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Document 62021CJ0202

Arrêt de la Cour (première chambre) du 29 septembre 2022.
ABLV Bank AS, en liquidation contre Conseil de résolution unique.
Pourvoi – Politique économique et monétaire – Union bancaire – Règlement (UE) no 806/2014 – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Fonds de résolution unique – Contributions annuelles – Liquidation d’un établissement de crédit – Remboursement de contributions acquittées – Pro rata temporis.
Affaire C-202/21 P.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2022:734

 ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

29 septembre 2022 ( *1 )

« Pourvoi – Politique économique et monétaire – Union bancaire – Règlement (UE) no 806/2014 – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement – Fonds de résolution unique – Contributions annuelles – Liquidation d’un établissement de crédit – Remboursement de contributions acquittées – Pro rata temporis »

Dans l’affaire C–202/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 30 mars 2021,

ABLV Bank AS, en liquidation, représentée par Me O. Behrends, Rechtsanwalt,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par MM. C. J. Flynn et J. Kerlin, en qualité d’agents, assistés de Mes S. Ianc, T. Klupsch, B. Meyring et S. Schelo, Rechtsanwälte,

partie défenderesse en première instance,

Commission européenne, représentée par M. A. Nijenhuis, Mme A. Steiblytė et M. D. Triantafyllou, en qualité d’agents,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. L. Bay Larsen (rapporteur), vice-président de la Cour, et M. A. Kumin, juge,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 28 avril 2022,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, ABLV Bank AS, en liquidation, demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 20 janvier 2021, ABLV Bank/CRU (T‑758/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:28), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision du Conseil de résolution unique (CRU) du 17 octobre 2018 rejetant sa demande visant, d’une part, à recalculer sa contribution ex ante pour l’année 2018 et à lui rembourser le trop-perçu ainsi que, d’autre part, à lui rembourser une partie de sa contribution ex ante pour l’année 2015 à la suite du retrait de son agrément par la Banque centrale européenne (BCE) (ci-après la « décision litigieuse »).

Le cadre juridique

Le règlement (UE) no 806/2014

2

L’article 2 du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), est libellé comme suit :

« Le présent règlement s’applique aux entités suivantes :

a)

les établissements de crédit établis dans un État membre participant ;

b)

les entreprises mères, y compris les compagnies financières holding et les compagnies financières holding mixtes, établies dans un État membre participant, lorsque celles-ci sont soumises à une surveillance sur base consolidée exercée par la BCE [...]

c)

les entreprises d’investissement et les établissements financiers établis dans un État membre participant lorsqu’ils sont couverts par la surveillance sur base consolidée de leur entreprise mère exercée par la BCE [...] »

3

L’article 5, paragraphe 1, de ce règlement prévoit :

« Lorsque, en vertu du présent règlement, le CRU exécute des tâches et exerce des pouvoirs qui [...] doivent être exécutées ou exercés par l’autorité de résolution nationale, le CRU est considéré, aux fins de l’application du présent règlement [...] comme l’autorité de résolution nationale concernée ou, dans le cas de la résolution d’un groupe transfrontalier, comme l’autorité de résolution au niveau du groupe concernée. »

4

L’article 70, paragraphes 2 et 4, dudit règlement dispose :

« 2.   Chaque année, le CRU, après consultation de la BCE ou de l’autorité compétente nationale et en étroite coopération avec les autorités de résolution nationales, calcule les contributions individuelles pour faire en sorte que les contributions dues par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ne dépassent pas 12,5 % du niveau cible.

[...]

4.   Les contributions dûment reçues de chacune des entités visées à l’article 2 ne leur sont pas remboursées. »

Le règlement délégué 2015/63

5

Le considérant 7 du règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2016/1434 de la Commission, du 14 décembre 2015 (JO 2016, L 233, p. 1) (ci-après le « règlement délégué 2015/63 »), est libellé comme suit :

« L’article 5, paragraphe 1, du [règlement no 806/2014] prévoit que le [CRU] est considéré, aux fins de l’application dudit règlement [...], comme l’autorité de résolution nationale concernée lorsqu’il exécute des tâches et exerce des pouvoirs qui [...] doivent être exécutées ou exercés par l’autorité de résolution nationale. Étant donné que l’article 70, paragraphe 7, du [règlement no 806/2014] habilite le CRU à calculer les contributions des établissements au Fonds de résolution unique [...], la notion d’autorité de résolution au sens du présent règlement doit également inclure le CRU. »

6

L’article 3, point 5, de ce règlement délégué est ainsi rédigé :

« [...] Aux fins du présent règlement, on entend [...] par :

[...]

5)

“contribution annuelle”, le montant [...] levé par l’autorité de résolution aux fins du dispositif de financement national durant la période de contribution auprès de chacun des établissements [...] »

7

L’article 12 dudit règlement délégué prévoit :

« 1.   Lorsqu’un établissement est surveillé depuis seulement une partie de la période de contribution, la contribution partielle est calculée par application de la méthode exposée à la présente section au montant de la contribution annuelle calculé pour la période de contribution suivante, rapporté au nombre de mois entiers de la première période de contribution pour lesquels l’établissement a été surveillé.

2.   Un changement de statut d’un établissement, y compris un petit établissement, au cours de la période de contribution n’a pas d’effet sur la contribution annuelle due pour l’année en question. »

8

L’article 17, paragraphes 3 et 4, du même règlement délégué énonce :

« 3.   Lorsque les informations soumises par un établissement à l’autorité de résolution font l’objet de retraitements ou de révisions, l’autorité de résolution adapte la contribution annuelle, conformément aux informations mises à jour, lors du calcul de la contribution annuelle de cet établissement pour la période de contribution suivante.

4.   Le règlement de toute différence entre la contribution annuelle calculée et versée sur la base des informations qui font l’objet de retraitements ou de révisions et la contribution annuelle qui aurait dû être versée à la suite de l’adaptation de la contribution annuelle se fait sur le montant de la contribution annuelle due pour la période de contribution suivante. Cette adaptation est réalisée par réduction ou augmentation de la contribution pour la période de contribution suivante. »

Le règlement d’exécution (UE) 2015/81

9

L’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (JO 2015, L 15, p. 1), précise :

« Les engagements de paiement irrévocables d’un établissement qui ne relève plus du champ d’application du règlement (UE) no 806/2014 sont annulés et les garanties dont ils sont assortis sont restituées. »

10

L’article 8, paragraphe 2, de ce règlement d’exécution est ainsi rédigé :

« Au cours de la période initiale, lorsqu’il calcule les contributions individuelles de chaque établissement, le CRU tient compte des contributions perçues par les États membres participants conformément aux articles 103 et 104 de la directive 2014/59/UE [du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190),] et transférées au Fonds [...], en les déduisant du montant dû par chaque établissement. »

Le règlement délégué (UE) 2017/2361

11

L’article 7, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement délégué (UE) 2017/2361 de la Commission, du 14 septembre 2017, sur le système définitif de contributions aux dépenses administratives du Conseil de résolution unique (JO 2017, L 337, p. 6), dispose :

« 2.   Lorsque le statut d’une entité ou d’un groupe passe d’une des catégories spécifiées à l’article 4, paragraphe 1, à l’autre au cours d’un exercice financier, sa contribution annuelle individuelle pour ledit exercice est calculée sur la base du nombre de mois pour lesquels l’entité ou le groupe relevait de la catégorie considérée le dernier jour du mois.

[...]

4.   Lorsqu’une modification telle que visée aux paragraphes 1 et 2 a été signalée par la BCE [...], le CRU recalcule uniquement la contribution annuelle individuelle de l’entité ou du groupe pour les exercices concernés. [...]

5.   Lorsque le montant d’une contribution annuelle individuelle qui a été payée est supérieur au montant recalculé conformément au paragraphe 4, le CRU rembourse la différence à l’entité ou au groupe concerné. Lorsque le montant d’une contribution annuelle individuelle qui a été payée est inférieur au montant recalculé conformément au paragraphe 4, l’entité ou le groupe concerné paie la différence au CRU. Aux fins du remboursement ou de la perception d’une somme due en vertu du présent paragraphe, le CRU diminue ou augmente la contribution annuelle individuelle de l’entité ou du groupe concerné pour l’exercice qui suit le nouveau calcul effectué conformément au paragraphe 4. »

Les antécédents du litige

12

ABLV Bank était un établissement de crédit letton agréé qui était soumis à la surveillance de la BCE dans le cadre du mécanisme de surveillance unique (MSU).

13

Au mois de décembre 2015, ABLV Bank a reçu un avis de perception de la Finanšu un kapitāla tirgus komisija (Commission des marchés financiers et des capitaux, Lettonie), l’informant du montant dû au titre de sa contribution ex ante pour l’année 2015. Cette contribution, payée par la requérante, a été transférée au Fonds de résolution unique (FRU).

14

Le 23 février 2018, la BCE a conclu que la défaillance de la requérante était réputée avérée ou prévisible. Le même jour, le CRU a considéré, dans sa décision SRB/EES/2018/09, qu’une mesure de résolution à l’égard de la requérante n’était pas nécessaire dans l’intérêt public.

15

Le 26 février 2018, les actionnaires d’ABLV Bank ont engagé une procédure permettant à cette dernière de mener à terme sa propre liquidation et ont soumis à la Commission des marchés financiers et des capitaux une demande d’approbation de son plan de liquidation volontaire.

16

Par la décision SRB/ES/SRF/2018/03, du 12 avril 2018, sur le calcul des contributions ex ante pour 2018, le CRU a approuvé les contributions ex ante pour l’année 2018. Par lettre du 27 avril 2018, la Commission des marchés financiers et des capitaux a informé ABLV Bank que le CRU avait adopté cette décision et lui a indiqué le montant à payer au titre de de sa contribution ex ante pour l’année 2018. La requérante s’est acquittée de ce montant le 3 juillet 2018.

17

Le 11 juillet 2018, la BCE a adopté, à la suite d’une proposition de la Commission des marchés financiers et des capitaux, une décision de retrait de l’agrément de la requérante.

18

Par lettre du 17 septembre 2018, cette dernière a demandé au CRU le remboursement d’une partie de la contribution versée pour l’année 2015, le nouveau calcul de sa contribution ex ante due pour l’année 2018 et le remboursement du trop-perçu à ce titre.

19

Par la décision litigieuse, le CRU a rejeté cette demande. Le CRU a estimé, sur le fondement de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, qu’aucune des dispositions de ces deux règlements ne prévoyait le nouveau calcul de sa contribution ex ante pour l’année 2018 ou le remboursement d’une partie de celle‑ci. Le CRU a, en particulier, indiqué que le retrait de l’agrément d’un établissement de crédit par la BCE constituait un changement de statut au sens de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63. En outre, le CRU a estimé que les entités qui avaient acquitté des contributions ex ante pour l’année 2015 et dont l’agrément avait été par la suite retiré ne bénéficiaient pas d’un droit au remboursement de ces contributions ex ante, tout comme elles ne bénéficiaient pas, conformément à l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, d’un droit au remboursement de toute autre contribution ex ante dûment payée.

Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

20

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 décembre 2018, ABLV Bank a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

21

À l’appui de ce recours, elle a invoqué dix moyens. Par les trois premiers moyens, elle reprochait, en substance, au CRU de ne pas avoir dûment tenu compte du caractère pro rata temporis des contributions ex ante. Les quatrième et cinquième moyens étaient tirés d’une interprétation erronée, d’une part, de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et, d’autre part, de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63. Les sixième, septième, huitième, neuvième et dixième moyens étaient tirés d’une violation, respectivement, des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, du principe de proportionnalité, de l’adage nemo auditur propriam turpitudinem allegans (ci-après l’« adage nemo auditur »), de l’interdiction d’agir de manière contradictoire ainsi que du droit de propriété et de la liberté d’entreprise.

22

Par décision du 30 avril 2019, la Commission européenne a été admise à intervenir au soutien des conclusions du CRU.

23

Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours introduit par ABLV Bank.

24

Après avoir déclaré ce recours recevable, le Tribunal a examiné ensemble, aux points 52 à 129 de l’arrêt attaqué, les cinq premiers moyens.

25

Au terme de cet examen, il a jugé, au point 130 de cet arrêt, que le CRU n’avait pas commis d’erreur de droit en considérant que le retrait de l’agrément d’un établissement par la BCE, pendant la période de contribution, n’était pas une circonstance qui ouvrait à cet établissement un droit à un nouveau calcul pro rata temporis de sa contribution ex ante pour cette période et en décidant, partant, de ne pas rembourser à ABLV Bank une partie de la somme qu’elle avait versée au titre de sa contribution ex ante pour l’année 2018. Il a également considéré que le CRU n’avait pas commis d’erreur de droit en estimant que le retrait de l’agrément d’un établissement par la BCE, durant la période initiale prévue par le règlement no 806/2014, n’était pas une circonstance qui ouvrait à cet établissement un droit au remboursement du solde restant de sa contribution ex ante versée pour l’année 2015.

26

Par conséquent, il a rejeté, au point 131 de l’arrêt attaqué, les cinq premiers moyens présentés par ABLV Bank.

27

Aux points 132 à 180 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné et a rejeté les sixième à dixième moyens soulevés par ABLV Bank.

Les conclusions des parties

28

Par son pourvoi, ABLV Bank demande à la Cour :

d’annuler l’arrêt l’attaqué ;

d’annuler la décision litigieuse ;

de condamner le CRU aux dépens des deux instances, et

dans l’hypothèse où la Cour ne serait pas en état de statuer sur le recours de première instance, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal.

29

Le CRU et la Commission demandent à la Cour :

de rejeter le pourvoi et

de condamner ABLV Bank aux dépens.

Sur le pourvoi

30

ABLV Bank invoque treize moyens au soutien de son pourvoi tirés, premièrement, d’une interprétation erronée de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, deuxièmement, d’une interprétation erronée de l’article 12 du règlement délégué 2015/63, troisièmement, d’une interprétation erronée de l’article 7 du règlement délégué 2017/2361, quatrièmement, d’une interprétation et d’une application erronées de la notion d’« enrichissement sans cause », cinquièmement, d’une omission de statuer sur une exception d’illégalité, sixièmement, d’erreurs en ce qui concerne la prise en compte de la décision SRB/ES/SRF/2018/03 du CRU, septièmement, d’une interprétation erronée de l’article 17 du règlement délégué 2015/63, huitièmement, d’erreurs en ce qui concerne le régime des engagements de paiement irrévocables, neuvièmement, d’erreurs de droit et d’omission de statuer en ce qui concerne les contributions ex ante pour l’année 2015, dixièmement, d’erreurs de droit lors du rejet du sixième moyen présenté en première instance, onzièmement, d’erreurs de droit lors du rejet du septième moyen présenté en première instance, douzièmement, d’erreurs de droit lors du rejet des huitième et neuvième moyens présentés en première instance ainsi que, treizièmement, d’erreurs en ce qui concerne le caractère suffisamment motivé de la décision litigieuse.

31

Le CRU et la Commission font valoir que plusieurs de ces moyens sont irrecevables.

Sur la recevabilité

Argumentation des parties

32

Le CRU soutient que les premier, quatrième, cinquième et huitième moyens sont irrecevables en tant qu’ils n’identifient pas les points de l’arrêt attaqué auxquels ils se rapportent.

33

La Commission relève que plusieurs moyens, en particulier les premier, troisième, septième et huitième moyens, ne se rapportent à aucun point spécifique de l’arrêt attaqué.

Appréciation de la Cour

34

Il importe de rappeler, d’emblée, qu’il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (arrêt du 13 janvier 2022, Dragnea/Commission, C‑351/20 P, EU:C:2022:8, point 53 et jurisprudence citée).

35

Ainsi, ne répond pas à ces exigences et doit être déclaré irrecevable un pourvoi dépourvu de structure cohérente, se limitant à des affirmations générales et ne comportant pas d’indications précises relatives aux points de l’arrêt attaqué qui seraient éventuellement entachés d’une erreur de droit (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission, C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 30 ainsi que jurisprudence citée).

36

En l’occurrence, il y a certes lieu de constater que les moyens du pourvoi visés par la fin de non-recevoir excipée par le CRU et par la Commission ne comportent pas de mention systématique des points de l’arrêt attaqué auxquels ils se rapportent.

37

Néanmoins, ces moyens sont présentés en suivant la structure de l’arrêt attaqué, comme le précise d’ailleurs explicitement la partie introductive du pourvoi.

38

De ce fait, les indications fournies dans le pourvoi permettent d’identifier aisément les points de l’arrêt attaqué auquel chacun des moyens se rapporte, les arguments avancés en défense par le CRU et la Commission confirmant d’ailleurs que ceux-ci ont été en mesure d’identifier ces points.

39

Partant, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de précision des premier, troisième à cinquième, septième et huitième moyens.

Sur le fond

Sur le premier moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014

– Argumentation des parties

40

Par son premier moyen, ABLV Bank fait valoir que l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 retenue par le Tribunal est erronée, dans la mesure où cette disposition implique simplement que les contributions ex ante ne constituent pas des dépôts remboursables.

41

En premier lieu, le Tribunal se serait écarté du sens commun du terme « due » et de la théorie de l’enrichissement sans cause en considérant comme étant « due » toute somme payée dûment initialement, même s’il s’avère ultérieurement qu’elle ne devait pas être acquittée pour la période pertinente.

42

En outre, la portée de la négation figurant à l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 ne serait pas aussi claire que le Tribunal l’aurait affirmé. La portée de cette négation dépendrait de son objet, à savoir un dépôt remboursable ou un réexamen ultérieur des montants dus. L’absence de mention, dans cette disposition, d’une possibilité d’adapter les contributions ex ante en cas de perte de l’agrément de l’établissement concerné ne serait pas non plus déterminante, au regard du caractère peu détaillé de ladite disposition.

43

En deuxième lieu, ABLV Bank soutient que l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 adoptée dans l’arrêt attaqué est incohérente avec d’autres éléments du droit de l’Union.

44

Cette interprétation serait contredite par l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 et par l’article 17 du règlement délégué 2015/63, lesquels prévoient des possibilités de remboursement de contributions ex ante.

45

Ladite interprétation serait également incompatible avec l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, puisqu’il serait illogique que cette disposition définisse certains changements comme dénués de pertinence pour une détermination ultérieure d’une dette si une telle détermination est en tout état de cause exclue.

46

De même, l’interprétation du Tribunal ne serait pas cohérente avec le raisonnement adopté par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C–255/18, EU:C:2019:967). En effet, ce raisonnement, qui se rapporterait à l’absence de pertinence du changement d’un statut d’un établissement intervenu au cours d’une période de contribution au FRU, serait fondé non pas sur l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, mais sur l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63.

47

En troisième lieu, le Tribunal aurait apprécié de manière erronée la nature des contributions ex ante en jugeant qu’elles ne constituent pas des contributions individuelles déterminées en fonction des risques propres à un établissement et se rapportant à des périodes spécifiques, à l’instar de primes d’assurance. En particulier, le Tribunal n’aurait pas tenu compte du fait que les contributions individuelles sont déterminées en fonction des risques et de la possibilité de prélever de nouvelles contributions après la période initiale prévue par le règlement no 806/2014. En outre, la circonstance que les contributions ex ante sont réparties dans le temps et ne sont pas automatiquement liées à une contrepartie ne serait pas pertinente, puisqu’il s’agirait de caractéristiques communes à l’ensemble des régimes d’assurance.

48

En quatrième lieu, le remboursement sollicité par ABLV Bank serait, en tout état de cause, aussi envisageable dans un cadre assimilable à celui du droit fiscal, sans que l’objectif fixé d’atteindre un niveau cible de réserves suffise à écarter un possible remboursement.

49

Le CRU et la Commission soutiennent que le premier moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

50

L’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 énonce que les contributions ex ante dûment reçues des établissements ne leur sont pas remboursées.

51

Aux points 66 et 67 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, tout d’abord, souligné que le libellé de cette disposition impliquait, sans équivoque, qu’une contribution dûment acquittée ne peut pas faire l’objet d’un remboursement.

52

Le Tribunal s’est ensuite référé, aux points 68 à 73 dudit arrêt, au contexte entourant ladite disposition. Il a notamment relevé qu’il découlait de la législation de l’Union que les contributions ex ante ne se rapportent pas à une année déterminée et qu’elles ne garantissent pas une quelconque contrepartie, ces éléments distinguant ces contributions de primes d’assurance dont le remboursement devrait être envisagé en cas de changement de situation intervenu en cours d’année.

53

Enfin, le Tribunal a relevé, aux points 74 et 75 du même arrêt, que la prise en compte de l’évolution de la situation juridique et financière des établissements concernés en cours d’exercice serait de nature à contrarier la réalisation de l’objectif poursuivi par le règlement no 806/2014 et par le règlement délégué 2015/63, à savoir veiller à ce que, au terme d’une période initiale de huit années, les moyens financiers disponibles du FRU atteignent au moins 1 % du montant des dépôts couverts de tous les établissements de crédit agréés dans tous les États membres participants.

54

À cet égard, il convient de souligner, en premier lieu, que le Tribunal a constaté à juste titre, au point 67 de l’arrêt attaqué, qu’il découle du libellé clair de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 que le législateur de l’Union a entendu exclure, de manière générale, le remboursement des contributions ex ante qui ont été reçues en bonne et due forme.

55

En outre, dès lors qu’ABLV Bank fait valoir que le Tribunal a retenu, dans l’arrêt attaqué, une interprétation s’écartant du sens ordinaire du terme « dû », il importe de relever que ladite disposition se réfère non pas aux « contributions dues », mais aux « contributions dûment reçues », indiquant ainsi que la règle de non remboursement qu’elle établit s’applique aux contributions ex ante qui ont été régulièrement perçues à la date de leur paiement.

56

Par ailleurs, si ABLV Bank se prévaut du caractère peu détaillé de la même disposition pour écarter la pertinence du constat, opéré au point 67 de l’arrêt attaqué, selon lequel aucune mention n’y est faite d’une possibilité d’ajuster a posteriori les contributions ex ante, sans toutefois en contester la substance, force est de constater que cette formulation reflète le choix du législateur de l’Union d’énoncer une règle dépourvue d’exception.

57

En deuxième lieu, l’argumentation d’ABLV Bank selon laquelle l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 retenue par le Tribunal contredit d’autres dispositions de droit dérivé ne saurait prospérer.

58

En effet, tout d’abord, l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 se borne à énoncer certaines règles applicables aux engagements de paiement irrévocables fournis par un établissement, lesquels présentent des particularités qui ont conduit le législateur de l’Union, ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 111 de l’arrêt attaqué, à instituer un régime spécifique propre à ces engagements.

59

Ensuite, si l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2015/63 prévoit certes la prise en compte de l’éventuelle différence entre une contribution ex ante versée sur la base d’informations qui font l’objet de retraitements ou de révisions et la contribution ex ante qui aurait dû être versée, il résulte de ces dispositions que cette prise en compte doit être opérée non pas sous la forme d’un remboursement, tel que celui sollicité par ABLV Bank auprès du CRU en l’espèce, mais dans le cadre du calcul de la contribution ex ante pour la période de contribution suivante.

60

Enfin, contrairement à ce que prétend la requérante, l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 retenue aux points 66 à 75 de l’arrêt attaqué ne peut être regardée comme privant de toute utilité l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63.

61

D’une part, comme l’a relevé Mme l’avocate générale au point 72 de ses conclusions, l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 a notamment pour objet d’éviter toute incertitude quant à la portée de l’article 12, paragraphe 1, de ce règlement délégué, dans la mesure où celui-ci prévoit une dérogation au principe selon lequel les contributions ex ante sont calculées sur la base des informations disponibles au 31 décembre de l’année précédant la période de contribution.

62

D’autre part, l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 ont un champ d’application matériel différent. En effet, alors que la première de ces dispositions ne porte que sur les contributions au FRU, la seconde vise, conformément à l’article 3, point 5, du règlement délégué 2015/63, les contributions levées par l’autorité de résolution aux fins du dispositif de financement national, notion qui doit être comprise, en vertu de l’article 5, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, comme visant également le CRU, ainsi que l’indique le considérant 7 de ce règlement délégué.

63

Dans ce contexte, la circonstance que, dans l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C–255/18, EU:C:2019:967), qui se rapportait au calcul d’une contribution à un fonds national de résolution, la Cour se soit limitée à interpréter l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, seule disposition sur laquelle elle était au demeurant interrogée, ne saurait impliquer qu’elle aurait écarté implicitement l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 retenue dans l’arrêt attaqué.

64

En troisième lieu, l’analogie invoquée par ABLV Bank entre les contributions ex ante et les primes d’assurance ne saurait, en tout état de cause, imposer au CRU de substituer au libellé clair de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, une règle contraire, au motif que cette règle serait, selon la requérante, usuelle dans le domaine des assurances.

65

Partant, les arguments d’ABLV Bank visant à démontrer que le Tribunal ne pouvait, au regard des éléments énoncés aux points 68 à 72 de l’arrêt attaqué, écarter, au point 73 de celui-ci, la similarité des caractéristiques des contributions ex ante et de celles de primes d’assurance doivent être rejetés comme étant inopérants.

66

En quatrième lieu, l’argumentation d’ABLV Bank dirigée contre les points 74 et 75 de l’arrêt attaqué, tirée de ce qu’il aurait été possible d’atteindre l’objectif consistant à procurer au FRU des moyens financiers suffisants au terme d’une période initiale de huit années, tout en procédant à un remboursement de contributions ex ante lorsqu’un établissement sort du champ d’application du règlement no 806/2014, n’est pas non plus de nature à remettre en cause l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, de ce règlement retenue au point 76 de cet arrêt.

67

En effet, la circonstance que le législateur de l’Union aurait également pu atteindre l’objectif mentionné au point 74 dudit arrêt en autorisant de tels remboursements, à la supposer établie, ne permet pas d’écarter les choix du législateur quant aux moyens les plus adéquats pour poursuivre cet objectif, choix qui sont exprimés par le libellé clair de ladite disposition (voir, par analogie, arrêt du 17 mars 2011, Brussels Hoofdstedelijk Gewest e.a., C‑275/09, EU:C:2011:154, point 29).

68

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 12 du règlement délégué 2015/63

– Argumentation des parties

69

Par son deuxième moyen, ABLV Bank soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la perte de l’agrément d’un établissement de crédit doit être considérée comme un « changement de statut », au sens de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63.

70

Cette interprétation serait incohérente avec l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 adoptée dans l’arrêt attaqué. En effet, si tout remboursement était exclu en application de cette disposition, il serait inutile d’avoir écarté, à l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, la possibilité de procéder à un tel remboursement en cas de changement de statut.

71

En outre, cette dernière disposition ne concernerait que le montant de la contribution ex ante et non le principe même de versement d’une telle contribution. Cette interprétation découlerait clairement de la version en langue allemande de ladite disposition et serait compatible avec les autres versions linguistiques de celle-ci. Avant de dire pour droit qu’une fusion transfrontalière devait être regardée comme constituant un « changement de statut », au sens de l’article 12 du règlement délégué 2015/63, la Cour se serait d’ailleurs fondée, au point 47 de l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C‑255/18, EU:C:2019:967), sur la circonstance que, à la suite d’une telle opération, l’établissement concerné continuait à relever du mécanisme de résolution unique (MRU).

72

Le CRU et la Commission soutiennent que le deuxième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

73

L’article 12, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 prévoit une méthode spécifique de calcul de la contribution ex ante qui doit être appliquée lorsqu’un établissement est surveillé depuis seulement une partie de la période de contribution.

74

L’article 12, paragraphe 2, de ce règlement délégué énonce qu’un changement de statut d’un établissement, y compris un petit établissement, au cours de la période de contribution n’a pas d’effet sur la contribution ex ante due pour l’année en question.

75

Après avoir exposé, au point 77 de l’arrêt attaqué, le libellé de ces dispositions, le Tribunal a cité, aux points 80 à 83 de cet arrêt, une large partie des points 35 à 48 de l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C‑255/18, EU:C:2019:967). Sur ce fondement, le Tribunal a estimé, aux point 84 et 87 de l’arrêt attaqué, que, pour les mêmes raisons que celles retenues par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C‑255/18,EU:C:2019:967), le retrait de l’agrément d’un établissement de crédit par la BCE doit être considéré comme un tel changement de statut, même si ce retrait implique que l’établissement en cause ne relève plus du MRU.

76

À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a jugé que les termes « changement de statut », employés à l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, peuvent englober toute sorte de changement dans la situation juridique ou factuelle d’un établissement susceptible d’avoir une incidence au regard de l’application de cette disposition (arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International, C‑255/18, EU:C:2019:967, point 35).

77

Le contexte dans lequel s’inscrit cette disposition implique, en outre, qu’une opération qui constitue un changement de statut, au sens de ladite disposition, ne bénéficie pas, en principe, du calcul de la contribution au prorata temporis prévu à l’article 12, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, dans la mesure où cette dernière disposition est d’interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International, C‑255/18, EU:C:2019:967, points 39 et 40).

78

La Cour a encore précisé que, si les autorités de résolution nationales devaient tenir compte de l’évolution de la situation juridique et financière des établissements au cours de l’exercice concerné, elles pourraient difficilement calculer de manière fiable les contributions ordinaires dues au cours de l’année suivante et, par conséquent, réaliser l’objectif consistant à atteindre, au plus tard le 31 décembre 2024, au moins 1 % du montant des dépôts couverts de tous les établissements agréés sur le territoire d’un État membre (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International, C‑255/18, EU:C:2019:967, point 43).

79

La Cour a déduit de ces éléments que la notion de « changement de statut », prévue à l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, doit être comprise de manière extensive comme incluant, notamment, une fusion transfrontalière par absorption ayant eu lieu au cours de la période de contribution (arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International, C‑255/18, EU:C:2019:967, point 44).

80

Dès lors que les considérations relatives au libellé, au contexte et à l’objectif de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 rappelées aux points 76 à 78 du présent arrêt sont pertinentes s’agissant de la perte de l’agrément d’un établissement de crédit au cours d’une année donnée, le Tribunal a jugé, à bon droit, au point 84 de l’arrêt attaqué, que ces considérations justifiaient qu’une telle perte d’agrément soit qualifiée de « changement de statut », au sens de cette disposition.

81

De même, c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a rejeté, au point 87 de l’arrêt attaqué, l’argument d’ABLV Bank selon lequel la notion de « changement de statut », au sens de ladite disposition, ne vise pas les changements conduisant un établissement à ne plus relever, à l’avenir, du MRU.

82

En effet, il convient de relever que le libellé de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 n’opère aucune distinction entre les changements de statut des établissements selon qu’ils conduisent ou non à faire sortir l’établissement concerné du MRU.

83

La circonstance, invoquée par ABLV Bank, que la version en langue allemande de cette disposition se réfère uniquement au montant de la contribution ex ante est dénuée de pertinence à cet égard.

84

Dans ces conditions, les considérations figurant au point 47 de l’arrêt du 14 novembre 2019, State Street Bank International (C‑255/18, EU:C:2019:967), qui ne visent, ainsi que l’indique le point 45 de cet arrêt, qu’à confirmer l’interprétation extensive de la notion de « changement de statut », au sens de l’article 12, paragraphe 2, du règlement 2015/63, dont le bien-fondé était déjà établi au point 44 dudit arrêt, ne sauraient être lues comme impliquant que la Cour aurait entendu limiter la portée de cette interprétation extensive aux seules modifications de la situation d’un établissement qui n’entraînent pas la sortie de celui-ci du MRU.

85

Par ailleurs, l’argument avancé par ABLV Bank selon lequel les interprétations de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 et de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 retenues dans l’arrêt attaqué seraient contradictoires doit être écarté pour les motifs exposés aux points 61 à 63 du présent arrêt.

86

Au vu de ce qui précède, le deuxième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le troisième moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 7 du règlement délégué 2017/2361

– Argumentation des parties

87

Par son troisième moyen, ABLV Bank avance, d’une part, que le Tribunal lui a imposé à tort d’établir un lien entre l’article 7 du règlement délégué 2017/2361 et l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, en se fondant sur l’idée erronée selon laquelle une même expression devrait en principe revêtir un sens différent lorsqu’elle est utilisée dans deux dispositions distinctes, à moins qu’il n’existe un lien spécifique entre celles-ci.

88

D’autre part, l’opposition retenue par le Tribunal entre l’intérêt public visé par les contributions ex ante et les intérêts plus particuliers de l’établissement en cause servis par les contributions aux dépenses administratives du CRU serait manifestement erronée. Il serait davantage pertinent de tenir compte du fait que les contributions ex ante présentent un lien plus étroit avec l’établissement concerné, dès lors qu’elles seraient liées au profil de risque de cet établissement.

89

Le CRU et la Commission soutiennent que le troisième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

90

L’article 7, paragraphes 2, 4 et 5, du règlement délégué 2017/2361 prévoit un mode de calcul au prorata temporis de la contribution annuelle individuelle aux dépenses administratives du CRU lorsque le statut d’une entité ou d’un groupe connaît certaines modifications en cours d’année.

91

Au point 86 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que la notion de « changement de statut », au sens de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, ne pouvait pas être comprise comme visant uniquement les cas couverts par l’article 7 du règlement délégué 2017/2361, au regard des différences d’objet et de finalité entre ces deux actes.

92

Au vu des considérations figurant à ce point 86, il apparaît que l’argument d’ABLV Bank selon lequel le Tribunal lui aurait imposé, à tort, d’établir un lien entre l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 et l’article 7 du règlement délégué 2017/2361 repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué, dès lors que le Tribunal ne s’est pas fondé, audit point, sur l’absence de lien établi entre ces deux dispositions.

93

En outre, ABLV Bank ne conteste pas l’appréciation du Tribunal selon laquelle les contributions ex ante et les contributions aux dépenses administratives du CRU n’ont pas le même objet.

94

Cette différence d’objet étant suffisante pour justifier qu’elles soient calculées par des méthodes distinctes et indépendantes, il y a lieu de considérer qu’ABLV Bank n’a pas établi que le Tribunal a commis une erreur de droit en refusant de prendre en compte l’article 7 du règlement délégué 2017/2361 aux fins d’interpréter l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63.

95

Partant, le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le quatrième moyen, tiré d’une interprétation et d’une application erronée de la notion d’« enrichissement sans cause »

– Argumentation des parties

96

Par son quatrième moyen, ABLV Bank soutient que les points 92 à 96 de l’arrêt attaqué reposent sur l’idée erronée selon laquelle l’application de la notion d’« enrichissement sans cause » impliquerait d’examiner uniquement la justification initiale du paiement. Au contraire, il y aurait en principe lieu de prendre en compte des évolutions intervenues ultérieurement qui auraient des conséquences sur la régularité d’un paiement, raison pour laquelle l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 exclut la prise en compte de certains changements par souci de simplicité administrative.

97

Le CRU et la Commission soutiennent que le quatrième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

98

Aux points 94 à 96 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les paiements en cause avaient pour bases légales l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et l’article 12 du règlement délégué 2015/63, bases légales qui excluent un remboursement partiel de la contribution ex ante pour l’année 2018 et dont la validité n’avait pas été contestée par ABLV Bank.

99

Ainsi, le Tribunal s’est explicitement fondé, en vue de constater l’existence d’une base légale à l’enrichissement du FRU découlant de la perception et de la conservation de la contribution ex ante pour l’année 2018 d’ABLV Bank, sur la circonstance que les dispositions pertinentes excluent le remboursement de cette contribution en cas de changement de statut de l’établissement concerné au cours de l’année 2018.

100

Partant, il ne saurait être considéré que le Tribunal a estimé qu’un enrichissement sans cause pouvait être écarté du seul fait que sa justification initiale était établie, sans tenir compte de l’existence d’une base légale pour conserver les montants en cause.

101

Il s’ensuit que le quatrième moyen invoqué par ABLV Bank procède d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué.

102

En conséquence, ce moyen doit être écarté comme étant non fondé.

Sur le cinquième moyen, tiré d’une omission de statuer sur une exception d’illégalité

– Argumentation des parties

103

Par son cinquième moyen, ABLV Bank fait valoir que le Tribunal a omis de répondre à une exception d’illégalité soulevée au point 40 de son mémoire en réponse aux questions du Tribunal, du 12 juin 2020.

104

Le CRU et la Commission soutiennent que le cinquième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

105

Au point 95 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les écritures de la requérante ne contenaient, explicitement ou implicitement, aucune exception d’illégalité relative à l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et à l’article 12 du règlement délégué 2015/63.

106

Dès lors qu’ABLV Bank fait valoir que le Tribunal a ainsi omis de statuer sur une exception d’illégalité exprimée au point 40 de son mémoire du 12 juin 2020, il y a lieu de rappeler, d’une part, que, dans le cadre du pourvoi, le contrôle de la Cour a pour objet, notamment, de vérifier si le Tribunal a répondu à suffisance de droit à l’ensemble des arguments invoqués par le requérant et, d’autre part, que le moyen tiré d’un défaut de réponse du Tribunal à des arguments invoqués en première instance revient, en substance, à invoquer une violation de l’obligation de motivation qui découle de l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 117 du règlement de procédure du Tribunal (arrêt du 9 mars 2017, Ellinikos Chrysos/Commission, C‑100/16 P, EU:C:2017:194, point 31 et jurisprudence citée).

107

L’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige, la motivation du Tribunal pouvant donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 9 mars 2017, Ellinikos Chrysos/Commission, C‑100/16 P, EU:C:2017:194, point 32 et jurisprudence citée).

108

Or, il apparaît que le Tribunal a, au point 95 de l’arrêt attaqué, considéré, implicitement mais nécessairement, que le point 40 du mémoire du 12 juin 2020 de la requérante, qui énonce qu’il serait illégal de retenir l’interprétation de l’article 12 du règlement délégué 2015/63 proposée par le CRU, se rapportait à l’interprétation de cet article et non à sa validité, sans commettre, ce faisant, de dénaturation de ce mémoire.

109

Dès lors, le cinquième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le sixième moyen, tiré d’erreurs en ce qui concerne la prise en compte la décision SRB/ES/SRF/2018/03 du CRU

– Argumentation des parties

110

Par son sixième moyen, ABLV Bank allègue que l’application de la règle selon laquelle une pratique ne peut pas modifier le cadre juridique en vigueur n’est pas appropriée en l’espèce. En effet, alors que la décision SRB/ES/SRF/2018/03 du CRU aurait ordonné le remboursement de contributions ex ante acquittées, il serait constant qu’un tel remboursement ne peut être envisagé que comme résultant d’un droit garanti au bénéficiaire de ce remboursement, sans qu’une libéralité du CRU puisse être admise.

111

L’argument retenu à titre subsidiaire par le Tribunal au sujet de la décision SRB/ES/SRF/2018/03 du CRU serait purement sémantique, un remboursement ne changeant pas de nature parce qu’il est présenté comme un paiement négatif ou qu’il suppose une opération mathématique. En outre, il serait arbitraire d’opérer une différence entre une déduction appliquée au montant d’une contribution et un remboursement.

112

Le CRU et la Commission soutiennent que le sixième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

113

Aux points 98 et 99 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les arguments d’ABLV Bank dirigés contre la décision SRB/ES/SRF/2018/03 du CRU étaient inopérants, dans la mesure où une simple pratique du CRU ne saurait avoir pour conséquence de modifier la teneur des dispositions législatives de l’Union applicables, avant de préciser, à titre subsidiaire, aux points 100 à 102 de cet arrêt, que ces arguments n’étaient pas fondés.

114

Il y a lieu de constater que c’est à bon droit que le Tribunal a rappelé, au point 98 de l’arrêt attaqué, qu’une simple pratique d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union n’est pas de nature à déroger aux normes qui s’imposent à eux et de créer un précédent qu’ils seraient tenus de suivre (voir, en ce sens, arrêts du 26 mars 1996, Parlement/Conseil, C‑271/94, EU:C:1996:133, point 24, et du 1er octobre 2009, Commission/Conseil, C‑370/07, EU:C:2009:590, point 54).

115

Il en découle que, à supposer même que le CRU ait effectivement admis, dans sa décision SRB/ES/SRF/2018/03, la possibilité de procéder à certains remboursements de contributions ex ante, cette décision ne serait pas de nature à remettre en cause l’interprétation retenue par le Tribunal de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63.

116

La circonstance que le CRU ne puisse pas valablement concéder des libéralités à des établissements de crédit est, dans ce contexte, dénuée de pertinence, dans la mesure où l’on ne saurait présumer que le CRU, lorsqu’il a adopté la décision SRB/ES/SRF/2018/03, s’est conformé à cette règle et a, de surcroît, correctement interprété les normes de droit dérivé qui s’imposent à lui.

117

Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante dirigée contre les points 98 et 99 de l’arrêt attaqué doit être écartée comme étant non fondée.

118

Dans ces conditions, les points 100 à 102 de cet arrêt doivent être considérés comme étant surabondants, ce qui implique que l’argumentation visant à contester ces points est inopérante (voir, par analogie, arrêt du 18 juin 2020, Dovgan/EUIPO, C‑142/19 P, non publié, EU:C:2020:487, point 92 et jurisprudence citée).

119

En conséquence, il y a lieu de rejeter le sixième moyen comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le septième moyen, tiré d’une interprétation erronée de l’article 17 du règlement délégué 2015/63

– Argumentation des parties

120

Par son septième moyen, ABLV Bank soutient que le raisonnement du Tribunal relatif à l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur de droit, dès lors que la possibilité de réviser les contributions ex ante prévue à cette disposition montre que l’interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 opérée par le Tribunal n’est pas correcte.

121

Le CRU soutient que le septième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, comme étant non fondé. La Commission fait valoir que ce moyen n’est pas fondé.

– Appréciation de la Cour

122

Après avoir rappelé, au point 105 de l’arrêt attaqué, le libellé de l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2015/63, le Tribunal a jugé, aux points 107 et 108 de cet arrêt, que l’interprétation de ces dispositions proposée par la requérante, selon laquelle toute contribution est susceptible de faire l’objet d’ajustements ultérieurs, n’était pas étayée par leur libellé et que le changement de circonstances invoqué par celle-ci n’était pas comparable aux retraitements ou aux révisions comptables mentionnés auxdites dispositions.

123

Il apparaît que, par son septième moyen, ABLV Bank reproche au Tribunal non pas d’avoir écarté à tort l’application de l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2015/63, mais d’avoir retenu une interprétation de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 incompatible avec cet article 17, paragraphes 3 et 4.

124

Or, pour les raisons exposées au point 59 du présent arrêt, une telle argumentation ne saurait prospérer.

125

Partant, il y a lieu, sans qu’il soit besoin d’apprécier la recevabilité du septième moyen, de rejeter celui-ci comme étant non fondé.

Sur le huitième moyen, tiré d’erreurs en ce qui concerne le régime des engagements de paiement irrévocables

– Argumentation des parties

126

Par son huitième moyen, ABLV Bank estime que le Tribunal a dénaturé son argumentation, dans la mesure où elle n’a pas fait valoir, dans ses écritures de première instance, que ses contributions ex ante constituaient des engagements de paiement irrévocables.

127

Or, l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 démontrerait que des calculs doivent être opérés quand une entité quitte le FRU et, partant, que l’interprétation du règlement no 806/2014 adoptée par le Tribunal est erronée.

128

Le CRU et la Commission soutiennent que le huitième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

129

L’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 prévoit que les engagements de paiements irrévocables d’un établissement qui ne relève plus du champ d’application du règlement no 806/2014 sont annulés et que les garanties dont ils sont assortis sont restituées.

130

Le Tribunal a précisé, au point 111 de l’arrêt attaqué, que de tels engagements ont une nature différente de celle des contributions ex ante et sont, pour ce motif, soumis à un régime spécifique qui ne saurait être appliqué, par analogie, à des contributions telles que celles acquittées par ABLV Bank.

131

À cet égard, il convient de relever, d’une part, qu’il ressort des points 110 et 111 de cet arrêt que le Tribunal n’a pas considéré que la requérante avait fait valoir que sa contribution ex ante pour l’année 2018 était constituée d’engagements de paiement irrévocables.

132

Il importe, en particulier, de souligner que le Tribunal a expressément rejeté, au point 111 dudit arrêt, la possibilité d’appliquer « par analogie » l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81.

133

Il s’ensuit que l’argument tiré d’une dénaturation des écritures de première instance d’ABLV Bank doit être écarté comme étant non fondé.

134

D’autre part, la requérante fait certes valoir, à juste titre, que l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81 implique que la sortie d’un établissement du champ du MRU peut impliquer l’adoption, par le CRU, de certaines mesures relatives aux contributions ex ante acquittées par cet établissement. Toutefois, elle ne critique aucunement les appréciations du Tribunal relatives aux différences distinguant les engagements de paiement irrévocables des autres contributions ex ante et insiste, au contraire, sur la réalité de ces différences.

135

L’argumentation de la requérante ne saurait, dans ces conditions, permettre de constater que le point 111 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit.

136

Dès lors, ce moyen doit être écarté comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le neuvième moyen, tiré d’erreurs de droit et d’omission de statuer en ce qui concerne les contributions ex ante pour l’année 2015

– Argumentation des parties

137

Par son neuvième moyen, ABLV Bank dénonce plusieurs erreurs qu’aurait commises le Tribunal en se prononçant sur l’argumentation de la requérante relative aux contributions ex ante pour l’année 2015.

138

En premier lieu, le Tribunal aurait assimilé à tort ces contributions aux contributions postérieures, alors que les contributions ex ante pour l’année 2015 sont conservées dans des compartiments dédiés jusqu’à leur restitution aux établissements concernés.

139

En deuxième lieu, le Tribunal aurait interprété de manière incorrecte l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81.

140

Ainsi, il n’aurait pas tenu compte du fait que cette disposition n’a pas prévu que la restitution des contributions en cause doit être opérée progressivement sur une période de huit ans. Dans ce contexte, l’exclusion du bénéfice d’un remboursement des établissements qui ne sont plus appelés à verser de contributions ex ante ne serait pas admissible, dès lors que leur situation à cet égard résulterait du report injustifié du remboursement prévu. L’absence de calcul destiné à solder la situation de tels établissements serait étonnante, dans la mesure où un calcul serait prévu, dans une telle situation, à l’article 7, paragraphe 3, du règlement d’exécution 2015/81.

141

En troisième lieu, le Tribunal se serait référé à tort à l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, alors que les contributions ex ante pour l’année 2015 n’auraient pas été collectées en vertu de ce règlement et que les règles applicables à ce type de contributions ne comprendraient pas de dispositions comparables.

142

En quatrième lieu, la position retenue par le Tribunal lors de l’examen de la recevabilité du recours contredirait celle adoptée lors de l’appréciation de fond relative aux contributions ex ante pour l’année 2015.

143

En cinquième lieu, le Tribunal aurait omis de reconnaître que, en se référant à l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, il admet que la question des changements survenus en cours d’année est pertinente.

144

Le CRU et la Commission soutiennent que le neuvième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

145

Après avoir rappelé, aux points 115 et 116 de l’arrêt attaqué, que les contributions ex ante pour l’année 2015 ont été perçues par les États membres, puis transférées au CRU, le Tribunal a tout d’abord estimé, au point 117 de cet arrêt, que ces contributions avaient, après leur transfert, été mises en commun avec les autres contributions ex ante de manière fongible au sein du FRU.

146

Il a ensuite exposé, aux points 119 à 127 dudit arrêt, que l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 ne pouvait pas servir de base à la demande de remboursement formulée par la requérante. Il a relevé, à cet égard, que cette disposition n’institue pas un droit à obtenir un remboursement et qu’elle précise uniquement la méthode devant être suivie par le CRU pour tenir compte, lors du calcul des contributions ex ante, des contributions ex ante pour l’année 2015 qui lui ont été transférées par les États membres.

147

Enfin, le Tribunal a estimé, au point 128 du même arrêt, que les contributions ex ante pour l’année 2015 étaient désormais régies, au même titre que les autres contributions, par l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014.

148

À cet égard, il convient de constater, premièrement, que l’argumentation d’ABLV Bank ne permet pas d’établir que l’interprétation de l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 retenue par le Tribunal aux points 120 à 127 de l’arrêt attaqué est entachée d’une erreur de droit.

149

Cette disposition énonce que, au cours de la période initiale, lorsqu’il calcule les contributions ex ante de chaque établissement, le CRU tient compte des contributions ex ante perçues par les États membres qui ont été transférées au FRU, en les déduisant du montant dû par cet établissement.

150

Comme l’a relevé le Tribunal aux points 120 à 122 de l’arrêt attaqué, il découle tant du libellé de l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 que de l’objet de ce règlement d’exécution, à savoir préciser les conditions de calcul des contributions ex ante au FRU de chaque établissement, que cette disposition ne peut être lue comme instaurant un droit de chaque établissement à se voir rembourser le montant des contributions ex ante perçues par les États membres qui ont été transférées au FRU. Ladite disposition se borne ainsi à prévoir l’intégration d’une opération de déduction de ces contributions dans la méthode de calcul des contributions ex ante au FRU.

151

Dès lors, ainsi que l’a souligné le Tribunal au point 123 de l’arrêt attaqué, un établissement qui n’est plus appelé à acquitter des contributions ex ante au FRU ne peut bénéficier de cette opération de déduction, puisqu’il ne se voit plus appliquer cette méthode de calcul.

152

Cette interprétation de l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 ne saurait être regardée comme étant incompatible avec l’article 7, paragraphe 3, de ce règlement d’exécution, dans la mesure où cette dernière disposition, qui se rapporte au régime spécifique des engagements de paiement irrévocables, n’a ni pour objet ni pour effet de préciser les règles applicables aux contributions ex ante perçues par les États membres qui ont été transférées au FRU.

153

Deuxièmement, pour autant que l’argumentation d’ABLV Bank doit être comprise comme dénonçant l’irrégularité de la pratique du CRU ayant consisté à procéder à la déduction prévue à l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 de manière progressive au cours de la période initiale prévue par le règlement no 806/2014, il y a lieu de constater qu’une telle irrégularité, à la supposer établie, aurait dû être invoquée à l’encontre des décisions fixant chaque année les contributions ex ante, en vue de démontrer que ces décisions étaient fondées sur une méthode de calcul contraire à cette disposition.

154

En revanche, une argumentation fondée sur l’irrégularité d’une telle pratique n’est pas de nature à démontrer que le Tribunal aurait dû constater que le CRU devait, en vue de se conformer à ladite disposition, procéder, lors de la sortie d’un établissement du champ du MRU, à un remboursement de la contribution ex ante de cet établissement perçue par un État membre qui a été transférée au FRU, en dehors de toute opération de calcul annuel des contributions ex ante dues par ledit établissement.

155

Il s’ensuit que les arguments tirés de l’irrégularité de la pratique du CRU ayant consisté à procéder à la déduction prévue à l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 de manière progressive au cours de la période initiale prévue par le règlement no 806/2014 doivent être écartés comme étant inopérants.

156

Troisièmement, dès lors que l’article 70, paragraphe 4, de ce règlement vise « les contributions dûment reçues » sans opérer de distinction entre les contributions ex ante qui ont été directement collectées par le CRU et les contributions ex ante qui lui ont été transférées par les États membres, il ne saurait être considéré que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, au point 128 de l’arrêt attaqué, que cette disposition s’applique à l’ensemble de ces contributions ex ante mises à la disposition du CRU.

157

Quatrièmement, les arguments d’ABLV Bank tirés de contradictions entre le raisonnement du Tribunal relatif aux contributions ex ante pour l’année 2015 et d’autres parties de la motivation de l’arrêt attaqué doivent être regardés comme étant irrecevables, conformément aux principes rappelés au point 34 du présent arrêt, dès lors que la requérante ne précise pas clairement la nature des contradictions de motifs dont elle entend se prévaloir.

158

Cinquièmement, étant donné qu’il résulte des considérations qui précèdent que le Tribunal a valablement jugé, d’une part, que l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 ne prévoit pas un droit au remboursement des contributions ex ante perçues par les États membres qui ont été transférées au FRU et, d’autre part, que l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 était applicable à ces contributions, il apparaît que l’appréciation du Tribunal, exprimée aux points 117 et 128 de l’arrêt attaqué, selon laquelle aucune distinction n’est faite, au sein du FRU, entre lesdites contributions et les contributions ex ante directement collectées par le CRU ne saurait être considérée comme étant nécessaire pour justifier la conclusion à laquelle le Tribunal est parvenu au point 129 de l’arrêt attaqué.

159

Les considérations relatives à cette appréciation devant, en conséquence, être considérées comme étant surabondantes, les arguments d’ABLV Bank critiquant ces considérations doivent être rejetés, conformément à la jurisprudence rappelée au point 118 du présent arrêt, comme étant inopérants.

160

Au vu de ce qui précède, le neuvième moyen doit être écarté comme étant, pour partie, irrecevable, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le dixième moyen, tiré d’erreurs de droit lors du rejet du sixième moyen présenté en première instance

– Argumentation des parties

161

Par son dixième moyen, ABLV Bank soutient que l’appréciation du Tribunal, exposée aux points 134 et suivants de l’arrêt attaqué, selon laquelle la décision litigieuse ne méconnaît pas les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime est entachée d’une erreur de droit, dès lors que, à supposer même que l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 ait le sens que lui a attribué le Tribunal, cette disposition ne saurait être considérée comme étant claire, du fait notamment de l’existence de cas de remboursement des contributions ex ante.

162

Le CRU fait valoir que le dixième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable ou, en tout état de cause, comme étant non fondé. La Commission estime également que ce moyen n’est pas fondé.

– Appréciation de la Cour

163

Aux points 136 à 138 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé que le CRU n’avait pas méconnu les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime. Il a motivé cette appréciation en constatant que la décision litigieuse était prévisible, en tant qu’elle se fondait sur l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, lequel constitue une disposition claire et précise ne comportant aucune exception ou atténuation.

164

Cette appréciation du Tribunal ne saurait être regardée comme étant entachée d’une erreur de droit dès lors que, ainsi que le Tribunal l’a relevé au point 136 de l’arrêt attaqué et qu’il a été rappelé aux points 54 et 55 du présent arrêt, il ressort du libellé même de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 que les contributions ex ante dûment reçues ne peuvent pas faire l’objet d’un remboursement.

165

En outre, si la requérante soutient que le Tribunal a omis de tenir compte de dispositions de droit de l’Union prévoyant que le CRU devait, dans certaines situations, procéder au remboursement de contributions ex ante, il convient de rappeler qu’il ressort de l’examen des premier, troisième et septième à neuvième moyens du présent pourvoi que l’argumentation d’ABLV Bank relative à l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement délégué 2015/63, à l’article 7, paragraphe 3, et à l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81 ainsi qu’à l’article 7 du règlement délégué 2017/2361 n’est pas de nature à démontrer l’existence d’une telle obligation de remboursement.

166

Dès lors, il y a lieu de rejeter le dixième moyen comme étant non fondé.

Sur le onzième moyen, tiré d’erreurs de droit lors du rejet du septième moyen présenté en première instance

– Argumentation des parties

167

Par son onzième moyen, ABLV Bank soutient que le Tribunal a retenu une interprétation « radicale et extrême » des dispositions pertinentes, méconnaissant ainsi le principe de proportionnalité. Il aurait également considéré, de façon erronée, que le CRU ne dispose d’aucune marge d’appréciation.

168

Par ailleurs, ABLV Bank conteste le rejet par le Tribunal, au point 152 de l’arrêt attaqué, de l’argumentation développée au point 23 de la requête, comme étant irrecevable. Elle soutient que cette argumentation était suffisamment précise pour être recevable et ne nécessitait pas une analyse détaillée de l’exemple invoqué à son appui.

169

Le CRU et la Commission soutiennent que le onzième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

170

Aux points 142 à 152 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté l’ensemble des arguments tirés du principe de proportionnalité avancés par la requérante. En particulier, il a relevé, au point 147 de cet arrêt, d’une part, que le CRU ne disposait d’aucune marge d’appréciation lors de l’application de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 ainsi que de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 et, d’autre part, qu’ABLV Bank ne soulevait aucune exception d’illégalité à l’encontre de ces dispositions.

171

Il convient d’emblée de relever qu’il découle des considérations relatives à l’examen des premier et deuxième moyens du présent pourvoi que le Tribunal a jugé à bon droit que le CRU était tenu, en application de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, de rejeter la demande de remboursement présentée par la requérante. Il s’ensuit, comme l’a affirmé le Tribunal au point 147 de l’arrêt attaqué, que le CRU ne disposait, à cet égard, d’aucune marge d’appréciation.

172

Dans ces conditions, le Tribunal était fondé à considérer, aux points 147 et 148 de l’arrêt attaqué, que l’absence de marge d’appréciation du CRU conduit à ce qu’il ne pouvait valablement lui être reproché d’avoir méconnu le principe de proportionnalité en rejetant cette demande, sauf à faire valoir que les dispositions l’obligeant à statuer en ce sens étaient invalides en raison de leur incompatibilité avec ce principe.

173

Or, il résulte du rejet du cinquième moyen du présent pourvoi que le Tribunal n’a pas dénaturé les écritures de première instance en considérant que la requérante n’avait pas soulevé une telle exception d’illégalité.

174

Partant, il apparaît que le motif retenu par le Tribunal au point 147 de l’arrêt attaqué était suffisant pour justifier le rejet du septième moyen présenté en première instance.

175

Dès lors, les arguments d’ABLV Bank tendant à contester d’autres éléments de la motivation du Tribunal relatifs au rejet de ce septième moyen doivent être considérés comme étant inopérants, conformément à la jurisprudence rappelée au point 118 du présent arrêt.

176

Il s’ensuit que le onzième moyen doit être rejeté comme étant, pour partie, inopérant et, pour partie, non fondé.

Sur le douzième moyen, tiré d’erreurs de droit lors du rejet des huitième et neuvième moyens présentés en première instance

– Argumentation des parties

177

Par son douzième moyen, ABLV Bank fait valoir que le Tribunal a appliqué de manière erronée l’adage nemo auditur.

178

En effet, en vue d’appliquer cet adage, il y aurait lieu non pas de déterminer si l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 ont été bien interprétés par le CRU, mais d’évaluer si cet organisme avait créé lui‑même illégalement les conditions qu’il a ensuite invoquées. Or, tel aurait été le cas en l’espèce, dès lors que la perte d’agrément de la requérante serait la conséquence inévitable de la décision SRB/EES/2018/09 du CRU, laquelle aurait excédé la compétence de ce dernier et aurait été illégale. Le CRU ne pourrait pas se prévaloir de l’absence d’annulation de cette décision, puisqu’il prétend que ses décisions du 23 février 2018 ne sont pas soumises à un contrôle juridictionnel.

179

En outre, l’appréciation au point 172 de l’arrêt attaqué selon laquelle les agissements illégaux du CRU ne remettent pas en cause la légalité de la décision litigieuse reviendrait à dénier toute portée à l’adage nemo auditur.

180

Par ailleurs, le Tribunal n’aurait pas répondu au neuvième moyen présenté en première instance, qui se rapportait au caractère contradictoire du comportement consistant à exclure un établissement d’un régime couvrant des risques, tout en retenant la contribution déterminée en fonction du profil de risque de cet établissement.

181

Le CRU et la Commission soutiennent que le douzième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

182

Au point 170 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé qu’aucun comportement fautif ne pouvait être reproché au CRU en l’espèce, puisque celui-ci avait fait une application correcte de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et de l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63. Le Tribunal a ajouté, au point 171 de cet arrêt, que la décision SRB/EES/2018/09 du CRU ne faisait pas l’objet du recours de première instance et ne pouvait donc pas établir un comportement fautif du CRU. Par ailleurs, au point 172 dudit arrêt, le Tribunal a considéré que le moyen tiré d’un comportement prétendument contradictoire de la part du CRU était inopérant en tant qu’il ne tendait pas à remettre en cause la légalité de la décision litigieuse.

183

S’agissant, en premier lieu, de l’appréciation portée par le Tribunal sur le bien-fondé du huitième moyen présenté en première instance par ABLV Bank, il y a certes lieu de constater que, dans la mesure où, par ce moyen, la requérante entendait se prévaloir de l’irrégularité supposée de la décision SRB/EES/2018/09 du CRU, les considérations figurant au point 170 de l’arrêt attaqué, relatives à la conformité de la décision litigieuse à l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 et à l’article 12, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63, étaient dépourvues de pertinence.

184

En revanche, ainsi que l’a relevé le Tribunal au point 171 de l’arrêt attaqué, il ne saurait être présumé, aux fins de l’application de l’adage nemo auditur, que la décision SRB/EES/2018/09 du CRU était irrégulière, alors que celle-ci n’a pas fait l’objet d’un recours en annulation.

185

La circonstance, invoquée par ABLV Bank, que le CRU considère que cette décision ne constitue pas un acte faisant grief est dépourvue de pertinence. En effet, il ressort du point 66 de l’arrêt du 6 mai 2021, ABLV Bank e.a./BCE (C‑551/19 P et C‑552/19 P, EU:C:2021:369), que le résultat final de la procédure de résolution, au cours de laquelle a été adoptée la décision SRB/EES/2018/09 du CRU, aurait pu faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.

186

S’agissant, en second lieu, du neuvième moyen présenté en première instance par ABLV Bank, il convient de souligner que l’argument tiré de l’omission de statuer sur ce moyen doit être écarté, puisque le Tribunal a explicitement rejeté ledit moyen au point 172 de l’arrêt attaqué.

187

En outre, étant donné que ce point porte sur un moyen tiré non pas de la méconnaissance de l’adage nemo auditur, mais d’un comportement prétendument contradictoire du CRU, la critique selon laquelle le Tribunal aurait, audit point, incorrectement appliqué cet adage ne saurait prospérer.

188

En conséquence, il y a lieu de rejeter le douzième moyen comme étant non fondé.

Sur le treizième moyen, tiré d’erreurs en ce qui concerne le caractère suffisamment motivé de la décision litigieuse

– Argumentation des parties

189

Par son treizième moyen, ABLV Bank soutient que le Tribunal a méconnu la portée de l’obligation de motivation en considérant que le caractère suffisamment motivé de la décision litigieuse pouvait être déduit de l’introduction d’un recours et du fait que le Tribunal a considéré être en mesure de statuer.

190

L’insuffisance de la motivation de la décision litigieuse serait illustrée par l’invocation à plusieurs reprises, par le Tribunal, d’éléments extérieurs à cette décision et par les questions posées par celui-ci au cours de la procédure. En particulier, la clarté alléguée de l’article 70, paragraphe 4, du règlement no 806/2014 serait contredite par la référence, dans l’une de ces questions, à un « remboursement » et par le fait que le Tribunal n’a pas estimé pouvoir s’appuyer sur le libellé de cette disposition.

191

Le CRU et la Commission soutiennent que le treizième moyen est non fondé.

– Appréciation de la Cour

192

Au point 178 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a estimé que le CRU avait spécifié, dans la motivation de la décision litigieuse, les éléments de fait et de droit revêtant une importance essentielle. Le Tribunal a également constaté que cette décision avait permis à ABLV Bank de connaître les justifications de ladite décision et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de celle-ci.

193

Comme l’a relevé le Tribunal au point 176 de l’arrêt attaqué, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que, si la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre à l’intéressé de connaître les justifications des mesures prises et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, une telle motivation doit, toutefois, être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. Dans cette perspective, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, en fonction de l’intérêt que les destinataires de l’acte peuvent avoir à recevoir des explications (voir, en ce sens, arrêt du 28 mars 2017, Rosneft, C‑72/15, EU:C:2017:236, point 122 et jurisprudence citée).

194

Force est de constater que le Tribunal a appliqué, au point 178 de l’arrêt attaqué, les critères issus de cette jurisprudence constante pour apprécier le caractère suffisamment motivé de la décision litigieuse. C’est, en particulier, à bon droit que celui-ci a tenu compte du fait que la motivation de cette décision avait permis à la requérante de défendre ses droits et au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de ladite décision.

195

En outre, dès lors que, conformément à ladite jurisprudence constante, il n’est nullement exigé que la motivation d’une décision soit exhaustive, le fait que le Tribunal ait pris en compte, dans son raisonnement, des éléments qui explicitaient cette motivation et qu’il ait conduit une instruction destinée à éclairer ladite motivation n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation du Tribunal énoncée au point 178 de l’arrêt attaqué.

196

Partant, il y a lieu de rejeter le treizième moyen comme étant non fondé.

Sur les dépens

197

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

198

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui‑ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

199

Le CRU et la Commission ayant conclu à la condamnation d’ABLV Bank et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le CRU et par la Commission.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête :

 

1)

Le pourvoi est rejeté.

 

2)

ABLV Bank AS, en liquidation, est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le Conseil de résolution unique (CRU) et par la Commission européenne.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

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