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Document 61994TJ0158

Urteil des Gerichts erster Instanz (Vierte Kammer) vom 19. September 1996.
François Brunagel gegen Europäisches Parlament.
Beamte - Einstellungsverfahren - Anwendung von Artikel 29 Absatz 2 des Statuts - Beurteilung der beruflichen Befähigung der Bewerber - Ermessensmißbrauch - Nichtdiskriminierung - Begründung.
Rechtssache T-158/94.

Sammlung der Rechtsprechung – Öffentlicher Dienst 1996 I-A-00383; II-01131

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:122

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

19 septembre 1996 ( *1 )

«Fonctionnaires — Procédure de recrutement — Application de l'article 29, paragraphe 2, du statut — Appréciation des aptitudes professionnelles des candidats — Détournement de pouvoir — Non-discrimination — Motivation»

Dans l'affaire T-158/94,

François Brunagel, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Bruxelles, représenté par Mes Georges Vandersanden et Laure Levi, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 1, rue Glesener,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. Manfred Peter, chef de division, en qualité d'agent, assisté de Me Alex Bonn, avocat au barreau de Luxembourg, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de ce dernier, 22, Côte d'Eich,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande visant à l'annulation de la décision du Parlement européen du 19 juillet 1993 emportant refus de nommer le requérant au poste de chef du protocole et, par voie de conséquence, à l'annulation de la décision de nomination de M. B. à ce poste,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. K. Lenaerts, président, Mme p. Lindh et M. J. D. Cooke, juges,

greffier: M. J. Palacio Gonzalez, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 17 avril 1996,

rend le présent

Arrêt

Faits et procédure

1

Le requérant, fonctionnaire de grade A 4, est entré au service des Communautés européennes le 1er octobre 1972 en qualité d'agent temporaire du Comité économique et social. Il a ensuite exercé différentes fonctions auprès du Parlement européen (ci-après «Parlement») et du Comité économique et social. Il a été détaché au cabinet du président du Parlement du 1er février 1985 au 28 février 1987 et du 8 février 1988 au 31 juillet 1989. A partir du 1er août 1989, il exerce les fonctions d'administrateur principal à la direction générale de l'information et des relations publiques du Parlement, en tant que chef du service des manifestations publiques et des publications.

2

Le 13 avril 1992, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN») a ouvert une procédure en vue de pourvoir le poste de chef du protocole, de grade A 3. L'avis de vacance de cet emploi (no 7044) indiquait qu'il s'agissait d'abord de pourvoir ce poste par voie de promotion ou de mutation et que, au cas où il ne pourrait être pourvu par cette voie, les possibilités d'autres procédures prévues par le statut seraient examinées.

3

La nature des fonctions de l'emploi était décrite de la manière suivante:

«Sous l'autorité du directeur général de l'administration, fonctionnaire chargé de l'organisation des activités protocolaires de l'institution, en collaboration étroite avec le cabinet du président et le cabinet du secrétaire général. Ces activités comprennent notamment:

l'organisation de toutes les manifestations à caractère officiel dans les trois lieux de travail et à l'extérieur (visites de chefs d'état ou de gouvernement, monarques, dignitaires politiques, etc.);

les contacts au niveau approprié avec les ministères, les autorités locales et gouvernementales dans l'ensemble de la Communauté européenne et à l'extérieur;

la responsabilité de la gestion budgétaire inhérente aux activités protocolaires.

Ces travaux exigent des qualités d'organisation, de rigueur, une capacité d'adaptation aux situations parfois imprévues ainsi qu'une aptitude à diriger une équipe.»

4

Les qualifications et connaissances requises étaient les suivantes:

«—

Formation de niveau universitaire sanctionnée par un diplôme ou expérience professionnelle garantissant un niveau équivalent;

expérience professionnelle confirmée dans un domaine analogue tourné vers les relations publiques;

parfaite connaissance d'une des langues officielles des Communautés européennes et très bonne connaissance d'une autre de ces langues. La connaissance d'autres langues sera prise en considération.»

5

Le requérant a posé sa candidature à cet avis de vacance. Elle a été rejetée le 29 septembre 1992.

6

En effet, aucun des candidats au poste à pourvoir n'a été retenu. Par note du 19 juin 1992, à l'attention du secrétaire général, le directeur général de l'administration avait conclu:

«Selon mes critères d'appréciation (connaissance ou expérience de la fonction, personnalité du fonctionnaire, aptitudes linguistiques), cinq candidats pourraient occuper le poste [...]

[liste des cinq candidats]

L'examen de l'ensemble de ces candidatures me donne cependant à penser que la fonction de chef du protocole doit être entièrement repensée à l'intérieur de l'institution et qu'il serait préférable d'avoir recours à une candidature externe.

La liste établie plus haut pourrait permettre de répondre à cette attente, mais impliquerait qu'un stage sérieux soit organisé pour le candidat sélectionné près d'un service du protocole d'un État membre ou d'un Parlement national.»

7

Le requérant ne figurait pas parmi les cinq candidats de la liste.

8

Dans une autre note adressée au secrétaire général, du 8 juillet 1992, le directeur général de l'administration demandait:

«Pour le cas probable où le poste de chef du protocole ne serait pas pourvu par le biais de la procédure interne, je souhaite, compte tenu de l'urgence, que soit constitué un comité de sélection, conformément à l'article 29, paragraphe 2, du statut.»

9

Après avoir sollicité l'avis de la commission paritaire, l'AIPN a rouvert la procédure de pourvoi pour le même poste, conformément à l'article 29, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après«statut»). L'avis de recrutement PE/51/S a été publié au Journal officiel du 21 août 1992, avec quelques légères modifications proposées par la commission paritaire.

10

Le 29 septembre 1992, un comité de sélection a été institué.

11

Le requérant s'est une nouvelle fois porté candidat au poste de chef du protocole et a été entendu par le comité de sélection.

12

Le 3 mars 1993, le comité de sélection a informé le requérant qu'il avait pris la décision d'inscrire son nom sur la liste d'aptitude, avec d'autres candidats. Cette liste comprenait quatre noms:

1.

M. D.

2.

Le requérant

3.

M. p.

4.

M. B.

13

Dans une note du 22 avril 1993, le chef du cabinet du président du Parlement a informé le secrétaire général que le président, à la suite d'entretiens individuels avec les quatre candidats proposés par le comité de sélection, avait jugé que M. B. était le plus qualifié pour le poste vacant.

14

La décision nommant M. B. a été prise le 15 juillet 1993 et le requérant en a été informé par lettre du 19 juillet 1993, dans les termes suivants:

«[J]e vous informe que, après examen approfondi des qualifications des lauréats du concours susmentionné, un autre candidat inscrit sur la liste d'aptitude a été choisi pour nomination comme chef du protocole.»

15

Le 19 octobre 1993, le requérant a introduit une réclamation contre la décision de ne pas le nommer au poste de chef du protocole (ci-après «décision attaquée»). Le Parlement n'a pas répondu à cette réclamation.

16

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 avril 1994, le requérant a introduit le présent recours. Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Toutefois, le Parlement a été admis à se faire accompagner de M. Dohmes, qui occupait le poste de chef de cabinet du président du Parlement à l'époque où la décision attaquée a été prise. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience publique du 17 avril 1996, au cours de laquelle M. Dohmes a également été entendu.

Conclusions des parties

17

Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision du Parlement emportant refus de le nommer au poste de chef du protocole et, par voie de conséquence, annuler la décision portant nomination de M. B. à ce poste;

pour autant que de besoin, annuler la décision de rejet implicite de la réclamation introduite par le requérant le 19 octobre 1993;

condamner le Parlement aux dépens.

18

Le Parlement conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

rejeter le recours en mettant les dépens à la charge du requérant;

à défaut, subsidiairement, lui permettre d'établir par le témoignage de M. Dohmes, chef de cabinet du précédent président du Parlement, que, lors d'un entretien particulier, il a renseigné le requérant sur la décision prise par le président du Parlement.

Sur le fond

19

Le requérant invoque à l'appui de ses conclusions quatre moyens tirés, respectivement, d'une violation des articles 25, deuxième alinéa, et 90, paragraphe 2, du statut, d'une violation des articles 27, 29 et 30 du statut, d'un détournement de pouvoir, et d'une violation du principe de non-discrimination.

20

Le Tribunal estime qu'il convient d'examiner le moyen tiré d'une violation des articles 25, deuxième alinéa, et 90, paragraphe 2, du statut après avoir examiné les autres moyens.

Sur le moyen tiré d'une violation des articles 27, 29 et 30 du statut

21

Ce moyen peut se subdiviser en deux branches, à savoir, d'une part, l'absence de validité de la décision de recourir à la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut et, d'autre part, à titre subsidiaire, le non-respect des règles de recrutement (articles 27 et 30 du statut).

Première branche: absence de validité de la décision de recourir à la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut

— Arguments des parties

22

Le requérant soutient que les conditions de l'article 29, paragraphe 2, du statut n'étaient pas réunies, puisque, en l'espèce, il ne s'agissait ni d'une procédure de recrutement de fonctionnaires de grade A 1 ou A 2, ni d'un cas exceptionnel justifiant une telle procédure.

23

Concernant l'existence d'un «cas exceptionnel», il invoque notamment la jurisprudence de la Cour selon laquelle cette situation n'est pas caractérisée, alors même que l'emploi à pourvoir présente une grande spécificité, lorsque plusieurs candidatures valables ont été présentées lors de l'examen des possibilités de promotion, la procédure ordinaire pouvant alors permettre de pourvoir l'emploi (voir arrêt de la Cour du 7 octobre 1985, Van der Stijl/Commission, 128/84, Rec. p. 3281, point 21).

24

Selon le requérant, la procédure interne, organisée sur la base de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, avait déjà suscité des candidatures répondant aux qualifications spéciales requises. A cet égard, il soutient qu'il ressort de la note du 19 juin 1992 du directeur général que cinq candidats au moins, sinon huit, présentaient les qualifications requises par l'avis de vacance et, ce faisant, auraient pu être nommés au poste de chef du protocole.

25

Il ajoute que sa candidature répondait certainement à ces qualifications puisque, dans le cadre de la procédure organisée ultérieurement sur le fondement de l'article 29, paragraphe 2, il a été classé en deuxième position sur la liste établie par le comité de sélection.

26

Le requérant estime que, en tout état de cause, l'AIPN pouvait, si elle souhaitait disposer d'un choix de candidats plus large, organiser un concours général ouvert aux candidats tant internes qu'externes à l'institution, comme le prévoit l'article 29, paragraphe 1.

27

Enfin, à propos des motifs donnés par le Parlement quant au choix du candidat retenu, il fait valoir que, dans l'hypothèse où les motifs réels de la décision de l'AIPN de ne retenir aucune des candidatures internes résideraient dans l'absence de liens personnels entre ces candidats internes et le président du Parlement, la décision de l'AIPN de recourir à l'article 29, paragraphe 2, et toutes les décisions prises dans le cadre de cette deuxième procédure de recrutement devraient être annulées pour méconnaissance de l'avis de vacance dans lequel cette condition ne figurait pas.

28

Le Parlement rejette l'argument du requérant selon lequel les conditions de l'article 29, paragraphe 2, du statut, n'étaient pas réunies en l'espèce.

29

Il souligne que le poste en cause doit être considéré comme exigeant des qualités particulières. A cet égard, il mentionne notamment des qualités personnelles, une aisance et une facilité de contact naturelles, susceptibles de rapprocher son titulaire de la personne de son supérieur hiérarchique.

30

A l'audience, le Parlement a ajouté que, au moment où la question de pourvoir le poste s'est posée, il s'est trouvé dans une situation exceptionnelle. Il s'agissait de faire face, d'une part, aux nouvelles tâches émanant du traité sur l'Union européenne entré en vigueur la même année et, d'autre part, à des événements politiques internationaux tels que le rapprochement d'Israël et de la Palestine ainsi que la situation en Union soviétique. Compte tenu de ces circonstances, le Parlement aurait souhaité donner un nouveau profil au poste de chef du protocole et nommer une personne apte à contribuer au suivi des nouvelles tâches.

31

Le Parlement réfute l'argument selon lequel certains candidats, dont le requérant, auraient possédé les qualifications spéciales requises. Selon lui, il ressort de la note du 19 juin 1992 du directeur général de l'administration que l'AIPN était d'un autre avis, puisqu'elle a estimé qu'il était préférable d'avoir recours à une candidature externe. Dès lors, aucune candidature valable n'aurait été présentée lors de l'examen des possibilités de promotion et de mutation.

32

Quant à l'organisation d'un concours général, le Parlement fait remarquer que le requérant, qui se plaint de ne pas avoir été recruté par voie de promotion, n'avait pas intérêt à se voir opposer d'autres concurrents. Son raisonnement serait, là encore, mal fondé; eu égard au résultat du recrutement par voie de mutation ou de promotion, un concours interne à l'institution aurait exclu toute possibilité de candidatures externes. L'AIPN a effectivement ouvert la possibilité de candidatures externes, mais par le biais d'une procédure spéciale en raison du besoin urgent de pourvoir le poste.

33

Enfin, le Parlement nie avoir suggéré ou laissé entendre, que des «liens personnels» entre le président du Parlement et le candidat nommé seraient pertinents. Il s'est borné à mettre l'accent sur les attributions particulières du chef du protocole, qui montrent son importance dans l'exercice des fonctions du président en matière de relations extérieures. Il affirme, de plus, que ces critères ressortaient de l'avis de vacance d'emploi.

— Appréciation du Tribunal

34

Le Tribunal rappelle, tout d'abord, que la procédure prévue à l'article 29, paragraphe 2, du statut, n'est autorisée que dans deux cas, à savoir:

pour le recrutement de fonctionnaires de grades A 1 et A 2;

pour le recrutement d'autres fonctionnaires, mais «dans des cas exceptionnels, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales».

35

Étant donné qu'il ne s'agit pas d'un recrutement au grade A 1 ou A 2, il est nécessaire pour que le recours à l'article 29, paragraphe 2, du statut soit justifié qu'il s'agisse d'un cas exceptionnel, pour un emploi nécessitant des qualifications spéciales.

36

Le Tribunal rappelle qu'il ressort de la jurisprudence que la notion de «cas exceptionnel» doit être interprétée strictement (voir, entre autres, arrêt de la Cour du 5 décembre 1974, Van Belle/Conseil, 176/73, Rec. p. 1361, point 14). En outre, si les procédures prévues à l'article 29, paragraphe 1, du statut suscitent des candidatures qui répondent aux qualifications spéciales requises, la spécificité de l'emploi ne peut nullement justifier de considérer le cas comme exceptionnel au sens de l'article 29, paragraphe 2, du statut (voir arrêt Van der Stijl/Commission, précité, point 22). Par conséquent, les institutions communautaires doivent, avant de passer à la procédure de l'article 29, paragraphe 2, apprécier, dans chaque cas, si les procédures de recrutement énumérées au paragraphe 1 dudit article sont susceptibles d'aboutir à la nomination d'une personne possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité. Elles ne sont pas, pour autant, tenues de procéder à toutes les mesures qui y sont mentionnées (voir arrêt du Tribunal du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, RecFP p. II-203, point 94).

37

Il convient dès lors d'examiner, en premier lieu, si la procédure ordinaire a suscité une candidature qui réponde aux qualifications requises et, en deuxième lieu, s'il s'agit d'un cas exceptionnel, pour un emploi nécessitant des qualifications spéciales.

38

En ce qui concerne la procédure ordinaire, il est de jurisprudence constante qu'il appartient à l'AIPN d'apprécier l'accomplissement par un candidat des conditions requises dans l'avis de vacance et que cette appréciation ne saurait être mise en cause qu'en cas d'erreur manifeste (voir, entre autres, arrêt de la Cour du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 16).

39

Le Tribunal constate ensuite que la procédure ordinaire conformément à l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut a été clôturée notamment à la suite de la note du 19 juin 1992 du directeur général de l'administration adressée au secrétaire général (voir point 6 ci-dessus).

40

Le Tribunal considère qu'il ressort de cette note qu'aucune candidature interne ne correspondait au poste de chef de délégation. En effet, cette note exprime clairement le souhait d'avoir recours à une candidature externe et ajoute, pour le cas où on choisirait un candidat interne, qu'il serait nécessaire de former le candidat sélectionné.

41

Ainsi, contrairement aux allégations du requérant, il ne découle pas de cette note, que les candidats pris en considération à ce stade de la procédure satisfaisaient aux qualifications spéciales requises. Au contraire, d'après le directeur général, pour qu'ils aient satisfait à ces qualifications, il aurait été nécessaire de compléter leur expérience.

42

Il en résulte que le requérant ne saurait se prévaloir de l'arrêt Van der Stijl/Commission, précité, car, dans cet arrêt, la Cour a conclu que l'administration, elle-même, avait apprécié qu'il y avait parmi les candidatures présentées lors de la procédure interne au moins trois candidatures qui étaient valables, alors qu'en l'espèce une telle conclusion ne peut pas être tirée.

43

Le requérant ne saurait pas non plus se fonder sur l'argument selon lequel sa candidature répondait aux qualifications énoncées dans l'avis de vacance, du fait que, dans le cadre de la procédure organisée ultérieurement sur la base de l'article 29, paragraphe 2, du statut, il a été classé en deuxième position sur la liste établie par le comité de sélection. En effet, même s'il a été classé deuxième dans le cadre de cette dernière procédure par le comité de sélection, au regard des candidats présentés, cela est sans pertinence en ce qui concerne la procédure interne préalable. A cet égard, il convient d'observer que le requérant ne figurait pas sur la liste comportant les cinq candidats réputés les plus aptes dans le cadre de cette première procédure (voir points 6 et 7 ci-dessus).

44

Il convient ensuite d'examiner s'il s'agit, en l'espèce, d'un cas exceptionnel, pour un emploi nécessitant des qualifications spéciales.

45

A cet égard, il y a lieu de relever qu'il ressort de la jurisprudence qu'il appartient à l'AIPN d'apprécier, sous le contrôle du juge communautaire, s'il s'agit d'un cas exceptionnel, pour des emplois nécessitant des qualifications spéciales, cette appréciation ne pouvant être mise en cause qu'en cas d'erreur manifeste (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 octobre 1975, Marenco e.a./Commission, 81/74 à 88/74, Rec. p. 1247, point 27).

46

Le Tribunal observe que le Parlement a fait valoir que les tâches incombant au chef du protocole nécessitent des qualifications spéciales.

47

Il n'y a aucune raison de mettre en doute cette appréciation du Parlement. En effet, les fonctions de chef du protocole supposent des qualités spécifiques. Ainsi, ce ne sont pas seulement les mérites des candidats qui sont pertinents, mais aussi, d'une façon décisive, l'ensemble de leur personnalité. A cet égard, il y a lieu d'observer que l'avis de vacance présente les tâches exercées par le chef du protocole comme requérant une personnalité capable, par exemple, de s'adapter à des situations imprévues, dans le cadre de l'organisation de manifestations à caractère officiel comme des visites de chef d'État ou de gouvernement, de monarques, ou encore de dignitaires politiques et lors des contacts avec les ministères, les autorités locales et gouvernementales des États membres et pays tiers.

48

Dans ce contexte, il convient de rejeter l'argument du requérant tendant à faire valoir que l'AIPN a pris en considération des liens personnels entre le candidat et le président et, de ce fait, n'a pas respecté les conditions reprises dans l'avis de vacance. En effet, aucun élément du dossier ne démontre que l'AIPN a pris en compte des liens personnels entre le candidat et le président du Parlement. Il en ressort, en revanche, qu'elle a considéré que certaines qualités personnelles étaient nécessaires pour exercer les tâches en cause, ce qui est indiqué dans l'avis de vacance.

49

Pour ce qui est de la présence d'un cas exceptionnel, il convient d'observer que, en réponse aux questions posées par le Tribunal lors de l'audience, le Parlement a décrit la situation géopolitique de l'époque comme étant exceptionnelle et que, dès lors, un nouveau profil pour le poste de chef du protocole devait être défini.

50

Il n'y a pas lieu de mettre en cause les explications du Parlement sur ce point non plus, lesquelles ne sont pas, par ailleurs, contestées par le requérant.

51

Enfin, il découle des considérations qui précèdent que l'argument du requérant selon lequel l'AIPN aurait pu organiser un concours général doit être écarté. Certes, il est vrai que, dans le cas où la procédure ordinaire susciterait des candidats valables, l'institution, si elle estime souhaitable de disposer d'un choix plus grand, dispose de la possibilité, prévue à l'article 29, paragraphe 1, du statut, d'ouvrir un concours général, auquel tous les candidats potentiels, tant internes qu'externes, peuvent se présenter (voir arrêt Van der Stijl, précité, point 23). Cependant, lorsque les conditions stipulées par l'article 29, paragraphe 2, du statut sont remplies, l'institution a le droit de recourir à un autre type de procédure afin de pourvoir le poste (voir arrêt Kotzonis/CES, précité, point 94).

52

Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de mettre en cause l'appréciation de l'AIPN quant à l'existence d'un cas exceptionnel, pour un emploi nécessitant des qualifications spéciales, au sens de l'article 29, paragraphe 2, du statut. En conséquence, la première branche du moyen doit être écartée.

Deuxième branche: non-respect des règles de recrutement (articles 27 et 30 du statut)

— Arguments des parties

53

Le requérant rappelle d'abord que, selon le statut, l'AIPN est tenue de concilier les notions de concours et de choix, de telle manière que soit nommé à ce poste vacant un fonctionnaire possédant les plus hautes qualités.

54

Il admet que l'AIPN dispose d'un large pouvoir pour choisir le meilleur candidat, mais souligne que ce pouvoir n'est pas sans limite et qu'il est soumis au contrôle du Tribunal. Il reconnaît également que la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut est une procédure exceptionnelle de recrutement et que, par conséquent, les règles gouvernant la procédure de concours ne s'appliquent pas dans ce cas. Cependant, en raison de la similitude entre la procédure suivie en l'espèce et celle du concours, il estime qu'il est raisonnable et justifié d'appliquer à la procédure choisie, les principes s'appliquant à la procédure de concours habituelle.

55

Le requérant invoque ensuite, à titre de comparaison, la jurisprudence de la Cour concernant les concours organisés en vertu de l'article 29, paragraphe 1, du statut, et relève que l'AIPN a, certes, le droit de ne pas respecter dans ce choix l'ordre précis résultant du concours, pour des raisons qu'il lui appartient de préciser et de motiver devant la Cour, mais elle n'a pas pour autant le droit d'annihiler la notion même de concours, en s'écartant substantiellement du résultat de celui-ci sans de sérieuses raisons (voir arrêt de la Cour du 15 décembre 1966, Serio/Commission, 62/65, Rec. p. 813). Il s'appuie également sur l'arrêt de la Cour du 18 décembre 1986, Kotsonis/Conseil (246/84, Rec. p. 3989), où la Cour a précisé que, pour s'écarter du résultat de la liste d'aptitude, l'AIPN doit invoquer des raisons tenant à l'intérêt du service.

56

Le requérant souligne que, en l'espèce, le candidat nommé avait été classé en quatrième et dernière position sur la liste d'aptitude, tandis que lui-même avait été classé deuxième sur cette même liste.

57

Ses qualifications, comparées à celles de M. B., montreraient que l'intérêt du service commandait de le nommer au poste de chef du protocole.

58

A l'appui de cette thèse, il affirme qu'il a assumé des fonctions de même nature que celles attachées au poste à pourvoir de chef du protocole. Il mentionne notamment ses deux détachements auprès du cabinet du président du Parlement, où il a été chargé de l'organisation de colloques et de manifestations publiques, assumant des tâches de coordination et d'organisation en relation avec tous les services concernés du Parlement, ainsi que la question des budgets correspondants. Il ajoute qu'il assume, de plus, actuellement, des fonctions de même nature que celles de chef du protocole.

59

Quant au candidat retenu, M. B., le requérant relève notamment qu'il n'avait, avant son entrée au service des Communautés européennes, aucune connaissance ni expérience au sein des institutions européennes. Le requérant estime que cette absence d'expérience et de connaissance aurait dû être appréciée par l'AIPN comme un élément particulièrement négatif dans le dossier de M. B., élément qui ne pouvait en toute hypothèse pas l'autoriser à nommer M. B. au poste de chef du protocole.

60

Il ajoute que le Parlement ne peut invoquer de prétendues particularités du poste à pourvoir, puisqu'elles ne ressortent pas de l'avis de recrutement et ne sont requises ni par la nature du poste à pourvoir ni'par l'intérêt du service. Il se réfère aux critères mentionnés par le Parlement selon lesquels le chef du protocole fait partie d'un groupe de personnes proches du président, que ce dernier, dans la mesure du possible, connaît personnellement.

61

A cet égard, le requérant relève que, selon l'avis de recrutement, le chef du protocole est au service de l'institution et non du président, et qu'il n'y a donc aucun lien direct entre le président et le chef du protocole. Il relève encore que, selon l'avis de recrutement, le chef du protocole n'est pas appelé à travailler uniquement avec le président, mais au contraire en collaboration avec son cabinet et avec le cabinet du secrétaire général. Enfin, il souligne que le chef du protocole a également une fonction administrative, puisqu'il dirige un service de douze personnes.

62

Dans ce contexte, le requérant soutient que le fait que le président du Parlement a accordé, selon une note annexée au mémoire en défense (annexe 36), une attention particulière à la faculté de «jugement politique» des quatre candidats en lice n'est pas pertinent. Selon le requérant, le chef du protocole n'a pas, par définition, à avoir de «jugement politique». Si tel était le cas, il méconnaîtrait le principe et la nature même de sa fonction. Le requérant estime que la définition que le Parlement donne de la fonction de chef du protocole s'apparente davantage à celle d'un membre du cabinet qu'à celle d'un fonctionnaire au service de son institution.

63

Le Parlement fait valoir qu'il connaît et applique les principes établis par la jurisprudence pour le pourvoi des postes. Il relève que l'AIPN a le droit de ne pas respecter dans ses choix l'ordre précis résultant du concours, mais qu'elle ne peut le faire que pour des raisons qu'il lui appartient de préciser.

64

A cet égard, il rappelle les particularités du poste à pourvoir et les qualifications du candidat choisi et se réfère à une note du 22 avril 1993 du directeur du cabinet du président informant le secrétaire général que le président du Parlement avait jugé, à la suite d'entretiens individuels, que M. B. était le plus qualifié pour occuper le poste vacant.

65

Ensuite, le Parlement conteste la description de la fonction de chef du protocole faite par le requérant. Il fait remarquer que les activités protocolaires de l'institution relèvent pour l'essentiel des activités du président, et que les fonctions assumées paile chef du protocole font partie des activités du président qui en a la responsabilité.

66

Enfin, il récuse l'argument du requérant selon lequel les critères appliqués ne ressortiraient pas de l'avis de recrutement. Cet avis précise que le chef du protocole est «chargé de l'organisation des activités protocolaires de l'institution». D'après le Parlement, cette formulation est claire et complète, et les candidats éventuels ne pouvaient se méprendre sur les qualifications exigées.

— Appréciation du Tribunal

67

Aux termes de l'article 30 du statut, l'AIPN «choisit» sur la liste d'aptitude résultant du concours les candidats qu'elle nomme aux postes vacants; cette autorité a le droit de ne pas respecter dans ses choix l'ordre précis résultant du concours, pour des raisons qu'il lui appartient d'apprécier et le cas échéant de justifier devant le juge communautaire, à condition toutefois qu'elle n'annihile pas la notion même de concours, en s'écartant substantiellement du résultat de celui-ci sans avoir de sérieuses raisons (voir arrêts Serio/Commission, précité, p. 826, et Kotsonis/Conseil, précité, point 9).

68

Le Tribunal considère que cette jurisprudence est également applicable à une procédure comme celle de l'espèce.

69

Pour comparer les mérites des candidats, l'AIPN dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Le contrôle du Tribunal doit donc se limiter à la question de savoir si, eu égard aux éléments sur lesquels s'est fondée l'administration pour établir son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables, au terme d'une procédure exempte d'irrégularité, et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée ou à des fins autres que celles pour lesquelles il lui avait été conféré (voir arrêt Kotzonis/CES, précité, point 81).

70

Il ressort de l'exposé fait par le Parlement dans le cadre de la première branche du moyen, qu'il a, d'une part, attribué une importance particulière aux qualités personnelles du candidat choisi, et d'autre part, souhaité donner un nouveau profil au poste de chef du protocole.

71

En outre, le président du Parlement, en sa qualité d'AIPN, a mis l'accent sur l'expérience politique et protocolaire de M. B. auprès de la chancellerie du Land Baden-Württemberg ainsi que sur ses activités pluriannuelles de représentant de ce Land auprès des Communautés européennes à Bruxelles. Il ressort en plus du dossier que le président a accordé une attention particulière au fait que ce candidat disposerait d'un «sens du jugement politique».

72

A cet égard, le requérant fait notamment valoir que, contrairement au candidat choisi, il a une expérience au sein de l'institution. Il s'interroge, en outre, sur les critères d'appréciation des mérites appliqués par le président du Parlement, et en particulier sur le fait qu'il a accordé une attention particulière à la faculté qu'il qualifie de «sens du jugement politique» des candidats.

73

Cependant, même si une expérience interne d'une institution est toujours un mérite pertinent pour obtenir un poste, force est de constater que cette expérience n'est pas présentée comme particulièrement requise par l'avis de recrutement. De plus, c'est à tort que le requérant prétend que le chef du protocole n'a pas, par définition, à avoir de «jugement politique». En effet, pour une personne travaillant dans un environnement politique, un tel jugement signifie généralement qu'elle a la faculté d'esprit permettant de s'adapter à des situations imprévues, ce qui est repris dans l'avis de vacance. Cela ne signifie pas pour autant qu'elle a une fonction politique, dans le cadre de laquelle elle doit donner son propre avis politique.

74

A la lumière de ces conditions et en l'absence d'éléments dans le dossier permettant de supposer que l'appréciation des mérites des candidats ait été entachée d'une erreur de fait ou de droit, le Tribunal considère que la deuxième branche du moyen doit également être écartée.

75

Dès lors, le moyen tiré d'une violation des articles 27, 29 et 30 du statut doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les moyens tirés d'un détournement de pouvoir et d'une violation du principe de non-discrimination

Arguments des parties

76

Le requérant estime que, en décidant de recourir à la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut pour pourvoir le poste de chef du protocole, le Parlement s'est réservé la possibilité de nommer un candidat préalablement choisi, externe à l'institution, à savoir M. B.

77

A l'appui de cette affirmation, le requérant apporte notamment les indices suivants:

le président du Parlement et le candidat nommé ont la même nationalité et appartiennent à la même famille politique;

des liens d'amitié uniraient de façon certaine le candidat nommé et certains proches collaborateurs du président du Parlement;

la procédure interne de recrutement serait clôturée au motif prétendu qu'aucun des candidats ne présentait les qualifications requises pour le poste à pourvoir.

78

Le requérant voit, en outre, dans les éléments invoqués par le Parlement dans son mémoire en défense la confirmation des indices susmentionnés.

79

A cet égard, il soutient qu'il ressort de ce mémoire que, dans le choix du candidat retenu, l'AIPN s'est donné un nouveau critère, auquel elle a accordé la plus grande importance: celui de l'existence de liens personnels et privilégiés avec le candidat. Il observe que ce critère n'était pas inscrit dans l'avis de recrutement.

80

Il en conclut que, en nommant M. B., seul candidat répondant au nouveau critère, l'AIPN a usé du pouvoir d'appréciation dont elle dispose dans un but autre que celui en vue duquel il lui a été conféré, ce dernier devant tendre à pourvoir le poste vacant par la désignation du candidat le mieux qualifié pour exercer les tâches s'y rapportant. Dans ce contexte, il répète qu'il est plus qualifié que M. B. pour exercer les tâches afférentes au poste de chef du protocole.

81

Enfin, le requérant soutient que sa conviction que le candidat nommé a été préalablement choisi est corroborée par le fait que, avant même l'affichage de l'avis de vacance pour la procédure de pourvoi interne, le Parlement avait envisagé de façon très claire le recours à l'article 29, paragraphe 2, du statut. La référence à cette procédure a ensuite été maintenue tout au long de la première procédure de pourvoi.

82

Dans ce contexte, le requérant fait également valoir que, en l'absence de toute motivation de la décision attaquée, il a subi un traitement discriminatoire par rapport au candidat nommé. Cela ressortirait également du fait qu'il n'a pas été nommé au poste vacant, bien qu'il ait été classé devant le candidat retenu.

83

Le Parlement fait valoir que la procédure critiquée ne révèle pas un détournement de pouvoir. Il se réfère notamment aux arguments qu'il a présentés dans le cadre du moyen précédent. Il se borne ici à remarquer que le fait que le candidat nommé ait la même nationalité que le président est dénué d'importance, dès lors surtout que le recrutement a été opéré suivant les règles générales de l'article 27 du statut.

84

Le fait que le recours à l'article 29, paragraphe 2, du statut a été envisagé dès le début du recrutement montre uniquement, selon le Parlement, que le directeur général a préféré, dès le début, indiquer les différentes possibilités de recrutement ouvertes par le statut, ce qui ne pourrait lui être reproché.

85

Enfin, le Parlement s'appuie sur les arguments et circonstances déjà avancés pour contester que la procédure critiquée révèle une violation du principe de non-discrimination.

Appréciation du Tribunal

86

La notion de détournement de pouvoir se réfère au fait qu'une autorité administrative a usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. En vertu d'une jurisprudence constante, une décision n'est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (voir dernièrement arrêt Kotzonis/CES, précité, point 73, et arrêt du Tribunal du 23 novembre 1995, Benecos/Commission, T-64/94, RecFP p. II-769, point 76).

87

Or, dans le cas d'espèce, les indices invoqués par le requérant ne peuvent pas être considérés comme objectifs, pertinents et concordants.

88

En effet, il ressort des constatations du Tribunal, dans le cadre du moyen tiré d'une violation des articles 27, 29 et 30 du statut, d'une part, que l'AIPN n'a pas commis de faute d'appréciation manifeste en usant de la procédure prévue à l'article 29, paragraphe 2, du statut et, d'autre part, qu'aucun indice ne permet de présumer que la candidature de M. B. a été appréciée au regard de conditions autres que celles énoncées dans l'avis de recrutement.

89

En ce qui concerne la référence à la possibilité de recourir à l'article 29, paragraphe 2, du statut, il suffit de constater, comme l'a souligné le Parlement à l'audience, que la formulation choisie dans l'avis de vacance est une formulation standard, souvent utilisée par les institutions communautaires, qui expose les différentes possibilités prévues par le statut.

90

Quant aux autres arguments avancés par le requérant dans le cadre de ces moyens, à savoir la nationalité du candidat nommé, son appartenance politique et ses liens d'amitié, le Tribunal considère qu'ils ne concernent que des éléments qui, en eux-mêmes, ne peuvent être considérés comme des indices pertinents pour établir que l'AIPN a commis un détournement de pouvoir.

91

Par conséquent, il y a lieu de constater que l'AIPN n'a pas usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés.

92

Il résulte de ce qui précède que le principe de non-discrimination n'a pas été violé, étant donné que l'AIPN a procédé à un examen comparatif régulier de la candidature du requérant, dans le cadre de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire (voir arrêt du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, points 24 et suivants).

93

Il s'ensuit que les moyens tirés d'un détournement de pouvoir et d'une violation du principe de non-discrimination doivent être rejetés.

Sur le moyen tiré d'une absence ou d'une insuffisance de motivation

Arguments des parties

94

Le requérant fait valoir que la décision attaquée est dénuée de toute motivation ou ne comporte, au mieux, qu'une motivation de pure forme, puisque cette décision comporte, comme seule justification, une référence générale à «l'examen approfondi des qualifications des lauréats du concours».

95

Il soutient qu'une telle motivation ne remplit pas à l'évidence les buts poursuivis par l'obligation de motiver leurs décisions mise à la charge des institutions, dans leur rôle d'AIPN, par l'article 25, deuxième alinéa, du statut. N'ayant donné aucune réponse explicite et motivée à la réclamation introduite par le requérant, le Parlement a une nouvelle fois méconnu cette obligation de motivation.

96

A l'appui de cet argument, le requérant invoque la jurisprudence relative à l'obligation de motiver les décisions, qui a pour but «de permettre à la Cour d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d'un vice permettant d'en contester la légalité» (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22).

97

Il rappelle que, selon une jurisprudence constante, les décisions d'un jury de concours rejetant une candidature font grief et doivent être motivées (voir arrêts de la Cour du 14 juin 1972, Marcato/Commission, 44/71, Rec. p. 427, et du 27 mars 1985, Kypreos/Conseil, 12/84, Rec. p. 1005). En outre, dans les arrêts du 30 juin 1983, Schloh/Conseil (85/82, Rec. p. 2105), et du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice (T-160/89 et T-161/89, Rec. p. II-871), la Cour et le Tribunal ont procédé à un examen minutieux des motifs de la décision rejetant la candidature des requérants dans ces affaires, alors même qu'il s'agissait dans les deux cas d'une application de la procédure de l'article 29, paragraphe 2, du statut.

98

Selon le requérant, les termes de la décision attaquée ne lui permettent pas de comprendre pour quels motifs il n'a pas été choisi par le Parlement et ne l'informe pas davantage sur les critères que l'AIPN a utilisé pour l'examen qu'elle dit avoir fait des mérites des lauréats. De plus, cette formulation ne permettrait pas non plus au Tribunal d'exercer son contrôle sur la légalité des décisions attaquées.

99

Il relève encore que l'AIPN aurait parfaitement pu communiquer au requérant une motivation objective, soit directement dans la décision attaquée, soit en réponse à la réclamation, sans méconnaître pour autant le devoir de confidentialité à l'égard des autres candidats. Il se réfère à cet égard au point 70 de l'arrêt Kalavros/Cour de justice, précité.

100

Enfin, le requérant nie formellement les dires du Parlement selon lesquels, d'une part, il aurait eu un entretien avec le chef de cabinet du président du Parlement au sujet du pourvoi du poste de chef du protocole et, d'autre part, il aurait été informé de l'existence et du contenu d'une lettre adressée le 7 juin 1993 à une tierce personne et lui exposant les motifs du rejet de sa candidature. Il ajoute que, en toute hypothèse, l'obligation de motivation incombe au Parlement, et que la méconnaissance de cette obligation ne saurait être couverte par un tiers.

101

Le Parlement remarque, à titre liminaire, que l'obligation de motivation des décisions invoquée dans le cadre du présent moyen n'est pas contestée; il s'agit uniquement d'examiner si la condition de motivation a été dûment remplie.

102

Il rappelle que le requérant a été informé, d'une part, qu'il était placé sur la liste d'aptitude, c'est-à-dire qu'il entrait dans un choix limité et, d'autre part, qu'un autre candidat avait été choisi «après examen approfondi des qualifications des lauréats».

103

Le Parlement soutient que ces deux communications renseignaient le requérant de façon complète ou à tout le moins suffisante. Il souligne que le comité de sélection n'avait pas le droit de communiquer la liste d'aptitude avec les points attribués au requérant, et que l'administration n'était pas non plus autorisée à le faire. Elle a dû se borner à lui faire part de la préférence accordée à un autre candidat.

104

Il ajoute que le requérant a reçu des informations complémentaires du chef de cabinet du président lors d'un entretien particulier, ainsi que du destinataire d'une lettre du président du 7 juin 1993, répondant à sa lettre de recommandation en faveur de M. Brunagel (annexe 37 au mémoire en défense).

105

Selon le Parlement, le rejet de la réclamation du requérant n'exigeait pas de motivation explicite, puisque les motifs de l'échec de la candidature étaient déjà connus à ce stade.

Appréciation du Tribunal

106

Selon une jurisprudence constante, l'obligation de motiver une décision a pour but de permettre aux juridictions communautaires d'exercer leur contrôle sur la légalité de la décision et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d'un vice permettant d'en contester la légalité (voir, par exemple, arrêt Michel/Parlement, précité, point 22). Ce principe a été confirmé à propos de l'article 29, paragraphe 2, du statut (voir arrêt Kalavros/Cour de justice, précité, point 64). Il est satisfait à cette obligation lorsque l'acte litigieux est intervenu dans un contexte connu du fonctionnaire concerné et lui permettant de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, par exemple, arrêts de la Cour du 7 mars 1990, Hecq/Commission, C-116/88 et C-149/88, Rec. p. I-599, points 26 à 27, et du Tribunal du 16 décembre 1993, Turner/Commission, T-80/92, Rec. p. II-1465, point 62).

107

En cas de rejet d'une candidature à un emploi vacant, l'AIPN est tenue de motiver à tout le moins la décision rejetant la réclamation de l'intéressé (voir, par exemple, arrêt Volger/Parlement, précité, point 36). Il suffit que la motivation s'appuie sur l'existence des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure (voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 24 février 1994, Caló/Commission, T-108/92, RecFP p. II-213, point 34).

108

La décision adressée au requérant porte comme seul motif que, «après examen approfondi des qualifications des lauréats du concours [...], un autre candidat inscrit sur la liste d'aptitude a été choisi pour nomination comme chef du protocole». Le requérant n'a pas reçu une réponse à sa réclamation à rencontre de cette décision. Pourtant, le Parlement prétend que le requérant a reçu des informations complémentaires du chef de cabinet du président, ainsi que du destinataire d'une lettre du président.

109

En ce qui concerne l'argument du Parlement selon lequel la motivation reprise dans la décision attaquée est suffisante, le Tribunal relève que, même s'il suffit que la motivation concerne l'existence des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure, une motivation générale et d'ordre purement procédural ne saurait être considérée comme suffisante lorsque le motif individuel et pertinent qui a permis d'écarter un candidat ne lui est pas communiqué (voir arrêt du Tribunal du 17 mai 1995, Benecos/Commission, T-16/94, RecFP p. II-335, point 35). En l'occurrence, lorsque la motivation qui s'est avérée pertinente pour rejeter la candidature du requérant ne lui a pas été communiquée, la formulation succincte dans la décision attaquée ne suffit pas pour remplir l'obligation de motivation. A cet égard, il convient d'observer que, par sa réclamation, le requérant a exprimé un souhait clair de connaître les motifs individuels et pertinents du rejet de sa candidature.

110

Pour ce qui est des informations complémentaires que le requérant aurait reçues, il y a d'abord lieu de constater que celles obtenues du destinataire de la lettre du président ne sont pas de nature à remplir l'obligation de motivation incombant au Parlement, qui ne peut pas être assumée par un tiers.

111

Quant au prétendu entretien avec le chef de cabinet du président, le Tribunal observe qu'il ressort des éléments avancés par le Parlement lors de l'audience, que les motifs du rejet de la candidature du requérant n'ont été fournis au requérant que partiellement. En effet, le seul fait établi est l'existence de contacts à ce sujet entre le chef de cabinet et le requérant.

112

Par conséquent, au moment de l'introduction du recours, le requérant n'était pas suffisamment informé des motifs du rejet de sa candidature.

113

Toutefois, le Tribunal estime qu'il ne s'agit pas d'une absence totale de motivation. A cet égard, il convient notamment d'observer que la candidature du requérant a été écartée au stade final de la procédure. Le requérant doit donc avoir compris qu'il s'agissait d'un choix discrétionnaire de l'AIPN, motivé par la personnalité des candidats inscrits sur la liste d'aptitude.

114

En outre, le requérant a été informé en cours d'instance des motifs qui le concernaient personnellement. A cet égard, il y a lieu de prendre en considération, entre autres, la note interne du chef de cabinet du président adressée au secrétaire général, produite en annexe 36 au mémoire en défense, la lettre du président adressée à la personne qui a recommandé le requérant pour ce poste, produite en annexe 37 au mémoire en défense, ainsi que les renseignements supplémentaires donnés lors de l'audience quant au nouveau profil que le Parlement souhaitait donner au poste en cause.

115

Le moyen tiré d'une insuffisance de motivation a donc été rendu sans objet par les explications que le Parlement a données en cours d'instance (voir arrêts du Tribunal du 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T-25/92, Rec. p. II-201, point 27, et du 17 mai 1995, Benecos/Commission, précité, point 38).

116

Dès lors, le moyen tiré d'une absence ou d'une insuffisance de motivation doit également être rejeté.

117

Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

118

Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il a été conclu en ce sens, étant entendu que, en vertu de l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

119

En l'espèce, eu égard au fait que la décision attaquée était entachée d'une insuffisance de motivation subsistant au stade du rejet de la réclamation et qu'elle n'a été corrigée que dans le cadre de la procédure contentieuse, le Tribunal considère qu'il y a lieu de condamner le Parlement à supporter les dépens du requérant.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Le Parlement est condamné aux dépens.

 

Lenaerts

Lindh

Cooke

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 1996.

Le greffier

H. Jung

Le président

K. Lenaerts


( *1 ) Langue de procédure: le français

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