COMMISSION EUROPÉENNE
Strasbourg, le 6.7.2021
COM(2021) 390 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS EMPTY
Stratégie pour le financement de la transition vers une économie durable
{SWD(2021) 180 final}
Introduction – Améliorer le cadre de l’UE pour la finance durable
Le changement climatique et la dégradation de l’environnement sont les grands défis mondiaux de notre époque. Les pays du monde entier, reconnaissent l’urgence de relever ces défis, comme en témoigne leur soutien à l’accord de Paris et au programme de développement durable des Nations unies à l’horizon 2030, fixent des objectifs ambitieux. Sur la base du pacte vert pour l’Europe, l’UE a pris un certain nombre d’engagements ambitieux, notamment celui de devenir le premier continent neutre pour le climat d’ici à 2050 et de réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990. L’UE veut également à renforcer sa résilience face au changement climatique, inverser le processus d’appauvrissement de la biodiversité et de dégradation générale de l’environnement et ne laisser personne de côté dans ce processus. Pour atteindre ces objectifs, l’alignement de toutes les sources de financement – publiques et privées, nationales et multilatérales – est nécessaire. L’UE doit coopérer à l’échelle mondiale et travailler à leur transition avec les pays à revenu faible à intermédiaire.
Le cadre de l’UE pour la finance durable jouera un rôle clé dans la réalisation de ces objectifs et dans le soutien à une reprise durable après la pandémie de COVID-19. On estime que l’Europe aura besoin de 350 milliards d’EUR d’investissements supplémentaires par an sur cette décennie pour atteindre son objectif de réduction des émissions à l’horizon 2030 pour les seuls systèmes énergétiques, en plus des 130 milliards d’EUR dont elle aura besoin pour ses autres objectifs environnementaux. Les investissements dans des activités et des actifs non durables sont de plus en plus susceptibles de devenir irrécupérables alors que les enjeux climatiques et environnementaux se font de plus en plus pressants. La prise en compte insuffisante de ces enjeux entrave la redistribution des ressources et pourrait entraîner des réajustements brutaux à l’avenir, avec des conséquences pour la stabilité financière. Il est par conséquent nécessaire de compléter la réglementation environnementale par un cadre pour la finance durable qui oriente les financements vers des investissements réduisant l’exposition aux risques climatiques et environnementaux .
Le cadre pour la finance durable peut permettre aux pouvoirs publics de lever plus facilement des capitaux durables. L’UE prend déjà des mesures importantes à cet égard. Au titre du cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 et de NextGenerationEU (NGEU), l’Union entend consacrer jusqu’à 605 milliards d’EUR à des projets visant à faire face à la crise climatique et 100 milliards d’EUR à des projets en faveur de la biodiversité. Sur les 750 milliards d’EUR alloués à NextGenerationEU, 30 % seront levés par l’émission d’obligations vertes NGEU. En tant que «banque de l’UE pour le climat», le Groupe Banque européenne d’investissement a également pris des mesures importantes pour soutenir la transition.
L’ampleur des investissements requis dépassant largement les capacités du secteur public, le principal objectif du cadre pour la finance durable est d’orienter les flux financiers privés vers les activités économiques pertinentes. L’intérêt du secteur privé pour l’investissement durable s’est considérablement accru ces dernières années, mais il a besoin d’un cadre pour la finance durable qui soit clair, cohérent et solide. L’UE est en train de mettre ce cadre en place.
Le cadre pour la finance durable et l’union des marchés des capitaux se renforcent mutuellement, créant ainsi davantage d’opportunités pour les entreprises et les investisseurs. Des marchés des capitaux bien intégrés et efficients devraient agir comme un catalyseur permettant une mobilisation et une allocation efficaces des capitaux en faveur des investissements durables. De son côté, la dynamique du programme politique en matière de finance durable rend d’autant plus importants et urgents les efforts tendant à créer un véritable marché unique et durable des capitaux dans l’UE.
En 2018, la Commission a adopté son premier plan d’action pour le financement de la croissance durable. C’est sur la base de ce plan que l’UE a mis en place les trois éléments constitutifs d’un cadre pour la finance durable
. Ces éléments constitutifs sont les suivants: 1) un système de classification, ou «taxinomie», des activités durables, 2) un cadre pour la publication d’informations par les entreprises financières et non financières, et 3) des outils d’investissement, notamment des indices de référence, des normes et des labels
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Le premier élément constitutif est la taxinomie de l’UE. Le règlement sur la taxinomie vise à mettre en place un système de classification solide et fondé sur des données scientifiques, qui permette aux entreprises financières et non financières de partager une définition commune de la durabilité et qui offre ainsi une protection contre l’écoblanchiment.
Le deuxième élément constitutif est un régime d’obligations d’information applicable aux entreprises tant financières que non financières, qui permet ainsi aux investisseurs de disposer d’informations pour prendre des décisions éclairées en matière d’investissement durable. Ces obligations d’information couvrent l’incidence des activités d’une entreprise sur l’environnement et la société, ainsi que les risques commerciaux et financiers qu’elle encourt du fait de ses expositions en matière de durabilité (principe de la «double importance relative»). Dans ce contexte, la Commission a adopté aujourd’hui, au titre du règlement sur la taxinomie, un acte délégué précisant les informations à publier par les entreprises financières et non financières sur leurs performances environnementales, mesurées sur la base de la taxinomie de l’UE.
Régime de l’UE sur la publication d’informations en matière de durabilité applicable aux entreprises financières et non financières
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Acte
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Proposition de directive relative à la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD)
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Règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR)
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Règlement sur la taxinomie
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Champ d’application
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Toutes les grandes entreprises de l’UE et toutes les entreprises cotées (à l’exception des microentreprises cotées)
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Les acteurs des marchés financiers proposant des produits d’investissement, et les conseillers financiers
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Les acteurs des marchés financiers;
toutes les entreprises soumises à la CSRD
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Publication d’informations
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Publication de rapports basés sur les normes formelles d’information et soumis à un audit externe
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Publication, au niveau de l’entité et du produit, d’informations sur les risques en matière de durabilité et les principales incidences négatives
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Chiffre d’affaires, dépenses d’investissement et dépenses d’exploitation de l’année de référence liés à des produits ou des activités associés à la taxinomie
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Statut
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En cours de négociation; devrait être applicable à partir de 2023
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Applicable depuis le 10 mars 2021
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Applicable à partir de janvier 2022
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Pour compléter ces obligations d’information, les conseils en investissement et en assurance doivent tenir compte des préférences exprimées en matière de durabilité
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Le troisième élément constitutif est un ensemble d’outils d’investissement, notamment des indices de référence, des normes et des labels. Ces outils permettent aux acteurs des marchés financiers d’aligner plus facilement leurs stratégies d’investissement sur les objectifs climatiques et environnementaux de l’UE. Ils leur donnent une plus grande transparence. Tels sont les objectifs des indices de référence «transition climatique» de l’Union et des indices de référence «accord de Paris» de l’Union, créés par le règlement sur les indices de référence de l’UE pour le climat. Une proposition législative de la Commission établissant une norme pour les obligations vertes européennes est en cours d’adoption. Cette législation créera une norme d’application volontaire de haute qualité, accessible à tous les émetteurs, afin de les aider à attirer les investissements durables. En outre, l’extension du label écologique de l’UE aux produits financiers permettra aux investisseurs de détail de disposer d’un label crédible, fiable et largement reconnu pour les produits financiers de détail.
En quelques années, des avancées majeures ont été réalisées dans les efforts tendant à poser les bases du cadre pour la finance durable. Les trois éléments constitutifs sont bien avancés, mais il reste beaucoup à faire. La Commission est déterminée à achever la mise en œuvre de son ambitieux plan d’action de 2018. Toutefois, depuis 2018, notre compréhension de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs de durabilité a évolué, et le contexte mondial a changé. C’est pourquoi il est nécessaire d’engager une nouvelle phase dans la stratégie de l’UE en matière de finance durable.
La présente stratégie identifie quatre grands domaines dans lesquels des actions supplémentaires sont nécessaires pour que le système financier soutienne pleinement la transition de l’économie vers la durabilité.
Pour étayer cette stratégie, la Commission a sollicité l’avis de la plateforme sur la finance durable et mené une vaste consultation auprès des parties prenantes en 2020
. Cette stratégie complète également d’autres initiatives du pacte vert pour l’Europe, telles que le paquet «Ajustement à l’objectif 55».
I.Financer la transition de l’économie réelle vers la durabilité
La transition vers les objectifs de durabilité de l’UE nécessite des efforts sans précédent pour atténuer le changement climatique et s’y adapter, reconstituer le capital naturel et renforcer la résilience et le capital social au sens large, tout cela dans le cadre d’une reprise durable après la crise de la COVID-19. Les trajectoires de transition des acteurs économiques seront très variables, avec des points de départ et des stratégies commerciales différents, mais toutes devraient, en définitive, être conformes aux objectifs de l’UE en matière de durabilité.
À ce jour, les efforts de l’UE ont principalement visé à soutenir les flux d’investissement vers des activités économiques déjà durables sur le plan environnemental et vers des projets visant à rendre des activités économiques durables sur le plan environnemental. Pour relever le défi du financement des étapes intermédiaires de la transition urgente d’activités vers les objectifs environnementaux et de neutralité climatique de l’UE, un cadre plus propice est nécessaire. À cette fin, la Commission a sollicité l’avis de la plateforme sur la finance durable sur les options envisageables pour encourager et reconnaître les investissements dans des activités économiques favorisant la transition vers la durabilité
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Reconnaître les efforts de transition
Tandis que les entreprises, les émetteurs et les investisseurs peuvent utiliser la taxinomie de l’UE pour écologiser leurs activités et leurs portefeuilles, le cadre actuel pourrait être développé de manière à mieux reconnaître les investissements consentis aux étapes intermédiaires de la voie vers la durabilité. S’ils ne conduisent pas à un verrouillage de technologies à forte intensité de carbone, ces investissements peuvent réduire les incidences néfastes sur le climat et l’environnement.
Dans un premier temps, la Commission réfléchira à une proposition législative pour reconnaître et soutenir le financement de certaines activités économiques, principalement dans le secteur de l’énergie, y compris du gaz, qui contribuent à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’une manière favorisant la transition vers la neutralité climatique sur toute la décennie en cours, comme annoncé dans sa communication d’avril 2021.
En outre, la Commission réfléchira aux possibilités d’étendre le cadre de la taxinomie au-delà des activités durables sur le plan environnemental, afin de prendre éventuellement en compte les activités présentant un niveau intermédiaire de performance environnementale. Cela pourrait contribuer à accroître la transparence et à mobiliser des financements pour des activités économiques suivant une trajectoire crédible vers la durabilité, tout en tenant compte des aspects sociaux. D’ici à la fin de 2021, la Commission publiera un rapport décrivant les dispositions nécessaires pour couvrir les activités économiques qui n’ont pas d’incidence importante sur la durabilité environnementale et les activités économiques qui causent un préjudice important à la durabilité environnementale
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Inclure d’autres activités durables dans la taxinomie de l’UE
Comme annoncé dans sa communication publiée en avril 2021, la Commission adoptera un acte délégué complémentaire relatif au volet climatique de la taxinomie de l’UE couvrant des activités qui ne sont pas encore couvertes par le premier acte délégué relatif au volet climatique de la taxinomie, telles que l’agriculture et certains secteurs de l’énergie, conformément aux exigences du règlement sur la taxinomie. Cet acte délégué complémentaire couvrira également les activités liées à l’énergie nucléaire, sous réserve et en cohérence avec le processus spécifique d’examen par des experts que la Commission a mis en place à cet effet
. La Commission adoptera cet acte délégué complémentaire dans les meilleurs délais après la fin du processus spécifique d’examen à l’été 2021. L’acte délégué complémentaire couvrira aussi les activités liées au gaz naturel et les technologies connexes en tant qu’activités transitoires, dans la mesure où elles restent dans les limites de l’article 10, paragraphe 2, du règlement sur la taxinomie. Les avantages d’une clause de limitation dans le temps des activités transitoires seront examinés dans ce contexte.
En outre, la Commission adoptera des critères d’examen technique pour les quatre autres objectifs environnementaux définis dans le règlement sur la taxinomie: eau, économie circulaire, prévention de la pollution et biodiversité. Comme le prévoit le règlement sur la taxinomie, la Commission définira des critères pour ces objectifs dans un acte délégué, qui sera adopté au cours du premier semestre de 2022 et sera ensuite applicable à partir de 2023. Cela facilitera les investissements durables sur le plan environnemental au-delà du climat.
Étendre le cadre des normes et labels en matière de finance durable
Les normes et les labels peuvent aider à orienter les financements vers les entreprises, les émetteurs et les investisseurs en transition vers des activités et des modèles d’entreprise plus durables. Ils peuvent également aider les investisseurs en créant un cadre transparent et crédible pour prévenir l’écoblanchiment. Afin de faciliter l’injection de capitaux supplémentaires dans les efforts de transition intermédiaires, la Commission travaillera sur d’autres labels pour les obligations, tels que des labels pour les obligations de transition ou les obligations liées à la durabilité.
Pour l’avenir, un cadre plus général pour les labels des instruments financiers pourrait contribuer à apporter clarté, transparence et cohérence aux marchés de la finance durable. Ce cadre rendrait possibles les innovations futures sur le marché et en tiendrait compte, tout en garantissant un niveau minimal de transparence et de crédibilité quant aux éléments de durabilité des labels développés par le marché. Outre les instruments financiers, la Commission envisagera des labels pour les indices de référence environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) et des critères de durabilité minimaux pour les produits financiers qui promeuvent des caractéristiques environnementales ou sociales. Enfin, des ajustements au règlement Prospectus pourraient être envisagés afin de créer des exigences minimales de comparabilité, de transparence et d’harmonisation des informations disponibles pour tous les titres ESG.
Action nº 1: Afin de mettre en place un cadre plus complet et de faciliter le financement des étapes intermédiaires vers la durabilité, la Commission:
a)envisagera de proposer une législation pour soutenir le financement de certaines activités économiques, principalement dans le secteur de l’énergie, qui contribuent à réduire les émissions de gaz à effet de serre;
b)examinera les possibilités d’étendre le cadre de la taxinomie de l’UE de manière à reconnaître éventuellement les activités économiques présentant un niveau de performance intermédiaire;
c)adoptera un acte délégué complémentaire relatif au volet climatique de la taxinomie de l’UE qui couvre de nouveaux secteurs, dont l’agriculture et certaines activités énergétiques;
d)adoptera, d’ici au 2e trimestre de 2022, un acte délégué couvrant les quatre autres objectifs environnementaux (eau, biodiversité, prévention de la pollution et économie circulaire); et
e)envisagera un cadre général pour les labels d’instruments financiers, travaillera sur d’autres labels d’obligations comme les obligations de transition ou les obligations liées à la durabilité, sur un label d’indice de référence ESG et sur des critères de durabilité minimale pour les produits financiers qui promeuvent des caractéristiques environnementales ou sociales, et introduira des obligations d’information ciblées dans les prospectus.
II.Vers un cadre pour la finance durable plus inclusif
Donner aux investisseurs de détail et aux PME les moyens d’accéder aux opportunités offertes par la finance durable
Les citoyens, en tant qu’investisseurs de détail ou consommateurs, et les petites et moyennes entreprises (PME) sont essentiels à la transition vers la durabilité. De nombreux projets durables seront de petite envergure et développés au niveau local; ils n’en seront pas moins essentiels pour soutenir la reprise verte. L’union des marchés des capitaux et le cadre pour la finance durable viseront ensemble à offrir aux PME davantage de possibilités de financement et à encourager une plus grande participation des investisseurs de détail aux marchés des capitaux.
Les particuliers et les ménages, en ayant accès à la finance durable, peuvent jouer un rôle important dans la transformation de l’économie. Par exemple, les prêts verts peuvent aider les ménages et les PME à améliorer la performance énergétique de leurs bâtiments ou à passer à des véhicules à émission nulle. Afin d’encourager les prêts de détail verts, la Commission sollicitera l’avis de l’Autorité bancaire européenne (ABE) sur la définition à donner aux prêts de détail verts et aux prêts hypothécaires verts et sur les outils par lesquels ces prêts pourraient être soutenus. La Commission étudiera également les moyens de soutenir les prêts hypothécaires fondés sur l’efficacité énergétique dans le cadre de la révision de la directive sur le crédit hypothécaire.
Les conseillers financiers sont le principal point de contact pour les investisseurs de détail. Ils doivent être qualifiés pour soutenir l’adhésion à la finance durable. Afin d’encourager un plus grand engagement des investisseurs de détail, la Commission s’efforcera d’améliorer le niveau d’expertise en durabilité des conseillers financiers, sous réserve d’une évaluation plus approfondie. Par ailleurs, la Commission, en collaboration avec l’OCDE et son réseau international sur l’éducation financière, s’emploie à améliorer la culture financière des citoyens. Ils publieront des cadres communs de compétences financières pour les adultes et les jeunes, reflétant les compétences et les connaissances dont les individus ont besoin pour soutenir leur bien-être financier et mieux accéder à la finance durable.
L’économie de l’UE compte 23 millions de PME, qui devraient bénéficier d’un meilleur accès à des services de conseil en matière de durabilité adaptés à leurs besoins spécifiques. Du fait de la crise liée à la COVID-19, il est devenu plus difficile aux PME d’attirer les financements nécessaires à leurs efforts de transition. Souvent, les PME n’ont pas conscience des opportunités offertes par les outils de la finance durable et n’ont pas les capacités de les saisir.
La Commission est prête à soutenir les États membres dans leurs efforts visant à fournir des conseils techniques aux PME sur la manière de rendre compte volontairement des risques et des incidences en matière de durabilité et à renforcer leurs capacités dans ce domaine
. À cette fin, et conformément à la CSRD proposée, le Groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG) préparera une norme simplifiée d’application volontaire sur la publication d’informations en matière de durabilité, qui permettra aux PME de disposer d’un outil proportionné. De plus, le programme InvestEU offrira des mécanismes de réduction des risques, tandis que le pilier «PME» du programme en faveur du marché unique fournira des services de conseil aux PME via le Réseau Entreprise Europe et l’initiative en faveur de collaborations entre clusters ou grappes d’entreprises.
Exploiter les possibilités qu’offrent les technologies numériques pour la finance durable
Les technologies numériques peuvent fournir aux citoyens, aux investisseurs et aux PME des solutions essentielles pour mener à bien leur transition vers la durabilité. La Commission rendra possible et encouragera le recours à des solutions innovantes pour aider les PME à utiliser des outils numériques de finance durable et pour permettre aux investisseurs de détail de comprendre l’incidence des produits financiers sur la durabilité. Les innovations technologiques, telles que l’intelligence artificielle, la chaîne de blocs, les mégadonnées et l’internet des objets, ont un rôle important à jouer dans la finance durable. D’autres initiatives de l’UE, telles que l’inclusion d’informations relatives à la durabilité dans le point d’accès unique européen et le cadre pour la finance ouverte, contribueront à libérer ce potentiel.
Si les technologies numériques sont des facilitateurs importants de la transition, l’incidence environnementale et les besoins énergétiques croissants des centres de données et des technologies des registres distribués, notamment pour les crypto-actifs, suscitent des inquiétudes. La Commission évaluera l’incidence des technologies de la finance numérique sur la durabilité. L’UE devrait être à la pointe des efforts tendant à rendre ces infrastructures neutres pour le climat et efficaces sur le plan énergétique d’ici à 2030. L’acte délégué relatif au volet climatique de la taxinomie de l’UE établit déjà les critères d’examen technique applicable aux centres de données et aux solutions numériques qui contribuent substantiellement aux objectifs de la taxinomie de l’UE; il devrait être étendu à d’autres activités visant à développer des solutions numériques durables et à utiliser des crypto-actifs durables.
Assurances: offrir une meilleure protection contre les risques climatiques et environnementaux
En augmentant la couverture d’assurance, le système financier peut mieux protéger l’économie et la société contre certains risques liés aux catastrophes climatiques et naturelles. Une légère augmentation de la couverture d’assurance peut réduire considérablement le coût économique des catastrophes climatiques pour les contribuables et les gouvernements. La stratégie d’adaptation au changement climatique récemment adoptée créera les conditions propres à soutenir la résilience de la société face au changement climatique et à réduire les risques. Un tableau de bord des assurances contre les catastrophes naturelles élaboré par l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) indiquera les éventuelles lacunes de la couverture d’assurance dans les États membres. De plus, la Commission lancera un dialogue sur la résilience climatique entre les assureurs, les réassureurs, les autorités publiques et les autres parties prenantes afin d’échanger les bonnes pratiques et d’identifier les moyens de combler le déficit de protection climatique, soit par des recommandations, soit par des engagements volontaires.
Soutenir les investissements sociaux crédibles
La reprise après la pandémie souligne la nécessité d’une transition juste qui soutienne les travailleurs et leurs communautés affectés par la transition des activités économiques. La forte augmentation des émissions d’obligations sociales montre que les investisseurs sont de plus en plus à la recherche d’opportunités d’investissement à retombées sociales positives et promouvant les droits de l’homme. Cette tendance encourage les établissements financiers à intensifier leur engagement auprès des entreprises afin de les aider à intégrer les droits de l’homme et les facteurs sociaux dans leurs stratégies et leurs activités.
Les obligations de publication d’informations en matière de durabilité imposées aux acteurs des marchés financiers couvrent déjà certains facteurs sociaux, mais des mesures supplémentaires sont nécessaires. Avant décembre 2022, la Commission s’attellera avec les autorités européennes de surveillance à réviser les normes techniques de réglementation liées au SFDR, afin de préciser les indicateurs des principales incidences négatives liées au climat et à l’environnement et des principales incidences négatives dans le domaine social et de l’emploi, du respect des droits de l’homme et de la lutte contre la corruption. En outre, d’ici à la fin de 2021, la Commission publiera un rapport sur les dispositions requises pour une taxinomie sociale, comme l’exige le règlement sur la taxinomie
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La Commission présentera en outre une proposition sur la gouvernance d’entreprise durable, afin de garantir que les entreprises gèrent les risques en matière de durabilité et bénéficient des opportunités offertes par la transition vers la durabilité.
Budgétisation verte et mécanismes de partage des risques
Si les fonds publics ne peuvent à eux seuls financer tous les investissements nécessaires, ils ont néanmoins un rôle majeur à jouer, parallèlement aux fonds privés.
La Commission continue à renforcer la prise en compte systématique des questions de climat et de biodiversité dans le budget de l’UE. Elle utilise déjà des outils de budgétisation verte dans le cycle budgétaire annuel de l’UE. Dans le contexte de la mise en œuvre du cadre financier pluriannuel 2021-2027 et de l’accord interinstitutionnel y afférent avec ses engagements en matière de dépenses pour le climat et la biodiversité, ces travaux seront encore renforcés. La Commission s’est engagée à produire des méthodes de suivi actualisées et renforcées, tant pour le climat que pour la biodiversité. Ces méthodes de suivi seront essentielles pour vérifier que les dépenses en faveur du climat et de la biodiversité au titre du cadre financier pluriannuel 2021-2027 sont conformes aux ambitions de l’UE.
La Commission travaille également en étroite collaboration avec les États membres pour accroître le recours aux outils de budgétisation verte. Elle a également élaboré un cadre de référence pour la budgétisation verte et mène des enquêtes annuelles sur les pratiques existantes en la matière au sein de l’UE afin de soutenir les nombreux États membres qui souhaitent réorienter leur budget national vers des priorités vertes. Des travaux d’analyse, un soutien technique et des formations ainsi qu’une conférence annuelle favorisent un processus d’apprentissage mutuel pour aligner les politiques et les dépenses budgétaires sur les engagements environnementaux.
Le partage des risques entre les investisseurs publics et privés peut être efficace pour remédier aux défaillances du marché qui entravent le financement d’infrastructures durables et une transition stimulée par l’innovation. Le plan d’investissement pour une Europe durable, qui constitue le volet «investissement» du pacte vert pour l’Europe, vise à mobiliser au moins 1 000 milliards d’EUR d’investissements durables privés et publics au cours de la prochaine décennie. Le programme InvestEU apportera au Groupe BEI, aux banques nationales de développement et à d’autres établissements financiers une capacité de prise de risques et un soutien à des initiatives consultatives liées. La Commission organisera un premier sommet annuel sur l’investissement durable avant la COP 26 afin de faire le point sur l’état d’avancement des initiatives de l’UE incluses dans le plan d’investissement pour une Europe durable.
Action nº 2: Afin d’améliorer le caractère inclusif de la finance durable, la Commission:
a)sollicitera l’avis de l’ABE sur la définition à donner et le soutien à apporter aux prêts et crédits hypothécaires verts, explorera d’ici à 2022 les options envisageables pour favoriser leur adoption, et renforcera l’accès des citoyens et des PME aux services de conseil en matière de finance durable;
b)intégrera les données relatives à la finance durable dans les espaces de données dans le cadre de la stratégie européenne en matière de données et réfléchira, avec la plateforme sur la finance numérique, à d’éventuelles mesures supplémentaires pour rendre possibles et promouvoir des solutions innovantes utilisant les technologies numériques afin de soutenir les PME et les investisseurs de détail;
c)identifiera les lacunes de la protection assurantielle au moyen du tableau de bord relatif aux catastrophes naturelles de l’AEAPP et lancera un dialogue sur la résilience climatique avec toutes les parties prenantes concernées (2022);
d)publiera un rapport sur une taxinomie sociale d’ici à la fin de 2021; et
e)renforcera les méthodes de suivi des dépenses en faveur du climat et de la biodiversité, soutiendra les États membres qui souhaitent réorienter leur budget national vers des priorités vertes et organisera un premier sommet annuel sur l’investissement durable avant la COP 26.
III.Améliorer la résilience du secteur financier et sa contribution à la durabilité: la double importance relative
Pour s'aligner sur le pacte vert pour l’Europe, le secteur financier lui-même devra être plus résilient face aux risques posés par le changement climatique et la dégradation de l’environnement, et améliorer sa contribution à la durabilité. Cela nécessite une approche globale qui consiste à intégrer systématiquement à la fois les risques financiers significatifs en matière de durabilité (point de vue externe) et les incidences sur la durabilité (point de vue interne) dans les processus de prise de décision en matière financière. Il est primordial que ces deux aspects du concept d’importance relative soient dûment intégrés pour que le secteur financier puisse contribuer pleinement et de manière proactive au succès du pacte vert pour l’Europe.
Renforcer la résilience économique et financière face aux risques en matière de durabilité
Les risques en matière de durabilité sont déjà significatifs et ils auront des répercussions négatives sur la stabilité financière et le financement de l’économie réelle. L’impact physique du changement climatique et la perte de biodiversité créent des risques qui peuvent être systémiques, sans être forcément visibles au niveau de chaque actif. Une réaction désordonnée et soudaine à la transition peut aussi comporter des risques. Il est donc vital de comprendre la nature et le degré de ces expositions ainsi que la manière dont elles interagissent et évoluent au fil du temps. Des mesures complémentaires sont nécessaires pour que les facteurs de durabilité soient intégrés de manière cohérente dans l’évaluation et la gestion des risques au sein du secteur financier.
Prendre en compte les risques en matière de durabilité dans les normes d’information financière et la comptabilité
La Commission soutient fermement les travaux internationaux sur l’intégration des considérations de durabilité dans les informations financières et la comptabilité et visera le niveau d’ambition le plus élevé. Elle collaborera avec le Groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG), l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) et le Bureau international des normes comptables (IASB) pour évaluer si les normes internationales d’information financière (IFRS) intègrent de manière appropriée les risques en matière de durabilité. Étant donné que les normes et pratiques en matière d’information financière déterminent la valeur des investissements, elles constituent un élément clé pour intégrer les risques en matière de durabilité dans le processus décisionnel des marchés financiers. Il convient notamment de voir comment reconnaître et signaler les risques climatiques et environnementaux pertinents, de manière adéquate et en temps utile, dans les états financiers.
Afin d’encourager l’élaboration de normes d’évaluation du capital naturel dans l’UE et dans le monde, la Commission intensifie aussi son dialogue avec l’industrie sur la comptabilisation de la biodiversité et du capital naturel.
Améliorer la transparence des notations de crédit et des perspectives de notation
Les agences de notation de crédit jouent un rôle important dans le système financier en évaluant le risque de crédit des émetteurs financiers et non financiers. Face à l’utilisation très large qui est faite des notations de crédit, les parties prenantes restent préoccupées par le manque de transparence sur la manière dont ces agences intègrent les facteurs de durabilité dans leurs méthodes de notation. Sous réserve d’une évaluation plus approfondie de l’efficacité des mesures existantes par l’AEMF, la Commission prendra des mesures pour améliorer la transparence et garantir l’inclusion des facteurs ESG pertinents dans les notations de crédit et les perspectives de crédit, en assurant notamment la transparence des méthodes employées.
Identification et gestion des risques en matière de durabilité par les banques et les assureurs
La capacité des banques et des entreprises d’assurance à identifier et gérer les risques en matière de durabilité, ainsi qu’à absorber les pertes financières qui en découlent, est déterminante pour la stabilité financière et la résilience de l’économie réelle pendant la transition. Malgré les efforts déployés par les entités du secteur financier et les autorités de surveillance pour intégrer les facteurs climatiques et environnementaux aux systèmes de gestion des risques et aux exigences prudentielles en matière de fonds propres, les progrès restent insuffisants.
-La Commission proposera des modifications du cadre prudentiel pour les banques afin de garantir l’intégration systématique des facteurs ESG dans la surveillance et les systèmes de gestion des risques. À cette fin, les cadres régissant la gestion des risques fixeront des exigences claires d’identification, de mesure, de gestion et de suivi des risques en matière de durabilité, notamment des tests de résistance au changement climatique pour les banques. En complément, dans le cadre de l’évaluation prudentielle annuelle, le rôle des autorités de surveillance dans l’évaluation de ces risques sera clarifié et renforcé. Enfin, la Commission proposera que l’Autorité bancaire européenne de présenter deux ans plus tôt, soit en 2023, son évaluation en cours du traitement prudentiel des expositions liées à des actifs ou activités étroitement associés à des objectifs environnementaux et/ou de durabilité.
-La Commission intégrera systématiquement les risques en matière de durabilité dans les systèmes de gestion des risques et le contrôle des assureurs. Elle proposera des modifications pour la directive Solvabilité II
, dont une analyse de scénarios de changement climatique par les assureurs. À l’instar de l’approche adoptée dans le secteur bancaire, l’AEAPP évaluera les différentiels de risque entre les expositions durables sur le plan environnemental et/ou social et les autres expositions dans le secteur de l’assurance.
Gérer les risques en matière de durabilité au niveau du système
Pour accroître la résilience du système financier face aux chocs, il est nécessaire d’identifier, de mesurer et de gérer les risques au niveau de l’ensemble du système. La Commission renforcera sa coopération avec les autorités de surveillance européennes et la Banque centrale européenne (BCE) dans le but de détecter, de surveiller et d’atténuer l’ensemble des risques systémiques en matière de durabilité ayant une incidence sur la stabilité financière à long terme. À cette fin, les travaux seront intensifiés afin de définir des méthodes et des scénarios cohérents et pertinents pour quantifier les risques en matière de durabilité et tester la résilience du système financier, en couvrant les secteurs financiers concernés. La Commission demandera un test de résistance ciblé du système financier sur le paquet «Ajustement à l’objectif 55».
Les établissements financiers sont de plus en plus exposés à l'accélération de la dégradation des écosystèmes et de la perte de biodiversité, à l’épuisement des ressources naturelles et à une pollution croissante de l’eau, de l’air et des sols. Pour intensifier les efforts d'évaluation des risques financiers liés à une perte de biodiversité et à une dégradation des écosystèmes d’importance significative, la Commission préparera un rapport sur la mesure et la présence de ces risques dans l’UE. Ce rapport examinera aussi des approches et des méthodes permettant de mesurer ces risques et présentera les prochaines étapes à franchir dans ce domaine.
Enfin, le traitement et la gestion des risques systémiques nécessitent que les autorités macroprudentielles disposent d’outils appropriés. Avec le soutien des autorités européennes de surveillance, du Comité européen du risque systémique (CERS) et de la Banque centrale européenne (BCE), la Commission examinera si les outils macroprudentiels permettent de parer aux risques pour la stabilité financière liés au changement climatique, dans le cadre d’un prochain réexamen du cadre macroprudentiel bancaire. À moyen terme, des travaux supplémentaires seront menés en vue d’étendre le champ d’application de ces outils à des secteurs non bancaires et aux risques environnementaux, sur avis des autorités européennes de surveillance, du CERS et de la BCE.
Action nº 3: Afin de renforcer la résilience économique et financière face aux risques en matière de durabilité, la Commission:
a)collaborera avec l’EFRAG, l’AEMF et l’IASB sur la meilleure façon, pour les normes d’information financière, d’appréhender les risques pertinents en matière de durabilité;
b)prendra des mesures pour garantir la prise en compte systématique et transparente des risques ESG pertinents dans les notations de crédit et les perspectives de notation, en tenant compte d’une évaluation supplémentaire par l’AEMF (2023);
c)proposera des modifications du règlement sur les exigences de fonds propres et de la directive sur les exigences de fonds propres destinées à garantir l’intégration cohérente des risques en matière de durabilité dans les systèmes de gestion des risques des banques, dont la réalisation de tests de résistance au changement climatique par les banques (2021);
d)proposera des modifications de la directive Solvabilité II visant à intégrer systématiquement les risques en matière de durabilité dans la gestion des risques des assureurs, dont la réalisation d’analyses de scénarios de changement climatique par les assureurs (2021); et
e)renforcera la stabilité financière à long terme par une coopération plus étroite en matière d’évaluation des risques pour la stabilité financière, des tests de résistance réguliers, une évaluation des outils macroprudentiels et une étude consacrée aux risques découlant de la dégradation de l’environnement et de la perte de biodiversité.
Accélérer la contribution du secteur financier aux efforts de transition
Au-delà de la gestion des risques en matière de durabilité par les établissements financiers, le succès du pacte vert pour l’Europe dépend de la contribution de tous les acteurs économiques et de leur incitation à atteindre nos objectifs. À cette fin, les établissements financiers doivent transposer les objectifs de durabilité de l’UE dans leurs stratégies de financement à long terme et dans leurs processus décisionnels. Il s’agit notamment de mieux mesurer, suivre et présenter, à intervalles réguliers, les progrès réalisés.
Améliorer l’établissement d’objectifs fondés sur des données scientifiques, la publication d’informations et le suivi des engagements du secteur financier
Les établissements financiers devraient publier leurs propres plans de décarbonation et de transition vers la durabilité, comportant des objectifs à moyen et long terme et indiquant comment ils comptent réduire leur empreinte environnementale. Une plus grande transparence des objectifs, des indicateurs, des définitions et des méthodes sera essentielle pour contrôler l’efficacité dans le temps des mesures prises. La proposition de CSRD adoptée par la Commission en avril 2021 obligera les sociétés cotées en bourse et les grandes entreprises de l’UE, y compris les banques, les assureurs et les investisseurs, à publier leurs objectifs de durabilité et les progrès accomplis vers leur réalisation. En outre, la Commission s’appuiera sur la norme technique de réglementation prévue par le SFDR pour renforcer les obligations d’information et d’efficacité des mesures de décarbonation des acteurs des marchés financiers, pour tous les produits d’investissement.
À cet égard, les engagements volontaires d’établissements financiers du monde entier sur l’adoption d’objectifs stratégiques scientifiquement définis en matière de climat et de durabilité constituent aussi un début louable. En attendant de possibles autres mesures de politique publique dans ce domaine, la Commission examinera dans quelle mesure de nouvelles orientations pourraient garantir la crédibilité de ces engagements volontaires et suivra dans le temps les progrès accomplis au sein de l’UE. À ce stade, les établissements financiers pourraient utiliser la taxinomie de l’UE et d’autres outils de la finance durable pour avancer dans la réalisation de leurs plans au niveau des entités et des portefeuilles.
Clarifier les devoirs fiduciaires et les règles de gestion des investisseurs afin de refléter la contribution du secteur financier aux objectifs du pacte vert
L’alignement des flux financiers sur les objectifs du pacte vert pour l’Europe nécessite une prise en compte plus poussée des incidences sur la durabilité dans les stratégies et les processus décisionnels des investisseurs. Le 21 avril 2021, la Commission a publié six actes délégués modificatifs, qui obligent les entreprises financières, telles que les conseillers financiers, les gestionnaires d’actifs et les assureurs, à intégrer dans leurs procédures les risques en matière de durabilité importants d’un point de vue financier et à tenir compte des préférences de leurs clients en matière de durabilité. Ces mesures devront être complétées par de nouvelles mesures applicables aux 125 000 fonds de pension de l’UE qui gèrent des régimes collectifs pour le compte d’environ 75 millions d’Européens. Pour renforcer la contribution des investisseurs et des fonds de pension aux objectifs du pacte vert, il est essentiel de faire en sorte que dans leurs processus décisionnels, leurs devoirs fiduciaires envers les affiliés et les bénéficiaires tiennent aussi compte des risques ESG que leurs investissements font courir à l’extérieur.
-La Commission demandera à l’AEAPP d’évaluer la nécessité éventuelle d’élargir la notion d’«intérêt supérieur à long terme des affiliés et des bénéficiaires» et d’introduire, dans le cadre mis en place pour les placements de retraite, l’obligation de tenir compte des incidences sur la durabilité. L’objectif serait de faire en sorte que ce cadre reflète mieux les préférences des affiliés et des bénéficiaires en matière de durabilité et leurs objectifs sociétaux et environnementaux plus larges. En collaboration avec les autorités européennes de surveillance, la Commission examinera et évaluera de nouvelles mesures pour permettre à tous les acteurs des marchés financiers et conseillers concernés d’examiner systématiquement les incidences positives et négatives sur la durabilité de leurs décisions d’investissement, ainsi que des produits qu’ils conseillent.
-La Commission réexaminera les cadres pertinents relatifs aux activités de gestion et d’engagement des investisseurs. Elle essaiera notamment de voir comment la deuxième directive concernant les droits des actionnaires
pourrait mieux refléter les objectifs de durabilité de l’UE et s’aligner sur les bonnes pratiques internationales en matière de lignes directrices relatives à la gestion.
Améliorer la disponibilité, l’intégrité et la transparence des recherches et des notations ESG
Pour mener à bien leurs efforts de transition, les établissements financiers auront besoin d’un large éventail d’informations leur permettant d’identifier les risques, les possibilités et les incidences en matière de durabilité associés aux entreprises dans lesquelles ils investissent et à leurs clients. À cette fin, la directive CSRD proposée obligera les grandes entreprises cotées de l’UE à publier des données sur la durabilité pertinentes, comparables et prospectives pour toute la chaîne de valeur financière
. De plus, la future proposition de point d’accès unique européen créera à l’échelle de l’UE un mécanisme qui offrira des bases de données faciles d’accès, comparables et exploitables numériquement, sur les obligations d’information des entreprises, y compris en matière de durabilité.
Sous réserve d’une consultation publique et d’une analyse d’impact, la Commission prendra des mesures pour améliorer la fiabilité, la comparabilité et la transparence des notations ESG. Les notations ESG ont une incidence de plus en plus importante sur le fonctionnement des marchés de capitaux et sur la confiance des investisseurs dans les produits durables. Ces mesures s’appuieront sur l’étude de la Commission publiée en janvier 2021, qui met en évidence un manque de transparence dans le fonctionnement des fournisseurs de notations ESG, le faible niveau de comparabilité de ces notations et de possibles conflits d’intérêts. La demande croissante en investissements durables met aussi en évidence la nécessité de recherches ESG impartiales et fiables, basées sur des méthodes transparentes et comparables.
Action nº 4: Afin d’accroître la contribution du secteur financier à la durabilité, la Commission:
a)améliorera la communication par les établissements financiers de leurs objectifs de durabilité et d’informations sur la planification de leur transition, examinera dans quelle mesure des orientations supplémentaires pourraient garantir la crédibilité des engagements pris volontairement, et suivra les progrès accomplis;
b)demandera à l’AEAPP d’évaluer la nécessité de réexaminer, d’ici à 2022, les devoirs fiduciaires des fonds de pension et des investisseurs, y compris leurs activités de gestion et d’engagement, afin que les incidences sur la durabilité soient prises en compte dans leurs processus décisionnels en matière d’investissement; et
c)prendra des mesures pour améliorer la fiabilité et la comparabilité des notations ESG et évaluera de manière plus approfondie certains aspects de la recherche ESG, afin de décider si une intervention est nécessaire.
Lutter contre l’écoblanchiment
L’UE a pris des mesures importantes pour lutter contre l’écoblanchiment sur le marché financier. Les tentatives d’écoblanchiment peuvent comporter des risques pour la réputation des acteurs concernés et entraîner une perte de confiance dans les produits de la finance durable et dans le système financier. Afin de prévenir l’écoblanchiment, l’UE a introduit des obligations d’information pour les entreprises et les investisseurs et a créé des outils pour accroître la transparence et aider les investisseurs finaux à identifier des opportunités d’investissement crédibles
. Toutefois, l’efficacité des politiques menées en matière de finance durable dépend également d’un niveau adéquat d’application dans l’ensemble de l’UE. Les autorités de surveillance ont un rôle clé à jouer, en contrôlant le respect de la réglementation en matière de finance durable et en faisant pleinement usage de leurs mandats et pouvoirs légaux pour assurer la protection des investisseurs et des consommateurs contre les allégations non étayées en matière de durabilité.
Avec le soutien des autorités européennes de surveillance, la Commission évaluera si les pouvoirs, les capacités et les obligations en matière de surveillance sont adaptés à l’objectif poursuivi. Sur la base de cette évaluation et d’un suivi des risques d’écoblanchiment par les autorités européennes de surveillance, la Commission réfléchira à des mesures pour garantir un niveau d’application et de surveillance cohérent et suffisant pour lutter contre l’écoblanchiment.
Veiller à la transition ordonnée du système financier de l’UE
La réalisation des objectifs climatiques de l’UE passera par une collaboration entre les États membres, les autorités de surveillance financière et les autorités publiques compétentes afin de suivre les progrès de la transition. La Commission, en collaboration avec la plateforme sur la finance durable, élaborera un cadre de suivi solide pour mesurer les flux de capitaux vers les investissements durables. Elle aidera les États membres à évaluer le déficit d’investissement et à mesurer les progrès réalisés par les secteurs financiers pour atteindre nos objectifs climatiques et environnementaux
.
Les autorités européennes de surveillance peuvent jouer un rôle important en contribuant à l’intégration cohérente du principe de double importance relative dans le système financier. La Commission renforcera la coopération entre toutes les autorités publiques concernées, y compris les autorités de surveillance, afin d’aider à définir des objectifs intermédiaires pour le secteur financier, à mieux comprendre si les progrès sont suffisants et à ouvrir ainsi la voie à une action politique plus concertée de toutes les autorités publiques concernées.
Enfin, la Commission mettra en place un forum de recherche sur la finance durable, afin de renforcer le rôle de la science et d’encourager le partage de connaissances sur la finance durable entre le monde universitaire et le secteur. Ce forum aurait pour mission de sensibiliser à l’utilisation de la recherche sur la finance durable et de favoriser l’échange de connaissances entre les chercheurs et la communauté financière.
Action nº 5: Afin de veiller à la transition ordonnée du système financier de l’UE et d’en garantir l’intégrité, la Commission:
a)surveillera les risques d’écoblanchiment et évaluera et révisera la boîte à outils dont disposent actuellement les autorités compétentes en matière de surveillance et d’exécution, afin que les pouvoirs, les capacités et les obligations en la matière sont adaptés à leurs finalités, avec le soutien des autorités européennes de surveillance;
b)élaborera un cadre de suivi solide pour mesurer les flux de capitaux et aidera les États membres à évaluer le déficit d’investissement et à mesurer les progrès réalisés par leur secteur financier d’ici à 2023;
c)renforcera la coopération entre toutes les autorités publiques concernées, notamment les États membres, la Banque centrale européenne, le Comité européen du risque systémique, les autorités européennes de surveillance et l’Agence européenne pour l’environnement, afin de définir une approche commune pour veiller à une transition ordonnée et garantir que le principe de double importance relative soit intégré de manière cohérente dans le système financier de l’UE (d’ici à 2022); et
d)créera un forum de recherche sur la finance durable afin de favoriser l’échange de connaissances entre les chercheurs et la communauté financière.
IV.Œuvrer en faveur d'une ambition mondiale
Les défis mondiaux imposent d'agir au niveau mondial. Or, d’un pays ou d’un groupe de pays à l’autre, les points de départ, les niveaux d’ambition et les objectifs varient. Pour exploiter pleinement le potentiel mondial de la finance durable, de plus en plus d'initiatives en la matière sont coordonnées par des forums et réseaux internationaux
. Mettant à profit ses réussites internes, l’UE a su s’imposer au niveau international comme chef de file dans le domaine de la finance durable et contribue activement à l’effort mondial. Ce rôle de chef de file peut être une source d’inspiration pour d’autres pays à travers le monde et générer des débouchés commerciaux pour le secteur financier de l’UE à l’échelle mondiale. Les acteurs de l’UE sont les principaux émetteurs d’obligations vertes et font désormais partie des grands investisseurs durables. Des marchés verts dynamiques contribuent à renforcer le rôle international de l’euro et font de l’UE le principal pôle mondial de la finance durable.
La Commission considère qu’il est nécessaire de disposer d’une architecture internationale en matière de finance durable qui soit ambitieuse et solide, intègre le concept de double importance relative et soutienne les pays partenaires de l’UE. Cette architecture doit comporter une gouvernance internationale robuste, un corpus réglementaire solide et un cadre de suivi. Dans un premier temps, la Commission suggère que le Conseil de stabilité financière étende son mandat à la contribution du système financier aux objectifs mondiaux en matière de climat et d’environnement.
La Commission invite tous les partenaires internationaux à renforcer la coopération bilatérale et multilatérale en matière de finance durable, notamment pour promouvoir la convergence des approches et fournir au secteur privé des outils et des indicateurs utilisables, tels que des taxinomies. Notamment, dans le cadre de la feuille de route du groupe de travail du G20 sur la finance durable (SFWG), la Commission souligne qu’il importe d’œuvrer à l’alignement des flux financiers sur les objectifs de durabilité.
Promouvoir un consensus ambitieux au sein des enceintes internationales
L’UE plaidera pour que les instances internationales et les organismes de normalisation, tels que la Fondation IFRS, élaborent des normes et des principes ambitieux en matière de publication d’informations, en s’appuyant, le cas échéant, sur les recommandations du groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat (TCFD) et sur d’autres initiatives internationales
. Les normes internationales de publication d’informations peuvent se chevaucher, manquer de cohérence entre elles et varier en termes d’ambition. La Commission se félicite des efforts déployés en vue d’établir une norme mondiale de référence pour la publication d’informations en matière de durabilité et plaide en faveur de normes exhaustives en la matière, qui abordent toutes les questions du développement durable et tiennent compte du principe de double importance relative, conformément à la proposition de directive CSRD.
L’UE continuera à coopérer avec ses partenaires au sein des enceintes internationales afin de convenir d’objectifs et de principes communs pour les taxinomies et, à terme, d’accroître la comparabilité et la cohérence des indicateurs et des seuils utilisés dans les taxinomies. L’UE s’engage activement au sein du G20 et de la plateforme internationale sur la finance durable afin d’éviter les approches fragmentées, qui se traduiraient par une augmentation des coûts de transaction, par des flux insuffisants de capitaux transfrontières et par des freins à l’innovation financière.
Il est essentiel de déployer des efforts au niveau mondial pour faire face aux conséquences des risques climatiques et environnementaux sur la stabilité financière. L’UE invite le Conseil de stabilité financière à se saisir des questions plus générales posées par la durabilité et à tenir compte du fait que les activités des établissements financiers ont une incidence sur le climat et l’environnement et contribuent donc aux risques qu’ils visent à mesurer. Enfin, l’UE soutient activement les travaux du groupe de travail sur les risques financiers liés au climat du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, qui visent à identifier et à combler les lacunes potentielles du cadre de Bâle, ainsi que les travaux de l’Association internationale des contrôleurs d’assurance, qui visent à intégrer les risques liés au climat dans la surveillance des assurances.
Faire progresser et approfondir le travail de l’IPSF
Afin de favoriser la coopération internationale, la Commission européenne et sept pays tiers ont créé la plateforme internationale sur la finance durable (IPSF) en octobre 2019
. L’IPSF promeut des marchés intégrés pour la finance durable et travaille sur des outils et des indicateurs utilisables. Elle compte maintenant 17 membres et est reconnue comme une initiative internationale essentielle en matière de finance durable
.
L’IPSF rendra compte de ses travaux sur une «taxinomie de base commune», qui s'inspirera des nouvelles taxinomies élaborées par ses membres, ainsi que sur les obligations d’information en matière de durabilité. La Commission promouvra le concept de double importance relative au sein de l’IPSF. De plus, elle proposera de renforcer le partage des connaissances sur des domaines clés de la finance durable, tels que les synergies entre le financement en faveur du climat et de la biodiversité et la transition du système financier vers des objectifs de durabilité partagés. Elle soutiendra également l’augmentation du nombre de membres de l’IPSF et l'adoption d'une structure de gouvernance renforcée, et proposera un nouveau plan de travail d’ici l’automne 2021. L’IPSF est également reconnue comme un partenaire pour l'échange de connaissances avec le groupe SFWG du G20 depuis son rétablissement en tant que groupe de travail, et comme un contributeur essentiel aux travaux concernant l’alignement des investissements sur les objectifs de durabilité.
Aider les pays à revenu faible ou intermédiaire à élargir leur accès à la finance durable
La Commission élaborera une stratégie globale pour contribuer à accroître la finance durable dans les pays partenaires de l'UE. Les pays à revenu faible et intermédiaire ont besoin d’investissements massifs pour financer leur développement durable. Il sera indispensable d’accélérer les flux financiers privés vers nos pays partenaires pour pouvoir concrétiser collectivement notre programme mondial en matière de durabilité. Toutefois, cela passera par l'octroi de soutiens spécifiques. La Commission soutiendra les efforts visant à renforcer l'utilisation d'instruments financiers liés à la durabilité dans nos pays partenaires et contribuer à mieux reconstruire au niveau mondial, notamment grâce à l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI) baptisé «L’Europe dans le monde» et à l’instrument d’aide de préadhésion (IAP).
Action nº 6: Afin d’assigner un niveau d’ambition élevé aux initiatives et normes internationales en matière de finance durable, et afin de soutenir les pays partenaires de l’UE, la Commission:
a)recherchera un consensus ambitieux dans les enceintes internationales, généralisera le concept de double importance relative, soulignera l’importance des cadres pour la publication d’informations et conviendra d’objectifs et de principes pour les taxinomies;
b)proposera d’élargir les travaux de l’IPSF à de nouveaux sujets et de renforcer sa gouvernance; et
c)aidera les pays à revenu faible ou intermédiaire à élargir leur accès à la finance durable en élaborant une stratégie globale et en promouvant les instruments financiers liés à la durabilité.
Conclusion – Mise en œuvre et prochaines étapes
Sur la base du plan d’action 2018 sur la finance durable, la Commission a pris des mesures sans précédent pour poser les fondements d’une finance durable. Ce cadre ambitieux doit être finalisé et consolidé pour que nous puissions répondre aux besoins d’investissement massifs liés à la transition, garantir une transition équitable et nous adapter au contexte mondial. Cette stratégie répond à ces défis et fournit un cadre opérationnel et cohérent.
Cette stratégie montre comment transposer les objectifs du pacte vert pour l’Europe dans l’ensemble du système financier et garantit que les acteurs de tous les secteurs de l’économie seront en mesure de financer leur transition, quel que soit leur point de départ. Les mesures qu'elle prévoit viennent compléter les changements décisifs apportés aux politiques en matière de climat et d’environnement qui ont été définis dans le pacte vert pour l’Europe. Elle s’appuie sur la collaboration et les partenariats de la Commission avec des initiatives privées et publiques extérieures, afin d’encourager le secteur financier à jouer un rôle moteur dans la réalisation des objectifs de l’UE en matière de durabilité. La Commission rendra compte de la mise en œuvre de cette stratégie d’ici la fin de 2023 et soutiendra activement les États membres dans leurs efforts.
La Commission invite toutes les parties prenantes concernées, depuis les banques centrales et les autorités de surveillance jusqu’aux États membres, en passant par les citoyens, les autorités locales et les entreprises financières et non financières, à agir dans leurs domaines respectifs pour maximiser l’impact de cette stratégie.