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Document 62017CJ0680

Arrêt de la Cour (première chambre) du 29 juillet 2019.
Sumanan Vethanayagam e.a. contre Minister van Buitenlandse Zaken.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Rechtbank Den Haag, zittingsplaats Utrecht.
Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Code communautaire des visas – Règlement (CE) no 810/2009 – Article 5 – État membre compétent pour examiner une demande de visa et se prononcer sur elle – Article 8 – Accord de représentation – Article 32, paragraphe 3 – Recours contre une décision de refus de visa – État membre compétent pour statuer sur le recours en cas d’accord de représentation – Titulaires du droit d’introduire un recours.
Affaire C-680/17.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2019:627

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

29 juillet 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Code communautaire des visas – Règlement (CE) no 810/2009 – Article 5 – État membre compétent pour examiner une demande de visa et se prononcer sur elle – Article 8 – Accord de représentation – Article 32, paragraphe 3 – Recours contre une décision de refus de visa – État membre compétent pour statuer sur le recours en cas d’accord de représentation – Titulaires du droit d’introduire un recours »

Dans l’affaire C‑680/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Rechtbank Den Haag, zittingsplaats Utrecht (tribunal de la Haye, siégeant à Utrecht, Pays-Bas), par décision du 30 novembre 2017, parvenue à la Cour le 5 décembre 2017, dans la procédure

Sumanan Vethanayagam,

Sobitha Sumanan,

Kamalaranee Vethanayagam

contre

Minister van Buitenlandse Zaken,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.-C. Bonichot, président de chambre, Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteure), vice-présidente de la Cour, Mme C. Toader, MM. A. Rosas et M. Safjan, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : Mme M. Ferreira, administratrice principale,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 décembre 2018,

considérant les observations présentées :

pour M. Vethanayagam, Mme Sumanan et Mme Vethanayagam, par Me M. J. A. Leijen, advocaat,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. K. Bulterman et P. Huurnink, en qualité d’agents,

pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek, J. Vláčil et T. Müller ainsi que par Mme A. Brabcová, en qualité d’agents,

pour le gouvernement danois, par M. J. Nymann-Lindegren ainsi que par Mmes M. Wolff et P. Ngo, en qualité d’agents,

pour le gouvernement estonien, par Mme N. Grünberg, en qualité d’agent,

pour le gouvernement français, par M. D. Colas ainsi que par Mmes E. de Moustier et E. Armoët, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. F. De Luca, avvocato dello Stato,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour le Parlement européen, par MM. G. Corstens et R. van de Westelaken ainsi que par Mme O. Hrstková Šolcová, en qualité d’agents,

pour le Conseil de l’Union européenne, par Mmes E. Moro et S. Boelaert, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme C. Cattabriga ainsi que par MM. F. Wilman et G. Wils, en qualité d’agents,

pour le gouvernement suisse, par M. E. Bichet, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 28 mars 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 32, paragraphe 3, du règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas (JO 2009, L 243, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 610/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 (JO 2013, L 182, p. 1) (ci-après le « code des visas »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Sumanan Vethanayagam, Mme Sobitha Sumanan et Mme Kamalaranee Vethanayagam au Minister van Buitenlandse Zaken (ministre des Affaires étrangères, Pays-Bas, ci-après le « ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas »), au sujet du rejet de demandes de visa de court séjour concernant M. Vethanayagam et Mme Sumanan.

Le cadre juridique

L’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen

3

L’accord entre l’Union européenne, la Communauté européenne et la Confédération suisse sur l’association de la Confédération suisse à la mise en œuvre, à l’application et au développement de l’acquis de Schengen (JO 2008, L 53, p. 52, ci-après l’« accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen ») énonce, à ses huitième et dixième considérants :

« Convaincues qu’il est nécessaire d’organiser la coopération entre l’Union européenne et la Confédération suisse en ce qui concerne la mise en œuvre, l’application pratique et le développement ultérieur de l’acquis de Schengen ;

[...]

Considérant que la coopération Schengen repose sur les principes de liberté, de démocratie, d’État de droit et de respect des droits de l’homme, tels que garantis en particulier par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ».

4

Selon l’article 1er, paragraphe 2, de l’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen :

« Le présent accord crée des droits et des obligations réciproques conformément aux procédures qui y sont prévues. »

5

L’article 2 de cet accord prévoit :

« 1.   Dans la mesure où elles s’appliquent aux États membres de l’Union européenne, ci-après dénommés “États membres”, les dispositions de l’acquis de Schengen énumérées à l’annexe A du présent accord sont mises en œuvre et appliquées par la Suisse.

2.   Dans la mesure où elles ont remplacé et/ou développé les dispositions correspondantes de la convention d’application de l’accord relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes signée à Schengen le 19 juin 1990, ci-après dénommée “convention d’application de Schengen”, ou ont été arrêtées en vertu de celle-ci, les dispositions des actes de l’Union européenne et de la Communauté européenne énumérées à l’annexe B du présent accord sont mises en œuvre et appliquées par la Suisse.

3.   Sans préjudice de l’article 7, les actes et les mesures pris par l’Union européenne et la Communauté européenne modifiant ou complétant les dispositions visées aux annexes A et B, auxquels les procédures prévues dans le présent accord ont été appliquées, sont également acceptés, mis en œuvre et appliqués par la Suisse. »

Le code des visas

6

Les considérants 4, 18, 28, 29 et 34 du code des visas énoncent :

« (4)

Les États membres devraient être présents ou représentés aux fins de la délivrance des visas dans tous les pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa. Les États membres qui n’ont pas de consulat propre dans un pays tiers ou dans une partie d’un pays tiers devraient s’efforcer de conclure des accords de représentation afin d’éviter aux demandeurs de visa de déployer un effort disproportionné pour se rendre aux consulats.

[...]

(18)

Une coopération locale au titre de Schengen est indispensable à l’application harmonisée de la politique commune des visas et à une appréciation correcte des risques migratoires et/ou pour la sécurité. Compte tenu des différences que peuvent présenter les situations locales, l’application pratique de certaines dispositions législatives devrait être évaluée par les représentations diplomatiques et consulaires des États membres dans chaque ressort territorial, afin d’assurer une application harmonisée des dispositions législatives en vue d’éviter le “visa shopping” ainsi qu’un traitement inégal des demandeurs de visa.

[...]

(28)

Étant donné que l’objectif du présent règlement, à savoir la définition des procédures et des conditions de délivrance des visas pour le transit ou les séjours prévus sur le territoire des États membres [...] ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc être mieux réalisés au niveau communautaire, la Communauté peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré à l’article 5 du traité. Conformément au principe de proportionnalité tel qu’énoncé audit article, le présent règlement n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

(29)

Le présent règlement respecte les droits fondamentaux et observe les principes reconnus notamment par la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du Conseil de l’Europe et par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

[...]

(34)

En ce qui concerne la Suisse, le présent règlement constitue un développement des dispositions de l’acquis de Schengen au sens de l’[accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen], qui relèvent du domaine visé à l’article 1, point B, de la décision 1999/437/CE [du Conseil, du 17 mai 1999, relative à certaines modalités d’application de l’accord conclu par le Conseil de l’Union européenne et la République d’Islande et le Royaume de Norvège sur l’association de ces États à la mise en œuvre, à l’application et au développement de l’acquis de Schengen (JO 1999, L 176, p. 31),] lu en liaison avec l’article 3 de la décision 2008/146/CE du Conseil[, du 28 janvier 2008,] relative à la conclusion dudit accord [(JO 2008, L 53, p. 1)]. »

7

L’article 1er du code des visas est libellé comme suit :

« Le présent règlement fixe les procédures et conditions de délivrance des visas pour les transits ou les séjours prévus sur le territoire des États membres d’une durée maximale de 90 jours sur toute période de 180 jours. »

8

Selon l’article 2, point 2, de ce code :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

2)

“visa” : l’autorisation accordée par un État membre en vue :

a)

du transit ou du séjour prévu sur le territoire des États membres, pour une durée totale n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours ;

b)

du passage par la zone internationale de transit des aéroports des États membres ;

[...] »

9

L’article 4, paragraphe 1, dudit code est ainsi libellé :

« Les demandes sont examinées par les consulats, qui se prononcent sur ces demandes. »

10

L’article 5 du même code prévoit :

« 1.   L’État membre compétent pour examiner une demande de visa uniforme et se prononcer sur celle-ci est :

a)

l’État membre dont le territoire constitue la destination unique du ou des voyages.

[...]

4.   Les États membres coopèrent afin d’éviter qu’une demande ne puisse être examinée et qu’une décision ne puisse être prise sur cette demande parce que l’État membre compétent en vertu des paragraphes 1 à 3 ne serait pas présent ou représenté dans le pays tiers où le demandeur introduit sa demande conformément à l’article 6. »

11

L’article 6 du code des visas, intitulé « Compétence territoriale consulaire », énonce, à son paragraphe 1 :

« Le consulat de l’État membre compétent dans la circonscription consulaire duquel le demandeur réside légalement examine la demande et se prononce sur celle-ci. »

12

Aux termes de l’article 8 de ce code, relatif aux accords de représentation :

« 1.   Un État membre peut accepter de représenter un autre État membre compétent conformément à l’article 5 en vue d’examiner les demandes et de délivrer les visas pour le compte de cet autre État membre. Un État membre peut aussi représenter un autre État membre de manière limitée aux seules fins de la réception des demandes et du recueil des identifiants biométriques.

2.   Lorsqu’il envisage de rejeter une demande de visa, le consulat de l’État membre agissant en représentation soumet la demande aux autorités compétentes de l’État membre représenté, afin que celles-ci prennent une décision définitive sur la demande dans le délai prévu à l’article 23, paragraphes 1, 2 ou 3.

[...]

4.   Un accord bilatéral comportant les éléments énumérés ci-dessous est établi entre l’État membre agissant en représentation et l’État membre représenté :

a)

il précise, le cas échéant, la durée de la représentation et la procédure à suivre pour y mettre fin ;

b)

il peut prévoir, en particulier si l’État membre représenté dispose d’un consulat dans le pays tiers concerné, la mise à disposition de locaux et de personnel ainsi qu’une participation financière de l’État membre représenté ;

c)

il peut préciser que les demandes de certaines catégories de ressortissants de pays tiers doivent être transmises par l’État membre agissant en représentation aux autorités centrales de l’État membre représenté pour consultation préalable, conformément à l’article 22 ;

d)

par dérogation au paragraphe 2, il peut autoriser le consulat de l’État membre agissant en représentation à refuser de délivrer un visa après examen de la demande.

5.   Les États membres qui n’ont pas de consulat dans un pays tiers s’efforcent de conclure des accords de représentation avec d’autres États membres qui y disposent d’un consulat.

6.   Afin d’éviter que la mauvaise qualité des infrastructures de transport ou la distance à parcourir dans une région ou zone géographique particulière n’exige, de la part des demandeurs, un effort disproportionné pour se rendre à un consulat, les États membres qui n’ont pas de consulat dans cette région ou zone s’efforcent de conclure des accords de représentation avec d’autres États membres qui y disposent d’un consulat.

[...] »

13

L’article 32, paragraphe 3, dudit code dispose :

« Les demandeurs qui ont fait l’objet d’une décision de refus de visa peuvent former un recours contre cette décision. Ces recours sont intentés contre l’État membre qui a pris la décision finale sur la demande, conformément à la législation nationale de cet État membre. Les États membres fournissent aux demandeurs les informations relatives aux voies de recours, comme indiqué à l’annexe VI. »

14

Selon l’article 47, paragraphe 1, du même code :

« Les autorités centrales des États membres et leurs consulats communiquent au public toutes les informations utiles concernant la demande d’un visa, notamment :

[...]

h)

le fait que les décisions de refus doivent être notifiées au demandeur et motivées, et que les demandeurs dont la demande est refusée disposent d’un droit de recours, avec des informations sur la procédure de recours, y compris l’autorité compétente et le délai d’action ;

[...] »

Le Manuel des visas

15

Le manuel relatif au traitement des demandes de visa et à la modification des visas délivrés, établi par la décision C(2010)1620 final de la Commission, du 19 mars 2010, explique que, « aux fins du code des visas et du présent manuel, le terme “État membre” désigne les États membres qui appliquent pleinement l’acquis de Schengen ainsi que les États associés, et le “territoire des États membres” désigne le territoire [...] des “États membres” précités ».

L’accord de représentation conclu entre le Royaume des Pays-Bas et la Confédération suisse

16

L’accord de représentation conclu entre le Royaume des Pays-Bas et la Confédération suisse qui était applicable au moment des faits est entré en vigueur le 1er octobre 2014. Il précise que la Confédération suisse représentera le Royaume des Pays-Bas pour ce qui concerne tous les types de visas Schengen, entre autres, au Sri Lanka.

17

Aux termes du point 2 de cet accord, la « représentation » consiste, entre autres, à « refuser de délivrer le visa lorsqu’il y a lieu, conformément à l’article 8, paragraphe 4, sous d), du code des visas, et à examiner les recours, conformément au droit national de la partie agissant en représentation (article 32, paragraphe 3, du code des visas) ».

Le litige au principal et les questions préjudicielles

18

M. Vethanayagam et Mme Sumanan, de nationalité sri-lankaise, mariés et résidents au Sri Lanka, ont chacun introduit, le 16 août 2016, une demande de visa de court séjour aux Pays-Bas en vue de rendre visite à Mme Vethanayagam, sœur de M. Vethanayagam, de nationalité néerlandaise et résidant à Amsterdam (Pays-Bas). Ces demandes ont été formées, par l’intermédiaire de VFS Global, prestataire de services, auprès du consulat suisse à Colombo (Sri Lanka) sur la base de l’accord de représentation conclu entre le Royaume des Pays-Bas et la Confédération suisse.

19

Par décisions du 19 août 2016, les autorités consulaires suisses agissant en représentation du Royaume des Pays-Bas ont rejeté les demandes de visa, en raison du fait que M. Vethanayagam et Mme Sumanan n’avaient pas fourni la preuve qu’ils disposaient de moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour garantir leur retour dans leur pays d’origine.

20

M. Vethanayagam et Mme Sumanan ont formé un recours contre ces décisions devant le ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas. Celui-ci s’est déclaré incompétent pour connaître de ce recours par des décisions du 28 septembre 2016.

21

Par ailleurs, la réclamation introduite auprès des autorités suisses par les intéressés contre les décisions du 19 août 2016 a été rejetée par une décision du Staatssekretariat für Migration (secrétariat d’État pour la Migration, Suisse) du 2 décembre 2016. Le Bundesverwaltungsgericht (Tribunal administratif fédéral, Suisse) a rejeté, à titre liminaire, la demande des demandeurs de pouvoir bénéficier de la gratuité de la procédure et a refusé d’examiner le recours introduit contre cette décision en raison du non-paiement de la somme exigée à titre de provision.

22

M. Vethanayagam et Mme Sumanan, ainsi que Mme Vethanayagam, en qualité de personne de référence, ont introduit une nouvelle demande de visa de court séjour auprès du Visadienst (service des visas, Pays-Bas) concernant les deux premiers. Cette demande a été rejetée par une décision du ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas du 18 octobre 2016.

23

Par décision du 23 novembre 2016, le ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas a rejeté comme étant irrecevable la réclamation introduite par les requérants au principal contre la décision du 18 octobre 2016.

24

Les requérants au principal ont formé un recours juridictionnel devant le Rechtbank den Haag, zittingsplaats Utrecht (tribunal de la Haye, siégeant à Utrecht, Pays-Bas) contre les décisions du 28 septembre 2016 et du 23 novembre 2016, en faisant valoir qu’il appartenait au Royaume des Pays-Bas d’examiner leurs réclamations et leurs demandes de visa et que la Confédération suisse n’était intervenue qu’en tant que représentante du Royaume des Pays-Bas. Les demandeurs au principal considèrent que, en vertu du droit de l’Union, ils étaient en droit d’introduire les demandes de visa auprès du pays de leur destination principale, et soutiennent que le fait de confier entièrement les procédures de demande de visa à un autre État est contraire au principe du recours effectif visé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

25

Le ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas fait valoir qu’il n’était pas compétent pour statuer sur les demandes de visa des demandeurs au principal.

26

En premier lieu, la compétence pour examiner les demandes de visa présentées au Sri Lanka aurait été, sur la base de l’article 8, paragraphe 4, du code des visas et de la note verbale fondée sur cette disposition, transférée à la Confédération suisse.

27

En deuxième lieu, les autorités consulaires suisses de Colombo étant compétentes pour refuser de délivrer un visa, les demandeurs au principal auraient dû former leur recours, en vertu de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, contre la Confédération suisse en tant qu’État ayant pris la décision finale sur leurs demandes.

28

En troisième lieu, les demandes de visa des ressortissants de pays tiers demeurant au Sri Lanka ne pourraient pas être introduites directement auprès du service des visas aux Pays-Bas. En effet, étant donné que le Royaume des Pays-Bas est représenté au Sri Lanka par la Confédération suisse, de telles demandes devraient être introduites, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du code des visas, auprès des autorités consulaires suisses.

29

Dans ce contexte, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à l’interprétation qu’il convient de donner au code des visas en ce qui concerne, tout d’abord, la position de la personne de référence dans les procédures de visa, ensuite, la notion de « représentation » et, enfin, la compatibilité du système de représentation consulaire au regard du droit à une protection juridictionnelle effective reconnue à l’article 47 de la Charte.

30

Dans ces circonstances, le Rechtbank den Haag, zittingsplaats Utrecht (tribunal de la Haye, siégeant à Utrecht) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’article 32, paragraphe 3, du code des visas fait-il obstacle à ce que, en tant que partie intéressée dans le cadre de la demande de visa des demandeurs, une personne de référence dispose en son nom propre d’une possibilité de réclamation et de recours contre la décision de refus de ce visa ?

2)

La représentation, telle qu’elle est réglée à l’article 8, paragraphe 4, du code des visas, doit-elle se comprendre en ce sens que la responsabilité continue à incomber (également) à l’État représenté ou en ce sens que la responsabilité est entièrement transférée à l’État agissant en représentation, de sorte que l’État représenté n’est plus lui-même compétent ?

3)

Au cas où l’article 8, paragraphe 4, initio et sous d), du code des visas permet les deux types de représentation visés à la deuxième question préjudicielle, quel est l’État membre qui doit être considéré comme l’État membre qui a pris la décision finale visée à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas ?

4)

Une interprétation de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 32, paragraphe [3], du code des visas selon laquelle les demandeurs des visas peuvent uniquement introduire le recours contre la décision de rejet de leurs demandes devant une instance administrative ou juridictionnelle de l’État membre agissant en représentation et non dans l’État membre représenté pour lequel le visa a été demandé est-elle conforme au droit à une protection juridictionnelle effective visé à l’article 47 de la [Charte] ? Pour la réponse à cette question, est-il pertinent que la voie de recours assurée garantisse que le demandeur a le droit d’être entendu, qu’il a le droit d’intenter le recours dans une langue de l’un des États membres, que l’importance des droits sur les actes ou des droits de greffe dans le cadre des procédures de réclamation et de recours ne soient pas disproportionnés en ce qui le concerne et qu’il existe une possibilité d’aide juridictionnelle couvrant les frais d’assistance juridique et de représentation ? Pour la réponse à cette question, eu égard à la marge d’appréciation dont l’État dispose en matière de visa, la question de savoir si une juridiction suisse a une connaissance suffisante de la situation néerlandaise pour pouvoir assurer une protection juridictionnelle effective est-elle pertinente ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

31

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 32, paragraphe 3, du code des visas doit être interprété en ce sens qu’il permet à la personne de référence de former un recours en son nom propre contre une décision de refus de visa.

Sur la recevabilité

32

À titre liminaire, la Commission européenne conteste la recevabilité de la première question préjudicielle en faisant valoir que la législation néerlandaise ne serait pas applicable à l’affaire au principal étant donné que ce sont les autorités suisses et non néerlandaises qui ont adopté, en l’occurrence, la décision finale sur la demande de visa.

33

Un tel argument ne saurait être retenu.

34

D’une part, il convient de relever que la détermination de l’État auprès duquel il y a lieu, au titre de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, de former un recours contre la décision de refus de visa constitue l’une des questions qui fait l’objet de la présente demande de décision préjudicielle, de sorte que la réponse à cette question ne saurait être anticipée dans le cadre de l’analyse de la recevabilité de la première question préjudicielle.

35

D’autre part, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la coopération entre cette dernière et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 4 décembre 2018, Minister for Justice and Equality et Commissioner of An Garda Síochána, C‑378/17, EU:C:2018:979, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

36

Il s’ensuit que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 4 décembre 2018, Minister for Justice and Equality et Commissioner of An Garda Síochána, C‑378/17, EU:C:2018:979, point 27 ainsi que jurisprudence citée).

37

En l’occurrence, la première question préjudicielle porte sur l’interprétation du droit de l’Union, en particulier sur le point de savoir si une personne de référence a qualité pour agir contre une décision de refus de visa dans le cadre du recours prévu à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas.

38

Par ailleurs, outre que la décision de renvoi expose le cadre factuel et juridique de manière suffisante pour permettre de déterminer la portée de la question posée, il n’apparaît pas que l’interprétation du droit de l’Union sollicitée n’ait aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ou que le problème soit de nature hypothétique.

39

En effet, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, Mme Vethanayagam, personne de référence, respectivement sœur et belle-sœur des demandeurs de visa, et qui réside aux Pays-Bas, a introduit, tout comme ceux-ci, un recours contre le rejet, par le service des visas, de la demande de visa au bénéfice de ces derniers.

40

En conséquence, une réponse de la Cour quant à l’interprétation sollicitée par la juridiction de renvoi apparaît nécessaire à cette dernière pour être en mesure de rendre son jugement.

41

La première question préjudicielle est, par suite, recevable.

Sur le fond

42

En ce qui concerne l’interprétation de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, s’agissant de l’interprétation des dispositions du droit de l’Union, il importe de tenir compte non seulement des termes de celles-ci, mais également de leur contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elles font partie (arrêt du 7 février 2018, American Express, C‑304/16, EU:C:2018:66, point 54 et jurisprudence citée).

43

En premier lieu, en ce qui concerne les termes de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, la première phrase de cette disposition énonce que « [l]es demandeurs qui ont fait l’objet d’une décision de refus de visa peuvent former un recours contre cette décision ». Il ressort ainsi du libellé de ladite disposition que le droit d’intenter un recours contre une décision de refus de visa est expressément reconnu au demandeur de visa concerné.

44

La reconnaissance de ce droit n’est pas contredite par le fait que la deuxième phrase de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas prévoit que le recours contre la décision de refus de visa doit être intenté contre l’État membre qui a pris la décision finale « conformément à la législation nationale de cet État membre ».

45

À cet égard, la Cour a déjà jugé que, en renvoyant ainsi à la législation des États membres, le législateur de l’Union a laissé à ceux-ci le soin de décider tant la nature que les modalités concrètes des voies de recours dont disposent les demandeurs de visa (arrêt du 13 décembre 2017, El Hassani, C‑403/16, EU:C:2017:960, point 25).

46

Il s’ensuit que le renvoi à la législation nationale des États membres se limite à la réglementation des modalités procédurales, tandis que la détermination de la personne à laquelle appartient le droit de former un recours est expressément prévue à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas.

47

En deuxième lieu, un tel constat est confirmé par le contexte dans lequel s’inscrit l’article 32, paragraphe 3, du code des visas. À cet égard, il ressort de l’article 47, paragraphe 1, sous h), de ce code que les autorités centrales des États membres et leurs consulats communiquent au public toutes les informations utiles concernant la demande d’un visa, notamment le fait que les décisions de refus doivent être notifiées aux demandeurs et que ceux-ci disposent d’un droit de recours.

48

En outre, ainsi qu’il ressort de l’annexe VI du code des visas, le formulaire-type qui y figure pour notifier et motiver une décision de refus, d’annulation ou d’abrogation d’un visa s’adresse au demandeur ou au titulaire du visa. Ce formulaire contient également une liste de motifs pouvant, conformément à l’article 32, paragraphe 1, du code des visas, justifier une décision de refus. Il en ressort qu’une telle décision doit être motivée uniquement par des raisons propres au demandeur de visa.

49

En effet, après avoir indiqué, sur le formulaire qu’elle doit remplir, qu’elle a, selon le cas, « examiné [la] demande de visas » ou « examiné [le] visa », l’autorité compétente doit préciser la ou les raisons qui justifient le refus, l’abrogation ou l’annulation du visa, parmi les onze qui figurent sur le formulaire, à savoir : le document de voyage présenté par le demandeur est faux ; l’objet et les conditions du séjour envisagé ne sont pas justifiés ; le demandeur n’a pas fourni la preuve qu’il dispose de moyens de subsistance suffisants pour la durée du séjour ; le demandeur a déjà séjourné sur le territoire des États membres pendant 90 jours au cours de la période de 180 jours en cours sur la base d’un visa uniforme ou d’un visa à validité territoriale limitée ; le demandeur a fait l’objet d’un signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen (SIS) ; un ou plusieurs États membres estiment que le demandeur représente une menace pour l’ordre public, la sécurité nationale ou la santé publique, ou pour les relations internationales d’un ou de plusieurs des États membres ; le demandeur n’a pas présenté d’éléments attestant être titulaire d’une assurance maladie en voyage adéquate et valable ; les informations communiquées par le demandeur pour justifier l’objet et les conditions du séjour ne sont pas fiables ; la volonté du demandeur de quitter le territoire des États membres avant l’expiration du visa n’a pas pu être établie ; le demandeur n’a pas présenté d’éléments suffisants pour attester qu’il n’a pas été en mesure de demander un visa à l’avance, justifiant une demande de visa à la frontière, et l’abrogation du visa a été demandée par le titulaire du visa.

50

Il ressort, dès lors, du contexte dans lequel s’inscrit l’article 32, paragraphe 3, du code des visas que le seul titulaire du droit de former un recours contre une décision de refus de visa est le demandeur de visa.

51

En troisième lieu, pour ce qui est des objectifs poursuivis par le code des visas, il ressort de l’article 1er de ce code, lu à la lumière de ses considérants 18 et 28, que celui-ci a pour objet, afin d’assurer l’application harmonisée de la politique commune des visas, de fixer les procédures et les conditions de délivrance des visas pour les transits ou les séjours prévus sur le territoire des États membres d’une durée maximale de 90 jours sur toute période de 180 jours.

52

À cet égard, selon l’article 2, point 2, sous a) et b), du code des visas, le visa est défini comme étant l’autorisation accordée par un État membre en vue, ou bien, du transit ou du séjour prévu sur le territoire des États membres, pour une durée totale n’excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours, ou bien du passage par la zone internationale de transit des aéroports des États membres. Il découle, dès lors, d’une telle autorisation l’existence de droits spécifiques en faveur du demandeur de visa.

53

Dans la mesure où le recours visé à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas tend à obtenir la modification de la décision de refus du visa, c’est le demandeur de visa, en tant que destinataire de cette décision, qui a un intérêt direct et spécifique à former un recours contre celle-ci.

54

Un tel constat ne fait pas obstacle, conformément à la jurisprudence citée au point 45 du présent arrêt, à ce que les États membres, lorsqu’ils déterminent la nature et les modalités concrètes des voies de recours dont disposent les demandeurs de visa, autorisent la personne de référence à intervenir, conjointement avec le demandeur de visa, dans la procédure de recours visée à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas.

55

Toutefois, au regard de ce qui a été jugé au point 47 du présent arrêt, la personne de référence ne peut intervenir qu’en qualité de partie subordonnée et accessoire par rapport au demandeur de visa, et non de façon indépendante.

56

Par ailleurs, compte tenu des considérations qui précèdent, l’article 32, paragraphe 3, du code des visas ne s’oppose pas non plus à ce que le destinataire d’une décision de refus du visa mandate un tiers pour le représenter en justice.

57

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 32, paragraphe 3, du code des visas doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas à la personne de référence de former un recours en son nom propre contre une décision de refus de visa.

Sur les deuxième et troisième questions

58

Par ses deuxième et troisième questions, auxquelles il convient de répondre ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 8, paragraphe 4, sous d), et l’article 32, paragraphe 3, du code des visas doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’il existe un accord bilatéral de représentation prévoyant que les autorités consulaires de l’État membre agissant en représentation sont habilitées à prendre les décisions de refus de visa, il appartient aux autorités compétentes de cet État de statuer sur les recours formés contre une décision de refus de visa.

59

Afin de répondre à ces questions, il y a lieu de relever que le titre III du code des visas fixe les normes relatives aux procédures et aux conditions de délivrance des visas.

60

Dans la mesure où ces normes se réfèrent aux États membres, elles visent également la Confédération suisse, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’article 2 de l’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen, lu à la lumière du considérant 34 du code des visas.

61

Or, tout d’abord, il résulte de l’article 4, paragraphe 1, du code des visas que les demandes de visa sont examinées, en principe, par les consulats.

62

Ensuite, en ce qui concerne l’État membre compétent pour examiner une demande de visa uniforme et se prononcer sur celle-ci, l’article 5, paragraphe 1, du code des visas désigne, ou bien, l’État membre dont le territoire constitue la destination unique du ou des voyages, ou bien, si le voyage comporte plusieurs destinations, l’État membre dont le territoire constitue la destination principale du ou des voyages en termes de durée ou d’objet du séjour, ou bien encore, si la destination principale ne peut être déterminée, l’État membre par la frontière extérieure duquel le demandeur a l’intention d’entrer sur le territoire des États membres.

63

En outre, s’agissant de la compétence territoriale consulaire, il découle de l’article 6, paragraphe 1, du code des visas que les demandes de visa doivent être présentées, en principe, au consulat de l’État compétent dans la circonscription consulaire duquel le demandeur réside légalement.

64

Toutefois, il ressort de l’article 8, paragraphes 5 et 6, du code des visas, lu à la lumière du considérant 4 de celui-ci, que, afin d’éviter aux demandeurs de visa de déployer un effort disproportionné pour se rendre aux consulats, les États membres qui n’ont pas de consulat propre dans un pays tiers ou dans une partie d’un pays tiers doivent s’efforcer de conclure des accords de représentation.

65

À cet effet, l’article 8 du code des visas énonce expressément que les États membres peuvent conclure entre eux des accords bilatéraux par lesquels l’un accepte de représenter l’autre dans le cadre des décisions à prendre en matière de demandes de visa.

66

Il reste que cet article 8 prévoit, quant à la portée de la représentation, des situations différentes en fonction de la décision envisagée sur la demande de visa ainsi que des termes de l’accord de représentation.

67

D’une part, dans le cas où il est envisagé d’accueillir la demande de visa, l’article 8, paragraphe 1, du code des visas prévoit qu’« [u]n État membre peut accepter de représenter un autre État membre compétent conformément à l’article 5 en vue d’examiner les demandes et de délivrer les visas pour le compte de cet autre État membre », et ajoute qu’« [u]n État membre peut aussi représenter un autre État membre de manière limitée aux seules fins de la réception des demandes et du recueil des identifiants biométriques ».

68

En conséquence, en cas de délivrance des visas, l’article 8, paragraphe 1, du code des visas envisage deux niveaux de représentation, à savoir un premier niveau, qui comprend l’examen et la délivrance du visa, et un second niveau, plus limité, qui se borne à la réception des demandes.

69

D’autre part, dans le cas où la décision envisagée est le refus du visa, l’article 8 du code des visas prévoit également deux niveaux différents de représentation, le premier ayant valeur de règle générale, l’autre de règle spéciale.

70

S’agissant de la règle générale, l’article 8, paragraphe 2, du code des visas énonce que, lorsqu’il envisage de rejeter une demande de visa, le consulat de l’État membre agissant en représentation soumet la demande aux autorités compétentes de l’État membre représenté, afin que celles-ci prennent une décision définitive sur cette demande.

71

Quant à la règle spéciale, l’article 8, paragraphe 4, sous d), dudit code prévoit que, par dérogation à la règle générale, l’accord bilatéral de représentation établi entre deux États membres peut autoriser le consulat de l’État membre agissant en représentation à refuser de délivrer un visa après examen de la demande.

72

En d’autres termes, dans le cas où l’État membre, agissant en représentation, considère qu’il y a lieu de refuser une demande de visa, il soumet, en l’absence de disposition contraire dans l’accord bilatéral de représentation, cette demande aux autorités de l’État membre représenté. Il incombe à ces dernières de prendre la décision finale. En revanche, il appartient aux autorités de l’État membre agissant en représentation de refuser la demande de visa et, dès lors, de prendre la décision finale, lorsque l’accord bilatéral de représentation le prévoit.

73

En conséquence, dans la mesure où l’article 32, paragraphe 3, du code des visas prévoit que les recours contre une décision de refus de visa sont intentés contre l’État membre qui a pris la décision finale sur la demande, la détermination de l’État compétent pour prendre la décision finale et, par suite, contre lequel le recours doit être intenté dépend, en cas d’accord de représentation entre deux États membres, des termes de cet accord.

74

En l’occurrence, dans la mesure où le territoire du Royaume des Pays-Bas constituait la destination unique du voyage des demandeurs au principal, les demandes de visa auraient dû, en l’absence d’accord de représentation, être introduites, sur la base des articles 5 et 6 du code des visas, au consulat de cet État membre au Sri Lanka. Toutefois, ainsi qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle, le Royaume des Pays-Bas n’ayant pas de consulat propre dans ce pays, ils ont conclu, le 1er octobre 2014, un accord de représentation avec la Confédération suisse. Celui-ci a permis aux demandeurs au principal de présenter leurs demandes de visa de court séjour aux Pays-Bas au consulat suisse à Colombo.

75

Or, cet accord prévoit que, lorsqu’elle représente le Royaume des Pays-Bas, il incombe à la Confédération suisse, notamment, de « refuser de délivrer les visas lorsqu’il y a lieu, conformément à l’article 8, paragraphe 4, sous d), du code des visas », et d’« examiner le recours conformément au droit national de la partie agissant en représentation ».

76

En conséquence, dans la mesure où, sur la base dudit accord, il appartenait à la Confédération suisse de prendre la décision finale sur les demandes de visa de court séjour aux Pays-Bas introduites par les demandeurs au principal, c’est également ce premier État qui était compétent pour connaître des recours intentés contre les décisions de refus de visa, conformément à l’article 32, paragraphe 3, du code des visas.

77

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux deuxième et troisième questions que l’article 8, paragraphe 4, sous d), et l’article 32, paragraphe 3, du code des visas doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’il existe un accord bilatéral de représentation prévoyant que les autorités consulaires de l’État membre agissant en représentation sont habilitées à prendre les décisions de refus de visa, il appartient aux autorités compétentes de cet État membre de statuer sur les recours formés contre une décision de refus de visa.

Sur la quatrième question

78

Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une interprétation combinée de l’article 8, paragraphe 4, sous d), et de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, selon laquelle le recours contre une décision de refus de visa doit être intenté contre l’État agissant en représentation, est compatible avec le droit fondamental à une protection juridictionnelle effective.

79

À cet égard, force est de constater que l’interprétation des dispositions du code des visas, y compris le droit au recours prévu à l’article 32, paragraphe 3, de ce code, doit être effectuée, ainsi qu’il découle du considérant 29 de ce même code, dans le respect des droits fondamentaux et des principes reconnus par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), et par la Charte.

80

Le principe de protection juridictionnelle effective des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union, auquel se réfère l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, constitue, en effet, un principe général du droit de l’Union qui découle des traditions constitutionnelles communes aux États membres, qui a été consacré par les articles 6 et 13 de la CEDH, et qui est à présent affirmé à l’article 47 de la Charte (arrêt du 27 février 2018, Associação Sindical dos Juízes Portugueses, C‑64/16, EU:C:2018:117, point 35).

81

Dans le contexte particulier de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, il appartient à chaque État membre de garantir le respect des droits fondamentaux, notamment la protection juridictionnelle effective, en déterminant la nature et les modalités des recours contre les décisions de refus de visa, dans le respect des principes d’équivalence et d’effectivité (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2017, El Hassani, C‑403/16, EU:C:2017:960, points 25 et 42).

82

En conséquence, que l’État contre lequel doit être intenté le recours contre une décision de refus de visa soit, en fonction des termes de l’accord de représentation, l’État agissant en représentation ou qu’il soit l’État représenté, le respect des droits fondamentaux, notamment le droit des demandeurs de visa à une protection juridictionnelle effective, doit être assuré.

83

En particulier, le fait que la décision finale de refus de visa est adoptée, comme dans l’affaire en cause au principal, par l’État agissant en représentation est sans incidence sur l’obligation de respecter un tel droit.

84

À cet égard, ainsi que l’énonce son considérant 34, le code des visas constitue un développement des dispositions de l’acquis de Schengen, au sens de l’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen, qui relèvent du domaine visé à l’article 1er, point B, de la décision 1999/437, lu en liaison avec l’article 3 de la décision 2008/146.

85

Conformément audit code, la Confédération suisse peut délivrer des visas uniformes valables pour l’ensemble de l’espace Schengen.

86

Or, si la Confédération suisse n’est pas un État membre de l’Union, elle est non seulement, en tant que membre du Conseil de l’Europe depuis le 6 mai 1963, partie à la CEDH, mais surtout un État associé sur la base de l’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen, lequel prévoit, à son dixième considérant, que « la coopération Schengen repose sur les principes de liberté, de démocratie, d’État de droit et de respect des droits de l’homme, tels que garantis en particulier par la [CEDH] ».

87

En outre, l’accord d’association de la Confédération suisse à l’acquis de Schengen crée, ainsi qu’il ressort de son article 1er, paragraphe 2, des droits et des obligations réciproques, de sorte que la Confédération suisse doit, comme le prévoit l’article 2 dudit accord, mettre en œuvre toutes les dispositions de l’acquis de Schengen conformément aux procédures qui y sont prévues.

88

Eu égard à ces considérations, il y a lieu de répondre à la quatrième question qu’une interprétation combinée de l’article 8, paragraphe 4, sous d), et de l’article 32, paragraphe 3, du code des visas, selon laquelle le recours contre une décision de refus de visa doit être intenté contre l’État agissant en représentation, est compatible avec le droit fondamental à une protection juridictionnelle effective.

Sur les dépens

89

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 32, paragraphe 3, du règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas, tel que modifié par le règlement (UE) no 610/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas à la personne de référence de former un recours en son nom propre contre une décision de refus de visa.

 

2)

L’article 8, paragraphe 4, sous d), et l’article 32, paragraphe 3, du règlement no 810/2009, tel que modifié par le règlement no 610/2013, doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’il existe un accord bilatéral de représentation prévoyant que les autorités consulaires de l’État membre agissant en représentation sont habilitées à prendre les décisions de refus de visa, il appartient aux autorités compétentes de cet État membre de statuer sur les recours formés contre une décision de refus de visa.

 

3)

Une interprétation combinée de l’article 8, paragraphe 4, sous d), et de l’article 32, paragraphe 3, du règlement no 810/2009, tel que modifié par le règlement no 610/2013, selon laquelle le recours contre une décision de refus de visa doit être intenté contre l’État agissant en représentation, est compatible avec le droit fondamental à une protection juridictionnelle effective.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.

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