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Document 62010CO0273

    Ordonnance de la Cour (sixième chambre) du 18 mars 2011.
    David Montoya Medina contre Fondo de Garantía Salarial et Universidad de Alicante.
    Demande de décision préjudicielle: Tribunal Superior de Justicia de la Comunidad Valenciana - Espagne.
    Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure - Politique sociale - Directive 1999/70/CE - Clause 4 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée - Contrats de travail à durée déterminée dans le secteur public - Droit aux primes triennales d’ancienneté - Principe de non-discrimination.
    Affaire C-273/10.

    Recueil de jurisprudence 2011 I-00032*

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2011:167

    ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

    18 mars 2011 (*)

    «Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure − Politique sociale – Directive 1999/70/CE − Clause 4 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée – Contrats de travail à durée déterminée dans le secteur public – Droit aux primes triennales d’ancienneté – Principe de non-discrimination»

    Dans l’affaire C‑273/10,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de la Comunidad Valenciana (Espagne), par décision du 14 mai 2010, parvenue à la Cour le 1er juin 2010, dans la procédure

    David Montoya Medina

    contre

    Fondo de Garantía Salarial,

    Universidad de Alicante,

    LA COUR (sixième chambre),

    composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. A. Ó Caoimh (rapporteur) et Mme P. Lindh, juges,

    avocat général: Mme E. Sharpston,

    greffier: M. A. Calot Escobar,

    la Cour se proposant de statuer par voie d’ordonnance motivée conformément à l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure,

    l’avocat général entendu,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la clause 4 de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999 (ci-après l’«accord-cadre»), qui figure en annexe à la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO L 175, p. 43).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Montoya Medina au Fondo de Garantía Salarial (fonds de garantie des salaires) et à l’Universidad de Alicante (université d’Alicante) quant au refus de lui octroyer des primes triennales d’ancienneté, prévues pour chaque période de trois années de service accomplie.

     Le cadre juridique

     La réglementation de l’Union

    3        Aux termes de l’article 1er de la directive 1999/70, celle-ci vise «à mettre en œuvre l’accord-cadre […], figurant en annexe, conclu […] entre les organisations interprofessionnelles à vocation générale (CES, UNICE, CEEP)».

    4        Aux termes de la clause 1 de l’accord-cadre, celui-ci a pour objet:

    «a)      d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination;

    b)      d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.»

    5        La clause 2, point 1, de l’accord-cadre est libellée comme suit:

    «Le présent accord s’applique aux travailleurs à durée déterminée ayant un contrat ou une relation de travail défini par la législation, les conventions collectives ou les pratiques en vigueur dans chaque État membre.»

    6        Un travailleur à durée déterminée est défini à la clause 3, point 1, de l’accord-cadre comme «une personne ayant un contrat ou une relation de travail à durée déterminée conclu directement entre l’employeur et le travailleur où la fin du contrat ou de la relation de travail est déterminée par des conditions objectives telles que l’atteinte d’une date précise, l’achèvement d’une tâche déterminée ou la survenance d’un événement déterminé».

    7        Ladite clause 3 définit à son point 2 la notion de «travailleur à durée indéterminée comparable» comme «un travailleur ayant un contrat ou une relation de travail à durée indéterminée dans le même établissement, et ayant un travail/emploi identique ou similaire, en tenant compte des qualifications/compétences. Lorsqu’il n’existe aucun travailleur à durée indéterminée comparable dans le même établissement, la comparaison s’effectue par référence à la convention collective applicable ou, en l’absence de convention collective applicable, conformément à la législation, aux conventions collectives ou aux pratiques nationales».

    8        La clause 4 de l’accord-cadre, intitulée «Principe de non-discrimination», prévoit en son point 1:

    «Pour ce qui concerne les conditions d’emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d’une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu’ils travaillent à durée déterminée, à moins qu’un traitement différent [ne] soit justifié par des raisons objectives.»

     La réglementation nationale

    9        L’article 47 de la loi organique n° 6/2001 sur les universités (Ley Orgánica 6/2001 de Universidades), du 21 décembre 2001 (BOE n° 307, du 24 décembre 2001, p. 49400), telle que modifiée par la loi organique n° 4/2007, du 12 avril 2007 (BOE n° 89, du 13 avril 2007, p. 16241, ci-après la «LOU»), prévoit que le personnel d’enseignement et de recherche des universités publiques est composé de fonctionnaires des corps enseignants universitaires et de personnel contractuel.

    10      L’article 48 de la LOU est libellé comme suit:

    «1.      Les universités peuvent recruter du personnel d’enseignement et de recherche sous le régime contractuel conformément aux modalités de recrutement contractuel spécifiques au secteur universitaire qui sont définies dans la présente loi ou selon les modalités prévues dans le statut des travailleurs pour le remplacement de travailleurs ayant un droit au maintien de leur emploi. Elles peuvent également recruter du personnel de recherche, du personnel technique ou autre par voie de contrat de travail pour une tâche ou un service déterminés, en vue de la réalisation de projets de recherche scientifique ou technique.

    […]

    2.      Les modalités de recrutement contractuel spécifiques au secteur universitaire sont celles qui concernent les statuts d’assistant, de maître de conférences à durée déterminée, de maître de conférences à durée indéterminée, de professeur associé et de professeur invité.

    […]

    3.      Le recrutement de personnel d’enseignement et de recherche, à l’exception de celui relevant du statut de professeur invité, s’effectue par voie d’appel public à candidatures, dont l’organisation, donnant lieu à la publicité nécessaire, est portée à la connaissance du conseil des universités suffisamment à l’avance pour être diffusée dans toutes les universités. […]

    […]

    6.      Dans les conditions fixées par la présente loi et dans le cadre de leurs compétences, les communautés autonomes établissent le régime du personnel d’enseignement et de recherche contractuel des universités.»

    11      L’article 50 de la LOU, intitulé «Maîtres de conférences à durée déterminée», dispose:

    «Le recrutement de maîtres de conférences à durée déterminée s’effectue conformément aux dispositions suivantes:

    a)       Sont engagés des titulaires du doctorat. Le recrutement est soumis à l’évaluation préalable positive de l’activité des intéressés par l’agence nationale d’évaluation de la qualité et de l’habilitation ou par l’instance d’évaluation externe déterminée par la loi de la communauté autonome. […]

    b)       L’engagement a pour objet l’accomplissement de tâches d’enseignement et de recherche.

    c)       L’engagement est temporaire et à temps complet.

    d)       La durée de l’engagement ne peut être inférieure à un an ni supérieure à cinq ans. […]»

    12      L’article 52 de la LOU, intitulé «Maîtres de conférences à durée indéterminée», est libellé comme suit:

    «Le recrutement de maîtres de conférences à durée indéterminée s’effectue conformément aux dispositions suivantes:

    a)       Sont engagés des titulaires du doctorat ayant fait l’objet d’une évaluation positive par l’agence nationale d’évaluation de la qualité et de l’habilitation ou par l’instance d’évaluation externe déterminée par la loi de la communauté autonome.

    b)      L’engagement a pour objet l’accomplissement de tâches d’enseignement et de recherche de plein exercice ou l’accomplissement prioritaire de tâches de recherche.

    c)       L’engagement est à durée indéterminée et à temps complet.»

    13      Le décret n° 174/2002 du gouvernement de la Communauté autonome de Valence, relatif au régime et à la rémunération du personnel d’enseignement et de recherche contractuel des universités publiques de la Communauté autonome de Valence et aux rémunérations additionnelles du corps enseignant universitaire (Decreto 174/2002 de la Generalitat Valenciana, sobre Régimen y Retribuciones del Personal Docente e Investigador Contratado Laboral de las Universidades Públicas Valencianas y sobre Retribuciones Adicionales del Profesorado Universitario), du 15 octobre 2002 (Diario Oficial de la Generalitat Valenciana 4362/2002, du 22 octobre 2002, ci-après le «décret 174/2002»), prévoit le mode de recrutement des maîtres de conférences à durée déterminée et des maîtres de conférences à durée indéterminée travaillant dans les universités publiques de la Communauté autonome de Valence ainsi que les conditions dans lesquelles ils exercent leurs fonctions.

    14      L’article 13, paragraphe 1, du décret 174/2002, intitulé «Rémunérations du personnel d’enseignement et de recherche contractuel», dispose:

    «Les universités, dans le cadre de leurs ressources budgétaires et dans la limite du coût autorisé pour chacune d’elles par la Communauté autonome de Valence, rémunèrent le personnel d’enseignement et de recherche exclusivement au moyen des éléments [de rémunération] visés dans le présent décret, sans préjudice des dispositions des articles 55, paragraphe 2, et 83 de la [LOU].»

    15      L’article 14, paragraphe 1, de ce décret, intitulé «Rémunérations des maîtres de conférences à durée indéterminée et des maîtres-assistants», prévoit:

    «Les maîtres de conférences à durée indéterminée et les maîtres-assistants qui exercent leur activité à temps complet auprès des universités publiques relevant de la Communauté autonome de Valence sont rémunérés au moyen d’un traitement, de primes triennales, de mois supplémentaires, d’une indemnité de fonction et d’une indemnité spécifique, conformément au présent article. […]»

    16      L’article 15 dudit décret, intitulé «Rémunérations des maîtres de conférences à durée déterminée et des assistants», prévoit que les rémunérations annuelles des maîtres de conférences à durée déterminée et des assistants recrutés par voie contractuelle par les universités publiques relevant de la Communauté autonome de Valence pour y exercer une activité à temps complet disposent d’un traitement, versé en 14 mensualités, et d’une indemnité de fonction, versée en 12 mensualités.

    17      L’article 15, paragraphe 6, du statut des travailleurs, dans la version résultant du décret législatif royal n° 1/1995, du 24 mars 1995 (BOE n° 75, du 29 mars 1995, p. 9654), dispose:

    «Les travailleurs ayant des contrats temporaires et à durée déterminée ont les mêmes droits que les travailleurs avec des contrats à durée indéterminée, sans préjudice des particularités spécifiques de chacune des modalités contractuelles en matière d’extinction du contrat et de celles expressément prévues par la loi en ce qui concerne les contrats formatifs et le contrat d’insertion. Le cas échéant, selon leur nature, de tels droits sont reconnus dans les dispositions légales et réglementaires ainsi que dans les conventions collectives de manière proportionnelle, en fonction du temps travaillé.»

     Le litige au principal et les questions préjudicielles

    18      M. Montoya Medina a travaillé en tant qu’assistant d’école universitaire («ayudante de escuela universitaria») relevant de l’université d’Alicante du 3 octobre 1995 au 2 octobre 1997 et du 1er octobre 1999 au 30 septembre 2001. Il a travaillé auprès de la même université en tant qu’assistant de faculté et d’école technique supérieure («ayudante de facultad y Escuela Técnica Superior») du 1er octobre 1997 au 30 septembre 1999 et en tant que professeur associé (profesor asociado) du 19 décembre 2001 au 9 janvier 2006. Du 10 janvier 2006 au 29 avril 2008, il a été lié par un contrat à durée déterminée conclu avec cette université en tant que maître de conférences à durée déterminée («profesor ayudante doctor») et, depuis le 30 avril 2008, il y travaille en tant que maître de conférences à durée indéterminée («profesor contratado doctor»).

    19      Le 8 octobre 2008, M. Montoya Medina a introduit une action contre le Fondo de Garantía Salarial et l’Universidad de Alicante devant le Juzgado de lo Social n° 7 de Alicante (juge des affaires sociales n° 7 d’Alicante), visant au paiement de la somme de 1 873,11 euros à titre de primes d’ancienneté échues au cours de la période allant du mois de juillet 2007 au mois d’avril 2008, au cours de laquelle il a exercé auprès de cette université les fonctions de maître de conférences à durée déterminée.

    20      Par jugement du 23 février 2009, le Juzgado de lo Social n° 7 de Alicante a fait droit à cette demande, considérant qu’il n’existe aucune justification objective, raisonnable et proportionnée susceptible d’expliquer la différence de traitement en matière de rémunération concernant les primes triennales entre le statut de maître de conférences à durée déterminée et celui de maître de conférences à durée indéterminée, au motif que «leurs fonctions sont les mêmes (tâches d’enseignement et de recherche) ainsi que leur qualification (doctorat) et les conditions d’accès». Selon ce juge, la seule différence constatée entre ces deux catégories concerne la durée de l’engagement, limitée dans le premier cas et indéterminée dans le second.

    21      La chambre sociale du Tribunal Superior de Justicia de la Comunidad Valenciana (Cour supérieure de justice de la Communauté autonome de Valence), a été saisie d’un appel de ce jugement formé par l’Universidad de Alicante.

    22      Le Tribunal Superior de Justicia de la Comunidad Valenciana, éprouvant des doutes quant à la compatibilité de la réglementation en cause au principal avec la clause 4, point 1, de l’accord-cadre, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

    «Une réglementation telle que celle contenue dans le [décret 174/2002] est-elle contraire au principe de non-discrimination inscrit à la clause 4 de l’[accord-cadre,] annexé à la directive [1999/70], dans la mesure où elle n’accorde pas aux maîtres de conférences à durée déterminée la possibilité de percevoir des primes d’ancienneté telles que les primes triennales, alors que ces mêmes primes sont accordées aux maîtres de conférences à durée indéterminée?»

     Sur la question préjudicielle

    23      Par cette question, la juridiction de renvoi demande en substance si la clause 4, point 1, de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, qui réserve le droit de percevoir une prime triennale d’ancienneté aux seuls maîtres de conférences à durée indéterminée, à l’exclusion des maîtres de conférences à durée déterminée.

    24      En vertu de l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel est identique à celle fournie à une question sur laquelle la Cour a déjà statué ou lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, l’avocat général entendu, à tout moment, statuer par voie d’ordonnance motivée.

    25      Il y a lieu de faire application de cette disposition du règlement de procédure dans la présente affaire. En effet, la réponse à la présente question préjudicielle peut être clairement déduite de la jurisprudence, en particulier des arrêts du 13 septembre 2007, Del Cerro Alonso (C‑307/05, Rec. p. I‑7109), du 15 avril 2008, Impact (C‑268/06, Rec. p. I‑2483), ainsi que du 22 décembre 2010, Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres (C‑444/09 et C‑456/09, non encore publié au Recueil).

    26      Tout d’abord, il ressort de cette jurisprudence que la directive 1999/70 et l’accord-cadre trouvent à s’appliquer à l’ensemble des travailleurs fournissant des prestations rémunérées dans le cadre d’une relation d’emploi à durée déterminée les liant à leur employeur (arrêts précités Del Cerro Alonso, point 28, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 42).

    27      Les prescriptions énoncées dans l’accord-cadre ont donc vocation à s’appliquer aux contrats et relations de travail à durée déterminée conclus avec les administrations et les autres entités du secteur public (arrêt Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, précité, point 38 et jurisprudence citée).

    28      Dès lors que M. Montoya Medina fait partie du corps enseignant d’une université relevant de la Communauté autonome de Valence et fait valoir une différence de traitement entre les maîtres de conférences à durée déterminée et les maîtres de conférences à durée indéterminée, il relève du champ d’application personnel de la directive 1999/70 et de celui de l’accord-cadre.

    29      Il convient ensuite de rappeler que, aux termes de la clause 1, sous a), de l’accord-cadre, l’un des objets de celui-ci est d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination. De même, à son troisième alinéa, le préambule de l’accord-cadre précise que celui-ci «illustre la volonté des partenaires sociaux d’établir un cadre général pour assurer l’égalité de traitement pour les travailleurs à durée déterminée en les protégeant contre la discrimination». Le quatorzième considérant de la directive 1999/70 indique à cet effet que l’objectif de cet accord-cadre consiste, notamment, à améliorer la qualité du travail à durée déterminée en fixant des prescriptions minimales de nature à garantir l’application du principe de non-discrimination (arrêt précité Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 47).

    30      L’accord-cadre, en particulier sa clause 4, vise à faire application dudit principe aux travailleurs à durée déterminée en vue d’empêcher qu’une relation d’emploi de cette nature soit utilisée par un employeur pour priver ces travailleurs de droits qui sont reconnus aux travailleurs à durée indéterminée (arrêts précités Del Cerro Alonso, point 37, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 48).

    31      Eu égard aux objectifs poursuivis par l’accord-cadre, tels que rappelés aux deux points précédents, la clause 4 de celui-ci doit être comprise comme exprimant un principe de droit social de l’Union qui ne saurait être interprété de manière restrictive (voir arrêts précités Del Cerro Alonso, point 38; Impact, point 114, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 49).

    32      La Cour a déjà jugé qu’une prime d’ancienneté identique à celle en cause au principal, dont le bénéfice était réservé par le droit espagnol au personnel statutaire fixe des services de santé travaillant à durée indéterminée, à l’exclusion du personnel intérimaire, ainsi qu’aux fonctionnaires statutaires d’une communauté autonome, à l’exclusion des fonctionnaires intérimaires, relève de la notion de «conditions d’emploi» visée à la clause 4, point 1, de l’accord-cadre (voir, en ce sens, arrêts précités Del Cerro Alonso, points 47 et 48, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, points 50 à 58).

    33      Il ressort des informations fournies à la Cour dans le cadre de la présente procédure que, à la différence des maîtres de conférences à durée indéterminée, les maîtres de conférences à durée déterminée employés par les universités relevant de la Communauté autonome de Valence ne bénéficient pas des primes triennales d’ancienneté en cause au principal, quelle que soit la durée des périodes de service accomplies.

    34      Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, en ce qui concerne les primes d’ancienneté telles que celles en cause au principal, qui constituent des conditions d’emploi au sens de la clause 4, point 1, de l’accord-cadre, les travailleurs à durée déterminée ne doivent pas être traités moins favorablement que les travailleurs à durée indéterminée se trouvant dans une situation comparable, en dehors de toute justification objective (voir, en ce sens, arrêts précités Del Cerro Alonso, points 42 et 47; Impact, point 126, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 53).

    35      Il ressort de la décision de renvoi que l’Universidad de Alicante soutient que les maîtres de conférences à durée déterminée et les maîtres de conférences à durée indéterminée constituent deux catégories professionnelles différentes, comportant des liens d’emploi, des contenus et des critères de recrutement différents, auxquelles s’applique des régimes de rémunération distincts, dont les différences ne se réduisent pas à la seule prime d’ancienneté en cause au principal.

    36      Il convient de rappeler à cet égard que la notion de «travailleur à durée indéterminée comparable» est définie à la clause 3, point 2, de l’accord-cadre comme correspondant à «un travailleur ayant un contrat ou une relation de travail à durée indéterminée dans le même établissement, et ayant un travail/emploi identique ou similaire, en tenant compte des qualifications/compétences».

    37      Pour apprécier si des travailleurs exercent un travail identique ou similaire, il convient de rechercher si ces travailleurs, compte tenu d’un ensemble de facteurs, telles la nature du travail, les conditions de formation et les conditions de travail, peuvent être considérés comme se trouvant dans une situation comparable (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 1999, Angestelltenbetriebsrat der Wiener Gebietskrankenkasse, C‑309/97, Rec. p. I-2865, point 17).

    38      Selon la juridiction de renvoi, qui se fonde sur un examen des statuts juridiques des maîtres de conférences à durée indéterminée et des maîtres de conférences à durée déterminée, ces deux statuts supposent la même qualification académique − puisque la possession du doctorat est exigée dans les deux cas −, une expérience professionnelle similaire − trois ans dans un cas et deux ans dans l’autre −, et l’exercice des fonctions d’enseignement et de recherche.

    39      Il appartient, en principe, à la juridiction de renvoi, et non à la Cour, d’établir si, en ce qui concerne la perception des primes triennales en cause au principal, les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée à l’égard desquels une différence de traitement relative aux conditions d’emploi est alléguée se trouvent dans des situations comparables. Il apparaît toutefois, sur la base des informations fournies à la Cour par cette juridiction et compte tenu de la définition de la notion de travailleur à durée indéterminée comparable figurant à la clause 3, point 2, de l’accord-cadre, que tel est le cas s’agissant des maîtres de conférences à durée déterminée et des maîtres de conférences à durée indéterminée du corps enseignant universitaire de la Communauté autonome de Valence.

    40      Enfin, quant à l’existence éventuelle d’une raison objective justifiant l’exclusion des maîtres de conférences à durée déterminée du bénéfice des primes triennales en cause au principal, il convient de rappeler que la notion de raisons objectives figurant au point 1 de la clause 4 doit être comprise comme ne permettant pas de justifier une différence de traitement entre les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée par le fait que cette différence est prévue par une norme nationale générale et abstraite, telle une loi ou une convention collective (arrêts précités Del Cerro Alonso, point 57, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 54).

    41      Ladite notion requiert que l’inégalité de traitement constatée soit justifiée par l’existence d’éléments précis et concrets, caractérisant la condition d’emploi dont il s’agit, dans le contexte particulier dans lequel elle s’insère et sur le fondement de critères objectifs et transparents, afin de vérifier si cette inégalité répond à un besoin véritable, est apte à atteindre l’objectif poursuivi et est nécessaire à cet effet. Lesdits éléments peuvent résulter, notamment, de la nature particulière des tâches pour l’accomplissement desquelles des contrats à durée déterminée ont été conclus et des caractéristiques inhérentes à celles-ci ou, le cas échéant, de la poursuite d’un objectif légitime de politique sociale d’un État membre (voir arrêts précités Del Cerro Alonso, points 53 et 58, ainsi que Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 55).

    42      Le recours à la seule nature temporaire du travail du personnel de l’administration publique n’est pas conforme à ces exigences et n’est donc pas susceptible de constituer une raison objective au sens de la clause 4, point 1, de l’accord-cadre (arrêt précité Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 56).

    43      En effet, une différence de traitement en ce qui concerne les conditions d’emploi entre travailleurs à durée déterminée et travailleurs à durée indéterminée ne saurait être justifiée par un critère qui, de manière générale et abstraite, se réfère à la durée même de l’emploi. Admettre que la seule nature temporaire d’une relation d’emploi suffit pour justifier une telle différence viderait de leur substance les objectifs de la directive 1999/70 et de l’accord-cadre. Au lieu d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée et de promouvoir l’égalité de traitement recherchée tant par la directive 1999/70 que par l’accord-cadre, le recours à un tel critère reviendrait à pérenniser le maintien d’une situation défavorable aux travailleurs à durée déterminée (arrêt précité Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, point 57).

    44      Il appartient, le cas échéant, à la juridiction de renvoi d’apprécier si les arguments présentés devant elle par l’Universidad de Alicante constituent des raisons objectives au sens de la clause 4, point 1, de l’accord-cadre, compte tenu de la jurisprudence rappelée aux points 40 à 43 de la présente ordonnance.

    45      La nature temporaire de la relation d’emploi de certains agents publics ou l’absence de toute disposition dans la réglementation nationale quant au paiement de primes d’ancienneté en cause au principal à certaines catégories de travailleurs à durée déterminée ne sont pas susceptibles de constituer, à elles seules, de telles raisons objectives.

    46      Il convient, enfin, de rappeler que la clause 4, point 1, de l’accord-cadre est inconditionnelle et suffisamment précise pour pouvoir être invoquée à l’encontre de l’État par les particuliers devant un juge national (voir, en ce sens, arrêt Gavieiro Gavieiro et Iglesias Torres, précité, points 78 à 83).

    47      Il y a lieu, compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, de répondre à la question posée que la clause 4, point 1, de l’accord-cadre doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui réserve, en dehors de toute justification objective, le droit de percevoir une prime d’ancienneté aux seuls maîtres de conférences à durée indéterminée, à l’exclusion des maîtres de conférences à durée déterminée, lorsque, à l’égard de la perception de cette prime, ces deux catégories de travailleurs se trouvent dans des situations comparables.

     Sur les dépens

    48      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:

    La clause 4, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure en annexe à la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale qui réserve, en dehors de toute justification objective, le droit de percevoir une prime d’ancienneté aux seuls maîtres de conférences à durée indéterminée, à l’exclusion des maîtres de conférences à durée déterminée, lorsque, à l’égard de la perception de cette prime, ces deux catégories de travailleurs se trouvent dans des situations comparables.

    Signatures


    * Langue de procédure: l’espagnol.

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