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Document JOC_2002_227_E_0382_01

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la réutilisation et l'exploitation commerciale des documents du secteur public [COM(2002) 207 final — 2002/0123(COD)]

JO C 227E du 24.9.2002, p. 382–386 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

52002PC0207

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant la réutilisation et l'exploitation commerciale des documents du secteur public /* COM/2002/0207 final - COD 2002/0123 */

Journal officiel n° 227 E du 24/09/2002 p. 0382 - 0386


Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL concernant la réutilisation et l'exploitation commerciale des documents du secteur public

(présentée par la Commission)

EXPOSÉ DES MOTIFS

1. JUSTIFICATION DE LA PROPOSITION

Le potentiel des informations émanant du secteur public [1]

[1] Les fondements et l'importance économique de cette initiative sont expliqués en détail dans la communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et au Comité des régions du 23.10.2001 intitulée «eEurope 2002: créer un cadre communautaire pour l'exploitation de l'information émanant du secteur public» COM(2001) 607. Le premier point du présent document récapitule brièvement les principaux arguments développés.

L'économie numérique, basée sur les connaissances, est un moteur puissant pour la croissance, la compétitivité et la création d'emplois, tout en améliorant la qualité de la vie. C'est l'une des idées fortes du plan d'action eEurope 2002 «une société de l'information pour tous» (COM(2000) 330 final). La présente initiative concernant la réutilisation des informations du secteur public s'inscrit dans le cadre du plan d'action et contribuera à la réalisation de ses objectifs, notamment dans les domaines de l'administration en ligne et du contenu numérique.

Dans l'exercice de sa mission, le service public est amené à collecter, à traiter et à diffuser d'énormes quantités d'informations. Les informations financières et commerciales sont collectées par les ministères et autres organismes du secteur public. Les informations juridiques et administratives relèvent par excellence du secteur public. Des informations de nature géographique et touristique ainsi que des informations sur les conditions de circulation sont également collectées par des organismes du secteur public à différents niveaux de gouvernement.

Les particuliers et les entreprises peuvent, les uns comme les autres, tirer de grands bénéfices d'une offre importante d'informations de ce type sur l'internet. Cela facilitera en effet leurs relations avec les administrations publiques et pourrait également renforcer leur participation au processus démocratique. Les informations émanant du secteur public sont très importantes pour la vie démocratique et citoyenne. De la même manière, les informations du secteur public sont une ressource essentielle pour l'activité économique et le bon fonctionnement du marché intérieur. En accroissant l'utilisation des informations émanant du secteur public, on compte que des informations de meilleure qualité seront utilisées par un groupe plus large de citoyens et d'entreprises, ce qui leur permettra de mieux faire valoir les droits que leur confère le marché intérieur.

Les informations émanant du secteur public présentent en effet un potentiel économique considérable. Les nouvelles technologies de la société d'information ont apporté des possibilités jusqu'à présent inouïes pour combiner des données prélevées de sources différentes et en faire des produits et des services à valeur ajoutée. Les informations du secteur public sont une base essentielle pour beaucoup de produits d'information numériques et pourraient devenir une matière première importante pour les nouveaux services, et en particulier pour l'internet sans fil [2]. Il s'agit d'un facteur important qui peut devenir un élément déterminant dans le développement futur du secteur du contenu, dont le marché représente déjà 433 milliards d'euros et qui emploie quelque 4 millions d'Européens. Ces dernières années, la production de contenu a entraîné une création rapide d'emplois et la tendance pourrait se maintenir. L'amélioration des conditions d'exploitation de l'information du secteur public permettra dès lors de relancer considérablement l'activité économique et la création d'emplois. La meilleure utilisation des informations du secteur public présentera encore d'autres avantages pour les particuliers, qui se verront proposer un éventail de produits d'information à valeur ajoutée que le secteur public lui-même ne serait pas en mesure de fournir.

[2] La Commission a adopté le 20.3.2000 une communication intitulée «Introduction des communications mobiles de troisième génération (3G) dans l'Union européenne: Situation actuelle et voie à suivre» COM(2001) 141.

Un marché européen fragmenté

L'intégration continue des économies européennes et le développement de l'internet sans fil suscitera une demande croissante de produits et de services d'information paneuropéens (services touristiques mobiles, services d'informations commerciales à l'échelle européenne, etc.). La mise en place de ce type de produits basés sur des informations émanant du secteur public est cependant loin d'être une tâche aisée. Les règles et les pratiques relatives à la réutilisation des informations divergent d'un pays à l'autre ou manquent tout simplement de clarté. Des difficultés rencontrées dans l'un ou l'autre pays peuvent empêcher un regroupeur de contenu de fabriquer un produit viable pour l'ensemble de l'Union européenne. Cela a des répercussions évidentes sur le marché européen, car les incertitudes concernant les conditions d'utilisation des informations empêchent les entreprises de s'engager dans l'exploitation transfrontalière des informations émanant du secteur public. Cela risque en particulier de mettre hors-jeu les PME dans la mesure où, dans leur cas, toute erreur importante d'investissement peut mettre en péril l'existence même de l'entreprise. L'établissement d'un minimum de règles communes sera un facteur de stabilité et facilitera la création de produits à l'échelle de l'Union. Cela pourrait également faciliter la tâche des organismes du secteur public eux-mêmes, qui se verraient ainsi libérés de l'obligation d'établir des règles ad hoc chaque fois qu'ils doivent répondre à des demandes de réutilisation de l'information.

Les difficultés rencontrées pour mettre en place des services d'information transfrontaliers affectent non seulement les producteurs de ces services, mais également les utilisateurs. Le fait de disposer de services d'information de bonne qualité sur, par exemple, les procédures administratives, les conditions de circulation, les conditions d'investissement ou la situation en matière d'environnement intéresse à la fois les entreprises exerçant des activités au sein du marché intérieur et les particuliers. On voit donc que la difficulté d'exploiter les informations émanant du secteur public risque d'avoir des effets négatifs sur le marché intérieur dans son ensemble.

Le choix de l'instrument juridique

La présente directive garantira qu'en matière de réutilisation des informations du secteur public les mêmes conditions de base s'appliqueront à tous les acteurs du marché de l'information européen, que davantage de transparence sera assurée sur les conditions de la réutilisation et que les distorsions injustifiées du marché seront éliminées. Plusieurs raisons ont amené la Commission à considérer qu'une proposition de directive concernant l'exploitation des informations du secteur public était le moyen le plus indiqué pour obtenir des résultats dans ce domaine, et ces mêmes raisons expliquent pourquoi la coordination entre les États membres ainsi qu'une recommandation adressée à eux sont insuffisantes pour redresser la situation, compte tenu aussi de l'importance économique de la question. La présente proposition de directive assurera la sécurité juridique aux acteurs du marché et fixera des délais pour la mise en oeuvre des changements, en laissant les États membres libres de choisir la manière précise selon laquelle les dispositions seront adaptées aux circonstances locales. Elle représentera une réponse claire à l'internationalisation des besoins en informations et à la nature paneuropéenne de plusieurs des produits et des services d'information. Elle permettra d'éviter une approche fragmentaire dans la mesure où les États membres évolueront à des moments différents dans ce domaine.

De plus, ne rien faire ou faire trop peu dans ce domaine pourrait nous amener dans quelques années à devoir constater avec déplaisir qu'il existe encore des obstacles considérables à l'exploitation des informations du secteur public à l'échelle de l'Union européenne et que l'écart avec les États-Unis a augmenté. L'expérience acquise par le passé dans le cadre des lignes directrices de 1989 [3] publiées par les services de la Commission sur l'exploitation des informations du secteur public montre qu'une approche non législative dans ce domaine ne conduira pas aux résultats nécessaires. Dans la pratique, ces lignes directrices ont eu peu d'effet.

[3] Lignes directrices pour améliorer la synergie entre secteur public et secteur privé sur le marché de l'information, Luxembourg 1989.

Par ailleurs, la poursuite des cas d'infraction isolés aux règles actuelles du traité (règles de concurrence, règles concernant la non-discrimination, règles sur la libre circulation des services) n'offre pas à elle seule la sécurité que réclame l'ensemble du secteur pour investir dans de nouveaux produits et services. Elle n'offre que des voies de recours limitées et ne serait pas nécessairement applicable dans d'autres cas. L'essai des limites des recours juridiques existants dans le cadre d'une série d'affaires déterminées prendra, du reste, beaucoup de temps, s'agissant d'instances portées devant les juridictions nationales, et sera une opération coûteuse pour les entreprises concernées. Par ailleurs, les décisions judiciaires ne résoudront pas le problème de fond, qui tient à la divergence des règles et des pratiques actuelles dans les États membres.

La proposition de directive n'aura pas d'incidence négative sur la possibilité offerte aux particuliers d'accéder aux documents à la source. Elle ne modifiera pas les règles en vigueur dans les États membres en matière d'accès aux documents et préservera la qualité de la protection des données à caractère personnel garantie par les réglementations applicables en la matière.

2. CHOIX ET JUSTIFICATION DE LA BASE JURIDIQUE

Comme on l'a vu plus haut, les divergences ou le manque de clarté des législations et/ou des pratiques des organismes publics à l'échelon national gênent le bon fonctionnement du marché intérieur des produits et des services. Les conditions de réutilisation des informations du secteur public en Europe manquent d'un minimum de stabilité et de transparence, ce qui nuit considérablement à la mise en place de produits et de services transfrontaliers basés sur ce type d'informations et, partant, au développement d'un véritable marché européen de l'information.

Dans ce contexte, la présente proposition vise à promouvoir les objectifs du marché intérieur définis à l'article 95 du traité CE en ce qui concerne les mesures relatives au rapprochement des dispositions qui ont pour objet l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur. Des mesures peuvent être adoptées à cet effet, et notamment des règlements, des décisions, des directives ou des recommandations, conformément à la procédure de codécision (article 251).

3. SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ

La présente directive a pour objectifs de faciliter la mise en place de services d'information européens basés sur les informations émanant du secteur public, de favoriser une utilisation transfrontalière efficace des informations du secteur public par les sociétés privées en vue de la création de produits et de services d'information à valeur ajoutée, de limiter les distorsions de concurrence sur le marché européen et d'éviter qu'une différence de rythme entre les États membres dans la définition des modalités de réutilisation des informations du secteur public ne conduise à une nouvelle fragmentation. Compte tenu de leur portée et de leur incidence fondamentalement européennes, ces objectifs ne peuvent, dès lors, être atteints d'une manière satisfaisante par les différents États membres agissant isolément et, partant, seraient mieux servis par une action à l'échelon communautaire.

La directive se borne à assurer l'harmonisation minimale nécessaire à la réalisation de ces objectifs. Les raisons pour lesquelles le choix de l'instrument le plus indiqué au regard des enjeux concernés s'est porté sur une directive sont exposées ci-dessus. Cette formule laisse une ample marge de manoeuvre aux gouvernements mais, en établissant un certain nombre de principes fondamentaux, elle contribuera à atténuer ou à éliminer les principaux obstacles auxquels sont confrontées les entreprises.

La proposition s'inscrit donc parfaitement dans les principes de subsidiarité et de proportionnalité.

4. INCIDENCE DE LA MISE EN oeUVRE DE LA PROPOSITION

Une incidence positive sur le marché de l'information

L'amélioration des possibilités de réutilisation des informations du secteur public grâce à un cadre juridique harmonisé favorisera les investissements et l'innovation sur le marché de l'information par le renforcement de la sécurité et de la transparence. Ces retombées doivent avoir pour effet de stimuler la croissance et d'accroître la compétitivité de l'industrie du contenu numérique et doivent également profiter au consommateur.

La valeur économique considérable des informations du secteur public dans l'Union européenne suffit à elle seule à démontrer le potentiel qu'elles représentent: cette valeur a récemment été estimée à quelque 68 milliards d'euros [4]. Ce secteur égale, dès lors, en importance celui des services juridiques et de l'imprimerie, par exemple. Une meilleure valorisation du potentiel économique des informations du secteur public permettra de relancer les activités et la création d'emplois dans l'industrie du contenu numérique. Un grand nombre de ces emplois se créeront dans les PME.

[4] «Commercial exploitation of Europe's public sector information», Pira International, sept. 2000.

À terme, le marché du contenu mobile devrait acquérir beaucoup d'importance. D'après une étude récente [5], le marché européen du contenu mobile devrait représenter quelque 19 milliards d'euros en 2006. L'étude indique que l'existence d'applications attrayantes et d'applications à valeur ajoutée basées sur l'information du secteur public pourrait jouer un rôle déterminant pour développer ce nouveau marché de services.

[5] «Digital Content for Global Mobile Services», Andersen, 2002

Les mesures proposées donneront, dès lors, à l'industrie du contenu en Europe davantage de possibilités d'utiliser l'information du secteur public pour créer des produits d'information à valeur ajoutée. Le défi consistera, pour les entreprises européennes, à exploiter pleinement ces possibilités.

L'incidence de modes de tarification différents

Au cours des dernières années, une série d'études a été consacrée à la modélisation et à l'évaluation de l'impact économique de politiques plus ouvertes en matière de données. La discussion a porté avant tout sur les questions de tarification, où deux conceptions s'affrontent: la méthode du coût minimum appliquée aux États-Unis - selon laquelle les redevances pour la réutilisation des informations émanant du gouvernement fédéral n'excèdent pas les coûts marginaux de reproduction et de diffusion - et les méthodes de recouvrement des coûts utilisées en Europe. La plupart des analyses - basées sur une approche sectorielle de modélisation économique et/ou empirique - aboutissent à la conclusion que la méthode du coût minimum apporte les plus grands avantages à la société dans son ensemble [6]. Une étude approfondie effectuée sur plusieurs bases de données gérées par des organismes de service public montre que faire payer une redevance équivalant au coût marginal de reproduction et de diffusion est de loin la solution la plus économique et la plus prometteuse en termes de 'prospérité' [7]. Elle serait en particulier profitable aux PME et aux entreprises en phase de démarrage. Les méthodes basées sur le recouvrement des coûts présentent un autre avantage qui est de rendre les informations du secteur public accessibles aux citoyens. Une étude prend particulièrement en considération les effets potentiels sur les recettes fiscales et souligne que l'accroissement de l'activité économique résultant de la diminution des redevances perçues pour la réutilisation des informations du secteur public sera globalement bénéfique pour les finances publiques [8]. Une analyse du ministère des finances du Royaume-Uni [9] réalisée dans le cadre de l'étude des dépenses publiques de l'année 2000 préconise la prudence, tout en reconnaissant la nécessité "d'inclure des mesures d'incitation telles que les départements, et notamment les fonds commerciaux, ne choisissent pas de produire peu à un coût élevé, coût qu'ils peuvent encore couvrir en facturant un prix élevé aux acheteurs. La simple inertie et le désir de ne pas se compliquer la vie peuvent constituer les principaux obstacles à l'extension de l'utilisation d'informations émanant du gouvernement, tout en permettant de couvrir les coûts". L'étude des dépenses a servi de base à la fourniture gratuite d'une série d'informations clef émanant du secteur public à des réutilisateurs.

[6] Voir par exemple les études «Welvaartseffecten van verschillende financieringsmethoden van elektronische gegevensbestanden», rapport de Berenschot et du Nederlands Economisch Instituut pour le ministère hollandais de l'intérieur, 2001, «Commercial exploitation of Europe's public sector information», rapport de Pira International pour la Commission européenne, septembre 2000, ou les travaux de recherche sur les informations géographiques présentés dans «The dissemination of spatial data: a North-American-European comparative study on the impact of government information policy»., X.R. Lopez, Ablex Publishing Corporation 1998 ou encore l'étude «Economische effecten van laagdrempelige beschikbaarstelling van overheidsinformatie» (2000) réalisée pour 'Ravi Bedrijvenplatform' (membres du Dutch Geographic Data Committee appartenant au secteur privé).

[7] «Welvaartseffecten van verschillende financieringsmethoden van elektronische gegevensbestanden», rapport de Berenschot et du Nederlands Economisch Instituut pour le ministère hollandais de l'intérieur, 2001.

[8] L'étude récente, basée sur une projection prudente de l'évolution du marché tenant compte de la diminution des redevances perçues pour la réutilisation des informations du secteur public, indique qu'une politique plus ouverte en matière d'octroi de licences donnerait lieu à des recettes fiscales supplémentaires qui compenseraient largement la perte des recettes provenant de ces redevances. En définitive, dans ces conditions, il ne s'agit pas d'un manque à gagner. «Commercial exploitation of Europe's public sector information», Pira International, sept. 2000.

[9] Annexe à l'étude des dépenses publiques réalisée par le ministère des finances du RU (HM Treasury Spending Review), 2000.

La présente proposition tient compte du fait que certains organismes publics comptent sur des recettes provenant de la vente de leurs informations pour financer en partie leur activité. Elle n'impose pas de changement radical en ce qui concerne les politiques tarifaires. Bien qu'elle incite les États membres à encourager les organismes publics à adopter à chaque fois que c'est possible la méthode de la facturation au coût marginal pour la reproduction et la diffusion, elle laisse le soin aux États membres et à ces organismes de définir les politiques tarifaires. La proposition autorise donc le recouvrement intégral des frais de production et autres frais connexes déboursés par les organismes publics concernés pour la production des documents, ainsi qu'un rendement satisfaisant des investissements. La seule restriction imposée est la fixation d'un plafond lorsque les organismes publics tirent des bénéfices excessifs de l'exploitation des informations qu'ils détiennent.

Le réexamen de la présente directive, prévu 3 ans après son entrée en vigueur, portera notamment sur l'incidence globale de la directive du point de vue de l'accroissement des possibilités de réutilisation des informations émanant du secteur public et sur ses répercussions sur les recettes publiques.

Les effets de la transparence et de conditions commerciales uniformes

La question des redevances n'est qu'un des aspects de la présente proposition. On compte qu'un accroissement de la transparence et l'instauration de conditions commerciales uniformes augmenteront considérablement les possibilités de réutilisation des informations du secteur public [10]. Ces mesures renforceront les services d'information et l'activité économique basée sur les informations du secteur public dans l'ensemble de l'Union européenne. S'il est vrai que les effets de la transparence sont difficiles à quantifier, la clarté et la cohérence sont considérées comme des conditions essentielles à l'évolution du marché [11]. Il en va de même de mesures visant à limiter le comportement monopolistique: aussi bien la théorie que la pratique économiques montrent qu'un tel comportement peut nuire considérablement au développement du marché de l'information.

[10] Voir les conclusions et recommandations de l'étude «Commercial exploitation of Europe's public sector information», Pira International, sept. 2000.

[11] «Welvaartseffecten van verschillende financieringsmethoden van elektronische gegevensbestanden», rapport de Berenschot et du Nederlands Economisch Instituut pour le ministère hollandais de l'intérieur, 2001.

Charge effective imposée aux organismes du secteur public

Les mesures prévues par la présente directive comprennent des dispositions qui pourraient demander un surcroît de travail aux organismes publics concernés. Elles ne vont toutefois pas au-delà des limites normales de la bonne pratique administrative.

L'esprit général de la présente proposition de directive consiste à limiter au maximum le surcroît de travail imposé aux organismes du secteur public. Les documents peuvent être rendus accessibles dans leur format d'origine et il n'y a aucune obligation de créer des documents ou de transposer des documents dans un format différent. La mise en oeuvre des mesures proposées devrait donc avoir une incidence limitée sur les administrations publiques des États membres sur le plan des ressources opérationnelles.

5. RÉSULTATS DES CONSULTATIONS AVEC LES PARTIES INTÉRESSÉES

La proposition de directive s'inspire notamment des réactions au Livre vert intitulé «L'information émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe» (COM(1998) 585), adopté par la Commission sur le 20 janvier 1999 [12], et des consultations qui ont suivi sa publication.

[12] Les réactions au Livre vert et une analyse de ces réactions sont disponibles sur Internet à l'adresse suivante: http://www.cordis.lu/econtent/psi/

Une consultation en ligne a également été lancée pour recueillir les observations et les réactions des parties concernées à propos du contenu d'un instrument juridique. La clôture de la consultation était fixée au 21 février 2002. 77 organisations ont réagi à cette consultation. Les réutilisateurs (entreprises) sont enthousiastes et estiment clairement, dans le droit fil de leurs déclarations antérieures, qu'une directive serait l'instrument approprié pour résoudre les problèmes. Quant aux détenteurs des données, ils expriment certaines inquiétudes au sujet de la proposition, notamment sur la question des tarifs, bien qu'ils considèrent souvent, eux aussi, qu'il serait possible et souhaitable d'améliorer les conditions de réutilisation des informations dans l'ensemble de l'Europe.

6. PRÉSENTATION DÉTAILLÉE DE LA PROPOSITION

La directive proposée s'inspire des orientations de base sur l'encadrement, sur le principe directeur, sur le commerce équitable et sur un nombre de problèmes pratiques proposées par la Commission dans sa communication du 23 octobre 2001 (COM(2001) 607).

Objet et champ d'application (article 1er)

La présente directive s'appliquera aux documents accessibles à tous, sauf dans les cas où elle prévoit une exception.

Activités étrangères à la mission de service public

Dans le cadre de l'utilisation d'informations émanant du secteur public, les organismes publics peuvent utiliser les mêmes documents pour les activités relevant de leur mission de service public et pour les activités de nature commerciale étrangères à cette mission. Il peut s'agir d'apporter de la valeur ajoutée à des informations collectées pour des clients particuliers ou d'élaborer des produits à valeur ajoutée destinés à un marché grand public et basés sur les données initiales qu'ils ont recueillies dans le cadre de leur mission de service public. Des études de marché basées sur des informations statistiques ou des prévisions météorologiques établies sur demande à partir de données météorologiques sont des exemples de ces activités commerciales. Si les informations de base recueillies à l'aide de fonds publics par l'organisme concerné dans le cadre de sa mission de service public doivent être librement accessibles en vue de leur réutilisation, il n'en va pas de même des produits et services d'information de nature commerciale élaborés à partir de ces informations. Certaines mesures de sauvegarde s'imposent toutefois pour garantir des conditions de concurrence uniformes lorsqu'un organisme public et un organisme tiers offrent des produits et services élaborés à partir des mêmes informations. Les conditions tarifaires et autres auxquelles est soumise la fourniture d'informations du secteur public destinées à ces activités commerciales doivent être les mêmes que les conditions appliquées aux tiers qui demandent ces informations (voir l'article 7). Dans les États membres, l'objet des missions de service public d'un organisme public est souvent défini par la loi ou par d'autres règles contraignantes. En l'absence de telles règles, il doit être défini conformément aux pratiques administratives courantes dans l'État membre concerné. La présente directive n'a pas pour but d'harmoniser l'objet des missions de service public assignées par les États membres.

Droits de propriété intellectuelle [13]

[13] Pour éviter tout malentendu, l'expression «droits de propriété intellectuelle» se réfère seulement aux droits d'auteur et aux droits voisins (incluant les droits sui generis). Elle n'inclut pas les droits de propriété industrielle.

Les droits de propriété intellectuelle que des tiers pourraient avoir sur l'information détenue par les organismes du secteur public ne sont pas concernés par les mesures proposées. Il arrive souvent que des produits et des services d'information ont été développés par le secteur public en association avec des partenaires du secteur privé ou, dans d'autres cas, que les droits de propriété intellectuelle appartiennent au personnel des organismes du secteur public. Les mesures proposées sont sans effet sur les droits de ces tiers.

En revanche, la proposition exerce un effet sur la manière dont les organismes du secteur public eux-mêmes peuvent exercer leurs droits de propriété intellectuelle. Tandis que le cadre réglementaire général dans lequel les droits de propriété intellectuelle subsistent et sont administrés est constitué à l'échelon européen par la directive 2001/29/CE [14] sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information et par la directive 96/9/CE [15] concernant la protection juridique des bases de données, la présente proposition fixe des limites raisonnables à l'exercice des droits de propriété intellectuelle par les organismes du secteur public. La proposition ne remet pas en cause l'existence de droits de propriété intellectuelle ou la détention de tels droits par des organismes du secteur public. Elle ne supprime pas le régime actuel de protection des droits de propriété intellectuelle, par exemple les recours juridiques en cas de réutilisation sans autorisation, ni la possibilité d'imposer des conditions pour la réutilisation et donc d'interdire des formes peu souhaitables de réutilisation grâce à une licence.

[14] Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22.5.2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, JO L 167 du 22.6.2001, p. 10-19.

[15] Directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11.3.1996, concernant la protection juridique des bases de données, JO L 77 du 27.3.1996, p. 20 - 28.

Les obligations énoncées dans la présente directive ne s'appliquent que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions des accords internationaux sur la protection des droits de propriété intellectuelle, notamment la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques et l'accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce.

Protection des données

La proposition de directive n'altère en rien le respect total des règles en vigueur en matière de protection des données. Si, pour des raisons liées à la protection des données, les informations ne sont pas accessibles à tous, elles ne seront pas exploitables. Cela vaut notamment pour le cas où des conditions particulières sont applicables pour la consultation de données personnelles détenues par les organismes du secteur public (telles que la nécessité, pour des raisons de protection des données, de faire valoir un intérêt légitime, ou encore l'accès limité à certaines parties des informations).

Radiodiffuseurs de service public, établissements culturels et éducatifs

Pour éviter tout malentendu sur la question de savoir s'il faut considérer les radiodiffuseurs de service public comme des «organismes du secteur public» au sens de la présente directive, il sont expressément exclus de son champ d'application. Cette exclusion résulte de leur statut particulier, qui a été reconnu dans le protocole annexé au traité d'Amsterdam.

D'une manière plus générale, certains organismes du secteur public dont les activités ont trait à la culture ou à l'enseignement ont droit à un traitement spécial en raison de plusieurs facteurs. L'application de la directive risque de leur imposer une charge administrative élevée par rapport aux avantages escomptés. Leurs informations échapperaient, du reste, en grande partie aux dispositions de la directive compte tenu des droits d'auteur détenus par des tiers. Enfin, leur fonction dans la société en tant que vecteurs de culture et de connaissances leur confère un statut particulier.

Définitions (article 2)

La définition qui figure dans les directives sur les marchés publics a servi de point de départ pour la définition de la notion d'«organismes du secteur public». Elle englobe un large éventail d'organismes financés par l'État ou sous contrôle de l'État, à l'exclusion des entreprises publiques.

La définition de la notion de «document», telle qu'elle figure dans la proposition de directive, à savoir «tout contenu quel que soit son support (écrit sur support papier ou stocké sous forme électronique, enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel)», est une définition générale qui correspond aux besoins de la société de l'information. Elle couvre tous les types de contenus, depuis les documents audiovisuels jusqu'aux bases de données, électroniques ou non. Il serait malvenu, par exemple, dans l'ère de l'internet, d'établir une distinction entre les actes d'une conférence gouvernementale et la diffusion de cette même conférence sur le web. Une définition identique a été utilisée dans le règlement relatif à l'accès du public aux documents des institutions, adopté en 2001 [16].

[16] Règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil du 30.5.2001 relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, JO L 145 du 31.5.2001.

«Documents accessibles à tous». Les mesures facilitant la réutilisation des informations du secteur public dans l'ensemble de l'Union européenne s'appuient sur les règles d'accès en vigueur dans les États membres. La présente proposition ne prévoit pas de changer ces règles. Puisque la proposition de directive s'appuie sur les systèmes d'accès actuels, elle ne s'appliquera pas aux documents ayant pour objet la sécurité publique, la défense, la sûreté de l'État, ainsi que les activités de l'État en matière judiciaire dans la mesure où elles ne sont pas soumises à des régimes spéciaux. De même, les documents ou parties de documents contenant des informations commercialement sensibles, telles que des secrets commerciaux, ne seront pas concernés, dans la mesure où ils relèvent des systèmes d'accès nationaux.

Les documents dont se servent des organismes du secteur public pour élaborer leurs propres produits ou services d'information sont réputés accessibles à tous. Le seul fait qu'un organisme du secteur public commercialise ses informations ne saurait suffire à les exclure du champ d'application de la présente proposition.

Principe général (article 3)

L'article 3 énonce que lorsque des organismes publics autorisent la réutilisation de documents, les conditions stipulées aux chapitres II et III s'appliquent. Il n'oblige pas les organismes publics à autoriser la réutilisation de documents spécifiques, mais invite les États membres à encourager lesdits organismes à donner accès à ces documents en vue de leur réutilisation.

Mise à disposition (article 4)

Cet article a pour but de permettre aux demandeurs d'obtenir les documents dans n'importe quel format et dans n'importe quelle langue disponible (par exemple, dans plusieurs formats électroniques), ce qui peut leur faciliter considérablement la tâche en vue du traitement des documents. Le transfert électronique est le mode de transmission préconisé mais, dans la mesure où un grand nombre de documents n'existent encore que sur papier et que tous n'ont pas accès aux outils de la société de l'information ni ne disposent des capacités nécessaires pour les utiliser, la transmission sur papier n'est pas exclue. Afin de ne pas imposer une charge trop lourde aux organismes du secteur public, l'article prévoit qu'aucune obligation ne leur est faite de créer ou de transposer des documents dans un autre format ou une autre langue. La nécessité d'adapter un document ne peut exister que dans le cas où une partie du document n'est pas librement accessible (il peut se révéler nécessaire de séparer cette partie du reste du document pour permettre la réutilisation des parties librement accessibles).

Délais et modalités applicables en cas de rejet d'une demande (article 5)

L'article concerne les cas dans lesquels une autorisation préalable est requise pour la réutilisation des documents. Souvent cette autorisation ne sera pas nécessaire, auquel cas il suffira de consulter l'information sur le web, puis de la réutiliser.

Afin de respecter les différences entre les systèmes d'accès nationaux, il est proposé d'aligner les délais de réponse aux demandes de réutilisation sur les délais applicables en matière d'accès à l'information.

Principes de tarification (article 6)

Le contrôle sur l'information que détiennent les organismes publics dans un secteur particulier leur confère une position de force sur le marché. De la même manière que les entreprises en position dominante ne peuvent abuser de leur puissance commerciale, les organismes du secteur public ne peuvent pas fixer leurs tarifs de manière arbitraire et ne doivent pas faire payer un prix excessivement élevé pour des informations obtenues dans le cadre d'une mission de service public et au moyen de fonds publics. Quoi qu'il en soit, les organismes de service public sont en droit de recouvrer l'investissement réalisé pour produire l'information. C'est la raison pour laquelle le présent projet de directive propose des principes de tarification orientés en fonction des coûts. Lorsque des redevances sont prélevées, le total des recettes provenant des autorisations de consultation ou de réutilisation de ces documents ne doit pas dépasser leur coût de production, de reproduction et de diffusion, majoré d'une marge bénéficiaire satisfaisante. En cas de litige, c'est à l'organisme public qu'il incombe de prouver que les tarifs pratiqués sont orientés en fonction des coûts, à moins qu'il ne tienne une comptabilité suffisamment transparente pour permettre à un réutilisateur éventuel de vérifier le respect du principe.

Cela n'empêche évidemment pas l'organisme en question de pratiquer des prix inférieurs pour la réutilisation du document ou d'appliquer la gratuité totale.

Non-discrimination (article 7)

Afin d'homogénéiser les règles de concurrence, les redevances et autres conditions pour la réutilisation commerciale doivent être non discriminatoires. De même, les conditions imposées à des organisations comparables qui réutilisent les informations à des fins non commerciales doivent être non discriminatoires.

Certains organismes du secteur public exercent également, en plus de leurs activités publiques, des activités commerciales qui ne relèvent pas de leur mission de service public. Les conditions tarifaires et autres auxquelles est soumise la fourniture d'informations du secteur public destinées à ces activités commerciales doivent être les mêmes que les conditions appliquées aux tiers qui demandent ces informations. Dans le cas contraire, le risque existe que l'organisme public concerné abuse de sa position privilégiée pour jouir d'un avantage concurrentiel par rapport aux autres acteurs du marché

Transparence (article 8)

Cet article impose la transparence des conditions de réutilisation (conditions tarifaires et autres). Il est prévisible que les conditions de réutilisation seront publiées sur l'internet par l'organisme en question, surtout si les documents concernés sont eux-mêmes publiés sur l'internet. Une telle transparence garantit que les règles appliquées sont pré-établies et objectives et ne risquent donc pas de contredire les principes de base en matière de concurrence. Elle permet donc de créer un environnement plus prévisible qui rend la prise de décisions en matière d'investissement et la planification plus aisées pour ceux qui réutilisent l'information.

Faciliter la réutilisation (article 9)

Les États membres doivent veiller à ce que des accords de licence types soient proposés et utilisables en ligne pour l'exploitation commerciale des informations du secteur public. Il n'est pas prévu pour autant de créer un modèle européen pour ces licences types en ligne. Il appartient aux États membres de déterminer à quel niveau d'administration il convient de mettre en place ces licences types. Dans la pratique, chaque organisme du secteur public proposant des informations sous licence pourrait disposer de sa propre licence en ligne, mais une certaine uniformisation faciliterait la tâche aux réutilisateurs qui doivent traiter avec plusieurs organismes publics.

Commerce équitable (article 10)

L'article 10 limite la possibilité qu'ont les organismes du secteur public de jouir d'accords d'exclusivité pour l'exploitation d'informations émanant du secteur public si ces accords restreignent de manière injustifiée la concurrence ou la réutilisation commerciale de l'information. En effet, dans la mesure où un accord d'exclusivité conduirait à un abus de position dominante par l'entreprise qui en bénéficie et, partant, à une violation des règles du traité CE en matière de concurrence (article 82 en liaison avec l'article 86), la présente directive traduit l'obligation imposée par le traité de supprimer tous les accords d'exclusivité non justifiés.

Dans certains cas bien définis, l'existence d'un accord d'exclusivité peut cependant se justifier (article 10, paragraphe 2). Les décisions prévoyant que l'exclusivité se justifie dans une situation donnée et, partant, n'entraîne pas de restriction injustifiable de la concurrence se prendraient au cas par cas et conformément à l'article 86 du traité.

Institutions communautaires

Bien que les destinataires de la présente directive soient les États membres, les règles de réutilisation des ressources en informations seront également respectées par les institutions communautaires. Ces dernières années, d'importants détenteurs d'informations au sein des institutions, comme l'Office des publications officielles de Communautés européennes et Eurostat, ont déjà réalisé des efforts considérables pour mettre en place une politique transparente et non discriminatoire pour la réutilisation de leurs informations et agiront en conformité avec les règles du présent acte.

2002/0123 (COD)

Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL concernant la réutilisation et l'exploitation commerciale des documents du secteur public

LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 95,

vu la proposition de la Commission [17],

[17] JO C [...], [...], p. [...].

vu l'avis du Comité économique et social [18],

[18] JO C [...], [...], p. [...].

vu l'avis du Comité des régions [19],

[19] JO C [...], [...], p. [...].

statuant conformément à la procédure visée à l'article 251 du traité [20],

[20] JO C ...

considérant ce qui suit:

(1) Le traité prévoit l'établissement d'un marché intérieur, ainsi que l'instauration d'un régime assurant que la concurrence n'est pas faussée dans le marché intérieur. L'harmonisation des règles et des pratiques des Etats membres en matière d'exploitation des informations du secteur public contribue à la réalisation de ces objectifs.

(2) L'évolution vers la société de l'information et des connaissances devrait influencer la vie des citoyens dans la Communauté en renouvelant notamment les conditions d'accès à la connaissance ainsi que ses modes d'acquisition.

(3) Le contenu numérique joue un rôle déterminant dans cette évolution. Ces dernières années, et actuellement encore, la production de contenu a entraîné une création rapide d'emplois, pour la plupart dans de petites entreprises émergentes.

(4) Le secteur public rassemble, classe et diffuse des informations dans un grand nombre de domaines, qu'il s'agisse d'informations géographiques ou touristiques, d'informations sur les entreprises, sur les brevets ou sur l'enseignement.

(5) L'un des principaux objectifs de l'établissement d'un marché intérieur est de créer les conditions qui permettront de développer des services à l'échelle de la Communauté. Les informations émanant du secteur public constituent une matière première importante pour les produits et les services de contenu numérique et deviendront une ressource de plus en plus importante sur le plan du contenu à mesure que les services de contenu sans fil se développeront. Il sera essentiel, à cet égard, d'assurer une vaste couverture géographique transfrontalière.

(6) Les règles et pratiques des États membres en matière d'exploitation des informations du secteur public présentent d'importantes divergences, qui font obstacle à la pleine réalisation du potentiel économique de cette ressource essentielle. Une harmonisation minimale des règles et des pratiques nationales régissant la réutilisation et l'exploitation commerciale des informations du secteur public s'impose dans les cas où les différences entre les réglementations et pratiques nationales ou l'absence de clarté nuisent au bon fonctionnement du marché intérieur et au bon développement de la société de l'information dans la Communauté.

(7) Faute d'un minimum d'harmonisation au niveau communautaire, les activités législatives au niveau national, dans lesquelles un certain nombre d'États membres se sont d'ores et déjà engagés pour relever les défis technologiques, risquent d'entraîner des écarts encore plus significatifs. L'incidence de ces incertitudes et de ces différences législatives grandira encore avec l'essor de la société de l'information, qui a déjà considérablement augmenté l'exploitation transfrontalière de l'information.

(8) Il importe d'établir un cadre général fixant les conditions de réutilisation des informations émanant du secteur public afin de garantir que ces conditions seront équitables, proportionnées et non discriminatoires.

(9) La présente directive doit s'appliquer aux documents détenus par les organismes du secteur public qui sont accessibles à tous. Lorsque des organismes du secteur public autorisent la réutilisation de ce type de documents, ces documents doivent être réutilisables à des fins commerciales et non-commerciales à certaines conditions. Les organismes du secteur public doivent être encouragés à promouvoir la mise à disposition en vue de leur réutilisation de tous les documents qu'ils détiennent et qui sont accessibles à tous.

(10) La multiplicité des formats utilisés par les organismes du secteur public peut entraîner une charge considérable pour les organisations privées qui veulent réutiliser des informations provenant de plusieurs sources. La nécessité de numériser des documents sur papier ou de manipuler des fichiers électroniques pour les rendre mutuellement compatibles doit être réduite en imposant aux organismes du secteur public de mettre les documents à la disposition du public dans tous leurs formats préexistants.

(11) Le délai de réponse aux demandes de réutilisation des informations doit être raisonnable et accordé avec le délai de réponse applicable aux demandes d'accès aux documents, de manière à ne pas empêcher la création de nouveaux produits et services d'information globalisés. Les retards excessifs entre la demande de réutilisation des documents et la décision statuant sur cette demande peuvent entraver la constitution de collections de données couvrant la totalité de la Communauté, puisque le rythme de progression sera celui du pays le plus lent.

(12) Lorsque des redevances sont prélevées, le total des recettes provenant des autorisations de consultation ou de réutilisation de ces documents ne doit pas dépasser leur coût de production, de reproduction et de diffusion, majoré d'une marge bénéficiaire satisfaisante. La production couvre la collecte et le classement, et la diffusion peut aussi comprendre une aide aux utilisateurs. Le plafond tarifaire est délimité par le recouvrement des coûts, majoré d'une marge bénéficiaire satisfaisante, toute tarification excessive devant être interdite. Il doit être loisible aux organismes du secteur public d'appliquer des tarifs inférieurs, voire de pratiquer la gratuité totale, et les États membres doivent inciter lesdits organismes à proposer les documents à des prix qui n'excèdent pas les coûts marginaux de reproduction et de diffusion.

(13) Les conditions tarifaires et autres appliquées en matière de réutilisation des informations du secteur public doivent être non discriminatoires. Cette règle s'applique également aux activités à caractère commercial des organismes du secteur public qui sont étrangères à leur mission de service public. Cela signifie que les mêmes conditions concernant les intrants doivent s'appliquer pourl'utilisation de documents dans le cadre des activités commerciales des organismes du secteur public et pour l'utilisation des mêmes documents dans le cadre des activités d'autres acteurs du marché. En particulier, les conditions tarifaires et autres auxquelles est soumise la fourniture d'informations du secteur public destinées à servir d'intrants dans le cadre de ces activités commerciales doivent être les mêmes que les conditions appliquées aux tiers qui demandent ces informations.

(14) Assurer la clarté et l'accessibilité publique des conditions de réutilisation des informations du secteur public est une condition préalable au développement d'un marché de l'information à l'échelle de la Communauté. Il importe, dès lors, de porter clairement à la connaissance des réutilisateurs potentiels l'ensemble des conditions applicables en matière de réutilisation de l'information.

(15) La possibilité d'accéder en ligne à des accords de licence types peut également jouer un rôle important en la matière. Dans tous les cas où les organismes du secteur public exercent leurs droits de propriété intellectuelle et/ou rendent payante la réutilisation des documents, il faut veiller à l'existence d'accords de licence types pour faciliter les transactions et accroître leur transparence.

(16) Les organismes du secteur public doivent veiller à ne pas risquer de contredire les principes fondamentaux de la politique de concurrence et ne doivent pas adopter de comportement qui pourrait constituer un abus de position dominante. L'existence d'accords d'exclusivité entre organismes du secteur public et partenaires privés pour l'exploitation des documents peut engendrer d'importantes distorsions du marché. Dans de nombreux cas, il s'agira d'accords conclus sur une base nationale, empêchant dès lors les autres acteurs dans la Communauté d'accéder au marché et de réutiliser ces mêmes informations. Néanmoins, dans le cadre d'une prestation de service d'intérêt économique général, il peut parfois se révéler nécessaire d'accorder un droit d'exclusivité pour la réutilisation de certaines informations du secteur public. Ce cas peut se produire, par exemple, si aucun éditeur commercial n'est disposé à publier l'information sans disposer de ce droit d'exclusivité.

(17) La réutilisation des informations du secteur public doit respecter pleinement les obligations particulières incombant aux autorités en matière de traitement des données à caractère personnel, conformément aux dispositions de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données [21]. En particulier, les données à caractère personnel collectées par les organismes du secteur public ne peuvent être utilisées à des fins incompatibles avec les finalités originelles, explicites et légitimes de leur collecte. Il peut arriver que la réutilisation à des fins commerciales de données à caractère personnel ou de documents contenant des données de ce type soit, par nature, incompatible avec ces finalités originelles, surtout lorsqu'il s'agit de données dont la collecte par les pouvoirs publics est obligatoire et dont les personnes concernées ne peuvent refuser le traitement.

[21] JO L 281 du 23.11.1995, p. 31

(18) La présente directive ne porte pas atteinte aux droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers. Elle ne remet pas en cause les droits de propriété intellectuelle existants ou leur détention par des organismes du secteur public, de même qu'elle ne restreint en aucune manière l'exercice de ces droits en dehors des limites qu'elle fixe. Les obligations énoncées dans la présente directive ne doivent s'appliquer que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions des accords internationaux sur la protection des droits de propriété intellectuelle, notamment la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques et l'accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce [22]. Les organismes du secteur public doivent toutefois exercer ces droits de façon à faciliter la réutilisation des documents.

[22] JO L 336 du 23.12.1994, p. 214.

(19) Les objectifs de l'action envisagée sont de faciliter la création de produits et de services d'information à l'échelle de la Communauté basés sur les informations émanant du secteur public, de favoriser une utilisation transfrontalière efficace des informations du secteur public par les entreprises privées en vue de créer des produits et des services d'information à valeur ajoutée, de limiter les distorsions de concurrence sur le marché européen et d'éviter que les différences de rythme entre États membres dans la mise en place des conditions de réutilisation des informations du secteur public n'engendrent de nouvelles disparités. Conformément au principe de subsidiarité et au principe de proportionnalité tels qu'énoncés à l'article 5 du traité, ces objectifs ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison de la dimension et des effets intrinsèquement communautaires de ladite action, être mieux réalisés au niveau communautaire. La présente directive se limite au minimum requis pour atteindre ces objectifs et n'excède pas ce qui est nécessaire à cette fin,

ONT ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:

Chapitre I

Dispositions générales

Article premier

Objet et champ d'application

1. La présente directive fixe un ensemble minimal de règles en matière d'exploitation commerciale et non commerciale, par tout ressortissant de l'Union et par toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre, de documents existants détenus par des organismes du secteur public des États membres et accessibles à tous.

2. La présente directive ne s'applique pas:

a) aux documents dont la fourniture est une activité qui ne relève pas de la mission de service public dévolue aux organismes du secteur public concernés en vertu de la loi ou d'autres règles contraignantes en vigueur dans l'État membre ou, en l'absence de telles règles, en vertu des pratiques administratives courantes dans l'État membre concerné;

b) aux documents ou parties de documents dont des tiers détiennent les droits de propriété intellectuelle;

c) aux documents contenant des données à caractère personnel, sauf si la réutilisation de ces données à caractère personnel est admissible au regard des dispositions du droit communautaire et des dispositions nationales relatives au traitement des données à caractère personnel et à la protection de la vie privée;

d) aux documents détenus par des diffuseurs de service public et leurs filiales et par d'autres organismes ou leurs filiales pour l'accomplissement d'une mission de radiodiffusion de service public;

e) aux documents détenus par des établissements d'enseignement et de recherche, et notamment par des écoles, des universités, des instituts de recherche, des archives et des bibliothèques;

f) aux documents détenus par des établissements culturels, et notamment par des musées, des bibliothèques, des archives, des orchestres, des opéras, des ballets et des théâtres.

3. Les obligations énoncées dans la présente directive ne s'appliquent que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions des accords internationaux sur la protection des droits de propriété intellectuelle, notamment la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques et l'accord sur les droits de propriété intellectuelle liés au commerce.

Article 2

Définitions

Aux fins de la présente directive, on entend par

1) «organismes du secteur public», l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public et les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou un ou plusieurs de ces organismes de droit public.

2) «organisme de droit public», tout organisme

a) créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial;

b) doté de la personnalité juridique; et

c) dont soit l'activité est financée majoritairement par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public.

3) «document»:

a) tout contenu quel que soit son support (écrit sur support papier ou stocké sous forme électronique, enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel);

b) toute partie de ce contenu.

4) «document accessible à tous», tout document pour lequel les règles en vigueur dans l'État membre prévoient un droit d'accès et tout document utilisé par des organismes du secteur public comme élément entrant dans l'élaboration de produits ou de services d'information en vue de leur commercialisation.

5) «réutilisation», l'utilisation à des fins commerciales ou non commerciales, par des personnes physiques ou morales, de documents détenus par des organismes du secteur public.

6) «données à caractère personnel», les données définies à l'article 2, point a), de la directive 95/46/CE.

Article 3

Principe général

Lorsque des organismes du secteur public autorisent la réutilisation de documents accessibles à tous, ces documents peuvent être réutilisés à des fins commerciales ou non-commerciales conformément aux conditions définies aux chapitres II et III.

Chapitre II

Conditions de réutilisation

Article 4

Mise à disposition

1. Les organismes du secteur public mettent leurs documents à la disposition du public dans tout format ou toute langue préexistants, si possible et s'il y a lieu sous forme électronique. Aucune obligation n'est faite aux organismes du secteur public de créer ou d'adapter des documents pour répondre à la demande.

2. Les organismes du secteur public ne peuvent être tenus de poursuivre la production d'un certain type de documents en vue de leur réutilisation par un organisme privé.

Article 5

Délais et modalités applicables en cas de décision négative

1. Les organismes du secteur public traitent les demandes de réutilisation et mettent le document à la disposition du demandeur dans un délai raisonnable qui ne dépasse pas le délai de réponse applicable aux demandes d'accès aux documents, si possible et s'il y a lieu sous forme électronique.

2. Dans les cas où il n'est pas prévu de limite dans le temps, les organismes du secteur public traitent la demande et fournissent le document au demandeur dans un délai maximal de trois semaines à compter de la réception de la demande.

3. En cas de décision négative, les organismes du secteur public communiquent au demandeur les raisons du refus fondé sur les dispositions applicables du système d'accès en vigueur dans l'État membre concerné, sur l'une des exceptions visées à l'article 1er, paragraphe 2, ou sur l'article 3. En cas de décision négative fondée sur l'article 1er, paragraphe 2, point b), l'organisme du secteur public fait mention de la personne physique ou morale titulaire des droits ou, à défaut, du donneur de licence auprès duquel il a obtenu le document en question. L'inexactitude d'une telle mention n'entraîne pas la responsabilité de l'organisme du secteur public concerné.

4. Toute décision négative fait mention des voies de recours dont dispose le demandeur pour contester cette décision.

Article 6

Principes de tarification

Lorsque des redevances sont prélevées, le total des recettes provenant des autorisations de consultation ou de réutilisation de ces documents ne dépasse pas leur coût de production, de reproduction et de diffusion, tout en permettant un rendement satisfaisant de l'investissement. C'est à l'organisme du secteur public fixant le tarif de réutilisation du document qu'il incombe de prouver que les tarifs sont orientés en fonction des coûts.

Article 7

Non-discrimination

1. Toutes les conditions applicables en matière de réutilisation ou d'exploitation commerciale des documents sont non discriminatoires.

2. Toutes les conditions applicables en matière de réutilisation non commerciale de documents sont non discriminatoires à l'égard de réutilisateurs appartenant à des catégories comparables.

3. Lorsqu'un organisme du secteur public se sert de documents dans le cadre de ses activités commerciales étrangères à sa mission de service public, les conditions tarifaires et autres applicables à la fourniture des documents destinés à ces activités sont les mêmes que pour les autres utilisateurs, dans le cas où la réutilisation est autorisée.

Article 8

Transparence

1. Les tarifs éventuels applicables en matière de réutilisation de documents détenus par les organismes du secteur public sont fixés à l'avance et publiés, dans la mesure du possible et s'il y a lieu sous forme électronique.

2. Toute autre condition éventuelle à laquelle serait soumise la réutilisation des documents doit être clairement exprimée et publiée, dans la mesure du possible et s'il y a lieu sous forme électronique.

Article 9

Mesures visant à faciliter la réutilisation

Les États membres veillent à ce que des accords de licence types pour l'exploitation commerciale des informations émanant du secteur public soient proposés et utilisables sous forme électronique.

Chapitre III

Commerce équitable

Article 10

Interdiction des accords d'exclusivité

1. La réutilisation des documents est ouverte à tous les acteurs potentiels du marché, même si un ou plusieurs d'entre eux exploitent déjà des produits à valeur ajoutée basés sur ces documents. Les contrats ou autres accords conclus entre les organismes du secteur public détenteurs des documents et les tiers n'accordent pas de droits d'exclusivité qui impliquent une restriction injustifiée de la concurrence ou de la réutilisation de l'information.

2. Si, pour des raisons tenant, par exemple, à la prestation d'un service d'intérêt général, un droit d'exclusivité est jugé nécessaire, le bien-fondé de l'octroi de ce droit d'exclusivité fait l'objet régulièrement et, en toute hypothèse tous les trois ans, d'un réexamen. Les accords d'exclusivité conclus après l'entrée en vigueur de la présente directive sont soumis à l'inspection publique.

Chapitre IV

Dispositions finales

Article 11

Mise en oeuvre

Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le [31 décembre 2004]. Les États membres en informent immédiatement la Commission.

Lorsque les États membres adoptent lesdites dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.

Article 12

Réexamen

La présente directive fait l'objet d'un réexamen trois ans après son entrée en vigueur.

Le réexamen porte notamment sur le champ d'application de la présente directive du point de vue des organismes du secteur public concernés. Il porte également sur l'incidence globale de la présente directive du point de vue de l'accroissement des possibilités de réutilisation des informations émanant du secteur public et sur ses répercussions sur les recettes publiques.

Article 13

Entrée en vigueur

La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Article 14

Destinataires

Les États membres sont destinataires de la présente directive.

Fait à Bruxelles, le

Par le Parlement européen Par le Conseil

Le Président Le Président

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