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Dokument 62015TJ0497

Sentenza tal-Qorti Ġenerali (Is-Sitt Awla) tat-13 ta’ Diċembru 2017.
Oltis Group a.s. vs Il-Kummissjoni Ewropea.
Riċerka u Żvilupp – Programm qafas għar-riċerka u għall-innovazzjoni 2014-2020 (Horizon 2020) – Stimulazzjoni u koordinazzjoni ta’ investimenti tal-Unjoni fir-riċerka u l-innovazzjoni fis-settur ferrovjarju – Il-ħolqien tal-impriża konġunta Shift2Rail – Status ta’ soċju tal-impriża konġunta Shift2Rail – Sejħa għal espressjonijiet ta’ interess – Ċaħda tal-applikazzjoni – Obbligu ta’ motivazzjoni - Żball manifest ta’ evalwazzjoni – Użu ħażin ta’ poter.
Kawża T-497/15.

IdentifikaturECLI: ECLI:EU:T:2017:895

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

13 décembre 2017 (*)

« Recherche et développement – Programme-cadre pour la recherche et l’innovation 2014-2020 (Horizon 2020) – Stimulation et coordination des investissements de l’Union en faveur de la recherche et de l’innovation dans le secteur ferroviaire – Création de l’entreprise commune Shift2Rail – Statut de membre associé de l’entreprise commune Shift2Rail – Appel à manifestation d’intérêt – Rejet de la candidature – Obligation de motivation – Erreur manifeste d’appréciation – Détournement de pouvoir »

Dans l’affaire T‑497/15,

Oltis Group a.s., établie à Olomouc (République tchèque), représentée par Me P. Konečný, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes J. Hottiaux et Z. Malůšková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours fondé sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision Ares(2015) 2691017 de la Commission, du 26 juin 2015, relative à la demande de réexamen du rejet de la demande de la requérante de devenir membre associé de l’entreprise commune Shift2Rail,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, D. Spielmann (rapporteur) et Z. Csehi, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        L’entreprise commune Shift2Rail (ci-après dénommée l’« entreprise commune S 2R ») a été établie par le règlement (UE) n° 642/2014 du Conseil, du 16 juin 2014, portant création de l’entreprise commune S 2R (JO 2014, L 177, p. 9).

2        Il ressort des considérants 3 à 7 du règlement n° 642/2014 que l’entreprise commune S 2R a été établie conformément au règlement (UE) n° 1291/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, portant établissement du programme-cadre pour la recherche et l’innovation « Horizon 2020 » (2014-2020) et abrogeant la décision n° 1982/2006/CE (JO 2013, L 347, p. 104). L’objectif de l’entreprise commune S 2R était de créer un partenariat public-privé visant à stimuler et à mieux coordonner les investissements de l’Union européenne en faveur de la recherche et de l’innovation dans le secteur ferroviaire en vue d’accélérer et de faciliter la transition vers un marché ferroviaire de l’Union plus adapté aux besoins des entreprises du secteur ferroviaire et conforme à l’objectif général de la réalisation d’un espace ferroviaire unique européen.

3        L’article 4, paragraphes 1, 2 et 5, de l’annexe I du règlement n° 642/2014 prévoit ce qui suit :

« 1. Pour autant qu’il accepte les présents statuts et s’engage à contribuer au financement visé au paragraphe 6 en vue d’atteindre les objectifs énoncés à l’article 2 du présent règlement, toute entité juridique, tout groupement ou tout consortium d’entités juridiques établi dans un État membre ou dans un pays associé à “Horizon 2020” peut demander à devenir membre associé de l’entreprise commune S 2R.

2.       Les membres associés de l’entreprise commune S 2R sont sélectionnés au moyen d’un appel ouvert, non discriminatoire et concurrentiel, lancé par la Commission [européenne], et sous réserve d’une évaluation transparente par le comité directeur. Cette évaluation tient compte, entre autres, de la pertinence et de la valeur ajoutée potentielle du candidat en ce qui concerne la réalisation des objectifs de l’entreprise commune S 2R, de la solidité financière du candidat, et de tout conflit d’intérêts au regard des objectifs de l’initiative S 2R.

[…]

5.       La contribution propre minimale requise pour devenir membre associé équivaut à 2,5 % du budget total du programme d’innovation auquel il participe. Par ailleurs, les entreprises ferroviaires constituées sous forme d’entité juridique distincte peuvent devenir membre associé avec une contribution propre minimale de 12 000 000 [euros] sur l’ensemble des programmes d’innovation. En outre, les consortiums composés d’entreprises ferroviaires et/ou de gestionnaires d’infrastructures peuvent devenir membre associé avec une contribution propre minimale de 15 000 000 [euros] sur l’ensemble des programmes d’innovation. »

4        Le 6 octobre 2014, la Commission européenne a publié un appel à manifestation d’intérêt aux fins de devenir membre associé de l’entreprise commune S 2R (réf. S 2R JU/AM/01/2014) (ci-après l’« appel S 2R »).

5        L’appel S 2R prévoyait que les membres associés devaient démontrer un engagement stratégique à long terme à la mise en œuvre du plan directeur de l’entreprise commune S 2R. Au point 6 de l’appel S 2R, il était indiqué que la procédure de sélection des membres associés se composerait de deux étapes. La première viserait à « identifier des candidats membres associés à la suite d’une évaluation initiale sur la base des critères d’éligibilité, d’exclusion et de sélection décrits [au point] 7 [de l’appel S 2R] ». La seconde étape de la procédure consisterait, en substance, en la sélection finale des membres associés à la suite de l’examen des propositions techniques détaillées.

6        Au point 7 de l’appel S 2R étaient établis les critères d’évaluation des candidatures. Il était prévu que « les entités pouvaient soumettre une candidature par programme d’innovation ou une candidature pour plusieurs programmes d’innovation ». Par ailleurs, il y était indiqué que les entités souhaitant devenir, « sous des formes différentes » (using different formations to apply), des membres dans plus d’un programme d’innovation devaient soumettre une demande pour chaque programme d’innovation. Au point 7.2 étaient établies les contributions minimales des membres associés pour chacun des cinq programmes d’innovation prévus. En outre, la somme minimale de 18,5 millions d’euros était fixée pour la participation à l’ensemble des programmes susvisés. Enfin, le point 7.4 établissait les critères de sélection à l’aune desquels les candidatures devaient être examinées. Ces critères avaient trait aux capacités financière et économique ainsi qu’opérationnelle des candidats. Au point 7.4.1 de l’appel S 2R, il était prévu que, afin de passer à la seconde étape de la procédure de sélection, chaque candidat devait remplir cumulativement deux conditions. D’une part, il devait se voir attribuer une note minimale de 3 sur 5 pour chaque sous-critère d’évaluation relatif à ses capacités financière, économique et opérationnelle. D’autre part, il devait obtenir une note générale de plus de 8 sur 10 au titre de la capacité économique et financière ainsi qu’une note générale de plus de 20 sur 25 concernant la capacité opérationnelle.

7        Le 7 novembre 2014, la requérante, Oltis Group a.s., a, dans le cadre de cet appel, déposé deux candidatures pour devenir membre associé de l’entreprise commune S 2R. La première candidature concernait le programme d’innovation « PI 4 – IT Solutions for attractive Railway Services » (solutions informatiques pour des services ferroviaires attrayants) (ci-après le « programme PI 4 ») et la seconde concernait le programme d’innovation « PI 5 – Technologies for Sustainable and Attractive European Freight » (technologies pour un fret européen durable et attrayant) (ci-après le « programme PI 5 »).

8        Le 7 avril 2015, la direction générale de la mobilité et des transports de la Commission a adressé une lettre [réf. Ares(2015) 1483995] à la requérante, par laquelle elle l’informait que le comité directeur de l’entreprise commune S 2R avait rejeté les deux demandes mentionnées au point 7 ci-dessus au motif qu’elle n’atteignait pas le nombre minimal de points nécessaire, fixé au point 7.4.1 de l’appel S 2R, pour accéder à la seconde étape de la procédure de sélection. La lettre informait aussi la requérante qu’elle pouvait demander le réexamen de cette décision dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la lettre. Il y était aussi indiqué que la requérante avait le droit d’introduire un recours en annulation en vertu de l’article 263 TFUE. Dans la lettre, il était également précisé que, dans le cas où elle demanderait le réexamen de cette décision, la requérante ne pourrait introduire un recours en annulation qu’après l’adoption de la décision finale de la Commission à cet égard.

9        La lettre du 7 avril 2015 renvoyait aussi au rapport de synthèse d’évaluation qui y était joint. Ce rapport indiquait que la requérante avait obtenu pour le sous-critère relatif à sa capacité financière 2,5 points sur 5. En outre, elle s’est vu attribuer 5,5 points sur 10 pour le résultat global concernant la capacité économique et financière. Quant au résultat global concernant la capacité opérationnelle, la requérante a obtenu un total de 18,5 points sur 25. Enfin, en ce qui concerne le score total, elle a obtenu 24 points sur 35, alors qu’un score minimal de 28 points sur 35 était exigé.

10      Le 30 avril 2015, la requérante a adressé à la Commission une demande de réexamen du rejet des deux demandes. Elle lui reprochait notamment de les avoir examinées conjointement et non séparément. La requérante estimait que l’examen conjoint des deux demandes avait conduit à une évaluation erronée des sous-critères relatifs à la capacité financière ainsi qu’à la diffusion et à l’exploitation des résultats qui seraient atteints par sa participation à l’entreprise commune S 2R.

11      En ce qui concerne la capacité financière, la requérante a soutenu que, si chacune de ses candidatures avait fait l’objet d’une évaluation distincte, elle aurait obtenu un nombre de points supérieur pour chacune d’elles. Quant aux autres critères, la requérante a affirmé qu’il ressortait du rapport de synthèse d’évaluation que sa candidature au programme PI 5 était meilleure que celle soumise dans le cadre du programme PI 4. Or, l’établissement de la moyenne des deux aurait fait baisser la note de sa candidature au programme PI 5, alors que, si les deux candidatures avaient été évaluées séparément, elle aurait pu obtenir de meilleures notes pour sa candidature à ce programme.

12      Le 26 juin 2015, la Commission a informé la requérante par courrier [réf. Ares(2015) 2691017] que sa demande de réexamen avait été rejetée (ci-après la « décision attaquée »). Selon la Commission, les critères énoncés dans l’appel S 2R ne s’opposaient pas à l’évaluation simultanée des deux candidatures. En outre, elle a informé la requérante que les deux candidatures avaient été examinées séparément, à chaque fois que cela était opportun. Enfin, la Commission a reconnu l’existence d’une erreur matérielle dans le rapport de synthèse d’évaluation de la requérante relative à la note attribuée à sa capacité d’innovation. Elle a indiqué que cette erreur n’avait eu aucun impact sur son évaluation globale.

 Procédure et conclusions des parties

13      Le 28 août 2015, la requérante a formé le présent recours.

14      En vertu de l’article 106, paragraphe 3, de son règlement de procédure, en l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure, le Tribunal peut décider de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure. En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé, en l’absence d’une telle demande, de statuer sans phase orale de la procédure.

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

17      Les arguments présentés par la requérante à l’appui du recours peuvent être regroupés en trois moyens. Le premier moyen est relatif à la motivation des lettres par lesquelles elle a été informée du rejet de ses demandes tendant à obtenir le statut de membre associé de l’entreprise commune S 2R. Le deuxième moyen concerne, en substance, des erreurs manifestes d’appréciation que la Commission aurait commises lors de l’examen de sa candidature. Enfin, le troisième moyen est tiré d’un détournement de pouvoir.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

18      La requérante affirme qu’elle n’a reçu aucune décision formelle de la Commission contenant un dispositif et une motivation formelle quant aux raisons du rejet de sa candidature.

19      La Commission conteste cette allégation de la requérante.

20      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée à l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées par l’acte au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 63 ; du 30 septembre 2003, Allemagne/Commission, C‑301/96, EU:C:2003:509, point 87, et du 22 juin 2004, Portugal/Commission, C‑42/01, EU:C:2004:379, point 66).

21      Il y a lieu de relever d’emblée que, compte tenu du contexte de l’affaire et notamment du fait que la décision de rejet figurant dans la lettre datée du 7 avril 2015 a été suivie, après demande de réexamen, de la décision attaquée, la motivation de cette dernière doit être appréciée en tenant compte également des éléments de motivation contenus dans ladite lettre.

22      En particulier, par le biais de sa lettre du 7 avril 2015, la Commission a informé la requérante du rejet de sa candidature pour devenir membre associé de l’entreprise commune S 2R. La lettre informait la requérante que sa candidature avait été examinée par un groupe d’experts indépendants et renvoyait aussi au rapport de synthèse d’évaluation, qui y était joint. Il ressort dudit rapport que la Commission a examiné de manière analytique tous les critères d’évaluation prévus par l’appel S 2R. En particulier, l’évaluation a successivement porté notamment sur la capacité financière, d’innovation et de gestion de la requérante ainsi que sur sa contribution opérationnelle attendue. De surcroît, ledit rapport expliquait en détail dans quelle mesure les données soumises par la requérante répondaient aux objectifs poursuivis par l’entreprise commune S 2R et correspondaient aux exigences requises pour l’octroi du statut de membre de celle-ci. Enfin, conformément à ce qui était prévu par l’appel S 2R, des notes ont été attribuées pour chaque sous-critère d’évaluation et deux notes au total ont été attribuées à la capacité financière et opérationnelle de la requérante.

23      Par ailleurs, par la décision attaquée, la Commission ne s’est pas limitée à rejeter la candidature de la requérante à la suite de la demande de réexamen introduite par celle-ci. Elle l’a informée que, lors du réexamen de sa candidature, l’organe compétent ne s’en est pas tenu à la demande de réexamen et au rapport de synthèse d’évaluation. D’autres documents pertinents ont été pris en compte, parmi lesquels les deux demandes soumises par la requérante, les rapports d’évaluation individuels, les curriculum vitæ des experts ainsi que toute la documentation de l’appel S 2R.

24      De surcroît, par la lettre du 26 juin 2015, la Commission a informé la requérante qu’elle avait pris en considération le fait que le rapport de synthèse d’évaluation contenait une erreur matérielle concernant la note attribuée à la capacité d’innovation de la requérante, dans le cadre de l’évaluation de sa capacité opérationnelle. Toutefois, cette erreur n’ayant pas eu d’incidence sur la note totale, la Commission a indiqué à la requérante que cette irrégularité dans le processus d’évaluation était marginale et n’avait pas d’incidence sur l’évaluation de l’ensemble de la proposition.

25      Il s’ensuit que, au regard des motifs figurant dans les lettres du 7 avril et du 26 juin 2015, la décision attaquée fait apparaître de façon claire et suffisante les raisons pour lesquelles la candidature de la requérante à l’entreprise commune S 2R a été rejetée. Elle est donc motivée à suffisance de droit au regard des exigences rappelées par la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus. 

26      Quant à l’argument de la requérante selon lequel elle n’a pas reçu de décision formelle de la Commission qui contiendrait un dispositif, celui-ci ne saurait prospérer. En effet, la décision attaquée, contenue dans la lettre du 26 juin 2015, constitue la décision formelle de la Commission et il ne ressort ni du règlement n° 642/2014 ni de l’appel S 2R que la communication de cette décision devait revêtir une forme spécifique.

27      Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation doit être écarté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation

28      La requérante soutient que la procédure d’évaluation de ses candidatures a été arbitraire, contraire aux documents relatifs à l’appel S 2R et en violation du principe d’égalité de traitement. Elle relève que la Commission n’aurait pas dû procéder à une évaluation conjointe de ses deux candidatures. En fusionnant ses deux demandes distinctes en une seule, alors qu’un tel acte n’était pas autorisé par ledit appel, l’organe d’évaluation aurait outrepassé son pouvoir d’appréciation.

29      La requérante fait valoir à ce titre que le fait que les conditions de participation à l’un des deux programmes envisagés n’ont pas été remplies ne saurait compromettre sa participation à l’autre programme. Elle affirme que le fait qu’elle a requis le statut de membre associé dans les deux demandes n’était qu’une mesure de précaution, au cas où l’une de celles-ci serait rejetée. Tout en relevant sa capacité économique de financer les programmes concernés, la requérante ajoute que son effort pour participer dans la plus large mesure possible à l’entreprise commune S 2R ne saurait lui porter préjudice. Selon la requérante, si le critère financier n’était pas satisfait pour l’ensemble des programmes d’innovation demandés, la Commission aurait dû évaluer séparément sa capacité financière pour chaque projet.

30      En outre, la requérante allègue que les considérations de l’organe d’évaluation sur les critères de « diffusion » et d’« exploitation » étaient purement spéculatives et infondées, puisque rien de tel ne ressortait du rapport d’évaluation qui lui avait été fourni. Enfin, elle estime que, en tout état de cause, la Commission aurait dû, conformément à l’article 8, paragraphe 2, de l’appel S 2R, l’alerter avant l’évaluation de ses demandes de candidature, afin de pouvoir clarifier toute ambiguïté ou régulariser tout défaut.

31      La Commission conteste ces allégations.

32      Il y a lieu tout d’abord de rappeler que, s’agissant de l’évaluation comparative de nombreux projets dans un domaine de nature scientifique et technique complexe, la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération à cet égard. Le contrôle juridictionnel est donc limité à la censure de la violation des règles de procédure et de motivation, de l’inexactitude matérielle des faits, de l’erreur manifeste d’appréciation ainsi que du détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêts du 9 septembre 2010, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑387/08, non publié, EU:T:2010:377, point 30, et du 15 septembre 2016, AEDEC/Commission, T‑91/15, non publié, EU:T:2016:477, point 68).

33      Ainsi, dans les limites fixées par la jurisprudence, il convient d’examiner si la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation lors de l’évaluation des demandes de la requérante au regard des différents critères d’évaluation de la qualité de membre associé à l’entreprise commune S 2R.

34      Il y a lieu de relever d’emblée que la partie introductive du point 7 de l’appel S 2R, intitulée « Critères d’évaluation », en page 14 de l’appel S 2R, dispose que « les entités peuvent soumettre une candidature par programme d’innovation ou une candidature pour plusieurs programmes d’innovation ». Par ailleurs, la phrase suivante de cette partie circonscrit les hypothèses dans lesquelles il existe une obligation de déposer plus d’une candidature par le même candidat. En particulier, il y est prévu que les entités souhaitant devenir, « sous des formes différentes », des membres dans plus d’un programme d’innovation doivent soumettre une candidature pour chaque programme d’innovation. Il ressort clairement de ces indications que, en principe, toute entité intéressée à devenir membre associé pouvait déposer une ou plusieurs demandes pour les programmes d’innovation auxquels elle postulait. Cette constatation ne signifie pas pour autant que l’organe d’évaluation se trouvait dans l’obligation d’examiner chaque demande émanant d’une entité indépendamment des autres demandes éventuelles déposées par la même entité.

35      En outre, il est indiqué au point 6 de l’appel S 2R que la procédure de sélection des membres associés à l’entreprise commune S 2R se déroulerait en deux étapes. La première, en cause en l’espèce, servirait à « identifier des candidats membres associés » à la suite d’une évaluation initiale sur la base des critères d’éligibilité, d’exclusion et de sélection décrits au point 7 de l’appel S 2R. Lors de la seconde étape, l’organe d’évaluation procéderait à la sélection finale des membres associés à la suite d’un examen des propositions techniques détaillées.

36      Le point 6 de l’appel S 2R confirme donc que, dans le cadre de la première étape de la procédure de sélection, la Commission était appelée à présélectionner les entités éligibles à devenir des membres associés et non pas à évaluer la capacité technique des candidats de participer à chacun des programmes d’innovation pourvus. Partant, il y a lieu de considérer que, aux fins d’accorder le statut de membre associé, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission pouvait procéder, dans le cadre de la première étape de la procédure de sélection, à une évaluation conjointe de ses deux demandes et apprécier sa capacité globale de devenir membre associé, bien qu’elle ait postulé séparément à chacun des deux programmes d’innovation. Quant àla capacité financière, qui était une condition à examiner dans le cadre de la première étape de la procédure de sélection, celle-ci dépendait notamment du nombre de programmes auxquels une entité souhaitait participer. Par conséquent, la Commission devait examiner les deux demandes de manière conjointe en ce qui concerne cet aspect.

37      À cet égard, la requérante allègue que, dans le cas où elle ne remplissait pas le critère financier pour l’ensemble des programmes PI 4 et PI 5 auxquels elle avait postulé, la Commission aurait dû évaluer séparément sa capacité financière pour chacun d’eux et lui accorder le statut de membre associé au titre de l’un d’eux.

38      Cet argument ne saurait prospérer. En effet, il ressort du point 7.2.1, sous a), de l’appel S 2R que les « candidatures à plusieurs programmes d’innovation sont soumises à la fourniture par le candidat de la contribution minimale à chaque programme d’innovation auquel il a postulé [ ; l]es candidatures à l’ensemble des cinq programmes d’innovation représentent, dès lors, un engagement à verser une contribution propre minimale aux actions indirectes de 18,5 millions d’euros ». Cette somme résulte de l’addition des sommes minimales requises pour la participation à chacun des cinq programmes d’innovation prévus. En outre, le point 7.4.2 de l’appel S 2R dispose que les candidats doivent pouvoir établir leur solidité financière, leur engagement à long terme et leur capacité de cofinancer « les activités qu’ils proposent ». Il en découle que, dès lors que la candidature de la requérante visait plusieurs programmes d’innovation, c’est conformément à l’appel S 2R que la Commission a examiné sa capacité de les financer conjointement.

39      À cet égard, c’est à bon droit que la Commission relève que le niveau de capacité financière à démontrer dépendait de la valeur totale des investissements proposés par le candidat au statut de membre associé. En effet,comme le soutient la Commission, il y a lieu de considérer qu’apprécier séparément la capacité financière du candidat pour chaque programme d’innovation ne lui aurait pas permis d’évaluer la capacité globale dudit candidat de contribuer à long terme au développement de l’entreprise commune S 2R.

40      Par ailleurs, il convient de relever que l’appel S 2R ne contient pas d’instruction spécifique sur la manière dont la Commission devait procéder dans le cas d’une candidate qui, à l’instar de la requérante, n’atteignait pas le score minimal requis pour participer aux deux programmes demandés, mais à un seul. Ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, lorsque deux demandes distinctes sont soumises, il se peut que le candidat concerné satisfasse au critère de la capacité financière pour chaque demande prise séparément, mais non pour les deux programmes pris dans leur ensemble. Or, procéder en l’espèce à un examen séparé des demandes ferait intervenir un élément d’arbitraire, dès lors que l’appel S 2R n’habilitait pas la Commission, dans un tel cas de figure, à choisir de manière discrétionnaire l’un des deux programmes d’innovation demandés. Par conséquent,c’est à bon droit quela Commission a opté pour le seul mode opératoire envisageable, à savoir le rejet des deux demandes conjointement.

41      Quant à l’argument de la requérante tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, il convient de relever qu’elle n’établit pas que l’organe d’évaluation aurait favorisé d’autres candidats ayant présenté une seule demande de participation à plusieurs programmes d’innovation, à son détriment, lors de l’évaluation de leur capacité à devenir membres associés. En effet, ainsi que la Commission le soulève à juste titre, il ressort du dossier que l’organe d’évaluation a traité toutes les demandes de la même manière, en portant son appréciation sur la capacité des candidats au regard de l’ensemble des programmes d’innovation auxquels ils se proposaient de participer. Pour autant que, par le biais de cet argument, la requérante entendrait faire valoir que la Commission aurait dû examiner exceptionnellement sa capacité financière séparément pour chaque programme d’innovation, il convient de considérer que, dans ce cas, les autres candidats ayant soumis une seule demande de participation à plusieurs programmes d’innovation auraient été défavorisés. Partant, cet argument doit être écarté.

42      Au demeurant, il convient de relever que dans la requête, la requérante affirme explicitement que « les documents relatifs à l’appel S 2R n’abordent pas l’hypothèse du dépôt de deux demandes distinctes visant des programmes d’innovation différents ». Elle reconnaît donc que l’appel S 2R ne comprenait pas d’indications explicites sur la manière dont la Commission devait évaluer deux demandes distinctes, chacune portant sur un programme d’innovation différent, et provenant de la même entité.

43      À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de considérer que le critère relatif à la capacité financière devait être apprécié en tenant compte de tous les programmes auxquels une entité souhaitait participer. Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en évaluant la capacité de la requérante de financer ensemble les deux programmes auxquels elle avait postulé.

44      En outre, il y a lieu de relever que l’organe d’évaluation n’a pas procédé à une appréciation conjointe des candidatures de la requérante en ce qui concerne tous les critères prévus par l’appel S 2R. Ainsi qu’il est, à bon droit, relevé par la Commission, en ce qui concerne la capacité opérationnelle de la requérante, le rapport de synthèse d’évaluation apporte une appréciation différenciée par programme d’innovation lorsque cela est nécessaire. À titre d’exemple, tel est le cas quant au sous-critère de la capacité d’innovation. Le rapport de synthèse énumère à ce titre les différents projets dans lesquels la requérante a été impliquée en différenciant entre les programmes PI 4 et PI 5.

45      Quant à l’argument de la requérante contestant la pertinence de l’appréciation par la Commission de sa capacité de financer les deux programmes d’innovation, il convient de relever que l’organe d’évaluation a constaté qu’elle semblait être une entreprise stable et rentable. Toutefois, se fondant sur des données fournies par la requérante, il a relevé que son chiffre d’affaires annuel oscillait, durant les cinq dernières années, entre 5 et 8 millions d’euros et que sa proposition d’investissement total s’élevait à 6,5 millions d’euros. Cette somme devait être répartie sur une période de dix ans, c’est-à-dire la durée maximale de l’entreprise commune S 2R. Or, avec un bénéfice annuel représentant 10 % environ de son chiffre d’affaires annuel, la requérante serait obligée d’investir tous ses bénéfices dans l’entreprise commune S 2R pour une période de dix ans afin de parvenir à couvrir l’investissement total de 6,5 millions d’euros. Par conséquent, et eu égard notamment à la large marge d’appréciation dont disposait la Commission en l’espèce (voir point 32 ci-dessus), sa conclusion, à savoir que la requérante « aurait du mal à financer le niveau de contribution requis », n’était pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

46      Par ailleurs, lors de l’examen de la capacité financière de la requérante, l’organe d’évaluation a relevé qu’elle avait omis de fournir les informations suffisantes sur les investissements effectués dans la recherche et le développement au cours des cinq dernières années. Or, cette obligation ressort du point 7.4.2 de l’appel S 2R, ce qui, en l’occurrence, n’est pas contesté par la requérante.

47      Au vu de ce qui précède, il ressort clairement de l’appréciation de la capacité financière de la requérante que l’organe d’évaluation a fondé sa décision sur des considérations qui n’étaient pas dénuées de pertinence ainsi que sur l’absence, dans le dossier, d’informations requises par l’appel S 2R. Partant, en attribuant à la requérante 2,5 points pour le sous-critère de la capacité financière de celle-ci, ce qui a entraîné le rejet de sa candidature faute d’avoir atteint l’une des deux conditions cumulatives nécessaires pour passer à la seconde étape de la procédure de sélection, l’organe d’évaluation n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.

48      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante contestant l’appréciation de l’organe d’évaluation relative au critère « Diffusion et exploitation », ainsi qu’il a déjà été constaté au point 47 ci-dessus, la Commission lui a, à juste titre, attribué 2,5 points pour le sous-critère de la capacité financière, ce qui a entraîné le rejet de sa candidature. Il n’y a donc pas lieu d’examiner si l’organe d’évaluation a, à bon droit, attribué à la requérante 3,5 points pour le critère « Diffusion et exploitation ».

49      Enfin, la Commission n’avait pas l’obligation, ainsi qu’il est allégué par la requérante, de l’alerter avant l’évaluation de ses demandes de candidature, afin de pouvoir régulariser des défauts éventuels dans celles-ci. À cet égard, il y a lieu de relever que le point 8.2 de l’appel S 2R prévoit qu’après l’ouverture des candidatures, la Commission « peut » contacter un candidat au cas où des clarifications sont nécessaires ou des erreurs administratives manifestes dans les candidatures doivent être rectifiées. Outre le fait que le contact de la requérante de la part de la Commission relevait de l’initiative de cette dernière, il convient de constater qu’aucune clarification ne s’imposait en l’espèce. Ainsi qu’il a été considéré au point 43 ci-dessus, il ne ressortait pas de l’appel S 2R que l’organe d’évaluation ne pouvait évaluer la capacité financière de la requérante de financer conjointement les deux programmes auxquels elle avait postulé.

50      Il résulte de ces considérations que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste lors de l’appréciation des demandes de la requérante ayant donné lieu au rejet de sa candidature à devenir membre associé de l’entreprise commune S 2R. Il y a lieu donc d’écarter ce moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré du détournement de pouvoir

51      La requérante soulève un moyen tiré de l’existence d’un détournement de pouvoir et se fonde sur les prétendues erreurs manifestes d’appréciation qu’aurait commises la Commission au cours de la procédure de sélection en l’espèce.

52      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la notion de détournement de pouvoir se réfère au fait, pour une autorité administrative, d’avoir usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise à une telle fin (arrêts du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C‑331/88, EU:C:1990:391, point 24, et du 10 mai 2005, Italie/Commission, C‑400/99, EU:C:2005:275, point 38). En cas de pluralité de buts poursuivis, même si un motif non justifié se joint aux motifs valables, la décision n’est pas pour autant entachée de détournement de pouvoir, dès lors qu’elle ne sacrifie pas le but essentiel (voir arrêt du 21 septembre 2005, EDP/Commission, T‑87/05, EU:T:2005:333, point 87 et jurisprudence citée).

53      Force est de constater que la requérante n’a présenté aucun élément susceptible de démontrer que la Commission aurait utilisé son pouvoir à d’autres fins, en l’espèce, que celle d’évaluer sa candidature à l’aune des critères prévus dans l’appel S 2R.

54      Dès lors, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être rejeté et, partant, le recours dans son entièreté.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Oltis Group a.s. est condamnée aux dépens.

Berardis

Spielmann

Csehi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 décembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : le tchèque.

Fuq