COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 3.5.2023
COM(2023) 234 final
2023/0135(COD)
Proposition de
DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
relative à la lutte contre la corruption, remplaçant la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil et la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l'Union européenne, et modifiant la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil
EXPOSÉ DES MOTIFS
1.CONTEXTE DE LA PROPOSITION
•Justification et objectifs de la proposition
La corruption est un phénomène extrêmement préjudiciable à la société, à nos démocraties, à l’économie et aux personnes. Elle sape les institutions dont nous dépendons, en ébranlant leur crédibilité et en affaiblissant leur capacité à mettre en œuvre des politiques et des services publics de qualité. Elle agit comme un catalyseur de la criminalité organisée et des ingérences étrangères hostiles. Il est essentiel de prévenir et de combattre efficacement la corruption, pour préserver les valeurs de l’Union et assurer l’efficacité de ses politiques, ainsi que pour maintenir l’état de droit et la confiance placée dans les gouvernants et dans les institutions publiques.
La corruption fait obstacle à une croissance économique durable, car elle détourne les ressources des résultats productifs, compromet l’efficacité des dépenses publiques et accentue les inégalités sociales. Elle entrave le fonctionnement efficace et harmonieux du marché unique, crée des incertitudes dans la conduite des affaires et freine les investissements. La corruption est, par nature, difficile à quantifier, mais des estimations même prudentes indiquent qu’elle coûte au moins 120 milliards d’euros par an à l’économie de l’UE. Les effets négatifs de la corruption se font sentir dans le monde entier, sapant les efforts déployés pour instaurer la bonne gouvernance et la prospérité et pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies.
Selon les données d’études Eurobaromètre menées en 2022, 68 % de la population de l’UE et 62 % des entreprises établies dans l’UE pensent que la corruption est répandue dans leur pays. Le discours sur l’état de l’Union de 2022 place la lutte contre la corruption au premier rang des priorités de la Commission, en soulignant la nécessité d’y remédier tant au niveau de l’UE qu’au niveau national. Le Parlement européen a également réclamé à maintes reprises que l’UE prenne davantage de mesures pour lutter contre la corruption. Le Conseil a formulé des demandes similaires, notamment dans le cadre de la coopération visant à lutter contre la grande criminalité internationale organisée.
Le cadre juridique existant de l’UE en matière de lutte contre la corruption doit être actualisé, afin de tenir compte de l’évolution des menaces de corruption et des obligations juridiques qui incombent à l’Union et aux États membres en vertu du droit international, ainsi que de l’évolution des cadres juridiques nationaux en matière pénale. La décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil prévoit des obligations relatives à l’incrimination de la corruption dans le secteur privé. La convention de 1997 relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires de l’UE ou des fonctionnaires des États membres de l’UE traite de certains actes de corruption impliquant ces fonctionnaires en général. Ces instruments ne sont toutefois pas suffisamment complets et les règles en vigueur dans les États membres doivent être développées davantage, en vue d’une réaction plus cohérente et plus efficace dans l’Union. Des lacunes dans la répression au niveau national et des obstacles à la coopération entre les autorités compétentes de différents États membres sont également apparus. Les autorités des États membres rencontrent des difficultés liées à la durée excessive des poursuites, à des délais de prescription très courts, aux règles relatives à l’immunité et aux privilèges, à la disponibilité limitée des ressources, à la formation et aux pouvoirs d’enquête, pour n’en citer que quelques-unes.
L’UE est partie à la convention des Nations unies contre la corruption (CNUCC), qui est l’instrument juridique international le plus complet dans ce domaine, combinant un large éventail de mesures visant à prévenir et à combattre la corruption. La présente proposition législative actualisera le cadre législatif de l’UE, notamment en intégrant des normes internationales contraignantes pour l’UE, telles que celles de la CNUCC. Le but est de faire en sorte que toutes les formes de corruption soient érigées en infractions pénales dans tous les États membres, que les personnes morales puissent également être tenues pour responsables de ces infractions et que ces infractions soient passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives. En outre, la proposition comprend des mesures pertinentes visant à prévenir la corruption conformément aux normes internationales et à faciliter la coopération transfrontière, comme l’exige la CNUCC.
Pour éradiquer la corruption, il faut des mécanismes tant préventifs que répressifs. Les États membres sont encouragés à adopter un large éventail de mesures préventives, législatives et de coopération dans le cadre de la lutte contre la corruption. Des manquements à l’intégrité, des conflits d’intérêts non divulgués ou des violations graves de règles déontologiques peuvent conduire, en l’absence d’intervention, à des activités de corruption. La prévention de la corruption réduit le besoin de répression pénale et présente des avantages plus larges pour susciter la confiance du public et gérer le comportement des agents publics.
•Cohérence avec les dispositions existantes dans le domaine d'action
La proposition de directive complète la stratégie de l’UE pour l’union de la sécurité (2020-2025). En avril 2021, la Commission a également adopté la stratégie de l’UE visant à lutter contre la criminalité organisée (2021-2025), qui prévoit des mesures spécifiques pour lutter contre la corruption qui favorise la criminalité organisée. Elle a ensuite évalué l’état d’avancement actuel de la dimension à la fois législative et opérationnelle de la prévention et de la lutte contre la corruption, dans le cadre d’une étude externe qui a été achevée fin 2022.
La stratégie de l’UE visant à lutter contre la traite des êtres humains (2021-2025), adoptée en avril 2021, est étroitement liée à la stratégie de l’UE visant à lutter contre la criminalité organisée. Elle souligne que les groupes criminels organisés impliqués dans la traite des êtres humains exploitent de plus en plus des entreprises légales pour leurs activités et participent à d’autres formes graves de criminalité, telles que la corruption, afin de soutenir leurs activités essentielles. La corruption peut en outre empêcher la détection de la traite des êtres humains, par exemple si les autorités chargées d’identifier les victimes sont impliquées dans des faits de corruption.
•Cohérence avec les autres politiques de l'Union
Panoplie d’outils en matière d’état de droit
Depuis 2020, la Commission suit l’évolution de la lutte contre la corruption au niveau national, qui constitue l’un des piliers centraux du cycle annuel de rapport sur l’état de droit. Depuis 2022, les rapports contiennent également des recommandations adressées à chaque pays, dans le but de soutenir les efforts déployés par les États membres pour faire progresser les réformes en cours ou prévues, d’encourager les évolutions positives et d’aider les États membres à recenser les domaines dans lesquels des améliorations ou un suivi des modifications ou réformes récentes pourraient s’avérer nécessaires. Les mesures anticorruption font également partie de la collaboration avec les États membres dans le cadre du Semestre européen et des plans pour la reprise et la résilience. Le Semestre européen s’est penché sur certains secteurs problématiques dans la lutte contre la corruption, tels que les marchés publics, l’intégrité au sein de l’administration publique, l’environnement des entreprises et le secteur des soins de santé. Les recommandations par pays formulées dans le cadre du Semestre européen ont orienté des réformes et des investissements concrets dans plusieurs États membres, afin d’améliorer leur capacité à lutter contre la corruption. Elles se traduisent par des jalons concrets dans les plans nationaux pour la reprise et la résilience.
En vertu du règlement relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union [règlement (UE, Euratom) 2020/2092], la Commission peut proposer que le Conseil de l’UE impose des mesures budgétaires aux États membres de l’UE lorsque des violations des principes de l’état de droit – y compris des faits de corruption – portent atteinte ou présentent un risque sérieux de porter atteinte à la bonne gestion financière du budget de l’Union ou à la protection des intérêts financiers de l’Union, d’une manière suffisamment directe.
La corruption est aussi un moyen utilisé pour l’ingérence étrangère dans les processus démocratiques, qui est la principale cible des mesures élaborées actuellement dans le cadre du paquet «Défense de la démocratie», également inclus dans le programme de travail de la Commission pour 2023.
Confiscation et recouvrement des avoirs
La directive 2014/42 a établi des règles concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime afin de priver effectivement les criminels de leurs avoirs illicites. Dans son champ d’application, elle a inclus les infractions couvertes par la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires ainsi que par la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil relative à la lutte contre la corruption dans le secteur privé. En mai 2022, la Commission a présenté une proposition de nouvelle directive sur le recouvrement et la confiscation des avoirs, qui s’appuie sur la législation antérieure. Cette proposition prévoit un nouveau cadre renforcé en matière de recouvrement des avoirs, afin que le crime ne paie pas. Elle doterait les autorités de meilleurs instruments pour priver les groupes criminels organisés des moyens financiers leur permettant de mener d’autres activités criminelles, dont la corruption.
Lutte contre le blanchiment de capitaux
La corruption et le blanchiment de capitaux sont intrinsèquement liés. À l’instar d’autres infractions génératrices de recettes, les infractions de corruption sont commises dans le but d’obtenir un avantage personnel. La lutte contre le blanchiment de capitaux est la pierre angulaire de la stratégie plus large consistant à lutter contre la grande criminalité, y compris la corruption, en privant les criminels de leurs profits illicites et en poursuivant ceux qui aident au blanchiment de ces profits.
La directive (UE) 2018/1673 visant à lutter contre le blanchiment de capitaux au moyen du droit pénal établit des règles de base en ce qui concerne l’incrimination du blanchiment de capitaux et énonce que la corruption doit constituer une infraction principale en matière de blanchiment de capitaux. En juillet 2021, la Commission a adopté des propositions législatives visant à renforcer les règles de l’Union en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT), notamment en renforçant la capacité des cellules de renseignement financier (CRF) à détecter, analyser et diffuser le renseignement financier liés au blanchiment des produits du crime. Il s’agit d’une condition préalable essentielle à l’efficacité des enquêtes et des poursuites en matière de corruption.
Le trafic de biens culturels constitue une activité lucrative pour la criminalité organisée. Outre le trafic, les criminels peuvent faire un usage frauduleux de biens culturels acquis même légalement, pour blanchir des capitaux et contourner des sanctions. Le 13 décembre 2022, la Commission a donc adopté le plan d’action de l’UE pour lutter contre le trafic de biens culturels, qui fournit un cadre global permettant à l’UE et aux États membres de faire progresser la prévention et la détection du trafic de biens culturels et des infractions connexes, y compris la corruption, ainsi que la réponse de la justice pénale à ces infractions.
Protection des lanceurs d’alerte
La directive (UE) 2019/1937 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union (ci-après la «directive sur la protection des lanceurs d’alerte») a été adoptée en 2019 dans le but d’assurer une solide protection aux lanceurs d’alerte, pour renforcer l’application du droit de l’Union dans des domaines d’action clés. Cette directive s’applique également au signalement de la fraude, de la corruption et de toute autre activité illégale affectant les intérêts financiers de l’Union ainsi qu’à la protection des personnes signalant de telles infractions. Cette directive devrait être rendue applicable au signalement des infractions visées dans la présente proposition, ainsi qu’à la protection des personnes qui signalent de telles infractions. Les autorités nationales compétentes devraient également veiller à ce que les personnes qui fournissent des éléments de preuve ou coopèrent d’une autre manière aux enquêtes pénales reçoivent la protection, le soutien et l’assistance nécessaires dans le cadre de la procédure pénale.
Programmes de citoyenneté et de résidence par investissement
Les programmes de citoyenneté et de résidence par investissement (programmes de «visas dorés» et de «passeports dorés») peuvent aider à dissimuler ou à faciliter des délits financiers et économiques, y compris des actes de corruption. Le manque de transparence et de contrôle de ces programmes, ainsi que le rôle joué par les intermédiaires dans ces programmes, suscitent également des préoccupations. Le nouveau règlement contre le blanchiment de capitaux proposé par la Commission vise à mettre en place une surveillance des activités des intermédiaires dans les programmes de résidence par investissement. La Commission considère que les programmes de citoyenneté par investissement, en vertu desquels la nationalité d’un État membre, et donc la citoyenneté de l’Union, est systématiquement accordée en échange de paiements ou d’investissements prédéterminés, sans qu’il existe un lien réel avec l’État membre qui accorde la nationalité, sont contraires au droit de l’Union. Elle estime par conséquent que les États membres ne doivent pas appliquer de tels programmes. La Commission a pris des mesures à l’encontre des États membres qui maintiennent ces régimes, en vue de leur suppression, en exerçant directement ses prérogatives de gardienne des traités.
Dans une recommandation en date du 28 mars 2022, la Commission a appelé les États membres à veiller à ce que toutes les mesures et garanties nécessaires soient prises pour contrer les risques inhérents aux programmes de résidence par investissement, y compris ceux liés à la corruption.
Protection des intérêts financiers de l’Union
La directive (UE) 2017/1371 vise à établir un système harmonisé, assorti de règles communes minimales, pour lutter contre la fraude et les autres infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union. Cette directive fournit des définitions communes pour un certain nombre d’infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, parmi lesquelles la fraude, le blanchiment de capitaux, la corruption active et passive et le détournement.
L’article 325 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) attribue à l’Union et aux États membres une responsabilité partagée pour combattre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, au moyen de mesures effectives et dissuasives. Il établit également l’obligation d’assurer le même niveau de protection pour les intérêts financiers de l’Union que pour ceux des États membres.
Afin que les États membres disposent de mesures équivalentes pour lutter contre la corruption portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union et à leurs propres intérêts financiers, il est nécessaire d’aligner la directive (UE) 2017/1371 sur les normes énoncées dans la présente directive, en ce qui concerne les sanctions, les circonstances aggravantes et atténuantes et les délais de prescription.
À l’occasion de l’évaluation de la directive (UE) 2017/1371, conformément à son article 18, la Commission évaluera dans quelle mesure les infractions prévues dans ladite directive doivent également être actualisées à la lumière de la directive actuelle.
2.BASE JURIDIQUE, SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ
•Base juridique
Les bases juridiques de la présente proposition sont l’article 83, paragraphes 1 et 2, et l’article 82, paragraphe 1, point d), du TFUE.
L’article 83, paragraphe 1, du TFUE mentionne la corruption parmi les domaines de criminalité revêtant une dimension transfrontière particulière. Il permet au Parlement européen et au Conseil d’établir des règles minimales nécessaires relatives à la définition de la corruption, par voie de directives adoptées conformément à la procédure législative ordinaire.
Il n’existe pas de définition unique de la corruption, celle-ci existant sous différentes formes impliquant différents participants. De fait, la corruption est un phénomène endémique qui revêt des formes multiples et touche tous les aspects de la société, par exemple les pots-de-vin, l’abus de confiance, le trafic d’influence, le commerce d’informations, l’abus de fonctions et l’enrichissement illicite.
Lors des négociations de la CNUCC, les États parties aux Nations unies ont examiné attentivement s’il convenait d’élaborer une définition juridique de la corruption. Il a été conclu que toute tentative de définition exhaustive échouerait inévitablement à couvrir certaines formes de corruption. Par conséquent, la communauté internationale est parvenue à un consensus sur certaines manifestations de la corruption, tout en laissant chaque État libre d’aller au-delà des normes minimales énoncées dans la CNUCC.
L’article 83, paragraphe 2, du TFUE est la base juridique sur laquelle avait été adoptée la directive (UE) 2017/1371 qui est modifiée par la directive proposée. Il consacre la compétence de l’UE pour établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans les domaines d’action de l’UE ayant fait l’objet de mesures d’harmonisation, lorsque cela s’avère indispensable pour assurer une mise en œuvre efficace dans ces domaines d’action.
L’article 82, paragraphe 1, point d), fournit la base juridique pour les mesures visant à faciliter la coopération entre les autorités judiciaires ou équivalentes des États membres dans le cadre des poursuites pénales et de l’exécution des décisions, par exemple l’adoption de règles communes concernant la compétence en matière pénale.
•Subsidiarité (en cas de compétence non exclusive)
La corruption est un phénomène transnational qui touche toutes les sociétés et toutes les économies. Des mesures adoptées au seul niveau national ou même au niveau de l’Union, sans tenir compte de la coordination et de la coopération internationales, auraient des effets insatisfaisants. L’action de l’Union devrait tenir dûment compte des travaux du Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECO), de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Entre 2016 et 2021, Eurojust a enregistré 505 affaires de corruption transfrontière, leur nombre ne cessant d’augmenter pendant cette période de cinq ans, ce qui confirme que la corruption est un phénomène transfrontière en croissance régulière dans l’UE.Une étude récemment publiée par la Commission européenne concluait que «l’absence d’un cadre européen cohérent comprenant des dispositions pour tous les délits liés à la corruption définis par des normes internationales constitue une source de problèmes législatifs et opérationnels pour lutter contre les cas de corruption transfrontières».
En raison de la dimension transnationale de la corruption, et compte tenu de la législation de l’UE qui existe déjà, une action au niveau de l’Union devrait être plus efficace et plus efficiente et apporter une valeur ajoutée tangible par rapport à des actions entreprises individuellement par les États membres. L’intervention de l’UE créerait une valeur ajoutée en rapprochant davantage le droit pénal des États membres, contribuant ainsi à un terrain d’action commun entre les États membres, ainsi qu’une coordination et des normes communes. Comme le montre l’analyse figurant dans les rapports annuels sur l’état de droit, les lacunes et l’application limitée de la législation existante, ainsi que la nécessité d’une coopération et de capacités pour engager des poursuites dans les affaires transfrontières, indiquent qu’une coordination accrue et la définition de normes communes à toute l’UE sont nécessaires. L’efficacité des mesures de prévention et des outils d’enquête dans l’ensemble de l’UE en serait en outre renforcée. De surcroît, compte tenu du caractère de plus en plus transfrontière des affaires de corruption, une collaboration étroite entre les États membres est indispensable pour assurer une prévention et une répression adéquates. Des définitions communes des infractions pénales faciliteraient cette collaboration. Enfin, la lutte contre la corruption nécessite les efforts conjugués de nombreux acteurs. Traiter le problème de la corruption dans le contexte plus large de l’UE, et non dans les cadres nationaux isolés des États membres, permet dès lors une participation plus large de toutes les parties prenantes concernées.
Si aucune mesure n’est prise au niveau de l’UE, le problème de la corruption est susceptible de prendre une ampleur considérable au cours des prochaines années, ce qui aurait des incidences transfrontières évidentes et un effet direct sur le marché unique, les intérêts financiers de l’UE et, plus généralement, sur la sécurité intérieure. La corruption dans un État membre concerne directement les autres États membres, en raison de ses effets transfrontières. Les autorités judiciaires et répressives continueraient de rencontrer de graves difficultés lors du traitement d’affaires de corruption plus complexes et les auteurs d’infractions auraient ainsi la possibilité de rechercher les pays de l’UE les plus favorables pour eux, c’est-à-dire ceux dont l’arsenal législatif anticorruption ne réprime pas, ou réprime de manière moins efficace et moins complète certaines activités de corruption. En continuant à se développer, la corruption ferait finalement peser sur la société un coût plus élevé, se traduisant par des activités criminelles qui perdurent, et pourrait également faciliter la poursuite des activités des groupes criminels organisés.
•Proportionnalité
Conformément au principe de proportionnalité énoncé à l’article 5, paragraphe 4, du TUE, la nouvelle directive proposée est limitée à ce qui est nécessaire et proportionné pour prévenir et combattre efficacement la corruption et pour mettre en œuvre les obligations et les normes internationales, en particulier en ce qui concerne l’incrimination de la corruption, conformément à la CNUCC.
La CNUCC exige que les parties à la convention adoptent les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale à la corruption, au détournement et au blanchiment de capitaux et qu’elles envisagent d’adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale à certains autres actes (abus de fonctions, trafic d’influence, et, sous réserve de leur constitution et des principes fondamentaux de leur système juridique, enrichissement illicite). Conformément aux engagements figurant dans la déclaration politique adoptée lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies de 2021 contre la corruption, l’Union européenne devrait, dans la mesure du possible, aller au-delà des mesures minimales et adopter des mesures supplémentaires pour prévenir et combattre la corruption.
La proposition définit le champ des infractions de corruption en vue de couvrir tous les comportements concernés, tout en le limitant à ce qui est nécessaire et proportionné. Elle renforce, si nécessaire, les obligations internationales existantes, afin d’améliorer la coopération transfrontière et d’empêcher les criminels d’exploiter à leur avantage les divergences existant entre les législations nationales.
L’incidence des mesures proposées sur les États membres, en ce qui concerne les ressources nécessaires et la nécessité d’adapter le cadre national, est contrebalancée par les avantages résultant de la capacité accrue des États membres à lutter contre la corruption au moyen du droit pénal, notamment une meilleure coopération transfrontière entre les autorités compétentes dans les affaires de corruption transfrontières. Le rapprochement des mesures liées à la prévention et à l’utilisation des outils d’enquête n’est prévu que dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du cadre de droit pénal proposé.
•Choix de l'instrument
Conformément à l’article 83 et à l’article 82, paragraphe 1, du TFUE, des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans le domaine de la grande criminalité revêtant une dimension transfrontière, y compris la corruption, peuvent uniquement être établies par le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de directives conformément à la procédure législative ordinaire.
3.RÉSULTATS DES ÉVALUATIONS EX POST, DES CONSULTATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES ET DES ANALYSES D’IMPACT
•Évaluations ex post/bilans de qualité de la législation existante
La convention de 1997 relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires, qui couvre la corruption dans le secteur public, et la décision-cadre 2003/568/JAI, qui couvre la corruption dans le secteur privé, n’ont fait l’objet d’aucune évaluation ex post.
À ce jour, la Commission a adopté deux rapports sur la mise en œuvre de la directive (UE) 2017/1371. Le 6 septembre 2021, la Commission a adopté le premier de ces rapports, qui indique que tous les États membres liés par la directive en avaient transposé les principales dispositions, mais que la transposition de la directive devrait encore être améliorée en ce qui concerne certaines autres dispositions. Le rapport constate qu’environ la moitié des États membres n’ont pas transposé certains aspects de la définition d’«agent public» dans leur législation nationale. Selon le rapport, plusieurs États membres devraient inclure la dimension supplémentaire de «manquement à des devoirs» dans leur définition de corruption active ou passive. Cette dimension supplémentaire réduit considérablement la portée des définitions de la corruption figurant dans la directive.
S’agissant de la «corruption passive», la Commission a constaté que, dans un petit nombre d’États membres, l’aspect relatif au non-accomplissement par les agents publics «d’un acte relevant de [leur] fonction» n’était pas couvert par la législation nationale. En matière de «corruption active», le rapport mentionne que certains aspects de la définition donnée dans la directive faisaient défaut ou n’étaient pas correctement transposés dans certains États membres. En ce qui concerne le détournement, la Commission a constaté que certains États membres avaient prévu une transposition plus restrictive de la disposition pertinente ou ne l’avaient pas du tout transposée. Le rapport mentionne également que, pour les sanctions, un quart des États membres n’avaient pas correctement transposé les dispositions de la directive. En ce qui concerne les délais de prescription, la Commission a relevé que, dans quelques États membres, le délai de prescription pour l’exécution d’une peine était inférieur à celui prévu dans la directive.
En septembre 2022, la Commission a adopté le deuxième rapport sur la mise en œuvre de la directive (UE) 2017/1371. Ce dernier était axé sur trois points spécifiques: i) le caractère adapté du seuil prévu par la directive pour la fraude à la TVA (10 millions d’EUR de préjudice total); ii) l’efficacité des dispositions relatives aux délais de prescription; et iii) l’efficacité de la directive pour lutter contre la fraude en matière de marchés publics. Conformément à l’article 18, paragraphe 3, de la directive (UE) 2017/1371, le rapport était principalement fondé sur les informations communiquées par les États membres à la Commission, notamment les statistiques annuelles sur les infractions pénales définies dans la directive.
•Consultation des parties intéressées
En 2022 et 2023, la Commission a consulté les États membres au sujet de leurs dispositions nationales existantes en ce qui concerne l’incrimination de la corruption et la lutte contre celle-ci, en demandant des informations actualisées au moyen de deux questionnaires, comme le décrit la section ci-dessous.
Les idées formulées au sujet d’un projet de directive, ainsi que les réponses aux questionnaires, ont été examinées dans le cadre de deux ateliers d’échange d’expériences sur la lutte contre la corruption. Ces ateliers ont eu lieu le 14 décembre 2022 et le 14 mars 2023, avec la participation d’experts des États membres, dont des représentants des ministères de l’intérieur et de la justice, des agences de lutte contre la corruption, de la police et des autorités judiciaires. La Commission a par ailleurs consulté les agences et organes de l’UE chargés d’appuyer la coopération policière et judiciaire entre les États membres, dont l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) et l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), ainsi que le Parquet européen et les autorités nationales chargées de la prévention et de la répression de la corruption.
La Commission a consulté et reçu des contributions de la part d’organisations internationales, dont l’ONUDC, l’OCDE et le GRECO. Le monde universitaire et la société civile ont également apporté leur contribution, dont Transparency International et la coalition de la CNUCC. Le 13 mars 2023, lors d’une réunion plénière des correspondants de recherche locaux sur la corruption, divers sujets en lien avec la proposition ont été abordés.
La présente proposition a également été examinée lors des réunions du réseau de points de contact sur l’état de droit (27 janvier 2023), du groupe d’experts sur les programmes de citoyenneté et de résidence par investissement (1er mars 2023), de la plateforme des CRF de l’UE (15 mars 2023) et du groupe d’experts de la Commission sur la politique pénale de l’UE (27 mars 2023).
Dans l’ensemble, les États membres et les parties intéressées ont souligné la nécessité d’harmoniser les infractions de corruption et les sanctions prévues en la matière, afin de lutter contre la corruption de manière globale et efficace dans toute l’UE. Les parties intéressées ont indiqué que, dans de nombreux cas, les définitions divergentes nuisaient à l’efficacité de la coopération transfrontière dans la répression des infractions de corruption. Le rapprochement des définitions respectives des infractions de corruption devrait améliorer l’échange d’informations et la coopération transfrontières entre les autorités répressives. En rapprochant les niveaux de sanction fixés pour les infractions de corruption, la répression et les moyens de dissuasion gagneraient aussi en efficacité dans l’ensemble de l’UE. Un certain nombre d’États membres ont fait valoir qu’une transposition littérale de l’infraction d’enrichissement illicite telle qu’elle est définie dans la CNUCC irait à l’encontre de la présomption d’innocence et des traditions constitutionnelles des États membres. Une grande partie des parties intéressées ont suggéré que la proposition devrait également couvrir la prévention de la corruption, inclure des sanctions supplémentaires, telles que l’inéligibilité ou l’interdiction d’exercer une fonction publique ou de participer à des appels d’offres publics, et faire ressortir l’importance des organismes spécialisés de lutte contre la corruption, en leur accordant suffisamment d’indépendance, de formations et de ressources.
Un appel à contributions a été organisé du 20 janvier 2023 au 17 février 2023 et a permis de recueillir 361 contributions au total. Les réponses ont confirmé l’importance vitale de la lutte anticorruption et la nécessité de lutter contre ce phénomène dans l’UE à de multiples niveaux, y compris au sein des institutions européennes. Si la grande majorité des réponses appelaient à adopter des mesures supplémentaires, certaines soulignaient également la nécessité de veiller à la bonne application du cadre international existant et de réfléchir soigneusement à l’adoption de nouvelles initiatives juridiques ou non contraignantes. Plusieurs contributions soulignaient l’existence d’un lien étroit entre la corruption et la criminalité organisée. Au sujet du renforcement du cadre actuel, la plupart des répondants s’accordaient sur le fait que les lacunes législatives devaient être comblées et que l’incrimination devrait porter sur des activités criminelles ne relevant pas de l’actuel cadre législatif international, en prévoyant les sanctions correspondantes. Selon certains répondants, pour résoudre efficacement les affaires de corruption complexes, les autorités répressives devraient disposer de moyens adéquats en termes de ressources, de formation, de techniques d’enquête spéciales et d’équipements spécialisés. Plusieurs répondants ont demandé la création, en collaboration avec la société civile, d’un outil de suivi et de vérification.
•Obtention et utilisation d'expertise
Conformément à l’engagement pris dans le cadre de la stratégie de l’Union visant à lutter contre la criminalité organisée pour la période 2021-2025, la Commission européenne a commandé une étude en vue du réexamen de l’acquis de l’UE en matière de lutte contre la corruption. L’étude « Strengthening the fight against corruption: assessing the EU legislative and policy framework », réalisée par un consortium formé par EY et RAND Corporation, a été publiée le 3 janvier 2023. Ses auteurs ont analysé les lacunes du cadre législatif de l’UE en matière de prévention et de répression de la corruption et ont formulé des recommandations concernant les mesures que l’UE pourrait prendre pour y remédier, en évaluant et en comparant leurs incidences.
L’étude a conclu qu’un alignement législatif plus étroit entre les États membres de l’UE, accompagné de mesures non contraignantes de soutien, aurait le plus d’effets pour la lutte anticorruption. Concrètement, l’étude préconisait d’établir des règles minimales communes pour la définition des infractions de corruption et les sanctions y afférentes, ainsi que des règles communes en vue d’améliorer les enquêtes et les poursuites concernant les actes de corruption dans l’ensemble des États membres (par exemple, en encourageant la dénonciation de ces actes et en harmonisant les approches adoptées en matière d’immunité et de prescription, ainsi qu’à l’égard des facilitateurs de la corruption). Ces conclusions ont été prises en considération dans la présente proposition de directive. L’étude préconisait en outre des mesures visant à prévenir efficacement la corruption, notamment une collecte exhaustive de données sur la corruption et la mise en place d’autorités anticorruption spécifiques, tant au niveau de l’UE qu’au niveau national.
La Commission a également tenu compte d’autres éléments, tels que les enquêtes Eurobaromètre de 2022 sur la corruption. Elle s’est aussi appuyée sur des documents ad hoc de l’ONUDC, de l’OCDE, du GRECO et du service de recherche du Parlement européen.
Comme indiqué ci-dessus, la Commission a envoyé un questionnaire aux États membres afin de déterminer les données de justice pénale sur les infractions de corruption qui étaient disponibles. Si la plupart des États membres collectent des données sur les affaires de corruption, tous les États membres qui ont répondu ne semblent pas recueillir des données sur les condamnations de personnes morales, le nombre d’affaires pendantes et les affaires résolues autrement que par une condamnation ou un acquittement. Cela indique qu’une collecte plus harmonisée de données sur les affaires de corruption pourrait permettre de cerner et d’analyser les tendances dans l’ensemble de l’UE.
La Commission a également demandé aux États membres de fournir des informations sur leurs organismes spécialisés chargés de la prévention de la corruption, y compris ceux dotés de certains pouvoirs répressifs (tels que la perception d’amendes). La plupart des États membres ont indiqué avoir un ou plusieurs organismes jouant un rôle dans le domaine de la prévention de la corruption. Dans de nombreux États membres, il existe plusieurs organismes de ce type dotés de compétences propres, mais certains États membres disposent d’un organe unique doté de pouvoirs plus étendus. Huit États membres ont indiqué ne pas disposer d’un organisme de prévention spécialisé, mais plutôt d’organismes qui, outre leurs autres missions, sont également chargés de la prévention.
La Commission a aussi demandé aux États membres des informations sur les pouvoirs de leurs organismes spécialisés chargés de prévenir la corruption. Cette cartographie révèle une grande diversité des tâches et des pouvoirs de ces organismes, qui vont de compétences liées à la surveillance des déclarations de patrimoine/d’intérêts ou des dons jusqu’au contrôle de l’application de la réglementation sur le lobbying et des règles relatives au «pantouflage». Certains organismes disposent également de pouvoirs répressifs tels que l’imposition d’amendes.
Les États membres ont en outre été interrogés sur leurs organismes spécialisés de répression de la corruption. Si tous les États membres autorisent les services policiers et judiciaires généraux à enquêter et à poursuivre certaines formes de corruption, la quasi-totalité d’entre eux ont également mis en place une forme de police spécialisée chargée d’enquêter sur des affaires de corruption spécifiques, par exemple lorsqu’elles sont plus graves, plus complexes ou concernent une certaine catégorie de suspects. En ce qui concerne les poursuites en matière de corruption, la plupart des États membres disposent de parquets spécialisés pour traiter ce type d’affaires.
Un deuxième questionnaire, pour lequel les contributions ont été recueillies entre le 9 janvier et le 8 février 2023, était axé sur les informations relatives aux infractions de corruption, afin d’informer et de guider la Commission en vue de la présente proposition. Les États membres ont été invités à communiquer leurs dispositions juridiques nationales relatives à ces infractions, telles que définies dans la CNUCC, la durée maximale des peines d’emprisonnement prévues pour de telles infractions et les délais de prescription en vigueur. Les infractions de corruption au sujet desquelles les informations étaient demandées étaient la corruption dans les secteurs public et privé, le détournement par un agent public ou dans le secteur privé, le trafic d’influence, l’abus de fonctions, l’enrichissement illicite et l’entrave à la justice. Tous les États membres, à l’exception de la Bulgarie et du Danemark, ont répondu au questionnaire. Les conclusions de ce questionnaire sont résumées ci-après.
Graphique 1 – Incrimination des infractions de corruption dans les États membres
INFRACTIONS
|
NOMBRE D’EM DANS LESQUELS L’INFRACTION EST COUVERTE PAR LE DROIT NATIONAL
|
NOMBRE D’EM DANS LESQUELS L’INFRACTION N’EST PAS COUVERTE PAR LE DROIT NATIONAL
|
Corruption dans le secteur public
|
25
|
0
|
Corruption dans le secteur privé
|
25
|
0
|
Abus de confiance, détournement et autres formes d’appropriation frauduleuse de biens par un agent public
|
25
|
0
|
Abus de confiance dans le secteur privé
|
25
|
0
|
Trafic d’influence
|
23
|
2
|
Abus de fonctions
|
25
|
0
|
Enrichissement illicite
|
8
|
17
|
Entrave à la justice
|
25
|
0
|
L’analyse des informations communiquées par les États membres montre que ceux-ci ont inclus, dans leur législation nationale, des infractions relatives à la corruption dans les secteurs public et privé, aux abus de confiance, aux détournements, à l’entrave à la justice et à l’abus de fonctions. Néanmoins, les définitions présentent de nombreuses divergences, notamment en ce qui concerne l’abus de confiance ou l’abus de fonctions. Il ne saurait être conclu que les États membres couvrent toute la portée des infractions de corruption définies dans la CNUCC. De nombreux États membres déclarent avoir incriminé le trafic d’influence dans leur législation nationale, mais certaines définitions diffèrent sensiblement de la disposition pertinente de la CNUCC et, parfois, l’infraction n’est que partiellement couverte. L’enrichissement illicite demeure peu couvert: huit États membres ont indiqué qu’il figurait sous une forme ou une autre dans leur législation nationale, tandis que plusieurs autres ont expliqué que ces aspects relevaient de leur législation en matière de blanchiment de capitaux ou de confiscation d’avoirs. Les différences de définition des infractions et la non-incrimination de certains comportements corrompus sont source de problèmes dans les affaires transfrontières et conduisent certains organismes de contrôle à critiquer la manière dont les États membres mettent en œuvre les instruments internationaux.
Graphique 2 – Peines d’emprisonnement prévues pour les infractions de corruption dans les États membres
Durée des peines d’emprisonnement dans les États membres
|
UE – Fourchette en années (selon les contributions reçues)
|
UE – Moyenne en années (selon les contributions reçues)
|
Valeur médiane
en années
|
Corruption dans le secteur public
|
0,25 - 15
|
6,94 - 9,59
|
6 - 10
|
Corruption dans le secteur privé
|
0,25 - 12
|
5,74 - 6,43
|
5 - 6
|
Abus de confiance, détournement et autres formes d’appropriation frauduleuse de biens par un agent public
|
0,25-15
|
6,15 - 8,34
|
-6 - 10
|
Abus de confiance dans le secteur privé
|
0,25 - 20
|
5,57 - 8,08
|
5 - 8
|
Trafic d’influence
|
0,25-10
|
4,87 - 5,53
|
5
|
Abus de fonctions
|
1 - 20
|
–5.92 - 6.56
|
4-5
|
Enrichissement illicite
|
0,5 - 15
|
5,38 - 7,19
|
3,5 - 6
|
Entrave à la justice
|
1 - perpétuité
|
5,58 - 8,67
|
4,5-6
|
Pour fixer le niveau minimal de la peine maximale pour les infractions dans la présente proposition, la Commission a tenu compte de la nature des infractions, des niveaux de sanctions fixés dans les États membres (voir graphique 2) et des niveaux fixés par d’autres instruments de l’UE dans le domaine du droit pénal matériel. Les sanctions proposées dans la présente directive ne vont pas au-delà du niveau moyen des sanctions maximales applicables à ces infractions dans les États membres. Par exemple, la sanction moyenne pour des faits de corruption dans le secteur public varie entre 7 et 9,5 ans, tandis que pour la corruption dans le secteur privé, elle varie entre 5,5 et 6 ans. Cependant, il existe également des différences importantes entre les législations des États membres. Par exemple, les sanctions maximales pour l’infraction de détournement vont de 3 mois en Espagne à 15 ans en Grèce. La fixation, au niveau de l’UE, d’un seuil minimal pour la peine maximale simplifiera donc la coopération policière et judiciaire transfrontière et renforcera l’effet dissuasif.
Graphique 3 – Délais de prescription prévus pour les infractions de corruption dans les États membres
Délais de prescription dans les États membres
|
UE – Fourchette en années
(sur la base des contributions reçues)
|
UE – Moyenne en années
(sur la base des contributions reçues)
|
Valeur médiane
en années
|
Corruption dans le secteur public
|
3 - 25
|
10,76 -14.28
|
10 - 12
|
Corruption dans le secteur privé
|
3 - 25
|
10,26 -11.70
|
10
|
Abus de confiance, détournement et autres formes d’appropriation frauduleuse de biens par un agent public
|
3 - 25
|
10,50 - 13,20
|
10 - 12
|
Abus de confiance dans le secteur privé
|
3 - 25
|
9,42 - 12,19
|
10
|
Trafic d’influence
|
2 - 25
|
9,00 - 10,82
|
8 - 10
|
Abus de fonctions
|
5 - 25
|
10,48 - 11,63
|
9 - 10
|
Enrichissement illicite
|
5 - 20
|
10,13 - 11,38
|
10 - 11
|
Entrave à la justice
|
3 - 25
|
9,25 - 12,70
|
10
|
|
|
|
|
La Commission a tenu compte des réponses des États membres relatives aux délais de prescription prévus pour les infractions de corruption dans leur législation nationale pour élaborer sa proposition actuelle. Pour la corruption dans le secteur public, la moyenne varie entre 11 et 14 ans, tandis que pour la corruption dans le secteur privé, elle varie entre 10 et 11,5 ans. Cependant, il existe aussi des différences considérables entre les législations des États membres: pour la corruption dans les secteurs public et privé, les délais de prescription minimaux et maximaux vont de 3 ans, dans des États membres tels que la Tchéquie ou la Lituanie, à 25 ans en Pologne.
Les rapports annuels sur l’état de droit ont souligné que des lacunes opérationnelles pouvaient entraver gravement les enquêtes et les poursuites dans les affaires de corruption et nuire à l’efficacité de la lutte contre la corruption. Citons par exemple les dispositions excessivement lourdes ou peu claires relatives à la levée des immunités et les délais de prescription très courts, qui peuvent empêcher la finalisation d’affaires complexes, en particulier s’ils se conjuguent à d’autres facteurs contribuant à allonger les procédures. Ces obstacles peuvent être particulièrement préjudiciables dans les affaires de corruption complexes et à haut niveau et peuvent créer un risque d’impunité, dénuant ainsi de leurs effets dissuasifs les efforts de lutte contre la corruption.
•Analyse d’impact
Étant donné que la présente proposition de directive intègre essentiellement des obligations et des normes internationales, en laissant peu de place à des solutions alternatives, elle est exceptionnellement présentée sans être accompagnée d’une analyse d’impact. En outre, l’initiative n’est pas susceptible d’avoir des incidences et des coûts économiques, environnementaux ou sociaux importants, ou d’entraîner des dépenses importantes. Elle devrait cependant être bénéfique à l’économie et à la société dans son ensemble.
La présente proposition s’appuie néanmoins sur les éléments recueillis dans le cadre des études externes et évaluations décrites dans la partie précédente et lors des différentes consultations effectuées auprès des parties intéressées.
Diverses approches ont été envisagées sur la base des éléments disponibles:
1.une action non législative au niveau de l’UE ou au niveau national, comprenant des lignes directrices, l’échange des meilleures pratiques, des séances de formation et l’établissement de tableaux de correspondance pour les infractions liées à la corruption;
2.une proposition transposant les dispositions de la CNUCC;
3.une proposition transposant les dispositions de la CNUCC tout en allant au-delà des obligations internationales pour certains aspects, en imposant des niveaux minimaux pour le plafond des sanctions, afin de faciliter les poursuites et de sensibiliser davantage les agents publics à l’éthique et à l’intégrité;
4.une proposition définissant les différentes conditions et les différents éléments de toutes les infractions de corruption potentielles et les exigences en matière de mesures préventives, telles que des règles relatives au lobbying et aux conflits d’intérêts.
Sur la base des éléments recueillis et des précédentes évaluations décrites ci-dessus, la Commission a choisi une approche (option 3 ci-dessus) qui propose une harmonisation alignée sur les dispositions de la CNUCC, mais en se montrant plus ambitieuse et en allant au-delà des obligations internationales dans les domaines où une action présente des avantages manifestes en termes de coopération transfrontière, tout en respectant les traditions et la jurisprudence nationales et en veillant à la cohérence avec le droit de l’Union.
La proposition législative devrait contribuer de façon positive à la prévention, la détection et la répression de la corruption, notamment en rapprochant les définitions des infractions pénales et en alignant les sanctions pénales. Adopter des mesures de prévention de la corruption, tout en poursuivant les auteurs et en jugulant le phénomène criminel de la corruption, devrait permettre d’en réduire les coûts économiques et sociaux et avoir une incidence positive sur l’économie. La mise en place de sanctions dissuasives pour les auteurs d’infractions devrait accroître le niveau global de sécurité et porter un coup d’arrêt aux activités des groupes criminels organisés. Une harmonisation accrue dans ce domaine permettrait en principe à l’UE de poursuivre son alignement sur les normes internationales en matière de corruption et de réduire la charge administrative en cas de coopération transfrontière entre les services répressifs et les autorités judiciaires.
•Réglementation affûtée et simplification
Pour la première fois au niveau de l’UE, la proposition réunit dans un seul acte juridique la corruption dans le secteur public et dans le secteur privé. La proposition vise à introduire des obligations et des normes internationales dans la législation de l’UE et à actualiser le cadre juridique pour qu’il puisse répondre de manière adéquate au phénomène transfrontière que constitue la corruption. Cela aidera les États membres au moment de la transposition et de la mise en œuvre des dispositions concernées.
•Droits fondamentaux
L’Union a été fondée sur les valeurs consacrées à l’article 2 du TUE; elle reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la charte des droits fondamentaux conformément à l’article 6, paragraphe 1, du TUE. La corruption porte atteinte aux institutions démocratiques et aux valeurs de l’UE, dont la protection des droits fondamentaux. En luttant contre la corruption, la présente proposition contribue de façon positive à la protection des droits fondamentaux, tels que le droit à un procès équitable et la liberté d’expression.
La lutte contre la corruption et la protection des droits fondamentaux sont des objectifs complémentaires, et non contradictoires. L’introduction, la mise en œuvre et l’application de l’incrimination doivent être réalisés dans le plein respect des obligations en matière de droits fondamentaux. Toute limitation de l’exercice des droits et libertés fondamentaux est soumise aux conditions énoncées à l’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, c’est-à-dire qu’elle doit satisfaire au principe de proportionnalité au regard de la finalité légitime de répondre effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui, et elle doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés.
À cet égard, divers droits et libertés fondamentaux consacrés par la charte des droits fondamentaux doivent être pris en compte. Les droits particulièrement pertinents pour les mesures proposées sont, notamment, le droit à la liberté et à la sûreté, la protection des données à caractère personnel, la liberté professionnelle et le droit de travailler, la liberté d’entreprise, le droit de propriété, le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, ainsi que le principe selon lequel une personne ne peut être jugée ou sanctionnée deux fois pour un même fait («ne bis in idem»).
Toutes les mesures adoptées par l’Union et ses États membres en rapport avec l’incrimination de la corruption conformément à la présente directive, et la détermination de sanctions pénales et non pénales s’y appliquant, doivent être soumises au principe de légalité et de proportionnalité des délits et des peines, à la présomption d’innocence et aux droits de la défense, et devraient exclure toute forme d’arbitraire.
La présente proposition respecte le principe de légalité et de proportionnalité des délits et des peines. Les droits fondamentaux en général et le principe de proportionnalité sont respectés, par la limitation du champ des infractions à ce qui est nécessaire pour permettre de poursuivre effectivement des actes qui constituent une menace particulière pour la stabilité et la sécurité des sociétés. La proposition tient également compte du principe de proportionnalité, en prévoyant des obligations liées aux circonstances aggravantes et atténuantes.
La directive introduit des règles minimales concernant le niveau des sanctions, conformément au principe de proportionnalité (voir notamment l’article 11, paragraphe 1, et l’article 13, paragraphe 1, de la directive), compte tenu de la nature de l’infraction. En outre, les sanctions administratives infligées doivent être prises en considération lors de la condamnation de la personne pour une infraction pénale prévue dans la directive (considérant 13). La directive souligne également que, afin de garantir l’efficacité et la transparence des enquêtes et des poursuites en matière d’infractions de corruption, les États membres devraient établir des procédures de suspension ou de réaffectation temporaire des agents publics accusés d’une infraction définie dans la présente directive. Dans de tels cas, ils devraient garder à l’esprit le principe de la présomption d’innocence et la nécessité de respecter le droit à un recours effectif (considérant 19).
L’utilisation d’outils d’enquête, à laquelle tend la directive, doit respecter les droits fondamentaux, tels que le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial (article 47), la présomption d’innocence et les droits de la défense (article 48). L’utilisation de tels outils devrait, conformément au droit national, être ciblée et tenir compte du principe de proportionnalité et de la nature et de la gravité des infractions qui font l’objet de l’enquête, et respecter le droit à la protection des données à caractère personnel. En outre, lorsqu’ils appliquent la directive, les États membres doivent respecter les obligations qui leur incombent au titre du droit de l’Union en ce qui concerne les droits procéduraux des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre de procédures pénales.
Les données recueillies par les États membres aux fins de la présente directive sont statistiques et ne comprennent aucune donnée à caractère personnel; par conséquent, l’article 8 de la charte des droits fondamentaux («Protection des données à caractère personnel») n’est pas affecté par l’obligation imposée aux États membres de collecter et de publier des données.
4.INCIDENCE BUDGÉTAIRE
La présente proposition n’a aucune incidence immédiate sur le budget de l’Union.
5.AUTRES ÉLÉMENTS
•Plans de mise en œuvre et modalités de suivi, d'évaluation et d'information
La mise en œuvre de la directive sera contrôlée par la Commission sur la base des informations fournies par les États membres relatives aux mesures adoptées pour mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive. La Commission présentera, deux ans après la date limite de mise en œuvre de la présente directive, un rapport au Parlement européen et au Conseil évaluant dans quelle mesure les États membres auront pris les dispositions nécessaires pour se conformer à la présente directive.
Quatre ans après la date limite de mise en œuvre de la présente directive, la Commission présentera au Parlement européen et au Conseil un rapport évaluant la valeur ajoutée de la présente directive au regard de la lutte contre la corruption, y compris son incidence sur les libertés et droits fondamentaux. Sur la base de cette évaluation, la Commission décidera, s’il y a lieu, des mesures de suivi appropriées.
•Documents explicatifs
Aucun document explicatif sur la transposition n’est jugé nécessaire.
•Explication détaillée de certaines dispositions de la proposition
Article premier: objet et champ d’application – Cette disposition définit l’objet et le champ d’application du projet de directive; en particulier, elle établit des règles minimales concernant la définition des infractions pénales et des sanctions dans le domaine de la corruption, ainsi que des mesures visant à mieux prévenir et combattre la corruption.
Article 2: définitions – Cette disposition établit une définition des «biens» (en relation avec les infractions de corruption mentionnées aux articles 7 à 13) conforme à l’acquis de l’UE et une définition des «personnes morales» (en relation avec l’obligation d’établir la responsabilité des personnes morales visée à l’article 16). La notion d’«agent public» est fondée sur les définitions figurant dans la convention de 1997 et dans la directive (UE) 2017/1371, tout en indiquant explicitement qu’elle recouvre également les personnes travaillant dans des pays tiers, des organisations internationales, y compris les institutions de l’Union européenne, ainsi qu’au sein des juridictions nationales et internationales. La présente directive utilise une définition unique de l’«agent public», qui s’applique à toutes les infractions de corruption qui y sont énoncées. La notion d’«agent de haut niveau» est définie par rapport aux circonstances aggravantes (articles 18 et 28), aux mesures de prévention (article 23) et à la collecte de données (article 25).
Article 3: prévention de la corruption – Cette disposition a pour but de souligner la nécessité d’aborder la lutte contre la corruption d’un point de vue préventif. Elle promeut les activités de sensibilisation à la lutte anticorruption, au moyen de programmes d’éducation et de recherche associant la société civile et les organisations non gouvernementales. Pour instaurer un tel système préventif de manière correcte, un processus adéquat d’évaluation des risques est nécessaire, afin de détecter les lacunes et les secteurs les plus exposés au risque de corruption, et d’y remédier. Comme l’expose la communication accompagnant la présente proposition, la Commission cartographiera d’ici à 2024, avec l’aide du réseau de l’UE contre la corruption et en étroite consultation avec les États membres, les zones à haut risque communes. Les résultats alimenteront l’évaluation nationale des risques par les États membres, requise par la présente proposition.
Article 4: organismes spécialisés – Cette disposition impose aux États membres d’avoir ou de mettre en place, dans leur ordre juridique national, des organismes spécialisés dans la prévention et la répression de la corruption. Ces organismes doivent être indépendants, être dotés de ressources humaines, financières, techniques et technologiques suffisantes et disposer des pouvoirs nécessaires à l’accomplissement de leurs tâches. Ils doivent être connus du public et exercer leurs fonctions en toute transparence, intégrité et responsabilité.
Article 5: ressources – Cette disposition vise à garantir que les autorités des États membres chargées de la détection, des enquêtes, des poursuites ou du jugement des infractions relevant de la directive disposent en permanence des ressources humaines, financières, techniques et technologiques nécessaires à l’exercice effectif de leurs fonctions.
Article 6: formation – Cette disposition oblige les États membres à dispenser aux autorités compétentes et à leur personnel une formation spécialisée sur la lutte anticorruption et à veiller à ce que des ressources suffisantes soient disponibles à cet effet. Elle contient également des obligations concernant la formation appropriée des agents publics.
Articles 7 et 8: corruption – Ces dispositions définissent la corruption dans les secteurs public et privé et prévoient que ce comportement, lorsqu’il est intentionnel, est passible de sanctions en tant qu’infraction pénale. La définition des infractions pénales couvre à la fois la corruption active et la corruption passive.
Article 9: détournement – Cette disposition définit le détournement dans les secteurs public et privé et prévoit que ce comportement, lorsqu’il est intentionnel, est passible de sanctions en tant qu’infraction pénale.
Article 10: trafic d’influence – Cette disposition définit le trafic d’influence et prévoit que ce comportement, lorsqu’il est intentionnel, est passible de sanctions en tant qu’infraction pénale. Elle précise également que le trafic d’influence est punissable indépendamment du fait que l’influence soit exercée ou non et qu’elle aboutisse ou non à des résultats.
Article 11: abus de fonctions – Cette disposition définit l’abus de fonctions dans les secteurs public et privé et prévoit que ce comportement, lorsqu’il est intentionnel, est passible de sanctions en tant qu’infraction pénale.
Article 12: entrave au bon fonctionnement de la justice – Cette disposition définit ce type d’entrave et prévoit que ce comportement, lorsqu’il est intentionnel et commis dans le cadre d’une procédure en rapport avec une infraction définie dans la présente directive, est passible de sanctions en tant qu’infraction pénale.
Article 13: enrichissement lié aux infractions de corruption – La directive (UE) 2018/1673 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2018 visant à lutter contre le blanchiment de capitaux au moyen du droit pénal établit des règles de base concernant l’incrimination du blanchiment de capitaux et mentionne que la corruption doit être considérée comme constituant une infraction principale en matière de blanchiment de capitaux. Elle n’oblige toutefois pas les États membres à incriminer l’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens provenant de la corruption lorsqu’une personne est impliquée dans l’infraction dont le bien provient (ce que l’on appelle l’«auto-blanchiment»). La présente proposition de directive introduit une telle obligation ciblée, en créant ainsi l’infraction d’«enrichissement par la corruption». Pour cette infraction, les autorités judiciaires devraient uniquement prouver l’existence d’un lien entre les biens et la participation à des faits de corruption, de la même manière qu’elles devraient démontrer que la corruption était une infraction principale en matière de blanchiment de capitaux.
Article 14: incitation, complicité et tentative – Il s’agit d’une disposition applicable aux infractions pénales mentionnées ci-dessus, qui impose aux États membres d’incriminer des formes de participation à la commission de la plupart desdites infractions, à avoir la complicité, l’incitation et la tentative.
Le fait de se rendre complice d’une infraction de corruption peut englober un large éventail d’activités, allant de la fourniture d’une assistance ou de conseils jusqu’à la fourniture de services d’appui pour la perpétration de ces actes. En outre, afin de garantir un effet dissuasif suffisant, il est nécessaire d’incriminer l’incitation, en rendant punissable le fait de demander à autrui de perpétrer les infractions énoncées dans la directive proposée. Étant donné que la définition de certaines infractions de corruption, telles que la corruption dans les secteurs public et privé, englobe des actes qui peuvent être considérés comme préparatoires et n’exige pas que l’auteur de l’infraction ait effectivement obtenu un avantage, la présente directive n’impose pas aux États membres d’incriminer la tentative de commettre lesdites infractions.
Article 15: sanctions et mesures à l’encontre des personnes physiques – Cette disposition s’applique à toutes les infractions et impose aux États membres d’infliger des sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives.
En outre, cette disposition fixe le niveau minimum de la peine maximale. La décision-cadre 2003/568/JAI établit déjà que la peine maximale encourue pour des faits de corruption dans le secteur privé doit être d’au moins un à trois ans. La convention de 1997 relative à la lutte contre la corruption impose, pour la corruption d’agents publics, à tout le moins dans les cas graves, des peines privatives de liberté pouvant donner lieu à extradition.
La présente proposition établit une peine maximale d’au moins quatre à six ans, en fonction de la gravité de l’infraction, ce qui est plus élevé que les sanctions susmentionnées prévues au niveau de l’UE pour la corruption. Comme il est expliqué ci-dessus, la Commission a analysé la législation des États membres en vue de l’élaboration de la présente législation.
La décision-cadre 2003/568/JAI prévoit déjà la possibilité de déchoir temporairement une personne condamnée pour corruption du droit d’exercer son activité professionnelle. La présente directive fixe plusieurs sanctions supplémentaires que les autorités compétentes devraient pouvoir infliger aux personnes condamnées pour une infraction de corruption.
Article 16: responsabilité des personnes morales – Applicable à l’ensemble des infractions pénales énoncées dans la présente directive, cette disposition impose aux États membres de faire en sorte que la responsabilité des personnes morales puisse être engagée, tout en excluant que cette responsabilité se substitue à celle des personnes physiques. Elle s’inscrit dans le droit fil de l’article 10 de la convention de Varsovie.
Cette disposition suit une formulation standard qui figure dans d’autres instruments juridiques de l’Union et qui oblige les États membres à prendre les mesures nécessaires pour que les personnes morales puissent être tenues pour responsables des infractions pénales définies dans la présente directive, lorsque ces dernières sont commises à leur profit par toute personne qui exerce un pouvoir de direction en leur sein ou par d’autres personnes placées sous leur contrôle ou surveillance. Il n’est pas nécessaire que cette responsabilité soit exclusivement pénale.
Article 17: sanctions à l’encontre des personnes morales – Cette disposition est applicable aux sanctions prévues pour les personnes morales. Elle établit une liste de sanctions et de mesures qui ne sont pas nécessairement de nature pénale, telles que l’exclusion temporaire ou permanente des procédures de marchés publics.
Article 18: circonstances aggravantes et atténuantes – Cette disposition établit tout d’abord une liste des circonstances qui doivent être considérées comme aggravantes, pour permettre au pouvoir judiciaire de tenir compte des dommages causés plus largement à la société, par exemple, par des groupes organisés ou des personnes occupant des postes à responsabilité publique. Elle établit également une liste de circonstances qui doivent être considérées comme atténuantes, par exemple, les cas dans lesquels les auteurs fournissent des informations ou collaborent avec les autorités.
Article 19: privilèges ou immunité en matière d’enquêtes et de poursuites concernant les infractions de corruption – Il s’agit d’une disposition applicable à toutes les infractions susmentionnées, qui impose aux États membres de prendre des mesures pour que l’immunité ou les privilèges en matière d’enquête et de poursuites accordés en vertu du droit national pour les infractions définies dans la présente directive puissent être levés au moyen d’une procédure efficace et transparente préalablement établie par la loi et conclue dans un délai raisonnable.
Article 20: compétence – Cette disposition est applicable à toutes les infractions pénales définies dans la présente directive et exige l’existence de critères de compétence permettant aux autorités judiciaires d’ouvrir des enquêtes, d’engager des poursuites et de traduire en justice les auteurs des infractions pénales définies dans la présente directive.
Article 21: délais de prescription des infractions pénales – Cet article établit des dispositions relatives aux délais de prescription, afin de permettre aux autorités compétentes de rechercher, de poursuivre et de juger les infractions pénales relevant de la présente proposition, ainsi que de permettre l’exécution des sanctions correspondantes, pendant une durée suffisante. La présente proposition fixe la durée minimale des délais de prescription entre huit et quinze ans, en fonction de la gravité de l’infraction.
Article 22: protection des personnes qui signalent des infractions ou concourent à l’enquête – La directive (UE) 2019/1937 établit des règles et des procédures visant à protéger les personnes qui transmettent des informations qu’elles ont obtenues dans un contexte professionnel sur des infractions au droit de l’Union dans des domaines d’action clés. Les lanceurs d’alerte peuvent fournir aux autorités compétentes des informations précieuses, qui leur permettent de prévenir, déceler et poursuivre efficacement des faits de corruption. Lorsqu’un lanceur d’alerte dénonce des infractions pénales définies dans la présente directive, cette disposition exige l’application de la directive (UE) 2019/1937. Cet article prévoit également que les autorités nationales compétentes veillent à ce que les personnes qui concourent aux enquêtes reçoivent la protection, le soutien et l’assistance nécessaires dans le cadre de la procédure pénale.
Article 23: outils d’enquête – Cette disposition vise à ce que les outils prévus par la législation nationale pour les affaires relatives à la criminalité organisée ou à d’autres formes graves de criminalité puissent également être utilisés dans les affaires de blanchiment de capitaux.
Article 24: coopération entre les autorités des États membres, la Commission, Europol, Eurojust, l’Office européen de lutte antifraude et le Parquet européen – Cette disposition prévoit une coopération entre les autorités des États membres, Europol, Eurojust, le Parquet européen et la Commission dans la lutte contre la corruption. Cette coopération comprend la fourniture d’une assistance technique et opérationnelle par Europol, Eurojust, l’OLAF, le Parquet européen et la Commission.
Article 25: soutien de la Commission aux États membres et à leurs autorités compétentes – Cette disposition définit les moyens par lesquels la Commission aidera les États membres et les autorités compétentes à respecter les obligations qui leur incombent en vertu de la présente directive. Comme l’annonce la communication qui accompagne la présente proposition, la Commission mettra en place un réseau européen de lutte contre la corruption, qui rationalisera et soutiendra les réseaux existants et optimisera l’échange de bonnes pratiques entre les autorités et agences nationales, la société civile et les experts indépendants.
Article 26: collecte de données et statistiques – Cette disposition impose aux États membres de collecter des données statistiques afin de contrôler l’efficacité de leurs systèmes de lutte contre la corruption. Cette disposition énumère, de manière non exhaustive, les données statistiques que les États membres doivent collecter et leur impose de les publier chaque année.
Article 27: remplacement de la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil et de la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne – Cette disposition remplace les dispositions actuelles en matière d’incrimination de la corruption pour les États membres participant à la présente directive.
Article 28: modifications apportées à la directive (UE) 2017/1371 – Cette disposition modifie la directive (UE) 2017/1371 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal. En conséquence, les règles énoncées dans la directive (UE) 2017/1371 pour la lutte contre la corruption portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, et plus particulièrement les sanctions à l’égard des personnes physiques et morales, les circonstances aggravantes et atténuantes et les délais de prescription, sont alignées sur celles établies par la présente directive.
Article 29: transposition – La Commission fera rapport sur la transposition de la présente directive 24 mois après l’expiration du délai de transposition, soit 18 mois après l’adoption de la présente directive.
Article 30: évaluation et rapports – Cette disposition prévoit que, après l’écoulement des 12 mois suivant la date limite de mise en œuvre de la présente directive, les États membres font rapport tous les deux ans sur la manière dont ils mettent en œuvre les articles 3 à 6, et que la Commission adoptera également un rapport d’évaluation.
2023/0135 (COD)
Proposition de
DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL
relative à la lutte contre la corruption, remplaçant la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil et la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l'Union européenne, et modifiant la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 82, paragraphe 1, point d), et son article 83, paragraphes 1 et 2,
vu la proposition de la Commission européenne,
après transmission du projet d’acte législatif aux parlements nationaux,
statuant conformément à la procédure législative ordinaire,
considérant ce qui suit:
(1)La corruption demeure un problème important au niveau de l’Union, qui menace la stabilité et la sécurité des sociétés, notamment en créant le terreau de la criminalité organisée et d’autres formes graves de criminalité. Elle porte atteinte aux institutions démocratiques et aux valeurs universelles sur lesquelles l’Union est fondée, en particulier l’état de droit, la démocratie, l’égalité et la protection des droits fondamentaux. Elle met en péril le développement, la prospérité ainsi que la durabilité et le caractère inclusif de nos économies. Afin de prévenir et de combattre efficacement la corruption, il est indispensable d’adopter une approche globale et pluridisciplinaire. L’objectif de la présente directive est de lutter contre la corruption au moyen du droit pénal, en permettant une meilleure coopération transfrontière entre autorités compétentes.
(2)La décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil prévoit des obligations pour ce qui est d’ériger en infraction pénale la corruption dans le secteur privé. La convention établie sur la base de l’article K.3, paragraphe 2, point c), du traité sur l’Union européenne relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne vise certains actes de corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres en général. Ces instruments ne sont toutefois pas suffisamment complets, et l’incrimination actuelle de la corruption varie d’un État membre à l’autre, ce qui fait obstacle à une réponse cohérente et efficace dans l’ensemble de l’Union. Des lacunes sur le plan du contrôle de l’application de la réglementation et des entraves à la coopération entre autorités compétentes des différents États membres sont également apparues. La présente directive vise à modifier et à étendre les dispositions de ces instruments. Les modifications devant être apportées à ces instruments étant significatives tant par leur nombre que par leur nature, il convient, dans un souci de clarté, de remplacer intégralement ces deux instruments pour les États membres liés par la présente directive.
(3)Il y a lieu de mettre à jour et de renforcer le cadre juridique existant afin de favoriser une lutte efficace contre la corruption dans l’ensemble de l’Union. La présente directive vise à ériger en infraction pénale les infractions de corruption lorsque celles-ci sont commises intentionnellement. L’intention et la connaissance peuvent se déduire de circonstances objectives et factuelles. La présente directive prévoyant des règles minimales, les États membres conservent toute latitude d’adopter ou de maintenir des règles pénales plus strictes en matière d’infractions de corruption.
(4)La corruption est un phénomène transnational qui touche toutes les sociétés et toutes les économies. Les mesures adoptées au niveau national ou de l’Union devraient reconnaître cette dimension internationale. L’action de l’Union devrait, par conséquent, tenir compte des travaux du Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe (GRECO), de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC).
(5)Pour éradiquer la corruption, des mécanismes tant préventifs que répressifs sont nécessaires. Les États membres sont encouragés à prendre un large éventail de mesures préventives, législatives et de coopération dans le cadre de la lutte contre la corruption. S’il est vrai que la corruption constitue d’abord et avant tout une infraction, et que le droit national et le droit international définissent certains actes spécifiques de corruption, les manquements en matière d’intégrité, les conflits d’intérêts non déclarés ou les violations graves des règles éthiques peuvent devenir des actes relevant de la corruption si aucune mesure n’est prise à leur égard. Prévenir la corruption réduit la nécessité de la réprimer sur le plan pénal et présente des avantages plus larges pour ce qui est de promouvoir la confiance du public et de gérer le comportement des agents publics. Les approches efficaces en matière de lutte contre la corruption s’appuient souvent sur des mesures visant à renforcer la transparence, l’éthique et l’intégrité, ainsi que sur la réglementation de domaines tels que les conflits d’intérêts, le lobbying et le «pantouflage». Les organismes publics devraient viser les normes les plus élevées en matière d’intégrité, de transparence et d’indépendance, qui constituent des éléments importants de la lutte contre la corruption au sens large.
(6)Il convient que les États membres disposent d’organes ou d’unités spécialisés dans la répression et dans la prévention de la corruption. Les États membres peuvent décider de confier à un organisme des fonctions tant préventives que répressives. Aux fins du bon fonctionnement de ces organismes, ceux-ci devraient un certain nombre de conditions, notamment être indépendants et disposer des ressources et pouvoirs nécessaires pour assurer la bonne gestion de leurs tâches.
(7)L’Union européenne est partie à la convention des Nations unies contre la corruption (CNUCC), qui est l’instrument juridique international le plus complet pour lutter contre la corruption, puisqu’il associe des mesures de prévention de ce phénomène à des mesures de lutte contre ce dernier. Cet instrument exige des parties à la convention qu’elles adoptent les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère d’infraction pénale à la corruption, au détournement et au blanchiment de capitaux et qu’elles envisagent d’adopter les mesures législatives ou autres nécessaire pour conférer le caractère d’infraction pénale à d’autres actes (comme l’abus de fonctions, le trafic d’influence et l’enrichissement illicite). Conformément aux engagements contenus dans la déclaration politique adoptée lors de la session extraordinaire de 2021 de l’Assemblée générale des Nations unies contre la corruption, l’Union européenne devrait, dans la mesure du possible, aller au-delà du minimum prévu par la CNUCC et adopter des mesures supplémentaires pour prévenir et combattre la corruption. La présente directive s’appuie sur les observations et les meilleures pratiques provenant du mécanisme d’examen de l’application de la CNUCC.
(8)Compte tenu de l’évolution des menaces de corruption et des obligations juridiques qui incombent à l’Union et aux États membres au titre du droit international, ainsi que de l’évolution des cadres juridiques nationaux, il convient de rapprocher davantage les définitions de la corruption dans tous les États membres dans le but de couvrir plus largement les comportements relevant de la corruption.
(9)Afin d’éviter l’impunité en cas d’infractions de corruption dans le secteur public, il est nécessaire de définir clairement le champ d’application. En premier lieu, la notion d’agent public devrait également couvrir les personnes travaillant dans des organisations internationales, y compris les institutions, organes et organismes de l’Union européenne, et auprès de juridictions internationales. Sont, entre autres, concernées les personnes agissant en tant que membres d’organes collégiaux chargés de statuer sur la culpabilité d’une personne poursuivie dans le cadre d’un procès, ainsi que les personnes qui, en vertu d’une convention d’arbitrage, sont appelées à rendre une décision juridiquement contraignante dans les litiges soumis par les parties à la convention d’arbitrage. En second lieu, de nombreuses entités ou personnes exercent aujourd’hui des fonctions publiques sans être investies d’un mandat officiel. Dès lors, la notion d’agent public est définie de manière à englober tous les agents concernés, qu’ils soient nommés, élus ou employés sur la base d’un contrat, détenant un mandat administratif ou judiciaire officiel, ainsi que tous les prestataires de services qui ont été investis de l’autorité publique ou qui sont soumis au contrôle ou à la surveillance des autorités publiques s’agissant de l’exécution d’un tel service, même s’ils ne détiennent pas de mandat officiel. Aux fins de la présente directive, la définition devrait couvrir les personnes travaillant dans des entreprises publiques ou contrôlées par l’État, ainsi que dans des fondations de gestion d’actifs et des entreprises privées exerçant des fonctions de service public de même que les personnes morales que celles-ci fondent ou détiennent. Il convient de considérer toute personne détenant un mandat législatif comme un agent public aux fins de la présente directive.
(10)Il y a lieu de renforcer le cadre juridique en matière de lutte contre la corruption et de doter les services répressifs et les services chargés des poursuites des outils nécessaires. En ce qui concerne la corruption d’agents publics, il convient d’établir une distinction entre deux aspects. Il est question de corruption active lorsqu’une personne promet, propose ou donne un avantage de quelque nature que ce soit pour influencer un agent public. Et il y a corruption passive lorsque l’agent public sollicite ou reçoit un tel avantage afin d’agir ou de s’abstenir d’agir d’une certaine manière. La présente directive devrait également fixer des règles minimales relatives au versement et à la sollicitation de pots-de-vin et à d’autres formes de corruption dans le secteur privé, lorsque les victimes immédiates comprennent notamment des entreprises qui sont injustement touchées et lorsque chaque pot-de-vin proposé ou accepté réduit la libre concurrence.
(11)Afin que les agents publics n’utilisent pas intentionnellement des fonds à d’autres fins que celles auxquelles ils étaient destinés, il est nécessaire de prévoir des règles relatives à l’infraction de détournement, par les agents publics, de biens dont la gestion leur est confiée. Pour adopter une approche globale de la lutte contre la corruption, la présente directive devrait également couvrir le détournement dans le secteur privé. Pour que le détournement soit criminel, il devrait procurer un avantage à l’agent public ou à un tiers.
(12)Il convient de considérer également comme une infraction pénale le trafic d’influence, qui résulte du comportement corrompu des personnes qui sont ou prétendent être proches du pouvoir et qui tentent d’échanger des promesses d’exercer une influence sur les processus décisionnels contre des avantages indus. Les éléments constitutifs de l’infraction pénale devraient être que l’instigateur procure, ou promet de procurer, à la personne qui use de son influence un avantage indu contre l’exercice d’une influence illicite sur un résultat ou un processus faisant l’objet d’une prise de décision. Lorsqu’il est intentionnel, ce comportement doit être considéré comme une infraction pénale, indépendamment du fait que l’influence ait été exercée et que l’influence alléguée aboutisse ou non au résultat escompté. Cette infraction ne devrait pas couvrir l’exercice légitime de formes reconnues de représentation d’intérêts qui peuvent chercher à influencer légitimement la prise de décision publique, mais qui n’impliquent pas un échange indu d’avantages. Ces formes de représentation d’intérêts, telles que les activités de plaidoyer par exemple, sont souvent menées dans un environnement réglementé précisément pour éviter qu’un manque de transparence ne leur permette de devenir des passerelles vers la corruption. La mise en place de règles supplémentaires efficaces relatives à la divulgation des conflits d’intérêts, au «pantouflage» ou au financement des partis politiques peut également contribuer à éviter les zones grises et les influences indues.
(13)En outre, il est nécessaire de définir le délit d’abus de fonctions dans le secteur public comme le fait, pour un agent public, de ne pas accomplir un acte, en violation de dispositions légales, en vue d’obtenir un avantage indu. Afin de lutter de manière globale contre la corruption, la présente directive devrait également couvrir les abus de fonctions dans le secteur privé.
(14)L’entrave au bon fonctionnement de la justice est une infraction pénale commise à l’appui de la corruption. Il est donc nécessaire d’ériger en infraction pénale l’entrave au bon fonctionnement de la justice, qui implique l’exercice de la force physique, des menaces ou des intimidations, ou l’incitation à apporter un faux témoignage ou à produire de faux éléments de preuve. Il convient également de couvrir les actions visant à entraver la fourniture de témoignages ou la production d’éléments de preuve, ou l’exercice des devoirs de leur charge par des agents de justice ou des agents des services répressifs. Conformément à la CNUCC, la présente directive ne s’applique qu’à l’entrave au bon fonctionnement de la justice en ce qui concerne les procédures relatives à une infraction de corruption.
(15)La corruption se nourrit de la volonté d’obtenir des avantages indus, qu’ils soient d’ordre économique ou d’une autre nature. Afin de réduire les incitants pour les individus et les organisations criminelles à commettre de nouveaux actes criminels et de dissuader les individus de consentir à devenir les propriétaires apparents de biens, il convient d’ériger en infraction pénale l’enrichissement au moyen d’infractions de corruption. Cela devrait permettre, à son tour, de rendre plus difficile la dissimulation de biens acquis de manière illicite et réduire la propagation de la corruption ainsi que les dommages causés à la société. La transparence aide les autorités compétentes à détecter un éventuel enrichissement illicite. Par exemple, dans les États où les agents publics sont tenus de déclarer leurs avoirs à intervalles réguliers, y compris à leur entrée en fonction et à leur cessation de fonctions, les autorités peuvent évaluer si les avoirs déclarés correspondent aux revenus déclarés.
(16)L’infraction pénale d’enrichissement se fonde sur les règles relatives à l’infraction pénale de blanchiment de capitaux figurant dans la directive (UE) 2018/1673 du Parlement européen et du Conseil. Elle vise les cas dans lesquels le pouvoir judiciaire estime que l’infraction ou les infractions de corruption ne peuvent être établies. À l’instar de l’infraction principale en matière de blanchiment de capitaux, la charge de la preuve est de nature différente. Cela signifie que, au cours de procédures pénales relatives à l’infraction pénale d’enrichissement, au moment d’évaluer si les biens sont issus d’une participation criminelle, de quelque nature que ce soit, à une infraction de corruption et si la personne en avait connaissance, il convient de tenir compte des circonstances particulières de chaque affaire, notamment du fait que la valeur des biens est disproportionnée par rapport au revenu licite de la personne poursuivie et que l’activité criminelle et l’acquisition des biens coïncident dans le temps. Il ne devrait pas être nécessaire d’établir la connaissance de tous les éléments factuels ou de toutes les circonstances se rapportant à la participation criminelle, y compris l’identité de l’auteur de l’infraction. Lorsqu’une personne est condamnée pour une infraction pénale telle que définie dans la présente directive, les autorités compétentes peuvent recouvrer les biens obtenus de manière illicite sur le fondement de la directive 2014/42/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l’Union européenne.
(17)Afin de prévenir la corruption dans toute l’Union, les États membres devraient prévoir des types et niveaux minimaux de sanctions lorsque les infractions pénales définies dans la présente directive sont commises. Les niveaux maximaux des peines d’emprisonnement et d’autres peines devraient être suffisamment élevés pour avoir un effet dissuasif sur les contrevenants potentiels et refléter la nocivité de la corruption et la priorité que les autorités compétentes devraient accorder à la lutte contre ces infractions. Dans le même temps, ces niveaux devraient être proportionnés à la gravité de chaque infraction de corruption et être cohérents avec les niveaux de sanctions pénales fixés dans le droit de l’Union et le droit national. Les États membres devraient veiller à ce que les sanctions soient appliquées dans la mesure nécessaire pour prévenir la perpétration de ces infractions. Lorsque les États membres envisagent l’éventualité d’une peine assortie d’un sursis probatoire ou d’une condamnation sous condition, d’une libération anticipée, d’une libération conditionnelle ou d’une grâce dans le cas de personnes condamnées pour l’une des infractions définies par la présente directive, les autorités judiciaires devraient pouvoir tenir compte, entre autres facteurs, de la gravité des infractions pénales concernées.
(18)La présente directive ne porte pas atteinte à l’application adéquate et efficace de mesures disciplinaires ou de sanctions autres que pénales, comme des sanctions administratives. Les sanctions ne pouvant être assimilées à des sanctions pénales, qui ont été infligées à la même personne pour le même comportement, peuvent être prises en considération lors de la condamnation de cette personne pour une infraction pénale définie par la présente directive. Pour les sanctions de nature pénale, il convient de respecter pleinement le droit à ne pas être jugé ou puni pénalement deux fois pour une même infraction («principe ne bis in idem»).
(19)Les autorités compétentes devraient pouvoir imposer, en complément ou en lieu et place d’une peine d’emprisonnement, des sanctions ou des mesures, qui ne sont pas nécessairement de nature pénale, telles que l’interdiction temporaire ou définitive de détenir un mandat public ou l’exclusion des procédures d’appel d’offres. Ces mesures ont un effet dissuasif général et peuvent réduire la récidive des auteurs condamnés. Les États membres devraient également envisager d’établir des procédures de suspension ou de réaffectation temporaire d’un agent public accusé d’une infraction pénale définie par la présente directive, en gardant à l’esprit la nécessité de respecter le principe de la présomption d’innocence et le droit à un recours effectif.
(20)Les personnes morales ne devraient pas être en mesure d’échapper à leur responsabilité en ayant recours à des intermédiaires, y compris des personnes morales liées, pour proposer, promettre ou donner un pot-de-vin à un agent public en leur nom. En outre, il conviendrait de calculer les amendes infligées aux personnes morales en tenant compte du chiffre d’affaires mondial de toutes les entités juridiques liées à l’auteur de l’infraction, y compris les entités mères, les filiales, les trusts liés, ou les entités juridiques similaires ou comparables.
(21)Lorsque l’infraction est commise par une organisation criminelle au sens de la décision-cadre 2008/841/JAI du Conseil ou lorsque l’auteur a abusé de sa position pour permettre la corruption, les États membres devraient prévoir la prise en compte de circonstances aggravantes conformément aux règles en vigueur établies par leur système juridique. Tout en étant soumises à la discrétion du juge, ces circonstances aggravantes devraient permettre au pouvoir judiciaire de tenir compte des dommages sociétaux plus larges causés, par exemple, par la corruption commise par des groupes organisés, des partis politiques ou des personnes occupant des postes à responsabilité publique. Les États membres ne devraient pas être tenus de prévoir les circonstances aggravantes figurant dans la présente directive lorsque ces circonstances sont passibles de sanctions plus sévères en tant qu’infractions pénales distinctes.
(22)La corruption au profit d’un pays tiers a une incidence particulièrement néfaste sur les institutions démocratiques et la vie politique des États membres et de l’Union. Les États membres devraient, dès lors, prévoir une circonstance aggravante pour couvrir de telles situations. Il convient qu’une telle circonstance aggravante couvre les infractions de corruption telles que le versement et la sollicitation de pots-de-vin ou le trafic d’influence, qui sont commises en vue de faire naître un avantage pour un pays tiers, comme la modification du processus décisionnel public dans le but de parvenir à une décision favorable au pays tiers.
(23)Les États membres devraient veiller à ce que des circonstances atténuantes soient prévues dans leur législation nationale en ce qui concerne les infractions couvertes par la présente directive. Sous réserve du pouvoir d’appréciation du juge, ces circonstances devraient couvrir les cas dans lesquels les contrevenants fournissent des informations ou collaborent d’une autre manière avec les autorités. De même, lorsque des personnes morales ont mis en œuvre des programmes efficaces de contrôle interne, de sensibilisation à l’éthique et de conformité, il devrait être possible de considérer ces mesures comme constituant une circonstance atténuante. Des sanctions moins sévères devraient également être envisagées lorsque, après la découverte d’une infraction, une personne morale divulgue rapidement des informations et prend des mesures correctives. En tout état de cause, il convient de laisser au juge ou à la juridiction le soin de déterminer le montant effectif de la sanction, en tenant compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce.
(24)Les députés et d’autres agents publics peuvent bénéficier d’une immunité ou d’une protection juridique à l’égard d’enquêtes ou de poursuites, ce qui contribue à renforcer leur indépendance en les protégeant contre les plaintes non fondées, notamment en ce qui concerne les opinions ou votes émis dans l’exercice de leurs fonctions. Toutefois, les protections et immunités de ce type peuvent entraver l’efficacité des enquêtes et poursuites en matière d’infractions de corruption, notamment en ayant une incidence sur la détection d’infractions commises par d’autres personnes et sur les enquêtes ou poursuites visant ces mêmes personnes qui ne bénéficient pas d’une immunité et qui peuvent avoir participé à l’infraction. En outre, l’application de l’immunité sans procédures appropriées pour lever cette immunité dans les cas où il existe des motifs de soupçonner la participation à des actes criminels nuit à la crédibilité des institutions publiques. Il convient donc de trouver un juste équilibre entre, d’une part, les éventuels immunités ou privilèges de juridiction accordés aux agents publics pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et, d’autre part, la possibilité de mener des enquêtes, des poursuites et des procédures de jugement efficaces concernant les infractions de corruption.
(25)Afin de renforcer la confiance dans les services chargés des poursuites judiciaires tout en réduisant la perception de la corruption dans les États membres, il convient que le pouvoir discrétionnaire, conféré par le droit interne, de ne pas engager, pour des motifs d’opportunité, de poursuites du fait d’infractions pénales définies par la présente directive soit exercé conformément à des règles et critères clairs; dans ce cadre, il convient en outre, au moyen d’une consultation interne appropriée, de faire en sorte de décourager la perpétration d’infractions de corruption et de garantir l’efficacité de la procédure judiciaire.
(26)Compte tenu de la mobilité des auteurs d’infractions et des produits tirés d’activités criminelles, ainsi que de la complexité des enquêtes transfrontières nécessaires pour lutter contre la corruption, tous les États membres devraient établir leur compétence afin de permettre aux autorités compétentes d’enquêter sur des infractions de corruption et d’engager des poursuites en la matière dans un éventail suffisamment large de cas, y compris lorsque les infractions sont commises en tout ou en partie sur leur territoire. Dans le cadre de cette obligation, les États membres devraient veiller à ce que la compétence soit également établie dans les situations où une infraction est commise au moyen d’un système d’information utilisé sur leur territoire, que cette technologie soit ou non basée sur leur territoire.
(27)Afin que les autorités compétentes disposent de suffisamment de temps pour mener des enquêtes et poursuites complexes, la présente directive prévoit un délai de prescription minimal permettant de détecter les infractions de corruption, de mener des enquêtes et poursuites à leur sujet et de prendre des décisions de justice en la matière pendant une période suffisamment longue après la perpétration de ces infractions, sans qu’il n’y ait d’incidence pour les États membres qui ne fixent pas de délais de prescription pour les enquêtes, les poursuites et l’exécution des décisions.
(28)Les infractions de corruption constituent une catégorie d’infractions difficiles à identifier et au sujet desquelles il n’est pas simple de mener des enquêtes, étant donné qu’elles se produisent le plus souvent dans le cadre d’une conspiration entre deux ou plusieurs parties consentantes et qu’elles ne font pas de victime immédiate et évidente susceptible de porter plainte. Ainsi, une proportion importante d’infractions de corruption ne sont jamais détectées, et les criminels peuvent tirer profit du produit de l’acte ou des actes de corruption qu’ils ont commis. Plus la détection d’une infraction de corruption prend du temps, plus il est difficile de mettre au jour des éléments de preuve. Par conséquent, il convient de veiller à ce que les services répressifs et les services chargés des poursuites disposent d’outils d’enquête appropriés pour recueillir des preuves pertinentes d’infractions de corruption qui concernent souvent plus d’un État membre. En outre, les États membres devraient prévoir, en étroite coordination avec l’Agence de l’Union européenne pour la formation des services répressifs (CEPOL), une formation suffisante, notamment sur l’utilisation des outils d’enquêtes afin de mener à bien les procédures et sur l’identification et la quantification des produits de la corruption dans le contexte du gel et de la confiscation. De plus, la présente directive facilite la collecte d’informations et d’éléments de preuve en prévoyant des circonstances atténuantes pour les auteurs d’infractions qui apportent leur concours aux autorités.
(29)Les personnes qui transmettent aux autorités compétentes des informations concernant des cas de corruption passés, en cours ou prévus, qu’elles ont acquises dans le cadre de leurs activités professionnelles, risquent de subir des représailles dans ce contexte. Ces signalements des lanceurs d’alerte peuvent renforcer le contrôle de l’application de la réglementation en permettant aux autorités compétentes de prévenir, de détecter et de poursuivre efficacement les actes de corruption. Compte tenu de l’intérêt public à protéger les institutions publiques et privées contre de tels actes et à renforcer la transparence, la bonne gouvernance et l’obligation de rendre compte, il est nécessaire de veiller à ce que des dispositifs efficaces soient en place afin de permettre aux lanceurs d’alerte d’utiliser des canaux confidentiels pour que les autorités compétentes soient prévenues et que ces lanceurs d’alerte soient protégés contre les représailles. La directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil s’applique aux signalements de violations portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union visés à l’article 325 du traité et précisés dans les mesures pertinentes de l’Union; elle s’applique donc au signalement de toutes les infractions pénales relevant du champ d’application de la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil. En ce qui concerne les infractions pénales définies par la présente directive, la directive (UE) 2019/1937 devrait s’appliquer au signalement de ces infractions et à la protection des personnes qui les signalent dans les conditions qu’elle prévoit. Au-delà des obligations découlant de la directive (UE) 2019/1937, les autorités nationales compétentes devraient veiller à ce que les personnes qui fournissent des éléments de preuve ou coopèrent d’une autre manière à des enquêtes pénales reçoivent la protection, le soutien et l’assistance nécessaires dans le cadre des procédures pénales.
(30)Les organisations indépendantes de la société civile sont indispensables au bon fonctionnement de nos démocraties et jouent un rôle de premier plan dans la défense des valeurs communes sur lesquelles l’Union européenne est fondée. Exerçant des fonctions essentielles de surveillance, elles attirent l’attention sur les menaces qui pèsent sur l’état de droit, contribuent à ce que les personnes en responsabilités rendent des comptes, et garantissent le respect des droits fondamentaux. Les États membres devraient promouvoir la participation de la société civile aux activités de lutte contre la corruption.
(31)Le pluralisme et la liberté des médias sont des vecteurs clés de l’état de droit, de la responsabilité démocratique, de l’égalité et de la lutte contre la corruption. Des médias indépendants et pluralistes, en particulier le journalisme d’investigation, jouent un rôle important dans le contrôle des affaires publiques, en détectant de possibles pratiques de corruption et atteintes à l’intégrité, en menant des actions de sensibilisation et en promouvant l’intégrité. Les États membres ont l’obligation de garantir un environnement favorable aux journalistes, de protéger leur sécurité et de promouvoir la liberté et le pluralisme des médias de manière proactive. La recommandation de la Commission concernant la protection, la sécurité et le renforcement des moyens d’action des journalistes ainsi que la proposition de directive et une recommandation de la Commission sur la protection des personnes qui participent au débat public contre les procédures judiciaires manifestement infondées ou abusives («poursuites stratégiques altérant le débat public») prévoient notamment des garanties et normes importantes afin que les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme et d’autres personnes puissent exercer leur rôle sans entraves.
(32)Les États membres devraient recueillir et publier des données sur l’application de la présente directive, que la Commission pourra analyser et exploiter dans le cadre du suivi, de la mise en œuvre et de l’évaluation de la directive, ainsi que sur l’utilisation de l’un quelconque des outils relatifs à l’état de droit, tels que le rapport annuel sur l’état de droit.
(33)Afin de lutter de manière effective contre la corruption, il est indispensable que les informations entre les autorités compétentes chargées de la prévention ou de la détection des infractions de corruption, des enquêtes ou des poursuites en la matière soient échangées de manière efficace. Les États membres devraient veiller à ce que les informations soient échangées avec efficacité et rapidité dans le respect du droit national et du droit de l’Union. La présente directive, qui vise à arrêter des définitions communes des infractions de corruption, devrait servir de référence pour l’échange d’informations et la coopération entre les autorités nationales compétentes au titre des directives (UE) XX/2023, (UE) 2019/1153 et (UE) 2016/681 du Parlement européen et du Conseil, des règlements (UE) 2018/1240, (UE) 2018/1862 et (UE) 603/2013 du Parlement européen et du Conseil ainsi que de la décision 2008/633/JAI du Conseil.
(34)La corruption est une problématique transversale tandis que les vulnérabilités, tout comme le moyen le plus approprié d’y remédier, varient d’un secteur à l’autre. Les États membres devraient par conséquent effectuer une évaluation régulière afin de recenser les secteurs les plus exposés au risque de corruption et élaborer des plans de gestion des risques pour agir sur les principaux risques dans les secteurs recensés, notamment en organisant, au moins une fois par an, des actions de sensibilisation adaptées aux particularités de ces secteurs. Les États membres qui disposent déjà de vastes stratégies nationales de lutte contre la corruption peuvent également choisir d’y intégrer leur évaluation des risques et leurs plans de gestion des risques, pour autant que ces risques soient évalués et que les mesures fassent l’objet d’un réexamen régulier. Par exemple, les programmes de résidence par investissement comptant parmi les secteurs qui présentent un risque élevé de corruption, ils devraient figurer dans les évaluations des secteurs les plus exposés au risque de corruption ainsi que dans les formations que les États membres doivent organiser en application de la présente directive.
(35)Afin d’offrir un niveau équivalent de protection aux intérêts financiers de l’Union et aux intérêts financiers nationaux, il convient d’harmoniser les dispositions de la directive (UE) 2017/1371 avec celles de la présente directive. À cette fin, les règles applicables aux infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union en ce qui concerne les sanctions, les circonstances aggravantes et atténuantes et les délais de prescription devraient être équivalentes à celles prévues par la présente directive.
(36)La mise en œuvre de la présente directive devrait garantir un niveau de protection des intérêts financiers de l’Union équivalent à celui des intérêts financiers nationaux.
(37)Étant donné que l’objectif de la présente directive, qui consiste à soumettre la corruption à des sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives dans tous les États membres, ne peut pas être atteint de manière suffisante par les États membres mais peut, en raison de la dimension et des effets de la présente directive, l’être mieux au niveau de l’Union, celle-ci peut prendre des mesures conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 du traité sur l’Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité énoncé audit article, la présente directive n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.
(38)L’effet dissuasif visé par l’application de sanctions pénales requiert une prudence particulière en ce qui concerne les droits fondamentaux. La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus, en particulier, par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (la «charte»), notamment: le droit à la liberté et à la sûreté, la protection des données à caractère personnel, la liberté professionnelle et le droit de travailler, la liberté d’entreprise, le droit de propriété, le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, la présomption d’innocence et les droits de la défense, les principes de légalité et de proportionnalité des délits et des peines, ainsi que le principe ne bis in idem.
(39)[Conformément à l’article 3 du protocole nº 21 sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Irlande a notifié son souhait de participer à l’adoption et à l’application de la présente directive.
ET/OU
(40)Conformément aux articles 1er et 2 du protocole nº 21 sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et sans préjudice de l’article 4 dudit protocole, l’Irlande ne participe pas à l’adoption ni à l’application de la présente directive et n’est pas liée par celle-ci ni soumise à son application.]
(41)Conformément aux articles 1er et 2 du protocole nº 22 sur la position du Danemark, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Danemark ne participe pas à l’adoption de la présente directive et n’est pas lié par celle-ci ni soumis à son application. La décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil continue de lier le Danemark et d’être applicable à son égard,
ONT ADOPTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
Article premier
Objet et champ d’application
La présente directive établit des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans le domaine de la corruption, ainsi que des mesures visant à mieux prévenir et combattre la corruption.
Article 2
Définitions
Aux fins de la présente directive, on entend par:
1.«prévention de la corruption», la détection et l’élimination des causes et des conditions de la corruption, par le développement et la mise en œuvre d’un système de mesures appropriées, ainsi que la dissuasion des actes liés à la corruption;
2.«biens», les fonds ou actifs de toute nature, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou intangibles, ainsi que les documents ou instruments juridiques, sous quelque forme que ce soit, y compris électronique ou numérique, attestant la propriété de ces actifs ou de droits y afférents;
3.«agent public»,
(a)un agent de l’Union ou un agent national d’un État membre ou d’un pays tiers,
(b)toute autre personne investie d’une fonction de service public dans les États membres ou des pays tiers, auprès d’une organisation internationale ou d’une juridiction internationale et qui exerce une telle fonction;
4.«agent de l’Union», une personne qui est:
(a)membre d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union ainsi que le personnel de ces derniers, tous étant assimilés aux fonctionnaires de l’Union;
(b)fonctionnaire ou autre agent engagé par contrat par l’Union au sens du statut des fonctionnaires de l’Union européenne et du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne fixé par le règlement (CEE, Euratom, CECA) nº 259/68 du Conseil (le «statut»);
(c)détachée auprès de l’Union par un État membre ou par tout organisme public ou privé et qui y exerce des fonctions équivalentes à celles qu’exercent les fonctionnaires ou autres agents de l’Union;
5.«agent national», toute personne exerçant une fonction exécutive, administrative ou juridictionnelle au niveau national, régional ou local, qu’elle ait été nommée ou élue, à titre permanent ou temporaire, qu’elle soit rémunérée ou non, et quel que soit son niveau hiérarchique. Toute personne exerçant des fonctions législatives au niveau national, régional ou local est considérée comme un agent national aux fins de la présente directive;
6.«violation d’une obligation», au moins tout comportement déloyal constituant la violation d’une obligation légale ou, selon le cas, la violation de règles ou de directives professionnelles qui s’appliquent dans le cadre de l’activité professionnelle d’une personne qui exerce une fonction de direction ou un travail, à quelque titre que ce soit, pour une entité du secteur privé;
7.«personne morale», toute entité dotée de la personnalité juridique en vertu du droit national applicable, exception faite des États ou des entités publiques dans l’exercice de leurs prérogatives de puissance publique et des organisations internationales publiques;
8.«agents de haut niveau», les chefs d’État, les chefs de gouvernement central ou régional, les membres de gouvernement central ou régional, ainsi que d’autres personnes nommées par le pouvoir politique qui exercent une fonction publique de haut niveau, telles que les vice-ministres, les secrétaires d’État, le chef et les membres du cabinet d’un ministre, et les hauts fonctionnaires politiques, ainsi que les membres des chambres parlementaires, les membres des plus hautes juridictions, telles que les cours constitutionnelles et suprêmes, et les membres des institutions supérieures de contrôle des finances publiques.
Article 3
Prévention de la corruption
1.Les États membres prennent des mesures appropriées, telles que des campagnes d’information et de sensibilisation ainsi que des programmes de recherche et d’éducation, afin de sensibiliser l’opinion publique au préjudice causé par la corruption et de réduire globalement la commission d’infractions de corruption ainsi que le risque de corruption.
2.Les États membres prennent des mesures pour assurer le degré le plus élevé de transparence et d’obligation de rendre compte dans l’administration publique et dans le processus décisionnel public, en vue de prévenir la corruption.
3.Les États membres prennent des mesures pour que des outils de prévention essentiels, tels que le libre accès aux informations d’intérêt public, des règles efficaces en matière de divulgation et de gestion des conflits d’intérêts dans le secteur public, des règles efficaces en matière de divulgation et de vérification des avoirs des agents publics et des règles efficaces régissant l’interaction entre le secteur privé et le secteur public, soient en place.
4.Les États membres adoptent des mesures globales et actualisées pour prévenir la corruption tant dans le secteur public que dans le secteur privé, qui soient adaptées aux risques propres à un domaine d’activité. Ces mesures comprennent au moins des actions visant à renforcer l’intégrité des catégories de personnes mentionnées ci-après et à prévenir les possibilités de les corrompre:
(a)les agents de haut niveau;
(b)les membres des services répressifs et de l’appareil judiciaire, y compris des mesures relatives à leur nomination et à leur conduite, ainsi que des mesures garantissant une rémunération suffisante et des barèmes de rémunération équitables.
5.Les États membres procèdent à une évaluation régulière afin de recenser les secteurs les plus exposés au risque de corruption.
À la suite de cette évaluation, les États membres:
(a)organisent, au moins une fois par an, des actions de sensibilisation, y compris à l’éthique, qui soient adaptées aux particularités des secteurs recensés; et
(b)élaborent des plans pour agir sur les principaux risques qui pèsent sur lesdits secteurs.
6.S’il y a lieu, les États membres prennent des mesures pour favoriser la participation de la société civile, des organisations non gouvernementales et des associations locales à des activités de lutte contre la corruption.
Article 4
Organismes spécialisés
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il existe un ou plusieurs organismes, ou unités d’organisation, spécialisés dans la prévention de la corruption.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il existe un ou plusieurs organismes, ou unités d’organisation, spécialisés dans la répression de la corruption.
3.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que l’organisme ou les organismes, ou la ou les unités d’organisation, visés aux paragraphes 1 et 2:
(a)soient fonctionnellement indépendants du gouvernement et possèdent un personnel qualifié en nombre suffisant et les ressources financières, techniques et technologiques, ainsi que les pouvoirs et outils nécessaires pour assurer la bonne gestion de leurs tâches;
(b)soient connus du public;
(c)rendent accessibles au public les informations pertinentes sur l’exercice de leurs activités, dans le respect de la protection des données à caractère personnel et de la confidentialité des enquêtes;
(d)fonctionnent et arrêtent des décisions conformément à des procédures transparentes prévues par la loi, dans le but de garantir l’intégrité et l’obligation de rendre compte.
Article 5
Ressources
Les États membres prennent les mesures nécessaires afin que les autorités nationales compétentes pour détecter les infractions pénales définies par la présente directive ou pour mener des enquêtes, engager des poursuites ou statuer en la matière disposent en permanence d’un personnel qualifié en nombre suffisant ainsi que des ressources financières, techniques et technologiques nécessaires à l’exercice effectif de leurs fonctions liées à la mise en œuvre de la présente directive.
Article 6
Formation
1.Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour assurer le financement et l’organisation de formations pour ses agents nationaux, afin qu’ils soient en mesure d’identifier les différentes formes de corruption et de risques de corruption auxquelles ils peuvent être confrontés dans l’exercice de leurs fonctions, et de réagir en temps utile et de manière appropriée à toute activité suspecte.
2.Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour assurer le financement et l’organisation, à intervalles réguliers, de formations spécialisées en matière de lutte contre la corruption pour les membres de ses services répressifs et de son appareil judiciaire ainsi que pour le personnel des autorités chargées des enquêtes et des procédures pénales relatives aux infractions relevant du champ d’application de la présente directive.
Article 7
Corruption dans le secteur privé
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
a)la promesse, la proposition ou l’octroi, directement ou par interposition de tiers, d’un avantage, de quelque nature que ce soit, à un agent public, pour lui-même ou pour un tiers, afin que cet agent accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte relevant de sa fonction ou un acte dans l’exercice de ses fonctions (corruption active);
b)la sollicitation ou la réception par un agent public, directement ou par interposition de tiers, d’un avantage de quelque nature que ce soit, ou la promesse d’un tel avantage, pour lui-même ou pour un tiers, afin que cet agent accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte relevant de sa fonction ou un acte dans l’exercice de ses fonctions (corruption passive).
Article 8
Corruption dans le secteur privé
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels et commis dans le cadre d’activités économiques, financières, professionnelles ou commerciales, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
(a)la promesse, la proposition ou l’octroi, directement ou par interposition de tiers, à une personne qui exerce une fonction de direction ou un travail, à quelque titre que ce soit, pour une entité du secteur privé, d’un avantage indu, de quelque nature que ce soit, pour elle-même ou pour un tiers, afin que cette personne accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte en violation de ses obligations (corruption active);
(b)la sollicitation ou la réception par une personne, directement ou par interposition de tiers, d’un avantage indu de quelque nature que ce soit, ou la promesse d’un tel avantage, pour elle-même ou pour un tiers, dans l’exercice d’une fonction de direction ou d’un travail, à quelque titre que ce soit, pour une entité du secteur privé, afin que cette personne accomplisse ou s’abstienne d’accomplir un acte en violation de ses obligations (corruption passive).
Article 9
Détournement
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
a)
le fait, pour un agent public auquel est confiée, directement ou indirectement, la gestion de biens, d’engager, de dépenser, de s’approprier ou d’utiliser ces biens d’une manière contraire aux fins prévues pour ces derniers;
b)
le fait, pour une personne qui exerce une fonction de direction ou un travail, à quelque titre que ce soit, dans une entité du secteur privé et à laquelle est confiée, directement ou indirectement, la gestion de biens, d’engager, de dépenser, de s’approprier ou d’utiliser ces biens, dans le cadre d’activités économiques, financières, professionnelles ou commerciales, d’une manière contraire aux fins prévues pour ces derniers.
Article 10
Trafic d’influence
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
(a)la promesse, la proposition ou l’octroi, directement ou par interposition de tiers, d’un avantage indu, de quelque nature que ce soit, à une personne ou à un tiers afin que cette personne exerce une influence réelle ou supposée en vue d’obtenir d’un agent public un avantage indu;
(b)la sollicitation ou la réception, directement ou par interposition de tiers, d’un avantage indu de quelque nature que ce soit, ou la promesse d’un tel avantage à une personne ou à un tiers afin que cette personne exerce une influence réelle ou supposée en vue d’obtenir d’un agent public un avantage indu.
2.Afin que les comportements décrits au paragraphe 1 soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales, il est indifférent que l’influence soit exercée ou non ou que l’influence supposée aboutisse ou non aux résultats escomptés.
Article 11
Abus de fonctions
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
1.l’exécution ou le défaut d’exécution d’un acte, en violation de dispositions légales, par un agent public dans l’exercice de ses fonctions aux fins de l’obtention d’un avantage indu pour lui-même ou pour un tiers;
2.l’exécution ou le défaut d’exécution d’un acte, en violation de ses obligations, par une personne qui exerce une fonction de direction ou un travail, à quelque titre que ce soit, pour une entité du secteur privé dans le cadre d’activités économiques, financières, professionnelles ou commerciales aux fins de l’obtention d’un avantage indu pour elle-même ou pour un tiers.
Article 12
Entrave au bon fonctionnement de la justice
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les comportements suivants, lorsqu’ils sont intentionnels, soient passibles de sanctions en tant qu’infractions pénales:
1.le recours, directement ou par interposition de tiers, à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation ou la promesse, la proposition ou l’octroi d’un avantage pour obtenir un faux témoignage ou empêcher un témoignage ou la présentation d’éléments de preuve dans une procédure en rapport avec l’une quelconque des infractions définies par les articles 7 à 11, 13 et 14;
2.le recours, directement ou par interposition de tiers, à la force physique, à des menaces ou à l’intimidation pour empêcher un agent de justice ou un membre des services répressifs d’exercer les devoirs de sa charge en rapport avec l’une quelconque des infractions définies par les articles 7 à 11, 13 et 14.
Article 13
Enrichissement lié aux infractions de corruption
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soit passible de sanctions en tant qu’infraction pénale l’acquisition, la détention ou l’utilisation intentionnelle par un agent public de biens dont il sait qu’ils proviennent de la commission de l’une quelconque des infractions définies par les articles 7 à 12 et 14, que cet agent ait ou non été impliqué dans la commission de cette infraction.
Article 14
Incitation, complicité et tentative
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soit passible de sanctions en tant qu’infraction pénale le fait d’inciter à commettre l’une quelconque des infractions définies par les articles 7 à 13.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soit passible de sanctions en tant qu’infraction pénale le fait de se rendre complice de l’une quelconque des infractions définies par les articles 7 à 13.
3.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que soit passible de sanctions en tant qu’infraction pénale la tentative de commettre l’une quelconque des infractions définies par l’article 9 et par les articles 11 à 13.
Article 15
Sanctions et mesures à l’égard des personnes physiques
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les infractions pénales définies par les articles 7 à 14 soient passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que:
a) les infractions pénales définies par les articles 7 et 12 soient passibles d’une peine d’emprisonnement maximale d’au moins six ans;
b) les infractions pénales définies par les articles 8 à 11 soient passibles d’une peine d’emprisonnement maximale d’au moins cinq ans; et
c) l’infraction pénale définie par l’article 13 soit passible d’une peine d’emprisonnement maximale d’au moins quatre ans.
3.Lorsqu’une infraction pénale définie par l’article 9 entraîne un préjudice ou un avantage d’un montant inférieur à 10 000 EUR, les États membres peuvent prévoir des sanctions autres que pénales.
4.Sans préjudice des paragraphes 1 à 3, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les personnes physiques qui ont été condamnées pour avoir commis l’une des infractions pénales définies par les articles 7 à 14 puissent faire l’objet de sanctions ou de mesures imposées par une autorité compétente et qui ne soient pas nécessairement de nature pénale, y compris:
(a)des amendes;
(b)la révocation, la suspension et la réaffectation d’un mandat public;
(c)la déchéance du droit
i)de détenir un mandat public;
ii)d’exercer une fonction de service public;
iii)de détenir un mandat au sein d’une personne morale dont l’État membre est totalement ou partiellement propriétaire;
iv)d’exercer les activités commerciales dans le cadre desquelles l’infraction a été commise;
d)
la déchéance du droit de se présenter à des élections, proportionnellement à la gravité de l’infraction commise; et
e)
le retrait des permis ou autorisations d’exercer les activités dans le cadre desquelles l’infraction a été commise;
(f)l’exclusion de l’accès aux financements publics, y compris aux procédures d’appel d’offres, aux subventions et aux concessions.
Article 16
Responsabilité des personnes morales
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les personnes morales puissent être tenues pour responsables des infractions pénales définies par les articles 7 à 14, lorsque ces dernières sont commises à leur profit par toute personne physique, agissant soit à titre individuel, soit en tant que membre d’un organe de la personne morale, qui exerce un pouvoir de direction en son sein, sur l’une ou plusieurs des bases suivantes:
(a)un pouvoir de représentation de la personne morale;
(b)la qualité pour prendre des décisions au nom de la personne morale; ou
(c)la qualité pour exercer un contrôle au sein de la personne morale.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les personnes morales puissent être tenues pour responsables lorsque le défaut de surveillance ou de contrôle de la part d’une personne visée au paragraphe 1 a rendu possible la commission, y compris par une personne placée sous son autorité, de l’une des infractions pénales définies par les articles 7 à 14 au profit de ladite personne morale.
3.La responsabilité des personnes morales au titre des paragraphes 1 et 2 n’exclut pas les poursuites pénales contre les personnes physiques qui sont les auteurs, les instigateurs ou les complices des infractions pénales définies par les articles 7 à 14.
Article 17
Sanctions contre les personnes morales
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’une personne morale déclarée responsable d’infractions pénales conformément à l’article 16 soit passible de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les sanctions ou mesures applicables aux personnes morales déclarées responsables conformément à l’article 16 incluent:
(a)des amendes pénales ou non pénales dont le plafond ne devrait pas être inférieur à 5 % du chiffre d’affaires mondial total réalisé par la personne morale, y compris les entités liées, au cours de l’exercice précédant la décision infligeant l’amende;
(b)l’exclusion de cette personne morale du bénéfice d’un avantage ou d’une aide publics;
(c)des mesures d’exclusion temporaire ou permanente des procédures d’appel d’offres;
(d)l’interdiction temporaire ou définitive, pour cette personne morale, d’exercer une activité commerciale;
(e)le retrait des permis ou autorisations d’exercer les activités dans le cadre desquelles l’infraction a été commise;
(f)la possibilité pour les autorités publiques d’annuler ou de résilier un contrat conclu avec elle, dans le cadre duquel l’infraction a été commise;
(g)le placement de cette personne morale sous surveillance judiciaire;
(h)une mesure de dissolution judiciaire de cette personne morale; et
(i)la fermeture temporaire ou définitive des établissements ayant servi à commettre l’infraction.
Article 18
Circonstances aggravantes et circonstances atténuantes
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les circonstances suivantes soient considérées comme des circonstances aggravantes en ce qui concerne les infractions définies par les articles 7 à 14:
(a)l’auteur de l’infraction est un agent de haut niveau;
(b)l’auteur de l’infraction a déjà été condamné pour l’une des infractions définies par les articles 7 à 14;
(c)l’auteur de l’infraction a obtenu un avantage considérable ou l’infraction a causé un préjudice considérable;
(d)l’auteur de l’infraction a commis l’infraction au profit d’un pays tiers;
(e)l’auteur de l’infraction exerce des fonctions d’enquête, de poursuite ou de jugement;
(f)l’infraction a été commise dans le cadre d’une organisation criminelle au sens de la décision-cadre 2008/841/JAI; et
(g)l’auteur de l’infraction est une entité assujettie au sens de l’article 2 de la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil, ou un employé d’une entité assujettie, ou a le pouvoir, à titre individuel ou en tant que membre d’un organe de l’entité assujettie, de représenter cette entité, ou a qualité pour prendre des décisions en son nom ou exercer un contrôle en son sein, et a commis l’infraction dans l’exercice de ses activités professionnelles.
2.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les circonstances suivantes soient considérées comme des circonstances atténuantes en ce qui concerne les infractions pénales définies par les articles 7 à 14:
(a)l’auteur de l’infraction fournit aux autorités compétentes des informations qu’elles n’auraient pas pu obtenir autrement et qui les aident
i)à identifier ou à traduire en justice les autres auteurs de l’infraction; ou
ii)à trouver des preuves;
(b)lorsque l’auteur de l’infraction est une personne morale et qu’il a mis en œuvre des programmes efficaces de contrôle interne, de sensibilisation à l’éthique et de conformité afin de prévenir la corruption avant ou après la commission de l’infraction; et
(c)lorsque l’auteur de l’infraction est une personne morale et qu’il a, une fois l’infraction découverte, rapidement et volontairement révélé l’infraction aux autorités compétentes et pris des mesures correctives.
Article 19
Privilèges ou immunité en matière d’enquêtes et de poursuites concernant les infractions de corruption
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les privilèges ou immunités en matière d’enquêtes et de poursuites accordés aux agents nationaux pour les infractions définies par la présente directive puissent être levés dans le cadre d’une procédure objective, impartiale, efficace et transparente préétablie par la loi, fondée sur des critères clairs et conclue dans un délai raisonnable.
Article 20
Compétence
1.Un État membre établit sa compétence à l’égard des infractions définies par la présente directive, dans les cas où:
(a)l’infraction a été commise, en tout ou en partie, sur son territoire;
(b)l’auteur de l’infraction est un ressortissant de cet État membre ou a sa résidence habituelle dans cet État membre;
(c)l’infraction a été commise au profit d’une personne morale établie sur son territoire.
2.Lorsqu’une infraction définie par la présente directive relève de la compétence de plusieurs États membres, les États membres concernés coopèrent pour déterminer celui qui mènera la procédure pénale. S’il y a lieu et conformément à l’article 12 de la décision-cadre 2009/948/JAI du Conseil, Eurojust est saisi de la question.
3. Dans les cas visés au paragraphe 1, point b), chaque État membre s’assure que l’exercice de sa compétence n’est pas subordonné à la condition que des poursuites ne puissent être engagées qu’à la suite d’une dénonciation émanant de l’État sur le territoire duquel l’infraction pénale a été commise ou d’une plainte de la victime déposée dans l’État sur le territoire duquel l’infraction pénale a été commise.
Article 21
Délais de prescription des infractions de corruption
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour prévoir un délai de prescription en ce qui concerne les infractions pénales définies par les articles 7 à 14, qui laisse suffisamment de temps pour enquêter, engager des poursuites, juger et statuer effectivement sur ces infractions après qu’elles ont été commises.
2.Le délai de prescription visé au paragraphe 1 ne peut être inférieur à:
(a)quinze ans à compter du moment où l’infraction a été commise, pour les infractions pénales définies par les articles 7 et 12;
(b)dix ans à compter du moment où l’infraction a été commise, pour les infractions pénales définies par les articles 8 à 11;
(c)huit ans à compter du moment où l’infraction a été commise, pour les infractions pénales définies par les articles 13 et 14.
3.Par dérogation au paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir un délai de prescription plus court, à condition que ce délai puisse être interrompu ou suspendu par certains actes spécifiques et que les règles applicables relatives aux délais de suspension et de prescription n’entravent pas l’efficacité de la procédure judiciaire ni l’application dissuasive des sanctions. Ce délai ne peut être inférieur à:
(a)dix ans pour les infractions pénales définies par les articles 7 et 12;
(b)huit ans pour les infractions pénales définies par les articles 8 à 11;
(c)cinq ans pour les infractions pénales définies par les articles 13 et 14.
4.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour permettre l’exécution d’une peine d’emprisonnement consécutive à une condamnation définitive pendant au moins:
(a)quinze ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 7 et 12;
(b)dix ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 8 à 11;
(c)huit ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 13 et 14.
5.Par dérogation au paragraphe 4, les États membres peuvent prévoir un délai de prescription plus court, à condition que ce délai puisse être interrompu ou suspendu par certains actes spécifiques et que les règles applicables relatives aux délais de suspension et de prescription n’entravent pas l’efficacité de la procédure judiciaire ni l’application dissuasive des sanctions. Ce délai ne peut être inférieur à:
(a)dix ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 7 et 12;
(b)huit ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 8 à 11;
(c)cinq ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales définies par les articles 13 et 14.
Article 22
Protection des personnes qui signalent des infractions ou concourent à l’enquête
1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que la directive (UE) 2019/1937 s’applique au signalement des infractions définies par les articles 7 à 14 et à la protection des personnes qui signalent ces infractions.
2. Outre les mesures visées au paragraphe 1, les États membres veillent à ce que les personnes qui signalent des infractions définies par la présente directive et qui fournissent des éléments de preuve ou coopèrent d’une autre manière à l’enquête, aux poursuites ou au jugement de ces infractions reçoivent la protection, le soutien et l’assistance nécessaires dans le cadre de la procédure pénale.
Article 23
Outils d’enquête
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que des outils d’enquête efficaces, tels que ceux qui sont utilisés dans la lutte contre la criminalité organisée ou d’autres formes graves de criminalité, soient mis à la disposition des personnes, unités ou services chargés des enquêtes ou des poursuites concernant les infractions pénales définies par la présente directive.
Article 24
Coopération entre les autorités des États membres, la Commission, Europol, Eurojust, l’Office européen de lutte antifraude et le Parquet européen
Sans préjudice des règles en matière de coopération transfrontière et d’entraide judiciaire en matière pénale, les autorités des États membres, Europol, Eurojust, le Parquet européen, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et la Commission coopèrent, dans les limites de leurs compétences respectives, dans le domaine de la lutte contre les infractions pénales définies par la présente directive. À cette fin, Europol, Eurojust, le Parquet européen, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et la Commission fournissent, s’il y a lieu, une assistance technique et opérationnelle conformément à leurs mandats respectifs afin de faciliter la coordination des enquêtes et des poursuites menées par les autorités compétentes.
Article 25
Soutien de la Commission aux États membres et à leurs autorités compétentes
1.La Commission aide, s’il y a lieu, les États membres et leurs autorités compétentes à respecter les obligations qui leur incombent en vertu de la présente directive.
2.La Commission dresse un état des lieux des risques sectoriels de corruption dans l’Union et facilite l’échange d’informations entre les États membres et les experts dans l’ensemble de l’Union.
3.La Commission, par l’intermédiaire du réseau européen de lutte contre la corruption, s’attache en particulier à:
(a)faciliter la coopération et l’échange des bonnes pratiques entre praticiens, experts, chercheurs et autres parties prenantes des États membres;
(b)compléter les activités, telles que celles visées à l’article 3 et à l’article 18, paragraphe 2, point b), en élaborant des bonnes pratiques, des documents d’orientation et des méthodes.
4. La Commission informe les États membres des ressources financières à leur disposition au niveau de l’Union pour lutter contre la corruption.
Article 26
Collecte de données et statistiques
1.Les États membres collectent des données statistiques sur les infractions pénales définies par les articles 7 à 14 de la présente directive.
2.Les données statistiques visées au paragraphe 1 comprennent au moins les éléments suivants:
(a)le nombre de cas signalés;
(b)le nombre de cas ayant fait l’objet d’une enquête;
(c)le nombre de mises en accusation;
(d)la durée moyenne des enquêtes pénales concernant ces cas;
(e)la durée moyenne des procédures judiciaires en première instance, en deuxième instance et en cassation;
(f)le nombre de condamnations;
(g)le nombre de personnes physiques condamnées et sanctionnées, en précisant le nombre d’agents publics et d’agents de haut niveau;
(h)le nombre de personnes morales déclarées responsables et sanctionnées;
(i)le nombre d’affaires de corruption rejetées, en faisant la distinction entre les affaires rejetées quant au fond ou non et en tenant compte des résolutions extrajudiciaires;
(j)les types et niveaux de sanction infligés pour chacune des infractions pénales définies par les articles 7 à 14;
(k)le nombre de remises de peine, en précisant le nombre de remises de peine accordées à des agents publics et à des agents de haut niveau.
3.
Les États membres publient, chaque année et au plus tard le 1er juin, dans un format lisible par machine et ventilé, les données statistiques énumérées au paragraphe 2 pour l’année précédente et en informent la Commission.
Article 27
Remplacement de la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil et de la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne
1.La décision-cadre 2003/568/JAI est remplacée à l’égard des États membres liés par la présente directive, sans préjudice des obligations des États membres concernant le délai de transposition de la décision-cadre en droit interne.
À l’égard des États membres liés par la présente directive, les références faites à la décision-cadre 2003/568/JAI s’entendent comme faites à la présente directive.
2.La convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne est remplacée à l’égard des États membres liés par la présente directive.
À l’égard des États membres liés par la présente directive, les références faites à la convention s’entendent comme faites à la présente directive.
Article 28
Modifications apportées à la directive (UE) 2017/1371 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal
La directive (UE) 2017/1371 est modifiée comme suit:
(1)à l’article 2, paragraphe 1, le point c) suivant est inséré:
«c) «agents de haut niveau», les agents qui sont définis à l’article 2, point 8), de la directive (UE) XXX relative à la lutte contre la corruption.».
(2)À l’article 4, paragraphe 2, les termes «corruption passive et corruption active», «corruption passive» et «corruption active» sont remplacés respectivement par les termes «corruption passive et corruption active dans le secteur public», «corruption passive dans le secteur public» et «corruption active dans le secteur public».
(3)À l'article 7, le paragraphe 3 est remplacé par le texte suivant:
«3. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les infractions pénales visées à l’article 3 et à l’article 4, paragraphes 1 et 2, soient passibles d’une peine maximale d’au moins six ans d’emprisonnement lorsqu’elles entraînent un préjudice ou un avantage considérable.
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les infractions pénales visées à l’article 4, paragraphe 3, soient passibles d’une peine maximale d’au moins cinq ans d’emprisonnement lorsqu’elles entraînent un préjudice ou un avantage considérable.
Le préjudice ou l’avantage résultant des infractions pénales visées à l’article 3, paragraphe 2, points a), b) et c), et à l’article 4 est réputé considérable lorsqu’il se monte à plus de 100 000 EUR.
Le préjudice ou l’avantage résultant des infractions pénales visées à l’article 3, paragraphe 2, point d), et relevant de l’article 2, paragraphe 2, est toujours réputé considérable.».
(4)À l’article 7, le paragraphe 4 est remplacé par le texte suivant:
«4. Lorsqu’une infraction pénale définie par l’article 3, paragraphe 2, points a), b) ou c), ou par l’article 4, paragraphes 1 et 3, entraîne un préjudice ou un avantage d’un montant inférieur à 10 000 EUR, les États membres peuvent prévoir des sanctions autres que pénales.».
(5)À l’article 7, le paragraphe 6 suivant est inséré:
«7. Sans préjudice des paragraphes 1 à 5, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les personnes physiques qui ont été condamnées pour avoir commis l’une des infractions pénales visées dans la présente directive puissent faire l’objet des sanctions ou des mesures prévues par l’article 15, paragraphe 4, de la directive (UE) XXX relative à la lutte contre la corruption.».
(6)L’article 8 est remplacé par le texte suivant:
«Article 8
Circonstances aggravantes et circonstances atténuantes
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les circonstances prévues à l’article 18 de la directive (UE) XXX relative à la lutte contre la corruption soient considérées comme des circonstances aggravantes et des circonstances atténuantes, en ce qui concerne les infractions pénales visées dans la présente directive.».
(7)L’article 9 est remplacé par le texte suivant:
«Article 9
Sanctions à l’encontre des personnes morales
1.Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’une personne morale déclarée responsable conformément à l’article 6 soit passible de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives.
2.
Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les sanctions ou mesures applicables aux personnes morales déclarées responsables conformément à l’article 6 incluent celles qui sont prévues par l’article 17, paragraphe 2, de la directive (UE) XXX relative à la lutte contre la corruption.».
8)À l’article 12, les paragraphes 2, 3 et 4 sont remplacés par le texte suivant:
«2. Le délai de prescription visé au paragraphe 1 ne peut être inférieur à:
(a)quinze ans à compter du moment où l’infraction a été commise, pour les infractions pénales visées à l’article 3 et à l’article 4, paragraphes 1 et 2;
(b)dix ans à compter du moment où l’infraction a été commise, pour les infractions pénales visées à l’article 4, paragraphe 3.
3. Par dérogation au paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir un délai de prescription plus court, à condition que ce délai puisse être interrompu ou suspendu par certains actes spécifiques et que les règles applicables relatives aux délais de suspension et de prescription n’entravent pas l’efficacité de la procédure judiciaire ni l’application dissuasive des sanctions. Ce délai ne peut être inférieur à:
a)
dix ans pour les infractions pénales visées à l’article 3 et à l’article 4, paragraphes 1 et 2;
b)
huit ans pour les infractions pénales visées à l’article 4, paragraphe 3.
4. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour permettre l’exécution d’une peine d’emprisonnement consécutive à une condamnation définitive pendant au moins:
(a)quinze ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales visées à l’article 3 et à l’article 4, paragraphes 1 et 2;
(b)dix ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales visées à l’article 4, paragraphe 3.
5. Par dérogation au paragraphe 4, les États membres peuvent prévoir un délai de prescription plus court, à condition que ce délai puisse être interrompu ou suspendu par certains actes spécifiques et que les règles applicables relatives aux délais de suspension et de prescription n’entravent pas l’efficacité de la procédure judiciaire ni l’application dissuasive des sanctions. Ce délai ne peut être inférieur à:
(a)dix ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales visées à l’article 3 et à l’article 4, paragraphes 1 et 2;
(b)huit ans à compter de la date de la condamnation définitive, pour les infractions pénales visées à l’article 4, paragraphe 3.».
Article 29
Transposition
1.Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le [18 mois après la date d’adoption]. Ils communiquent immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions.
2.Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.
3.Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.
Article 30
Évaluation et établissement de rapports
1.La Commission présente au Parlement européen et au Conseil, au plus tard le [24 mois après le délai de mise en œuvre de la présente directive], un rapport évaluant dans quelle mesure les États membres ont pris les dispositions nécessaires pour se conformer à la présente directive.
2.Tous les deux ans à compter du [12 mois après le délai de mise en œuvre de la présente directive], les États membres transmettent à la Commission, dans un délai de trois mois, un rapport contenant un résumé de la mise en œuvre des articles 3 à 6 et des mesures prises conformément auxdits articles.
3.Au plus tard le [48 mois après le délai de mise en œuvre de la présente directive], la Commission présente au Parlement européen et au Conseil un rapport évaluant la valeur ajoutée de la présente directive au regard de la lutte contre la corruption. Ce rapport porte également sur l’incidence de la présente directive sur les droits et libertés fondamentaux. Sur la base de cette évaluation, la Commission décide, s’il y a lieu, des mesures de suivi appropriées.
Article 31
Entrée en vigueur
La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne.
Article 32
Destinataires
Les États membres sont destinataires de la présente directive conformément aux traités.
Fait à Bruxelles, le
Par le Parlement européen
Par le Conseil
La présidente
Le président