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Document JOC_2002_203_E_0001_01

    Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires [COM(2002) 149 final — 2002/0072(COD)] (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

    JO C 203E du 27.8.2002, p. 1–5 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

    52002PC0149

    Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires /* COM/2002/0149 final - COD 2002/0072 */

    Journal officiel n° 203 E du 27/08/2002 p. 0001 - 0005


    Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires

    (présentée par la Commission)

    EXPOSÉ DES MOTIFS

    1. INTRODUCTION

    L'économie de la connaissance repose sur l'innovation et le capital humain et requiert une plus grande capacité d'adaptation de la part des entreprises et des travailleurs. Réussir la transition vers cette économie, impose donc de promouvoir, en association avec les partenaires sociaux, des formules plus souples d'organisation du travail et de réformer l'environnement réglementaire, contractuel et légal, dans le but de mieux concilier flexibilité et sécurité mais aussi de créer davantage d'emplois et de meilleure qualité. Dans ce contexte, les lignes directrices pour l'emploi 2001 [1] et les Grandes Orientations de politique économique pour 2001 [2] préconisent le développement de formes diverses et souples d'emplois et de contrats de travail.

    [1] DÉCISION DU CONSEIL du 19 janvier 2001, JOCE du 24 janvier 2001

    [2] Recommandation du Conseil du 15 juin 2001 sur les grandes orientations des politiques économiques des États membres et de la CommunautéJOCE n° L 179 du 02/07/2001 p. 0001 - 0045

    Ces mesures contribueront à la mise en oeuvre de la stratégie décidée par le Conseil européen de Lisbonne en mars 2000 qui vise à faire de l'Union, l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale. L'Union se donnera ainsi les moyens d'atteindre le plein-emploi d'ici à 2010, à savoir un taux d'emploi global de 70 %, d'au moins 60 % pour les femmes et 50% pour les travailleurs vieillissants.

    Comme le préconise l'Agenda social proposé par la Commission et les orientations adoptées lors du Conseil européen de Nice, l'Union doit s'appuyer sur tous les instruments disponibles pour stimuler la création d'emplois de qualité, diversifier les formes d'emploi et concilier flexibilité et sécurité.

    L'une des actions pour parvenir à cet objectif prioritaire était de s'appuyer sur les négociations des partenaires sociaux sur le travail intérimaire et après l'échec des négociations, définir un cadre comparable à ceux qui s'appliquent d'ores et déjà au travail à durée déterminée et au travail à temps partiel.

    2. LA DIMENSION COMMUNAUTAIRE DU TRAVAIL INTÉRIMAIRE

    1.Vue d'ensemble du secteur intérimaire dans l'Union européenne

    Selon une étude [3] récente de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail , basée sur l'étude [4] de la Confédération Internationale des Entreprises de Travail Temporaire (CIETT), la part du travail intérimaire en Europe n'a cessé de s'accroître depuis 10 ans, avec un taux de croissance annuel estimé à 10 % entre 1991 et 1998, même si sa part dans l'emploi total reste encore réduit (2,1 millions de personnes en moyenne équivalent temps plein, soit 1,4 % de l'emploi total en Europe, en 1998).

    [3] Temporary agency work in the European Union, Dublin, 2002 (non encore publiée).

    [4] Orchestrating the evolution of Private Employment Agencies towards a stronger society, Bruxelles, 2000. Les chiffres cités ci-après sont tirés de cette étude. Il n'existe pas aujourd'hui de données européennes harmonisées concernant le travail intérimaire : l'enquête ECHP fournit en effet des chiffres sur les contrats à durée déterminée ou de courte durée (question PE024), qui représentent une catégorie plus large que le seul travail intérimaire.

    Cette croissance rapide répond à quatre raisons majeures qui font du travail intérimaire un élément-clé de renforcement de la capacité d'adaptation du marché du travail, des entreprises et des travailleurs :

    * De façon générale, les entreprises ont vu s'accroître les exigences de flexibilité dans la gestion de la main-d'oeuvre, notamment en raison des fluctuations plus rapides et plus amples de leur carnet de commandes. Le travail intérimaire peut ainsi servir à compenser une insuffisance de personnel permanent ou une hausse temporaire de la charge de travail, ce qui est particulièrement important pour les PMEs, plus sensibles que les autres entreprises aux coûts d'embauche et de licenciement d'employés permanents. Mais cet avantage lié au recours au travail intérimaire peut être amoindri si son acceptabilité sociale et sa qualité apparaissent médiocres. Or, les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises (PMEs), ont un besoin croissant de travailleurs qualifiés et aux compétences plus diversifiées, y compris sur une base temporaire. Un travail intérimaire de qualité permet ainsi de mieux répondre aux besoins de flexibilité et d'adaptation de l'économie d'aujourd'hui. Du point de vue des travailleurs intérimaires eux-mêmes, cette forme d'emploi est souvent un moyen d'intégrer le marché du travail ou d'y revenir, en particulier pour les jeunes. Selon les États membres, entre 24 et 52 % des personnes qui deviennent intérimaires pour la première fois étaient inactives auparavant, parce qu'elles étaient au chômage ou encore en formation initiale.

    * Plus récemment, le recours au travail intérimaire a été aussi motivé par les pénuries que rencontrent les entreprises dans certaines qualifications, en premier lieu dans les métiers liés aux technologies de l'information. Ce phénomène s'inscrit dans le contexte général d'un déficit européen dans ces qualifications, que veut combler le "Plan d'action sur les Compétences et la Mobilité" que la Commission a soumis au Conseil européen de Barcelone.

    * Enfin, l'environnement réglementaire s'est profondément assoupli: aujourd'hui, la majorité des États membres ont désormais adapté leur cadre réglementaire à cette forme d'emploi, généralement dans le sens d'une plus grande souplesse, alors que certains l'interdisaient, il y a encore quelques années.

    En dépit de cette croissance globale, le travail intérimaire est développé très inégalement dans l'Union. Selon l'étude susvisée, environ 80 % des travailleurs intérimaires étaient employés en 1999 dans quatre États membres : les Pays-Bas, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Cependant, lorsque l'on considère leur part dans l'emploi total, l'importance relative de cette forme d'emploi est différente : aux Pays-Bas, les travailleurs intérimaires représenteraient 4,0% de la main-d'oeuvre, suivis par le Luxembourg (3,5%), la France (2,7%), , , le Royaume-Uni (2,1%), la Belgique (1,6%), le Portugal (1%), l'Espagne et la Suède (0,8 %), l'Autriche, l'Allemagne et le Danemark (0,7 %) , l'Irlande et la Finlande (0, 60%), et l'Italie (0,2%).

    Cette diversité dans le poids du travail intérimaire se reflète dans la structure des emplois concernés, même si tous les secteurs d'activité y recourent. Au Royaume-Uni, par exemple, 80% de l'activité des agences d'intérim concernent les services et le secteur public, alors qu'en France, 75% sont liés à l'industrie manufacturière et au Bâtiment et Travaux Publics.

    2. Cadres normatifs nationaux

    La caractéristique essentielle et commune du travail intérimaire est une "relation triangulaire" entre une entreprise utilisatrice, un salarié et une agence. Cependant, au-delà de ce schéma de base, la situation juridique varie considérablement entre les États membres. Dans de nombreux États, les conditions d'emploi d'intérimaires et les activités des entreprises de travail temporaires sont strictement réglementées. Dans d'autres cas, comme par exemple au Royaume Uni ou en Irlande, le cadre législatif et réglementaire est très souple.

    La nature de la norme applicable diffère également d'un État à l'autre. Dans certains cas, comme en Allemagne par exemple, la régulation du secteur relève presque exclusivement de la législation. Très fréquemment, l'on assiste à une combinaison de dispositions législatives et conventionnelles mais il existe aussi des situations dans lesquelles des codes de conduite encadrent l'activité.

    - On peut résumer en classant les États en trois catégories:

    1. Les États qui n'ont pas de définition de l'intérim ou qui ont une réglementation spécifique très limitée : Danemark, Finlande, Irlande et Royaume-Uni.

    2. Les États qui possèdent une définition et une réglementation spécifiques de l'intérim, portant principalement sur la relation liant l'entreprise de travail intérimaire, l'entreprise utilisatrice et le travailleur : Allemagne, Autriche, Espagne, Luxembourg, Pays-Bas et Suède.

    3. Les États qui ont élaboré une définition et une réglementation spécifiques de l'intérim, couvrant non seulement la relation liant l'entreprise de travail intérimaire, l'entreprise utilisatrice et le travailleur mais également le statut du travailleur intérimaire : Belgique, France, Italie, Portugal et Grèce.

    - S'agissant de la réglementation proprement dite applicable en matière de conditions de travail, au-delà de la grande diversité rencontrée, quelques traits communs peuvent être dégagés:

    - L'entreprise de travail intérimaire est en général considérée comme l'employeur du travailleur intérimaire, qui est alors un salarié Le Royaume-Uni et l'Irlande font ici exception : dans certains cas, les agences d'intérim garantissent explicitement aux personnes recrutées le statut de salarié ; dans d'autres cas, les travailleurs intérimaires sont considérés comme des indépendants. Enfin, il ressort de certaines décisions de tribunaux que les travailleurs intérimaires sont liés par un contrat sui generis, car ils ne sont salariés, ni de l'entreprise de travail intérimaire, ni de l'entreprise utilisatrice.

    - En sa qualité d'employeur, l'entreprise de travail intérimaire est tenue à toutes les obligations qui en découlent. Cependant, la relation triangulaire propre à l'intérim induit fréquemment un partage de responsabilités avec l'entreprise utilisatrice, qui est parfois garante du paiement des salaires et des charges sociales, et doit appliquer les règles d'hygiène et de sécurité. Mais c'est généralement au sein de l'entreprise de travail intérimaire que les travailleurs intérimaires peuvent faire valoir leurs droits collectifs. Cependant, dans certains États membres, sous certaines conditions, ils peuvent exercer des droits dans les deux (Autriche, France, Pays-Bas).

    - Les travailleurs intérimaires sont recrutés sur la base d'un contrat à durée déterminée. En Allemagne et en Suède, en revanche, les contrats à durée indéterminée constituent la norme. Dans certains États, notamment en Italie et aux Pays-Bas, les contrats à durée déterminée se transforment en contrats à durée indéterminée sous certaines conditions. Aux Pays-Bas par exemple, dès que le travailleur intérimaire a travaillé pour plus de 18 mois pour la même entreprise utilisatrice ou plus de 36 mois pour la même agence d'intérim, le contrat de travail entre l'agence et le travailleur est considéré comme un contrat à durée indéterminée.

    - Les travailleurs intérimaires perçoivent une rémunération au moins égale à celle que percevrait un travailleur permanent de l'entreprise effectuant des tâches identiques ou similaires. Un tel principe peut ainsi être dégagé des dispositions législatives, conventionnelles ou de codes de conduite propre au secteur en vigueur en Autriche, aux Pays-Bas, en Belgique, en France, en Italie, au Portugal, en Espagne, au Luxembourg et en Grèce.

    - On ne peut remplacer un salarié gréviste par un travailleur intérimaire. Cette règle est en effet très fréquemment reprise par les législations, dispositions collectives ou les codes de conduite applicables.

    - L'accès aux services sociaux de l'entreprise utilisatrice est une pratique prévue très souvent par la législation applicable.

    3. Travail intérimaire et qualité de l'emploi

    La "stratégie de Lisbonne" appelle l'Europe à créer davantage d'emplois, et des emplois de meilleure qualité. Le travail intérimaire se trouve au coeur de ces exigences :

    - il permet d'accroître le volume global d'emplois en étant particulièrement adapté aux exigences renforcées de flexibilité et de souplesse de l'économie contemporaine,

    - mais, par ailleurs, il ne pourra être durablement un moteur de création d'emplois sans une attractivité suffisante pour les travailleurs et les demandeurs d'emplois, c'est à dire s'il n'offre pas des emplois de qualité, en dépit de son caractère temporaire (que n'efface pas le lien entre l'agence et le travailleur). Cet enjeu de qualité ne cessera de se renforcer dans les années à venir, qui verront en particulier se réduire la population en âge de travailler (- 9 millions de personnes dans l'Union entre 2000 et 2025).

    Dans ce contexte, une comparaison des conditions de travail s'avère nécessaire entre la qualité de l'emploi du travailleur intérimaire et celle du travailleur qui, dans l'entreprise utilisatrice, accomplit des tâches semblables et que, par exemple, le travailleur intérimaire vient épauler ou remplacer pendant la durée de sa mission. Les conclusions du Conseil européen de Stockholm [5], développées et précisées par la Communication de la Commission "Politiques sociales et de l'emploi : un cadre pour investir dans la qualité" [6], ont dégagé plusieurs dimensions du concept de qualité qui permettent d'établir cette comparaison.

    [5] §26: "l'égalité des chances pour les personnes handicapées, l'égalité entre les hommes et les femmes, une organisation du travail satisfaisante et souple permettant de mieux concilier vie professionnelle et vie privée, l'éducation et la formation tout au long de la vie, la santé et la sécurité sur le lieu de travail, la participation des travailleurs et la diversité dans la vie professionnelle."

    [6] COM (2001) 313 final

    S'agissant de la qualité intrinsèque de l'emploi sous contrat de travail intérimaire, il convient d'admettre tout d'abord que de nombreux éléments caractérisant la qualité d'un emploi ne sont pas liés au statut de la relation de travail, mais au secteur d'activité ou à la nature des tâches accomplies. Ainsi, selon une étude de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail [7], si 70% des travailleurs intérimaires estimaient, en 1996, avoir des problèmes d'hygiène et de sécurité, cette proportion est égale à celle des travailleurs en contrats à durée déterminée (CDD) (70%) et n'est guère différente de celle des travailleurs en contrats à durée indéterminée (CDI) (73%). L'écart est plus important pour le contenu du travail, que 76% des travailleurs en CDI trouvent intéressant, contre 70% des intérimaires - mais on doit ici prendre en compte les différences entre les deux catégories (notamment l'ancienneté sur le marché du travail).

    [7] Les conditions de travail dans l'Union européenne, Luxembourg, 1996

    La différence essentielle de qualité intrinsèque semble être liée aux rémunérations. Il n'existe pas de données sur le rapport entre le salaire perçu par des intérimaires et celui des travailleurs de l'entreprise utilisatrice. Cependant, un certain nombre de chiffres disponibles indiquent que les travailleurs intérimaires ont tendance, au moins en moyenne, à percevoir des rémunérations inférieures..

    Dans l'étude nationale consacrée par la Fondation européenne à l'Autriche, les estimations indiquent que dans certains cas la différence entre le salaire défini par la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice et le salaire réel des travailleurs intérimaires peut représenter jusqu'à 30%. Par contraste, une autre étude qui compare le revenu brut mensuel moyen d'un travailleurs intérimaires avec le revenu moyen pour le même type de travail, estime que l'écart salarial ne serait que d'environ 5%.

    Les chiffres contenus dans un rapport parlementaire officiel sur la situation du travail intérimaire en Allemagne indiquent que les travailleurs intérimaires gagneraient entre 22% et 40% moins que le salaire moyen perçu par les « autres travailleurs ». Cependant, en Allemagne, les travailleurs intérimaires ont plus souvent des contrats à durée indéterminée, et sont aussi rémunérés entre deux missions, ce qui ne permet pas une comparaison directe entre leur revenu et celui d'autres travailleurs.

    Des estimations professionnelles pour l'Espagne (Observatoire européen des relations industrielles, 28 juillet 1999) indiquaient qu'avant l'entrée en vigueur en 1999 d'une nouvelle loi (qui dispose que les salaires des travailleurs intérimaires doivent être égaux à ceux prévus par la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice), les salaires payés par les agences d'intérim étaient de 10% à 15% plus bas que dans les entreprises utilisatrices.

    Pour le Royaume-Uni, les chiffres cités dans le rapport national de l'étude de la Fondation de Dublin montrent que le revenu hebdomadaire moyen des travailleurs intérimaires à plein-temps représente 68% du revenu hebdomadaire moyen de l'ensemble des salariés, alors que le chiffre correspondant, pour les personnes à temps plein sous contrat à durée déterminée, est de 89%.

    Enfin, le caractère volontaire ou non du travail intérimaire varie sensiblement. Ainsi, près d'un tiers des travailleurs intérimaires déclarent une préférence pour ce type d'emploi, en raison généralement de la souplesse qu'il comporte, de la liberté de choix de l'employeur et de la possibilité d'acquérir une expérience professionnelle variée et de renforcer ainsi son employabilité.

    Concernant la caractéristique des emplois touchant à la formation tout au long de la vie, on peut noter que les travailleurs intérimaires participent sensiblement moins à la formation professionnelle continue (leur taux de participation serait d'environ 20%) que les travailleurs sous CDI (36%) ou même sous CDD (27%). Les entreprises utilisatrices, comme les agences d'intérim elles-mêmes, ont en effet peu d'incitations à leur offrir une formation professionnelle, étant donné le caractère par définition temporaire de leurs missions. Il existe cependant des dispositifs, destinés à améliorer l'accès à la formation des intérimaires, qui sont volontaires (comme au Royaume-Uni) ou imposés par les conventions collectives ou la loi (comme en France, en Belgique, en Espagne et en Italie).

    S'agissant de l'égalité entre hommes et femmes, le travail intérimaire présente ici des visages très différents selon les États membres. Certains, principalement ceux où cette forme d'emploi concerne majoritairement l'industrie et le Bâtiment et les travaux publics, voient une prédominance des hommes : c'est le cas de l'Autriche (87%), de l'Allemagne (80%), de la France (74%), du Luxembourg (77%), de l'Espagne (62%) et de la Belgique (60%). D'autres - les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni- connaissent un relatif équilibre entre les genres. En Finlande et en Suède, en revanche, les femmes sont très majoritaires, avec environ 80% de l'ensemble des travailleurs intérimaires.

    En matière de flexibilité et sécurité, le travail intérimaire offre aux entreprises et aux salariés concernés une souplesse évidente dans la gestion de l'emploi. Cette souplesse est mise en lumière par la durée des missions, dont l'immense majorité n'excède pas 6 mois. En France et en Espagne, d'ailleurs, 80% des missions durent au plus un mois. L'Autriche et les Pays-Bas sont ici des exceptions, puisque les missions de plus de 6 mois concernent respectivement 30% et 17% du total.

    La question fondamentale est de savoir si l'intérim peut déboucher sur des relations de travail plus stables et plus longues, favorisant ainsi une certaine sécurité du salarié ou si elle maintient les salariés concernés dans une relation par nature précaire, susceptible de générer une insécurité permanente. Les chiffres [8] donnent lieu à un certain optimisme : selon les pays, entre 29 et 53% des intérimaires trouvent un CDI dans l'année qui suit leur embauche par l'agence d'intérim.

    [8] CIETT, 2000, op.cit.

    S'agissant enfin de la santé et de la sécurité, la troisième enquête européenne sur les conditions de travail (2000) de la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail montre que les conditions de travail des travailleurs intérimaires sont plus mauvaises que les travailleurs soumis à d'autres types de contrats de travail. Les travailleurs intérimaires sont plus exposés aux risques physiques (postures pénibles, vibrations, bruit) et ont à faire face à une intensité du travail et à des cadences plus élevées que les travailleurs sous CDI ou sous CDD.

    3. JUSTIFICATION DE L'INITIATIVE:

    1. Les initiatives précédentes:

    La présente directive s'inscrit dans la continuité de diverses propositions législatives précédentes et des négociations récentes entre les partenaires sociaux, (juin 2000 à mai 2001) qui n'ont pas débouché sur un accord. La Commission a constaté que ces négociations avaient permis de dégager de nombreuses positions communes qui laissaient entrevoir que les parties avaient en fait été très proches d'un consensus. C'est pourquoi elle a souhaité proposer sans tarder un texte de directive qui reprenne l'acquis des négociations et formule des dispositions susceptibles de lever les points de blocage restants.

    A. Premières initiatives de la Commission:

    Dès le début des années 1980, le travail intérimaire est devenu une composante importante du fonctionnement du marché du travail en Europe, en relation avec la recherche de flexibilité des entreprises dans la gestion de l'emploi.

    Face à ce phénomène, le Conseil et le Parlement avaient adopté, il y a maintenant plus de vingt ans des résolutions [9], dans lesquelles ils soulignaient la nécessité d'entreprendre une action communautaire en vue notamment d'encadrer la pratique du travail intérimaire et d'assurer la protection des travailleurs concernés. En 1982, la Commission soumettait à ces deux institutions une proposition de directive en ce sens. Cette proposition, qui a été modifiée en 1984, ne fut jamais adoptée.

    [9] JO n° C 2 du 4.01.1980, p.1 et JO n° C 260 du 12.10.1981, p. 54.

    Par la suite, la Commission a proposé en 1990 un socle de dispositions fondamentales visant à assurer un minimum de cohérence entre ces différentes formes de contrats. Elle proposait alors trois directives du Conseil sur le travail atypique [10] qui couvraient le travail à temps partiel, les contrats à durée déterminée et l'intérim. Cette action s'inscrivait dans le cadre du programme d'action associé à la Charte communautaire des droits fondamentaux des travailleurs qui avait indiqué que ces nouvelles conditions de vie et de travail (à savoir le travail à durée déterminée, le travail à temps partiel, le travail intérimaire et le travail saisonnier) devaient faire l'objet d'une "harmonisation par le haut".

    [10] COM (90) 228 final du 29.06.1990, JO C 224 du 8.9.1990, p8.

    Deux des projets présentés par la Commission avaient pour objet d'accorder aux salariés concernés une série étendue de droits à l'égalité de traitement avec les salariés à temps plein et à durée indéterminée. Le troisième concernait les travailleurs temporaires et visait à leur garantir les mêmes conditions d'hygiène et de sécurité que les travailleurs de l'entreprise utilisatrice. Seule cette dernière proposition a abouti en 1991 par l'adoption de la directive 91/383/CE du Conseil du 25 juin 1991 complétant les mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire.

    B. Consultation des partenaires sociaux

    Vu l'absence de progrès au sein du Conseil des initiatives décrites ci-dessus, la Commission a décidé d'engager la procédure prévue à l'article 3 de l'accord sur la politique sociale annexé au protocole (n° 14) sur la politique sociale annexé au traité instituant la Communauté européenne. Ainsi, le 27 septembre 1995, elle a donné son approbation à la consultation des partenaires sociaux conformément à l'article 3, paragraphe 2, dudit accord sur la flexibilité du temps de travail et la sécurité des travailleurs.

    Les réponses des partenaires sociaux ont fait apparaître un large soutien au principe directeur fondamental de non-discrimination des travailleurs concernés par les nouvelles formes de travail flexibles, leur garantissant un traitement comparable à celui dont bénéficie le personnel à temps plein et sous contrat à durée indéterminée. Bien que les avis aient divergé considérablement quant à la forme et au niveau approprié de l'action à entreprendre dans ce domaine, la plupart des partenaires sociaux se sont déclarés prêts à jouer un rôle actif dans la définition des principes et dans leur mise en oeuvre, notamment par le biais de la convention collective au niveau approprié.

    Après examen de ces réactions, la Commission a estimé qu'une action communautaire était souhaitable et a décidé de lancer le 9 avril 1996 la deuxième consultation des partenaires sociaux prévue au 3ème paragraphe de l'article 3 de l'accord sur la politique sociale.

    Le 19 juin 1996, trois organisations, (l'Union des Confédérations de l'industrie et des employeurs d'Europe (UNICE), le Centre européen de l'entreprise publique (CEEP) et la Confédération européenne des syndicats (CES) ont annoncé leur intention d'engager des négociations sur ce sujet mais en sériant les différents sujets. Ils ont entamé leurs travaux de négociation par le travail à temps partiel. Ils sont parvenus à un accord sur ce thème le 6 juin 1997 qui a été mis en oeuvre par la directive du Conseil 97/81/CE du 15 décembre 1997.

    Ils ont fait ensuite porter leur négociation sur les contrats à durée déterminée en parvenant à un accord le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive du Conseil 1999/70/CE du 28 juin 1999.

    Enfin au mois de mai 2000, les partenaires sociaux ont décidé d'ouvrir une négociation sur le travail intérimaire. Cependant, le 21 mai 2001, ces derniers ont dû reconnaître qu'ils étaient dans l'incapacité de parvenir à un accord.

    Il apparaît que le point de discordance fondamental réside dans la notion de "travailleur comparable". Les représentants des travailleurs souhaitent que la base de référence soit le travailleur de l'entreprise utilisatrice exécutant le même travail ou un travail similaire. Les employeurs refusent que le salarié comparable de l'entreprise utilisatrice soit le premier point de référence. Ils considèrent qu'une telle comparaison serait injustifiée dans les pays où les travailleurs intérimaires ont un contrat de travail à durée indéterminée avec l'agence et sont rémunérés par leur employeur même en l'absence de mission dans une entreprise utilisatrice. Pour les syndicats représentant les travailleurs en revanche, le point de référence pour les conditions essentielles d'emploi, comme les salaires, le temps de travail, la santé et la sécurité, doit être le travailleur comparable de l'entreprise utilisatrice comme c'est déjà le cas dans la plupart des pays de l'Union. Cependant, en dépit de ce point de désaccord fondamental persistant malgré des assouplissements incontestables par rapport aux positions initiales de chacune des deux parties, les partenaires sociaux sont parvenus à des positions convergentes sur de nombreux autres points. C'est pourquoi, la présente proposition de directive est largement fondée sur les points de consensus auxquels étaient parvenus les négociateurs.

    Il est à noter enfin que cette proposition répond aux attentes des partenaires sociaux du secteur des entreprises de travail intérimaire - à savoir Euro-Ciett, l'organisation des employeurs et Uni-Europa, l'organisation des salariés - telles qu'exprimées dans leur déclaration commune du 8 octobre 2001 dans laquelle ces deux organisations ont fait connaître leurs positions sur l'objet et le contenu d'une future directive.

    C. Les situations transnationales

    Le 16 décembre 1996 le Parlement européen et le Conseil adoptaient la directive 96/71 relative au détachement de travailleurs dans le cadre d'une prestation de services, dont l'objectif premier de promouvoir la prestation de services dans un cadre transnational. Le législateur avait pleinement conscience qu'une telle promotion nécessitait une concurrence loyale et des mesures garantissant le respect du droit des travailleurs.

    Le principe à la base de ce texte est que les conditions essentielles de travail et d'emploi en vigueur dans l'État d'accueil de la prestation doivent être appliquées aussi bien aux travailleurs nationaux qu'aux travailleurs détachés dès lors que ces derniers sont salariés d'une entreprise établie dans un autre État. Les mises à disposition transnationales de travailleurs dans le cadre de l'intérim sont couvertes par ce texte. Cela signifie concrètement que les agences de travail intérimaire qui souhaitent mettre leurs salariés à disposition d'entreprises utilisatrices établies dans un autre État membre que le leur, sont obligées de leur appliquer le socle de règles minimales impératives prévues par la directive "détachement", en vigueur dans le pays du lieu d'exécution de la prestation. Il est à noter que parmi ces règles impératives figurent les conditions de mise à disposition des travailleurs intérimaires.

    La présente proposition de directive vise ainsi à préciser et à rapprocher les conditions de mises à disposition des travailleurs au niveau national. Elle s'analyse dans le même temps comme la continuation du dispositif d'ores et déjà en vigueur dans les situations de mises à disposition transnationales de travailleurs intérimaires. Il est logique, dans un véritable marché intérieur, d'aligner les règles applicables à la mise à disposition dans le cadre de l'intérim quelle que soit la condition de sa mise en oeuvre, nationale ou transnationale.

    Il convient, in fine, de préciser que la présente proposition de directive ne modifie en aucune façon le champ d'application, y compris les possibilités de dérogations, de la directive "détachement."

    2. La Convention C 181 de 1997 de l'OIT sur les agences d'emploi privées

    La Conférence générale de l'Organisation internationale du travail a adopté le 19 juin 1997 la Convention sur les agences d'emploi privées dont l'un des objectifs est de protéger les travailleurs ayant recours à leurs services. La Convention précise le type de mesures que les États doivent prendre en vue de garantir une protection adéquate des travailleurs intérimaires. L'Espagne, la Finlande, Italie et les Pays-Bas ont ratifié cette Convention.

    3. Subsidiarité

    La proposition de directive relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires répond aux objectifs prévus à l'article 136 du Traité créant la Communauté européenne, en particulier celui des conditions de travail, de promotion de l'emploi et du dialogue social.

    Dans cet esprit, la proposition complète la législation des États membres, conformément à l'article 137 du Traité, en établissant un cadre communautaire commun et flexible en vue d'améliorer la qualité du travail des travailleurs intérimaires et de promouvoir le secteur du travail intérimaire.

    Le besoin d'entreprendre une action communautaire dans ce domaine se justifie pour plusieurs raisons.

    Il y a, premièrement, un besoin, au niveau communautaire, d'étendre le principe de non-discrimination entre les travailleurs intérimaires et les travailleurs comparables des entreprises utilisatrices, qui est d'ores et déjà en vigueur dans neuf États membres. Ce faisant, la proposition de directive offrira un cadre stable pour le développement du travail intérimaire. En garantissant des droits minima aux travailleurs intérimaires, elle rendra ce secteur plus attractif et améliorera sa réputation. La plus grande attractivité du travail intérimaire élargira les possibilités de choix des entreprises utilisatrices et leur permettra de mieux satisfaire à leurs exigences de flexibilité, en ayant accès à un plus large éventail de candidats. Elle posera donc les bases d'une nouvelle expansion du secteur, contribuera à la pleine et entière réalisation de son potentiel d'emploi et améliorera le fonctionnement du marché du travail.

    Deuxièmement, il est nécessaire, en vue de promouvoir le travail intérimaire, de préparer le terrain au niveau communautaire à l'élimination des restrictions ou limitations existantes au recours au travail intérimaire qui ne sauraient plus se justifier pour des raisons d'intérêt général ou de protection des travailleurs.

    Troisièmement, il est urgent de compléter la législation communautaire existante - les directives du Conseil 91/383/EEC, 97/81/EC et 1999/70EC - qui ont déjà défini le principe de non-discrimination s'agissant des relations de travail atypique Dans le domaine de la santé et de la sécurité, le principe de non discrimination entre les travailleurs intérimaires et les travailleurs comparables de l'entreprise utilisatrice est d'ores et déjà en vigueur.

    Quatrièmement, un cadre législatif communautaire portant sur les travailleurs intérimaires répondra aux voeux des partenaires sociaux interprofessionnels au niveau communautaire, qui avaient lancé en mai 2000 des négociations en vue d'établir un tel cadre. Cela répondra également aux attentes des partenaires sociaux du secteur de l'intérim qui, dans une déclaration commune du 8 octobre 2001, ont reconnu le besoin d'une directive communautaire dans ce domaine. A ce propos, il est utile de noter que dans sa contribution au Conseil européen de Barcelone, la Confédération internationale des entreprises de travail intérimaires - Euro-Ciett- se félicite d'une directive sur le travail intérimaire ayant pour objectif d'instaurer le juste équilibre entre la protection des travailleurs et la création d'emploi.

    4. Principe de proportionnalité

    Le contenu de l'action proposé est également conforme au principe de proportionnalité, étant donné qu'il détermine un minimum communautaire de protection tout en laissant aux États membres mais aussi aux partenaires sociaux le soin de fixer les adaptations jugées nécessaires au regard des particularités nationales.

    Dans ce contexte, le cadre établi par la proposition de directive est flexible. Avant toute chose, il est parfaitement adapté à la consolidation et au renforcement des bonnes pratiques dans de nombreux États membres. Ce cadre donne aux États membres la possibilité de déroger très largement au principe de non-discrimination à chaque fois que les travailleurs intérimaires sont sous contrat à durée indéterminée. Les États membres peuvent aussi confier aux partenaires sociaux le soin de déroger à ce principe quelle que soit la forme de contrat de travail. De plus, la proposition demande aux États membres de mener un examen périodique des restrictions qui auraient pu être imposées à l'usage du travail intérimaire. A mesure que le niveau minimal de protection des travailleurs intérimaires s'améliorera dans l'avenir, il devrait être possible de lever les restrictions qui ont été jusqu'à présent justifiées par le souhait de protéger ces travailleurs.

    4. BASE JURIDIQUE

    L'article 137 paragraphe 1 du traité CE prévoit qu'en vue de réaliser les objectifs visés à l'article 136, la Communauté soutient et complète l'action des États membres dans les domaines suivants : (...) - les conditions de travail (...)".

    Le paragraphe 2 du même article prévoit qu'aux fins du paragraphe 1, "le Conseil peut arrêter, par voie de directives, des prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres. Ces directives évitent d'imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu'elles contrarieraient la création et le développement des petites et moyennes entreprises.

    Le Conseil statue selon la procédure visée à l'article 251 et après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions."

    Cet article 137 paragraphe 2 constitue la base juridique de la présente proposition.

    L'action proposée répond à ce cadre. La présente proposition de directive établit ainsi un socle commun de règles minimales, afin de faciliter le développement du travail intérimaire en améliorant la qualité de cette forme d'emploi.

    S'agissant des petites et moyennes entreprises (PMEs), il est clair que le travail intérimaire représente un instrument de flexibilité privilégié pour adapter leur main d'oeuvre aux conditions du marché. Elles en ont en effet recours pour faire face aux accroissements temporaires d'activités, aux fluctuations saisonnières ou au remplacement de salariés absents. Elles recherchent une main d'oeuvre de qualité, qualifiée et motivée. Dans la mesure où la directive améliore l'image du travail intérimaire par un renforcement des conditions de travail des travailleurs intérimaires, ce type de travail va attirer un plus grand nombre de travailleurs. Cela permettra aux entreprises de travail intérimaire de disposer d'un très large éventail de qualifications et ainsi de répondre dans des conditions très fines aux besoins des entreprises utilisatrices. Par ailleurs, la proposition de directive, en établissant un cadre, stable, clair, lisible qui élimine les distorsions trop flagrantes entre les situations nationales, facilite l'activité des PMEs qui opèrent sur le marché intérieur.

    5. LES ÉLÉMENTS DE LA PROPOSITION

    1. Description d'ensemble de la directive :

    La présente proposition de directive pose le principe général de non-discrimination des travailleurs intérimaires. Selon ce principe, un travailleur intérimaire ne peut pas être traité d'une manière moins favorable, en terme de conditions essentielles de travail, qu'un travailleur comparable défini comme le travailleur de l'entreprise utilisatrice occupant un poste de travail identique ou similaire.

    La proposition de directive prévoit une limite et deux assouplissements possibles à ce principe.

    Une limite peut être apportée si un traitement différent se justifie pour des raisons objectives. Tel est le cas lorsque selon des circonstances de fait, le travailleur intérimaire se trouve placé dans une situation différente du salarié normalement comparable ce qui explique qu'il ne puisse bénéficier d'un traitement comparable.

    Par ailleurs, il peut être dérogé à ce principe, tout d'abord largement, lorsque le travailleur intérimaire est lié à l'entreprise de travail intérimaire par un contrat à durée indéterminée. Dans ce cas en effet, et dans l'hypothèse où les travailleurs intérimaires continuent à percevoir une rémunération entre deux missions, les États membres peuvent prévoir, la possibilité de déroger au principe de non-discrimination, compte tenu du supplément de protection ainsi apporté aux travailleurs intérimaires.

    Les États peuvent également autoriser les partenaires sociaux, par voie de conventions collectives, à fixer des conditions de travail qui s'écartent de ce principe dans la mesure où un niveau de protection adéquat est assuré. Cette dérogation vise à mettre en avant le rôle des partenaires sociaux afin de leur permettre d'adapter les règles applicables au plus près des intérêts et des besoins rencontrés par les parties intéressées.

    Ces deux dérogations constituent une proposition de formule flexible en réponse au point de blocage des négociations. Elles s'analysent comme un compromis entre la nécessité de parvenir à l'égalisation dans le progrès des conditions de travail des travailleurs intérimaires et la prise en compte des législations et des pratiques nationales.

    La proposition de directive invite dans le même temps les États à procéder au réexamen périodique des restrictions ou interdictions qui existeraient à l'encontre du travail intérimaire. La garantie de l'application d'un socle minimum aux travailleurs intérimaires, doit pouvoir en effet permettre d'éliminer à l'avenir des limitations justifiées en leur temps par une volonté d'assurer la protection des salariés concernés, étant entendu que toute limitation restrictive à la liberté de prester des services doit, en tout état de cause, être nécessaire et proportionnée au regard de l'objectif qu'une telle mesure poursuit.

    La proposition de directive prévoit un dispositif complémentaire de règles visant à améliorer la situation des travailleurs intérimaires. Il s'agit tout d'abord de leur faciliter l'accès à l'emploi permanent. Pour ce faire, il est prévu, d'une part que les travailleurs intérimaires affectés dans une entreprise utilisatrice doivent être informés des postes qui y sont déclarés vacants, et d'autre part que sont déclarées nulles les clauses interdisant ou ayant pour effet d'empêcher l'embauche d'un travailleur intérimaire par une entreprise utilisatrice.

    Il s'agit par ailleurs d'améliorer leurs conditions matérielles de travail en leur permettant d'accéder aux services sociaux de l'entreprise utilisatrice et de renforcer leur capacité d'insertion professionnelle en prévoyant leur accès aux formations organisées dans l'entreprise de travail intérimaire et dans l'entreprise utilisatrice.

    Il est précisé enfin que les travailleurs intérimaires sont pris en compte, au sein de l'entreprise de travail intérimaire, pour le calcul du seuil au-dessus duquel les instances représentatives des travailleurs prévues par les législations nationales et communautaires, peuvent être constituées. Il est laissé aux États la possibilité d'étendre cette prise en compte pour le calcul des seuils à l'entreprise utilisatrice elle-même. Cette dernière doit en tout état de cause informer ses instances représentatives des travailleurs sur son éventuel recours au travail intérimaire.

    2. Description article par article

    Chapitre I : Dispositions générales

    1. Articles 1 à 3 : champ d'application et définitions

    L'article 1 définit le champ d'application de la proposition de directive. Il est la reprise de la notion de "relations de travail intérimaire" telle que définie dans la directive du 25 juin 1991 complétant les mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire [11].Le paragraphe 2 prévoit que la directive est applicable aux entreprises privées et publiques.

    [11] Directive 91/383/CEE -JO L n°206/19- 29.7.91

    Le paragraphe 3 donne la possibilité aux États membres d'exclure du champ d'application les personnes qui bénéficient d'un programme de formation, d'insertion ou de reconversion professionnelles public spécifique ou soutenu par les pouvoirs publics.

    L'article 2 précise l'objet de la directive.

    Le paragraphe 1 de l'article 3 définit les notions de travailleur, de travailleur comparable, de mission et de conditions essentielles de travail et d'emploi. Au paragraphe 2 de l'article 3, la définition du contrat de travail ou de la relation est renvoyée au droit national ; il est précisé qu'un État ne saurait exclure un travailleur du champ d'application de la directive au motif qu'il aurait un contrat à durée déterminée, qu'il travaillerait à temps partiel ou qu'il effectuerait une mission d'intérim. Cette dernière précision vise à mettre fin à l'insécurité juridique que peuvent rencontrer les personnes qui effectuent des missions d'intérim. La qualification très variable donnée au contrat en application duquel elles exécutent leur mission peuvent les écarter de la protection de la législation du travail.

    L'article 4 prévoit que les États doivent procéder à l'examen périodique des restrictions ou interdictions au recours au travail intérimaire se rapportant à certaines catégories de travailleurs ou à certaines branches d'activité.

    Chapitre II : Conditions de travail et d'emploi

    Le paragraphe 1er de l'article 5 pose le principe de non-discrimination et définit les conditions de sa mise en oeuvre. Une limite et deux dérogations peuvent être apportées à ce principe. Tout d'abord si des raisons objectives empêchent d'en faire application. D'autre part, le paragraphe 2 autorise les États, dans le cas particulier des travailleurs intérimaires bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée prévoyant qu'ils continuent à être rémunérés même lorsqu'ils n'exécutent pas de missions, à déroger au principe. Le paragraphe 3 prévoit que, les États membres peuvent confier aux partenaires sociaux, le soin de conclure des conventions collectives qui dérogent à ce principe. Le paragraphe 4 prévoit que les États membres peuvent, pour les travaux dont l'exécution est inférieure à six semaines, ne pas appliquer le principe de non-discrimination visé au paragraphe 1. Le paragraphe 5 indique la conduite à suivre dans l'hypothèse où il n'existerait pas de travailleur comparable. Le paragraphe 6 enfin précise les modalités de mise en oeuvre des dispositions de l'article.

    L'article 6 prévoit une série de dispositions visant à améliorer la qualité de l'emploi du travailleur intérimaire. Afin de lui permettre d'accéder à un emploi permanent, le travailleur intérimaire doit être informé des postes vacants et ne rencontrer aucun obstacle lorsque l'opportunité lui est offerte de conclure un contrat à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice à l'issue de sa mission (paragraphe 1 et 2). Aucun honoraire ne doit être mis à la charge du travailleur intérimaire (paragraphe 3). Il doit pouvoir accéder aux services sociaux de l'entreprise utilisatrice (paragraphe 4). Enfin, toutes les mesures doivent être mises en oeuvre pour améliorer sa formation tant dans l'entreprise de travail intérimaire que dans l'entreprise utilisatrice (paragraphe 5).

    L'article 7 précise que les travailleurs intérimaires sont pris en compte, au sein de l'entreprise de travail intérimaire, pour le calcul du seuil au-dessus duquel les instances représentatives des travailleurs prévues par les législations nationales et communautaires, peuvent être constituées. Il est laissé aux États la possibilité d'étendre cette prise en compte pour le calcul des seuils à l'entreprise utilisatrice elle-même.

    L'article 8 prévoit que les salariés de l'entreprise utilisatrice doivent être informés du recours à l'intérim dans leur entreprise.

    Chapitre III Dispositions finales

    L'article 9 : Exigences minimales (clause type)

    L'article 10 : Sanctions (clause type)

    L'article 11 : Mise en oeuvre (clause type)

    L'article 12 : Réexamen par la Commission : il est proposé 5 ans après l'adoption, en vue de proposer des éventuelles modifications.

    2002/0072 (COD)

    Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires

    LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

    vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 137 paragraphe 2,

    vu la proposition de la Commission [12],

    [12] JO C du , p. .

    vu l'avis du Comité économique et social [13],

    [13] JO C du , p. .

    vu l'avis du Comité des régions [14],

    [14] JO C du , p. .

    statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 du traité [15],

    [15] JO C du , p. .

    considérant ce qui suit:

    (1) le présent acte respecte les droits fondamentaux et observe les principes qui sont reconnus notamment par la Charte des Droits fondamentaux de l'Union européenne ; en particulier le présent acte vise à assurer le plein respect de l'article 31 de la Charte des Droits fondamentaux de l'Union européenne qui prévoit que tout travailleur a droit à des conditions de travail saines, sûres et dignes ainsi qu'à une limitation de la durée maximale de travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés;

    (2) en outre, le point 7 de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs prévoit, entre autres, que la réalisation du marché intérieur doit conduire à une amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs dans la Communauté européenne; ce processus s'effectuera par un rapprochement dans le progrès de ces conditions, notamment pour les formes de travail autres que le travail à durée indéterminée, telles que le travail à durée déterminée, le travail à temps partiel, le travail intérimaire et le travail saisonnier;

    (3) les conclusions du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000 ont fixé un nouvel objectif stratégique pour l'Union européenne à savoir "devenir l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale";

    (4) conformément à l'Agenda social européen, qui sur la base de la Communication de la Commission a été adopté par le Conseil européen de Nice les 7, 8 et 9 décembre 2000, aux conclusions du Conseil européen de Stockholm des 23 et 24 mars 2001 ainsi qu'à à la décision du Conseil du 19 janvier 2001 sur les lignes directrices pour l'emploi en 2001, il convient de mettre en place une organisation du travail satisfaisante et souple dans le cadre de nouveaux contrats flexibles assurant une sécurité appropriée et un statut professionnel plus élevé aux travailleurs concernés, qui soit dans le même temps compatible avec leurs aspirations et les besoins des entreprises;

    (5) la Commission a consulté les partenaires sociaux sur l'orientation possible d'une action communautaire concernant la flexibilité du temps de travail et la sécurité des travailleurs le 27 septembre 1995;

    (6) la Commission, estimant après cette consultation qu'une action communautaire était souhaitable, a de nouveau consulté les partenaires sociaux sur le contenu de la proposition envisagée le 9 avril 1996;

    (7) les parties signataires, dans le préambule de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, avaient indiqué leur intention de considérer la nécessité d'un accord similaire pour le travail intérimaire;

    (8) les organisations interprofessionnelles à vocation générale, à savoir l'Union des confédérations de l'industrie de l'industrie et des employeurs d'Europe (UNICE), le Centre européen des entreprises à participation publique (CEEP) et la Confédération européenne des syndicats (CES), ont informé la Commission, par lettre conjointe de leur volonté d'engager le processus prévu au point 4 de l'article 138 du traité CE; elles ont, par lettre conjointe, demandé à la Commission un délai supplémentaire de trois mois; la Commission a accédé à cette demande en prolongeant le délai de négociation jusqu'au 15 mars 2001;

    (9) le 21 mai 2001 les partenaires sociaux ont reconnu que leurs négociations sur le travail intérimaire n'avaient pu aboutir;

    (10) au sein de l'Union, la situation juridique des travailleurs intérimaires se caractérise par une grande diversité;

    (11) le travail intérimaire devrait répondre aux besoins de flexibilité des entreprises, aux besoins de concilier la vie privée et professionnelle des salariés et contribue à la création d'emplois ainsi qu'à la participation et à l'insertion sur le marché du travail;

    (12) l'objectif de la présente directive est d'établir un cadre protecteur pour les travailleurs intérimaires qui constitue également un cadre commun et souple favorisant l'intervention des entreprises du secteur intervenant sur le territoire de la Communauté européenne, en évitant d'imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu'elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises;

    (13) la présente directive s'applique dans le respect du Traité en particulier en matière de libre prestation de services et de liberté d'établissement et sans préjudice de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 [16] concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestations de services;

    [16] JO L18 du 21.1.97, p1

    (14) la directive 91/383/CEE du 25 juin 1991 [17] complétant les mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire fixe les dispositions applicables aux travailleurs intérimaires en matière de sécurité et santé au travail;

    [17] JO L 206 du 29.7.1991, p.19.

    (15) en ce qui concerne les conditions essentielles de travail et d'emploi, les travailleurs intérimaires ne devraient pas être traités d'une manière moins favorable qu'un "travailleur comparable" c'est à dire un travailleur de l'entreprise utilisatrice occupant un poste identique ou similaire en tenant compte de l'ancienneté et des qualifications et compétences;

    (16) toutefois, des différences de traitement pourraient intervenir si elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime;

    (17) s'agissant des travailleurs liés à l'entreprise de travail intérimaire par un contrat à durée indéterminée, compte tenu de la protection particulière afférente à la nature de leur contrat de travail, il convient de prévoir la possibilité de déroger aux règles applicables dans l'entreprise utilisatrice;

    (18) compte tenu de la nécessité de maintenir une certaine flexibilité dans la relation de travail, il convient de prévoir que les États membres puissent confier aux partenaires sociaux le soin de définir des conditions essentielles de travail et d'emploi adaptées aux spécificités de certains types d'emploi ou de certaines branches d'activité économique;

    (19) il convient d'assurer une certaine souplesse dans l'application du principe de non-discrimination dans les cas de missions effectuées pour réaliser un emploi, qui compte tenu de sa nature ou de sa durée, n'excède pas six semaines;

    (20) l'amélioration du socle de protection des travailleurs intérimaires découlant de l'application de la présente directive justifie un réexamen périodique des restrictions ou interdictions qui auraient pu être apportées au recours au travail intérimaire et, le cas échéant, leur élimination lorsqu'elles ne sont plus justifiées en raison de l'intérêt général tenant, notamment, à la protection des travailleurs salariés;

    (21) la représentation des droits des travailleurs intérimaires doit être effective;

    (22) conformément au principe de subsidiarité et au principe de proportionnalité visés à l'article 5 du traité, les objectifs de l'action envisagée ci-dessus, ne peuvent être réalisés de manière suffisante par les États membres, dans la mesure où il s'agit d'établir un cadre de protection pour les travailleurs intérimaires harmonisé au niveau communautaire ; en raison de la dimension et des effets de l'action envisagée, ces objectifs peuvent être mieux réalisés au niveau communautaire par le biais de l'introduction de prescriptions minimales applicables dans l'ensemble de la Communauté européenne ; la présente directive se limite à ce qui est requis pour atteindre ces objectifs,

    ONT ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:

    CHAPITRE I

    DISPOSITIONS GÉNÉRALES

    Article premier

    Champ d'application

    1. La présente directive s'applique au contrat de travail ou à la relation de travail entre, d'une part, une entreprise de travail intérimaire qui est l'employeur et, d'autre part, le travailleur, ce dernier étant mis à disposition afin de travailler pour une entreprise utilisatrice et sous son contrôle.

    2. La présente directive est applicable aux entreprises publiques et privées exerçant une activité économique, qu'elles poursuivent ou non un but lucratif.

    3. Les États membres, après consultation des partenaires sociaux, peuvent prévoir que la présente directive ne s'applique pas aux contrats ou relations de travail conclus dans le cadre d'un programme de formation, d'insertion et de reconversion professionnelles public spécifique ou soutenu par les pouvoirs publics.

    Article 2

    Objet

    La présente directive a pour objet :

    1. d'améliorer la qualité du travail intérimaire en assurant le respect du principe de non-discrimination à l'égard des travailleurs intérimaires;

    2. d'établir un cadre approprié d'utilisation du travail intérimaire pour contribuer à un bon fonctionnement du marché du travail et à l'emploi.

    Article 3

    Définition

    1. Aux fins de la présente directive, on entend par :

    a) "travailleur" : toute personne qui, dans l'État membre concerné, est protégée en tant que travailleur dans le cadre de la législation nationale sur l'emploi et conformément aux pratiques nationales ;

    b) "travailleur comparable" : le travailleur de l'entreprise utilisatrice occupant un poste identique ou similaire à celui occupé par le travailleur mis à disposition par l'entreprise de travail intérimaire en tenant compte de l'ancienneté et des qualifications et compétences;

    c) "mission": la période pendant laquelle le travailleur intérimaire est mis à disposition auprès de l'entreprise utilisatrice.

    d) "conditions essentielles de travail et d'emploi" : les conditions de travail et d'emploi relatives :

    i) à la durée du travail, aux périodes de repos, au travail de nuit, aux congés payés, aux jours fériés;

    ii) à la rémunération;

    iii) au travail des femmes enceintes et allaitantes, des enfants et des jeunes et;

    iv) aux dispositions prises en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle.

    2. La présente directive ne porte pas atteinte au droit national en ce qui concerne la définition du contrat ou de la relation de travail. Cependant, les États membres ne sauraient exclure du champ d'application de la présente directive les contrats ou relations de travail uniquement du fait qu'ils concernent :

    a) des travailleurs à temps partiel au sens de la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997;

    b) des travailleurs à durée déterminée au sens de la directive 99/70/CE du Conseil du 28 juin 1999;

    c) des personnes effectuant une mission d'intérim auprès d'une entreprise utilisatrice.

    Article 4

    Réexamen des interdictions ou restrictions

    1. Les États membres, après consultation des partenaires sociaux, conformément à la législation, aux conventions collectives et pratiques nationales, réexaminent périodiquement, au minimum tous les cinq ans, les restrictions ou interdictions au recours au travail intérimaire concernant certaines catégories de travailleurs ou certaines branches d'activité économique afin de vérifier si les conditions particulières qui les sous-tendent demeurent valables. Dans la négative, les États membres doivent les supprimer.

    2. Les États membres notifient à la Commission le résultat dudit examen. En cas de maintien de telles restrictions ou interdictions, les États membres communiquent les raisons pour lesquelles ils estiment que de telles restrictions ou interdictions sont nécessaires et justifiées.

    Les restrictions ou interdictions susceptibles d'être maintenues doivent être justifiées par des raisons d'intérêt général tenant, notamment, à la protection des travailleurs salariés.

    CHAPITRE II

    CONDITIONS DE TRAVAIL ET D'EMPLOI

    Article 5

    Principe de non-discrimination

    1. Les travailleurs intérimaires sont traités, pendant la durée de leur mission, d'une manière au moins aussi favorable qu'un travailleur comparable de l'entreprise utilisatrice, pour ce qui concerne les conditions essentielles de travail et d'emploi, y compris celles qui sont soumises à une ancienneté particulière dans l'emploi, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives.

    Lorsque c'est approprié, le principe du pro rata temporis s'applique.

    2. Les États membres peuvent prévoir qu'il peut être dérogé au principe fixé au paragraphe 1er lorsque les travailleurs intérimaires, liés à l'entreprise de travail intérimaire par un contrat à durée indéterminée, continuent à être rémunérés dans l'intervalle de temps entre l'exécution de deux missions.

    3. Les États membres peuvent confier aux partenaires sociaux, au niveau approprié, la possibilité de conclure des conventions collectives qui dérogent au principe fixé au paragraphe 1er à condition qu'un niveau de protection adéquat soit assuré aux travailleurs intérimaires.

    4. Sans préjudice des dispositions des paragraphes 2 et 3 ci-dessus, les Etats membres peuvent prévoir que le paragraphe 1 ne s'applique pas, lorsqu'un travailleur intérimaire travaille, à l'occasion d'une mission ou d'une série de missions, au sein de la même entreprise utilisatrice, dans un emploi qui, compte tenu de sa durée ou sa nature, peut être réalisé dans une période qui ne peut excéder six semaines.

    Les Etats membres prennent les mesures nécessaires, en vue d'éviter le recours abusif à l'application de ce paragraphe.

    5. Lorsque selon la présente directive, la comparaison doit se faire avec un travailleur comparable dans l'entreprise utilisatrice mais qu'il n'existe pas de tel travailleur, la comparaison s'effectue par référence à la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice ; lorsqu'il n'existe pas de telle convention collective applicable, la comparaison s'effectue par référence à la convention collective applicable à l'entreprise de travail intérimaire ; en l'absence de convention collective applicable, les conditions essentielles de travail et d'emploi du travailleur intérimaire relèvent de la législation nationale et des pratiques nationales.

    6. Les modalités de mise en oeuvre des dispositions du présent article sont définies par les États membres après consultation des partenaires sociaux. Les États membres peuvent également confier aux partenaires sociaux au niveau approprié le soin de définir par voie d'accord négocié ces modalités.

    Article 6

    Accès à l'emploi permanent et de qualité

    1. Les travailleurs intérimaires sont informés des postes vacants dans l'entreprise utilisatrice dans le but de leur assurer la même possibilité que les autres travailleurs de cette entreprise d'obtenir des postes permanents.

    2. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les clauses interdisant ou ayant pour effet d'empêcher la conclusion d'un contrat de travail ou d'une relation de travail entre l'entreprise utilisatrice et le travailleur intérimaire, après l'expiration de sa mise à disposition, soient nulles ou puissent être déclarées nulles.

    3. Les entreprises de travail intérimaire ne mettent pas des honoraires à la charge des travailleurs en échange d'affectations dans une entreprise utilisatrice.

    4. Les travailleurs intérimaires bénéficient des services sociaux de l'entreprise utilisatrice, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives.

    5. Les États membres prennent les mesures appropriées ou favorisent le dialogue entre les partenaires sociaux, conformément à leurs traditions et pratiques nationales, en vue :

    - d'améliorer l'accès des travailleurs intérimaires aux opportunités de formation dans les entreprises de travail intérimaire, y compris dans les périodes se situant entre les missions afin de promouvoir leur développement de carrière et leur employabilité,

    - d'améliorer l'accès des travailleurs intérimaires aux opportunités de formation des travailleurs des entreprises utilisatrices dans lesquelles ils sont mis à disposition.

    Article 7

    Représentation des travailleurs intérimaires

    Les travailleurs intérimaires sont pris en compte, au sein de l'entreprise de travail intérimaire, pour le calcul du seuil au-dessus duquel les instances représentatives des travailleurs prévues par les législations nationales et communautaires doivent être constituées.

    Les États membres peuvent prévoir, dans les conditions qu'ils définissent, que ces travailleurs, sont pris en compte au sein de l'entreprise utilisatrice, pour le calcul du seuil au-dessus duquel les instances représentatives des travailleurs prévues par les législations nationales et communautaires peuvent être constituées.

    Article 8

    Information des représentants des travailleurs

    Sans préjudice des dispositions nationales et communautaires, plus contraignantes et/ou plus spécifiques, relatives à l'information et consultation, l'entreprise utilisatrice doit fournir des informations appropriées sur le recours au travail intérimaire au sein de l'entreprise lors de la transmission d'informations sur la situation de l'emploi dans l'entreprise aux instances représentatives des travailleurs instituées conformément à la législation communautaire et nationale.

    CHAPITRE III

    DISPOSITIONS FINALES

    Article 9

    Exigences minimales

    1. La présente directive ne porte pas atteinte au droit des États membres d'appliquer ou d'introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables aux travailleurs ou de favoriser ou de permettre des conventions collectives ou des accords conclus entre les partenaires sociaux plus favorables aux travailleurs.

    2. La mise en oeuvre de la présente directive ne constitue en aucun cas un motif suffisant pour justifier une réduction du niveau général de protection des travailleurs dans les domaines couverts par la présente directive. Les mesures prises pour la mise en oeuvre de la présente directive sont sans préjudice des droits des États membres et/ou des partenaires sociaux d'arrêter eu égard à l'évolution de la situation, des dispositions législatives, réglementaires ou contractuelles différentes de celles qui existent au moment de l'adoption de la présente directive, pour autant que les exigences minimales prévues par la présente directive soient respectées.

    Article 10

    Sanctions

    Les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions nationales arrêtées en application de la présente directive et prennent toute mesure nécessaire pour assurer leur mise en oeuvre. Les sanctions ainsi prévues doivent être effectives, proportionnelles et dissuasives. Les États membres notifient ces dispositions à la Commission au plus tard à la date mentionnée à l'article 11, ainsi que toute modification ultérieure dans les meilleurs délais. Ils veillent en particulier à ce que les travailleurs et/ou leurs représentants disposent de procédures adéquates aux fins de l'exécution des obligations prévues par la présente directive.

    Article 11

    Mise en oeuvre

    1. Les États membres adoptent les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le ...( deux ans après l'adoption), ou s'assurent que les partenaires sociaux mettent en place les dispositions nécessaires par voie d'accord, les États membres devant prendre toutes dispositions nécessaires leur permettant d'être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par la présente directive. Ils en informent immédiatement la Commission.

    2. Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

    Article 12

    Réexamen par la Commission

    Au plus tard le...(cinq ans après l'adoption de la présente directive) après l'adoption de la présente directive, la Commission réexamine, en consultation avec les États membres et les partenaires sociaux au niveau communautaire, son application, en vue de proposer au Parlement et au Conseil, en tant que de besoin, les modifications nécessaires.

    Article 13

    Entrée en vigueur

    La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

    Article 14

    Les États membres sont destinataires de la présente directive.

    Fait à Bruxelles, le

    Par le Parlement européen Par le Conseil

    Le Président Le Président

    FICHE D'ÉVALUATION D'IMPACT IMPACT DE LA PROPOSITION SUR LES ENTREPRISES ET NOTAMMENT SUR LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (PME)

    Titre de la proposition

    Directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de travail des travailleurs intérimaires

    Numéro de référence du document

    COM(2002)149 final

    La proposition

    1. En considérant le principe de subsidiarité, pourquoi une législation communautaire est-elle nécessaire dans ce domaine et quels sont ses objectifs principaux -

    Comme le souligne le mémorandum explicatif, la proposition de directive se fonde sur un certain nombre d'initiatives précédentes au niveau européen, et en particulier sur les négociations entre partenaires sociaux. Ces négociations constituèrent la réponse des partenaires sociaux à une consultation lancée par la Commission en 1995, qui appelait à une initiative législative européenne à propos des conditions de travail des travailleurs à temps partiel, sous contrat à durée déterminée et intérimaires. L'objectif de cette consultation fut de développer des voies et moyens pour améliorer la flexibilité du temps de travail tout en renforçant la sécurité des salariés.

    Les partenaires sociaux ont déjà conclu des accords-cadres en matière de travail à temps partiel et à durée déterminée, qui ont tous deux été mis en oeuvre par des directives du Conseil. Des négociations semblables, portant sur le travail intérimaire, échouèrent en mai 2001, même si les positions effectives des partenaires sociaux étaient très proches, y compris sur un accord portant sur le principe de non discrimination à l'égard des travailleurs intérimaires sous contrat à durée déterminée.

    Dans sa réaction à l'échec de ces négociations, la CIETT, l'organisation internationale du secteur, déclarait qu'elle "considérait ces négociations comme cruciales, étant donné qu'elle estimait que le secteur de l'intérim en particulier, et le marché du travail européen en général, bénéficieraient d'un cadre réglementaire européen négocié par les partenaires sociaux."

    La présente proposition est largement fondée sur le consensus qui fut atteint par les partenaires sociaux pendant les négociations, en proposant un compromis sur les questions qui ne purent être résolues pendant les négociations, compromis qui prend en compte les différentes positions des partenaires sociaux. Il répond ainsi aux attentes des partenaires sociaux du secteur de l'intérim, à savoir Euro-CIETT et Uni-Europa, telles qu'elles furent exprimées dans leur déclaration commune du 13 juillet 2001, par laquelle ils "saluent l'annonce faite par la Commission européenne qu'elle proposera de légiférer sur l'intérim."

    Il est aussi utile de rappeler que le principe de non-discrimination entre travailleurs intérimaires et travailleurs comparables des entreprises utilisatrices est déjà inscrit dans la législation communautaire dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail par la directive 91/383/CE du 25 juin 1991 complétant les mesures d'encouragement à l'amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs avec une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire.

    La proposition de directive définit un cadre général applicable aux conditions de travail des travailleurs intérimaires en Europe. En établissant un principe général de non discrimination, elle amènera une plus grande transparence et accroîtra la confiance dans le secteur. Elle améliorera ainsi la sécurité des travailleurs tout en donnant une plus grande flexibilité aux entreprises.

    La proposition de directive offre un cadre stable à un nouveau développement de l'intérim. On peut s'attendre à ce que la garantie de droits minima aux travailleurs intérimaires et la définition de normes fondamentales rendra le secteur plus attractif et consolidera sa réputation. Elle améliorera la sécurité des travailleurs intérimaires et fera en sorte que ceux-ci ne soient pas désavantagés. La plus grande attractivité de l'intérim offrira davantage de choix aux entreprises utilisatrices et leur permettra de mieux répondre à leurs besoins de flexibilité, étant donné qu'elle auront accès à un réservoir plus grand de candidats. De plus, la directive prévoit aussi un examen régulier des restrictions et des interdictions existantes à l'usage de l'intérim. Elle contribuera ainsi à la levée des ces restrictions, étant donné que les améliorations dans les conditions de travail les rendront de plus en plus dépassées. De façon générale, cette proposition posera donc les fondations d'une nouvelle expansion du secteur, contribuant ainsi à exploiter pleinement son potentiel de création d'emplois, et à améliorer le fonctionnement du marché du travail. Ce faisant, la proposition vise à atteindre un équilibre juste entre la protection des travailleurs intérimaires et le renforcement du rôle positif que l'intérim peut jouer dans le marché européen du travail.

    L'IMPACT SUR LES ENTREPRISES

    2. Qui sera affecté par la proposition -

    La proposition affectera le secteur du travail intérimaire de l'UE, y compris les agences et les entreprises utilisatrices. Comme le souligne le mémorandum explicatif, le travail intérimaire est répandu dans tous les États membres. En 1999, environ 2,1 millions de personnes (en équivalent temps plein) travaillaient pour le compte d'agences, en moyenne quotidienne, représentant 1,5% de l'ensemble des salariés d'Europe. Le chiffre d'affaires du secteur du travail intérimaire représentait, en 1999, environ EUR59 milliards.

    Le travail intérimaire est le plus répandu au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Espagne et en Belgique. Environ 80% de l'ensemble des travailleurs intérimaires étaient employés au Royaume-Uni, en France, aux Pays-Bas et en Allemagne. En termes de proportion de l'emploi, le secteur est le plus développé aux Pays-Bas, au Luxembourg, en France et au Royaume-Uni.

    La répartition sectorielle diffère de façon marquée entre les pays. En France, la part de travailleurs intérimaires est la plus élevée dans le secteur de la construction et dans l'industrie, avec 6,7% et 5,8%. Au Royaume-Uni, la proportion est comparable pour l'industrie, la construction et les services, avec environ 2% à 2,5%, mais elle est sensiblement plus élevée dans le secteur public, avec 5,3%. Par contraste, aux Pays-Bas, le taux de pénétration est le plus élevé dans l'industrie et les services (6,6% et 4,4%).

    Les principales motivations pour l'emploi de travailleurs intérimaires résident dans la gestion des variations de la demande -qu'il s'agisse de fluctuations saisonnières ou de pointes imprévues-, ou de l'absence du personnel permanent. Par contraste, les avantages de coûts semblent jouer un rôle presque négligeable. Ce n'est que dans 1% des cas que les entreprises embauchent des travailleurs intérimaires parce qu'ils coûtaient moins cher.

    Le marché du travail intérimaire est relativement concentré dans la plupart des pays. Dans un certain nombre de pays, les cinq plus grandes agences possèdent une part de marché proche de, ou même supérieure à, 80%.

    Les caractéristiques des travailleurs intérimaires diffèrent considérablement. Presque les trois-quarts de l'ensemble des travailleurs intérimaires ont moins de 35 ans, une majorité (60%) a achevé des études secondaires, et environ les deux tiers accomplissent des tâches manuelles. Cependant, le travail intérimaire est répandu dans toutes les tranches d'âge, il est réparti de manière égale parmi les travailleurs avec un niveau d'éducation primaire et supérieure, et une part substantielle des travailleurs intérimaires est employée à des tâches de bureau.

    Les motivations pour rechercher un emploi sous la forme de travail intérimaire diffèrent aussi de façon substantielle, avec environ un tiers de tous les travailleurs intérimaires exprimant une préférence affichée pour ce type de travail.

    Il n'y a pas, de même, de schéma unique en ce qui concerne le genre. Dans certains cas, plus des trois-quarts des travailleurs intérimaires sont des hommes. Dans certains autres pays, cependant, il y a plus ou moins une répartition égale, ou une majorité de femmes. Ces différences reflètent largement celles qui prévalent dans la répartition sectorielle. Là où le travail intérimaire est concentré dans le secteur manufacturier ou de la construction, davantage d'hommes que de femmes sont susceptibles de travailler sous cette forme. Là où il est plus répandu dans les services, ou dans les emplois non manuels, les femmes ont tendance à être plus nombreuses.

    Les missions des travailleurs intérimaires dans les entreprises utilisatrices sont habituellement très courtes. Dans la grande majorité des cas, les missions durent moins de 6 moins. Dans la plupart des pays, c'est le cas pour plus de 90% des missions. EN France et en Espagne, les missions très courtes, de moins d'un mois, sont la normes. Par contraste, en Suède et en Allemagne, les missions sont habituellement plus longues qu'un mois, mais dépassent rarement six mois. Selon des chiffres fournis par la CBI, la majorité des missions au Royaume-Uni durent moins de 3 mois.

    3. Que devront faire les entreprises pour respecter la proposition -

    La proposition de directive établit un principe général de non-discrimination entre travailleurs intérimaires et travailleurs comparables de l'entreprise utilisatrice, en prenant en compte l'ancienneté, les qualifications et les compétences, en termes conditions de travail essentielles. Des dérogations à ce principe sont possibles pour les travailleurs intérimaires sous contrat de travail à durée indéterminée ainsi qu'à durée déterminée.

    Des règles particulières concernent l'information des travailleurs intérimaires sur les emplois disponibles dans l'entreprise utilisatrice, l'interdiction de pratiques empêchant les travailleurs intérimaires d'occuper un emploi permanent, et l'accès des travailleurs intérimaires à l'action sociale et à la formation. Les travailleurs intérimaires doivent être pris en compte lors du calcul des seuils relatifs à la représentation collective dans les agences, et les entreprises utilisatrices doivent informer les instances de représentation existantes de l'usage qu'elles font du travail intérimaire.

    Pour la plus grande partie, ces dispositions codifient les pratiques et les règles communes qui sont déjà inscrites dans la législation nationale, les accords collectifs ou les codes de conduite. Au surplus, la directive offre un degré significatif de flexibilité dans le cas des travailleurs intérimaires avec des contrats à durée indéterminée ainsi qu'à durée déterminée.

    Au total, les règles proposées ne devraient donc qu'entraîner seulement, dans l'immédiat, des changements très limités pour les entreprises. Cependant, elles créeront les fondations d'une amélioration de la qualité du travail dans le secteur et d'une stimulation de son développement futur.

    4. Quels effets économiques la proposition est-elle susceptible d'entraîner -

    Dans le cas de la plupart des mesures proposées dans la directive, il n'est pas possible de mesurer les coûts et les bénéfices. L'information statistique qui serait nécessaire pour ce faire n'est pas disponible. L'information sur la situation économique du secteur est assez limitée, et, en particulier, des données comparables existent à peine.

    Sur la base de l'information limitée qui est disponible, une analyse qualitative de l'impact possible de la directive a été entreprise. Cette analyse se fonde essentiellement sur l'information fournie par le secteur lui-même, une étude conduite par la CIETT, l'organisation professionnelle du secteur, et une étude récente de la Fondation Européenne pour l'Amélioration des Conditions de Vie et de Travail (non encore publiée), qui inclut aussi des rapports nationaux sur tous les États membres.

    En évaluant l'impact de la proposition, il est nécessaire de prendre en compte la marge substantielle de flexibilité qu'elle offre. Par exemple, des dérogations aux principes de non-discrimination sont possibles :

    - pour des raisons objectives,

    - sur la base d'accords collectifs,

    - dans le cas des travailleurs intérimaires sous contrat à durée indéterminée,

    - lorsqu'il n'existe aucun travailleur comparable ni aucun accord collectif applicable à l'entreprise utilisatrice.

    Ces dérogations et exclusions sont particulièrement importantes, étant donnée l'hétérogénéité réelle du secteur, soulignée plus haut. Cependant, cette flexibilité, comme cette diversité, rendent impossible de tirer de quelconques conclusions simplistes en ce qui concerne les coûts et les bénéfices de la directive.

    * Remarques d'ensemble

    Avant d'analyser avec davantage de détails les implications de la proposition de directive sur l'emploi, l'investissement, et la compétitivité des entreprises, il vaut peut-être la peine de mettre en lumière l'approche générale adoptée dans cette étude d'impact, ainsi que certaines de ses conclusions générales.

    L'étude d'impact a inclus une analyse complète du cadre réglementaire existant en matière de travail intérimaire dans les États membres, ainsi qu'une évaluation de l'ampleur et de l'échelle des changements exigés par la proposition de directive.

    Le deuxième pilier de l'étude d'impact a consisté dans l'identification des facteurs principaux qui déterminent le développement du secteur du travail intérimaire, y compris les défis essentiels de sa croissance future. Cette partie a été fondée en grande partie sur l'analyse menée par l'organisation professionnelle du secteur, la CIETT, ainsi que, dans certains cas, sur le rapport de la Fondation Européenne pour l'Amélioration des Conditions de Vie et de Travail.

    Cela a fourni la base d'une analyse qualitative des effets des changements exigés dans la réglementation sur les facteurs identifiés ci-dessus -à savoir, les coûts salariaux et non-salariaux, l'image globale et l'acceptation sociale du secteur, sa capacité à satisfaire les besoins des entreprises utilisatrices en termes de flexibilité, sa capacité à offrir des services différenciés et sur mesure aux entreprises utilisatrices, ainsi que les restrictions existantes au recours au travail intérimaire.

    Il est particulièrement important de souligner que, globalement, les changements effectifs qui sont exigés par la directive seront très limités, parce que, en majeure partie, elle codifie des règles qui représentent d'ores et déjà des pratiques communes et sont inscrites dans la législation nationale, les accords collectifs et les codes de conduite. De plus, même dans les cas où certains changements peuvent être nécessaires, les effets réels en seront atténués par la flexibilité significative offerte par la directive.

    Étant donné que la proposition de directive, par conséquent, entraînera seulement des changements très limités dans le cadre réglementaire, il est évident que les coûts, qui pourraient être induits par la directive, devraient, en tout état de cause, demeurer très limités.

    Une seconde conclusion préliminaire est tout aussi importante. Comme l'étude de la CIETT le souligne, la motivation prédominante des entreprises utilisatrices dans leur recours au travail intérimaire est leur besoin de flexibilité. Dans la grande majorité des cas, le travail intérimaire est utilisé pour faire face à l'absence de personnel permanent, ou à un accroissement temporaire de la charge de travail. Par contraste, les avantages de coût jouent un rôle presque négligeable. Dans sa contribution au sommet de Barcelone, Euro-CIETT a rappelé ce point, soulignant que "la décision des entreprises de recourir aux travailleurs intérimaires n'est presque jamais basée sur le coût: seulement 1% des travailleurs était recruté parce que cela revient moins cher que de recruter un travailleur permanent".

    Ainsi, lorsque l'on analyse de façon cohérente les implications économiques de cette proposition, l'accent doit être sur la manière dont elle affectera les possibilités offertes aux entreprises utilisatrices d'utiliser le travail intérimaire pour gérer les événements imprévus. Des facteurs tels que la disponibilité de personnels satisfaisant aux besoins des entreprises utilisatrices seront bien plus important à cet égard que n'importe quel avantage de coût.

    Effets sur l'emploi

    Un certain nombre de facteurs différents doivent être pris en compte afin d'évaluer l'impact de la proposition sur l'emploi de manière complète et systématique. Les effets de la directive en termes de coûts salariaux représentent à cet égard seulement un élément. Au strict minimum, toute évaluation devra aussi prendre en compte les effets éventuels sur la productivité des travailleurs intérimaires.

    De plus, un certain nombre d'éléments de la proposition de directive auront un impact sur la demande de travail intérimaire qui va bien au-delà et est complètement indépendant de cet accent très étroit placé sur les salaires. De façon très spécifique, cela concerne des questions telles que l'image et l'acceptation sociale du travail intérimaire, l'attractivité du secteur sur des salariés potentiels, et la levée anticipée des restrictions actuelles. En réalité, étant donné la préoccupation majeure des entreprises utilisatrices - la flexibilité-, ces aspects-ci sont voués à être beaucoup plus importants que n'importe quel effet sur les salaires.

    Les aspects non salariaux

    L'étude de la CIETT estime qu'avec l'établissement d'un cadre réglementaire adéquat 6,5 millions de personnes pourraient être employées dans l'intérim, en moyenne quotidienne, en 2010. Cela signifierait un gain net de plus de 4 millions de personnes.

    Selon la CIETT, deux éléments sont particulièrement importants à l'égard de ce cadre réglementaire. L'un concerne la levée des restrictions et des interdictions existantes. L'autre traite d'un nouveau développement de la réglementation du travail.

    Comme il a été déjà dit, la directive prévoit un examen périodique des restrictions et des interdictions existantes en matière d'intérim. De même, en améliorant la réglementation des conditions de travail du secteur, elle enlèvera un obstacle important à une nouvelle déréglementation du secteur lui-même. Elle contribuera ainsi, de façon importante, à l'établissement d'un cadre réglementaire favorable à un développement nouveau du secteur de l'intérim.

    De façon évidente, cela ne se limite pas à la levée des restrictions existantes. L'importance de mesures destinées à améliorer l'acceptation sociale de l'intérim -y compris grâce à la réglementation des conditions de travail- pour la croissance du secteur, est soulignée ainsi dans l'étude de la CIETT :

    « [Il] est important que toutes les nouvelles dispositions et conditions relatives à l'intérim -particulièrement dans le domaine des salaires et de la sécurité de l'emploi- soient appliquées par une réglementation appropriée du travail. Toutes ces mesures amélioreront l'image du secteur et accroîtront l'acceptation sociale du travail intérimaire. Cela est vital pour que le secteur des [agences privées de l'emploi (APE)] continue de se développer. Les Pays-Bas offrent un exemple de la manière dont un changement progressif de l'acceptabilité sociale de l'intérim a permis le développement du secteur néerlandais des APE et a créé une base pour leur croissance future. »

    Toujours à propos des initiatives législatives, dans certains pays, qui visent à assurer une absence de discrimination salariale entre travailleurs intérimaires et les autres travailleurs, l'étude de la CIETT conclut que cela « peut s'avérer nécessaire pour accroître l'acceptabilité sociale de l'intérim », au moins dans les cas où les agences et les travailleurs intérimaires, ou leurs représentants, ne sont pas capables d' « affronter eux-mêmes le problème des salaires. » C'est là l'approche exacte retenue dans la proposition de directive, en accordant une priorité claire aux accords collectifs, et en imposant le principe de non-discrimination en matière de salaires seulement si aucune solution ne peut être dégagée à ce niveau.

    La proposition de directive sera ainsi un élément important de la création d'un cadre réglementaire adapté pour la poursuite de l'expansion du secteur de l'intérim. L'établissement d'un principe général de non-discrimination aidera à améliorer l'acceptation sociale de l'intérim, le rendra plus attractif et facilitera la levée des barrières à un nouveau développement. La disponibilité de travailleurs, en particulier ceux avec des qualifications plus élevées et des compétences plus diversifiées, encouragera davantage d'entreprises utilisatrices à employer des travailleurs intérimaires. Cela permettra aux agences de recruter leurs travailleurs dans un réservoir de candidats plus important et de se développer dans de nouveaux domaines. Sur la base de cette analyse, on peut donc s'attendre à ce que cette proposition contribue à la création de nouveaux emplois en Europe, à l'amélioration du fonctionnement des marchés du travail et à atteindre ainsi les objectives définis au Sommet de Lisbonne.

    Les coûts salariaux

    Les conséquences de la directive sur les coûts salariaux sont plus difficiles à apprécier. Les chiffres sur l'écart salarial effectif entre travailleurs intérimaires et les travailleurs comparables des entreprises utilisatrices n'existent pas. En réalité, il n'existe pratiquement pas de données sur les niveaux ou la structure des salaires des travailleurs intérimaires.

    Les quelques chiffres qui sont effectivement disponibles dans ce domaine font seulement référence à des données agrégées et comparent les salaires moyens des travailleurs intérimaires avec le revenu moyen des « autres » travailleurs, soit dans le secteur, soit dans l'ensemble de l'économie elle-même. Par conséquent, ils élargissent excessivement l'écart salarial entre travailleurs intérimaires et travailleurs comparables dans les entreprises utilisatrices, et ne peuvent être considérés comme une indication d'une quelconque hausse des salaires qui peut résulter de cette directive. Pour le bien de l'exhaustivité, ces chiffres sont cités ici. On doit cependant noter aussi que, dans la plupart des cas, ce sont de pures estimations qui ne sont pas fondées sur une quelconque méthodologie explicite et sur un rassemblement systématique de données.

    Dans l'étude nationale consacrée par la Fondation européenne à l'Autriche, les estimations indiquent que dans certains cas la différence entre le salaire défini par la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice et le salaire réel des travailleurs intérimaires peut représenter jusqu'à 30%. Par contraste, une autre étude (citée ici), qui compare le revenu brut mensuel moyen d'un travailleurs intérimaires avec le revenu moyen pour le même type de travail, estime que l'écart salarial ne serait que d'environ 5%.

    Les chiffres contenus dans un rapport parlementaire officiel sur la situation du travail intérimaire en Allemagne indiquent que les travailleurs intérimaires gagneraient entre 22% et 40% moins que le salaire moyen perçu par les « autres travailleurs ». Cependant, en Allemagne, les travailleurs intérimaires ont plus souvent des contrats à durée indéterminée, et sont aussi rémunérés entre deux missions, ce qui ne permet pas une comparaison directe entre leur revenu et celui d'autres travailleurs.

    Des estimations professionnelles pour l'Espagne (Observatoire européen des relations industrielles, 28 juillet 1999) indiquaient qu'avant l'entrée en vigueur en 1999 d'une nouvelle loi (qui dispose que les salaires des travailleurs intérimaires doivent être égaux à ceux prévus par la convention collective applicable à l'entreprise utilisatrice), les salaires payés par les agences d'intérim étaient de 10% à 15% plus bas que dans les entreprises utilisatrices.

    Pour le Royaume-Uni, les chiffres cités dans le rapport national de l'étude de la Fondation de Dublin montrent que le revenu hebdomadaire moyen des travailleurs intérimaires à plein-temps représentent 68% du revenu hebdomadaire moyen de l'ensemble des salariés, alors que le chiffre correspondant, pour les personnes à temps plein sous contrat à durée déterminée, est de 89%.

    Encore une fois, on doit souligner que ces chiffres sont cités ici à titre d'illustration et seulement dans un souci d'exhaustivité. Toutes ces données sont seulement des estimations et sont agrégées. De même, elles ne donnent aucune indication quant à une possible hausse des salaires entraînée par la proposition de directive.

    Ceci dit, il est bien entendu possible que, au moins dans certains cas, le principe de non discrimination entre travailleurs intérimaires et travailleurs comparables aboutira à une hausse des coûts salariaux pour les agences et/ou les entreprises utilisatrices.

    Cependant, toute hausse sera limitée par certains facteurs. En premier lieu, on doit encore une fois souligner que, dans une majorité d'États membres, le principe de non-discrimination en matière de rémunération est déjà mis en oeuvre de façon effective, ce qui signifie que, dans ces cas, la directive n'entraînera aucune hausse du tout. Deuxièmement, même là où cela n'est pas le cas, la directive autorisera certaines dérogations importantes à la fois pour les travailleurs intérimaires sous contrat à durée déterminée et ceux sous contrats à durée indéterminée. En particulier, le principe de non-discrimination en matière de rémunération s'appliquera seulement si aucun accord collectif n'existe dans ce domaine. Cela aussi limitera l'impact de la directive en matière de hausse de salaires. Troisièmement, il existe certaines preuves empiriques de cas où les travailleurs intérimaires gagnent en réalités davantage que les travailleurs comparables, par exemple parce qu'ils possèdent des compétences très recherchées, ce qui implique aussi qu'aucune hausse de salaires n'est à attendre dans ces cas.

    En prenant ces considérations en compte, il est donc difficile d'imaginer que la proposition de directive ne conduise à une quelconque hausse des coûts salariaux à une large échelle. Toute hausse de ce type devrait, en tout état de cause, être limitée à certains cas particuliers.

    Même dans les cas où la directive impliquera effectivement certaines hausses des coûts du travail, celles-ci seront limitées par les gains potentiels de productivité. Certaines dispositions de la directive sont susceptibles d'avoir un effet positif sur la productivité des travailleurs intérimaires. Par exemple, le travail intérimaire deviendra plus attractif aux yeux de travailleurs plus qualifiés, et il deviendra possible de faire correspondre plus étroitement le profil des travailleurs intérimaires et les besoins spécifiques des entreprises utilisatrices. La directive promeut aussi un meilleur accès des travailleurs intérimaires aux dispositifs de formation. La non-discrimination et d'autres mesures visant à améliorer l'intégration des travailleurs intérimaires dans les entreprises utilisatrices, comme l'information des représentants des travailleurs sur l'usage du travail intérimaire ou l'accès à l'action sociale, auront un effet positif sur leur motivation et aideront à éviter des conflits éventuels avec le personnel permanent. Toutes ces mesures auront un impact positif sur la productivité et limiteront ainsi les effets de toute hausse de salaire.

    Enfin, l'impact réel d'une hausse de salaire sur les niveaux d'emploi dépendra aussi de la sensibilité aux salaires de la demande de travailleurs intérimaires. Alors que, encore une fois, il n'existe aucune donnée concrète sur ce sujet, il est important de noter que, selon l'étude de la CIETT, le motif essentiel des entreprises utilisatrices pour recourir au travail intérimaire est le remplacement de personnel absent et des hausses temporaires dans la charge de travail, tandis que les avantages de coûts ne concernent que 1% de l'ensemble des cas. De même, même si la directive devait conduire à des hausses de salaires dans certaines situations, il semblerait assez improbable que cela fût la cause d'un déclin important de l'activité du secteur du travail intérimaire, et que cela eût des effets négatifs majeurs sur l'emploi.

    Pour résumer ce débat, la directive a certaines conséquences -à la fois en termes de facteurs salariaux et non salariaux- qui exerceront une influence sur le potentiel de création d'emplois du secteur du travail intérimaire. Certaines raisons expliquent pourquoi tout effet sur les coûts salariaux sera assez limité dans son ampleur et sa portée, et sera amoindri par certains facteurs. Au même moment, par l'établissement d'un cadre réglementaire adéquat pour un nouveau développement du secteur du travail intérimaire, la directive contribuera à exploiter pleinement son potentiel de création d'emplois. Dans ce contexte, il vaut la peine de noter que des règles semblables ou identiques à celles proposées par la directive -y compris, en particulier, le principe de non-discrimination en matière de conditions de travail essentielles- existent d'ores et déjà dans certains pays, et que ces pays sont parmi ceux où le secteur du travail intérimaire est le plus florissant.

    * L'effet sur l'investissement et sur la création d'entreprises

    La proposition de directive n'a aucun effet direct sur l'investissement et sur la création d'entreprises. Comme il est démontré dans la section précédente, elle pose cependant les fondations pour une expansion nouvelle du travail intérimaire dans toute l'Europe, et peut de cette manière entraîner des investissements.

    Le travail intérimaire est important pour les jeunes pousses, où il y a une demande considérable de personnel très qualifié, mais qui ne sont pas toujours en mesure d'embaucher pour une durée indéterminée. Dans la mesure où les dispositions proposées rendent le travail intérimaire plus attractif, il devrait devenir plus facile pour ces jeunes pousses de trouver des travailleurs en adéquation avec leurs besoins spécifiques.

    * Effet sur la compétitivité des entreprises

    En ce qui concerne l'évaluation des conséquences de la proposition de directive sur la compétitivité des entreprises, on peut se référer à de nombreux arguments déjà avancés à propos des effets sur l'emploi. L'analyse suivante abordera ainsi les conséquences essentielles, de façon séparée, sur les agences d'intérim et les entreprises utilisatrices.

    Les agences d'intérim

    Du point de vue de ces agences, les principaux coûts potentiels entraînés par la proposition de directive ont trait aux hausses possibles de salaire qui sont liées au principe de non-discrimination entre travailleurs intérimaires et travailleurs comparables des entreprises utilisatrices. Cependant, la concrétisation de ces possibilités sera limitée par certains facteurs. Premièrement -et c'est le plus important-, le principe de non discrimination en matière de rémunération s'appliquera seulement si aucun accord collectif n'existe. Deuxièmement, seules quelques agences, dans certains pays, seront affectées, soit parce que le principe de non discrimination s'applique déjà aux autres, soit parce que les travailleurs intérimaires perçoivent déjà, en réalité, des rémunérations similaires voire supérieures. Troisièmement, des exceptions importantes demeureront possibles dans le cas des travailleurs intérimaires sous contrat à durée déterminée et indéterminée. Quatrièmement, certaines disparités salariales peuvent continuer à exister, parce qu'elles sont liées par exemple à des différences de qualifications, d'expérience ou de parcours professionnels. Enfin, dans certains cas, les agences seront en position de reporter sur les entreprises utilisatrices les hausses de salaires, car celles-ci sont préoccupées avant tout par la flexibilité. De façon générale, le surcoût engendré par la directive pour les agences en Europe devrait ainsi demeurer assez limité.

    La nécessité de déterminer les niveaux pertinents de salaire pour les travailleurs comparables dans les entreprises utilisatrices peut imposer aux agences une relation surcharge administrative. Dans de nombreux cas, cependant, cette information sera immédiatement disponible, soit grâce aux accords collectifs concernés, qui pourraient servir de point de référence, ou soit grâce à l'entreprise utilisatrice elle-même, qui peut avoir à la rassembler de toute manière afin de déterminer les missions spécifiques.

    L'interdiction des pratiques qui empêchent les travailleurs intérimaires de prendre un emploi permanent peut entraîner des coûts pour les agences en termes de perte de recettes ou de rotation plus rapide de leur personnel. Ces pratiques, cependant, ne sont pas très répandues en Europe et les coûts éventuels qu'elles entraînent devraient être relativement bas. Le gouvernement britannique, par exemple, a élaboré une réglementation qui interdirait les commissions levées sur le passage d'un statut d'intérimaire à celui de permanent, et une étude du Department of Trade and Industry a estimé les coûts qui en résulteraient pour les agences de 0,04% à 0,08% du chiffre d'affaires total de ce secteur.

    En même temps, la directive offre certains avantages aux agences, qui sont susceptibles de les aider à relever, directement ou au moins indirectement, de nombreux problèmes auxquels le secteur est aujourd'hui confronté. Comme il est démontré plus haut, ainsi que dans l'étude de la CIETT, dans certains pays au moins, une expansion plus importante du travail intérimaire est freinée par l'image négative qui lui est encore accolée. Dans d'autres pays, le principal défi du secteur est de s'étendre à de nouveaux domaines et d'offrir à ses clients de services sur mesure, plus diversifiés et plus spécialisés. En retour, cela exige de disposer de travailleurs hautement qualifiés, motivés et flexibles, avec des compétences diversifiées.

    Dans les deux cas, la proposition de directive peut produire des bénéfices considérables pour le secteur de l'intérim. En établissant un principe général de non-discrimination entre les travailleurs intérimaires et les autres travailleurs dans les entreprises utilisatrices, on avancera beaucoup sur la voie de l'amélioration de l'acceptabilité sociale du travail intérimaire. En même temps, elle rendra le travail intérimaire plus attractif pour davantage de groupes de travailleurs, et elle permettra aux agences de recruter leur personnel dans un réservoir plus large de candidats.

    De plus, et peut-être avant tout, en définissant certains standards minima pour les conditions de travail des travailleurs intérimaires, le fondement de nombreuses préoccupations liées aujourd'hui au travail intérimaire aura en réalité disparu. Cela signifiera que, dans de nombreux cas, il deviendra plus aisé de lever les restrictions qui, encore souvent, font obstacle aux activités des agences. Leur examen périodique, comme le prévoit la directive, contribuera davantage encore à leur disparition.

    Les entreprises utilisatrices

    Pour les entreprises utilisatrices, la motivation dominante dans l'embauche de travailleurs intérimaires est leur besoin de plus grande flexibilité dans leur gestion des fluctuations de la demande ou de l'absence de personnel permanent. Elles devraient donc avoir un intérêt majeur à pouvoir recruter, grâce aux agences, des travailleurs bien qualifiés, motivés et adaptable, qui peuvent être rapidement et facilement être intégrés à leur structure.

    La proposition de directive entraîne donc certains bénéfices pour les entreprises utilisatrices. Dans la mesure où elle améliore l'attractivité du travail intérimaire, il deviendra beaucoup plus facile pour les entreprises utilisatrices de recruter des travailleurs qui correspondent à leurs besoins spécifiques. De plus, de nombreuses dispositions de la proposition recèlent la possibilité d'une amélioration de la productivité des travailleurs intérimaires et d'une meilleure intégration dans l'entreprises utilisatrice. Cela concerne en particulier le principe de non discrimination, l'information des représentants des travailleurs sur l'usage du travail intérimaire, ou l'accès à l'action sociale. Ces aspects entraîneront aussi une baisse des frictions et conflits potentiels avec le personnel permanent, et aideront à éviter tous les coûts éventuels liés à ceux-ci. En particulier, le fait que les travailleurs intérimaires ne seront pas traités moins favorablement que le personnel permanent avec lequel ils travailleront de manière quotidienne, ôtera une source importante tensions et de conflits.

    L'abolition des pratiques qui empêchent les travailleurs intérimaires de prendre un emploi permanent profitera encore davantage aux entreprises utilisatrices en leur économisant des commissions et en leur permettant de recruter des travailleurs intérimaires plus aisément.

    Les entreprises utilisatrices peuvent avoir à supporter certains coûts, particulièrement dans la mesure où les agences peuvent reporter sur elles des hausses de salaires par des commissions plus élevées. Cependant, le coût des travailleurs intérimaires représente seulement une petite fraction de l'ensemble des coûts salariaux de la plupart des entreprises utilisatrices. De telles hausses de coûts ne sont par conséquent pas susceptibles d'affecter les entreprises utilisatrices à une large échelle. De plus, dans tous les cas cités plus haut, où aucune hausse de salaire ne sera exigée par la directive, cela n'impliquera aussi aucun changement pour les entreprises utilisatrices. Encore une fois, cela concerne notamment les cas où existent des accords collectifs.

    Offrir un accès à l'action sociale de l'entreprise utilisatrice est un facteur important d'intégration pleine et entière du personnel temporaire dans l'entreprise. Dans la plupart des cas, cela n'entraînera que peu de coûts supplémentaires, voire aucun. La plupart des dispositifs d'action sociale (tels que cantines, crèches, transport,...) sont susceptibles d'entraîner des coûts fixes d'installation. Mais les coûts marginaux entraînés par l'ouverture de ces dispositifs à davantage de travailleurs seront vraisemblablement faibles ou proches de zéro. Par ailleurs, cela améliorera certainement la motivation des travailleurs. Cela renforcera leur sentiment d'appartenir à l'entreprise, influencera leurs relations avec les autres travailleurs et améliorera leur productivité globale.

    Informer les travailleurs intérimaires sur les emplois disponibles dans l'entreprise, selon toute probabilité, ne créera aucun coût pour celle-ci, mais devrait leur offrir certains avantages. Au maximum, cela pourrait entraîner certains coûts administratifs pour mettre en place et faire fonctionner un mécanisme qui permette aux travailleurs intérimaires d'être informés de ces postes vacants de façon systématique et régulière. Cela ne permettra pas seulement d'améliorer l'intégration, la motivation et la productivité des travailleurs intérimaires. Cela impliquera aussi que les entreprises seront en mesure d'utiliser le travail intérimaire plus systématiquement comme un moyen de recruter du personnel permanent, ce qui peut contribuer à économiser les coûts habituellement associés à la recherche, à l'évaluation et au recrutement des candidats.

    La disposition qui prévoit d'informer les représentants des travailleurs sur l'usage du travail intérimaire par l'entreprises utilisatrice n'impliquera aucun coût, ou de façon limitée. Elle contribuera, cependant, à répondre aux réserves et aux objections du personnel, voire à les atténuer, et aidera ainsi à éviter les conflits et les frictions possibles.

    En ce qui concerne la formation, la directive promeut un dialogue social amélioré afin de renforcer l'accès des travailleurs intérimaires aux dispositifs de formation. La directive n'a donc pas d'implications directes en termes de coûts à cet égard.

    5. Est-ce que la proposition contient des mesures prenant en considération la situation spécifique des PME (exigences différentes ou réduites, etc.) -

    La proposition de directive s'applique de façon égale à toutes les entreprises. En ce qui concerne les agences, on doit souligner que, dans la plupart des pays, le secteur est en réalité fortement concentré et que les cinq plus grandes agences jouissent d'une part de marché supérieure à 80%. En ce qui concerne les entreprises utilisatrices, aucun chiffre ayant trait à leur taille n'est disponible.

    Pour les agences de petite et de moyenne taille, la levée des restrictions actuelles sur les activités des agences d'intérim leur permettra de mieux concurrencer les agences plus grandes grâce à des possibilités accrues de spécialisation sur certains créneaux. La flexibilité offerte dans la directive en ce qui concerne les travailleurs intérimaires sous contrat à durée déterminée et indéterminée permettra des modalités d'organisation souples, à la fois au niveau sectoriel et de l'entreprise, et devrait aider à éviter les charges administratives et financières pesant sur les petites et moyennes agences. La disposition selon laquelle le principe de non discrimination ne s'appliquera pas aux missions de moins d'un mois -au moins pendant un certain temps et dans les pays où ce principe n'est pas encore en vigueur- a particulièrement pour objectif de donner à ces petites et moyennes agences davantage de temps pour s'adapter à ces changements.

    Pour les PME utilisatrices, certains bénéfices cités plus haut, tels que la disponibilité de travailleurs bien qualifiés possédant une large expérience professionnelle, les concernent tout particulièrement, et leur permettront dans l'avenir de satisfaire leurs besoins de flexibilité grâce à l'emploi de travailleurs intérimaires.

    Consultation

    6. Liste des organisations qui ont été consultées sur la proposition, et exposé des éléments essentiels de leur position.

    La directive proposée s'appuie sur les négociations menées entre les partenaires sociaux au niveau européen. En 1995, la Commission a commencé à les consulter sur "la flexibilité du temps de travail et la sécurité des travailleurs", y compris sur le travail à temps partiel, à durée déterminée ou intérimaire. Les partenaires sociaux ont déjà conclu des accords-cadres sur le travail à temps partiel et à durée déterminée, qui sont mis en oeuvre au moyen de directives du Conseil. Des négociations similaires sur le travail intérimaire se sont soldées par un échec en mai 2001.

    Les positions des partenaires sociaux étaient malgré tout très proches. Elles incluaient par exemple un accord de base sur le principe de non-discrimination entre les travailleurs intérimaires et les travailleurs comparables au sein des entreprises utilisatrices pour les personnes ayant des contrats temporaires. Néanmoins, aucun accord n'avait pu être conclu pour les travailleurs intérimaires sous contrat à durée indéterminée.

    La proposition actuelle repose largement sur le consensus atteint par les partenaires sociaux au cours de ces négociations. La proposition suggère une formule flexible qui permettrait de déroger au principe de non-discrimination lorsque les travailleurs intérimaires en question continuent d'être rémunérés entre deux missions. La directive proposée fournit ainsi un cadre juridique européen, lequel est fondé sur les négociations des partenaires sociaux et offre, sur la question des travailleurs intérimaires sous contrat à durée indéterminée, un compromis conciliant les positions divergentes des partenaires sociaux.

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