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Document 52007IE1255

Avis du Comité économique et social européen sur le thème Intégration du commerce mondial et externalisation. Faire face aux nouveaux défis

JO C 10 du 15.1.2008, p. 59–66 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

15.1.2008   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 10/59


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Intégration du commerce mondial et externalisation. Faire face aux nouveaux défis»

(2008/C 10/17)

Le 16 février 2007, le Comité économique et social européen a décidé, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de son règlement intérieur, d'élaborer un avis d'initiative sur l'«Intégration du commerce mondial et externalisation. Faire face aux nouveaux défis».

La commission consultative des mutations industrielles, chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 12 septembre 2007 (rapporteur: M. ZÖHRER; corapporteur: M. LAGERHOLM).

Lors de sa 438e session plénière des 26 et 27 septembre 2007 (séance du 26 septembre 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 151 voix pour, 1 voix contre et 8 abstentions.

1.   Résumé

1.1

Les déplacements des courants d'échange et l'intégration croissante des économies nationales dans le système commercial mondial ont pour origine un certain nombre de facteurs. Parmi ces facteurs, l'un des plus significatifs est le développement de la répartition internationale de la production qui a entraîné l'augmentation du volume d'échanges des moyens de production intermédiaires (biens et services) à différents stades du processus de fabrication. Le commerce des produits intermédiaires est l'un des principaux vecteurs des mutations industrielles et correspond à une forme particulière de la division internationale du travail.

1.2

Dans ce contexte, l'externalisation est mesurée au commerce extérieur de produits intermédiaires, approche qui s'écarte quelque peu de la définition habituelle de cette notion et présente certaines similitudes avec la délocalisation (offshoring). Aussi pourrait-on, pour établir la distinction, parler «d'externalisation à l'étranger».

1.3

L'externalisation à l'étranger s'explique par toute une série de raisons, dont la plus importante est le faible coût du travail (salaires et/ou protection sociale moindres). Toutefois, le prix des matières premières ou la proximité de nouveaux marchés en expansion sont également des facteurs déterminants, tout comme peuvent l'être les avantages au niveau des coûts découlant de législations environnementales moins sévères ou d'avantages fiscaux.

1.3.1

L'externalisation à l'étranger n'est pas un phénomène nouveau. Il s'agit d'une organisation de la production basée sur la division du travail dans le cadre de laquelle les entreprises se spécialisent dans les activités pour lesquelles elles sont les plus performantes et les moins chères. Des technologies de l'information et de la communication bon marché accélèrent cette évolution et rendent possible des échanges internationaux dans nombre de nouveaux secteurs, principalement celui des services.

1.3.2

L'existence d'un réseau de transport peu coûteux et efficace est une condition fondamentale pour l'externalisation à l'étranger.

1.4

Les échanges internationaux de marchandises sont quinze fois plus importants aujourd'hui qu'ils ne l'étaient en 1950 et leur part dans le PIB mondial a triplé. Le commerce international des services atteint désormais un taux de croissance comparable à celui des marchandises et augmente plus vite que le PIB. Les services représentent près de 20 % du commerce international.

1.5

De 1992 à 2003, la part des biens intermédiaires et des biens d'équipement dans les importations totales a augmenté (de 52,9 à 54,1 % pour les biens intermédiaires et de 14,9 à 16,6 % pour les biens d'équipement), alors que celle des biens de consommation a légèrement diminué. Dans le secteur des biens intermédiaires, on observe un net déplacement de la demande vers la catégorie des pièces et composants.

1.6

Au niveau régional également, les tendances évoluent très différemment. Si la part des biens intermédiaires dans les importations de l'UE-15, du Japon et des États-Unis a diminué, elle a en revanche augmenté en Chine, en Asie du Sud-Est et dans les nouveaux États membres de l'UE (UE-10).

1.7

La croissance rapide du commerce des services concerne surtout la catégorie «autres services», qui englobe les services aux entreprises. À cet égard, les secteurs des services financiers, informatiques et de l'information sont particulièrement dynamiques. Les grands gagnants de l'externalisation des services sont les États-Unis, l'UE-15 et l'Inde, cette dernière étant le pays qui, en termes relatifs, en a tiré le plus de bénéfices.

1.8

Dans l'ensemble, l'UE a réussi à conserver sa position de leader dans le commerce mondial, tant dans le secteur des biens que dans celui des services. L'économie européenne occupe la première place dans un grand nombre d'industries à contenu technologique moyen et à forte intensité de capital. Son déficit commercial croissant avec l'Asie et ses performances plutôt faibles en matière de technologies de l'information et de la communication sont toutefois préoccupants.

1.9

L'externalisation à l'étranger intensifie les échanges commerciaux, ce qui améliore d'une manière générale le bien-être. Toutefois, le Comité est conscient que tout le monde n'en ressort pas gagnant et qu'il est la plupart du temps plus facile d'identifier les perdants, dans la mesure où les conséquences de l'externalisation sont immédiates (par exemple des travailleurs perdent leur emploi).

1.10

Étant donné que, dans l'ensemble, le commerce de produits intermédiaires évolue favorablement pour l'UE, il convient d'encourager celle-ci à adopter une attitude positive et active à l'égard d'échanges commerciaux libres mais équitables au niveau mondial ainsi qu'une stratégie active face à la mondialisation, étant entendu que la plus grande attention devra être accordée, au sein de l'UE, à la répartition des bénéfices qui en découlent.

1.11

L'UE doit défendre un commerce mondial qui garantisse des conditions équitables et un développement économique, social et environnemental durable.

1.12

L'UE devrait être consciente de ses points forts et les développer. En particulier, les secteurs à contenu technologique moyen mentionnés ci-dessus font souvent appel à une capacité d'innovation importante. Toutefois, il est également indispensable d'investir dans de nouveaux domaines, tant sur le plan matériel que des idées.

1.13

Compte tenu du développement que l'externalisation à l'étranger exige, des analyses plus nombreuses et différenciées sont nécessaires. Le Comité recommande à la Commission de faire élaborer des analyses qui incluent également des scénarios éventuels pour le moyen et le court terme, et d'y associer les acteurs concernés. Ces analyses peuvent faire partie des enquêtes sectorielles effectuées dans le contexte de la nouvelle politique industrielle et pourraient servir de base aux débats menés dans le cadre du dialogue social sectoriel.

1.14

La stratégie de Lisbonne renferme les principales réponses aux défis que posent à l'Union européenne l'intégration du commerce mondial et l'externalisation croissante de la production à l'étranger. À cet égard, le Comité souligne que les points suivants sont décisifs si l'on veut que l'Europe soit compétitive et capable de s'adapter à la mondialisation:

l'achèvement et le renforcement du marché intérieur;

la promotion de l'innovation;

la stimulation de l'emploi.

2.   Motivation et contexte de l'avis

2.1

Les déplacements des courants d'échange et l'intégration croissante des économies nationales dans le système commercial mondial ont pour origine un certain nombre de facteurs (la libéralisation des échanges, la réduction des coûts de transport et de communication, la hausse des revenus, l'accélération de la division internationale du travail, etc.). Parmi ces facteurs, l'un des plus significatifs est le développement de la répartition internationale de la production qui a entraîné l'augmentation du volume d'échanges des moyens de production intermédiaires (biens et services) à différents stades du processus de fabrication. Cet essor du commerce intermédiaire (appelé ici «externalisation») témoigne de la réorganisation qu'ont subie de nombreux processus de production au niveau mondial et régional et tend à toucher de nombreux secteurs de l'économie des services.

2.2

Les traditionnels avantages comparatifs qui caractérisent la qualification professionnelle des travailleurs et la valeur technologique des produits et processus de production issus des pays industrialisés semblent être confrontés à une pression plus soutenue ayant des origines diverses. L'UE fait face à un contexte qui évolue rapidement et à de nouveaux concurrents qui sont apparus dans de nombreux secteurs industriels et dans le domaine des services à forte valeur ajoutée. Ainsi, les entreprises européennes rencontrent des défis qui se multiplient rapidement.

2.3

Le commerce des produits intermédiaires est l'un des principaux vecteurs de mutations industrielles et correspond à une forme particulière de la division internationale du travail qui remplace rapidement des formes d'internationalisation plus traditionnelles. De toute évidence, la globalisation des marchés associée au progrès technologique a donné lieu à la division du processus de production d'un produit donné en plusieurs étapes successives, en amont et en aval, fréquemment réparties entre plusieurs pays.

2.4

Le présent avis examinera en premier lieu la manière dont les développements dans les pays asiatiques (la Chine et l'Inde pour l'essentiel) ainsi que l'intégration des nouveaux États membres de l'UE déterminent le phénomène d'externalisation des biens/services au niveau mondial. Il analysera ensuite si et, dans l'affirmative, dans quelle mesure, l'UE est fragilisée par l'émergence de nouvelles puissances commerciales mondiales et par le changement que subissent de ce fait les avantages comparatifs, au niveau mondial et plus spécifiquement sur les marchés où l'UE occupe la première place. Ces marchés correspondent essentiellement à des secteurs caractérisés par des technologies de niveau moyen et des biens à forte intensité de capital, comme par exemple l'industrie automobile ou pharmaceutique ou la fabrication de matériels spécialisés.

2.5

Le présent avis ne traitera pas des délocalisations, dans la mesure où ce thème a déjà fait l'objet d'un avis du Comité.

2.6

En résumé, nous sommes ici confrontés à un intéressant phénomène industriel qui obligera les entreprises européennes à développer les avantages concurrentiels dont elles ont bénéficié jusqu'à présent mais qui ne leur sont plus garantis, et ce même dans des secteurs tout à fait nouveaux comme l'économie des services. Si nous sommes en mesure d'analyser ce processus, nous pourrons identifier les secteurs qui sont ou qui deviendront faibles et prévenir les acteurs industriels européens afin qu'ils adoptent de manière anticipée les décisions appropriées.

3.   L'évolution du commerce mondial

3.1

L'analyse qui figure ci-après repose sur une étude publiée dans le numéro 259 d'octobre 2006 des «Economic Papers» de la Direction générale de l'économie et des finances de la Commission européenne (1).

3.1.1

Cette étude porte sur la période de 1990 à 2003, une période intéressante dans la mesure où des changements déterminants pour l'Europe se sont produits au début des années quatre-vingt-dix dans le commerce mondial. La République populaire de Chine a participé plus intensivement au commerce international, et a fini par adhérer à l'Organisation mondiale du commerce. La réalisation du marché commun s'est poursuivie et a permis d'approfondir l'intégration au sein de l'UE. Le marché intérieur s'est étendu à la suite de l'ouverture politique et économique des pays d'Europe centrale et orientale et de leur intégration dans l'UE. Au début de cette période, l'Union était formée de 12 États membres; elle en compte aujourd'hui 27.

3.1.2

Dans le même temps, des changements fondamentaux ont également eu lieu en Inde, en Russie et en Amérique latine (surtout au Brésil), changements qui ont renforcé la position de ces pays dans le commerce mondial.

3.1.3

Au moment où l'étude a été clôturée, aucune donnée fiable n'était encore disponible pour la période après 2003, de sorte qu'il est impossible de donner des informations précises sur l'évolution de la situation. Toutefois, on peut considérer que les tendances exprimées dans l'étude concernant l'UE-10 s'appliquent également à la Bulgarie et la Roumanie. C'est ce que montre l'exemple de l'industrie textile, qui confirme plutôt le rythme de l'évolution mise en évidence.

3.2

Le volume des échanges internationaux de marchandises est quinze fois plus important aujourd'hui qu'il ne l'était en 1950 et leur part dans le PIB mondial a triplé. Le commerce international des services atteint désormais un taux de croissance comparable à celui des marchandises (environ 6 % en moyenne par an depuis 1990) et augmente plus vite que le PIB. Les services représentent près de 20 % du commerce international.

3.2.1

Si l'évolution générale est plutôt stable, on constate toutefois de nettes différences concernant les taux de croissance des différentes catégories de produits et de services.

3.2.2

Comme nous l'avons mentionné dans l'introduction, la division internationale du travail est l'un des principaux vecteurs de l'évolution du commerce mondial. Elle a pour résultat une progression constante du commerce intermédiaire de biens et de services. Cet essor du commerce intermédiaire (p. ex. de biens semi-finis, pièces et composants) ou «externalisation» atteste la réorganisation de nombreux processus de production sur une base mondiale ou régionale plutôt que nationale et reflète l'augmentation considérable du flux d'investissements directs étrangers qui sont passés de moins de 5 % du PIB mondial en 1980 à plus de 15 % de celui-ci à la fin des années quatre-vingt-dix. À cet égard, il faut toutefois souligner que tous les investissements directs étrangers ne sont pas automatiquement liés à l'externalisation.

3.2.3

La mondialisation des systèmes de production qui, en liaison avec le développement de technologies de l'information et de la communication (TIC) efficaces, débouche sur l'externalisation ou, pour utiliser un autre terme, la «spécialisation verticale», gagne également de nombreux domaines du secteur des services.

3.2.4

L'internationalisation des processus de production aux niveaux régional et mondial stimule de plus en plus les échanges entre industries et entre entreprises. Les exportations d'une industrie donnée d'un pays dépendent de plus en plus des importations de biens intermédiaires produits par la même industrie ou la filiale d'une multinationale.

3.3   Aperçu du commerce par stade de production

3.3.1

Sur la base de la classification par grandes catégories économiques des Nations unies (Broad Economic Categories, BEC), les biens peuvent être classés en fonction de leur utilisation finale (p. ex.: biens intermédiaires, de consommation ou d'équipement).

3.3.2

De 1992 à 2003, la part des biens intermédiaires et des biens d'équipement dans les importations totales a augmenté (de 52,9 à 54,1 % pour les biens intermédiaires et de 14,9 à 16,6 % pour les biens d'équipement), alors que celle des biens de consommation a légèrement diminué. Dans le secteur des biens intermédiaires, on observe un net déplacement de la demande vers la catégorie des pièces et composants, surtout dans le secteur de l'industrie automobile et des technologies de l'information et de la communication.

3.3.3

Au niveau régional également, les tendances évoluent très différemment. Si la part des biens intermédiaires dans les importations de l'UE des Quinze, du Japon et des États-Unis a diminué, elle a en revanche augmenté en Chine, en Asie du Sud-Est et dans les nouveaux États membres de l'UE (UE-10).

3.4

Ces observations ne prennent pas en compte le commerce et les tendances dans l'UE des Quinze (15). Il convient toutefois de souligner que c'est de loin au sein de celle-ci qu'ont lieu la plus grande partie des échanges des différents États membres de l'UE (de deux-tiers à 80 %). L'externalisation n'est par conséquent mesurée qu'au commerce extérieur de produits intermédiaires, approche qui s'écarte de la définition habituelle et présente certaines similitudes avec la délocalisation. Aussi pourrait-on, pour établir la distinction, parler «d'externalisation à l'étranger».

4.   Les raisons de l'essor de l'externalisation à l'étranger

4.1

Si les raisons pour lesquelles une entreprise décide de transférer ses activités commerciales à l'étranger en bloc ou en partie sont nombreuses et variées, le faible coût du travail semble actuellement être la principale. Toutefois, d'autres facteurs tels que des matières premières moins chères ou la proximité de marchés en expansion jouent également un rôle important. Une faible productivité, l'incertitude juridique, le manque d'infrastructures, des conditions commerciales défavorables (par exemple, droits de douane, normes) ainsi que l'absence de possibilités de contrôle et de réaction lorsque des problèmes surviennent peuvent influencer négativement une telle décision.

4.2

Le fait que les entreprises déplacent leurs centres de production ou se procurent ailleurs des biens qu'elles fabriquaient auparavant elles-mêmes n'est pas nouveau. Remplacer le travail national par le travail étranger est, depuis des années, une pratique courante dans tous les pays industrialisés. L'externalisation est synonyme de division du travail et d'entreprises qui restent compétitives et gardent la maîtrise des coûts en se spécialisant dans les activités où elles excellent. L'élément nouveau, c'est qu'au cours des dernières années, les technologies de l'information et de la communication (TIC) ont permis d'externaliser toute une série de nouveaux services ainsi que la production de biens. À l'heure actuelle, des technologies de l'information et des communications peu onéreuses permettent aux entreprises d'externaliser la plupart des activités qui peuvent être reproduites/gérées sous forme numérique, par exemple des supports IT, arrière-guichets, centres d'appel, la programmation de logiciels et certaines activités de R&D.

4.2.1

De la même manière, les TIC ont également permis d'externaliser davantage la production de biens, dans la mesure où il est désormais possible de se procurer les intrants intermédiaires auprès de multiples fournisseurs. Les techniques de production «juste à temps» reposent pour une grande part sur les TIC, qui permettent de coordonner simultanément, à des distances plus ou moins grandes, la fabrication et la livraison de pièces et de composantes provenant de producteurs différents.

4.3

Normalement, ce qui est externalisable peut également être externalisé à l'étranger. L'externalisation à l'étranger peut consister dans le transfert de certaines tâches d'une entreprise à l'étranger ou à un fournisseur indépendant.

S'il ne s'agit pas d'un phénomène nouveau, le développement rapide des TIC et la baisse du coût des communications qui en découle ont toutefois introduit dans le circuit du commerce international un grand nombre de nouveaux intrants, en particulier dans le secteur des services. À l'heure actuelle, des services tels que la conception architecturale, la lecture des rayons X en radiologie ou certains services juridiques peuvent être transférés à l'étranger. Le développement des TIC a donc intensifié les échanges commerciaux internationaux en abaissant le coût des transactions et en permettant la commercialisation de nouveaux biens. Ceci n'est pas sans rappeler l'impact du système international de conteneurisation dans les années cinquante, qui a notamment été à l'origine de l'essor du commerce international (2).

4.4

Le présent avis se concentrera sur l'externalisation à l'étranger. Toutefois, dans le débat politique général, cette notion est souvent associée à la question des investissements directs étrangers (IDE). Par exemple, certains développements sont souvent présentés comme des formes d'externalisation/externalisation à l'étranger mais font en réalité partie d'une extension des activités commerciales à l'étranger afin de pourvoir aux besoins des marchés locaux. Pour savoir si le transfert d'une unité de production constitue une externalisation à l'étranger, il faut déterminer quel marché doit être couvert. L'extension des opérations commerciales à l'étranger dans le seul but de servir des marchés étrangers (IDE horizontal) n'aura pas nécessairement, même à court terme, des effets négatifs sur l'emploi dans le pays d'origine. Au contraire, elle peut avoir des conséquences très positives à la fois en termes de profit et d'emploi au siège de l'entreprise.

4.5

Bien entendu, les entreprises ne transfèrent pas leur production uniquement pour bénéficier d'une main-d'œuvre moins chère (salaires et/ou protection sociale moindres) ou pour se rapprocher de certains marchés. Leur démarche peut également être motivée par des coûts moins élevés liés à des législations environnementales moins strictes ou à des avantages fiscaux. Un exemple intéressant d'externalisation récente à l'étranger est celui de l'industrie européenne du ciment. En raison de la forte augmentation du prix de l'énergie en Europe (due notamment au système commercial de l'UE concernant les émissions de CO2) et de la limitation directe des émissions de CO2 appliquée à l'industrie, certains producteurs européens de ciment ont externalisé la production de clinker en Chine.

4.6

Enfin, et c'est un facteur très important, un système de transport efficace et bon marché est une condition fondamentale pour l'externalisation à l'étranger.

5.   L'externalisation de la production des marchandises

5.1

L'externalisation, définie dans l'étude comme le transfert de certaines parties de la production à des fournisseurs externes ou à des établissements propres implantés en dehors de l'UE, reflète les facteurs suivants:

l'internationalisation des structures de production et l'augmentation des investissements étrangers directs mondiaux stimulent les échanges commerciaux au niveau mondial;

la part des biens intermédiaires (surtout les pièces et composants) et des biens d'équipement dans les importations mondiales croît. Partant, les échanges entre industries et entre entreprises augmentent également;

on note une nette augmentation des échanges commerciaux complémentaires entre les pays industrialisés et les pays en développement ou émergents. La part des biens intermédiaires dans les importations dans l'UE des Quinze, aux États-Unis et au Japon diminue, alors qu'elle augmente dans le même temps chez leurs partenaires régionaux moins avancés;

l'externalisation de certaines parties de la production est une caractéristique particulière de l'industrie automobile et des technologies de l'information et de la communication, étant donné que les entreprises de ces secteurs opèrent au niveau mondial.

6.   L'externalisation des services

6.1

Le commerce mondial des services a connu un essor rapide depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Il a atteint des taux de croissance similaires à ceux du commerce de marchandises et progresse donc plus rapidement que le PIB. La part des services dans le PIB global est passée de 3,8 % en 1992 à 5,7 % en 2003.

6.2

Alors que le taux de croissance du secteur des transports et du tourisme est proche de celui du PIB, la catégorie «autres services», qui comprend les services aux entreprises, enregistre une croissance rapide. À cet égard, les secteurs des services financiers, informatiques et de l'information sont particulièrement dynamiques.

6.3

Si l'on compare les résultats nets (les exportations moins les importations) on constate que les grands gagnants de l'externalisation des services sont les États-Unis, l'UE des Quinze et l'Inde, cette dernière étant le pays qui, en termes relatifs, en a tiré le plus de bénéfices.

7.   Les points forts et les points faibles de l'UE

7.1

Depuis 1990, l'UE a réussi à conserver dans l'ensemble sa position de leader dans le commerce mondial, tant dans le secteur des biens que dans celui des services. Cela est dû en partie au fait que la phase d'investissements lourds du processus de rattrapage global du début des années quatre-vingt-dix a favorisé les industries produisant des biens à forte intensité de capital, domaine dans lequel la position de l'Europe est relativement forte. L'UE occupe la première place dans un grand nombre d'industries caractérisées par des technologies de niveau moyen et des biens à forte intensité de capital. Ses points forts sont plus particulièrement les secteurs de la production automobile mondiale, l'industrie pharmaceutique, les équipements spéciaux ainsi que les services financiers et les services aux entreprises.

7.1.1

L'excédent du commerce extérieur de l'UE est passé de 0,5 à 1,5 % du PIB entre 1992 et 2003, et contribue fortement à sa croissance.

7.1.2

L'un des principaux atouts de l'UE est indubitablement son marché intérieur, qui offre non seulement un cadre juridique stable, mais représente également un marché domestique tout aussi grand. Depuis l'élargissement, une partie de l'externalisation a lieu dans les nouveaux États membres.

7.1.3

En ce qui concerne l'externalisation à l'étranger, l'étude constate, dans certains domaines de production tels que l'industrie automobile, une tendance à la concentration régionale (les nouveaux États membres pour l'UE-15, le Mexique et le Brésil pour les États-Unis, l'Asie du Sud-Est et la Chine pour le Japon). Cela s'explique surtout par les coûts liés à l'éloignement géographique (par exemple les frais de transport). Ces coûts jouent cependant un rôle moins important dans les secteurs des nouvelles technologies et des services.

7.2

Dans le même temps, l'étude montre que certains domaines sont motifs à préoccupation. Sur le plan géographique, le déficit commercial avec l'Asie en général ne cesse de croître et, sur le plan technologique, les performances de l'UE en matière de technologies de l'information et de la communication sont plutôt faibles. Un élément particulièrement important à cet égard est le fait que quelques pays en développement aspirent à s'élever rapidement dans la chaîne de valeur et investissent dès lors beaucoup dans la recherche-développement et la formation.

7.2.1

Jusqu'à présent, dans le commerce mondial, l'Asie a principalement rencontré le succès dans des domaines tels que les TIC, qui étaient considérées par les Européens comme relativement moins importantes que l'automobile, l'industrie pharmaceutique ou la chimie. Au cours des quinze dernières années, nombre de pays asiatiques se sont spécialisés dans l'exportation de produits issus des TIC (3). Il faut s'attendre à ce que ces pays, dans le cadre de leur développement ultérieur, se tournent également vers les industries dominées jusqu'ici par l'UE (comme le montre l'exemple de l'industrie textile).

7.2.2

Les structures commerciales de l'UE et de la Chine sont fortement complémentaires, l'UE étant spécialisée dans la moyenne-haute technologie et les biens capitaux, et la Chine se concentrant sur les produits de faible technologie, à forte intensité de main-d'œuvre et en rapport avec les TIC. Cette complémentarité se traduit par des tendances commerciales favorables à l'UE, de nombreux États membres jouissant actuellement d'avantages considérables en ce qui concerne leur pouvoir de fixation des prix par rapport à des puissances commerciales émergentes comme la Chine. Ces conclusions suggèrent que les processus de rattrapage de grandes économies émergentes telles que la Chine peuvent être mutuellement bénéfiques, et engendrer d'importantes hausses du revenu par habitant, tant pour le monde développé que celui en développement.

7.2.3

Actuellement, la délocalisation de services vers l'Inde est (encore) peu significative sur le plan macroéconomique.

7.3

À moyen ou à long terme, l'UE est susceptible d'être confrontée aux problèmes suivants en matière de commerce extérieur:

7.3.1

Les bonnes performances enregistrées par l'UE dans les années quatre-vingt-dix s'expliquent pour une bonne partie par les bénéfices retirés de la première phase, riche en investissements, de la libéralisation du commerce mondial, un scénario qui ne se répétera pas éternellement.

7.3.2

L'UE montre des signes de faiblesse dans un grand nombre de secteurs des technologies de pointe, en particulier les technologies de l'information et de la communication.

7.3.3

L'Asie est en train de devenir un concurrent potentiel dans certains des principaux segments de l'UE. Les Chinois, qui produisent à bas prix, domineront vraisemblablement une large part des industries nécessitant des technologies de niveau moyen et une main-d'œuvre importante. Les conséquences en seront plus importantes pour l'UE que pour les États-Unis ou le Japon.

8.   Les gagnants et les perdants de l'externalisation et de l'externalisation à l'étranger

8.1

L'externalisation à l'étranger génère une intensification des échanges, souvent en ce qui concerne de nouveaux types d'intrants et de nouveaux secteurs. Les études théoriques et empiriques ayant montré que le commerce induit le bien-être, l'externalisation à l'étranger devrait donc permettre d'accroître le bien-être mondial. Cette analyse est toutefois compliquée par le fait que les avantages en matière de coûts qui sont à l'origine de la décision d'externaliser une production à l'étranger peuvent être la conséquence de législations moins sévères en matière de protection de l'environnement et notamment concernant les effets sur l'environnement au niveau global. Toutefois, si tel n'est pas le cas, nous pouvons partir du principe que l'externalisation à l'étranger augmente le bien-être mondial. Par ailleurs, il est notoire qu'en matière d'échanges commerciaux, il y a des gagnants et des perdants. La question qui se pose est de savoir à qui l'externalisation croissante à l'étranger profitera-t-elle en Europe et à qui portera-t-elle préjudice.

8.1.1

Lorsqu'une entreprise décide d'externaliser une tâche spécifique, cette décision peut se révéler être un mauvais choix et ce, pour plusieurs raisons. Il est possible que les clients n'apprécient pas d'être pris en charge par des centres d'appel à l'étranger, que les biens intermédiaires ne présentent pas la qualité requise et ne soient pas livrés aux entreprises dans les délais convenus, que des malentendus liés à des différences culturelles surgissent entre les entreprises et les clients ou au niveau international ou que des informations confidentielles soient dévoilées à des concurrents.

8.1.2

Pour les besoins de notre analyse, nous devons toutefois partir du principe que la décision prise par une entreprise (ou un gouvernement) d'externaliser ou d'externaliser à l'étranger est un succès. Qui seront dès lors les gagnants et les perdants?

8.2   Les gagnants

8.2.1

Les entreprises européennes qui se lancent dans l'externalisation et l'externalisation à l'étranger.

Ces entreprises pourront bénéficier d'une réduction des coûts parfois considérable, principalement en raison d'une main-d'œuvre moins chère. À long terme, elles pourront également avoir accès à de nouveaux effectifs qualifiés, que ce soit directement, au travers du déplacement de leurs propres installations ou indirectement, au travers de l'externalisation à l'étranger des fournisseurs locaux. Par ailleurs, dans certains cas, les entreprises qui ont transféré leurs activités dans des pays européens dont les marchés du travail sont bien réglementés pourront gérer leurs volumes de main-d'œuvre avec plus de souplesse. L'externalisation d'une activité à l'étranger peut également être à l'origine du développement de nouveaux marchés. Grâce aux installations de production locales, des entreprises européennes peuvent proposer des biens et des services à des prix permettant de les vendre dans des pays à faibles salaires.

8.2.2

Les pays européens prestataires de produits et de services externalisés et externalisés à l'étranger.

Depuis l'adhésion de douze nouveaux États membres en 2004 et 2007, l'Union européenne comporte un certain nombre de fournisseurs importants de produits et services externalisés et externalisés à l'étranger. Toutefois, certains pays de l'UE-15, en particulier l'Irlande, ont également tiré profit du fait qu'ils ont accueilli sur leur territoire des activités externalisées. Les avantages de l'externalisation à l'étranger pour les pays qui accueillent les activités concernées sont très clairs: création d'emplois et augmentation des investissements à court terme, transfert de technologies et de compétences au bénéfice des populations locales à long terme.

8.2.3

Les consommateurs des produits et services externalisés et externalisés à l'étranger.

Ces produits et services pourront être moins chers pour les consommateurs. Selon certaines estimations, la mondialisation de l'industrie de matériel informatique a conduit à une baisse de 10 à 30 % du prix des semi-conducteurs et des puces à mémoire dans les années quatre-vingt-dix. Un autre avantage pour le consommateur est l'extension des heures d'ouverture des bureaux dans nombre d'industries de services, par exemple parce le centre d'appel d'une entreprise situé à Bangladore peut être contacté après 17 heures GMT/CET. En fonction du volume que représentent l'externalisation et l'externalisation à l'étranger par rapport au total des biens et services concernés, la baisse des prix fera fléchir l'inflation et, partant, conduira à une augmentation du pouvoir d'achat.

8.3   Les perdants

8.3.1

Les salariés européens qui perdent leur emploi du fait de l'externalisation ou de l'externalisation à l'étranger.

Les salariés qui perdent leur emploi du fait de l'externalisation ou de l'externalisation à l'étranger sont bien évidemment les perdants immédiats de ce système. Ceux qui perdent leur emploi dans ce contexte constituent un petit groupe concentré durement touché par rapport au groupe beaucoup plus nombreux et varié des gagnants de l'externalisation et de l'externalisation à l'étranger qui (à l'exception éventuellement des entreprises) n'en tireront que des bénéfices relativement peu importants sur le plan individuel. Cette dichotomie entre gagnants et perdants met la politique de l'externalisation au niveau de la plupart des autres débats sur le libre-échange et la concurrence étrangère. Grâce au «Fonds européen d'ajustement à la mondialisation» créé par le Conseil sur l'insistance de la Commission, l'UE dispose d'un instrument lui permettant — même si ses moyens sont limités — de prêter main-forte à ce groupe de «perdants».

8.3.2

Les entreprises européennes qui ne sont pas en mesure d'adopter des «bonnes pratiques» en ayant recours à ces mécanismes.

Le problème essentiel auquel est aujourd'hui confrontée l'Europe est la lenteur avec laquelle croît la productivité. La mondialisation s'accélérant, l'externalisation et l'externalisation à l'étranger deviennent un impératif concurrentiel pour un nombre de plus en plus grand d'entreprises. Celles qui ne sont pas en mesure de modifier leurs opérations en ayant recours à l'externalisation et à l'externalisation à l'étranger de certains intrants ou tâches intermédiaires, seront désavantagées sur le plan de la compétitivité par rapport à leurs concurrentes européennes et non européennes en mesure de le faire. Leur croissance risque par conséquent d'être moins rapide, et elles seront poussées par le marché, ou choisiront elles-mêmes, de transférer l'ensemble de leur production en dehors de leur pays d'origine. Dans les deux cas de figure, cette opération s'accompagnera de pertes d'emplois plus importantes que si l'externalisation ou l'externalisation à l'étranger avaient pu être réalisées à un stade plus précoce.

9.   Mesures à prendre et recommandations

9.1

Le Comité a eu l'occasion de se prononcer à diverses reprises dans le passé sur le thème du commerce mondial et de la mondialisation (4), et plus récemment dans un avis intitulé «Les défis et chances de l'UE dans le contexte de la globalisation» (REX/228 — Rapporteur: M. MALOSSE). Dans cet avis, le Comité s'est notamment prononcé en faveur d'une stratégie commune face à la mondialisation, d'un État de droit planétaire, d'une ouverture commerciale équilibrée et responsable, d'une intégration accélérée et d'une mondialisation à visage humain.

9.1.1

Étant donné que, dans l'ensemble, le commerce de produits intermédiaires évolue favorablement pour l'UE, il convient d'encourager celle-ci à adopter une attitude positive et active à l'égard d'échanges commerciaux libres au niveau mondial ainsi qu'une stratégie active face à la mondialisation, étant entendu que la plus grande attention devra être accordée à la répartition des bénéfices qui en découleront ainsi qu'au débat politique. Dans le cadre de celui-ci, l'UE doit défendre un commerce mondial qui garantisse des conditions équitables et un développement économique, social et environnemental durable.

9.1.2

L'UE doit davantage orienter sa politique commerciale vers l'amélioration des normes sociales et environnementales au niveau mondial et adopter une approche qui conjugue solidarité et intérêts individuels, dont tous les citoyens puissent tirer profit. Il y a lieu de poursuivre la suppression des barrières non tarifaires aux échanges, surtout dans les secteurs où des entreprises européennes sont discriminées. S'agissant de l'externalisation à l'étranger, le Comité insiste sur la nécessité d'améliorer la protection de la propriété intellectuelle.

9.1.3

Le débat en cours sur le changement climatique, les émissions de gaz à effet de serre et le développement durable aboutira de plus en plus à une réévaluation de nombreux aspects de la mondialisation, y compris le commerce. Les pays en développement cherchent déjà à obtenir davantage d'aide, ou à développer leurs capacités, en matière d'utilisation de technologies plus propres. L'on veillera à recourir à des modes de transport plus propres, ayant une meilleure efficacité énergétique, en particulier le transport maritime, le cas échéant. Les considérations environnementales auront davantage de poids dans les décisions relatives aux futurs lieux d'implantation des usines et à la distribution ultérieure des marchandises. Le Comité se tourne dès lors vers la Commission pour qu'elle entreprenne, dans les domaines où elle ne le fait pas déjà, des études distinctes sur le commerce en tant qu'élément du vaste débat sur le changement climatique.

9.2

L'UE devrait être consciente de ses points forts et les développer. En particulier, les secteurs à contenu technologique moyen mentionnés plus haut font souvent appel à une capacité d'innovation très importante. Toutefois, il est également indispensable d'investir dans de nouveaux domaines, que ce soit au niveau matériel ou des idées. Le 7e programme-cadre (2007-2012) fournit à cet égard quelques pistes. Il convient de poursuivre sur cette voie et de l'approfondir (5).

9.3

Compte tenu du développement spectaculaire de l'externalisation à l'étranger en particulier, il est urgent d'effectuer des analyses plus nombreuses et différenciées (sur base sectorielle, régionale, etc.), d'autant que l'étude mentionnée dans le présent avis ne fournit qu'un aperçu très général et ne prend pas en compte les évolutions récentes.

9.3.1

Les derniers élargissements de l'Union européenne ont créé de nouvelles ouvertures pour l'externalisation vers les nouveaux États membres. Sachant que dans ce cas de figure, les gagnants comme les perdants font partie de la Communauté, il convient d'analyser le phénomène en profondeur. Si l'on considère que l'externalisation vers les nouveaux et les futurs États membres peut contribuer utilement à la stratégie de cohésion, la logique veut que l'on étudie également son incidence sur l'orientation future des instruments financiers communautaires correspondants.

9.3.2

Il n'existe pas non plus d'études détaillées concernant les autres conséquences de l'externalisation sur l'emploi et les qualifications.

9.3.3

Le Comité recommande à la Commission de faire réaliser des analyses qui incluent également des scénarios éventuels pour le moyen et le court terme et d'y associer les acteurs concernés. Les enquêtes réalisées auprès des décideurs dans les entreprises donnent parfois une vision des choses différente de celle que présentent les statistiques commerciales.

9.3.4

Ces analyses peuvent faire partie des enquêtes sectorielles menées dans le cadre de la nouvelle politique industrielle et pourraient servir de base aux débats menés dans le contexte du dialogue social sectoriel, qui disposerait ainsi d'un instrument supplémentaire pour maîtriser et anticiper les changements (cf. à cet égard différents avis de la CCMI et du CESE).

9.4

La stratégie de Lisbonne fournit les principales réponses aux défis que posent à l'Europe l'intégration du commerce mondial et l'externalisation croissante de la production européenne à l'étranger. Le CCMI souligne à cet égard que les points suivants sont décisifs si l'on veut que l'Europe soit compétitive et capable de s'adapter à la mondialisation:

l'achèvement et le renforcement du marché intérieur;

la promotion de l'innovation;

la stimulation de l'emploi.

9.4.1

La poursuite du développement et de l'élargissement du marché intérieur dans le but d'optimiser la libre-circulation des marchandises, des services, des personnes et des capitaux contribuera de manière significative au renforcement de la concurrence, ce qui stimulera les entreprises, l'innovation et la croissance.

9.4.2

L'achèvement du marché intérieur ne pourra être réalisé que si la législation est effectivement et correctement mise en œuvre et entrée en vigueur. La Commission et le Conseil doivent veiller à ce que les États membres respectent les délais prévus en la matière.

9.4.3

Pour que l'Europe soit compétitive sur le marché mondial, il est crucial de développer les technologies et d'attirer l'innovation dans l'Union. Ceci permettra d'augmenter le nombre des emplois hautement qualifiés dans l'UE et, partant, de rendre l'Union plus attrayante pour les entreprises et les investissements.

9.4.4

Pour encourager l'innovation, il est indispensable de disposer d'une procédure de brevet abordable et simple. Actuellement, le brevet européen visant à protéger une invention est considérablement plus cher et plus compliqué à obtenir que le brevet américain. Il y lieu de mettre en œuvre un brevet communautaire abordable.

9.4.5

Il convient de mener une action concertée pour atteindre le plus rapidement possible l'objectif des 3 % du PIB fixé à Lisbonne concernant les dépenses nationales pour la recherche et le développement. Comme l'indiquent les chiffres clés de la science, de la technologie et de l'innovation publiés par la Commission le 11 juin 2007, 85 % des retards dans la réalisation de cet objectif sont imputables au faible niveau d'investissement des entreprises. Simultanément, une haute intensité de R&D ne peut être atteinte que si l'engagement important du secteur privé s'accompagne d'investissements publics élevés. Le secteur public de l'UE (c'est-à-dire les États membres) doit donc continuer à investir dans la R&D, afin que des activités de recherche-développement puissent ensuite se déployer dans le secteur privé. Par ailleurs, les gouvernements devraient proposer des mesures de financement innovantes afin d'encourager les investissements dans la recherche et le développement.

9.4.6

Les investissements dans les technologies de l'information et de la communication renforceraient l'efficacité de la gestion et accéléreraient les relations entre les consommateurs et les marchés en Europe. Le développement d'un réseau global de connexions internet à large bande doit être considéré comme une tâche prioritaire.

9.5

Dans le contexte ainsi tracé, la politique de l'emploi revêt une importance particulière. D'une part, il s'agit d'offrir de nouvelles possibilités d'emploi à ceux qui perdent leur travail du fait de l'externalisation et de l'externalisation à l'étranger. D'autre part, il y a lieu de maintenir les exigences en matière de qualification et de capacité d'adaptation des travailleurs. Les travailleurs qui perdent leur emploi du fait d'une délocalisation ont toujours plus de mal à retrouver un nouveau poste. Il y a seulement quelques années, il était en règle générale possible de trouver un nouvel emploi en trois à quatre mois. Actuellement, la recherche d'emploi peut prendre plusieurs années, dans la mesure où de plus en plus d'activités productives à forte intensité de main-d'œuvre sont délocalisées et que très peu de solutions de rechange adéquates sont proposées. La clé de la compétitivité de l'Europe est une main-d'œuvre flexible, bien formée et motivée.

9.5.1

Aussi le Comité insiste-t-il à nouveau sur les conclusions du rapport de Wim KOK (6) concernant:

une meilleure capacité d'adaptation des travailleurs et des entreprises pour leur permettre de mieux anticiper le changement;

la participation d'un plus grand nombre de travailleurs au marché de l'emploi;

des investissements plus nombreux et plus efficaces dans le capital humain.

9.5.2

Dans un monde en mutation rapide, les technologies sont dépassées aussi rapidement qu'elles apparaissent. Les gouvernements européens doivent faire en sorte que leurs citoyens soient capables de s'adapter à ce nouvel environnement pour que tous aient les mêmes chances. Il est urgent de disposer de politiques sociales et de l'emploi modernes qui visent à promouvoir les possibilités d'emploi et l'employabilité en prévoyant des compétences et des mesures permettant d'améliorer les capacités d'adaptation, de reconversion et de mobilité géographique des travailleurs. Pour pouvoir relever ce défi ambitieux, il est fondamental de disposer de politiques nationales en matière d'éducation et de compétences définies et mises en œuvre par les États membres et reposant sur l'investissement dans la formation et l'apprentissage tout au long de la vie afin de donner aux citoyens les armes nécessaires pour pouvoir s'adapter aux changements et aux nouveaux avantages comparatifs. Comme l'a souligné l'Agenda de Lisbonne, ceci devrait englober «les nouvelles compétences de base, telles que les compétences en technologies de l'information, langues étrangères, culture technologique, esprit d'entreprise et aptitudes sociales».

9.6

Si la qualification des travailleurs est importante, il est tout aussi essentiel que l'externalisation à l'étranger ne conduise pas à une fuite accrue du savoir-faire. Il convient de maintenir un environnement qui fasse de l'Europe un pôle d'attraction pour la recherche et le développement. À cette fin, il y a lieu de redéfinir le rôle des universités (principalement dans les domaines scientifiques et techniques), leur interconnexion au niveau européen ainsi que leur collaboration avec le secteur économique.

9.7

La compétitivité de l'Europe sera essentiellement déterminée par une économie innovante basée sur la connaissance et un modèle social solidaire qui garantit une cohésion solide. En effet, elle ne peut pas lutter contre des concurrents moins-disants en matière de normes sociales et environnementales.

Bruxelles, le 26 septembre 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Economic Papers, numéro 259: «Global trade integration and outsourcing: How well is the EU coping with the new challenges» par Karel Havik et Kierian McMorrow.

(2)  La conteneurisation est un système intermodal de transport de cargaisons générales ou de produits en lots utilisant des conteneurs répondant aux normes ISO. Les marchandises peuvent être aisément transportées d'un endroit à l'autre dans ces conteneurs, qui peuvent être chargés sur des bateaux, des camions, des trains ou des wagons, et des avions. Le concept de conteneurisation est considéré comme une innovation essentielle en matière de logistique, ayant révolutionné le transport de marchandises au XXe siècle et contribué à une baisse spectaculaire des prix du transport.

(3)  Les sites de production bon marché, qui, souvent, traitent aussi des produits coûteux de haute technologie et utilisent du savoir-faire en provenance des États-Unis ou d'Europe, ont permis de commercialiser à un prix abordable des articles tels que les ordinateurs ou les téléphones mobiles, auxquels ont ainsi accès une large catégorie de consommateurs.

(4)  

REX/182 — «La dimension sociale de la mondialisation», mars 2005

REX/198 — «Préparation de la 6e conférence ministérielle de l'OMC», octobre 2005

SOC/232 — «Qualité de la vie professionnelle, productivité et emploi face à la mondialisation et aux défis démographiques», septembre 2006

REX/228 — «Les défis et chances de l'UE dans le contexte de la globalisation», mai 2007.

(5)  Voir à ce sujet l'avis du CESE (INT/269) sur le 7e programme-cadre, décembre 2005.

(6)  Rapport de la task-force pour l'emploi présidée par M. Wim KOK, novembre 2003.

La task-force a commencé son travail en avril 2003 et a rendu son rapport à la Commission le 26 novembre 2003. La Commission et le Conseil ont intégré les résultats du rapport dans leur Rapport conjoint sur l'emploi pour le Conseil de printemps 2004, qui a confirmé la nécessité qu'une action décisive soit menée par les États membres, conformément aux propositions de la task-force.


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