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Document 62013FO0060

UZNESENIE SÚDU PRE VEREJNÚ SLUŽBU EURÓPSKEJ ÚNIE (druhá komora) zo 14. januára 2014.
Giorgio Lebedef proti Európskej komisii.
Verejná služba – Úradníci – Zápis neprítomnosti z dôvodu choroby – Neospravedlnená neprítomnosť – Skrátenie riadnej dovolenky menovacím orgánom – Podanie návrhu elektronickou poštou – Vedomosť dotknutej osoby o existencii rozhodnutia – Neotvorenie pošty a neoboznámenie sa s obsahom rozhodnutia kliknutím na hypertextový odkaz – Prípustnosť – Lehoty – Určenie okamihu, od ktorého sa môže dotknutá osoba oboznámiť s obsahom rozhodnutia.
Vec F‑60/13.

Court reports – Reports of Staff Cases

ECLI identifier: ECLI:EU:F:2014:6

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

14 janvier 2014 ( *1 )

«Fonction publique — Fonctionnaires — Enregistrement des absences pour cause de maladie — Absence irrégulière — Déduction opérée par l’AIPN sur le congé annuel — Introduction d’une demande par courriel — Connaissance par l’intéressé de l’existence d’une décision — Omission d’ouvrir un courriel et de s’enquérir, en cliquant sur un hyperlien, du contenu de cette décision — Recevabilité — Délais — Détermination de la date à partir de laquelle l’intéressé pouvait prendre connaissance du contenu de la décision»

Dans l’affaire F‑60/13,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Giorgio Lebedef, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Senningerberg (Luxembourg), représenté par Me F. Frabetti, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme C. Berardis-Kayser et M. G. Berscheid, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

(deuxième chambre),

composé de Mme M. I. Rofes i Pujol, président, M. K. Bradley et M. J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1

Par sa requête parvenue au greffe du Tribunal le 24 juin 2013, M. Lebedef demande l’annulation d’une décision, prétendument implicite, de rejet de sa demande, introduite le 13 avril 2012, tendant à ce que la Commission européenne corrige les enregistrements de certaines de ses absences dans le logiciel de gestion, interne à cette institution, des congés de son personnel (ci-après «SysPer 2»), ainsi que l’annulation de la décision explicite du 24 juillet 2012 statuant sur cette même demande (ci-après la «décision du 24 juillet 2012»), en ce qu’elle porte retrait de cinq jours des droits à congé annuel du requérant.

Cadre juridique

Dispositions statutaires

2

L’article 59 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le «statut») se lit comme suit :

«1.   Le fonctionnaire qui justifie être empêché d’exercer ses fonctions par suite de maladie ou d’accident bénéficie de plein droit d’un congé de maladie.

L’intéressé doit aviser, dans les délais les plus brefs, son institution de son indisponibilité en précisant le lieu où il se trouve. Il est tenu de produire, à partir du quatrième jour de son absence, un certificat médical. Ce certificat doit être envoyé au plus tard le cinquième jour de l’absence, le cachet de la poste faisant foi. À défaut, et sauf si le certificat n’est pas envoyé pour des raisons indépendantes de la volonté du fonctionnaire, l’absence est considérée comme injustifiée.

[…]

2.   Lorsque les absences pour maladie sans certificat médical non supérieures à trois jours dépassent, sur une période de douze mois, un total de douze jours, le fonctionnaire est tenu de produire un certificat médical pour toute nouvelle absence pour cause de maladie. L’absence est considérée comme injustifiée à compter du treizième jour d’absence pour maladie sans certificat médical.

3.   Sans préjudice de l’application des dispositions relatives aux procédures disciplinaires, le cas échéant, toute absence considérée comme injustifiée au titre des paragraphes 1 et 2 est imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé. […]»

3

L’article 60 du statut dispose :

«Sauf en cas de maladie ou d’accident, le fonctionnaire ne peut s’absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique. Sans préjudice de l’application éventuelle des dispositions prévues en matière disciplinaire, toute absence irrégulière dûment constatée est imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé. […]»

Dispositions internes de la Commission

4

Sous la rubrique «A[bsence inférieure ou égale à trois jours]», le chapitre II, sous a), de la décision de la Commission du 28 avril 2004 portant création des dispositions d’application en matière d’absence pour maladie ou accident, publiée aux Informations administratives no 92‑2004, du 6 juillet 2004, pose un principe de base selon lequel «[u]n certificat médical n’est pas exigé pour une absence pour maladie inférieure ou égale à trois […] jours [‘]calendrier[’]», tout en précisant en substance que, lorsque les absences de ce type dépassent un total de douze jours sur la période des douze mois qui précède, le fonctionnaire est tenu de produire un certificat pour toute absence pour cause de maladie, quelle que soit sa durée, tant que le total, sur les douze derniers mois, reste supérieur à douze jours. À défaut, «[l]’absence est automatiquement considérée comme injustifiée à compter du treizième jour d’absence pour maladie sans certificat».

5

Il est également indiqué dans le chapitre II, sous a), qu’«[u]ne absence pour maladie sans certificat ne peut pas suivre une absence pour maladie avec certificat» et, qu’à l’inverse, «[u]ne absence pour maladie sans certificat ne peut précéder ni suivre directement un congé annuel ou spécial, lorsque la totalité de l’absence, congés inclus, est supérieure à [trois] jours ‘calendrier’ ». Dans ce dernier cas, l’absence est considérée comme irrégulière.

Faits à l’origine du litige

6

Au cours du mois d’avril 2012, le requérant, qui aurait été victime d’un «léger malaise», a, lors de sa démarche tendant à déclarer à son administration, Eurostat (ci-après également «ESTAT»), une absence pour maladie sans certificat, découvert que plusieurs absences sans certificat médical avaient été indûment reportées dans SysPer 2 pour l’année 2012. En poursuivant ses investigations dans son compte personnel sur SysPer 2, il a découvert que deux absences de deux journées consécutives avaient été enregistrées, en tant qu’absences sans certificat médical, alors même que ces quatre jours correspondaient à deux samedis et à deux dimanches.

7

Consultant l’ensemble de l’historique de ses absences pour les années 2009 à 2012, le requérant est arrivé à la conclusion qu’entre 52 et 70 jours avaient été erronément comptabilisés par son administration en tant qu’absences sans certificat médical, et ce en raison d’une prise en compte d’absences étant survenues des samedis, dimanches et jours fériés.

8

Par un courriel, intitulé «Demande art. 90[, paragraphe]1» et envoyé, le 13 avril 2012 à 17 h 46, depuis son adresse électronique professionnelle à l’adresse électronique fonctionnelle «ESTAT LEAVE OFFICE», le requérant a invité le service des congés («Leave Office») à «corriger les enregistrements de [s]es absences dans SysPer 2 en n’incluant plus dans ces absences les weekends et jours fériés, et cela depuis le 15 avril 2009 jusqu’à aujourd’hui».

9

Le corps du courriel, reproduisant la demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, telle que contenue dans une pièce jointe, révèle que le requérant avait préalablement demandé et obtenu des précisions de la part d’une personne en charge des questions liées aux congés annuels. Le requérant a terminé ce message électronique en priant l’administration de considérer celui-ci comme une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, et de la faire suivre par la voie hiérarchique à l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’«AIPN»).

10

L’AIPN a accepté de traiter cette demande introduite électroniquement. Ainsi, le 24 juillet 2012, elle a, au moyen d’un courriel intitulé «ARES – You received a link to document […]» et depuis la même adresse fonctionnelle «ESTAT LEAVE OFFICE», transmis au requérant, à son adresse électronique professionnelle, adresse qu’il avait utilisée pour introduire sa demande, une information sur la disponibilité de la décision du 24 juillet 2012. Pour pouvoir accéder directement au contenu de cette décision, le requérant devait cliquer sur l’hyperlien contenu dans ce courriel.

11

Il ressort de la requête que le requérant s’est absenté pour des raisons de maladie sur des périodes, reportées de manière distincte par lui, ayant été ou non couvertes par des certificats médicaux. Cependant, une lecture globale de ces absences fait apparaître que, en définitive, celui-ci a été absent pour des raisons médicales sur toute la période comprise entre le 10 septembre et le 18 novembre 2012. Il a par ailleurs également été absent pour des raisons de maladie du 16 juillet au 21 juillet 2012. En revanche, il ressort du mémoire en défense de la Commission que, du 23 juillet 2012 au 7 septembre 2012, le requérant a été en congé annuel.

12

Le 13 novembre 2012, date à laquelle le requérant était supposé être en congé de maladie, un courriel, intitulé «Réclamation de M. Giorgio Lebedef», a été envoyé depuis l’adresse électronique fonctionnelle «REP PERS OSP A&D LUXEMBOURG» à l’adresse fonctionnelle «HR MAIL D 2». Le corps de ce courriel se limitait au texte suivant : «Veuillez trouver en annexe la réclamation de M. Giorgio Lebedef / Avec nos meilleures salutations». Il était signé au moyen du logo «A&D Luxembourg, Syndicat autonome de la Fonction publique européenne» (ci-après le «syndicat»), accompagné du numéro de bureau et des coordonnées téléphoniques de ce syndicat. La réclamation jointe en annexe (ci-après la «première réclamation») était datée et signée au 13 novembre 2012, mais la partie III de celle-ci indiquait toutefois que «[la] présente réclamation [était] introduite le 20 octobre 2012».

13

Par courriel du 14 novembre 2012, envoyé depuis l’adresse fonctionnelle «HR MAIL D 2» à l’adresse fonctionnelle «REP PERS OSP A&D LUXEMBOURG», l’unité «HR. D 2. ‘recours et suivi des cas’ » de la direction des affaires juridiques de la direction générale (DG) des ressources humaines (ci-après l’«unité ‘Recours’ ») a répondu que, «[c]oncernant la réclamation que [le syndicat avait] introduite au nom de M. Lebedef le 13 novembre 2012 contre le ‘rejet implicite’ de sa demande selon l’article 90[, paragraphe] 1, du statut (D/299/12), [cette organisation devait] noter que, contrairement à ce qui est allégué, une réponse explicite […] a été envoyée [à M. Lebedef] par l’ESTAT le 24 juillet 2012, référence ARES(2012)902327. Il lui est donc loisible d’introduire une réclamation contre [cette] décision [explicite] de l’ESTAT, tout en tenant compte des éléments de réponse y compris».

14

N’ayant pas reçu, sur son adresse électronique professionnelle, un message d’enregistrement de sa première réclamation de la part de l’unité «Recours», le requérant a, le 24 janvier 2013, adressé un courriel au chef de l’unité «Recours» demandant des explications à ce sujet. Par courriel du 25 janvier 2013, le chef de cette unité a répondu, en reprenant la correspondance des 13 et 14 novembre 2012, qu’une réponse avait été envoyée au syndicat, expéditeur du message qui avait été adressé à l’unité «Recours» et dans lequel figurait en pièce jointe la première réclamation.

15

Le requérant a alors envoyé au chef de l’unité «Recours», le 12 février 2013, un courriel en réponse dans lequel il soulignait que sa première réclamation devait absolument être enregistrée par son service, étant donné que, en l’espèce, une décision implicite de rejet de sa demande du 13 avril 2012 était intervenue le 13 août 2012, que le délai pour introduire une réclamation expirait dès lors le 13 novembre suivant et que, par conséquent, sa réclamation avait été introduite endéans les délais statutaires.

16

Le même 12 février 2013, le chef de l’unité «Recours» a adressé un courriel au requérant lui indiquant que, dans son cas, aucune décision implicite de rejet de sa demande du 13 avril 2012 n’était intervenue, mais qu’au contraire une décision explicite de rejet, à savoir la décision du 24 juillet 2012, lui avait été transmise le 24 juillet 2012 et que, à cet égard, même à supposer que le courriel du 13 novembre 2012, envoyé par le syndicat et non par le requérant lui-même, doive être considéré comme une réclamation, quod non, une telle prétendue réclamation devait être considérée comme introduite hors délai. Le requérant a été informé, dans ce contexte, qu’il ne serait pas procédé au traitement de sa première réclamation.

17

Le 13 février 2013, le requérant a introduit par courriel une seconde réclamation (ci-après la «seconde réclamation»), datée du 12 février 2013, tendant à contester de façon autonome la décision du 24 juillet 2012 en ce qui concerne uniquement le retrait de cinq jours de ses droits à congé annuel auquel il avait été procédé par cette décision.

18

Considérant que la Commission avait refusé d’enregistrer et, par conséquent, de prendre en compte la première réclamation, le requérant en a déduit qu’une décision implicite de rejet de cette réclamation était intervenue le 13 mars 2013 de sorte qu’il disposait d’un délai expirant le 24 juin 2013 pour introduire le présent recours.

Conclusions des parties

19

Le requérant conclut en substance à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision implicite de rejet de la demande du 13 avril 2012 en ce qui concerne la correction des enregistrements de ses absences de maladie dans SysPer 2, en prenant en compte seulement les jours ouvrables, et cela depuis le 13 avril 2009 jusqu’à la date de sa demande ;

annuler la décision explicite de rejet de la demande du 13 avril 2012, en ce qui concerne les cinq jours retirés de ses droits de congés pour l’année 2012 ;

condamner la Commission aux dépens.

20

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner le requérant aux dépens.

En droit

Sur la décision du Tribunal de statuer par voie d’ordonnance motivée

21

En vertu de l’article 76 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

22

En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour se prononcer et décide ainsi qu’il y a lieu de faire usage de cette disposition de son règlement de procédure.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

23

Dans sa requête et eu égard au refus de la Commission de statuer sur les première et seconde réclamations en raison de leur tardiveté, le requérant aborde la question de la recevabilité de son recours et tente de justifier les raisons pour lesquelles il n’a pas pris connaissance en temps utile de la décision du 24 juillet 2012 lui ayant été adressée par courriel du même jour.

24

Le requérant explique ainsi que c’est au hasard de l’introduction, le 30 novembre 2012, de demandes de congés annuels afin d’épuiser un reliquat de douze jours de congé qu’il n’avait pas pu utiliser, compte tenu notamment de ses longues absences pour maladie et de congés spéciaux, absences sur lesquelles le requérant fournit d’ailleurs des explications dans sa requête, qu’il aurait découvert, sous la rubrique «Droits annuels/Résumé» de son compte dans SysPer 2, que l’AIPN avait déduit cinq jours de ses droits à congé annuel.

25

Il aurait alors consulté une rubrique intitulée «Évolution du quota» qui lui était prétendument inconnue, rubrique dans laquelle figurait une mention de déduction de cinq jours de ses droits à congé annuel en raison de cinq absences non autorisées. Il était indiqué en marge de cette mention que cette déduction «[f]aisait suite à la décision, au sens de l’article 90 du statut, du 24 juillet 2012» («Following reply to Art. 90 on 24.07.2012»).

26

Puisqu’il était convaincu de n’avoir reçu aucune décision portant cette date, le requérant aurait alors décidé de contrôler la boîte de messagerie électronique fournie par son administration, Eurostat, en l’occurrence la partie de celle-ci liée à son adresse professionnelle et non l’autre partie liée à l’adresse fonctionnelle du syndicat. Ce faisant, il aurait retrouvé la trace de plusieurs messages qu’il n’avait pas effacés et qui lui avaient été adressés entre les 20 et 27 juillet 2012, période pendant laquelle, selon ses dires, il était en congé annuel.

27

Ainsi, le requérant aurait remarqué un courriel émanant de l’adresse électronique fonctionnelle «ESTAT LEAVE OFFICE» et intitulé «ARES – You received a link to document Ares(2012)90[…]». Ce message était intercalé entre deux messages émanant d’un autre service de la Commission et auxquels il avait en revanche répondu durant sa période de congé du 20 au 27 juillet 2012. Compte tenu du libellé, selon lui, peu évocateur de l’objet de ce message, du nom générique de l’expéditeur, mais également parce qu’il avait consulté les courriels lui ayant été envoyés pendant ses congés avec l’aide de son fils, lequel lui aurait fait lecture de ses courriels et l’aurait aidé dans la rédaction de certaines réponses, le requérant invoque son erreur et, accessoirement, celle de son fils, en ce qu’il n’a pas mesuré, en temps opportun, l’«importance certaine» de ce courriel, «car [celui-ci] communiquait la réponse explicite de la Commission du 24 juillet à [la demande du 13 avril 2012]».

28

Le requérant fait toutefois valoir que, pendant son congé annuel et compte tenu de l’état de santé dans lequel il se trouvait, il n’était pas censé se faire lire par son fils tous les courriels envoyés par les services de la Commission, en particulier ceux qui ne lui apparaissaient pas comme étant importants. En tout état de cause, dans la mesure où c’est la Commission qui se prévaut de la tardiveté de la présentation de la première réclamation du requérant, il incomberait à celle-ci d’apporter la preuve de la date à laquelle il a pris connaissance de la décision du 24 juillet 2012. Or, cette institution ne pourrait que constater, si elle vérifiait l’accusé de lecture généré électroniquement, que sa décision du 24 juillet 2012 n’a pas été lue par le requérant avant le 30 novembre 2012.

29

Il en irait de même de la date à laquelle le requérant s’est connecté sur le serveur Ares pour consulter le document électronique mis à sa disposition au moyen de l’hyperlien figurant dans le courriel du 24 juillet 2012. À cet égard, le requérant reproche au service des congés une certaine négligence puisque, contrairement au service «ESTAT A 2 EVAL PROMO» qui lui avait adressé un rappel au sujet d’un rapport de notation qu’il n’avait pas retourné audit service, le service des congés n’a pas cherché à vérifier si le requérant avait ouvert le courriel et lu la décision du 24 juillet 2012, ce qui irait à l’encontre de l’obligation qui incombait à l’AIPN de s’assurer que le requérant, en tant que destinataire, avait bien eu notification de cette décision.

30

Par ailleurs, le requérant fait valoir qu’il n’a pas non plus pris connaissance du courriel adressé à son syndicat le 14 novembre 2012 dans la mesure où, n’étant plus détaché depuis le 1er décembre 2012, il ne se rendait que très rarement au bureau du syndicat. Il reconnaît toutefois que, «[l]e 14 novembre, le délai pour déposer la réclamation pour l’annulation du rejet de sa demande, était déjà dépassé».

31

Ainsi, ce serait dans une ignorance de bonne foi du contenu de la décision du 24 juillet 2012 qu’il aurait introduit «une réclamation signée électroniquement par lui-même, envoyée par le bureau du syndicat […] et délivrée le jour même» à l’AIPN, et ce à l’encontre de ce qu’il pensait être alors une décision implicite de rejet intervenue le 13 août 2012.

32

Le requérant soutient que le Tribunal devrait reporter la date de sa prise de connaissance de la décision du 24 juillet 2012 au 19 novembre 2012, date de sa reprise du travail, voire au 30 novembre 2012, si le Tribunal admettait qu’un fonctionnaire diligent a tout de même besoin de plusieurs jours pour traiter l’ensemble des courriels qui se sont accumulés au cours d’une très longue période d’absence. Partant, le requérant conclut que sa seconde réclamation serait recevable, car elle a été introduite endéans le délai de trois mois prévu à l’article 90, paragraphe 2, premier alinéa, du statut.

33

En outre, sa première réclamation n’ayant fait l’objet d’aucune réponse explicite, il conviendrait de considérer qu’une décision implicite de rejet de cette réclamation est intervenue le 13 mars 2013, permettant l’introduction du présent recours jusqu’au 24 juin 2013.

34

Dans son mémoire en défense, la Commission excipe de l’irrecevabilité du recours dans la mesure où, en l’espèce, le requérant n’aurait pas présenté une réclamation contre la décision du 24 juillet 2012 dans le délai statutaire prévu à l’article 90, paragraphe 2, premier tiret, du statut.

35

La seconde réclamation serait en toute hypothèse hors délai. La première le serait également puisque, ainsi que cela résulterait du point 48 de l’ordonnance du Tribunal du 16 décembre 2010, AG/Parlement (F‑25/10), une absence seulement motivée par des vacances ne peut pas être considérée comme un motif légitime faisant obstacle à la présomption de notification.

Appréciation du Tribunal

36

Selon une jurisprudence constante, les délais de réclamation et de recours, visés aux articles 90 et 91 du statut, sont d’ordre public et ne sauraient être laissés ni à la disposition des parties ni à celle du juge auquel il appartient de vérifier, même d’office, s’ils sont respectés. Ces délais répondent à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou traitement arbitraire dans l’administration de la justice (voir, notamment, arrêt de la Cour du 7 juillet 1971, Müllers/CES, 79/70, point 18 ; ordonnance du Tribunal du 15 mai 2006, Schmit/Commission, F‑3/05, point 24).

37

À cet égard, la recevabilité d’un recours introduit devant le Tribunal, au titre de l’article 270 TFUE et de l’article 91 du statut, est subordonnée au déroulement régulier de la procédure précontentieuse et au respect des délais qu’elle prévoit (arrêts du Tribunal de première instance du 6 juillet 2004, Huygens/Commission, T‑281/01, point 125 et du 9 janvier 2007, Van Neyghem/Comité des régions, T‑288/04, point 53).

38

Ainsi, en l’espèce, en application de l’article 90, paragraphe 1, et de l’article 91, paragraphe 2, du statut, le recours n’est recevable que si l’AIPN a effectivement été préalablement saisie d’une réclamation dans le délai de trois mois courant du jour de la notification de la décision du 24 juillet 2012 et, en tout cas, au plus tard du jour où l’intéressé en a eu connaissance.

39

Le calcul du délai pour introduire une réclamation se fait à compter du jour de la notification de la décision de l’AIPN statuant sur la demande. À cet égard, pour qu’une décision soit «dûment notifiée» au sens desdites dispositions du statut, il faut non seulement qu’elle ait été communiquée à son destinataire mais aussi que celui-ci ait été mis en mesure de prendre utilement connaissance de son contenu (arrêt de la Cour du 15 juin 1976, Jänsch/Commission, 5/76, point 10 ; arrêt du Tribunal du 25 avril 2007, Lebedef-Caponi/Commission, F‑71/06, points 29 à 31).

40

Il a par ailleurs été jugé, à propos du délai de réclamation visé à l’article 90, paragraphe 2, du statut, que la «connaissance» d’un acte à laquelle fait référence cette disposition est la connaissance résultant de la notification ou de la publication d’un tel acte (arrêt du Tribunal de première instance du 18 mars 1997, Rasmussen/Commission, T‑35/96, point 40 ; ordonnance AG/Parlement, précitée, point 37).

41

En outre, il appartient à la partie qui se prévaut d’un dépassement du délai d’apporter la preuve de la date à laquelle ledit délai a commencé à courir (arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Belfiore/Commission, 108/79, point 7 ; arrêt du Tribunal du 7 octobre 2009, Pappas/Commission, F‑101/08, point 43 ; ordonnance AG/Parlement, précitée, point 34).

– Sur la date de notification ou, le cas échéant, de la prise de connaissance de la décision du 24 juillet 2012

42

À titre liminaire, il convient de rappeler que, grâce aux garanties particulières qu’elle présente tant pour le fonctionnaire que pour l’administration, la notification par lettre recommandée avec avis de réception postal constitue une modalité sûre en matière de notification. Cependant, cette modalité n’est pas la seule possible en matière de notification de décisions administratives (voir, en ce sens, ordonnance AG/Parlement, précitée, points 38 et 39).

43

Ainsi, en particulier dans une situation où l’intéressé est en activité au sens de l’article 35, sous a), du statut, il convient de considérer que, en principe, lorsque l’administration accepte l’introduction d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, par la voie électronique, en l’occurrence à partir de l’adresse électronique professionnelle mise à sa disposition par l’administration, il est légitime, compte tenu du choix de ce mode de communication opéré par l’intéressé lui-même, que cette administration puisse, en application du principe du parallélisme des formes, notifier sa réponse à l’intéressé également au moyen d’un courriel envoyé depuis l’adresse électronique de l’AIPN, destinataire de la demande de l’intéressé, à l’adresse électronique professionnelle du fonctionnaire.

44

La preuve que le destinataire d’une décision l’a non seulement reçue, mais a également pu en prendre utilement connaissance, peut résulter de différentes circonstances. À cet égard, une institution ne saurait présumer qu’une communication interne par la voie électronique, en l’occurrence un courriel annonçant l’existence et la disponibilité «on-line» d’une décision de l’AIPN, parvient à son destinataire dès lors qu’il est physiquement présent sur son lieu de travail. En effet, une telle circonstance ne permet pas à elle seule d’en déduire, avec une certitude suffisante, que l’intéressé a effectivement pu prendre connaissance d’une décision à son retour ou lors d’un passage dans son service. En revanche, une telle présomption peut être retenue lorsque l’institution concernée s’appuie, non pas sur de simples indices, mais sur des éléments, y compris ceux fournis par l’intéressé, indiquant que, en tant que destinataire, il a reçu à son adresse électronique professionnelle un courriel et qu’il a, selon toute vraisemblance, pu l’ouvrir et prendre ainsi dûment connaissance, au moyen d’un hyperlien, de la décision dont l’existence était ainsi communiquée par courriel (voir, en ce sens, arrêts Lebedef-Caponi/Commission, précité, point 34, et Pappas/Commission, précité, point 43).

45

En l’espèce, le requérant a lui-même admis que, pendant sa période de congé comprise à tout le moins entre le 23 et le 27 juillet 2012, il s’est rendu sur son lieu de travail et a été en mesure de consulter sa boîte de messagerie professionnelle. À cet égard, le requérant a fourni au Tribunal une capture d’écran de sa boîte de messagerie qui révèle que, à l’époque, d’une part, il pouvait visualiser tant sa messagerie liée à son adresse électronique professionnelle que celle fonctionnelle du syndicat, et, d’autre part, il avait effectivement reçu le courriel du 24 juillet 2012.

46

Ainsi qu’il le reconnaît lui-même, le requérant a toutefois opéré un tri dans la lecture de ses messages électroniques en fonction de ceux qu’il considérait importants et, partant, dont il estimait opportun de prendre connaissance. Ainsi, selon ses dires, il a pris connaissance et répondu, avec l’aide de son fils, à deux autres courriels affichant comme expéditeur une autre adresse fonctionnelle de la Commission, en l’occurrence «ESTAT A 2 EVAL PROMO». En revanche, c’est de son propre chef qu’il ne s’est pas enquis du contenu du message envoyé par le service des congés ni du document, à savoir la décision du 24 juillet 2012, dont l’accès, dans ces circonstances, lui était aisément accessible en cliquant sur un hyperlien.

47

Étant donné que le requérant reconnaît lui-même avoir fait un tel choix, la circonstance que le service des congés ne lui a pas demandé d’accuser lecture du courriel du 24 juillet 2012 est sans incidence sur la date à laquelle il peut être considéré que le requérant avait eu la possibilité de prendre utilement connaissance de la décision du 24 juillet 2012.

48

Eu égard à ces considérations, il convient de retenir en l’espèce que, à la suite de la communication par l’AIPN du courriel du 24 juillet 2012, que le requérant aurait dû ouvrir et traiter au même titre que les courriels des 20 et 23 juillet 2012 émanant de «ESTAT A 2 EVAL PROMO», l’existence de la décision du 24 juillet 2012 a été portée à sa connaissance, et, par conséquent, il a eu l’occasion de prendre dûment connaissance de la décision de rejet de sa demande à cette date ou, à tout le moins, au plus tard le 27 juillet 2012, mais il a omis de le faire.

49

Ainsi, le délai pour introduire une réclamation contre la décision du 24 juillet 2012 était, en tout état de cause, expiré à la date du 27 octobre 2012. Partant, la première réclamation transmise par le syndicat le 13 novembre 2012, pour autant qu’une telle transmission soit admissible, était hors délai.

– Sur les éléments tendant à justifier la tardiveté de la seconde réclamation

50

Il y a lieu d’ajouter que, à supposer même que, en utilisant l’adresse fonctionnelle du syndicat, dont les messages apparaissent d’ailleurs dans la même boîte de messagerie électronique que celle où figurent ceux adressés à l’adresse électronique professionnelle du requérant, ce dernier ait pu introduire régulièrement une réclamation, force est de constater qu’il aurait dû, à nouveau, s’attendre à une réponse de l’AIPN sur cette même adresse de messagerie. L’argumentation du requérant selon laquelle il n’aurait pas non plus pris connaissance du courriel en réponse du 14 novembre 2012 doit ainsi être purement et simplement rejetée puisque, ainsi que la capture d’écran qu’il a fournie au Tribunal l’indique, le requérant peut consulter simultanément les deux adresses électroniques, son adresse professionnelle et celle du syndicat, adresses que son administration met à sa disposition.

51

Par conséquent, le courriel purement informatif du 14 novembre 2012 sur l’existence de la décision du 24 juillet 2012, dont le requérant a omis de s’enquérir, ne saurait non plus avoir eu pour effet de faire naître, à son profit, un nouveau délai pour introduire une réclamation contre cette décision (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 décembre 1980, Grasselli/Commission, 23/80, point 18, et ordonnance de la Cour du 21 novembre 1990, Infortec/Commission, C‑12/90, point 10 ; arrêt Van Neyghem/Comité des régions, précité, point 52). Par ailleurs, l’indication figurant dans ce courriel, selon laquelle il était loisible au requérant d’introduire une réclamation, était assortie de la précision «tout en tenant en compte des éléments de réponse y compris». Or, la décision du 24 juillet 2012 précisait justement que toute réclamation devait être introduite dans un délai de trois mois à partir de la notification.

52

Quant à l’article 91, paragraphe 3, second tiret, du statut, ainsi que l’a relevé la Commission, cette disposition concerne les délais de recours devant le Tribunal et, en tout état de cause, ne saurait être invoquée en l’espèce au soutien d’une fiction juridique selon laquelle une décision explicite peut, postérieurement à l’intervention d’une prétendue décision implicite, venir à nouveau ouvrir un délai pour introduire une réclamation au moment où le réclamant daigne finalement prendre connaissance de cette réponse explicite de l’administration (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 10 mai 2011, Barthel e.a./Cour de justice, F‑59/10, point 27).

53

Il résulte de ce qui précède que la prétendue réclamation du 13 novembre 2012 communiquée par le syndicat a, de toute manière, été introduite hors délai, de même d’ailleurs que la seconde réclamation, de sorte que le présent recours est irrecevable déjà pour cette raison. De même, étant donné qu’aucune décision implicite n’est intervenue en date du 13 août 2012, la première réclamation était de toute façon présentée en lien avec une décision inexistante.

54

Par ailleurs et à titre surabondant, le Tribunal considère que, ainsi que l’a fait valoir la Commission, il peut en outre être considéré que, en informant le requérant, par son courriel du 12 février 2013, qu’elle ne procéderait pas au traitement de la première réclamation, l’AIPN a adopté une décision explicite de rejet de celle-ci à cette date, de sorte que le présent recours, introduit le 24 juin 2013, à savoir au-delà du délai prévu à l’article 91, paragraphe 3, du statut, augmenté du délai forfaitaire de 10 jours, soit le 22 mai 2013, est irrecevable également pour tardiveté.

55

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

Sur les dépens

56

Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

57

La Commission ayant conclu à la condamnation du requérant aux dépens et celui-ci ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que ce dernier doit supporter ses propres dépens et être condamné à supporter ceux exposés par la Commission.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

(deuxième chambre)

ordonne :

 

1)

Le recours est rejeté comme étant manifestement irrecevable.

 

2)

M. Lebedef supporte ses propres dépens et est condamné aux dépens de la Commission européenne.

 

Fait à Luxembourg, le 14 janvier 2014.

 

Le greffier

W. Hakenberg

Le président

M. I. Rofes i Pujol


( *1 ) Langue de procédure : le français.

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