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Document 52020AE5657

Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à un programme d’action général de l’Union pour l’environnement à l’horizon 2030 [COM(2020) 652 final — 2020/0300(COD)]

EESC 2020/05657

JO C 123 du 9.4.2021, p. 76–79 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

9.4.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 123/76


Avis du Comité économique et social européen sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à un programme d’action général de l’Union pour l’environnement à l’horizon 2030

[COM(2020) 652 final — 2020/0300(COD)]

(2021/C 123/12)

Rapporteur général:

Lutz RIBBE

Consultation

Parlement européen, 11.11.2020

Conseil, 5.11.2020

Base juridique

Article 192, paragraphe 1, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section «Agriculture, développement rural et environnement»

Décision du bureau

1.12.2020

Adoption en session plénière

27.1.2021

Session plénière no

557

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

227/4/4

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) ne voit dans la proposition à l’examen relative à un huitième programme d’action pour l’environnement (PAE) qu’une valeur ajoutée tout au plus marginale, qui réside dans l’annonce de l’amélioration du suivi amélioré et du système de présentation des rapports. Pour le reste, la proposition se contente de décrire la situation en termes généraux et de formuler des déclarations d’intention, sans offrir de véritable contenu ni d’actions concrètes. Or l’amélioration de la gouvernance ne nécessite pas à elle seule un «programme d’action».

1.2.

Le CESE se demande si un 8e PAE est vraiment nécessaire pour donner un nouvel élan à la politique environnementale de l’UE, laquelle figure au cœur de la politique de l’UE depuis l’adoption du pacte vert pour l’Europe.

1.3.

La proposition de la Commission conforte le CESE dans la position qu’il a rappelée à de nombreuses reprises depuis des années, à savoir que ce qui fait défaut n’est pas la connaissance de ce qu’il conviendrait de faire, mais la mise en œuvre de mesures bien connues, souvent décidées depuis longtemps, et la volonté politique.

1.4.

Le CESE trouverait utile, par exemple, que les initiatives stratégiques présentées par la Commission en vue de la mise en œuvre du pacte vert pour l’Europe, telles que la stratégie en faveur de la biodiversité, la stratégie «De la ferme à la table» ou le plan d’action en faveur de l’économie circulaire, soient intégrées au 8e PAE et fassent l’objet d’une codécision. Qui plus est, le Conseil et le Parlement européen pourraient faire obligation à la Commission, dans le cadre d’un 8e PAE, de s’engager également à pérenniser et à approfondir le pacte vert pour l’Europe, en la chargeant expressément de présenter, au plus tard pour le nouveau mandat, une proposition législative relative à un «programme de l’UE à l’horizon 2050» (soit une version modifiée et augmentée du «pacte vert pour l’Europe»), qui ajouterait au 8e PAE un catalogue concret et détaillé de mesures. Toutefois, rien de tel n’est prévu.

1.5.

Le CESE préconise dès lors un débat de fond sur le sens et l’utilité des programmes d’action pour l’environnement et réitère son appel en faveur de l’élaboration d’un «programme de développement durable de l’UE à l’horizon 2050». Il estime que le pacte vert constitue une base saine et solide pour ce faire.

2.   Contexte de l’avis

Les programmes d’action de l’UE pour l’environnement

2.1.

Des programmes d’action pour l’environnement (PAE) existent au niveau de l’UE depuis le début des années 70; le 7e PAE a expiré le 31 décembre 2020.

2.2.

La Commission précise dans sa proposition relative à un 8e PAE que les programmes environnementaux «guident l’élaboration de la politique environnementale de l’UE». Elle a dû toutefois également admettre indirectement que ces programmes n’ont pas eu, en définitive, l’effet escompté. C’est ainsi qu’elle a conclu que «les progrès en matière de protection de la nature, de santé et d’intégration des politiques n’étaient pas suffisants». Elle renvoie en outre au rapport de l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) intitulé «L’environnement en Europe: état et perspectives» (The European Environment — state and outlook, SOER 2020) et publié le 4 décembre 2019, selon lequel «les défis en matière d’environnement, de climat et de durabilité sont d’une ampleur et d’une urgence sans précédent; ils nécessitent une action immédiate et concertée et des solutions systémiques». En effet, «avec le modèle de croissance actuel, les pressions sur l’environnement devraient encore s’accroître, causant directement et indirectement des torts considérables pour la santé et le bien-être des êtres humains. Cela vaut particulièrement pour les secteurs ayant la plus forte incidence sur l’environnement, à savoir l’alimentation, la mobilité, l’énergie ainsi que les infrastructures et les bâtiments».

2.3.

Cette affirmation s’inscrit dans le droit fil du rapport 2020 sur le développement durable en Europe, présenté en décembre dernier par le Réseau de solutions pour le développement durable (SDSN) et l’Institut pour une politique européenne de l’environnement. L’une des principales conclusions de ce rapport est que dans les domaines de l’agriculture et de l’alimentation durables et de la diversité biologique, l’Europe est confrontée à des défis considérables qui font obstacle à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).

2.4.

La Commission précise que le 11 décembre 2019, en publiant son pacte vert pour l’Europe, elle a adopté un programme ambitieux visant a) à faire de l’UE le premier continent neutre pour le climat à l’horizon 2050, b) à protéger, préserver et renforcer le capital naturel de l’UE et c) à protéger la santé et le bien-être des citoyens contre les risques et les incidences environnementaux.

2.5.

Le Conseil, le Parlement européen et le Comité des régions ont néanmoins invité la Commission à élaborer une proposition relative à un 8e PAE qui serait ensuite adoptée par le Conseil et le Parlement européen. La Commission a présenté la «proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à un programme d’action général de l’Union européenne pour l’environnement à l’horizon 2030» (8e PAE), qui fait l’objet du présent avis, le 14 octobre 2020, soit près d’un an après la présentation du pacte vert pour l’Europe et à peine deux mois et demi avant l’expiration du 7e PAE.

Contenu du 8e PAE

2.6.

Le 8e PAE ne comporte que six articles.

2.7.

L’article 2 énumère des objectifs environnementaux de l’UE déjà connus et reconnus par le Conseil et le Parlement européen, tels que la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la neutralité climatique à l’horizon 2050, l’adaptation au changement climatique, l’objectif «zéro pollution» pour un environnement non polluant, ou la protection, la préservation et le rétablissement de la biodiversité, qualifiés d’«objectifs thématiques prioritaires» du 8e PAE. Toutefois, contrairement au 7e PAE, aucun instrument ou mesure concret permettant d’atteindre les objectifs et/ou les mesures en faveur de l’environnement n’est mentionné. Cela est étonnant, d’autant que certaines exigences sont particulièrement élevées. Ainsi, le document précise qu’il vise «la réalisation de progrès vers un modèle de croissance régénérative qui rende à la planète davantage qu’il ne lui prend» (1).

2.8.

De même, l’article 3 ne mentionne que les «conditions», connues depuis longtemps, propices à la réalisation des objectifs prioritaires. Parmi ces conditions figurent notamment:

la mise en œuvre effective et efficiente de la législation existante en matière d’environnement et de climat;

l’intégration des objectifs prioritaires définis dans toutes les stratégies concernées, les initiatives législatives et non législatives, les programmes, les investissements et les projets aux niveaux national, régional, local et de l’Union; et

la suppression progressive des subventions préjudiciables à l’environnement au niveau de l’Union et au niveau national.

2.9.

L’article 4 décrit l’objectif principal du 8e PAE, à savoir l’engagement de mettre en place un meilleur cadre de suivi et de communication d’informations afin de permettre aux décideurs politiques et au grand public d’avoir une meilleure vue d’ensemble des progrès (ou des lacunes). Il convient de noter, entre autres, que le Conseil et le CESE, par exemple, ont demandé que la performance économique et le progrès social soient mesurés «au-delà du PIB». De même, des «indicateurs clés» devront être élaborés afin d’améliorer le suivi, par exemple, de la biodiversité ou de l’économie circulaire. L’Agence européenne pour l’environnement et l’Agence européenne des produits chimiques joueront un rôle clé à cet égard; par conséquent, leurs effectifs devraient être renforcés.

2.10.

Enfin, l’article 5 prévoit que la Commission procédera, pour le 31 mars 2029 au plus tard, à une évaluation du 8e PAE; il n’est donc pas prévu de procéder à un examen à mi-parcours.

2.11.

L’article 6 traite de l’entrée en vigueur.

3.   Remarques

3.1.

Le CESE partage l’avis de la Commission selon lequel les programmes d’action pour l’environnement ont longtemps guidé l’élaboration de la politique environnementale de l’UE. Toutefois, l’on ne saurait comparer la politique environnementale des années 70, 80 ou 90 à celle d’aujourd’hui; c’est pourquoi se pose également la question du rôle ou de la fonction des programmes d’action pour l’environnement.

3.2.

Dès lors, le CESE se demande si un 8e PAE est vraiment nécessaire pour donner un nouvel élan à la politique environnementale de l’UE, laquelle figure au cœur des politiques de l’UE depuis l’adoption du pacte vert pour l’Europe. C’est d’autant plus vrai que la proposition relative au 8e PAE se caractérise davantage par des descriptions générales de la situation et des déclarations d’intention que par un contenu et des actions substantiels. C’est un programme d’action… sans action!

3.3.

Bien entendu, le CESE ne met pas en doute le bien-fondé des priorités énoncées à l’article 2 ni l’opportunité des «conditions propices à la réalisation des objectifs prioritaires» énumérées à l’article 3. Mais quelle serait l’utilité, pour la politique environnementale, d’un 8e PAE qui se limite pour l’essentiel à répéter les objectifs énoncés, entre autres, dans le pacte vert pour l’Europe, sans décrire, fût-ce sommairement, des instruments ou des actions de mise en œuvre que la décision du Conseil et du Parlement européen rendrait contraignants? Et à quoi servirait réellement d’énumérer des «conditions» connues depuis longtemps si aucun plan contraignant n’est présenté et adopté pour les remplir?

3.4.

La proposition de la Commission conforte le CESE dans la position qu’il a rappelée à de nombreuses reprises depuis des années, à savoir que ce qui fait défaut n’est pas la connaissance de ce qu’il conviendrait de faire, mais la mise en œuvre de mesures bien connues, souvent décidées depuis longtemps, et la volonté politique. La Commission et aussi, dans une certaine mesure, la Cour de justice de l’Union européenne se plaignent également depuis des années de la mauvaise application par les États membres d’un grand nombre d’actes législatifs en vigueur dans le domaine de l’environnement. Aucun programme d’action pour l’environnement ne peut pallier le défaut de mise en œuvre de la législation ni le manque de volonté politique.

3.5.

Même en l’absence de programme d’action pour l’environnement, les institutions européennes et les États membres disposent de suffisamment de possibilités pour tenir les promesses faites. La politique en matière de biodiversité en est un exemple.

3.6.

La protection, la conservation et la restauration de la nature ont été explicitement définies comme «objectif prioritaire» dans tous (!) les programmes d’action pour l’environnement depuis le 2e PAE (couvrant la période 1977-1981), et le sont à nouveau dans le 8e PAE. Un bien maigre bilan pour les programmes d’action pour l’environnement, alors que la biodiversité y occupe une place prépondérante depuis plus de 40 ans (!) et que la Commission se voit contrainte de constater, dans sa stratégie en faveur de la biodiversité publiée en mai 2020, que la nature se trouve «en situation d’urgence».

3.7.

Indépendamment de tous les programmes d’action pour l’environnement, des idées et des propositions claires pour remédier à la situation existent. À titre d’exemple, la stratégie en faveur de la biodiversité (2) présentée par la Commission contient une longue liste de mesures. Tant le Conseil que le Parlement européen auraient eu l’occasion, notamment dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune (PAC), de donner suite aux exigences concrètes qui y sont définies. Cette occasion a été perdue. Le CESE a du mal à voir quelles améliorations pourrait apporter le 8e PAE proposé aujourd’hui pour adoption au Conseil et au Parlement européen.

3.8.

Toutefois, cela montre également la manière dont un 8e PAE pourrait avoir une valeur ajoutée: une intégration formelle, aux fins de la réalisation des objectifs du pacte vert, de la stratégie en faveur de la biodiversité présentée par la Commission, de la stratégie «De la ferme à la table» (et autres documents stratégiques similaires) et de leurs exigences spécifiques détaillées encouragerait le Conseil et le Parlement à se prononcer en faveur de la mise en œuvre des propositions concrètes.

3.9.

Qui plus est, le Conseil et le Parlement européen pourraient faire obligation à la Commission, dans le cadre d’un 8e PAE, de s’engager également à pérenniser et à approfondir le pacte vert pour l’Europe, en la chargeant expressément de présenter, au plus tard pour le nouveau mandat, une proposition législative relative à un «programme de l’UE à l’horizon 2050» (soit une version modifiée et augmentée du «pacte vert pour l’Europe»), qui ajouterait au 8e PAE un catalogue concret et détaillé de mesures.

3.10.

Toutefois, rien de tel n’est prévu à l’heure actuelle, raison pour laquelle la valeur ajoutée du 8e PAE tel qu’il a été présenté se limite à annoncer un modèle amélioré de suivi et d’établissement de rapports. Il n’est cependant pas nécessaire d’adopter un «programme d’action» pour améliorer le suivi et la gouvernance, aussi importants que soient ces deux aspects.

4.   Observations finales

4.1.

De toute évidence, l’évaluation que fait la Commission de l’importance et de l’impact des derniers programmes d’action pour l’environnement et du futur 8e PAE est nettement plus favorable que celle du CESE. À titre d’exemple, le Comité ne partage absolument pas l’affirmation de la Commission selon laquelle le 7e PAE a «anticipé le programme des Nations unies à l’horizon 2030». Ce dernier est beaucoup plus complexe que ce à quoi peut prétendre une politique environnementale européenne, aussi innovante soit-elle. Certes, toute politique environnementale devrait également tenir compte de la pauvreté, de la faim, de l’éducation ou de l’égalité entre les hommes et les femmes, mais ces différents aspects ne peuvent y être traités de manière adéquate.

4.2.

C’est précisément la raison pour laquelle le CESE plaide en faveur de l’élaboration d’un «programme de l’UE à l’horizon 2050» à part entière, qui devrait naturellement inclure un axe environnemental fort. Même l’actuel pacte vert pour l’Europe n’est pas suffisant pour mettre en œuvre le programme des Nations unies à l’horizon 2030, étant donné que les questions sociales, tant dans le contexte européen que mondial, ne sont pas abordées comme il conviendrait. Toutefois, le CESE tient à souligner fermement qu’il considère que le pacte vert pour l’Europe constitue une base solide et saine pour une stratégie globale de développement durable dans le cadre d’un «programme de l’UE à l’horizon 2050».

4.3.

Le CESE recommande également que les ambitions politiques énoncées dans les textes de la Commission soient formulées de manière à ce que les citoyens européens puissent imaginer ce que recouvre leur mise en œuvre. Il est question, dans le 8e PAE, de promouvoir un «modèle de croissance régénérative» qui rendrait à la planète «davantage qu’il ne lui prend». Nombre de citoyens, y compris des responsables politiques, ont probablement du mal à comprendre ce qui se cache derrière ce «modèle de croissance régénérative» et ce qui, au quotidien, permettrait de rendre à la planète davantage que ce qu’on lui prend.

4.4.

Enfin, le CESE recommande vivement la tenue d’un débat général sur le rôle que pourraient jouer d’éventuels futurs programmes d’action pour l’environnement. À cette fin, il serait utile de ne pas attendre d’être à neuf mois de l’expiration du 8e PAE pour procéder à une évaluation.

Bruxelles, le 27 janvier 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2020:0652:FIN:FR:PDF, article 2, paragraphe 2, point c).

(2)  Stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, COM(2020) 380 final.


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