1999, od primatelja se može zahtijevati povrat svake nezakonite potpore.

TEKST DOPISA

«Par la présente, la Commission a l’honneur d’informer la République française qu’après avoir examiné les informations fournies par vos autorités sur la mesure citée en objet, elle a décidé d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

I.   PROCÉDURE

(1)

Après des contacts de pré-notification, les autorités françaises ont notifié, le 30 juillet 2014, un ensemble de mesures de soutien financier dans le cadre du plan de restructuration par voie de continuation de la société Kem One SASU (ci-après “Kem One” ou “l’entreprise bénéficiaire”).

II.   DESCRIPTION DES FAITS

2. 1.   Kem One

(2)

Kem One est constituée de plusieurs activités appartenant à une filière verticalement intégrée allant de la production de sel jusqu’à la transformation du polychlorure de vinyle (PVC).

(3)

Kem One était une filiale à 100 % de Kem One Holding qui a été constitué en 2012 pour permettre la filialisation et reprise des activités vinyliques d’Arkema par le groupe Klesch, groupe financier basé en Suisse.

(4)

Kem One regroupe les activités amont qui consistent en la production et la commercialisation de produits chloro-chimiques et de PVC à destination de nombreux secteurs économiques: automobile, construction, secteur agricole et de la santé.

(5)

En 2012, Kem One et ses filiales (Kem One Italia et Kem One Hernani) ont généré un chiffre d’affaires total de 818,2 millions EUR, dont […] (1) millions EUR en France. Les activités de Kem One ont pour principale finalité de produire ([…]% du chiffre d’affaires) et de commercialiser le PVC. Kem One produit trois types de PVC: des PVC à usages généraux (M-PVC et S-PVC) qui représente […]% du volume de la production de PVC, des PVC émulsion (E-PVC) qui représente […]% en volume de la production mais […]% de la marge totale liée à l’activité PVC et des PVC surchloré (PVC-C) qui représente […]% du volume de la production PVC. Outre le PVC, Kem One produit et commercialise de la soude, des chlorométhanes et du chlore utilisé pour la fabrication du PVC (2).

(6)

Les principales implantations industrielles de Kem One se trouvent en Europe (18 usines dont 11 en France). Kem One a également des activités au Mexique et en Asie (Vietnam, Japon et Chine). Kem One emploie 1  315 salariés en France.

2. 2.   Les difficultés rencontrées par Kem One

(7)

Les difficultés rencontrées découlent à la fois d’handicaps structurels et de la crise mondiale qui a entraîné des pertes financières importantes entre le deuxième semestre 2012 et le début de l’année 2013.

2. 2. 1.   Les handicaps structurels de Kem One

La désintégration verticale de la chaîne éthylène

(8)

Les autorités françaises considèrent que la compétitivité des acteurs du PVC repose sur différents facteurs, dont le prix d’accès à l’énergie et aux matières premières, l’intégration et la taille des unités de toute la chaîne vinylique, leur implantation géographique et la logistique associée, les technologies des unités et la possibilité pour certains acteurs de valoriser deux fois le chlore.

(9)

Les activités actuelles de Kem One se sont développées au sein du pôle vinylique d’Arkerma, qui est devenu un groupe indépendant en 2006. Ces activités ont ensuite été cédées au groupe Klesch en 2012. La structure actuelle de Kem One est le résultat de plusieurs découpages lors des différentes cessions d’activités préexistantes dans le secteur de la chimie en France qui ont entraîné une désintégration verticale de la chaîne éthylène défavorable à Kem One en raison de l’importance des coûts que représente l’achat d’éthylène dans la production de PVC. Ainsi, Kem One ne bénéficie pas d’un accès intégré à l’éthylène, en raison notamment de la coupure du lien avec le vapocraqueur de TOTAL qui constituait sa source d’approvisionnement d’éthylène. Les principaux concurrents de Kem One bénéficient d’une situation d’intégration partielle grâce à des productions intégrées d’éthylène pour une partie de leur besoins (vapocraqueurs d’INEOS en Norvège et de Solvay en France) ou d’accords de long terme équivalent à une forme d’intégration (c’est le cas de SHIN-ETSU aux Pays-Bas pour l’accès au vapocraqueur de SHELL).

Un coût d’accès aux principales matières premières moins compétitif que celui des concurrents

(10)

Selon les autorités françaises, Kem One bénéficiait de conditions d’approvisionnement nettement moins compétitives que celles de ses concurrents s’agissant de l’approvisionnement en éthylène, en vapeur et en électricité.

Le cœur de l’outil de production (électrolyses) est vieillissant et sous-performant

(11)

Sur quatre unités d’électrolyse, une seule peut être considérée comme technologiquement moderne et trois sont fortement consommatrices d’énergie (Fos-sur-Mer, Lavéra). Les principaux concurrents de Kem One se sont engagés dans des conversions d’électrolyses à mercure et diaphragme vers des électrolyses membrane dans la période 2003-2013.

(12)

Ainsi, Kem One n’a que […]% des capacités les plus modernes (électrolyse à membrane) alors que cette technologie représente près de […]% des capacités existantes.

Des coûts de production élevés

(13)

Le transfert des activités vinyliques d’Arkema à Klesch n’a pas été précédé d’une filialisation et d’une restructuration interne qui aurait optimisé les coûts de structure. Ces derniers représentaient une charge de […] millions EUR en 2013.

(14)

En outre de nombreux contrats de services et de prestations ont dû être mis en place entre Arkema et Kem One générant des déficits de compétitivité.

Une politique commerciale trop orientée vers le Sud de l’Europe

(15)

Le positionnement géographique de Kem One, dont les principales unités de production ont un accès direct à la Méditerranée, a conduit à la mise en place d’une politique de vente (PVC et soude) largement orientée vers les pays du Sud de l’Europe dont les marchés ont été directement touchés par la crise de 2008-2009 et par l’importation de produits en particulier de soude, à bas prix, par comparaison avec ceux des marchés de la zone Europe du Nord-Ouest. Cette orientation de la politique commerciale a contribué à la dégradation de la marge de Kem One.

2. 2. 2.   Les difficultés financières de Kem One

(16)

La mauvaise conjoncture économique du deuxième semestre 2012 et du début de l’année 2013 a rapidement conduit Kem One à des pertes financières importantes: l’excédent brut d’exploitation (EBE) a chuté de façon continue à partir de 2008 jusqu’en 2012 ([…] en 2007; -[…] en 2012).

(17)

Les effets négatifs de la crise ont été renforcés par plusieurs évènements qui ont entraîné une baisse significative des ventes et ont affecté la marge de l’entreprise bénéficiaire: arrêt quinquennal de Fos en 2012 plus long que prévu, problème de la qualité de l’éthylène fourni par TOTAL, incident majeur survenu sur le vapocraqueur de TOTAL à Lavéra fin décembre 2012 qui a entraîné son arrêt total jusqu’en mars 2013 puis son fonctionnement à mi- capacité.

2. 2. 3.   La cessation des paiements et l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire

(18)

Les difficultés récurrentes rencontrées par Kem One ont conduit celle-ci a sollicité l’ouverture d’une procédure de conciliation auprès du Tribunal de commerce de Lyon en janvier 2013. Aucun accord n’ayant été trouvé, le Tribunal a constaté, le 27 mars 2013, la cessation de paiements de Kem One et a prononcé l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

(19)

Par jugement du 20 décembre 2013, la Tribunal a retenu l’offre conjointe portée par Monsieur Alain de Krassny et par la société d’investissement Open Gate Capital (ci-après “Open Gate”) et a validé le plan de redressement. Le plan de redressement vise à la continuation de l’entreprise.

(20)

Une nouvelle société, K1 Group SAS (ci-après “K1”), est constituée pour les besoins du plan de redressement et a vocation à acquérir et détenir les titres de Kem One et de Kem One Innovative Vinyls. K1 sera détenue à 50 % par la société AK1 contrôlée par M. de Krassny et à 50 % par la société K1 International contrôlée par Open Gate.

2. 3.   Les mesures de soutien public

(21)

Le 27 décembre 2013, les ministres de l’Économie et des Finances et du redressement productif ont adressé une lettre à l’administrateur judiciaire (3) dans laquelle ils s’engagent à mettre à la disposition de Kem One les financements suivants:

Un prêt du Fonds de développement économique et social (ci-après “le prêt FDES”) d’un montant maximum en principal de 30 millions EUR;

Une subvention pour un montant de 15 millions EUR et des avances remboursables pour un montant maximum de 80 millions EUR.

(22)

La lettre évoque également la possibilité d’une remise importante de dettes sociales et fiscales qui pourra être demandée par le repreneur.

2. 3. 1.   Le prêt FDES

(23)

Ce prêt de 30 millions EUR est destiné à servir de garantie à l’octroi de crédits fournisseurs à Kem One et à participer au financement de ses besoins en fonds de roulement et de ses besoins de trésorerie à court terme.

(24)

Le FDES est utilisé par les autorités françaises comme un outil d’accompagnement de la restructuration de certaines entreprises en difficulté. La doctrine d’emploi du FDES s’appuie actuellement sur la circulaire du 26 novembre 2004 (4) relative à l’action de l’État dans la prévention et le traitement des difficultés des entreprises, mais cible plus particulièrement les entreprises de taille intermédiaire (5) souvent en procédure collective. Le FDES intervient sous forme de prêts, limités aux entreprises dont la viabilité est assurée à l’issue de la période de restructuration et dont la disparition emporterait des conséquences majeures sur l’ensemble d’une filière ou d’une région. Dans tous les cas, l’État intervient en cofinancement avec le secteur privé.

(25)

Le prêt sera octroyé à Kem One après la signature du contrat de prêt et son octroi sera conditionné notamment à la souscription par les repreneurs à une augmentation de capital en numéraire de 10 millions EUR au minimum entièrement libéré.

(26)

Le prêt produira des intérêts au taux fixe annuel de 3,5 %. Kem One remboursera le prêt FDES en 7 versements annuels.

(27)

L’État bénéficie d’un gage de premier rang consenti par Kem One sur son matériel et/ou ses équipements. La valeur nette comptable des matériels et équipements, telle qu’inscrites dans les comptes arrêtés au 31 décembre 2013, est de [10 0 0 00  000-14 0 0 00  000] EUR. Compte tenu de la validation des apports par un commissaire aux comptes en juillet 2012 et de l’absence de circonstances exceptionnelles pouvant remettre en question les durées d’amortissement, les autorités françaises considèrent que les valeurs nettes comptables reflètent la valeur réelle de ces actifs.

2. 3. 2.   Les subventions et avances remboursables

(28)

Ces mesures de financement sont destinées à la mise en œuvre du projet SAM de conversion de l’outil industriel (électrolyses à mercure du site de Lavéra) dans le cadre du programme d’investissements d’avenir “aide à la réindustrialisation”.

(29)

Les avances seront remboursables sur 7 ans. Elles incluent un différé d’amortissement de 2 ans et sont décomposées en deux tranches de 65 millions EUR portant un taux fixe annuel de 3,5 % et de 15 millions EUR portant un taux fixe annuel de 10 %.

(30)

Dans le cadre de la mise à disposition de ces financements, un comité de suivi regroupant des représentants de l’État, de Kem One et des repreneurs, sera mis en place. Il sera chargé de la validation des dépenses engagées au titre du projet SAM, de la validation du maintien de l’activité et des emplois sur le site de Lavéra et de l’observation de la conformité des éventuelles “management fees” perçus par M. de Krassny.

2. 3. 3.   L’éventuel abandon de créances fiscales et sociales

(31)

Les créances fiscales et sociales dues par Kem One s’élèvent à 42 millions EUR.

(32)

Le 20 février 2014, Kem One a saisi la Commission des Chefs de services financiers (ci-après “CCSF”) compétente en matière de remise de dette fiscale et sociale.

(33)

Conformément à la lettre des ministres du 17 décembre 2013 précitée, Kem One a déposé auprès du tribunal de commerce de Lyon une requête en modification substantielle de plan conformément à l’article L.626-26 du code de commerce (6), avec une demande de remise importante des dettes publiques légalement rémissibles. Conformément à ce qui est mentionné dans le jugement du Tribunal de commerce, la demande de remise de la part de Kem One porte sur 90 % de la partie rémissible desdites dettes. Les autorités françaises ont retenu le montant de 37,8 millions EUR qui correspond à 90 % des dettes fiscales et sociales. La demande de remise n’a pas encore été formellement instruite par la CCSF au jour de la notification à la Commission européenne.

2. 4.   Le plan de restructuration de Kem One

2. 4. 1.   Les mesures envisagées

(34)

Le plan de restructuration repose sur une continuation de l’activité de Kem One regroupée avec les autres filiales détenues par Kem One Innovative Vinyls SASU afin de reconstituer le périmètre des activités amont et aval.

(35)

Le plan de restructuration comporte trois types de mesures: industrielles, commerciales et financières.

Modernisation de l’outil de production, en particulier les installations de l’électrolyse de Lavéra

(36)

Ce projet comporte trois objectifs principaux:

se conformer à l’engagement volontaire pris par les producteurs de chlore regroupés au sein d’Eurochlor d’éliminer la technologie mercure de la production de chlore à l’horizon 2020;

restaurer la compétitivité du site de Lavéra dans la filière chlore-soude-chlorométhanes-CVM au niveau de ses concurrents européens grâce à la production de chlore sur technologie membrane;

conserver l’intégration verticale du site en amont par l’accès à la saumure de Vauvert et en aval, par les débouchés CVM et chlorométhanes.

(37)

L’estimation faite par Kem One du rattrapage de son retard de compétitivité est de l’ordre de [20-45] millions EUR/an sur les coûts de production. La mise en service est prévue en 2016. Le montant total des coûts du projet SAM s’élève à [150-210] millions EUR.

La réduction des frais de structure

(38)

Le plan prévoit la suppression de [90-110] postes de travail. [1-15] salariés se sont vus notifier des modifications substantielles de leur contrat de travail en raison de la fermeture du site d’Aix-en-Provence. S’agissant du reclassement, [80-100] postes de travail ont été recensés au sein de Kem One et du groupe. Ce plan social correspond à [5-10]millions EUR d’économie de coûts salariaux.

(39)

Le plan prévoit également des économies de frais de structure de [10-15] millions EUR liées à une réduction des coûts assurance, la fermeture de l’antenne du siège social à Aix-en-Provence et au report de projets informatiques.

(40)

Enfin, le plan vise [10-30] millions EUR d’économie résultant de l’amélioration de la productivité: réduction des frais fixes et variables, amélioration des rendements. Ces mesures sont indépendantes du projet SAM et ont vocation à être réalisées en 2014 et 2015.

Réorientation de la politique commerciale vers les débouchés à valeur ajoutée

(41)

Kem One envisage de saturer ses capacités de production pour les débouchés les plus rentables, notamment le PVC-C ou le E-PVC et l’activité chlore liquide, permettant ainsi une augmentation de sa marge à capacité de chlore constante.

(42)

Kem One entend aussi développer ses ventes en France et en Europe du Nord-Ouest pour la soude et le S-PVC de base.

(43)

Le plan de redressement prévoit un gain de [10-30] millions EUR d’ici à 2016, soit une progression d’environ [1-5]% du taux de marge brut sur chiffre d’affaires.

2. 4. 2.   Estimation des coûts de restructuration et financement du plan de restructuration

(44)

Les coûts de restructuration s’élèvent à 222 millions EUR: le projet de conversion des électrolyses de Lavéra ([150-210] millions EUR) et les forages de deux doublets à la saline de Vauvert ([15-30] millions EUR).

(45)

Afin de financer les coûts de restructuration, le plan prévoit les financements suivants:

Contributions privées (M EUR)

Contributions publiques (M EUR)

Autofinancement

[30-40]

Subventions

15

Prêt bancaire

[60-70] (7)

Avances remboursables

80

Financement [opérateur privé no 1]

[35-45]

Prêt FDES

30

Financement [opérateur privé no 2]

[40-50]

 

Augmentation de capital

10

Total

187,5

Total

125

Total des financements

312,5

(46)

Le financement de la restructuration est complété par des mesures d’abandons de créances de la part de créanciers privés, à hauteur de 158,8 millions EUR et de la part de créanciers publics, à hauteur de 37,8 millions EUR.

(47)

Enfin dans le cadre de la cession des titres de Kem One à K1 Group SAS, Kem One Trésorerie a reversé à Kem One, un montant de [10-19] millions EUR correspondant à la garantie dite SEVESO qui avait été constituée par le groupe Kem One Holding via Kem One Trésorerie pour les sites de Kem One en France lors de leur transfert par Arkema, en application de l’article L.515-8 du code de l’environnement (8) relatif aux installations classée pour la protection de l’environnement. Les autorités françaises ont précisé que si la libération et le transfert à Kem One du montant de la garantie SEVESO initialement constituée par le groupe Klesch ont un effet positif immédiat sur sa trésorerie, le montant correspondant n’a pas été comptabilisé comme un apport privé en raison du fait qu’il devra être progressivement affecté à la reconstitution desdites garanties financières.

2. 4. 3.   Le plan d’affaires de Kem One

(48)

Le plan d’affaires de Kem One couvre la période 2013-2017, avec un retour de l’entreprise à la viabilité dès 2017 sur la base d’hypothèses réalistes, selon les autorités françaises. Dans le scénario médian, Kem One retrouve un niveau de trésorerie satisfaisant dès 2014, un niveau de marge brute de [25-35]% du chiffre d’affaires dès 2017 et un niveau d’EBITDA de l’ordre de [4-12]% à partir de 2018, en ligne avec les références du secteur de la chimie des commodités.

(49)

L’amélioration de la viabilité résultera notamment des cinq mesures suivantes: des apports significatifs privés significatifs pour une reconstitution immédiate de la trésorerie; des investissements permettant de fiabiliser les opérations d’électrolyse et de forages à saline afin d’améliorer la compétitivité de l’entreprise; la renégociation de contrats d’accès aux matières premières et de plates formes industrielles; une restructuration interne associée à un plan de performance et de productivité et une révision de la politique commerciale du positionnement de Kem One sur le marché.

(50)

Les autorités françaises considèrent que les hypothèses retenues sont réalistes: les gains escomptés sont déjà actés par de nouveaux contrats; à l’exception des électrolyses, la taille des unités de CVM et de S-PVC se situe au niveau des meilleures unités concurrentes de l’Europe de l’Ouest; enfin les hypothèses de prix de marché n’anticipent pas une reprise de la demande ou une amélioration de l’équilibre offre/demande en PVC, pourtant prévue par les principaux consultants de la profession.

(51)

Le plan d’affaires prend aussi en considération des scénarios alternatifs. Dans le scénario pessimiste, les autorités françaises émettent l’hypothèse que des incidents répétés de production amputent la production et les ventes de [8-14]% par rapport au scénario médian ainsi que les coûts variables et les gains identifiés sur les contrats d’approvisionnement. L’EBITDA reste dégradée sur la période 2014-2016 ([1-5]% du chiffre d’affaires). La trésorerie retrouve un niveau satisfaisant dès la fin de 2014 mais ne permet pas à Kem One de réduire sa dette. Cependant, le retour à la viabilité à long terme est assuré même dans ce scénario grâce au projet de conversion des électrolyses.

(52)

Le scénario optimiste fait l’hypothèse d’une augmentation progressive des prix de vente du PVC de commodité et de la soude pour les prochaines années. Dans ce scénario, la trésorerie retrouve un niveau satisfaisant dès 2014 (+[40-70] M EUR). Le plan permet également à Kem One de financer certains de ses investissements ([300-600] millions EUR entre 2014-2020), de réduire sa dette sur la période 2017-2020 et de parvenir à un niveau d’EBITDA de [10-15]% à partir de 2018.

2. 5.   Appréciation des autorités françaises

2. 5. 1.   Évaluation de la présence d’aide

(53)

Les autorités françaises considèrent que les conditions du prêt FDES et en particulier le taux de rémunération prévu, correspondent à des conditions normales de marché. En effet, Kem One fournit des sûretés très élevés, couvrant un montant près de cinq fois supérieur au montant du prêt lui-même, qui sont complétées par des engagements de la part des repreneurs et de Kem One, pour réduire le risque d’insolvabilité de l’entreprise.

(54)

Les autorités françaises ont appliqué au prêt FDES la Communication de la Commission relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d’actualisation (9) (ci-après “la Communication de 2008”). Selon elles, dans la mesure où Kem One est une entreprise en difficulté au ses des lignes de 2004 et ne dispose pas de notation officielle par ailleurs, le risque de solvabilité de Kem One devrait être assimilé à la notation CCC. Les autorités françaises ont ensuite appliqué au taux de base [taux IBOR à un an (10)], une majoration de 400 points de base lorsque le niveau des sûretés offertes peut être qualifié d’élevé, c’est-à-dire lorsqu’il couvre un montant au moins égal à 70 % du montant du crédit. Cette formule conduit à une rémunération de 4,53 %. Pour mémoire, le taux du prêt FDES s’élève à 3,5 %.

(55)

Les autorités françaises considèrent cependant qu’il existe plusieurs circonstances de nature à justifier que le taux de 3,5 % prévu dans le projet de contrat de prêt corresponde à un taux de marché, même si ce taux est légèrement inférieur au taux indicateur résultant de la Communication de 2008. Tout d’abord, le risque d’insolvabilité de Kem One doit être relativisé pour plusieurs raisons: le consentement du prêt est strictement lié à la mise en ouvre effective du plan de redressement qui permet un retour à la viabilité de Kem One dès 2017; Kem One s’engage à appliquer une gestion financière solide visant à protéger les fonds consentis; le prêt pourra être déclaré immédiatement exigible en cas de manquement à l’une des obligations ou engagements des repreneurs ou de Kem One et enfin l’État bénéficiera de sûretés de premier rang consenti par Kem One sur son matériel et ses équipements et dont la valeur est de [10 0 0 00  000-14 0 0 00  000] EUR.

(56)

Dans ces conditions, les autorités françaises considèrent que le prêt FDES ne contient pas d’élément d’aide d’État. Dans l’hypothèse où la Commission devrait considérer que le prêt FDES constitue une aide, il y aurait lieu de considérer que l’élément d’aide contenu dans ce prêt correspond entre le taux d’intérêt de référence applicable majoré de 400 points de base et le taux d’intérêt auquel le prêt est octroyé, soit 1,03 %.

(57)

S’agissant des mesures de soutien financier au projet de conversion (projet SAM), soit la subvention de 15 millions EUR et les avances remboursables d’un montant de 80 millions, les autorités françaises évaluent l’élément d’aide de ces mesures à 29,4 millions EUR.

(58)

Enfin, en ce qui concerne l’abandon de créances fiscales et sociales au bénéfice de Kem One pour un montant de 37,8 millions EUR (correspondant à 90 % de leur totalité), les autorités françaises que cet abandon n’est pas susceptible de contenir des éléments d’aides d’État dès lors que le taux de renoncement correspondrait au taux moyen de renoncement des créanciers privés pour permettre le redressement de l’entreprise. L’État se comporterait donc comme l’ensemble des créanciers privés. Toujours selon les autorités françaises, les éventuels éléments d’aides ne pourraient correspondre qu’à la différence entre le niveau de renoncement finalement consenti, soit l’hypothèse de 90 % de la part rémissible, et le niveau de renoncement minimum accepté par l’ensemble des créanciers privés pour permettre le redressement et la continuation de l’entreprise, soit 70 %. Dans ce cas, l’équivalent aide de cette mesure s’élèverait au maximum à 8,4 millions EUR.

2. 5. 2.   Appréciation de la compatibilité des mesures de soutien public par les autorités françaises

(59)

Les autorités françaises considèrent que l’article 107, paragraphe 3, c) du TFUE, tel qu’interprété par les Lignes directrices communautaires concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté (11) (ci-après les “Lignes directrices de 2004”), constitue la base juridique appropriée pour apprécier la compatibilité des mesures en cause.

Eligibilité de Kem One aux aides à la restructuration

(60)

Les autorités françaises rappellent que le plan de redressement de Kem One accepté par le Tribunal de commerce, repose sur une continuation de l’activité de Kem One avec les mêmes actifs industriels et maintien de la force de travail. Les produits commercialisés seront les mêmes avant et après la reprise. Dans ces conditions, les autorités françaises considèrent que la société issue de la procédure judiciaire n’est pas une entreprise nouvelle.

(61)

De même lors de sa reprise par le groupe Klesch, les activités de Kem One correspondaient à des activités économiques préexistantes. Ces activités ont été filialisées par Arkema en 2012 afin de pouvoir être transférées au groupe Klesch. Il n’y a donc pas eu de rupture de continuité entre les activités économiques placées sous Kem One et celles exercées au sein d’Arkema avant leur filialisation.

(62)

En outre, à la date de la formalisation des conditions de l’intervention de l’État (le 17 décembre 2013), Kem One remplissait les conditions de soumission à une procédure collectivité et constituait une entreprise en difficulté en application du paragraphe 10 c) des Lignes directrices de 2004.

(63)

Les autorités françaises ont précisé que ni Kem One ni le groupe auquel elle appartient n’ont déjà bénéficié d’une aide au sauvetage ou à la restructuration.

Retour à la viabilité à long terme

(64)

Les autorités françaises considèrent que les différentes mesures de restructuration sont adaptées pour répondre aux différents facteurs qui ont conduit Kem One à des difficultés. Le plan de redressement permet de répondre de façon efficace à ces différents handicaps. Les anciens actionnaires de l’activité vinylique existante de Kem One ont réalisé des apports significatifs. D’autres opérateurs privés ont participé de manière significative à a restructuration financière de l’entreprise, sous forme de financements ou d’abandon de créances permettant la reconstitution de la trésorerie. Le plan de redressement s’appuie également sur des investissements importants visant à fiabiliser les opérations et à renforcer la compétitivité. Le plan prévoit également la renégociation des principaux contrats de Kem One pour l’approvisionnement des matières premières essentielles afin de rapprocher la structure des coûts de l’entreprise au niveau de ses concurrents. Il met en place une restructuration interne associée à un plan de performance et de productivité. Enfin la restructuration de Kem One passe par une révision de la politique commerciale et du positionnement de Kem One sur le marché.

(65)

Les autorités françaises considèrent également que le plan de restructuration permettra à Kem One de rétablir la viabilité à long terme de Kem One dans un délai raisonnable et sur la base d’hypothèses réalistes et prudentes. Les hypothèses de prix de marché retenues sont conformes à la conjoncture PVC et soude 2012 et 2013 et n’anticipent pas une reprise de la demande ou une amélioration de l’équilibre offre/demande en PVC, pourtant prévue par les principaux consultants de la profession.

(66)

Les autorités françaises ont également produit trois scénarios. Dans le scénario nominal, le plan de restructuration de Kem One lui permet de retrouver un niveau de marge brute de [25-35]% du chiffre d’affaires dès 2017 et un niveau d’EBITDA de [4-12]% à partir de 2018, en ligne avec les références du secteur de la chimie de commodités et un niveau de trésorerie satisfaisant dès la fin de l’exercice 2014 (+[40-70] millions EUR).

(67)

Dans le scénario pessimiste, Kem One perd en moyenne [25-30] millions EUR/an d’EBITDA par rapport au scénario nominal. Cependant grâce au démarrage du projet SAM en 2017, l’EBITDA rejoint des niveaux acceptables en fin de période ([5-10]% du chiffre d’affaires) et Kem One dégage un résultat net moyen de [8-14] millions EUR. Ainsi, le retour à la viabilité est assuré même dans un scénario pessimiste.

(68)

Dans le scénario optimiste proposé par les autorités françaises, l’hypothèse retenue d’augmentation des prix de vente du PVC et de la soude est de +[1-6]% par rapport au scénario nominal. Cela permet à Kem One de retrouver un niveau d’EBITDA de [10-15]% à partir de 2018, ce qui la positionne dans le niveau de profitabilité moyen, et de retrouver un niveau de trésorerie satisfaisant dès la fin de l’exercice 2014 (+[40-70] millions EUR).

(69)

Enfin, les autorités françaises précisent qu’elles se sont basées sur les études de marché du PVC publiées par IHS, qui font référence. Selon ces études, le marché européen du PVC devrait croître à un rythme annuel moyen de 1,7 % entre 2013 et 2018, pour passer de 4020 kt à 4366 kt (12).

Prévention de toute distorsion excessive de la concurrence

(70)

Tout d’abord, les autorités françaises considèrent que les éventuels effets de distorsion pour les concurrents susceptibles de découler des mesures d’aide sont d’une ampleur limitée.

(71)

Les parts de marché de Kem One sur les marchés sont relativement faibles et il existe plusieurs concurrents plus importants que Kem One. L’élément d’aide contenu dans le prêt FDES est faible (1,03 %). Ce soutien public ne pourra pas être utilisé pour financer les activités commerciales de Kem One ou des investissements qui ne seraient indispensables au retour à la viabilité. De même, les autres mesures de soutien sont liées exclusivement au financement du projet d’investissement SAM indispensable pour assurer le retour à la viabilité de l’entreprise à long terme.

(72)

Les autorités considèrent en outre que les effets négatifs de l’aide sont très largement compensés par les effets positifs sur la structure de la concurrence sur les marchés du S-PVC et du E-PVC par rapport au scénario contrefactuel en l’absence d’aide.

(73)

Toujours selon elles, la disparition de Kem One renforcerait le niveau de concentration du marché et conduirait à un affaiblissement de l’intensité de la concurrence entre les acteurs restants. Elle entraînerait une réduction significative de la capacité disponible pour la production de S-PVC de base en Europe de l’Ouest et du Nord-Ouest et limiterait sensiblement les possibilités pour les clients de Kem One de continuer à mettre en œuvre une politique d’approvisionnement diversifiée.

(74)

Par ailleurs, elles considèrent que les importations ne sont pas de nature à exercer une contrainte suffisante sur le comportement concurrentiel des fournisseurs de S-PVC de base ne Europe de l’Ouest en raison de plusieurs barrières naturelles (délais de transport, niveau des droits de douane des importations en provenance des États-Unis…).

(75)

Dans ce contexte, les autorités françaises considèrent que l’imposition des mesures compensatoires visant à limiter la présence de Kem One aurait pour effet d’entraîner une détérioration de la structure et de l’intensité de la concurrence au préjudice des clients. Il n’existe pas de schéma équilibré et performant qui permettrait de scinder les actifs de Kem One nécessaires aux activités amont et aval, au bénéfice soit d’un nouvel entrant, soit d’opérateurs déjà présents sur le marché. Une telle scission aboutirait au démantèlement de l’entreprise et compromettrait son retour à la viabilité. Par ailleurs, les différents acteurs vinyliques présents en Europe sont déjà intégrés verticalement et sont déjà proches de l’équilibre entre capacités amont et aval.

(76)

Les autorités françaises en concluent que les seules mesures compensatoires envisageables seraient des mesures de réduction de la capacité ou de la présence commerciale de Kem One sur les marchés du PVC. Cependant, selon elles, compte-tenu de la structure déjà oligopolistique des marchés en cause, de telles mesures entraîneraient une réduction de la pression concurrentielle sur le comportement des autres acteurs présents sur ces marchés et donc un affaiblissement significatif de la structure concurrentielle préexistante. Ce type de mesures aurait également un impact défavorable sur le retour à la viabilité. Celui-ci dépend essentiellement du maintien d’une chaîne de production verticalement intégrée présentant un équilibre entre les capacités des deux sites en amont et celles des cinq sites avals.

(77)

En outre, les autorités françaises justifient l’absence de mesures compensatoires par la finalité environnementale de la plupart des mesures de soutien public. Elles s’appuient sur la pratique décisionnelle de la Commission pour considérer que des mesures pouvaient être compatibles si leur octroi était absolument nécessaire à la prévention de dommages environnementaux et à condition qu’elles n’entraînent pas une augmentation des capacités.

(78)

Enfin, la préservation des emplois et du secteur chimique en France constitue le dernier argument des autorités françaises pour justifier l’absence de mesures compensatoires. Selon les estimations faites par les syndicats, les pertes d’emploi par effet domino pourraient atteindre jusqu’à 25  000 emplois. Les autorités françaises soulignent également que la Commission a déjà reconnu dans plusieurs décisions le rôle systémique que peut jouer une entreprise dans une région ou un secteur économique et le caractère d’objectif d’intérêt commun d’une aide.

Limitation de l’aide: contribution réelle, exempte d’aide

(79)

Les autorités françaises évaluent les contributions privées (Kem One, repreneurs, partenaires et créanciers) à 356,3 millions EUR, soit 68,6 % de la totalité des contributions.

III   APPRÉCIATION DES MESURES

3. 1.   Évaluation de la présence d’aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE

(80)

La Commission doit examiner si les mesures notifiées sont susceptibles de constituer une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1 TFUE.

(81)

Selon l’article 107, paragraphe 1, TFUE sont “incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions”.

(82)

Sur la base de cette disposition, la Commission considère que la qualification d’une mesure publique en tant qu’aide d’État suppose que les conditions cumulatives suivantes soient remplies, à savoir: (i) que la mesure en question confère un avantage économique à son bénéficiaire (ii) que cet avantage ait une origine étatique (iii) que cet avantage soit sélectif et (iv) que la mesure en cause fausse ou menace de fausser la concurrence et soit susceptible d’affecter les échanges entre États membres.

3. 1. 1.   Présence de ressources d’État et critère de l’imputabilité

(83)

La première mesure consiste en un prêt octroyé par le fonds de développement économique et social par arrêté du ministre de l’économie et des finances et dont l’exécution est confiée au directeur général du Trésor. La loi de finances 2014 a doté le fonds d’un budget de 300 millions EUR. Il est utile de préciser que le FDES, dotée d’une personnalité juridique différente de celle de l’État, ne peut être assimilé à un fonds géré avec une obligation d’équilibre financier entre les remboursements en capital et leur utilisation pour de nouvelles interventions. Les prêts du FDES sont réalisés à travers un compte spécial du Trésor et constituent les dépenses du compte. Les intérêts des prêts sont versés quant à eux le budget général de l’État. La doctrine d’emploi du FDES s’appuie toujours sur la circulaire du 26 novembre 2004 (13) relative à l’action de l’État dans la prévention et le traitement des difficultés des entreprises, mais cible plus particulièrement les entreprises de taille intermédiaire (14) souvent en procédure collective. L’octroi des prêts FDES fait toujours l’objet d’un examen au cas par cas. Ils ne font pas l’objet d’une attribution automatique en fonction de critères précédemment établis.

(84)

Le prêt FDES, les subventions, les avances remboursables et l’abandon de créances fiscales et sociales sont consentis au moyen de ressources publiques et octroyés par des décisions prises par l’État.

3. 1. 2.   Critère de la sélectivité

(85)

Les mesures sous examen sont prévues de façon ad hoc, exclusivement en faveur de Kem One, devenue K1 pour les besoins de la reprise.

3. 1. 3.   Présence d’un avantage économique

Le prêt FDES

(86)

Un avantage économique existe dès lors que la situation financière d’une entreprise est améliorée du fait de l’intervention de l’État. Cependant, l’intervention d’une autorité publique ne confère pas un avantage à leur bénéficiaire et, de ce fait, ne constitue pas une aide si elle est réalisée dans des conditions normales de marché, c’est-à-dire si l’autorité publique s’est comportée comme un opérateur en économie de marché l’aurait fait en pareille situation.

(87)

La Commission ne partage pas à ce stade l’analyse des autorités françaises sur le caractère en partie non aide des mesures. En effet, au vu des informations transmises par les autorités françaises, la Commission émet les doutes suivants sur le caractère avisé de l’octroi du prêt FDES et des autres mesures.

(88)

La Commission s’interroge tout d’abord sur les conditions du prêt FDES. En ce qui concerne les sûretés, le prêt FDES bénéficie d’une garantie de premier rang sur le matériel et/ou ses équipements. Les autorités françaises considèrent que la valeur nette comptable inscrites dans les comptes arrêtés au 31 décembre 2013, reflètent la valeur réelle des actifs compte tenu de la validation des commissaires et de l’absence de circonstances exceptionnelles.

(89)

La Commission émet plusieurs réserves sur l’estimation de la valeur des sûretés. Tout d’abord, les autorités françaises ne précisent pas quels matériels et quels équipements sont gagés. Seule leur valeur globale égale à la valeur nette comptable, soit [10 0 0 00  000-14 0 0 00  000] EUR, est indiquée. Or, la valeur nette comptable d’un actif ne peut être assimilée à son prix de marché, en particulier lorsque l’entreprise concernée est en procédure collective. La Commission note également que le caractère vieillissant et sous-performant voire obsolète de certains outils de production est présenté par les autorités françaises comme un des principales difficultés de Kem One; c’est le cas notamment des électrolyses à mercure et diaphragme. Par conséquent, la Commission s’interroge sur la valeur réelle des équipements et matériels gagés et doute que la valeur nette comptable retenue pour l’estimation des sûretés soit la valeur la plus pertinente, notamment en comparaison avec l’alternative qui reviendrait à estimer la valeur des gages en fonction des recettes nettes que leur exploitation peut dégager. Le fait que le gage soit de premier rang ne suffit pas à compenser une sous-estimation éventuelle de la valeur des sûretés. Dans ces conditions, une majoration de 400 points de base afin de calculer la rémunération du prêt, apparaît insuffisante. La Commission invite donc les autorités françaises à lui communiquer la liste des actifs gagés et à démontrer que leur valeur comptable correspond à leur valeur de marché.

(90)

La Commission a également des doutes sur les conditions de rémunération du prêt. Les autorités françaises, en appliquant la Communication sur les taux de référence de 2008, parviennent à une rémunération de 4,53 % mais ont retenu un taux de 3,5 % pour les raisons évoquées au paragraphe 2. 5. ci-dessous. La Commission considère au contraire que la majoration concernant la qualité des sûretés étant insuffisante, le taux devrait se situer plutôt dans la fourchette entre 6,53 % et 10,53 % (15). Les raisons invoquées par les autorités françaises, à savoir le faible risque d’insolvabilité de Kem One et la qualification du niveau des sûretés ne justifient pas un taux inférieur. En effet, le fait que l’octroi du prêt soit strictement lié à la mise en œuvre effective du plan de redressement et que Kem One s’engage à appliquer une gestion financière solide constituent des obligations et des contreparties habituelles à une mesure de restructuration. Elles ne justifient pas une rémunération inférieure à un taux de marché.

(91)

Comme les autorités françaises le rappellent, la Commission admet que la méthode utilisée par la Communication ne sert que d’indicateur pour l’évaluation d’un taux de marché. La Communication ne saurait donc lier la Commission dans son application du principe de l’opérateur privé en économie de marché, notamment dans les cas où des données réelles de marché sont disponibles et sont manifestement différentes de celles résultant de la méthodologie énoncée dans ladite communication.

(92)

Par conséquent, une approche alternative à la méthodologie décrite dans la Communication et plus axée sur le marché a également été envisagée. Selon cette approche, un prêt peut être considéré comme ne constituant pas une aide s’il est rémunéré à un taux égal ou plus élevé que le taux de référence défini par un taux de base (16) majoré d’une prime de risque et des frais au bénéfice du prêteur. La méthodologie basée sur les données Bloomberg et Capital IQ aboutit à un taux de 20,95 %. Ce calcul a été obtenu sur la base d’un taux de swap EUR de 4 ans utilisé comme taux de base et une marge de risque, qui se traduisent par le second quartile d’un échantillon de sociétés pour lesquelles des contrats de CDS 4 ans se négocient. L’échantillon retenu est composé de 10 exemples de sociétés en Europe et aux États-Unis ayant une notation dans la catégorie CCC à la date de l’octroi du prêt. La formule suivante a été appliquée: taux de base + marge de risque + frais et aboutit au résultat suivant: 0,76 % + 19,99 % + 0,2 % = 20,95 %.

(93)

La Commission invite par conséquent les autorités françaises à produire leurs observations sur ces deux méthodologies ainsi que sur toute autre méthodologie proposée par ces dernières. La Commission note également qu’en l’absence de prêt octroyé à KEM ONE par une banque privée dans les mêmes conditions, dans le contexte des difficultés et de la restructuration de l’entreprise, l’intégralité du prêt pourrait être considérée, à ce stade de la procédure, comme le montant d’aide.

Les subventions (15 millions EUR) et avances remboursables (80 millions EUR)

(94)

Les autorités françaises considèrent que seule une partie de la totalité de ces mesures, à savoir 29,4 millions EUR est un élément d’aide.

(95)

La Commission est d’avis qu’une subvention constitue un avantage économique que le bénéficiaire n’obtiendrait pas à des conditions de marché. En effet, une subvention est un instrument financier dont le capital n’est pas remboursable et qui ne génère pas d’intérêt à payer par le bénéficiaire. Il est donc exclu qu’un prêteur privé, qui a un coût de financement et doit rémunérer son capital, accepte de financer une entreprise par des subventions. S’agissant des avances remboursables, la Commission note que la présence de certaines conditions liées à leur octroi qu’un prêteur privé n’aurait vraisemblablement pas exigées. Il s’agit notamment de la condition relative au maintien de l’activité et des emplois sur le site de Lavéra pendant les cinq ans qui suivent la réalisation du projet, sauf si la pérennité de Kem One le justifiait et après accord préalable de l’État. En outre, en l’absence de la démonstration par les autorités françaises que des prêteurs privés auraient été disposés à prêter un tel montant dans les mêmes conditions à une entreprise en difficulté, la Commission considère à ce stade de la procédure, que la totalité des avances remboursables doit être considérée comme aide.

(96)

Les autorités françaises mentionnent l’éventualité d’un prêt bancaire de [60-70] millions mais celui-ci reste à ce stade une hypothèse. Aucun contrat ou lettre d’engagement d’un prêteur privé n’ont été produits. Dans la notification, les autorités française reconnaissent d’ailleurs que: “Kem One ne serait pas en mesure de réaliser la totalité de cet investissement (le projet SAM) sans l’aide de l’État.”

L’abandon des créances fiscales et sociales (42 millions EUR)

(97)

Les autorités françaises considèrent que 90 % de ces dettes peuvent faire l’objet d’un abandon. Pour cela, elles rappellent que les créanciers privés ont accepté d’abandonner leur créance à hauteur de 70 % au minimum; certains ont même abandonné la totalité de leur créance. Par conséquent, les autorités françaises considèrent que l’État se comporterait comme l’ensemble des créanciers privés s’il renonçait à ses créances rémissibles à hauteur de 90 %.

(98)

La Commission note que les autorités françaises n’invoquent que le caractère pari passu de la mesure mais ne soulèvent aucun argument relatif au principe du créancier privé en économie de marché.

(99)

La Commission observe tout d’abord que les pourcentages d’abandons des dettes n’est pas le même entre les créanciers privés (70 %) et les créanciers publics (90 %).

(100)

Par ailleurs, il n’est pas certain que l’État soit placé dan les mêmes conditions que les créanciers privés qui entretiennent des relations anciennes avec Kem One. Les partenaires industriels connaissent leur client et sont indispensables au fonctionnement de l’entreprise et à sa continuation. Ils ont donc intérêt à rester impliqués dans l’entreprise et donc à consentir un abandon partiel de créances, contrairement à un créancier purement financier dont le seul objectif est de récupérer sa créance.

(101)

Par ailleurs, s’agissant du principe du créancier privé en économie de marché, un abandon de créances constitue a priori une aide puis qu’il avantage une entreprise vis-à-vis de ses concurrents en allégeant ses charges. Cela est d’autant plus vrai lorsque l’entreprise est en difficulté et en procédure collective. En l’espèce, la Commission s’interroge sur les motivations de cet abandon de créances fiscales et sociales qui auraient contribué à privilégier l’offre d’un repreneur. À ce stade de la procédure et à la lumière des éléments ci-dessus, la Commission n’écarte pas la possibilité que le montant d’aide soit égale au montant total de l’abandon envisagé.

3. 1. 4.   Affectation de la concurrence et des échanges entre États membres

(102)

Les mesures de soutien public favorisent Kem One en lui fournissant des ressources financières additionnelles et en lui évitant de cesser ses activités. Elles lui permettent en effet de conserver une position concurrentielle plus forte que celle qu’elle aurait eue en l’absence d’aide. Elles menacent donc de fausser la concurrence entre les opérateurs présents dans le secteur du PVC et sur le marché de la production de chlore et de soude.

(103)

Par ailleurs, ces différents secteurs sont caractérisés par des échanges commerciaux importants entre les États membres sur le territoire européen. Le marché du PVC est relativement concentré: cinq opérateurs dont Kem One représentent 90 % du marché, Kem One se situant au troisième rang européen des producteurs de S-PVC. La Commission a déjà eu l’occasion de considérer que la dimension géographique de ce marché recouvre au moins l’Europe du Nord-Ouest, ce qui implique des conditions de concurrence relativement homogènes dans cet espace (17). Par conséquent, l’avantage accordé par les mesures sous examen à une entreprise active sur un marché ouvert à la concurrence et relativement concentré est de nature à pouvoir fausser la concurrence et à affecter les échanges entre États membres.

Conclusion quant à la présence d’aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE

(104)

À ce stade, la Commission conclut que l’ensemble des mesures sous examen semble constituer des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE.

3. 2.   Analyse de la compatibilité des mesures

(105)

L’interdiction des aides d’État prévue à l’article 107, paragraphe 1, TFUE n’est ni absolue, ni inconditionnelle. En particulier, les paragraphes 2 et 3 de l’article 107 du TFUE constituent des bases juridiques permettant de considérer certaines aides comme compatibles avec le marché intérieur. En l’espèce, la Commission considère que les aides ont été octroyées dans le but de restaurer la viabilité à long terme d’une entreprise en difficulté. L’ensemble des aides a été consenti à Kem One. Une nouvelle société, K1 Group SAS, a été constituée pour acquérir et détenir les titres de Kem One conformément au plan de continuation et de redressement validé par le tribunal. À ce stade de la procédure, K1 assure donc la continuité économique avec Kem One. La compatibilité de ces aides doit être analysée à la lumière des Lignes directrices de 2004.

(106)

Malgré l’entrée en vigueur le 1er août 2014, des nouvelles Lignes directrices concernant les aides au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté, les mesures en l’espèce seront analysées à l’aune des Lignes directrices de 2004. Même si certaines d’entre elles n’ont pas encore été octroyées à la date de la notification, à savoir le 30 juillet 2014, toutes les mesures envisagées ont fait l’objet d’un engagement ferme qui a pris la forme d’une lettre des ministres de l’économie et des finances et du redressement productif datée du 17 décembre 2013 et qui a été adressée à l’administrateur judiciaire désigné par le tribunal de commerce. Par ailleurs, il ressort du considérant 1 que ces mesures ont été notifiées à la Commission en juillet 2014. En vertu donc du point 136 des nouvelles Lignes Directrices, les Lignes Directrices de 2004, en vigueur lors de cette notification, sont applicables.

(107)

Par conséquent, il convient d’analyser si les mesures sous examen pourraient être considérées comme compatibles sur la base de l’article 107, paragraphe 3, TFUE, en application des critères indiqués dans les Lignes directrices de 2004

3. 2. 1   Le plan de restructuration de Kem One

Egibilité de Kem One aux aides à la restructuration

(108)

La Commission ne conteste pas les conditions d’éligibilité de Kem One aux Lignes directrices de 2004 invoquées par les autorités françaises. En redressement judiciaire depuis le 27 mars 2013, Kem One remplit les critères du point 10 c) des Lignes directrices de 2004.

Le retour à la viabilité à long terme

(109)

La Commission observe tout d’abord que les autorités françaises n’incluent dans les coûts de la restructuration que les coûts liés à la modernisation de l’appareil productif (projet de conversion des électrolyses de Lavéra ([150-210] millions EUR) et forages de deux doublets à la saline de Vauvert ([15-30] millions EUR)]. La Commission considère que la restructuration interne de Kem One doit nécessairement engendrer des coûts supplémentaires liés à chaque mesure de restructuration décrite au paragraphe 2.4.1, à savoir la réduction des frais de structure et la réorientation de la politique commerciale. Elle invite donc les autorités françaises à commenter ce point.

(110)

Par ailleurs, elle observe que le scénario nominal, s’agissant du rétablissement de la trésorerie, ne laisse qu’un faible excédent de trésorerie à la fin de la clôture en 2020. Les résultats de trésorerie sont bien plus dégradés dans le scénario pessimiste dans lequel la trésorerie affiche un montant négatif de [100-150] millions EUR en 2020. Dans ces conditions, la Commission s’interroge sur le retour à la viabilité de Kem One à long terme.

(111)

Par ailleurs, la Commission observe que les trois scénarios intègrent l’obtention d’un prêt bancaire de [60-70] millions EUR en 2016 auprès d’établissements financiers privés. Or, à ce stade, les autorités françaises ne semblent disposer d’aucune garantie sur l’obtention de ce prêt. Cette incertitude fragilise le caractère réaliste des trois scénarios.

(112)

Enfin, la Commission souhaiterait que les autorités françaises précisent le point de départ et la fin de la période de restructuration. Parfois les autorités françaises mentionnent les années 2013 ou 2014 comme étant le point de départ et les années 2017 ou 2018 ou 2020, comme étant la fin de la restructuration.

Prévention de toute distorsion excessive de la concurrence

(113)

Les autorités françaises considèrent qu’il n’y a pas lieu en l’espèce d’imposer des mesures compensatoires à Kem One. Elles le justifient tout d’abord en application du principe mentionné au point 39 des Lignes directrices de 2004, selon lequel des mesures compensatoires ne doivent pas détériorer la structure du marché, notamment en créant une situation d’oligopole étroit.

(114)

Or la Commission ne partage pas cette opinion. Le point 39 ne justifie pas l’absence définitive de toutes mesures compensatoires. Il invite au contraire la Commission à tenir compte de la structure du marché et des conditions de concurrence afin d’éviter un effet indirect de création d’une situation de monopole ou d’oligopole étroit, pour adapter au mieux les mesures compensatoires et non pour justifier leur absence. Même dans le cas où l’État membre pourrait prouver qu’une telle situation se produirait, ce qui, à ce stade, n’est pas acquis en l’espèce, le point 39 invite la Commission à définir les contreparties de l’aide de manière à l’éviter et non à dispenser l’État membre d’imposer des mesures compensatoires.

(115)

Par ailleurs, la Commission entend bien le deuxième argument des autorités françaises, à savoir que les effets de distorsion susceptibles de découler pour les concurrents des mesures de soutien public sont d’une ampleur limitée. Cet argument est repris dans le pont 40 des Lignes directrices: “Les contreparties doivent être en proportion des effets de distorsion causés par l’aide, et notamment de la taille et du poids relatif de l’entreprise sur son ou les marchés sur lesquels elle opère.” Le point 40 invite donc la Commission à tenir compte de l’ampleur limitée des effets de distorsion lorsqu’elle analyse les mesures compensatoires mais ne justifie pas leur absence.

(116)

Les autorités françaises invoquent ensuite la “théorie de l’entreprise défaillante” élaborée par la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre du contrôle des concentrations (18) pour justifier le bien-fondé de l’absence de mesures compensatoires. Selon cette théorie, la reprise par un concurrent d’une entreprise en difficulté peut être autorisée sans conditions lorsqu’il apparaît que les effets résultant de l’opération ne sont pas plus défavorables que ceux qui résulteraient de la disparition de l’entreprise en difficulté. Or, en l’espèce, ce n’est pas la disparition de KEM ONE qui est en jeu, mais la compensation partielle, au moyen de mesures compensatoires effectives, des effets de distorsion de l’aide.

(117)

Les autorités françaises considèrent également que l’imposition de mesures compensatoires structurelles compromettrait le retour à la viabilité à long terme de Kem One.

(118)

La Commission note que cette condition est reprise par le point 38 des Lignes directrices: “La Commission prendra en compte l’objectif de retour à la viabilité à long terme lors de la détermination de l’adéquation des mesures compensatoires.” Le point 38 ne dispense donc pas l’État membre d’imposer des mesures compensatoires et invite encore une fois la Commission à les analyser à l’aune du retour à la viabilité à long terme de l’entreprise afin de ne pas le compromettre.

(119)

Les autorités françaises font observer que la Commission, dans sa pratique décisionnelle, a déjà pris en compte la compatibilité des aides en faveur de la protection de l’environnement dans le cadre d’un plan de restructuration (19). Or, toujours selon les autorités françaises, la majorité des mesures sert à financer le projet SAM qui permettra à Kem One d’améliorer le niveau de protection de l’environnement et d’économiser de l’énergie.

(120)

La Commission souhaite préciser que dans la décision précitée, elle a imposé comme condition de compatibilité l’absence d’augmentation des capacités. Or cette condition constitue bien une mesure compensatoire. Encore une fois, l’analyse de la Commission s’efforce de tenir compte des spécificités de chaque cas mais ne peut accepter l’absence de mesures compensatoires. Par ailleurs, invoquer les objectifs d’une autre réglementation de l’Union européenne, en matière d’environnement en l’espèce, ne peut aboutir à un contournement des règles communautaires en matière d’aide d’État et ne peut donc dispenser les États membres d’imposer des mesures compensatoires à une entreprise à laquelle ils octroient une aide à la restructuration.

(121)

Enfin, la préservation des emplois directs et la contribution de Kem One au secteur chimique en France ne peuvent justifier non plus l’absence de mesures compensatoires.

(122)

La Commission souhaite rappeler que la présence de mesures compensatoires constitue un des critères de compatibilité d’une aide à la restructuration. Elle invite par conséquent les autorités françaises à lui proposer des mesures compensatoires susceptibles de prendre en compte l’ensemble de leurs arguments.

Limitation de l’aide: contribution réelle, exempte d’aide

(123)

La Commission émet des doutes sur les données prises en compte par les autorités françaises pour calculer le montant de la contribution propre, et, partant, sur le respect de la règle selon laquelle la contribution propre d’une grande entreprise aux coûts de sa restructuration doit représenter 50 % du montant total.

(124)

En effet, elles incluent dans les contributions un prêt de [60-70] millions EUR. Les autorités françaises n’ont produit aucun engagement ferme d’un quelconque établissement financier privé disposé à prêter cette somme. Ce prêt reste donc hypothétique et ne semble pas satisfaire à la condition d’effectivité réelle de la contribution propre du bénéficiaire précisée dans les Lignes directrices de 2004. Par conséquent, la Commission considère qu’il n’est pas justifié de le prendre en compte dans le calcul.

(125)

La Commission considère que les contributions privées s’élèveraient à un total de 132,4 million EUR selon le tableau ci-dessous.

Auto-financement de Kem One

[30-40]

Financement [Opérateur privé 1] (20 + 20,5)

[35-45]

Financement [opérateur privé 2]

[40-50]

Augmentation de capital des repreneurs

10

Désintéressement des créances d’[opérateur privé 3]

[0-10]

Total en millions EUR

132,4

(126)

La Commission considère en effet que les abandons de créances de la part des partenaires privés ne doivent pas être pris en compte car elles ne constituent pas véritablement un flux financier au profit de Kem One. En outre, elles ne reflètent pas la croyance des investisseurs privés en la poursuite de l’activité d l’entreprise, contrairement à des interventions sous forme de prise de participation ou d’augmentation de capital qui traduisent davantage leur implication dans le retour à la rentabilité de l’entreprise concernée. Un abandon de créances ne traduit pas en effet la volonté d’un investisseur d’assumer de nouveaux risques liés à l’exécution du plan de restructuration.

(127)

Les contributions publiques s’élèvent à 162,8 millions EUR. Par conséquent, à ce stade la procédure, la Commission constate que les contributions privées sont inférieures aux contributions publiques.

Principe de non-récurrence

(128)

La Commission prend note que les autorités françaises ont déclaré que ni Kem One ni le groupe auquel elle appartiendra n’ont déjà bénéficié d’une aide au sauvetage ou à la restructuration dans le passé.

IV   RÉSUMÉ DES DOUTES DE LA COMMISSION

(129)

La Commission invite les autorités françaises et toute partie intéressée à produire leurs observations et éclaircissements sur les points suivants:

la conformité du prêt FDES et des autres mesures aux principes de l’investisseur et/ou du prêteur avisé en économie de marché (en particulier, s’agissant des niveaux de rémunération et de sûretés du prêt FDES) ainsi que sur la quantification de l’élément d’aide pour chaque mesure;

la compatibilité de ces mesures avec les Lignes directrices de 2004 et en particulier la Commission souhaite obtenir des propositions de mesures compensatoires et des clarifications sur le calcul de la contribution propre et sur certains aspects du retour à la viabilité à long terme de l’entreprise.

Compte tenu des considérations qui précédent, la Commission invite la France, dans le cadre de la procédure de l’article 108, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, à présenter ses observations et à fournir toute information utile pour l’évaluation des mesures dans un délai d’un mois à compter de la date de réception de la présente. Elle invite vos autorités à transmettre immédiatement une copie de cette lettre au bénéficiaire potentiel de l’aide.

La Commission rappelle à la France l’effet suspensif de l’article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et se réfère à l’article 14 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil qui prévoit que toute aide illégale pourra faire l’objet d’une récupération auprès de son bénéficiaire.

Par la présente, la Commission avise la France qu’elle informera les intéressés par la publication de la présente lettre et d’un résumé de celle-ci au Journal officiel de l’Union européenne. Elle informera également les intéressés dans les pays de l’AELE signataires de l’accord EEE par la publication d’une communication dans le supplément EEE du Journal officiel, ainsi que l’autorité de surveillance de l’AELE en leur envoyant une copie de la présente. Tous les intéressés susmentionnés seront invités à présenter leurs observations dans un délai d’un mois à compter de la date de cette publication.»


(1)  Informations confidentielles.

(2)  Le chlore est utilisé pour la fabrication du chlorure de vinyle monomère (CVM) utilisé à son tour pour la fabrication du PVC.

(3)  L’administrateur judiciaire a été désigné par le Tribunal de commerce de Lyon lors du jugement du 27 mars 2013 prononçant l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire à l’encontre de Kem One.

(4)  JORF du 1.12.2004.

(5)  D’après la définition retenue par l’Institut national de la statistique et des études économiques, une entreprise de taille intermédiaire est une entreprise qui a entre 250 et , salariés, et soit une chiffre d’affaires n’excédant pas 1,5 milliard EUR, soit un total de bilan n’excédant pas 2 milliards EUR. Une entreprise qui a moins de 250 salariés, mais plus de 50 millions EUR de chiffre d’affaires et plus de 43 millions EUR de total de bilan est aussi considérée comme une entreprise de taille intermédiaire.

(6)  “Une modification substantielle dans les objectifs ou les moyens du plan ne peut être décidée que par le tribunal, à la demande du débiteur et sur le rapport du commissaire à l’exécution du plan. Lorsque la situation du débiteur permet une modification substantielle du plan au profit des créanciers, la saisine du tribunal peut émaner du commissaire à l’exécution du plan.”

(7)  La décision de souscrire cet emprunt sera prise en fonction du cash-flow généré par Kem one en 2014 et 2015.

(8)  “Lorsqu’une demande d’autorisation concerne une installation classée à implanter sur un site nouveau et susceptible de créer, par danger d’explosion ou d’émanation de produits nocifs, des risques très importants pour la santé ou la sécurité des populations voisines et pour l’environnement, des servitudes d’utilité publique peuvent être instituées concernant l’utilisation du sol ainsi que l’exécution de travaux soumis au permis de construire.”

(9)  JOUE C 14 du 19.1.2008, p. 6.

(10)  Le taux IBOR à un an s’élève à o,53 %pour la France depuis janvier 2014.

(11)  JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

(12)  2014IHS World Vinyls — Analysis, p. 169 e 179.

(13)  JORF du 1.12.2004.

(14)  D’après la définition retenue par l’Institut national de la statistique et des études économiques, une entreprise de taille intermédiaire est une entreprise qui a entre 250 et 4999 salariés, et soit une chiffre d’affaires n’excédant pas 1,5 milliard EUR, soit un total de bilan n’excédant pas 2 milliards EUR. Une entreprise qui a moins de 250 salariés, mais plus de 50 millions EUR de chiffre d’affaires et plus de 43 millions EUR de total de bilan est aussi considérée comme une entreprise de taille intermédiaire.

(15)  Application de la majoration de 600 points de base pour un niveau de sûretés qualifié et de 1000 points de base pour un niveau de

(16)  Le taux de base reflète la référence avec laquelle les investisseurs mesurent le coût de leur financement.

(17)  M.6218 — Ineos/Tessenderlo Group S-PVC Assets, décision de la Commission du 26/07/2011 ou M.6905 — Ineos/Solvay/JV, décision de la Commission du 06/05/2014.

(18)  Décision de la Commission du 14 décembre 1993, IV/M.38 Kali und Salz/Mdk/Treuhand, points 70 et ss., confirmé par la Cour de justice, sur pourvoi, dans son arrêt du 31 mars 1998, affaires jointes C-68/94 et C-30/95 P, France et Société commerciale de potasses et de l’azote (SCPA) et Enterprise minière et chimique (EMC) c. Commission, Rec., 1998, p. I-1375, points 113-124, voir plis récemment décision de la Commission dans l’affaire COMP/M.6360 — NYAS/SHELL/HARBURG REFINERY du 2 septembre 2013.

(19)  Décision de la Commission du 29 mai 1996 relative à l’aide proposée par l’Allemagne pour Buna GmbH, Sächsische Olefinwerke GmbH, Leuna-Werke GmbH, Leuna-Polyolefine et BSL Polyolefinverbund GmbH, paragraphe 11.3.


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