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Document 52015AE6764

Avis du Comité économique et social européen sur l’examen annuel de la croissance 2016 [COM(2015) 690 final] et le projet de rapport conjoint sur l’emploi accompagnant la communication de la Commission sur l’examen annuel de la croissance 2016 [COM(2015) 700 final]

JO C 133 du 14.4.2016, p. 37–45 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

14.4.2016   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 133/37


Avis du Comité économique et social européen sur l’examen annuel de la croissance 2016

[COM(2015) 690 final]

et le projet de rapport conjoint sur l’emploi accompagnant la communication de la Commission sur l’examen annuel de la croissance 2016

[COM(2015) 700 final]

(2016/C 133/08)

Rapporteur:

Juan MENDOZA CASTRO

Le 22 décembre 2015, la Commission européenne a décidé, conformément à l’article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur:

l’«Examen annuel de la croissance 2016» et le «Projet de rapport conjoint sur l’emploi accompagnant la communication de la Commission sur l’examen annuel de la croissance 2016»

[COM(2015) 690 final, COM(2015) 700 final].

Le sous-comité «Examen annuel de la croissance 2016», créé au titre de l’article 19 du règlement intérieur et chargé de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son projet d’avis le 12 janvier 2016.

Lors de sa 514e session plénière des 17 et 18 février 2016 (séance du 17 février 2016), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 139 voix pour, 8 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Persistance de taux de chômage élevés. Sept années après le début de la crise, le Comité exprime son inquiétude face au taux de chômage élevé, en particulier dans certains États membres. Le nombre de jeunes au chômage, de jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET) ainsi que celui des chômeurs de longue durée sont également importants.

1.2.

L’examen annuel de la croissance (EAC) 2016 comporte davantage d’analyses et d’objectifs à caractère social. Toutefois, pour être efficace, cette nouvelle approche ne devrait pas se baser sur la réitération des recommandations politiques des années antérieures. Outre la relance des investissements privés à laquelle se réfère la Commission, la stagnation de l’économie et l’emploi nécessitent un accroissement de la demande intérieure et d’importants investissements publics.

1.3.

Semestre européen. Le CESE se félicite de la décision de renforcer le suivi des objectifs de la stratégie Europe 2020 et de la division du semestre en une phase européenne et une phase nationale, en ce qu’elle permettra de mieux délimiter les responsabilités dans la réalisation des objectifs fixés. Il est par ailleurs indispensable d’améliorer la cohérence entre les politiques de la gouvernance européenne et les objectifs de la stratégie Europe 2020.

1.4.

Le semestre européen devrait prendre en compte la réalisation des 17 objectifs de développement durable (ODD) du programme de développement durable des Nations unies à l’horizon 2030.

1.5.

Économie. L’Union européenne connaît une reprise modérée, mais bénéficie toutefois de facteurs positifs temporaires. L’excédent record au niveau des exportations de la zone euro reflète notamment les effets de la dépréciation de l’euro. Le surplus d’épargne intérieure par rapport aux investissements traduit quant à lui les incertitudes qui pèsent encore sur la relance économique et la croissance.

1.6.

Face à la baisse substantielle des investissements, le Conseil Ecofin a signalé l’urgente nécessité de créer un environnement plus favorable à l’investissement afin de soutenir la relance économique, et d’augmenter la productivité et le potentiel de croissance. Le CESE, pour sa part, estime qu’il est nécessaire de réorienter la politique dite d’austérité vers un plus grand engagement en faveur des politiques de croissance (1).

1.7.

Le grand nombre de personnes exposées au risque de pauvreté ou d’exclusion amène à s’interroger sur la réalisation d’un des grands objectifs de la stratégie Europe 2020.

1.8.

Face à l’afflux massif de réfugiés et de demandeurs d’asile, le CESE propose des mesures basées sur l’action commune et solidaire, le respect des valeurs et des lois internationales, l’égalité de traitement et la primauté de la vie sur toute approche principalement axée sur des politiques de «sécurité». Par ailleurs, il souligne que l’accord de Schengen est un pilier fondamental de l’architecture de l’Union européenne.

2.   Recommandations du CESE

2.1.

Comme l’avait proposé le CESE, l’EAC 2016 met particulièrement en lumière l’importance de l’investissement dans l’emploi et les politiques sociales, qui nécessite l’adoption par la Commission d’une approche ambitieuse.

2.2.

L’EAC 2016 doit mettre l’accent sur le renforcement de la gouvernance afin d’exécuter de manière efficace les grandes politiques européennes d’intégration des marchés et de modernisation de l’économie, en soulignant, à cet égard, le train de mesures sur la gouvernance économique de l’Union européenne. Pour leur part, les cadres efficaces de gouvernance nationale doivent renforcer la confiance, rétablir les réserves budgétaires (fiscal buffers) nécessaires et éviter les politiques budgétaires procycliques.

2.3.

Il est essentiel d’améliorer les synergies des stratégies d’investissement et de développement entre les économies nationales et l’économie européenne.

2.4.

Le CESE suggère, dans le cadre des priorités politiques, de concentrer les efforts en particulier sur deux domaines: l’investissement et l’emploi.

2.5.

Les instruments du cadre financier pluriannuel et du mécanisme pour l’interconnexion en Europe sont fondamentaux pour faire face à la crise et repartir sur la voie de la croissance. Le CESE se félicite des bons débuts du plan d’investissement pour l’Europe et a proposé, à cet égard, d’attirer un plus grand nombre d’investisseurs institutionnels et de diffuser davantage les possibilités de financement.

2.6.

Une «action immédiate» est nécessaire pour lutter contre le chômage de longue durée (qui représente 50 % du chômage total) et le chômage des jeunes. En outre, la Commission devrait présenter une stratégie globale en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes dans le monde du travail.

2.7.

Les investissements dans la transition énergétique (accord de Paris) doivent devenir une source de création d’emplois et de développement économique.

2.8.

Le CESE plaide pour de plus grands efforts concertés afin de combattre la planification fiscale agressive ainsi que la fraude et l’évasion fiscales.

2.9.

Le CESE demande la pleine participation des partenaires sociaux et des autres organisations représentatives de la société civile dans les politiques sociales et les programmes nationaux de réforme, par exemple par l’intermédiaire des conseils économiques et sociaux ou d’institutions similaires. En ce qui concerne la proposition de la Commission de créer des conseils nationaux de la compétitivité dans la zone euro, le CESE adoptera un avis distinct en mars 2016. En tout état de cause, ces conseils doivent être pleinement compatibles avec les négociations collectives libres, et les mécanismes de participation et de dialogue des partenaires sociaux qui existent dans chaque État membre.

2.10.

Légitimité démocratique. Face au déficit démocratique, il est nécessaire de consolider les principes de justice sociale qui sous-tendent l’architecture de l’Union européenne et de renforcer une Europe sociale vouée à la lutte contre l’exclusion sociale et au maintien de la solidarité.

3.   Introduction

3.1.

Selon l’EAC 2016:

l’Union européenne connaît une reprise modérée, mais bénéficie toutefois de facteurs positifs temporaires, notamment le bas niveau des prix du pétrole, un euro relativement faible et des politiques monétaires accommodantes;

en conséquence, les politiques devraient viser à consolider la reprise et à renforcer la convergence vers les pays les plus performants;

le rythme de l’activité devrait s’accélérer progressivement;

les performances économiques et les conditions sociales, ainsi que la mise en œuvre des réformes, restent inégales dans l’Union européenne.

3.2.

Les priorités politiques antérieures, visant à créer un cadre qui respecte un équilibre entre les modifications structurelles, la solidité des budgets publics et l’investissement, sont maintenues. L’EAC 2016 présente des considérations plus spécifiques en rapport notamment avec le marché du travail, le travail non déclaré, l’intégration professionnelle, les inégalités entre les hommes et les femmes, et l’emploi des jeunes.

3.3.

L’EAC 2016 plaide pour une administration publique moderne et efficace, nécessaire pour garantir des services rapides et de grande qualité aux entreprises et aux citoyens.

3.4.

En outre, l’accent est mis sur l’amélioration de la qualité, l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire des États membres comme condition préalable à la création d’un environnement propice à l’investissement et aux activités économiques.

3.5.

Les principales conclusions tirées du projet de rapport conjoint sur l’emploi concernent la grande disparité entre les États membres et la lenteur de l’amélioration de la situation sociale et de l’emploi. D’autres conclusions mettent en évidence:

la poursuite des réformes sur les marchés du travail;

des systèmes fiscaux plus favorables à la création d’emplois;

l’investissement dans le capital humain par l’intermédiaire de l’éducation et de la formation, qui est principalement axé sur les jeunes;

la poursuite de la modération salariale; et

les efforts en faveur de l’emploi des jeunes et en rapport avec le grand nombre de personnes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET).

4.   Persistance de taux de chômage élevés

4.1.

Sept années après le début de la crise, le CESE exprime une nouvelle fois son inquiétude face à la situation de l’emploi, en particulier dans certains États membres de la zone euro. Dans l’Union européenne, 22,5 millions de personnes sont sans emploi (17,2 millions dans la zone euro) et l’on ne prévoit pas d’amélioration significative dans ce domaine au cours des deux prochaines années. En plus des conséquences sociales et économiques, ce facteur vient s’ajouter à ceux qui contribuent à la désaffection des citoyens vis-à-vis du projet européen.

4.2.

L’EAC 2016 comporte davantage d’analyses et d’objectifs à caractère social. Pour que cette nouvelle approche soit efficace et ne reste pas lettre morte, elle ne doit pas se baser sur la réitération des recommandations politiques des années antérieures — essentiellement des réformes structurelles du marché du travail — mais donner un véritable élan coordonné à la croissance et à l’emploi.

4.3.

Comme l’avait proposé le CESE, l’EAC 2016 met particulièrement en lumière l’importance de l’investissement dans l’emploi et les politiques sociales, qui nécessite l’adoption par la Commission d’une approche ambitieuse.

4.4.

Outre la relance des investissements privés, qui constitue le fondement de la proposition de la Commission, la stagnation de l’économie et de l’emploi nécessitent le recours à d’importants investissements publics.

5.   Semestre européen: renforcer la gouvernance

5.1.

L’EAC 2016 devrait mettre l’accent sur le renforcement de la gouvernance afin d’exécuter de manière efficace les grandes politiques européennes d’intégration des marchés et de modernisation de l’économie.

5.2.

Le semestre européen doit également progresser dans la mise en œuvre du train de mesures sur la gouvernance économique, révisé en octobre 2015. Pour leur part, les cadres efficaces de gouvernance nationale doivent renforcer la confiance, rétablir les réserves budgétaires (fiscal buffers) nécessaires et éviter les politiques budgétaires procycliques (2). Les instruments financiers de l’Union européenne et les budgets nationaux doivent contribuer à la réalisation de ces objectifs.

5.3.

Le CESE accueille favorablement la décision de renforcer le suivi des objectifs de la stratégie Europe 2020 dans le cadre du semestre européen, comme l’avaient proposé les cinq présidents (3). Outre l’amélioration de la mise en œuvre et du suivi de la stratégie existante, le semestre européen prévoit un processus visant à développer une vision à long terme allant au-delà de l’horizon 2020, à la lumière notamment des nouveaux ODD convenus par les Nations unies pour 2030. Le Comité salue l’initiative prévue dans la mesure où elle confirme son point de vue selon lequel l’Union européenne devra étendre son horizon de planification au moins jusqu’à 2030 afin de réaliser les ODD, en adoptant une stratégie intégrée pour une Europe durable dans un contexte de mondialisation.

5.4.

La division du semestre européen en deux phases — à savoir, la phase européenne (de novembre à février) et la phase nationale (de février à juin) — délimite mieux les domaines de compétence et permet une consultation approfondie des partenaires sociaux sur les processus de réforme en Europe.

6.   Évolution économique

6.1.

L’Union européenne affiche une croissance du PIB réel de 1,9 % en 2015 et des prévisions de 2,0 % pour 2016 et de 2,1 % pour 2017 (4), mais l’on constate des différences significatives entre les États membres.

6.2.

Le CESE attire l’attention sur le fait que les exportations, avec un excédent record de 3,5 % du PIB dans la zone euro (1,9 % du PIB dans l’EU-28), ont été le moteur de la relance. Au niveau agrégé, la zone euro enregistre un excédent des comptes courants qui est l’un des plus importants au monde et qui devrait augmenter à nouveau pour l’année 2015. Alors que la baisse des prix des matières premières et la dépréciation de l’euro ont contribué à renforcer la balance commerciale, l’excédent courant s’explique en grande partie par un surplus d’épargne intérieure par rapport aux investissements dans la zone euro (5). Ces facteurs traduisent également les incertitudes qui pèsent encore sur la relance économique et la croissance.

6.3.

La modération salariale, l’effondrement du prix du pétrole, les faibles taux d’intérêt et l’évolution des taux de change favorisent la compétitivité de l’économie européenne. La relance économique dépend de plus en plus de la demande intérieure, mais cette dernière est touchée par les restrictions budgétaires, le caractère très temporaire des emplois, la modération salariale et la disponibilité insuffisante de crédit pour les familles et les entreprises, en particulier les PME.

7.   Observations sur le projet de rapport conjoint sur l’emploi

7.1.

Selon le projet de rapport conjoint sur l’emploi, une série de réformes ont renforcé des mécanismes de fixation des salaires afin de favoriser l’alignement de l’évolution des salaires sur la productivité et de soutenir le revenu disponible des ménages, en accordant une attention particulière aux salaires minimaux. Le CESE fait toutefois observer qu’entre 2008 et 2015, l’augmentation des salaires a été inférieure à celle de la productivité dans au moins dix-huit États membres (6).

7.2.

En 2014, on a observé une diminution des coûts salariaux unitaires (CSU) dans un certain nombre de pays de la zone euro particulièrement touchés par la crise. En outre, dans les pays dont le marché du travail connaît une embellie, le nombre d’heures travaillées a commencé à contribuer positivement à l’évolution des CSU (7).

7.3.

Le CESE convient que la modernisation, une meilleure adéquation entre les compétences et les besoins du marché du travail, et l’investissement continu dans l’éducation et la formation, y compris les compétences numériques, sont essentiels pour l’avenir de l’emploi, de la croissance économique et de la compétitivité dans l’Union européenne.

7.4.

Le chômage de longue durée représente actuellement 50 % du chômage total. Ce problème nécessite «une action immédiate» et doit être traité en priorité dans le cadre des politiques de l’emploi. Le taux de chômage élevé des jeunes et le cas des jeunes ne travaillant pas et ne suivant pas d’études ou de formation (NEET) requièrent également une attention prioritaire.

7.5.

Il est révélateur que les récentes analyses sur l’inadéquation des compétences indiquent que moins de la moitié des difficultés de recrutement relèvent de véritables problèmes de déficits de compétences, tandis que près d’un tiers peuvent être imputées à un salaire peu attractif.

7.6.

Le grand nombre de personnes exposées au risque de pauvreté ou d’exclusion recensées en 2014 (24,4 %, soit 122 millions de personnes dans l’EU-28) et l’évolution de ces chiffres au cours des dernières années suscitent beaucoup d’interrogations sur la réalisation d’un des objectifs fondamentaux de la stratégie Europe 2020.

7.7.

Les femmes sont sous-représentées sur le marché du travail, alors que leurs qualifications se sont améliorées et ont même dépassé celles des hommes en termes d’éducation formelle. La différence de 40 % au niveau des pensions est le résultat de carrières plus courtes et de salaires plus bas. Le Comité déplore qu’il n’y ait pas de propositions concernant ce problème dans l’EAC 2016. De même, il signale que la Commission n’a toujours pas présenté de stratégie générale pour l’égalité entre les hommes et les femmes, comportant des mesures spécifiques qui tiennent compte des engagements politiques existants et des exigences de la société civile organisée (8).

8.   Priorités politiques pour 2016

8.1.

La fin de la crise se fait toujours attendre.

8.2.

Les différences profondes qui existent au sein de l’Union européenne sur le plan social et économique obligent à renforcer la convergence des États membres au niveau de la réalisation des objectifs dans ce domaine. Il est essentiel d’améliorer les synergies des stratégies d’investissement et de développement entre les économies nationales et l’économie européenne.

8.3.

Dans le cadre des priorités politiques de 2016, le CESE met particulièrement l’accent sur deux domaines: l’investissement et l’emploi.

8.4.   Relance de l’investissement: une urgente nécessité

8.4.1.

Face à la baisse substantielle des investissements, il faut de toute urgence créer un environnement plus favorable à l’investissement afin de soutenir la relance économique, et d’augmenter la productivité et le potentiel de croissance (9). Le CESE, pour sa part, estime qu’il est nécessaire de réorienter la politique dite d’austérité vers un plus grand engagement en faveur des politiques de croissance.

8.4.2.

Les instruments du cadre financier pluriannuel (notamment les Fonds structurels et d’investissement européens) sont essentiels afin de faire face à la crise et de repartir sur la voie de la croissance durable, en particulier le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, destiné au renforcement des réseaux transeuropéens d’infrastructures de transport, de télécommunications et d’énergie.

8.4.3.

Le plan d’investissement pour l’Europe est un pas dans la bonne direction, mais doit être complété par d’autres dispositions; sa phase de démarrage a porté ses fruits sachant que, selon la BEI, le total des investissements mobilisés en 2015 atteindra 50 milliards d’EUR et que 71 000 PME et entreprises à capitalisation moyenne peuvent bénéficier des projets d’investissement du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS). Pour réaliser l’objectif de 315 milliards d’EUR d’investissements d’ici à 2017, il est nécessaire:

d’attirer un plus grand nombre d’investisseurs institutionnels (UE et hors UE). À ce jour, seuls neuf États membres ont annoncé des contributions au plan, et l’on ne retrouve pas parmi eux certains de ceux qui ont le plus besoin de moderniser leur structure économique;

d’assurer une plus grande diffusion des possibilités de financements offertes par le FEIS, car dans certains cas elles ne sont pas encore suffisamment connues des pouvoirs publics et des investisseurs privés.

8.4.4.

Plus de la moitié des projets financés au titre du FEIS concernent l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables et l’innovation. La mise en œuvre de l’accord de Paris pour la transition des économies à forte intensité d’énergie et de ressources fossiles vers des modèles à faibles émissions de carbone et faible empreinte écologique représente un défi énorme pour l’Union européenne qui doit réduire considérablement ses émissions. Les investissements dans la transition énergétique sont une source de création d’emplois et de développement économique. En outre, ils sont un facteur essentiel pour réduire les prix de l’énergie, s’accompagnant d’effets sociaux et économiques positifs.

8.4.5.

Le Comité convient que le financement de l’économie réelle a connu de notables améliorations, même si des différences persistent entre les États membres. Ce problème concerne toutefois principalement les PME, qui sont largement tributaires du crédit bancaire. L’union des marchés des capitaux, une des grandes initiatives de l’Union européenne, doit avoir comme objectif central de faciliter l’accès des PME au financement (10).

8.4.6.

S’agissant de l’investissement dans le capital humain, le CESE déplore la baisse de la dépense publique consacrée à l’éducation (11), sachant que l’Europe a besoin d’une main-d’œuvre bien formée et qualifiée pour réaliser son potentiel économique. Les mesures de réforme devraient privilégier tant le relèvement du niveau des connaissances, des capacités et des compétences que le comblement de l’écart qui se creuse entre les personnes peu qualifiées et celles hautement qualifiées.

8.5.   Promotion de l’emploi et de politiques sociales inclusives ainsi que d’une croissance économique durable

8.5.1.

Les secteurs innovants ont un énorme potentiel en matière de création d’emplois et ce sont eux que visent les politiques européennes d’intégration des marchés et de modernisation de l’économie (stratégie numérique, marché intérieur de l’énergie, cadre pour le secteur de l’audiovisuel, marché des télécommunications).

8.5.2.

La stabilité de l’emploi est fondamentale pour la reprise économique, mais l’on constate une profonde segmentation du marché du travail (12). Il convient de concilier les adaptations qu’exige un monde du travail en profonde mutation avec la sécurité de l’emploi, l’attachement des travailleurs à leur entreprise et le développement de leurs compétences.

8.5.3.

Le CESE a déjà souligné que le concept de flexicurité, que la Commission remet à l’ordre du jour dans l’EAC 2016, n’est pas synonyme d’une diminution unilatérale et illégitime des droits des travailleurs, mais concerne la conception du droit du travail, des systèmes de protection de l’emploi et, en accord avec les partenaires sociaux, des pratiques de négociation collective, afin d’assurer un équilibre optimal entre flexibilité et sécurité dans toutes les relations de travail et de garantir une sécurité adéquate aux travailleurs, quel que soit leur type de contrat, afin de lutter contre la segmentation des marchés du travail (13).

8.5.4.

Le CESE se félicite:

de la décision de l’Eurogroupe d’évaluer la pression fiscale sur le travail dans le but de diminuer les freins à l’investissement et à la création d’emplois (14), et souligne que l’écologisation des régimes fiscaux, notamment en veillant à ce que les activités à faibles émissions de carbone et à faible empreinte environnementale soient récompensées par rapport à celles qui consomment beaucoup de ressources et d’énergie, est indispensable pour rendre l’économie européenne plus durable;

des propositions visant à améliorer les marchés de produits et de services ainsi que l’environnement des entreprises, et notamment celles se rapportant au commerce de détail;

des propositions ayant trait aux marchés publics qui représentent 19 % du PIB de l’Union européenne, à savoir: une plus grande transparence, une administration plus efficace, une utilisation accrue de la passation électronique des marchés publics et la lutte contre la corruption.

8.5.5.

Le Comité a souscrit à la transition vers une économie verte (15); il est favorable au principe d’une économie circulaire, et évalue actuellement les avantages et les inconvénients du train de mesures dévoilé par la Commission européenne en décembre 2015.

8.5.6.

Le CESE souligne le rôle important que devraient jouer le semestre européen et l’examen annuel de la croissance afin de garantir le suivi des politiques de développement durable. Au cours des dernières années, la Commission avait commencé à intégrer des questions environnementales dans l’examen annuel de la croissance et les recommandations par pays. Le Comité regrette qu’elle ait abandonné cette démarche («écologisation du semestre européen») pour l’EAC 2016 et l’invite à reprendre en considération, dans le cadre du semestre européen, la transition vers une économie circulaire et sobre en carbone, en tant que facteur essentiel de la prospérité économique, de la compétitivité et de la résilience à long terme.

9.   Autres mesures

9.1.   Des politiques budgétaires responsables

9.1.1.

Ces dernières années, l’Union européenne et ses États membres ont adopté un vaste ensemble de mesures (union bancaire, réformes structurelles, etc.) dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance. En conséquence, des progrès ont été accomplis dans la correction des déséquilibres macroéconomiques. Dans un contexte de très faible inflation (0 % en 2015 et une prévision de 1,7 % pour 2017), on a constaté une diminution sensible du déficit public [2,5 % du PIB actuellement et une prévision de 1,6 % du PIB pour 2017 (16)]. Les mesures visant à réduire l’important encours de la dette publique (86,8 % du PIB) et privée (ménages: 57,9 %, sociétés non financières: 79,5 %) supposent des restrictions à l’investissement et à la consommation.

9.1.2.

En ce qui concerne le renforcement de l’efficacité et de l’équité des systèmes fiscaux, le CESE est favorable à l’élimination de la distorsion injustifiée en faveur de l’endettement dans la fiscalité (debt bias), ainsi que l’a recommandé le FMI dans ses rapports. Cette approche favorisera les canaux de financement autres que le crédit bancaire, notamment les marchés de capitaux.

9.1.3.

Le CESE se félicite des initiatives de la Commission concernant la localisation de l’activité économique et le train de mesures sur la transparence fiscale. Les autorités européennes et nationales devraient davantage coordonner leurs actions afin d’éliminer les paradis fiscaux et de lutter contre la planification fiscale agressive ainsi que la fraude et l’évasion fiscales qui entraînent, au sein de l’Union européenne, des pertes estimées à 1 000 milliards d’EUR (17).

9.2.   Évolution démographique: son incidence sur les systèmes de pension et de santé

9.2.1.

Les États membres de l’Union européenne ont adopté des mesures relatives aux systèmes de pensions publiques visant, d’une part, à atténuer les conséquences sociales de la crise et, d’autre part, à améliorer la viabilité à long terme de ces systèmes. Il s’agissait de mesures d’austérité telles que l’augmentation de l’âge de la retraite et l’établissement d’un lien strict entre les cotisations et les prestations, entre autres. Les régimes de retraite privés jouent un rôle social important, comme l’a déclaré le Comité (18), mais ils ne doivent pas être considérés comme de simples instruments financiers.

9.2.2.

Le CESE convient qu’il est nécessaire d’établir une base de financement viable pour les systèmes de santé. Dans l’intérêt d’un bien-être optimal des citoyens de l’Union, ces systèmes doivent se fonder sur les principes et les valeurs qui sous-tendent la dimension sociale de l’Europe, tels que l’universalité, l’accessibilité, l’équité et la solidarité (19).

9.3.   Réfugiés et demandeurs d’asile

9.3.1.

Si l’on veut créer le consensus social requis au sein de l’Union européenne, il est essentiel de respecter pleinement l’égalité de traitement et les droits sociaux tant des citoyens européens que des réfugiés en Europe, en accordant une attention particulière aux plus vulnérables d’entre eux. Un investissement précoce dans l’intégration des réfugiés dans la société et sur le marché du travail est important pour les aider à reconstruire leur vie, limiter les conflits potentiels avec la population locale et éviter des coûts plus élevés à l’avenir.

9.3.2.

Le CESE espère que le mécanisme de relocalisation en cas de crise aidera l’Union européenne à mettre en place, par consensus, un système suffisamment robuste et flexible pour relever les défis liés à la migration sous ses différentes formes.

9.3.3.

La Commission européenne et les autres institutions de l’Union européenne doivent soutenir activement les États membres, de sorte que ceux-ci disposent de conditions et de perspectives adéquates pour intégrer les demandeurs d’asile relocalisés. Il convient notamment de bien spécifier dans ce contexte que les dépenses des États membres liées à l’accueil et à l’intégration des demandeurs d’asile et des réfugiés ne constituent pas des dépenses durables ou structurelles, et ne doivent donc pas être incluses dans le calcul des déficits budgétaires structurels.

9.3.4.

Le CESE souligne que l’accord de Schengen est un pilier fondamental de l’architecture de l’Union européenne (20).

9.4.   Participation de la société civile

9.4.1.

Le CESE estime qu’il est indispensable d’associer la société civile aux politiques sociales et économiques, comme condition préalable à leur plus grande efficacité.

9.4.2.

Les programmes nationaux de réforme (PNR) doivent inclure des enceintes de débat, en particulier les conseils économiques et sociaux. Or, une telle participation n’existe pas dans certains États membres.

9.4.3.

S’ils sont créés, comme le recommande la Commission, les conseils nationaux de la compétitivité doivent être pleinement compatibles avec les négociations collectives libres, et les mécanismes de participation et de dialogue des partenaires sociaux qui existent dans chaque État membre. L’avis du CESE sur cette question sera adopté en mars 2016.

9.5.   Légitimité démocratique

9.5.1.

Le déficit démocratique a conduit à une perte de confiance en l’idéal européen. Le Comité souligne la nécessité de regagner la confiance des citoyens et de reconstruire la vision d’une Europe sociale, ce qui renforcera et confortera la légitimité sociale de l’édifice européen.

9.5.2.

En théorie comme en pratique, l’Union européenne est loin de bénéficier d’une légitimité sociale suffisante. La controverse sur le «déficit démocratique» de l’Union est toujours d’actualité, tandis qu’il s’est produit un glissement sémantique du concept de «déficit démocratique» vers ceux de «déficit de justice» et de «déficit de légitimité» au sens large. Il est nécessaire de consolider les principes de justice sociale qui sous-tendent l’architecture de l’Union européenne et de renforcer une Europe sociale vouée à la lutte contre l’exclusion sociale et au maintien de la solidarité.

Bruxelles, le 17 février 2016.

Le président du Comité économique et social européen

Georges DASSIS


(1)  Conseil Ecofin, 15 janvier 2016.

(2)  Voir note de bas de page no 1.

(3)  «Compléter l’Union économique et monétaire européenne», 22 juin 2015. Voir aussi la «Communication relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire», COM(2015) 600 final.

(4)  Prévisions d’automne 2015.

(5)  Rapport sur le mécanisme d’alerte 2016, COM(2015) 691 final.

(6)  Voir https://www.etuc.org/sites/www.etuc.org/files/document/files/08-en_ags2015_annex_3_-_wages_as_an_engine_of_growth.pdf

(7)  Voir note de bas de page no 5.

(8)  Voir Monserrat Mir, Why is the Commission ignoring women?, http://www.euractiv.com/sections/social-europe-jobs/why-commission-annoying-half-population-320379

(9)  Voir note de bas de page no 1.

(10)  Voir http://www.savings-banks.com/press/positions/Pages/Common-position-on-Capital-Markets-Union-.aspx

(11)  COM(2015) 700 final.

(12)  Voir note de bas de page no 11.

(13)  JO C 211 du 19.8.2008, p. 48.

(14)  Déclaration de l’Eurogroupe sur le programme de réforme structurelle — Discussions thématiques sur la croissance et l’emploi: études comparatives sur la fiscalité du travail, 638/15, 12 septembre 2015.

(15)  JO C 230 du 14.7.2015, p. 99.

(16)  Voir note de bas de page no 4.

(17)  http://ec.europa.eu/taxation_customs/taxation/tax_fraud_evasion/missing-part_fr.htm

(18)  JO C 451 du 16.12.2014, p. 106.

(19)  JO C 242 du 23.7.2015, p. 48.

(20)  Voir les avis du CESE sur les thèmes suivants: «Frontex» (JO C 44 du 11.2.2011, p. 162), «Communication sur la migration» (JO C 248 du 25.8.2011, p. 135) et «Faire de l’Europe ouverte et sûre une réalité» (JO C 451 du 16.12.2014, p. 96), ainsi que la résolution du 10 décembre 2015 (JO C 71 du 24.2.2016, p. 1).


ANNEXE

Le paragraphe suivant de l’avis du sous-comité, qui a été remplacé par un amendement adopté par l’Assemblée, a recueilli au moins un quart des voix exprimées (article 54, paragraphe 4, du règlement intérieur):

Paragraphe 9.4.3

S’ils sont créés, comme le recommande la Commission, les conseils nationaux de la compétitivité doivent être pleinement compatibles avec les négociations collectives libres et les mécanismes de participation et de dialogue des partenaires sociaux qui existent dans chaque État membre. L’avis du CESE sur cette question sera adopté en mars 2016.

Résultat du vote

Voix pour:

103

Voix contre:

54

Abstentions:

10


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