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Document 52013AE0472

    Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises» COM(2012) 742 final et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n ° 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité» COM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD)

    JO C 271 du 19.9.2013, p. 55–60 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    19.9.2013   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 271/55


    Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen — Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises»

    COM(2012) 742 final

    et sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité»

    COM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD)

    2013/C 271/10

    Rapporteur: M. Pedro Augusto ALMEIDA FREIRE

    Le 12 décembre 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

    «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen – Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises»

    COM(2012) 742 final.

    Le 15 janvier 2013 et le 5 février 2013, respectivement, le Parlement européen et le Conseil ont décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

    «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 1346/2000 du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité»

    COM(2012) 744 final – 2012/0360 (COD).

    La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 29 avril 2013.

    Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 130 voix pour, 1 voix contre et 4 abstentions.

    1.   Conclusions et recommandations

    1.1   Conclusions générales

    1.1.1

    L’Europe traverse une crise économique et sociale majeure, dont les effets frappent tous les échelons de la société.

    1.1.2

    Favoriser la survie des entreprises figure parmi les mesures que l’Union européenne a identifiées pour sortir de l’impasse. Les faillites ont en effet des répercussions qui vont au-delà des conséquences négatives pour les entreprises concernées, elles touchent globalement l’économie des États membres, et plus particulièrement le citoyen en sa qualité de contribuable, de salarié, et d’employeur.

    1.1.3

    Le CESE souscrit aux objectifs figurant dans la communication de la Commission, bien que selon lui, la «seconde chance» qui y est évoquée devrait bénéficier aux entrepreneurs ayant tiré les leçons de leur échec précédent, et capables de rebondir sur la base d’un projet entrepreneurial repensé.

    1.1.4

    Il soutient également la proposition de règlement, dont il regrette toutefois le manque d’ambition.

    1.1.5

    En effet, de nombreuses réflexions et actions concrètes doivent encore être menées, pour préserver les droits des créanciers, tout en veillant à trouver un équilibre entre les intérêts des entrepreneurs et des salariés, favoriser la restructuration des entreprises, empêcher le forum shopping, améliorer la coordination des procédures d’insolvabilité des groupes d’entreprises.

    1.2   Recommandations sur la communication

    1.2.1

    Le CESE estime que les pistes de réflexion pour une harmonisation substantielle du droit de l’insolvabilité des entreprises sont intéressantes, même s’il déplore l’absence de réponse efficace à la crise économique et sociale que traversent les entreprises et les citoyens européens.

    1.2.2

    Il est plus favorable à la notion de Fresh start, selon le concept central du droit américain de l’insolvabilité, qu’à celle de «seconde chance» défendue par la Commission. Aussi, il l’invite à réfléchir sur l’apport de cette notion au droit européen de l’insolvabilité.

    1.2.3

    Il considère également que le salarié devrait être mieux protégé et se voir reconnaître le rang de créancier privilégié.

    1.2.4

    La question du soutien inapproprié des entreprises en difficulté doit aussi faire partie de la réflexion, le CESE souligne à cet égard que cette responsabilité peut viser d’autres personnes que des banques. Il invite donc à la Commission à envisager ces paramètres à leur juste valeur.

    1.2.5

    Il estime que la pénalisation du droit de l’insolvabilité n’est pas souhaitable car elle accroîtrait la judiciarisation des procédures d’insolvabilité et allongerait les délais d’examen.

    1.2.6

    Il ne lui semble pas que le recours systématique au juge soit la meilleure solution. Il invite la Commission à réfléchir sur l’idée de créer de nouvelles instances, par exemple liées au secteur de l'économie, dont la composition pluridisciplinaire (économique, financière, juridique) serait mieux à même de comprendre et agir rapidement pour aider les entreprises à vaincre leurs difficultés financières.

    1.2.7

    Enfin, il invite la Commission à considérer les propositions relatives à l’harmonisation du statut de syndic, telles que résultant de la résolution du Parlement européen du 11 octobre 2011 (1).

    1.3   Recommandations sur la proposition de règlement

    1.3.1

    Le CESE soutient la proposition de règlement, même si elle se limite à des règles processuelles, et qu’elle ne vise pas à harmoniser les droits nationaux applicables aux cas d’insolvabilité d’entreprises.

    1.3.2

    Il salue l’obligation faite aux États membres d’améliorer les règles de publicité via un registre électronique, des décisions judiciaires pertinentes rendues dans des affaires d’insolvabilité transfrontalières, et l’interconnexion des registres nationaux d’insolvabilité.

    1.3.3

    Il invite néanmoins la Commission à veiller à ce que la charge, le coût et les délais des traductions ne ralentissent pas les procédures d’insolvabilité, car la rapidité est un gage de leur réussite.

    1.3.4

    Il soutient l’intégration des procédures civiles de surrendettement, mais pour autant, cet ajout ne devrait pas s’avérer défavorable aux débiteurs particuliers. En effet, un droit conçu pour les entreprises, destiné à satisfaire les exigences du commerce, est par essence moins protecteur que le droit de la consommation. Il recommande à la Commission d’être particulièrement vigilante à ce sujet.

    1.3.5

    Enfin, il invite la Commission à veiller à ce que le recours à la procédure de délégation pour modifier des annexes du règlement, prenne en considération l’article 290 du TFUE et l’apport de la jurisprudence sur la notion de «mesures essentielles».

    2.   Introduction

    2.1   L’objectif du «Paquet Insolvabilité»

    2.1.1

    Les initiatives comprises dans ce paquet législatif font partie de la réponse de l’UE à la crise économique et sociale que traversent les entreprises et les citoyens européens. L'objectif affiché est de favoriser la survie des entreprises et de donner une seconde chance aux entrepreneurs frappés par une situation d’insolvabilité.

    2.1.2

    La méthode choisie par la Commission européenne consiste à modifier le règlement (CE) no 1346/2000 (2) du Conseil du 29 mai 2000 dit «règlement sur l’insolvabilité» essentiellement relatif aux règles de droit international privé applicables aux procédures d’insolvabilité transfrontalières, et d'initier à une consultation sur la base d’une communication intitulée: «Nouvelle approche européenne en matière de défaillances et d’insolvabilité des entreprises».

    2.1.3

    Le CESE a décidé de se prononcer sur les deux textes dans un seul et même avis.

    2.2   La proposition de règlement  (3)

    2.2.1

    Partant du constat de l’obsolescence du «règlement sur l’insolvabilité» du 29 mai 2000, et de l’identification de ses cinq écueils majeurs (4), la Commission propose de réviser ledit texte.

    2.3   La communication

    2.3.1

    Elle constate à juste titre que sa proposition de règlement du 12 décembre 2012 se limite à mettre à jour le «règlement sur l'insolvabilité» du 29 mai 2000, en se contentant de porter sur la reconnaissance et la coordination des règles de procédures applicables aux cas nationaux d’insolvabilité, et ce sans harmoniser les droits nationaux applicables aux cas d'insolvabilité d'entreprises.

    2.3.2

    Elle tente de palier ce défaut en proposant des pistes de réflexion pour une harmonisation substantielle du droit de l’insolvabilité des entreprises, étant entendu que seuls les cas d’insolvabilités transfrontalières, sont visés.

    3.   Observations générales sur la communication

    3.1   Philosophie de la nouvelle approche

    3.1.1

    Elle se fonde sur la nécessité d’accorder une seconde chance aux entrepreneurs et de sauvegarder des emplois.

    3.1.2

    Le CESE considère pour sa part que les faillites d’entreprises, tout comme les créations d’entreprises d’ailleurs, font partie du cycle de la vie économique et de la dynamique du marché. Il serait donc à ce titre incorrect de les considérer comme des maux devant à tout prix être évités.

    3.1.3

    Dans cet ordre d'idées, le CESE pense que la «seconde chance» évoquée par la Commission devrait bénéficier aux entrepreneurs ayant tiré des leçons de leur échec précédent, et capables de rebondir sur la base d’un projet entrepreneurial repensé.

    3.1.4

    Il souligne également que les faillites d’entreprises peuvent avoir des causes internes, telles que la mauvaise gestion, mais aussi des causes externes provenant de règlementations aussi excessives qu’inadaptées. À ce titre, l’État a aussi une certaine responsabilité dans les faillites, en sa qualité de législateur, mais aussi de pouvoir adjudicateur dans le cadre de marchés publics (5).

    3.1.5

    Le CESE est plus favorable à la notion de Fresh start, selon le concept central du droit américain de l’insolvabilité (6) qu’à celle de «seconde chance» défendue par la Commission. Le Fresh start, concept largement culturel et non pas juridique, suppose que le débiteur soit, à certaines conditions, libéré de sa responsabilité personnelle sur ses dettes. L’étape de la décision judiciaire déclarant la faillite de l’entreprise est ainsi évitée et le débiteur peut commencer un nouveau projet, sans être identifié comme failli.

    3.1.6

    La communication laisse au contraire penser que la «seconde chance» consiste en une poursuite d’activité. Or, selon le CESE, il serait contre-productif de maintenir artificiellement tel que, des entreprises dans le tissu économique, en leur donnant une «seconde chance», alors que l'expérience a démontré que le modèle choisi n'était pas viable.

    3.1.7

    Des conséquences nocives sur la confiance des créanciers et fournisseurs résulteraient d’une telle démarche, et in fine nuirait à une concurrence saine entre acteurs économiques.

    3.2   Le CESE soutient l’approche américaine du droit de l’insolvabilité, et selon lui, l’évaluation du Fresh start devrait intervenir avant même que le juge n’ait été saisi.

    4.   Observations particulières sur la communication

    4.1   Pour une harmonisation efficace

    4.1.1

    L'hétérogénéité des droits nationaux de l'insolvabilité est une source, notamment pour les sociétés ayant des activités transfrontalières, de désavantages concurrentiels qui pourraient nuire à la relance économique.

    4.1.2

    Elle incite au forum shopping, et entraine par voie de conséquence un affaiblissement du marché intérieur.

    4.1.3

    Aussi, le CESE se joint au Parlement européen (7) qui avait appelé de ses vœux une harmonisation de certains domaines du droit de l'insolvabilité.

    4.1.4

    Il demande lui aussi à la Commission de présenter, sur la base de l'article 50, de l'article 81, paragraphe 2, ou de l'article 114 du TFUE, une ou plusieurs propositions législatives pour un véritable cadre européen de l'insolvabilité des entreprises, ne se limitant pas à de simples règles processuelles de droit international privé.

    4.1.5

    En effet, les cas d’insolvabilité ont des répercussions qui vont au-delà des conséquences négatives pour les entreprises concernées, ils touchent globalement l’économie des États membres, et plus particulièrement le citoyen en sa qualité de contribuable, de salarié, et d’employeur.

    4.2   Préserver les droits des créanciers

    4.2.1

    Tournées à l'origine exclusivement aux fins de désintéressement des créanciers, les procédures collectives ont progressivement eu pour finalité la pérennité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Plus récemment, la tendance législative en Europe est de prévenir les problèmes de l'entreprise en amont de la cessation de paiements.

    4.2.2

    L’ouverture d’une procédure collective contre le débiteur est un évènement redouté par le créancier, qui ignore s’il pourra obtenir le paiement des sommes dues. La première frustration vient de ce que souvent, l’ouverture d’une procédure collective interdit de poursuivre le débiteur pour toute créance née avant le jugement d’ouverture et suspend les poursuites en cours. Chaque créancier doit donc déclarer sa créance dans le délai légal (8).

    4.2.3

    La seconde frustration du créancier survient dans le cas d’une insuffisance d’actif; en pratique, il est souvent proposé aux créanciers pendant la procédure collective, de choisir entre un paiement immédiat moyennant un abandon d’une partie non négligeable de leur créance, et un étalement de la dette sur une période donnée.

    4.2.4

    L’idéal pour le créancier est donc de prévenir toute situation d’insolvabilité, par exemple en sécurisant certaines opérations lors de la conclusion du contrat, en exigeant une constitution de garanties par un tiers (9) ou en exigeant des gages, nantissements ou hypothèques sur les actifs de l’entreprise (10).

    4.3   Mieux traiter le sort des salariés dans les procédures d’insolvabilité

    4.3.1

    Les salariés sont en première ligne en cas de faillite de leur entreprise. Leurs salaires ne sont pas toujours réglés avant le dépôt de bilan et leur situation financière personnelle est difficile durant cette période d'inquiétude.

    4.3.2

    L'ouverture d'une procédure collective entraîne souvent l'élection d'un représentant des salariés, dont la mission est de contrôler les informations relatives aux créances salariales. Il constitue, outre les instances habituelles de représentation de salariés au sein d’une entreprise, un relais d'information entre le personnel, le tribunal et les intervenants de la procédure.

    4.3.3

    Les sommes dues aux salariés avant l'ouverture de la procédure collective, doivent être inscrites au passif de l'entreprise. Toutefois, cette mesure d'ordre général est en fait très atténuée par les divergences entre les législations et les pratiques nationales. Le défaut d’harmonisation relatif à l’ordre des créanciers rend donc l’issue des procédures collectives très incertaine pour les salariés.

    4.3.4

    Le CESE pense que le salarié devrait être mieux protégé en se voyant reconnaitre le rang de créancier privilégié et considère à ce titre qu’une harmonisation de sa protection serait utile.

    4.4   Prévenir le soutien inapproprié d’entreprises mal en point

    4.4.1

    Les pratiques commerciales de certains établissements financiers peuvent conduire à soutenir des entreprises dont la situation est irrémédiablement compromise. Elles créent ainsi une apparence de solvabilité, qui nuit à une concurrence saine sur le marché et entache l'image du secteur bancaire.

    4.4.2

    Le CESE souligne que la responsabilité pour soutien abusif peut viser d’autres personnes que des banques y compris l'État. D'ailleurs, des juges nationaux considèrent que certains fournisseurs ou clients de l’entreprise peuvent également voir leur responsabilité engagée lorsque, par leur attitude, ils soutiennent abusivement l’activité d’une entreprise dont ils savent qu’elle est irrémédiablement compromise.

    4.4.3

    Ces paramètres devraient également être envisagés à leur juste valeur pour harmoniser le droit de l’insolvabilité des entreprises.

    4.5   Le cas particulier des faillites frauduleuses

    4.5.1

    La majorité des faillites d’entreprises sont dues à des raisons objectives, exemptes de tout comportement frauduleux de leurs dirigeants.

    4.5.2

    Le phénomène des faillites frauduleuses ne saurait pour autant être ignoré. La Commission y fait d’ailleurs référence dans sa communication (11), et suggère de faire une distinction entre les faillites honnêtes et les faillites malhonnêtes. Selon elle, le non-respect volontaire ou irresponsable des obligations légales par un débiteur pourrait entrainer des sanctions civiles, voire pénales. À ce titre, les procédures de liquidation des faillites honnêtes devraient être accélérées.

    4.5.3

    Le CESE est quant à lui convaincu que l’harmonisation du délai de réhabilitation et une durée raisonnablement brève de ce dernier, seraient appropriées, notamment dans l’intérêt des salariés, mais il reste dubitatif quant à la distinction des procédures de liquidation selon l’honnêteté des dirigeants car cela accroîtrait la judiciarisation des procédures d’insolvabilité, leur donnerait un caractère pénal et allongerait les délais d’examen.

    4.5.4

    Cette pénalisation du droit de l’insolvabilité n’est pas souhaitable. Selon le CESE, l’appréciation de la nature frauduleuse de la faillite doit avoir lieu dans une procédure distincte de la procédure d’insolvabilité.

    5.   Observations générales sur la proposition de règlement

    5.1

    Le CESE salue l’élargissement du champ d’application du règlement en incluant les procédures hybrides, les procédures de pré-insolvabilité, les procédures de décharge de dettes, ainsi que les procédures relatives aux personnes physiques.

    5.2

    Il salue également la clarification des circonstances permettant de renverser la présomption selon laquelle le centre des intérêts principaux correspond au lieu du siège statutaire.

    5.3

    L’amélioration du régime procédural précisant le champ d’intervention de la juridiction compétente pour les actions dérivant directement des procédures d’insolvabilité ou qui y sont étroitement liées, comme les actions révocatoires, est également positive.

    5.4

    Le fait que les procédures secondaires ne soient plus nécessairement des procédures de liquidation et que leur ouverture puisse être refusée lorsqu’elles ne sont pas nécessaires à la protection des intérêts des créanciers locaux, participe également à l’amélioration du règlement, tout comme l’extension de la coopération entre procédure principale et secondaire.

    5.5

    L’obligation pour les États membres d’améliorer les règles de publicité, en rendant accessible à tous, via un registre électronique, les décisions pertinentes rendues par les juridictions dans des cas d’insolvabilité transfrontières et l’interconnexion des registres nationaux d’insolvabilité, sont aussi des idées intéressantes.

    5.6

    Le CESE s’interroge néanmoins sur la charge, le coût et les délais des traductions, et rappelle que la rapidité est un gage indispensable à la réussite de la procédure.

    5.7

    Enfin il salue l’obligation des juridictions et des syndics de coopérer dans les procédures d’insolvabilité visant les membres d’un même groupe d’entreprises, car elle donne aux syndics les moyens d’être plus efficaces.

    6.   Observations particulières sur la proposition de règlement

    6.1

    Le CESE s’interroge sur la coordination entre le règlement CE no 1215/2012 du 12 décembre 2012 (12), appelé à remplacer le règlement CE no 44/2001 sur la compétence juridictionnelle des tribunaux nationaux et les effets des jugements dans l’Union européenne, dit «règlement de Bruxelles I». Il se demande si le considérant 6 contenu dans la proposition de «règlement sur l’insolvabilité» clarifie suffisamment le critère de répartition des compétences résultant de la jurisprudence Gourdain (13). En effet, cette jurisprudence semble donner une interprétation restrictive, alors que certaines actions placées dans sous l’empire du «règlement de Bruxelles I» sont déterminantes pour la procédure d’insolvabilité. Par exemple, le jeu ou non d’une clause de réserve de propriété est déterminant pour définir l’étendue de l’actif du débiteur. L’enjeu est important au regard de l’objectif affiché de sauver les entreprises en difficulté, puisque la reconstitution de l’actif est la clé de la réussite du redressement des entreprises en difficulté.

    6.2

    S’agissant de la coopération entre les syndics, la Commission aurait pu proposer de modifier l’article 31 en incitant davantage à l’adoption de protocoles d’accord entre les syndics. En effet, la diversité du statut des syndics dans les États membres est une entrave à leur coopération professionnelle.

    6.3

    Les échanges entre syndics et juridictions devraient quant à eux concerner prioritairement l’inventaire, le passif du débiteur, la déclaration et la vérification des créances, ainsi que le règlement collectif coordonné des créanciers figurant dans les plans négociés.

    6.4

    Enfin, le CESE souligne que la Commission envisage de recourir à la procédure de délégation pour modifier les annexes du règlement, alors qu’il semble y être question de mesures essentielles, comme la notion de procédure collective ou la liste des personnes agissant comme syndic.

    7.   Observations particulières quant au droit substantiel de l’insolvabilité

    7.1

    Une harmonisation des critères d’insolvabilité est nécessaire. En effet, dans certains États membres, la procédure d’insolvabilité n’est envisageable que lorsque le débiteur est avéré insolvable, dans d'autres, l’insolvabilité «probable dans un futur proche» est un critère suffisant.

    7.2

    Ces divergences favorisent le forum shopping, et devraient donc à ce titre être supprimées.

    7.3

    L’impératif de sécurité juridique appelle aussi une harmonisation des règles relatives à la production de créances.

    8.   Intégrer les procédures civiles de surendettement

    8.1

    Le CESE soutient cette proposition de la Commission consistant en un nouveau considérant 9 (14).

    8.2

    Les considérants 9 et 10 du «règlement sur l'insolvabilité» du 29 mai 2000 s’y prêtent aisément (15).

    8.3

    Pour autant, cette intégration ne devrait pas s’avérer défavorable aux débiteurs particuliers. En effet, un droit conçu pour les entreprises, destiné à satisfaire les exigences du commerce, est par essence moins protecteur que le droit de la consommation. Le CESE invite donc la Commission à être particulièrement vigilante à ce sujet.

    8.4

    Il invite également la Commission à réfléchir à une harmonisation du droit de l’insolvabilité des particuliers, prenant en considération les intérêts du consommateur.

    9.   Harmoniser le statut et les compétences des syndics

    9.1

    Les divergences nationales sur les statuts et compétences des syndics altèrent le bon fonctionnement du marché intérieur en compliquant les procédures d’insolvabilité transfrontalières (16).

    9.2

    Il va de l’intérêt des entreprises et de la relance économique qu’une harmonisation des aspects généraux concernant les exigences quant aux compétences et missions du syndic soit mise en œuvre rapidement. Aussi, le CESE se joint au Parlement européen (17) pour recommander les pistes de réflexions suivantes:

    le syndic devrait être homologué par une autorité compétente d'un État membre ou mandaté par une juridiction compétente d'un État membre, jouir d'une bonne réputation et disposer du niveau de formation nécessaire pour l'accomplissement de ses fonctions;

    il doit avoir compétence et qualité pour évaluer la situation de l'entité du débiteur et pour prendre en charge les tâches de gestion de l'entreprise;

    il doit pouvoir recouvrer, par des procédures adaptées et prioritaires, des sommes dues à l'entreprise en amont du règlement des créanciers et en tant qu'alternative aux transferts de créances;

    il doit être indépendant des créanciers ainsi que des autres parties concernées par la procédure d'insolvabilité;

    en cas de conflit d'intérêts, il doit démissionner de sa charge.

    9.3

    La Commission devrait donc aller au-delà de ce qu’elle prévoit à l’article 31 de la proposition de règlement qui se limite à entériner la pratique et à porter sur la coopération entre syndic de procédure principale et syndic de procédure secondaire.

    10.   Développer les règlements extrajudiciaires pour un soutien et un encadrement efficaces des entreprises

    10.1

    Favoriser les procédures négociées permettrait d’accroître la rapidité et l’efficacité des plans de restructuration des entreprises.

    10.2

    Leur délai moyen et le taux de succès généralement observés dans l’Union européenne, militent en faveur de l’adoption de cette approche.

    10.3

    D'ailleurs, il ne semble pas au CESE que le recours systématique au juge soit forcément la meilleure solution.

    Il soutient ainsi l’idée de créer de nouvelles instances, par exemple liées au secteur de l'économie, dont la composition pluridisciplinaire (économique, financière, juridique) serait mieux à même d'agir rapidement pour aider les entreprises à vaincre leurs difficultés financières.

    10.4

    Ce système existe déjà dans plusieurs pays, et pourrait être généralisé à d'autres États membres.

    10.5

    Enfin, il serait utile que la Commission publie périodiquement des statistiques relatives aux cas d’insolvabilité soumis au «règlement sur l’insolvabilité» afin de pouvoir évaluer l’efficacité du système mis en place.

    Bruxelles, le 22 mai 2013.

    Le Président du Comité économique et social européen

    Henri MALOSSE


    (1)  Résolution du Parlement européen du 15.11.2011 – 2011/2006 (INI).

    (2)  JO L 160 du 30.6.2000, p. 1 et JO C 75 du 15.3.2000, p. 1.

    (3)  COM(2012) 744 final du 12.12.2012.

    (4)  

    champ d’application trop restreint;

    persistance du forum shopping due à une application incohérente de la notion de «centre des intérêts principaux du débiteur»;

    absence de coordination entre procédure principale d’insolvabilité et procédure secondaire;

    publicité insuffisante des procédures d’insolvabilité;

    vide juridique quant à l’insolvabilité des groupes multinationaux;

    la Commission s’appuie sur les 134 réponses à une consultation publique initiée le 29 mars 2012, les conclusions d’une étude de droit comparé réalisée par les universités d’Heidelberg et de Vienne, ainsi que sur une analyse d’impact évaluant différents scenarii relatifs à des options de réforme, pour suggérer de palier les cinq lacunes susmentionnées, dans une proposition de «Règlement du Conseil relatif aux procédures d’insolvabilité».

    (5)  Par exemple des règles relatives à la sécurité, l’environnement qui tout en étant légitimes dans leur esprit, peuvent nuire au fonctionnement des entreprises. Les délais de paiement pratiqués par l’acheteur public, dans le cadre des marchés publics contribuent aussi aux difficultés rencontrées par les entreprises.

    (6)  Thomas H. Jackson,The Fresh-Start Policy in Bankruptcy Law, 98 Harv. L. Rev. 1393 (1985); Charles Jordan Tabb, The Scope of the Fresh Start in Bankruptcy: Collateral Conversions and the Dischargeability Debate, 59 Geo. Wash. L. Rev. 56 (1990).

    (7)  Résolution du Parlement européen du 15.11.2011 – 2011/2006 (INI).

    (8)  Les créances à déclarer sont non seulement les créances échues ou à échoir nées avant l’ouverture du jugement mais également certaines créances nées postérieurement lorsqu’elles correspondent à des prestations fournies avant la date du jugement d’ouverture ou sont jugées non nécessaires à la poursuite de la procédure.

    (9)  Une banque ou le dirigeant.

    (10)  Mobilier, fonds de commerce, marques, etc.

    (11)  Point 3.1: Une seconde chance pour les entrepreneurs honnêtes en faillite. COM(2012) 742 final.

    (12)  L’application du règlement est reportée au 10 janvier 2015, notamment pour permettre aux États membres d’adapter leurs règles de procédures en raison de l’abolition de l’exequatur.

    (13)  CJCE Gourdain c/Nadler, 22 février 1979.

    (14)  Considérant 9 «Le présent règlement devrait s’appliquer aux procédures d’insolvabilité…que le débiteur soit une personne physique ou morale, un commerçant ou un particulier».

    (15)  En outre, le droit de certains Etats membres le prévoit déjà. En Belgique, la procédure de règlement collectif des dettes vise également les procédures applicables aux consommateurs (loi du 5 juillet 1988). L’Allemagne n’opère pas de distinction entre les procédures applicables aux commerçants et celles applicables aux particuliers (loi du 5 octobre 1994).

    (16)  En effet, le syndic peut être un fonctionnaire ou une personne privée homologuée par l’État, désigné par le juge, mais payée par les créanciers.

    (17)  Rapport du 11 octobre 2011 contenant des recommandations à la Commission sur les procédures d'insolvabilité dans le cadre du droit européen des sociétés (2011/2006(INI)).


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