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Document 52020AE5933

    Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Construire une Union européenne de la santé: renforcer la résilience de l’UE face aux menaces transfrontières pour la santé» [COM(2020) 724 final], sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux [COM(2020) 725 final — 2020/321 (COD)], sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 851/2004 instituant un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies [COM(2020) 726 final — 2020/320 (COD)] et sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision n° 1082/2013/UE [COM(2020) 727 final — 2020/322 (COD)]

    EESC 2020/05933

    JO C 286 du 16.7.2021, p. 109–120 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    16.7.2021   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 286/109


    Avis du Comité économique et social européen sur la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — «Construire une Union européenne de la santé: renforcer la résilience de l’UE face aux menaces transfrontières pour la santé»

    [COM(2020) 724 final]

    sur la

    proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments dans la préparation aux crises et la gestion de celles-ci en ce qui concerne les médicaments et les dispositifs médicaux

    [COM(2020) 725 final — 2020/321 (COD)]

    sur la

    proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 851/2004 instituant un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies

    [COM(2020) 726 final — 2020/320 (COD)]

    et sur la

    proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les menaces transfrontières graves pour la santé et abrogeant la décision no 1082/2013/UE

    [COM(2020) 727 final — 2020/322 (COD)]

    (2021/C 286/20)

    Rapporteur:

    Ioannis VARDAKASTANIS (EL-III)

    Consultation

    Conseil, 14.12.2020

    Parlement européen, 14.12.2020

    Commission, 12.11.2020

    Base juridique

    Article 168, paragraphe 5, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

    Compétence

    Section «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

    Adoption en section

    16.4.2021

    Adoption en session plénière

    27.4.2021

    Session plénière no

    560

    Résultat du vote

    (pour/contre/abstentions)

    232/3/7

    1.   Conclusions et recommandations

    1.1.

    Avec le train de mesures pour une «Union européenne de la santé», l’Union européenne et ses États membres doivent répondre à l’aspiration des personnes vivant dans l’Union de voir celle-ci jouer un rôle plus actif dans la protection de leur santé et la promotion du droit à la santé. Selon une récente enquête de l’Union, 66 % des citoyens européens souhaiteraient que l’Union soit davantage entendue sur les questions de santé. 54 % des personnes interrogées estiment que la santé publique devrait être une priorité de dépenses dans le cadre du budget de l’Union (1). Il y a lieu d’améliorer tout particulièrement la capacité de l’Union à prévenir et à détecter les menaces transfrontières pour la santé, ainsi qu’à s’y préparer et à les gérer efficacement. À ce titre, une discussion et un éventuel réexamen de la subsidiarité, du partage des compétences et des références aux menaces transfrontières pour la santé et à la préparation dans les traités de l’Union devront avoir lieu dès qu’il aura été possible d’évaluer pleinement l’impact de cette pandémie ainsi que les réactions de l’Union et de ses États membres. Dans l’intervalle, il convient de poursuivre les actions ambitieuses menées dans le cadre actuel des traités.

    1.2.

    Au cours de la pandémie, les personnes vivant en Europe ont observé et ressenti à quel point l’Union était mal préparée pour préserver la sécurité des personnes, avec son architecture de soins et sa stratégie de prévention fragmentées, et après plusieurs décennies d’austérité et de sous-investissement dans les services de santé et d’aide sociale. Cela a eu une incidence tant sur le plan des pertes de vies humaines, que sur l’augmentation des inégalités et des taux de pauvreté. La pandémie a révélé que de nombreuses personnes ne sont toujours pas protégées contre les discriminations au sein de l’Union ou n’ont pas accès aux informations de santé publique ni aux soins de santé. Le CESE plaide en permanence en faveur d’une convergence vers le haut des systèmes de santé et de protection sociale, ainsi que de principes généraux communs au niveau de l’Union (2). Les mesures de protection de la santé doivent toujours respecter l’ensemble des droits fondamentaux et devraient reposer sur des systèmes de santé solidaires. La procédure du semestre européen devrait vérifier les performances ainsi que la situation générale des systèmes de santé et de gestion de crise des États membres.

    1.3.

    La pandémie de COVID-19 a démontré à quel point les services de santé et de soins sont essentiels, et que la santé constitue un bien public. Dans ce contexte, il convient que l’Union et les États membres veillent à ce que chacun ait un accès égal à des services sociaux et sanitaires de qualité, dotés d’effectifs suffisants et bien équipés.

    1.4.

    Pendant la pandémie, les professionnels de santé, les travailleurs sociaux, les médiateurs de santé, les acteurs de la société civile et les prestataires de services essentiels (alimentation, transports) ont été en première ligne, et ils ont fait preuve d’une solidarité exceptionnelle en cette période particulièrement difficile. Il y a lieu d’accorder une attention particulière au personnel de santé et à la nécessité d’améliorer leurs conditions de travail, notamment en matière de rémunération, de recrutement et de maintien dans la profession, ainsi qu’à tout ce qui concerne leur santé et leur sécurité. La pression exercée par la pandémie pousse nombre d’entre eux à envisager de quitter la profession. Le train de mesures à l’examen doit en prendre acte, tout en mesurant bien le rôle que tous les acteurs susmentionnés peuvent jouer dans le domaine de la santé. De même, les collectivités locales, les prestataires de services et le personnel de santé devraient être plus largement consultés. Une meilleure coordination entre l’Union, les États membres et les niveaux régional et local, en ce compris la société civile, augmentera l’efficacité au bénéfice de la population européenne.

    1.5.

    Si le Comité économique et social européen (CESE) félicite l’Union pour la solidarité qui se manifeste dans la stratégie de vaccination, il constate toutefois de sérieux retards dans l’accès des citoyens au vaccin. Le CESE demande à la Commission de veiller à ce que l’accès à la vaccination demeure, conformément à ce qu’elle avait affirmé initialement, un bien public gratuit pour tous. Les droits de propriété intellectuelle et les règles de l’Union en matière d’exclusivité des données et d’exclusivité commerciale ne devraient pas constituer une entrave à la disponibilité des futurs vaccins. Par ailleurs, les bénéficiaires de fonds de l’Union devraient être juridiquement tenus de partager les connaissances sur les technologies de la santé liées à la COVID-19.

    1.6.

    La pandémie a mis en évidence la relation toxique entre maladies transmissibles et non transmissibles. La grande majorité des décès liés à la COVID-19 sont liés à des problèmes de santé sous-jacents et des pathologies préexistantes. Un autre effet observé de la pandémie est son incidence sur des patients atteints de maladies chroniques, dont l’accès au traitement a pâti de la situation. Par conséquent, les maladies non transmissibles devraient également faire l’objet d’une attention particulière dans le cadre du mécanisme de réaction aux crises et de l’union européenne de la santé. Il en va de même de la crise de la santé mentale, qui existait déjà avant la pandémie, mais qui vraisemblablement explose, en raison de la pression que subissent aujourd’hui de nombreuses personnes.

    1.7.

    En ce qui concerne le règlement de l’Union relatif aux menaces transfrontières graves pour la santé, le CESE souligne la nécessité de stocker et de développer des médicaments utilisables et abordables pour l’ensemble de la population, de mettre en place sans délai une préparation adéquate à la protection des groupes à haut risque, notamment ceux qui séjournent dans des institutions et des établissements fermés, d’assurer une collecte de données davantage désagrégées afin de permettre une compréhension claire des groupes les plus exposés et de veiller à ce que les innovations et les réponses médicales soient accessibles à chacun, indépendamment de son revenu et de son État membre ou de sa région de résidence.

    1.8.

    Compte tenu du mandat renouvelé du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), le CESE met en exergue l’importance de veiller à ce que la réduction des inégalités de santé dans l’Union soit au cœur des travaux du Centre et de s’assurer que les maladies non transmissibles bénéficient également de l’attention nécessaire, d’être pleinement en mesure de collecter des données entièrement désagrégées et anonymisées et enfin de formuler des recommandations sur les déterminants sociaux et commerciaux de la santé (3); il conviendrait aussi de se doter, tant au niveau européen que national, d’un mandat permettant de surveiller les investissements et de formuler des recommandations concernant le financement de la surveillance de la santé, de l’évaluation des risques, de la préparation et de la réaction.

    1.9.

    En ce qui concerne le renforcement du rôle de l’Agence européenne des médicaments (EMA), le CESE demande instamment que le groupe de pilotage sur les médicaments et le groupe de pilotage sur les dispositifs médicaux associent et consultent utilement la société civile et les partenaires sociaux, que l’offre de médicaments et de dispositifs médicaux dans l’ensemble de l’Union soit non seulement cohérente et suffisante, mais aussi que l’EMA collabore avec toutes les parties prenantes de la santé en vue d’établir un modèle européen de tarification des médicaments de manière équitable, responsable et transparente.

    1.10.

    Le nouvel arsenal des mesures européennes en faveur de la santé devrait être combiné avec le déploiement du socle européen des droits sociaux, notamment de ses principes no 12, 16, 17 et 18, et le plan d’action sur ledit socle, qui propose, entre autres, de mettre en place un espace européen des données de santé. Il devrait également s’inscrire dans la réalisation de l’objectif de développement durable (ODD) no 3.

    1.11.

    Il convient de remédier au chevauchement entre les objectifs des différents règlements et de clarifier les mandats des différentes agences, pour accroître l’efficacité et éviter toute confusion dans le partage des responsabilités en fonction des différentes actions. En outre, les observations formelles récemment formulées par le Contrôleur européen de la protection des données (CEPD) sur le train de mesures proposé pour l’union européenne de la santé devraient faire l’objet d’un suivi.

    1.12.

    Le CESE estime que certains éléments de cet ensemble de règlements arrivent peut-être trop tôt, car nous sommes toujours au milieu de la pandémie de COVID-19, dont les effets ne sont pas encore totalement connus. Dans le même temps, le Comité est conscient qu’une action urgente est nécessaire dans certains domaines de la coordination en matière de santé au niveau de l’Union. Il invite la Commission à présenter, d’ici juin 2021, un rapport sur les enseignements tirés à ce jour de la pandémie.

    2.   Observations générales

    2.1.

    Le CESE se félicite du train de mesures proposé par la Commission pour construire une union européenne de la santé solide. Celui-ci comprend notamment a) la communication intitulée «Construire une Union européenne de la santé: renforcer la résilience de l’Union face aux menaces transfrontières pour la santé», b) l’adoption d’un nouveau règlement concernant les menaces transfrontières graves afin de renforcer la préparation, d’accroître la surveillance et d’améliorer la communication des données, c) le renforcement des capacités du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies et de l’Agence européenne des médicaments pour mieux protéger les personnes vivant au sein de l’Union et lutter contre les menaces transfrontières pour la santé, d) la création d’une Autorité européenne de préparation et d’intervention en cas d’urgence sanitaire (HERA) afin de soutenir efficacement la réaction face aux menaces transfrontières pour la santé à l’échelle de l’Union, et e) l’établissement de la nouvelle Agence exécutive européenne pour la santé et le numérique qui sera responsable du déploiement et de la gestion des programmes de travail annuels dans le cadre du programme «L’UE pour la santé».

    2.2.

    Le CESE invite l’Union et ses États membres à répondre à la demande des citoyens européens de faire de la santé une priorité. Comme l’a souligné la Commission dans sa communication, «les citoyens européens expriment de plus en plus clairement leur volonté que l’Union européenne joue un rôle plus actif dans la protection de leur santé, en particulier contre les menaces sanitaires qui transcendent les frontières nationales».

    2.3.

    Le train de mesures proposé par la Commission constitue le point de départ pour la concrétisation du droit à une santé de qualité et le renforcement de systèmes de santé et de soins de santé inclusifs pour tous les citoyens de l’Union, des pays voisins et des pays en voie d’adhésion à l’Union. Il renforce également la plateforme pour la contribution de l’Union à la santé publique mondiale. En outre, la protection sociale dans le domaine de la santé doit devenir une priorité dans les partenariats internationaux de la Commission.

    2.4.

    Si le train de mesures relatif à l’union européenne de la santé va dans la bonne direction, il convient d’aller au-delà de la simple coordination. Les nouvelles mesures devraient s’accompagner d’une éventuelle révision des traités de l’Union, en particulier de l’article 168, paragraphe 1, deuxième alinéa du TFUE, en vue d’élargir les compétences de l’Union dans le domaine des urgences sanitaires et des menaces transfrontières pour la santé, et de présenter la protection de la santé comme un bien public. L’article 35 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne stipule que: «Toute personne a le droit d’accéder à la prévention en matière de santé et de bénéficier de soins médicaux dans les conditions établies par les législations et pratiques nationales. Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de l’Union». À cette fin, il y a lieu de veiller à ce que les États membres investissent de manière adéquate dans la santé publique et l’aide sociale. Il convient également de tenir compte du juste équilibre entre les systèmes de santé et de soins nationaux approuvés démocratiquement d’une part, et les besoins communs de l’Europe d’autre part. Toutes les sources scientifiques pertinentes devraient contribuer à l’adoption de décisions politiques responsables, et une analyse d’impact sanitaire obligatoire de toutes les initiatives politiques de l’Union devrait être mise en œuvre. Enfin, les mesures de protection de la santé doivent respecter l’ensemble des droits fondamentaux. Les limitations de ces droits devraient être proportionnées, contrôlées par les juridictions, et respecter les principes de la démocratie et de l’état de droit.

    2.5.

    Le CESE a déjà adopté des avis dans le domaine de la santé (4). En juin 2020, lors de sa session plénière, il a également adopté une résolution contenant ses propositions pour la reconstruction et la relance après la crise de la COVID-19 (5).

    2.6.

    L’initiative visant à accroître la capacité de l’Union à se préparer aux menaces transfrontières pour la santé, ainsi qu’à prévenir et gérer ces dernières efficacement et de manière globale devrait être combinée à la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux, en particulier de ses principes no 12, 16, 17 et 18, et du plan d’action en faveur dudit socle, qui propose entre autres de mettre en place un espace européen des données de santé. Cet espace devrait être réglementé comme un bien public. L’initiative susmentionnée devrait également s’inscrire dans la réalisation des ODD et être liée aux réformes financées par la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), lesquelles pourraient ouvrir la voie à des avancées sur le plan de l’accessibilité de la santé en ligne et de la télémédecine. Le CESE attend avec intérêt le tableau de bord de la FRR, qui mettra en évidence les investissements réalisés par l’intermédiaire de celle-ci dans le secteur de la santé.

    2.7.

    Malgré les programmes de coopération européenne entre régions transfrontalières et plus de vingt ans d’investissement de fonds européens en faveur de la promotion de la mobilité en matière de santé dans ces régions, nous ne sommes pas encore parvenus à instaurer un modèle plus intégré de soins transfrontaliers. Un nouvel élan et une vision à long terme sont nécessaires pour faire des territoires transfrontaliers les moteurs de la solidarité et de la coopération dans le domaine de la santé. Lorsque des États membres partagent une frontière terrestre, la prévention, la préparation et la planification de la réaction devraient notamment reposer sur une connaissance des structures et du personnel de santé publique de l’État limitrophe, et prévoir l’organisation d’exercices transfrontaliers communs.

    2.8.

    La pandémie a considérablement accru les taux de pauvreté et exacerbé les inégalités préexistantes, en particulier dans les États membres qui ont été durement touchés par la crise économique au cours de ces dix dernières années. La crise sanitaire a eu d’importantes répercussions sur l’économie, le marché du travail et la cohésion sociale. Les effets notables sur le marché du travail sont la hausse du chômage, le gel du recrutement, une pénurie de nouveaux emplois et la réduction du temps de travail. Les chiffres d’Eurostat montrent les conséquences évidentes de la pandémie sur les taux de chômage dans l’Union, et la situation risque de continuer à s’aggraver au cours des années à venir. Le taux de chômage à l’échelle de l’Union s’élevait à 7,6 % en octobre 2020, contre 6,6 % en novembre 2019. Pour les jeunes, la situation est encore pire, le taux de chômage ayant grimpé de 14,9 % à 17,7 % entre novembre 2019 et novembre 2020 (6). Il convient de noter que l’article 31, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dispose que «tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité». L’article 3, paragraphe 3, du TUE mentionne également l’objectif du plein emploi.

    2.9.

    Les systèmes de santé existants dans l’ensemble de l’Union, notamment ceux des États membres qui ont été touchés par des politiques d’austérité, un sous-investissement constant et des réductions importantes des dépenses publiques au cours des dix années précédentes, n’ont pas été en mesure de répondre efficacement à l’immense pression causée par la pandémie de COVID-19. Cette pandémie a mis en évidence les lacunes des systèmes de santé dans toute l’Europe et la nécessité de modifier la manière dont nous considérons les soins de santé. Ceux-ci ne peuvent pas être traités comme une simple marchandise. L’égalité d’accès aux traitements, l’augmentation des effectifs dans le secteur de la santé et l’amélioration des conditions des professionnels de santé doivent devenir une priorité.

    2.10.

    La stratégie coordonnée de vaccination de l’Union et l’achat groupé de vaccins par celle-ci se sont révélés insuffisants. L’Union fait en outre toujours face à des difficultés en matière de capacités de production, ce qui entraîne inutilement des pertes de vies humaines. Le CESE appelle de ses vœux une révision approfondie du système européen d’achat centralisé de vaccins contre la COVID-19. Une fois la pandémie terminée, il serait utile d’analyser comment cet achat centralisé s’est déroulé, ce qui a fonctionné et ce qui aurait pu être amélioré. Il est essentiel de tirer tous les enseignements possibles de la situation actuelle et d’en tenir compte dans notre planification future.

    2.11.

    Pendant la pandémie, la société civile et les partenaires sociaux ont joué un rôle essentiel dans la protection et la promotion des droits. Ils devraient jouer un rôle central dans la conception et la mise en œuvre de l’ensemble des actions futures visant à améliorer la santé des européens les plus touchés par la COVID-19, à savoir les personnes âgées, particulièrement celles vivant dans des établissements spécialisés, les sans-abri, les personnes vivant dans la pauvreté, les personnes handicapées ou atteintes de maladies chroniques, les migrants, les réfugiés, les minorités ethniques et la communauté LGBTIQ+.

    2.12.

    La pandémie a révélé que de nombreuses personnes ne sont toujours pas protégées contre les discriminations au sein de l’Union ou n’ont pas accès aux informations de santé publique ni aux soins de santé essentiels. En outre, nous avons observé la multiplication des «déserts médicaux» (7). Selon les traités de l’Union, chacun devrait également être à l’abri de toute discrimination. Actuellement, la protection contre les discriminations au niveau de l’Union dans le domaine de la santé ne couvre pas tous les domaines. En raison de l’incapacité du Conseil à adopter la directive sur l’égalité de traitement publiée en 2008, la protection contre la discrimination dans le domaine des soins de santé fondée, par exemple, sur l’âge, le handicap, le sexe ou l’orientation sexuelle, n’est toujours pas assurée. Cela est ressorti clairement au cours de la pandémie. Les lacunes dans les services, ainsi qu’en matière d’accès et de protection contre les discriminations au sein de l’Union doivent être comblées.

    2.13.

    Le CESE souhaite faire office de point central pour la participation des organisations de la société civile aux processus de l’union européenne de la santé, en rassemblant les représentants des institutions de l’Union, des États membres et des organisations de la société civile tant à l’échelle de l’Union qu’à l’échelle nationale.

    2.14.

    L’union européenne de la santé constitue une nouvelle évolution importante. Elle devrait contribuer à améliorer l’accès aux soins de santé, ainsi que la sécurité et le bien-être des personnes vivant dans l’Union, renforcera la reconnaissance de l’engagement de l’Union à servir ses citoyens et protégera également les États membres contre la menace que constitue la montée du nationalisme et du populisme. Il devrait donc s’agir d’un thème à inclure dans la conférence sur l’avenir de l’Europe. À cette fin, le CESE attire l’attention sur les recommandations figurant dans le rapport de la commission de haut niveau sur l’emploi en santé et la croissance économique de l’OMS intitulé «S’engager pour la santé et la croissance — investir dans les personnels de santé» ainsi que dans le «Plan d’action quinquennal pour l’emploi en santé et la croissance économique inclusive (2017-2021)», qui devraient être mises en œuvre dans le cadre de l’action visant à améliorer la préparation de l’Union aux futures urgences sanitaires.

    2.15.

    Les mesures proposées ne permettront pas à elles seules de parvenir à une véritable union européenne de la santé inclusive. Il convient d’aller au-delà de la simple gestion des crises et de veiller à ce que l’union européenne de la santé ait pour finalité ultime une Europe où chacun bénéficie du niveau de santé le plus élevé possible et dispose d’un accès égal à un traitement de qualité. Elle devrait amorcer un changement systémique pour mieux se préparer, non seulement à la prochaine pandémie, mais aussi à d’autres enjeux transfrontaliers en matière de santé, tels que la résistance aux antimicrobiens et les épidémies d’obésité ou de maladies non transmissibles touchant tous les pays européens. L’union européenne de la santé devrait également adopter l’approche «Une seule santé», en travaillant sur le lien entre bien-être humain, bien-être animal et bien-être environnemental afin de préserver notre santé.

    2.16.

    Étant donné que, dans de nombreux États membres, la prévention et la fourniture des services de santé sont assurées à l’échelle locale ou régionale, il est extrêmement important que le train de mesures de l’Union relatif à la santé prévoie une gouvernance à plusieurs niveaux qui inclut pleinement les autorités locales et régionales, les organismes chargés des opérations d’urgence et les prestataires de services. Il doit être clairement établi qu’en cas d’incident sanitaire majeur, les autorités locales auront un rôle essentiel à jouer pour transmettre des informations et des données et signaler la disponibilité des lits d’hôpitaux, des infirmiers ainsi que des équipements et des médicaments vitaux dans leur localité. Ces informations doivent être recueillies de manière centralisée au niveau de l’Union et, dans le cas des régions frontalières, les États membres devraient faire preuve de solidarité afin de soutenir les régions voisines et les pays candidats à l’adhésion à l’Union qui ont dépassé leur capacité en matière de fourniture de soins de santé d’urgence. Dans certains États membres, les services de santé sont fournis par des entreprises de l’économie sociale sans but lucratif, telles que les mutuelles d’assurance maladie. Tous les États membres devraient disposer de cadres juridiques et financiers adaptés à ces services pour garantir une participation directe aux mesures de l’Union, une concurrence loyale et une convergence vers le haut sur le plan de la qualité et de l’accessibilité, tout en veillant au respect du principe de la santé en tant que bien public. À cet égard, conformément à son avis intitulé «Vers un cadre juridique européen adapté pour les entreprises de l’économie sociale», le CESE propose d’introduire dans le droit de l’Union un cadre juridique adapté à une meilleure reconnaissance de ces entreprises. Il y a lieu de veiller à ce que l’équipe centrale de collecte de données puisse atteindre directement, rapidement et par voie numérique toutes les parties prenantes concernées au sein des États membres, de manière à maximiser la précision des données collectées et la qualité de la réaction coordonnée de l’Union.

    2.17.

    L’Union européenne devrait également examiner de plus près le recrutement, le maintien dans l’emploi et les conditions de travail des professionnels de la santé et des travailleurs sociaux. Leur sécurité devrait également devenir une priorité, compte tenu du nombre de décès observés dans leurs rangs au cours de la pandémie. En outre, l’Union devrait collecter des données pertinentes et transparentes relatives aux conséquences de la COVID-19 sur les professionnels de santé et les travailleurs sociaux. Ceci permettrait à l’Union et aux États membres d’évaluer de façon plus précise les effets à long terme de la COVID-19, et aussi de concevoir des mesures propres à garantir que les systèmes de santé seront mieux préparés aux urgences sanitaires à venir.

    2.18.

    Les objectifs des différents règlements semblent se chevaucher. La manière dont les responsabilités seront réparties en pratique n’est pas claire. Il existe un manque de précision quant à l’agence ou l’organe qui sera chargé de mener les actions redondantes, ce qui pourrait créer une confusion et conduire à l’inefficacité des efforts de coordination de l’Union. Ce point devrait être clarifié. Lorsque des chevauchements persistent entre les différents règlements, il convient de veiller à garantir un ensemble de définitions communes pour tous les termes utilisés, comme ce qui constitue une «crise de santé publique».

    2.19.

    La COVID-19 a attiré l’attention sur la fragmentation de l’architecture de santé de l’Union et sur la nécessité de renforcer le rôle de l’ensemble des agences européennes concernées. Malgré les financements de l’Union, les investissements restent insuffisants compte tenu de l’ampleur des défis à relever, notamment en matière de prévention. Le CESE déplore également que les investissements au titre de la facilité pour la reprise et la résilience dans le domaine de la santé aient été réduits par rapport à la proposition de la Commission. Il estime qu’il s’agit là d’une erreur majeure.

    2.20.

    Le CESE demande instamment que l’on fasse preuve de prudence dans le cadre de la mise en œuvre des propositions contenues dans le train de mesures. Si, d’une manière générale, il soutient le train de règlements, le Comité espère qu’une évaluation de la situation et de son adéquation sera réalisée une fois que la pandémie sera terminée, et que nous aurons une image plus précise de son impact.

    3.   Règlement de l’Union sur les menaces transfrontières graves pour la santé

    3.1.

    Le CESE accueille favorablement ce règlement qui conduira à la création d’un cadre juridique plus solide et plus complet permettant à l’Union de mieux se préparer et de réagir rapidement aux menaces transfrontières pour la santé.

    3.2.

    Le CESE estime que les mécanismes de coordination actuels se sont avérés largement insuffisants pour contenir la pandémie de COVID-19 et protéger les personnes vivant au sein de l’Union, pour un certain nombre de raisons exposées ci-après.

    3.2.1.

    Les dispositions actuelles en matière de sécurité sanitaire, fondées sur le système d’alerte précoce et de réaction (SAPR), ainsi que l’échange d’informations et la coopération au sein du comité de sécurité sanitaire, ne pourraient guère déclencher une réaction commune en temps opportun à l’échelle de l’Union, coordonner les aspects essentiels de la communication des risques, ni garantir la solidarité entre les États membres.

    3.2.2.

    L’approche adoptée a été par trop fragmentée pour contenir le virus, ce qui a entravé la capacité de l’Europe à empêcher sa propagation. Dans de trop nombreux États membres, les mesures introduites n’ont pas été appliquées conformément aux avis scientifiques. Les taux d’infection des pays qui ont tardé à adopter des mesures préventives, n’ont pas imposé de confinements ou ont opté pour l’approche de l’«immunité collective» le démontrent. Les caractéristiques géographiques particulières des États membres, telles que les frontières qu’ils partagent avec d’autres pays où le taux d’infection est élevé ou qui connaissent un afflux important de migrants et de réfugiés, n’ont pas été suffisamment prises en considération.

    3.2.3.

    Les personnes bénéficiant de soins en institutions étaient particulièrement sujettes à une infection et ont représenté un nombre disproportionné de décès. Les données disponibles indiquent notamment que les personnes dans les milieux institutionnels faisaient face et continuent de faire face aux taux les plus élevés d’infection et de mortalité liés à la COVID-19. En Slovénie, par exemple, 81 % des décès dus à la COVID-19 concernaient des personnes séjournant en maison de retraite médicalisée (8). Le virus a eu des effets dévastateurs dans ces milieux et les futures actions de l’Union en matière de sécurité sanitaire devraient remédier à ce problème.

    3.2.4.

    Lorsque les unités de soins de santé primaires et d’urgence se sont retrouvées saturées, les personnes qui risquaient le plus de développer une infection et de souffrir de graves conséquences pour la santé étaient les premières à se voir refuser des soins dans le cadre des systèmes de «triage». Les personnes âgées et les personnes handicapées risquaient particulièrement de se voir refuser des soins d’urgence.

    3.2.5.

    Le début de la pandémie a été marqué par de graves pénuries d’équipements de protection individuelle (EPI) et d’équipements médicaux. La pandémie a mis au jour les faiblesses de la solidarité de l’Union, certains États membres empêchant l’exportation d’EPI ou de respirateurs vers d’autres États membres qui en avaient cruellement besoin. L’absence d’évaluation des technologies de la santé (ETS) centralisée au niveau de l’Union pour les produits pharmaceutiques et les dispositifs médicaux est également apparue comme un problème important. Autant de problèmes auxquels l’Union devrait veiller à ne plus jamais être confrontée.

    3.2.6.

    Les données désagrégées sur les groupes les plus touchés par la COVID-19 manquaient, ce qui a entravé les tentatives d’identification et de protection des personnes les plus à risque.

    3.2.7.

    L’incohérence de la communication avec le public et les parties prenantes telles que les professionnels de la santé dans l’ensemble de l’Union, ainsi qu’entre les États membres, a eu des effets négatifs sur l’efficacité de la réaction en matière de santé publique. Il existe également un manque de mise en œuvre efficace des outils de santé en ligne de l’Union et des nouvelles technologies liées à l’intelligence artificielle.

    3.3.

    Le CESE estime que le règlement de l’Union sur les menaces transfrontières graves pour la santé pourrait contribuer à atténuer ces problèmes lors de futures crises sanitaires à l’échelle de l’Union en:

    3.3.1.

    Mettant en œuvre une procédure de passation de marché commune à l’échelle de l’Union et en prévoyant de constituer des stocks stratégiques au moyen de la réserve rescEU pour contribuer à réduire les pénuries similaires lors de futures crises sanitaires à l’échelle de l’Union. Il sera particulièrement important de fournir des médicaments utilisables par l’ensemble de la population et, dans les cas où certains groupes auraient besoin de formes de traitement adaptées ou alternatives en raison de leur âge, de leur sexe ou de leur genre, de leur état ou de leur handicap, qu’il en soit pleinement tenu compte.

    3.3.2.

    Établissant un cadre législatif complet visant à régir et à mettre en œuvre de manière efficace l’action au niveau de l’Union en matière de préparation, de surveillance, d’évaluation des risques et d’alerte précoce et de réaction. La préparation à la protection des groupes à haut risque devrait commencer immédiatement, en particulier pour les personnes vivant groupées et dans des institutions où il s’est avéré très difficile d’offrir une protection suffisante aux résidents et de respecter leurs droits, ainsi que de garantir la santé et la sécurité, concernant les conditions de travail et un niveau adéquat de personnel, tant dans le secteur de la santé que dans celui des soins. Le règlement à l’examen devrait également prévoir un meilleur suivi des pénuries de personnel de santé et de soins afin d’aider les États membres, la Commission et les partenaires sociaux nationaux et européens à envisager des solutions propres à rendre l’activité dans ce secteur plus attractive, et à améliorer ainsi le recrutement et le maintien dans l’emploi.

    3.3.3.

    Encourageant les compétences scientifiques et le dialogue interdisciplinaire de manière coordonnée. Le CESE estime que cela devrait se faire en s’appuyant sur les compétences de la société civile, en particulier celles des organisations représentant des groupes à haut risque lors de pandémies, tels que les personnes âgées, les sans-abri, les personnes issues de minorités ethniques et les personnes handicapées. Il convient également d’inclure le secteur de la santé, les chercheurs et d’autres acteurs concernés, notamment les entreprises de l’économie sociale.

    3.3.4.

    Permettant au comité de sécurité sanitaire (CSS) de l’Union européenne de fournir des orientations concernant l’adoption, à l’échelle de l’Union, de mesures communes d’affrontement d’une future menace transfrontière pour la santé. Les partenaires sociaux européens du secteur de la santé (comme c’est le cas dans le cadre du comité de dialogue social européen pour le secteur de la santé) devraient être consultés et associés à la gouvernance du CSS.

    3.3.5.

    Facilitant la communication des données relatives au système de santé et d’autres données pertinentes pour la gestion des menaces transfrontières. Ces données doivent être recueillies sous forme désagrégée afin de conduire à une compréhension plus claire, à l’échelle de l’Union, des groupes les plus exposés et les plus touchés par les menaces pour la santé. Elles devraient tenir compte du sexe, de l’âge, de l’origine ethnique, de l’origine migratoire, du handicap et des maladies chroniques. Il y a également lieu de communiquer des données relatives à l’offre de professionnels de la santé et de travailleurs sociaux, au stock de médicaments, de dispositifs médicaux et d’équipements de protection individuelle, au nombre de lits disponibles et occupés dans les services de soins intensifs et de soins aigus, au nombre de respirateurs disponibles et utilisés, aux capacités de dépistage et aux tests effectués, ainsi qu’aux ressources des services de santé publique, pour garantir des niveaux suffisants de personnels axés sur les besoins, concernant notamment les effectifs par habitant pour la médecine communautaire. Il importe aussi de recueillir des informations sur le caractère inclusif des systèmes de santé nationaux pour assurer un accès plus équitable. Ces données devraient être utilisées pour adopter des recommandations, y compris sur les ratios de ressources par unité de population, y compris les effectifs du personnel des services de santé et des services sociaux, élaborés sur la base de bonnes pratiques et d’évaluations des politiques.

    3.3.6.

    Mettant en place de nouveaux réseaux de laboratoires de l’Union. Une attention devrait être accordée à la manière de veiller à ce que les innovations et les réponses médicales soient accessibles à toutes les personnes, indépendamment de leur État membre ou de leur région de résidence, et à la manière de les rendre abordables pour tous.

    3.3.7.

    Proposant aux spécialistes des programmes de formation qui devraient également tenir compte des besoins spécifiques des différents profils de patients, de professionnels de la santé et de soignants, et de l’importance croissante de la santé en ligne et de la télémédecine. Au cours de la pandémie de COVID-19, nous avons constaté que l’âge ainsi que l’existence de divers troubles et handicaps avaient une grande incidence sur le risque de développer des symptômes graves et de décéder. En ce qui concerne plus particulièrement les personnes handicapées ou souffrant de maladies chroniques, il est essentiel que les spécialistes comprennent comment consulter les patients de manière adéquate, qu’ils respectent le libre arbitre de chacun et qu’ils veillent à ce que personne ne soit contraint de suivre un traitement. La formation devrait être cohérente avec l’approche «Une seule santé». En outre, dans les régions frontalières, il conviendrait de promouvoir des exercices transfrontaliers communs et d’encourager la connaissance des systèmes de santé publique.

    4.   Centre européen de prévention et de contrôle des maladies

    4.1.

    Le CESE salue la consolidation du mandat du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ci-après dénommé le «Centre») dans les domaines de la surveillance, de la préparation, de l’alerte précoce et de la réaction, au sein d’un cadre renforcé de l’Union en matière de sécurité sanitaire.

    4.2.

    Cette prolongation et cet élargissement du mandat du Centre interviennent à un moment opportun et, en cas de succès, ils constitueront des éléments essentiels pour permettre à l’Union de mieux faire face à la pandémie de COVID-19. Ils peuvent également permettre de remédier aux faiblesses mises au jour par la pandémie en ce qui concerne la santé publique et la réaction aux crises sanitaires au niveau national et de l’Union.

    4.3.

    Le CESE estime que le Centre ne disposait pas du mandat, des mécanismes, ni des ressources nécessaires pour répondre de manière cohérente et efficace à la pandémie de COVID-19.

    4.4.

    Le principe de subsidiarité s’applique aux questions nationales de santé publique. Cependant, au sein de l’Union, qui est marquée par d’importants mouvements de personnes et de biens au-delà des frontières, toutes les maladies transmissibles sont, potentiellement, des menaces transfrontières pour la santé qui nécessitent une surveillance, une préparation, une évaluation des risques, une alerte précoce et une réaction à l’échelle de l’Union.

    4.5.

    La pandémie a mis en évidence la relation toxique entre les maladies transmissibles et non transmissibles. La grande majorité des décès liés à la COVID-19 sont liés à des problèmes de santé sous-jacents et des pathologies préexistantes, et l’accès des patients atteints de maladies chroniques au traitement a pâti de la situation. Par conséquent, le cadre du mécanisme de réaction aux crises et de l’union européenne de la santé devrait également inclure les maladies non transmissibles.

    4.6.

    L’évaluation externe du Centre publiée en septembre 2019 mettait l’accent sur des manières efficaces de renforcer ce dernier. Elle soulignait la nécessité d’accroître la pertinence pour les États membres et de se concentrer sur la correction des lacunes et des faiblesses structurelles des systèmes de santé publique des États membres, qui influent sur la capacité de ces derniers à contribuer efficacement aux activités de l’ECDC et à en bénéficier de manière optimale. L’évaluation faisait également ressortir la nécessité de revoir et d’élargir le mandat du Centre et de modifier la réglementation existante.

    4.7.

    Le CESE note que la protection de la santé est essentielle à la préservation des droits de l’homme. L’incapacité à enquêter de manière adéquate sur les menaces pour la santé, et de s’y préparer, de les signaler et d’y répondre correctement, comme nous avons pu continuer à l’observer au cours de la pandémie, porte atteinte aux droits de l’homme, notamment au droit à la santé, et entraîne des inégalités.

    4.8.

    La proposition comprend des améliorations importantes des capacités du Centre:

    sa capacité accrue à suivre la situation sanitaire sera renforcée grâce à des systèmes de surveillance numérisés;

    une meilleure préparation dans les États membres, grâce à l’élaboration de plans nationaux de prévention et d’intervention et au renforcement des capacités pour permettre des réactions rapides et intégrées dans le domaine de la santé;

    des mesures renforcées pour contrôler les épidémies grâce à des recommandations contraignantes en matière de gestion des risques;

    un renforcement de la capacité de mobilisation et de déploiement du groupe de travail de l’Union dans le domaine de la santé;

    une surveillance et une évaluation de la capacité des systèmes de santé en ce qui concerne le diagnostic, la prévention et le traitement de maladies transmissibles et non transmissibles spécifiques;

    un accroissement de la capacité à déterminer les groupes de la population les plus à risque et qui nécessitent des mesures d’intervention ciblées;

    un renforcement des liens entre la recherche, la préparation et la réaction, et l’établissement de liens politiques entre la santé publique et les communautés de recherche;

    une consolidation des compétences en matière de protection de la santé grâce à la coordination d’un nouveau réseau de laboratoires de référence de l’Union et d’un nouveau réseau de services nationaux promouvant les transfusions, les transplantations et la reproduction médicalement assistée;

    un élargissement des travaux sur les maladies transmissibles;

    une contribution à l’engagement de l’Union en faveur de la sécurité sanitaire et de la préparation à l’échelle mondiale.

    4.9.

    Le CESE a demandé à plusieurs reprises l’accroissement des investissements dans le domaine de la santé publique au sein de l’Union. Ce faisant, à travers la consolidation du mandat du Centre, il sera important de garder à l’esprit les éléments ci-après.

    4.9.1.

    Le Centre devrait disposer du mandat et des ressources nécessaires pour lutter contre les inégalités en matière de santé et garantir que les réactions de l’Union dans le domaine de la santé ciblent les personnes considérées par des groupes d’experts scientifiques multidisciplinaires comme étant les plus à risque. Le recensement des personnes les plus à risque devrait être fondé sur des données désagrégées de qualité qui incluent ces populations. La société civile, les partenaires sociaux, les prestataires de services et les membres des communautés les plus touchées devraient participer de manière significative. La coordination entre les systèmes de santé publique, le corps médical et la société civile, y compris les partenaires sociaux et les entreprises de l’économie sociale travaillant dans le domaine de la santé, est essentielle pour le partage d’informations.

    4.9.2.

    La santé n’est pas une affaire isolée. Elle est étroitement liée à l’accès à un niveau de vie et un travail décents, une alimentation et un logement adéquats et un éventail complet de services et d’aides. L’Union européenne s’est déjà engagée à promouvoir la mise en œuvre d’une Europe sociale au moyen du socle européen des droits sociaux. Le Centre doit également être équipé pour procéder à des évaluations et élaborer des recommandations à l’intention des structures compétentes de l’Union, telles que celles qui supervisent le processus du semestre européen et le tableau de bord social renouvelé du socle européen des droits sociaux. En coordination avec ces structures, il devrait pouvoir orienter les États membres en ce qui concerne les déterminants sociaux de la santé, et quant à la manière d’améliorer la santé en agissant sur ces derniers.

    4.9.3.

    Le Centre devrait être chargé de suivre les investissements et de formuler des recommandations sur le financement de la surveillance de la santé, l’évaluation des risques, la préparation et la réaction, tant au niveau de l’Union qu’au niveau national.

    4.9.4.

    Il y a lieu de mettre en place une collaboration en matière de suivi systématique entre l’ECDC et les centres nationaux de prévention et de contrôle des maladies. Ensemble, ils devraient surveiller les groupes les plus touchés par les menaces pour la santé, détecter les cas et les principaux foyers de contamination, mettre au jour les tendances à cet égard et formuler des recommandations.

    5.   Règlement de l’Union relatif à un rôle renforcé de l’Agence européenne des médicaments

    5.1.

    Le CESE salue le rôle renouvelé de l’Agence européenne des médicaments et sa capacité accrue à réduire les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux au sein de l’Union.

    5.2.

    Le CESE estime que le rôle actuel de l’EMA est insuffisant pour faire face aux difficultés posées par la pandémie, d’autant plus qu’au début de celle-ci en particulier, l’Union a connu de graves pénuries d’équipements médicaux vitaux tels que les respirateurs. Les pénuries étaient particulièrement visibles dans certains États membres et la coordination pour distribuer des dispositifs et des EPI de manière équitable dans l’ensemble de l’Union était insuffisante.

    5.3.

    Le rôle renouvelé et la capacité accrue de l’EMA, à utiliser en cas de nouvelle crise sanitaire à l’échelle de l’Union, permettront de réduire les problèmes observés lors de la pandémie de COVID-19 en:

    5.3.1.

    Créant un groupe de pilotage sur les médicaments et un groupe de pilotage sur les dispositifs médicaux qui rendraient compte à la Commission et aux États membres des pénuries ou des risques de pénuries futures. Les groupes de pilotage, composés d’experts provenant de toute l’Union afin de proposer une approche coordonnée, devraient inclure des professionnels spécialisés dans les traitements médicaux adaptés aux personnes qui risquent le plus de développer des complications lors de pandémies telles que celle que nous connaissons actuellement. Cela dépendra bien entendu du type de crise sanitaire connue par l’Union et nécessitera généralement qu’un traitement adapté en fonction du sexe et du genre aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux personnes souffrant de graves problèmes de santé soit connu. Les organisations de la société civile devraient également être incluses et consultées de manière adéquate.

    5.3.2.

    Réagissant avant les pénuries de médicaments et en détectant les pénuries potentielles. Cela concerne non seulement les médicaments les plus couramment utilisés sur le marché dans l’Union, mais également les médicaments et les dispositifs médicaux destinés aux maladies plus rares, afin de garantir qu’ils soient disponibles en tout temps, si nécessaire, dans l’ensemble des États membres et des localités.

    5.3.3.

    Coordonnant les études aux côtés du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies afin de contrôler l’efficacité et l’innocuité des vaccins, et en encourageant une révision continue dans le cadre de laquelle un groupe de travail examinera les données et les preuves provenant d’essais cliniques en temps réel afin d’accélérer le processus. Ce groupe de travail émettra également des avis scientifiques sur les projets d’essais cliniques de médicaments et de vaccins. Dans l’exercice de cette compétence, il devrait encourager la définition des objectifs de performance les plus pertinents d’un point de vue clinique pour les médicaments qui seront évalués dans le cadre des essais cliniques. L’Agence émet déjà des avis scientifiques, mais elle le fera désormais de manière accélérée, dans un délai de 20 jours, et gratuitement.

    5.4.

    Les futures activités de l’EMA comportent plusieurs difficultés. L’Agence devra non seulement veiller à ce que l’approvisionnement en médicaments et en dispositifs médicaux dans l’ensemble de l’Union soit cohérent et suffisant, mais également assurer l’existence de stocks disponibles et abordables pour les citoyens.

    5.5.

    À l’heure actuelle, le plus grand défi concerne le déploiement du processus de vaccination. Il est regrettable que la stratégie de l’Union à cet égard néglige certains groupes à haut risque, comme les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladies chroniques, en les considérant comme inéligibles à une vaccination accélérée. Les priorités concernant la vaccination des différents groupes de la population devraient être définies sur la base d’une analyse scientifique multidisciplinaire tenant compte de la discrimination et de l’exposition au virus desdits groupes. Le vaccin doit être considéré comme un bien public et, en tant que tel, il est essentiel de veiller à ce que son administration rapide à la population ne soit pas trop entravée par des restrictions liées à des considérations telles que les droits de propriété intellectuelle. Le sauvetage de vies humaines doit toujours être la priorité absolue de l’Union. Il est donc essentiel que la Commission veille à ce que l’Europe reste le premier continent en matière de développement de vaccins.

    5.6.

    Pendant la pandémie de COVID-19, l’EMA a partagé de manière volontariste des données sur les vaccins et sur les médicaments approuvés, ainsi que des informations relatives à l’exercice des activités de l’Agence. L’EMA a également expliqué au public les processus réglementaires. Ce niveau de transparence est considéré comme très bénéfique et devrait également être garanti à l’avenir. À cette fin, le règlement devrait prévoir la publication de toutes les données des essais cliniques sur la base desquelles l’Agence autorise des médicaments ou des vaccins, de même que celle des protocoles d’essais cliniques sur lesquels l’Agence fournit des conseils, conformément au règlement sur les essais cliniques.

    5.7.

    Le CESE encourage l’EMA à collaborer avec toutes les parties prenantes de la santé afin de mettre en place un modèle européen pour une tarification équitable, responsable et transparente des médicaments et pour des innovations pharmaceutiques accessibles.

    6.   Autorité de préparation et d’intervention en cas d’urgence sanitaire

    6.1.

    L’Union envisage la création d’une Autorité européenne de préparation et d’intervention en cas d’urgence sanitaire (HERA). La proposition législative visant à créer l’Autorité devrait être publiée au quatrième trimestre de l’année 2021, mais un aperçu de l’HERA a déjà été proposé dans la stratégie pharmaceutique pour l’Europe récemment publiée.

    6.2.

    Il est prévu que l’HERA comble une lacune majeure dans les infrastructures de préparation et de réaction aux crises de l’Union. Elle renforcera la coordination entre les États membres en accroissant les investissements stratégiques pour la recherche, le développement, la fabrication, le déploiement, la distribution et l’utilisation de contre-mesures médicales. Pour y parvenir, l’HERA aidera l’Union à mieux répondre aux besoins émergents en matière de santé:

    en anticipant des «menaces spécifiques et des technologies génériques au moyen de l’analyse prospective et de prévisions». Un important niveau de sensibilisation des groupes de la société civile représentant les personnes qui courent généralement davantage de risques lors d’urgences sanitaires sera nécessaire afin d’évaluer la manière dont les menaces potentielles pourraient avoir des effets disproportionnés sur elles;

    en déterminant et en comblant les lacunes en matière d’investissement dans les contre-mesures clés, y compris le développement d’antimicrobiens innovants;

    en surveillant les capacités de production, qu’elle mettra en commun, ainsi que les besoins en matières premières et la disponibilité de celles-ci, ce qui permettra de remédier aux vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement;

    en soutenant la mise au point de solutions technologiques transversales telles que les technologies de plateformes vaccinales, qui soutiennent la planification de la préparation et de la réaction aux futures menaces pour la santé publique;

    en élaborant des contre-mesures spécifiques, y compris au moyen de la recherche, des essais cliniques et de l’infrastructure de données.

    6.3.

    Le CESE s’interroge sur les chevauchements entre les objectifs prévus par l’HERA et ceux prévus par l’ECDC, l’EMA et le règlement sur les menaces transfrontières graves pour la santé. Les questions relatives à la préparation aux crises, à la recherche, aux données et à la distribution coordonnée de médicaments et de dispositifs médicaux semblent être couvertes par les règlements susmentionnés. La valeur ajoutée de l’HERA paraît donc floue et la création d’une telle autorité risque même de brouiller les frontières entre les organes responsables des différents domaines de coordination des soins de santé. Par exemple, il n’est pas possible de déterminer clairement si les recommandations de l’HERA prévaudraient sur celles de l’EMA si une épidémie se déclarait au sein de l’Union.

    6.4.

    L’HERA devrait être une organisation purement publique chargée d’une mission claire en matière de santé publique, ne pouvant être assimilée à des secteurs de la politique industrielle, et manifester la volonté d’exercer un jugement indépendant de l’industrie pharmaceutique, et concevoir des solutions axées sur la santé publique (par exemple, dans le domaine de la lutte contre la résistance aux antimicrobiens). Elle devrait disposer d’un budget conséquent permettant une planification indépendante à long terme. Une clause de tarification raisonnable devrait être envisagée dans les actes juridiques régissant le fonctionnement de l’HERA.

    6.5.

    Son rôle de coordination dans la fabrication d’équipements médicaux et de protection, ainsi que de médicaments, peut toutefois être perçu comme une valeur ajoutée de l’HERA. La surveillance et la mise en commun des capacités de production, des besoins en matières premières et de la disponibilité de celles-ci est également un domaine dans lequel l’HERA se démarquera par rapport à l’EMA et l’ECDC. Le succès de l ‘HERA ne sera possible que si celle-ci est capable de s’affirmer comme une agence publique forte, indépendante et transparente. L’intérêt public devrait être au cœur de ses priorités, de sa gouvernance et de ses actions. Assurer une collecte de données davantage désagrégées sur les groupes vulnérables serait une condition préalable à la lutte contre les inégalités en matière de santé.

    6.6.

    Le CESE considère qu’il existe des questions non résolues que l’HERA pourrait en toute logique être habilitée à superviser et auxquelles aucune communication précédente n’a encore fait allusion. L’HERA offre une occasion propice de s’appuyer sur l’excellence de la science européenne, de tirer les leçons de la crise actuelle et de veiller à ce que le secteur public agisse comme un investisseur avisé, guidant une innovation pertinente et axée sur les besoins en matière de santé publique. Compte tenu des chevauchements avec les travaux d’autres autorités, il pourrait être avantageux d’adapter le champ d’application et les responsabilités de l’HERA en incluant les éléments ci-après.

    6.6.1.

    La coordination d’un groupe de travail de l’Union axé spécifiquement sur les répercussions des urgences sanitaires sur les groupes sociaux à haut risque, ainsi que sur les professionnels de la santé et les soignants. Ce groupe de travail pourrait se concentrer, entre autres, sur les personnes âgées, les personnes souffrant de problèmes de santé et les personnes handicapées.

    6.6.2.

    Un accent sur la non-discrimination dans la réaction de l’Union aux futures pandémies, en veillant à ce que les mesures de prévention, les soins médicaux d’urgence et les traitements soient accessibles à tous, y compris aux sans-abri, aux communautés itinérantes et aux sans-papiers résidant au sein de l’Union, qui risquent tous d’être laissés pour compte lorsque des réponses publiques sont apportées aux crises sanitaires.

    6.6.3.

    Des campagnes de communication pendant les urgences sanitaires pour s’assurer que les personnes comprennent mieux comment se protéger, les adaptations qu’elles doivent apporter à leurs activités quotidiennes pour rester en sécurité et, si et quand des traitements sont disponibles, comment y avoir accès. Ces communications doivent être directement adressées et accessibles à tous, et tenir compte des besoins particuliers des groupes à haut risque, tels que les personnes âgées, les personnes souffrant de problèmes de santé et les personnes handicapées. Au cours de la pandémie de COVID-19 actuelle, ces communications dépendent en grande partie du travail des organisations de la société civile. Il serait donc souhaitable qu’elles soient consultées dans le contexte de cette activité.

    6.6.4.

    La structure de gouvernance de l’HERA devrait être transparente et équilibrée, et inclure les organisations de patients et de santé publique, la société civile et les partenaires sociaux, ainsi que des représentants de la communauté des chercheurs. Bien qu’étant des partenaires importants, les industries ne devraient faire partie d’aucune structure de gouvernance de cette nouvelle organisation publique. Seul le secteur de la santé publique déterminera quels sont les besoins mondiaux non satisfaits, et l’objectif sera de s’engager dans le développement de nouveaux produits en vue de les mettre sur le marché.

    Bruxelles, le 27 avril 2021.

    La présidente du Comité économique et social européen

    Christa SCHWENG


    (1)  L’opinion publique dans l’UE au temps de crise du coronavirus 3 (europa.eu).

    (2)  JO C 13 du 15.1.2016, p. 40; JO C 14 du 15.1.2020, p. 1.

    (3)  Policy & practice: Commercial determinants of health and sport.

    (4)  JO C 429 du 11.12.2020, p. 251; JO C 440 du 6.12.2018, p. 150; JO C 242 du 23.7.2015, p. 48; JO C 181 du 21.6.2012, p. 160; JO C 14 du 15.1.2020, p. 1; JO C 13 du 15.1.2016, p. 40.

    (5)  CESE resolution (JO C 311 du 18.9.2020, p. 1).

    (6)  https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/products-euro-indicators/-/3-08012021-ap

    (7)  https://www.aim-mutual.org/mediaroom/tackling-medical-deserts-across-the-eu/?lang=fr

    (8)  A. Comas-Herrera et al., «Mortality associated with COVID-19 outbreaks in care homes: early international evidence», (mai 2020).


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