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Document 62014CO0450

Sklep Sodišča (deveti senat) z dne 31. maja 2016.
Koinonia Tis Pliroforias Anoichti Stis Eidikes Anagkes – Isotis proti Evropski komisiji.
Pritožba – Poslovnik Sodišča – Člen 181 – Arbitražna klavzula – Pogodbe, sklenjene v okviru Šestega okvirnega programa na področju raziskav, tehnološkega razvoja in predstavitvenih dejavnosti, ki prispeva k oblikovanju Evropskega raziskovalnega prostora in k inovacijam (2002‑2006), Programa eTEN, ki se nanaša na področje vseevropskih telekomunikacijskih omrežij ter Okvirnega programa za konkurenčnost in inovativnost (2007 – 2013) – Računovodsko poročilo, v katerem je bilo ugotovljeno, da so bili priglašeni izdatki neupravičeni – Zahteva za vračilo izplačanih subvencij – Pavšalna odškodnina – Ničnostna tožba – Nasprotna tožba.
Zadeva C-450/14 P.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2016:477

ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)

31 mai 2016 (*)

« Pourvoi – Règlement de procédure de la Cour – Article 181 – Clause compromissoire – Contrats conclus dans le cadre du sixième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et de l’innovation (2002-2006), du programme eTEN, relatif aux réseaux de télécommunications transeuropéens, ainsi que du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013) – Rapport d’audit ayant constaté le caractère non éligible des dépenses exposées – Demande de remboursement des subventions versées – Indemnité forfaitaire – Recours en annulation – Demande reconventionnelle »

Dans l’affaire C‑450/14 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 septembre 2014,

Koinonia Tis Pliroforias Anoichti Stis Eidikes Anagkes – Isotis, établie à Ilion Attikis (Grèce), représentée par Me S. Skliris, avocat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par Mmes S. Lejeune et A. Marcoulli, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. C. Lycourgos, président de chambre, MM. E. Juhász et C. Vajda (rapporteur), juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Koinonia Tis Pliroforias Anoichti Stis Eidikes Anagkes – Isotis (ci-après « Isotis ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 juillet 2014, Isotis/Commission (T‑59/11, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2014:679), par lequel celui-ci a rejeté son recours relatif aux subventions versées au titre de neuf contrats conclus avec la Communauté européenne et ayant pour objet la réalisation de certains projets (ci-après les « contrats en cause »), d’une part, et a accueilli la demande reconventionnelle de la Commission européenne contre Isotis, d’autre part.

 Le cadre juridique

 Le cadre contractuel

2        Les contrats en cause ont été conclus entre, d’une part, la Communauté européenne, représentée par la Commission, et, d’autre part, un coordinateur ainsi que les membres d’un consortium, parmi lesquels figure Isotis. Chacun de ces contrats fixait une durée du projet concerné et prévoyait une contribution financière maximale de la Communauté européenne ainsi que la partie de cette contribution destinée à Isotis. Lesdits contrats comprenaient, outre le texte principal, six annexes, dont la deuxième contenait les conditions générales applicables.

3        Parmi les contrats en cause, six contrats (ci-après les « contrats FP6 ») ont été conclus dans le cadre du sixième programme-cadre arrêté par la décision n° 1513/2002/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2002, relative au sixième programme-cadre de la Communauté européenne pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et à l’innovation (2002-2006) (JO 2002, L 232, p. 1).

4        Il s’agit des contrats n° 027020 « Access to e-Government Services Employing Semantic Technologies », n° 035242 « A virtual platform to enhance and organize the coordination among centres for accessibility ressources and support », n° 511298 « Ambient Intelligence System of Agents for Knowledge-based and Integrated Services for Mobility Impaired Users », n° 034778 « European Unified Approach for Accessible Lifelong Learning », n° 045056 « Emergency Monitoring and Prevention » ainsi que n° 045563 « A wearable system supporting services to enable elderly people to live well, independently and at ease ».

5        Les conditions générales des contrats FP6 (ci-après les « conditions FP6 ») stipulaient, notamment, ce qui suit :

« [...]

Article II.1 Définitions

[...]

22.      Recettes : transferts financiers ou contributions en nature mis à la disposition d’un contractant par un tiers qui sont considérés comme recettes au sens de l’article II.23 ainsi que tous revenus générés par le projet [...]

[...]

Article II.19 Coûts éligibles du projet

1.      Les coûts éligibles encourus pour la réalisation du projet doivent remplir toutes les conditions suivantes :

[...]

d)      ils doivent être inscrits dans les comptes du contractant qui les a encourus, au plus tard à la date de l’établissement du certificat d’audit visé à l’article II.26. Les méthodes comptables utilisées pour enregistrer les coûts et les recettes doivent être conformes aux règles comptables utilisées dans l’État où le contractant est établi et doivent permettre le rapprochement des coûts encourus et des recettes perçues dans la réalisation du projet ainsi que de l’état général des comptes relatifs à l’activité commerciale globale du contractant ;

[...]

Article II.29 Contrôles et audits

1.      À tout moment au cours du contrat et jusqu’à cinq ans après la fin du projet, la Commission peut faire procéder à des audits, soit par des réviseurs ou auditeurs scientifiques ou technologiques externes, soit par les services de la Commission eux-mêmes, y compris l’[Office européen de lutte antifraude]. Ces audits peuvent porter sur des aspects scientifiques, financiers, technologiques et autres (tels que les principes de comptabilité et de gestion) se rapportant à la bonne exécution du projet et du contrat. Ces audits s’effectuent sur une base confidentielle. Les montants qui seraient dus à la Commission en raison des résultats de ces audits peuvent faire l’objet d’un recouvrement comme indiqué à l’article II.31.

[...]

2.      Les contractants mettent directement à la disposition de la Commission toutes les données détaillées qui peuvent être demandées par la Commission en vue de vérifier si le contrat est bien géré et exécuté.

[...]

Article II.31 Remboursement de la Commission et ordres de recouvrement

1.      Lorsqu’un montant a été payé indûment au contractant ou lorsqu’un recouvrement est justifié dans les conditions du contrat, le contractant s’engage à rembourser à la Commission la somme en question dans les conditions et à la date précisées par elle.

2.      À défaut de paiement par le contractant à la date fixée par la Commission, la somme due est porteuse d’intérêts au taux indiqué à l’article II.28. Les intérêts de retard s’appliquent à partir de la date fixée pour le paiement jusqu’au jour où la Commission reçoit le total de la somme qui lui est due.

[...] »

6        Parmi les contrats en cause, deux autres contrats (ci-après les « contrats eTEN ») ont été conclus dans le cadre du programme spécifique eTEN, relatif aux réseaux de télécommunications transeuropéens et régi par le règlement (CE) n° 2236/95 du Conseil, du 18 septembre 1995, déterminant les règles générales pour l’octroi d’un concours financier communautaire dans le domaine des réseaux transeuropéens (JO 1995, L 228, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1655/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 19 juillet 1999 (JO 1999, L 197, p. 1).

7        Il s’agit des contrats n° 029255 « NavigAbile : e-inclusion for communication disabilities » et n° 517506 « European Recommended Materials for Distance Learning Courses for Educators ».

8        Les conditions générales des contrats eTEN (ci-après les « conditions eTEN ») stipulaient notamment :

« [...]

Article II.16 Justification des coûts

Les coûts éligibles sont remboursés lorsqu’ils sont motivés par le participant.

À cette fin, le participant est tenu de conserver, sur une base régulière et conformément aux conventions comptables usuelles de son État d’établissement, la comptabilité relative au projet et une documentation appropriée pour étayer et justifier dans le détail les frais et le temps figurant dans ses écritures comptables.

La documentation doit être précise, complète et efficace.

Article II.17 Audit financier

[...]

2.      La Commission ou tout représentant autorisé pourra accéder à des heures raisonnables, notamment, au personnel des bénéficiaires qui est associé au projet, à la documentation visée à l’article 16 de la présente annexe, et aux données informatiques et équipements qu’il/elle considérera comme pertinents. Dans ce cadre, il/elle pourra exiger que les données lui soient remises dans une forme appropriée afin, par exemple, de vérifier l’éligibilité des coûts.

[...]

4.      Sur la base des conclusions de l’audit, la Commission prendra toutes les mesures appropriées qu’elle jugera utiles, y compris la mise en recouvrement de tout ou partie des paiements qu’elle aura effectués. La mise en recouvrement sera adressée au bénéficiaire concerné, ou au bénéficiaire impliqué si l’audit financier vise l’un de ses membres.

[...]

Article II.19 Remboursement à la Commission et mises en recouvrement

1.      Si un montant est indûment versé au participant ou si le recouvrement est justifié en vertu des clauses du contrat, le bénéficiaire entreprend de rembourser à la Commission la somme en cause, selon les modalités et à la date précisées par la Commission.

2.      Si le bénéficiaire omet de payer jusqu’à la date fixée par la Commission, la somme due sera majorée d’intérêts au taux fixé à l’article 3.6 de la présente annexe. Les intérêts de retard courront depuis la date impartie pour le paiement, exclue, jusqu’à la date, inclue, à laquelle la Commission percevra la totalité du montant dû.

[...] »

9        Le dernier des contrats en cause (ci-après le « contrat CIP ») a été conclu dans le cadre du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (CIP), adopté par la décision n° 1639/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 2006, établissant un programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013) (JO 2006, L 310, p. 15).

10      Il s’agit du contrat n° 224988 « T-Seniority : Expanding the benefits of information society to older people through digital TV channels ».

11      Les conditions générales du contrat CIP (ci-après les « conditions CIP ») contenaient, notamment, les articles suivants :

« [...]

Article II.20 Coûts éligibles – principes généraux

1.      Les coûts éligibles sont ceux visés aux articles II.21 et II.22. Ils doivent remplir les conditions suivantes :

[...]

–        ils doivent être nécessaires pour la mise en œuvre du projet ;

–        ils doivent avoir été effectivement engagés par le bénéficiaire ;

–        ils doivent être identifiables et vérifiables, être inscrits dans la comptabilité du bénéficiaire et fixés conformément aux principes comptables applicables dans le pays d’établissement du bénéficiaire et conformément aux méthodes de calcul des coûts usuelles du bénéficiaire ; les procédures internes de comptabilité et d’audit du bénéficiaire doivent permettre une correspondance directe entre les coûts et factures déclarés au titre du projet et les documents financiers et annexes correspondants ;

–        ils doivent être conformes aux exigences de la législation fiscale et sociale applicable ;

–        ils doivent être raisonnables et justifiés et répondre aux impératifs de bonne gestion financière, notamment en ce qui concerne l’économie et l’efficacité ;

et

–        ils doivent avoir été engagés au cours de la durée du projet.

[...]

Article II.23 Justification des coûts

Les coûts éligibles sont remboursés lorsqu’ils sont motivés par le bénéficiaire.

À cette fin, le participant est tenu de conserver, sur une base régulière et conformément aux conventions comptables normales de son État d’établissement, la comptabilité relative au projet et une documentation appropriée pour étayer et justifier dans le détail les frais et le temps figurant dans ses écritures comptables. Cette comptabilité doit être conservée pendant cinq ans au moins à compter de la date du paiement final. Tout le temps de travail imputé au contrat de financement doit être enregistré pendant toute la durée du projet et pour une période maximale de deux mois à compter de la fin du projet ; ce temps doit être certifié par la personne responsable du travail désignée par le participant conformément à l’article II.3.b ou par le directeur financier dûment habilité du participant.

Cette documentation doit être précise, complète et efficace.

[...]

Article II.28 Audit financier

[...]

2.      Les bénéficiaires mettront directement à la disposition de la Commission toutes les informations et données détaillées réclamées par celle-ci ou par tout représentant habilité par elle, afin de vérifier que le contrat de financement est correctement géré, qu’il est mis en œuvre conformément à ses dispositions et que les coûts ont été imputés de manière conforme.

[...]

5.      Sur la base des conclusions de l’audit, la Commission prendra toutes les mesures appropriées qu’elle jugera utiles, y compris la mise en recouvrement de tout ou partie des paiements qu’elle aura effectués et l’imposition de toute sanction applicable.

[...]

Article II.30 Remboursement à la Commission et mises en recouvrement

1.      Lorsqu’un montant versé par la Commission au coordinateur, en sa capacité de récipiendaire de tous les paiements, doit être recouvré en vertu des dispositions du présent contrat de financement, le bénéficiaire concerné entreprend de rembourser à la Commission la somme en cause, selon les modalités et à la date précisées par la Commission.

2.      Si l’obligation de payer le montant dû n’a pas été honorée à la date fixée par la Commission, la somme due sera majorée d’intérêts au taux fixé à l’article II.5(5). Les intérêts de retard courront depuis la date impartie pour le paiement, exclue, jusqu’à la date, inclue, à laquelle la Commission percevra la totalité du montant dû.

[...] »

12      Conformément à l’article 12 des contrats FP6 et à l’article 5, paragraphe 1, des contrats eTEN, ceux-ci sont régis par le droit belge. Le contrat CIP est, conformément à son article 10, premier alinéa, régi, à titre principal, « par ses propres dispositions, par les actes pertinents de la Communauté relatifs au [CIP], par le règlement financier applicable au général des Communautés européennes ainsi que ses modalités d’application, [et] par les autres dispositions du droit communautaire » et, à titre subsidiaire, par le droit belge.

13      L’article 13 des contrats FP6, l’article 5, paragraphe 2, des contrats eTEN et l’article 10, troisième alinéa, du contrat CIP contiennent une clause compromissoire en vertu de laquelle le Tribunal ou la Cour, selon le cas, sont compétents pour régler les litiges entre la Communauté européenne et les contractants relatifs à la validité, à l’application ou à l’interprétation de ces contrats.

 Le droit belge

14      En vertu de l’article 1134, troisième alinéa, du code civil, les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi.

15      L’article 1156 de ce code prévoit :

« On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes. »

16      Aux termes de l’article 1315 dudit code :

« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »

 Les antécédents du litige

17      Isotis est une société civile à but non lucratif de droit grec établie à Athènes (Grèce) ayant participé aux projets afférents aux contrats en cause. Le 17 janvier 2011, elle a été placée en liquidation.

18      Du 8 au 12 février 2010, la Commission a effectué un audit financier portant sur les contrats en cause dans les bureaux d’Isotis. Antérieurement à la réalisation de cet audit, la Commission avait versé la dernière tranche de la contribution financière de la Communauté européenne à Isotis pour certains des contrats en cause, alors que d’autres contrats en cause se trouvaient à des stades d’exécution différents.

19      Le 28 juin 2010, la Commission a envoyé à Isotis un rapport d’audit provisoire concernant l’exécution des contrats en cause. Isotis a communiqué à la Commission ses observations sur ledit rapport le 30 septembre 2010.

20      Par lettre du 22 décembre 2010, la Commission a informé Isotis qu’elle avait adopté le rapport d’audit définitif, annexé à ladite lettre, dont elle approuvait les conclusions. Dans ce rapport, il était constaté ce qui suit :

–        durant plusieurs années successives, Isotis n’avait pas comptabilisé, en particulier, ses recettes exactes dans ses livres de compte et ses archives, en violation des dispositions pertinentes de la loi grecque ; il en résultait que ses écritures comptables n’étaient pas fiables et qu’aucune comparaison directe ne pouvait être effectuée entre les dépenses et les recettes relatives à l’exécution des programmes et la situation générale de ses comptes ;

–        un pourcentage important des fiches de présence du personnel portait systématiquement des corrections manuscrites qui avaient été effectuées a posteriori par le directeur des programmes, sans le consentement du personnel ; cela avait des conséquences importantes sur le temps de travail déclaré et suscitait des doutes quant à l’enregistrement des heures de travail ;

–        les fiches de présence du directeur des programmes indiquaient un nombre d’heures de travail exagéré. Ces heures recoupaient celles consacrées à d’autres activités professionnelles ;

–        Isotis avait faussement déclaré que le directeur des programmes n’avait pas participé à l’exécution du contrat ETSI STF 333 financé par la Commission ;

–        la justification des frais de voyage ne fournissait pas une image fiable et objective des conditions et des activités entreprises dans le cadre de ces déplacements, dans la mesure où la majorité de ces voyages n’était pas directement liée aux programmes en cause.

21      Le rapport d’audit concluait qu’il convenait, en conséquence, de considérer que toutes les dépenses exposées par Isotis au cours de l’exécution des contrats en cause étaient non éligibles et que la totalité des montants pertinents versés à celle-ci devait être recouvrée.

22      Le rapport d’audit recommandait également, eu égard à la gravité des infractions constatées, de dénoncer tous les contrats en cours conclus par Isotis avec la Commission, conformément à l’article II.16.2 des conditions FP6, à l’article II.7.3 (irrégularité financière grave) et à l’article II.7.4 (fausses déclarations) des conditions eTEN ainsi qu’à l’article II.10.3 (violation du contrat et non-production d’informations) des conditions CIP.

23      Dans sa lettre du 22 décembre 2010, la Commission indiquait également la somme à rembourser pour chacun des contrats en cause ainsi que la possibilité d’une indemnité forfaitaire due à l’Union européenne à l’égard des contrats FP6, conformément à l’article II.30 des conditions FP6.

24      Par lettre du 21 mars 2011, la Commission a indiqué à Isotis les montants qui lui avaient été indûment versés et l’a informée que si elle ne soumettait pas de commentaires à cet égard dans les 15 jours suivant la réception de cette lettre, les services de la Commission continueraient la procédure de recouvrement pour un montant de 643 782,81 euros, lequel a ensuite été rectifié pour indiquer un montant de 999 366,40 euros.

25      Le 29 avril 2011, la Commission a émis neuf notes de débit à concurrence du montant à rembourser au titre de chacun des contrats en cause pour un total de 999 213,45 euros. Elle a également informé Isotis que le montant total des indemnités forfaitaires dues au titre des contrats FP6 s’élevait à 70 471,47 euros, pour lesquelles elle a, le 20 juin 2011, émis six notes de débit.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal, Isotis a introduit un recours fondé sur l’article 272 TFUE.

27      Le recours visait, en substance, à ce que le Tribunal, d’une part, déclare non fondée la demande de la Commission tendant au remboursement des subventions versées à Isotis au titre des contrats en cause et, d’autre part, condamne la Commission au paiement du solde des subventions au titre des contrats nos 511298 et 034778.

28      Dans son mémoire en défense, la Commission a conclu au rejet de ce recours et a formé une demande reconventionnelle tendant à la condamnation d’Isotis au remboursement, majoré d’intérêts, des subventions indûment versées dans le cadre des contrats en cause ainsi qu’au paiement de l’indemnité forfaitaire visée au point 25 de la présente ordonnance.

29      Le Tribunal a rejeté le recours d’Isotis et a accueilli la demande reconventionnelle de la Commission. Il a également condamné Isotis aux dépens.

 Les conclusions des parties devant la Cour

30      Par son pourvoi, Isotis demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        de statuer elle-même sur le présent pourvoi en faisant droit à son recours ainsi qu’en rejetant la demande reconventionnelle de la Commission, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

31      La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi comme étant irrecevable et/ou non fondé et de condamner Isotis aux dépens.

 Sur le pourvoi

32      En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée.

33      Il y a lieu de faire application de cette disposition en l’espèce.

34      Au soutien de son pourvoi, Isotis soulève neuf moyens.

 Sur les premier et deuxième moyens, tirés d’une application erronée de l’article 1315 du code civil belge concernant la répartition de la charge de la preuve ainsi que d’un défaut de motivation

 Argumentation des parties

35      Par son premier moyen, Isotis fait valoir que, conformément à l’article 1315 du code civil belge, applicable aux contrats en cause, la Commission était tenue, dans sa demande reconventionnelle, de prouver les arguments susceptibles d’établir l’existence et le montant de sa créance sur Isotis. En effet, le rejet du recours de cette dernière n’impliquerait pas en soi que les faits invoqués dans cette demande reconventionnelle étaient établis. Or, les points 258 à 306 de l’arrêt attaqué, relatifs à cette demande, ne comporteraient aucune référence à des faits dont la Commission aurait apporté la preuve, ni aux moyens de preuve. Ainsi, en rejetant le recours d’Isotis, le Tribunal aurait présumé que les demandes de la Commission étaient bien fondées, en méconnaissance des règles de répartition de la charge de la preuve prévue audit article.

36      Par son deuxième moyen, Isotis soutient que lesdits points 258 à 306 ne comportent aucune motivation au soutien de la décision du Tribunal d’accueillir la demande reconventionnelle de la Commission. En s’appuyant sur le seul élément de preuve apporté par cette institution, à savoir le rapport d’audit, le Tribunal aurait motivé l’arrêt attaqué de manière contradictoire en considérant comme élément de preuve le fait qui devait être prouvé.

37      La Commission considère que ces moyens sont irrecevables et, à titre subsidiaire, non fondés.

 Appréciation de la Cour

38      Contrairement à ce que fait valoir la Commission, les premier et deuxième moyens sont recevables. En effet, il y a lieu de relever qu’Isotis indique que les points 258 à 306 de l’arrêt attaqué, comprenant la partie de celui-ci consacrée à l’examen de la demande reconventionnelle, sont entachés d’une erreur de droit. Or, si ces points de cet arrêt, qui sont cités de manière générale, concernent l’appréciation de l’étendue, de la recevabilité ainsi que du bien-fondé des demandes de la Commission, il n’en demeure pas moins qu’une telle citation, qui englobe l’appréciation relative au bien-fondé de ces demandes, combinée à l’argumentation d’Isotis, qui reproche spécifiquement au Tribunal une méconnaissance des règles de répartition de la charge de la preuve, identifie avec la précision requise l’erreur de droit que celui-ci aurait commise. Par conséquent, le manque de précision reproché à Isotis par la Commission ne saurait être retenu.

39      Sur le fond, les arguments d’Isotis, selon lesquels le Tribunal aurait en substance renversé la charge de la preuve dans son examen de la demande reconventionnelle, méconnaissent le lien étroit entre cette demande et le recours d’Isotis. En effet, d’une part, ce dernier visait à ce que le Tribunal déclare que la demande de la Commission tendant au remboursement des subventions versées à Isotis au titre des contrats en cause était non fondée. D’autre part, par sa demande reconventionnelle, la Commission demandait qu’Isotis soit condamnée au remboursement desdites subventions, majoré d’intérêts, ainsi qu’au paiement de l’indemnité forfaitaire visée au point 23 de la présente ordonnance.

40      En vue d’examiner le bien-fondé de cette demande reconventionnelle, il y avait lieu que le Tribunal se réfère aux termes des contrats en cause (voir, par analogie, arrêt du 20 février 1997, IDE/Commission, C‑114/94, EU:C:1997:68, points 84 à 90).

41      Or, en l’occurrence, le Tribunal s’est référé, tout d’abord, au point 284 de l’arrêt attaqué, aux dispositions des contrats en cause sur lesquelles la Commission fondait ses demandes de remboursement et de paiement de l’indemnité forfaitaire visée au point 23 de la présente ordonnance, à savoir l’article II.31, paragraphes 1 et 2, des conditions FP6, l’article II.19, paragraphes 1 et 2, des conditions eTEN ainsi que l’article II.30, paragraphes 1 et 2, des conditions CIP. Ensuite, au point 285 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, pour qu’une créance soit exigible au titre desdites dispositions contractuelles, deux conditions précisées dans celles-ci devaient être remplies, à savoir, en premier lieu, qu’un montant ait été payé de manière injustifiée ou qu’un recouvrement soit justifié selon les conditions des contrats en cause et, en second lieu, que la Commission ait spécifié les conditions de remboursement ainsi que la date de paiement. Enfin, à partir du point 287 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné si ces conditions étaient remplies pour conclure, en substance, que tel était le cas.

42      De plus, il découle de l’article II.29, paragraphe 1, des conditions FP6, de l’article II.17, paragraphe 4, des conditions eTEN ainsi que de l’article II.28, paragraphe 5, des conditions CIP que les montants dus à la Commission en raison des résultats des audits financiers effectués par cette institution peuvent faire l’objet d’un recouvrement. C’est donc à bon droit que le Tribunal a jugé que la demande tendant au recouvrement forcé demandé par la Commission était fondée, eu égard aux conclusions du rapport d’audit qu’Isotis avait vainement contestées dans son recours.

43      Il résulte de ce qui précède que l’argumentation d’Isotis, selon laquelle le Tribunal a méconnu les règles de répartition de la charge de la preuve dans son examen du bien-fondé de la demande reconventionnelle de la Commission et n’a pas motivé cet examen, est manifestement dépourvue de fondement.

44      En conséquence, il y a lieu de rejeter les premier et deuxième moyens comme étant manifestement non fondés.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur de droit relative à l’inapplication des normes internationales de l’audit

 Argumentation des parties

45      Isotis fait valoir que, au point 188 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé à tort que le droit grec en matière comptable, applicable entre les parties en vertu de certaines dispositions des conditions FP6 et CIP, n’imposait pas à la Commission de respecter les normes édictées par l’International Federation of Accountants (IFAC) (Fédération internationale des comptables). Isotis relève que l’application des normes internationales de l’audit est prévue tant par certaines des dispositions de la loi grecque qui a transposé la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 mai 2006, concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés et modifiant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE du Conseil, et abrogeant la directive 84/253/CEE du Conseil (JO 2006, L 157, p. 87), que par le code de déontologie grec des experts comptables et conseillers fiscaux.

46      En outre, il y aurait eu lieu d’appliquer les normes internationales de l’audit en vertu de la législation belge régissant les contrats en cause, soit, plus particulièrement, l’article 1134 du code civil relatif au principe de bonne foi dans l’exécution des conventions et l’article 1156 de ce code, selon lequel il y a lieu d’interpréter des conventions en se fondant sur la volonté commune des parties. Or, il ressortirait de certaines dispositions de la directive 2006/43 que la Commission acceptait l’application des normes internationales en matière d’audit.

47      La Commission soutient que ce moyen est irrecevable et, à titre subsidiaire, non fondé.

 Appréciation de la Cour

48      Il importe de relever que le troisième moyen du pourvoi contient un argument nouveau qui n’a pas été soumis à l’appréciation du Tribunal et qui, dès lors, est irrecevable au stade du pourvoi. En effet, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal.

49      À cet égard, l’argumentation que développe Isotis à l’appui de ce moyen, selon laquelle le droit grec en matière comptable, qui serait applicable conformément à certaines dispositions des contrats en cause, de même que le code de déontologie grec des experts comptables et conseillers fiscaux, imposeraient l’application des normes internationales de l’audit, n’a pas été soulevée devant le Tribunal. Ainsi qu’il ressort du point 186 de l’arrêt attaqué, Isotis a simplement fait valoir, devant cette juridiction, que la directive 2006/43 imposait aux États membres le respect des règles internationales de l’audit.

50      En outre, s’agissant de l’argument d’Isotis relatif au droit belge, il convient de constater que celle-ci n’a pas contesté l’appréciation visée au point 187 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, d’une part, l’article 26, paragraphe 1, de la directive 2006/43 prévoit que, si les États membres sont tenus d’exiger que les contrôleurs légaux des comptes et les cabinets d’audit effectuent un contrôle légal des comptes conformément aux normes internationales de l’audit adoptées par la Commission, ils peuvent appliquer les normes nationales de l’audit aussi longtemps que la Commission n’a pas adopté de normes internationales de l’audit couvrant la même matière et, d’autre part, la Commission n’avait pas encore adopté de règles d’audit internationales. Dès lors, cet argument est inopérant.

51      Il s’ensuit que le troisième moyen doit être écarté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une interprétation erronée du principe d’égalité des armes

 Argumentation des parties

52      Par son quatrième moyen, Isotis soutient que, aux points 269 à 274 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, en rejetant ses arguments relatifs à une violation du principe d’égalité des armes, méconnu la portée de ce principe. S’agissant de la demande reconventionnelle formée par la Commission dans le cadre de son mémoire en défense, le Tribunal aurait estimé que ledit principe n’avait pas été enfreint dès lors que, même si son règlement de procédure ne permettait à la partie initialement requérante de prendre position qu’une seule fois par écrit sur cette demande, la phase écrite de la procédure était complétée par une phase orale pendant laquelle ladite partie pouvait répondre aux arguments avancés dans le mémoire en duplique de la Commission.

53      Toutefois, Isotis fait valoir que la violation du principe d’égalité des armes résulte du fait que le Tribunal ne pouvait pas « entendre » ses arguments de manière efficace, par écrit et en détail, à savoir de la même manière dont il a entendu les arguments de la Commission. Ainsi, la différence de traitement des parties aurait consisté dans le mode de présentation, de développement et de motivation des arguments respectifs de celles-ci.

54      La Commission conclut au rejet de ce moyen comme étant non fondé.

 Appréciation de la Cour

55      C’est à bon droit que le Tribunal a, au point 271 de l’arrêt attaqué, renvoyé au point 71 de l’arrêt de la Cour du 6 novembre 2012 (Otis e.a., C‑199/11, EU:C:2012:684), selon lequel le principe d’égalité des armes est un corollaire de la notion même de procès équitable et implique l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire.

56      Il découle de cette jurisprudence de la Cour que le fait qu’une partie n’a pas été en mesure de faire valoir ses arguments au moyen d’un nombre de mémoires écrits identique à celui que dépose l’autre partie n’est pas, en soi, contraire au principe d’égalité des armes, pourvu que cette première partie ait eu une possibilité raisonnable de présenter sa cause et qu’elle n’ait pas été placée dans une situation de net désavantage par rapport à la seconde partie.

57      En l’espèce, Isotis n’allègue pas, et démontre encore moins, qu’elle n’a pas eu une possibilité raisonnable d’être entendue dans le cadre de la demande reconventionnelle formée par la Commission dans son mémoire en défense, ni qu’elle a été placée dans une situation de net désavantage par rapport à cette institution.

58      Par conséquent, il convient de rejeter le quatrième moyen comme étant manifestement non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une application erronée du principe de bonne foi ainsi que d’une violation des droits de la défense

 Argumentation des parties

59      Par son cinquième moyen, Isotis critique la considération du Tribunal, figurant au point 233 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le principe d’exécution de bonne foi des conventions, visé aux articles 1134 et 1135 du code civil belge, n’était pas de nature à contraindre la Commission, en l’espèce, d’adresser à Isotis, en exécution des contrats en cause, le rapport d’audit en langue grecque. Cette dernière avait, au cours de la procédure, fait une demande en ce sens, ledit rapport ayant été rédigé en langue anglaise.

60      Isotis fait valoir que le Tribunal s’est livré à une interprétation de ce principe de bonne foi qui méconnaît la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En outre, l’envoi des documents en langue anglaise aurait violé le principe du respect des droits de la défense, en ce qu’il aurait limité la possibilité pour Isotis de répondre de manière complète à l’ensemble des griefs de la Commission, compte tenu du volume des documents ainsi que de la terminologie comptable utilisée.

61      La Commission soutient que les arguments d’Isotis sont irrecevables et, à titre subsidiaire, non fondés.

 Appréciation de la Cour

62      Il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande.

63      Ne répond pas à ces exigences le moyen par lequel la requérante se borne à invoquer, par la seule énonciation abstraite de principes juridiques, une erreur de droit prétendument commise par le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2007, Lindorfer/Conseil, C‑227/04 P, EU:C:2007:490, point 83, et ordonnance du 4 décembre 2014, ADR Center/Commission, C‑259/14 P, non publiée, EU:C:2014:2417, point 43).

64      En l’espèce, l’allégation d’Isotis, selon laquelle l’interprétation à laquelle le Tribunal s’est livré du principe de bonne foi qui doit, en droit belge, présider à l’exécution des contrats n’a pas pris en compte la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, est trop générale et imprécise pour pouvoir faire l’objet d’une appréciation juridique par la Cour dans le cadre du présent pourvoi.

65      Il résulte de ce qui précède que le cinquième moyen doit être écarté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une interprétation erronée des termes des contrats en cause, d’une application erronée du droit grec ainsi que de l’absence de prise en compte d’un argument invoqué par Isotis

 Argumentation des parties

66      Isotis fait valoir que le Tribunal a commis une erreur en jugeant, au point 123 de l’arrêt attaqué, qu’elle avait tenu ses livres de compte d’une façon non conforme aux règles comptables grecques, applicables aux contrats en cause en vertu des clauses pertinentes de ceux-ci.

67      En particulier, ce serait à tort que le Tribunal a conclu à un manquement aux obligations contractuelles en raison de l’absence d’enregistrement du paiement d’une subvention de 63 000 euros par la Commission dans le cadre du contrat n° 027020. En effet, l’article II.19, paragraphe 1, sous d), des conditions FP6 stipulerait qu’Isotis devait respecter la législation grecque applicable en matière d’enregistrement des dépenses et des recettes relatives aux programmes en cause. Or, aux termes de l’article II.1, paragraphe 22, et de l’article II.23 desdites conditions, la notion de « recettes » recouvrirait seulement les paiements provenant de tiers et, partant, pas ceux reçus de la cocontractante d’Isotis.

68      Isotis soutient encore que, en se basant sur la constatation figurant au point 109 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la validité et la force probante des comptes d’Isotis pour l’année 2006 pouvaient être remises en cause par la Commission, pour juger qu’Isotis avait tenu ses livres de compte pour toutes les années litigieuses d’une manière non conforme à la législation grecque, le Tribunal a violé le droit grec comptable et fiscal, qui est régi par le principe d’autonomie des exercices financiers.

69      Enfin, Isotis critique l’affirmation du Tribunal figurant au point 110 de l’arrêt attaqué selon laquelle elle ne contestait pas explicitement le constat des contrôleurs de l’audit selon lequel la mise à jour des livres de compte uniquement après que ces contrôleurs avaient relevé que l’absence d’enregistrement de certains coûts et recettes constituait une violation des règles comptables grecques. À cet égard, Isotis allègue que le Tribunal n’a pas tenu compte de certaines constatations faites dans sa requête introductive d’instance.

70      La Commission estime que le sixième moyen d’Isotis est irrecevable et, à titre subsidiaire, non fondé.

 Appréciation de la Cour

71      Ainsi que le relève la Commission, l’allégation selon laquelle l’absence d’enregistrement d’une subvention de 63 000 euros dans les comptes d’Isotis ne contrevenait pas aux règles comptables applicables, au motif que cette subvention ne constituait pas une « recette », au sens des contrats en cause, n’a pas été soulevé devant le Tribunal. En effet, dans sa requête introductive d’instance devant cette juridiction, Isotis a, au contraire, fait valoir que l’absence d’enregistrement de cette somme dans ses comptes résultait d’une erreur excusable.

72      Ladite allégation constitue, dès lors, un argument nouveau qui, ainsi qu’il ressort du point 48 de la présente ordonnance, ne saurait être déclaré recevable au stade du pourvoi.

73      En outre, il résulte de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure que les moyens et les arguments de droit invoqués dans le cadre d’un pourvoi doivent identifier avec précision les points de motifs de la décision du Tribunal qui sont contestés.

74      Or, en ce qui concerne l’argument selon lequel le Tribunal a violé le droit comptable et fiscal grec en jugeant, sur la base de la seule année 2006, qu’Isotis avait tenu ses livres de compte pour toutes les années litigieuses d’une manière non conforme à la législation grecque, force est de constater qu’Isotis n’identifie aucun point de l’arrêt attaqué qui serait entaché de cette prétendue erreur de droit, dès lors que le seul point cité par celle-ci au soutien dudit argument, à savoir le point 109 de l’arrêt attaqué, se limite à constater que la validité et la force probante de ses comptes pour l’année 2006 pouvaient être remises en cause par la Commission.

75      S’agissant de la contestation d’Isotis relative aux considérations du Tribunal figurant au point 110 de l’arrêt attaqué, il suffit de relever que les points de sa requête en première instance cités par Isotis ne soutiennent pas son allégation selon laquelle, contrairement à ce que le Tribunal a jugé audit point, elle avait contesté le constat des auditeurs selon lequel la mise à jour tardive de ses comptes constituait une violation des dispositions pertinentes du droit comptable grec.

76      Dès lors, il convient de rejeter le sixième moyen comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur le septième moyen, tiré d’une interprétation erronée des termes des contrats en cause, de l’absence de prise en compte d’un argument d’Isotis ainsi que d’une dénaturation de documents

 Argumentation des parties

77      Isotis critique les points 119 et 122 de l’arrêt attaqué, qui sont rédigés comme suit :

« 119 S’agissant également de l’argument [d’Isotis] selon lequel le rapprochement comptable [prévu à l’article II.19, paragraphe 1, sous d), des conditions FP6 et à l’article II.20, paragraphe 1, des conditions CIP] était possible dans la mesure où elle avait enregistré dans ses livres de compte toutes les dépenses déclarées et les recettes reçues au titre des contrats en cause et conservé les justificatifs pertinents, il convient de constater que cette affirmation est directement contredite par le constat, non contesté par [Isotis], de l’absence d’enregistrement d’une recette d’un montant de 63 000 euros dans le cadre du contrat [n° 027020]. En outre, à supposer que cette affirmation doive être interprétée comme s’appliquant uniquement aux autres recettes et dépenses afférentes aux contrats en cause, il y a lieu de constater que la requérante n’apporte aucun élément de preuve à cet égard.

[...]

122      Il s’ensuit [qu’Isotis] ne démontre pas que, en dépit des erreurs identifiées dans ses livres de compte, les contrôleurs étaient en mesure de procéder à une comparaison directe entre les dépenses et les recettes relatives aux contrats en cause, d’une part, et sa situation comptable générale, d’autre part. »

78      En premier lieu, le Tribunal se serait livré à une interprétation erronée de l’article II.19, paragraphe 1, des conditions FP6, de l’article II.16 des conditions eTEN ainsi que de l’article II.20, paragraphe 1, et de l’article II.23 des conditions CIP en estimant que le rapprochement comptable prévu par ces dispositions contractuelles devait se faire sur la seule base des livres comptables d’Isotis. Or, tant le principe de bonne foi qui doit, en droit belge, présider à l’exécution des contrats, que les normes internationales de l’audit et la législation grecque en matière de comptabilité imposeraient la prise en compte de l’ensemble des procédures comptables et des documents d’Isotis.

79      En deuxième lieu, la contradiction constatée par le Tribunal au point 119 de l’arrêt attaqué reposerait sur l’interprétation erronée de la notion de « recettes » qui recouvrerait, à tort, les paiements reçus du cocontractant.

80      En troisième lieu, le Tribunal n’aurait pas pris en compte l’argument d’Isotis selon lequel la recette d’un montant de 63 000 euros avait été enregistrée dans ses livres de comptes au cours de la durée de l’audit, de sorte que le rapprochement visé au point 78 de la présente ordonnance aurait été possible avant l’issue du contrôle.

81      En quatrième lieu, en dénaturant le contenu des pièces probantes communiquées par Isotis, le Tribunal aurait retenu à tort que celle-ci n’apportait aucun élément de preuve quant au fait qu’il était possible de procéder à ce rapprochement. En effet, Isotis aurait communiqué au Tribunal huit rapports établis par les auditeurs assermentés qui auraient démontré une telle possibilité.

82      La Commission invoque l’irrecevabilité du septième moyen et, à titre subsidiaire, le caractère non fondé de celui-ci.

 Appréciation de la Cour

83      Tout d’abord, l’argument d’Isotis, selon lequel la contradiction retenue par le Tribunal au point 119 de l’arrêt attaqué reposait sur une interprétation erronée de la notion de « recettes », est inséparable de l’argument, avancé dans le cadre du sixième moyen, relatif à la qualification de la subvention de 63 000 euros, dès lors qu’Isotis soutient précisément que l’absence d’enregistrement de cette subvention dans ses comptes ne contrevenait pas aux règles comptables applicables, au motif que ladite subvention ne constituait pas une « recette », au sens des contrats en cause. Ce dernier argument ayant été jugé, aux points 71 et 72 de la présente ordonnance, manifestement irrecevable en tant qu’argument nouveau, l’argument invoqué dans le présent moyen doit, partant, également être déclaré manifestement irrecevable.

84      Ensuite, l’allégation selon laquelle le Tribunal a estimé, à tort, que le rapprochement comptable prévu par les contrats en cause devait se faire sur la seule base des livres comptables d’Isotis repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. En effet, au point 121 de cet arrêt, le Tribunal a constaté, en substance, que des écritures comptables et des justificatifs avaient été soumis à la Commission mais que, faute de production de ces documents devant le Tribunal, il n’était pas possible de vérifier s’il pouvait être procédé au rapprochement comptable sur la base de ceux‑ci.

85      De même, l’argument selon lequel le Tribunal n’a pas pris en compte l’allégation d’Isotis selon laquelle l’enregistrement ultérieur du montant de 63 000 euros dans ses comptes aurait permis un tel rapprochement comptable est contredit, notamment, au point 118 de l’arrêt attaqué. En effet, dans ce point, le Tribunal a constaté qu’il ressortait tant du rapport d’audit que des écritures de la Commission que cette dernière ne prétendait pas que les modifications apportées avaient rendu ce rapprochement comptable impossible, mais que, en dépit des modifications introduites pour remédier aux erreurs constatées dans les comptes d’Isotis, il n’avait pas été possible de procéder audit rapprochement.

86      S’agissant, enfin, du grief tiré d’une dénaturation, par le Tribunal, du contenu des pièces produites devant lui par Isotis, il y a lieu de rappeler qu’une telle dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves.

87      Or, à supposer que, par ledit grief, Isotis vise la dernière phrase du point 119 de l’arrêt attaqué, la constatation du Tribunal y figurant, selon laquelle Isotis n’apportait aucun élément de preuve du fait que, mis à part l’absence d’enregistrement d’une recette d’un montant de 63 000 euros dans le cadre du contrat n° 027020, elle avait enregistré dans ses livres de compte toutes les dépenses déclarées et les recettes reçues au titre des contrats en cause et conservé les justificatifs pertinents, ne saurait constituer une dénaturation manifeste des pièces soumises à l’appréciation du Tribunal par Isotis. Cette constatation constitue, tout au plus, une appréciation de la valeur probatoire desdites pièces qui n’est pas susceptible de faire l’objet d’un contrôle de la Cour au stade du pourvoi.

88      Il résulte de ce qui précède que le septième moyen doit être rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur le huitième moyen, tiré d’un défaut de motivation, d’une violation du droit applicable aux contrats en cause ainsi que de la dénaturation d’un document

 Argumentation des parties

89      Le huitième moyen d’Isotis est dirigé contre la partie de l’arrêt attaqué concernant la modification des fiches de présence du personnel relevée dans le rapport d’audit. Isotis reproche au Tribunal de ne pas avoir motivé sa constatation, figurant au point 127 de cet arrêt, selon laquelle il y avait lieu, s’agissant de la proportion de fiches corrigées, de considérer le nombre de 72 fiches par rapport non pas au nombre total de fiches, mais à celles contrôlées par la Commission, à savoir 770 fiches. Le Tribunal n’aurait pas précisé la règle sur la base de laquelle il a conclu en ce sens. En outre, en confirmant les conclusions de la Commission, le Tribunal aurait violé le droit applicable aux contrats en cause, en ce que des normes internationales en matière d’audit exigeraient la prise en compte de l’ensemble des éléments existants et des preuves suffisantes, en évitant des généralisations.

90      Selon Isotis, la considération du Tribunal figurant au point 129 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le fonctionnement du système d’enregistrement du temps de travail d’Isotis apparaissait viser moins à assurer l’enregistrement du nombre exact d’heures déclarées par chaque employé affecté à un programme qu’à permettre d’ajuster ce nombre d’heures, pour des raisons non expliquées par Isotis, avant l’envoi à la Commission, n’est pas motivée non plus, nonobstant les éléments qu’Isotis a fait valoir à ce propos dans sa requête devant le Tribunal.

91      En outre, cette considération se fonderait sur une dénaturation du contenu des fiches de présence communiquées par la Commission, dès lors qu’il ne résulterait pas de ces dernières que des corrections manuscrites y ont été apportées après la rédaction des rapports financiers ou après leur soumission à la Commission.

92      La motivation du Tribunal serait également empreinte de contradictions, dans la mesure où, d’une part, au point 128 de l’arrêt attaqué, il fait état d’une correction réduisant de 136 à 120 le nombre total d’heures de travail du directeur des programmes d’Isotis pour le mois d’octobre 2004, soit une modification de ce nombre d’heures. D’autre part, le Tribunal aurait considéré, au point 129 de l’arrêt attaqué, que les corrections manuscrites apportées aux fiches de présence qui sont reprochées à Isotis visaient à ce que le nombre d’heures déclarées corresponde aux heures contenues dans les rapports financiers afin que le nombre total d’heures de travail ne soit, au contraire, pas modifié. La constatation faite par le Tribunal audit point 128 procéderait par ailleurs d’une dénaturation du document concerné puisque la mention de 136 heures n’y figurerait pas.

93      La Commission soutient que le huitième moyen est irrecevable et, à titre subsidiaire, non fondé.

 Appréciation de la Cour

94      La critique dirigée par Isotis contre le point 127 de l’arrêt attaqué constitue essentiellement une mise en cause de l’appréciation faite par le Tribunal des éléments de preuve, en particulier du nombre de fiches de présence du personnel présentant des corrections. Une telle critique ne saurait être accueillie au stade du pourvoi. Au demeurant, il convient de relever qu’Isotis n’allègue pas que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant, à ce même point, qu’il revenait à Isotis de démontrer qu’aucune autre fiche de présence ne comportait de modification manuscrite, ce que celle-ci s’était abstenue de faire en l’espèce.

95      S’agissant du point 129 de l’arrêt attaqué, il en ressort que la considération qui y figure, selon laquelle le fonctionnement du système d’enregistrement du temps de travail apparaissait viser à permettre d’ajuster le nombre d’heures déclarées par chaque employé, pour des raisons non expliquées par Isotis, avant l’envoi du rapport final à la Commission, est motivée à suffisance de droit, contrairement aux affirmations d’Isotis. En effet, ladite considération est présentée comme une déduction des constatations faites à ce point selon lesquelles Isotis n’avait apporté aucune explication convaincante en ce qui concerne la modification d’un nombre important de fiches de présence lors du second contrôle et qu’elle n’avait ni soutenu ni démontré le caractère justifié de ces modifications.

96      Les deux allégations de dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal sont également dénuées de fondement. D’une part, celui-ci a fait état, au point 129 de l’arrêt attaqué, de modifications apportées aux fiches de présence mensuelles postérieurement à leur établissement et non, comme Isotis le prétend, après la rédaction des rapports financiers ou après la soumission des fiches de présence à la Commission. D’autre part, la mention de 136 heures figure bien sur le document visé au point 128 de l’arrêt attaqué, annexé au mémoire en réponse de la Commission.

97      Quant à l’allégation d’une contradiction de motifs entre les points 128 et 129 de l’arrêt attaqué, celle-ci repose sur une lecture erronée de ceux-ci, dans la mesure où, contrairement à ce qu’indique Isotis, le Tribunal n’a pas constaté que les corrections en question visaient l’ajustement d’heures déclarées aux heures contenues dans les rapports financiers afin que le nombre total d’heures de travail ne soit pas modifié.

98      Par conséquent, il convient d’écarter le huitième moyen comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur le neuvième moyen, relatif à la prise en compte d’arguments non invoqués et à l’absence de prise en compte des arguments invoqués

 Argumentation des parties

99      Isotis critique la constatation du Tribunal, figurant au point 165 de l’arrêt attaqué, aux termes de laquelle « [Isotis] conteste, en substance, la conclusion du rapport d’audit selon laquelle elle a fait de fausses déclarations au cours de la procédure d’audit au motif que c’est son personnel qui a dissimulé la relation existant entre le contrat ETSI STF 333 et la Commission ». Isotis fait valoir qu’elle n’a jamais prétendu que son personnel avait fait une telle dissimulation.

100    En revanche, le Tribunal n’aurait pas pris en compte les arguments d’Isotis selon lesquels cette dernière avait donné à la Commission un accès complet à l’ensemble des contrats qu’elle avait conclu, y compris au contrat ETSI STF 333.

101    Selon la Commission, la première allégation d’Isotis est non fondée et la seconde irrecevable ou, en tout état de cause, non fondée.

 Appréciation de la Cour

102    La première allégation d’Isotis, relative à la prise en compte d’un argument non invoqué par elle, repose sur une lecture erronée du point 165 de l’arrêt attaqué. En effet, ainsi que le relève la Commission dans son mémoire en réponse, le Tribunal a, à ce point, simplement résumé l’affirmation contenue dans la requête introductive d’instance devant cette juridiction, selon laquelle la Commission prétendait qu’Isotis avait fait de « fausses déclarations », au motif que son personnel avait soi-disant dissimulé la relation existant entre le contrat ETSI STF 333 et la Commission. Il s’ensuit que le Tribunal ne s’est référé à l’affirmation selon laquelle le personnel d’Isotis a dissimulé ladite relation que pour indiquer qu’Isotis contestait cette même affirmation.

103    La seconde allégation, relative à la non-prise en compte d’arguments invoqués, revient à mettre en cause la conclusion d’ordre factuel à laquelle le Tribunal est parvenu au point 176 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, en ne mentionnant pas ledit contrat en réponse aux lettres de la Commission, Isotis avait fait une fausse déclaration aux contrôleurs de la Commission, en violation des clauses pertinentes des contrats en cause. Une telle critique échappe au contrôle de la Cour au stade du pourvoi et ne saurait, partant, être accueillie.

104    Il y a donc lieu de rejeter le neuvième moyen comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

105    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

 Sur les dépens

106    En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

107    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

108    La Commission ayant conclu à la condamnation d’Isotis et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Koinonia Tis Pliroforias Anoichti Stis Eidikes Anagkes – Isotis est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure : le grec.

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