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Document 62020TO0743

A Törvényszék végzése (nyolcadik tanács), 2022. január 17.
Car-Master 2 sp. z o.o. sp.k. kontra Európai Bizottság.
Verseny – Kartellek – A lengyelországi gépjárműjavítási piac – Panaszt elutasító határozat – Az 1/2003/EK rendelet 13. cikkének (2) bekezdése – Az ügy nemzeti versenyhatóság általi elbírálása – Minden jogalapot nélkülöző kereset.
T-743/20. sz. ügy.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2022:33

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

17 janvier 2022 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché de la réparation des véhicules automobiles en Pologne – Décision de rejet d’une plainte – Article 13, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 – Traitement de l’affaire par une autorité de concurrence nationale – Recours dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑743/20,

Car-Master 2 sp. z o.o. sp.k., établie à Cracovie (Pologne), représentée par Me M. Miśkowicz, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. G. Meessen, J. Szczodrowski et I. Zaloguin, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2020) 7369 final de la Commission, du 22 octobre 2020 (affaire AT.40665 – Toyota Motor Poland), rejetant la plainte introduite par la requérante concernant de prétendues infractions à l’article 101 TFUE,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, R. Barents et Mme T. Pynnä (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Car-Master 2, est un concessionnaire de véhicules des marques Jaguar et Land Rover en Pologne. Elle a effectué une demande d’admission au réseau de services de la marque Toyota et d’octroi d’un agrément en qualité de prestataire de services, demande qui a été définitivement rejetée par Toyota Motor Poland le 17 août 2017.

2        Le 14 septembre 2017, la requérante a informé le président de l’Urząd Ochrony Konkurencji i Konsumentów (Office de la protection de la concurrence et des consommateurs, Pologne, ci-après l’« UOKiK ») qu’elle soupçonnait Toyota Motor Poland de pratiques restrictives de concurrence contraires au droit de la concurrence polonais et à l’article 101 TFUE.

3        Le 10 novembre 2017, le président de l’UOKiK a effectué une demande d’informations supplémentaires auprès de la requérante, estimant ne pas avoir les informations suffisantes pour évaluer exhaustivement les pratiques de Toyota Motor Poland.

4        Le 14 février 2018, la requérante a adressé au président de l’UOKiK une lettre en réponse à sa demande d’informations supplémentaires.

5        Le 21 mars 2018, le président de l’UOKiK a informé la requérante qu’il estimait que l’exposé des faits ne justifiait pas l’adoption des mesures prévues par la loi polonaise sur la protection de la concurrence et de la consommation.

6        Le 6 juillet 2018, le président de l’UOKiK a envoyé à Toyota Motor Poland une lettre lui demandant de répondre à une série de questions liées aux points soulevés par la requérante dans sa plainte.

7        Le 9 août 2018, le président de l’UOKiK a réitéré sa décision de ne pas adopter de mesures prévues par la loi polonaise sur la protection de la concurrence et de la consommation à l’égard de Toyota Motor Poland.

8        Le 14 juin 2019, la requérante a déposé une plainte auprès de la Commission européenne sollicitant l’ouverture d’une procédure d’infraction à l’article 101 TFUE.

9        Le 21 janvier 2020, elle a reçu une lettre de la Commission l’informant de son intention de rejeter la plainte en vertu de l’article 13 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1), au motif que l’UOKiK avait déjà traité la même pratique restrictive au sens de l’article 13, paragraphe 2, dudit règlement.

10      Le 12 février 2020, la requérante a formulé ses observations sur l’évaluation provisoire de sa plainte par la Commission.

11      Le 22 octobre 2020, la Commission a adopté la décision C(2020) 7369 final dans l’affaire AT.40665 – Toyota Motor Poland, par laquelle elle a définitivement rejeté la plainte de la requérante sur le fondement de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 (ci-après la « décision attaquée »).

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 décembre 2020, la requérante a introduit le présent recours.

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris les frais de représentation en justice.

14      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure, lorsque le recours est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

16      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

17      La requérante soulève deux moyens à l’appui de son recours, tirés, le premier, de l’interprétation et de l’application erronées de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 et, le second, d’une violation du principe de bonne administration.

 Sur le premier moyen, tiré de l’interprétation et de l’application erronées de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003

18      La requérante estime que la Commission a privilégié une interprétation et une application erronées de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 en considérant que le président de l’UOKiK avait « traité l’affaire » au sens de cette disposition.

19      En premier lieu, elle considère que la Commission ne peut pas rejeter une plainte au seul motif qu’une autre autorité aurait été saisie ou se serait autosaisie, mais seulement si cette dernière a effectivement traité l’affaire en cause.

20      En effet, la requérante fait valoir que, pour pouvoir considérer une affaire comme « traitée » par une autre autorité au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 et de la jurisprudence issue de l’arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission (T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 48), il faut, d’une part, que celle-ci ait exercé les pouvoirs qui lui ont été conférés et, d’autre part, qu’elle ait procédé à un examen des circonstances de droit et de fait pertinentes pour l’affaire. Elle reconnaît par ailleurs qu’une affaire peut être considérée comme traitée et l’autorité comme ayant exercé ses pouvoirs, même lorsque celle-ci ne rend pas de décision, à condition qu’elle ait examiné minutieusement les éléments de droit et de fait.

21      En l’espèce, la requérante conteste que tel ait été le cas dans la mesure où le président de l’UOKiK aurait refusé de prendre les mesures prévues et d’évaluer les pratiques litigieuses, en invoquant une insuffisance d’information, et n’aurait entrepris aucune démarche pour obtenir ces informations.

22      Par ailleurs, dans son mémoire en réplique, la requérante précise ne pas avoir eu connaissance des questions adressées à Toyota Motor Poland par l’UOKiK et estime que ces questions ne sont pas de nature à étayer l’argument de la Commission selon lequel l’affaire avait été « traitée » au sens de l’article 13, paragraphe 2 du règlement no 1/2003.

23      D’une part, elle se fonde sur l’envoi tardif de ces questions. D’autre part, elle fait valoir qu’il n’est pas démontré que Toyota Motor Poland ait répondu à la lettre du président de l’UOKiK dans la mesure où il n’est fait aucune référence dans la position finale du président de l’UOKiK aux éventuels éléments de réponse qui auraient été fournis. En tout état de cause, la requérante demande à avoir accès à la réponse de Toyota Motor Poland pour pouvoir répondre aux éventuelles affirmations de Toyota.

24      La requérante souligne également que l’absence de conclusion formelle de la procédure nationale, combinée à l’ensemble des circonstances de la présente affaire, aurait dû conduire la Commission à considérer que le président de l’UOKiK n’avait pas traité l’affaire au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003.

25      En deuxième lieu, la requérante déduit du point 22 de la communication de la Commission relative à la coopération au sein du réseau des autorités de concurrence (JO 2004, C 101, p. 43, ci-après la « communication sur la coopération »), tel qu’interprété par le Tribunal dans l’arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission (T‑355/13, EU:T:2015:36, point 29), que la Commission ne peut rejeter une plainte et considérer qu’une autorité de concurrence d’un État membre a déjà traité une affaire, lorsque celle-ci n’a pas pu recueillir les preuves nécessaires pour démontrer l’infraction, que si cette dernière a tenté d’y parvenir et a fait preuve d’initiative pour résoudre l’affaire, mais n’y est pas parvenue pour des raisons indépendantes de sa volonté.

26      Or, la requérante conteste que cette hypothèse se soit réalisée en l’espèce. En effet, elle soutient que le président de l’UOKiK était en mesure d’obtenir les informations et éléments de preuve nécessaires, mais qu’il ne l’aurait pas fait et se serait borné à lui transférer l’intégralité de la charge de la preuve. Selon la requérante, le président de l’UOKiK ne pouvait donc pas rejeter la plainte et c’est à tort que la Commission a tenu ce rejet pour un « traitement » de l’affaire au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003.

27      En troisième lieu, la requérante estime, en se fondant sur le considérant 18 du règlement no 1/2003, que l’objectif poursuivi par la Commission, lorsqu’elle rejette une plainte, devrait consister à assurer, d’une part, une attribution optimale des affaires au sein du réseau des autorités de concurrence et, d’autre part, que chaque affaire ne soit traitée que par une seule autorité.

28      Selon la requérante, l’application de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 par la Commission aurait produit l’effet inverse en l’espèce, dans la mesure où l’affaire n’aurait été examinée par aucune autorité en raison du rejet de la plainte par la Commission.

29      La Commission conteste ces arguments.

30      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, « [l]orsqu’une autorité de concurrence d’un État membre ou la Commission est saisie d’une plainte contre un accord, une décision d’association ou une pratique qui a déjà été traitée par une autre autorité de concurrence, elle peut la rejeter ».

31      Le rejet d’une plainte par la Commission est donc subordonné à deux conditions, à savoir, d’une part, qu’une autorité de concurrence d’un État membre « traite l’affaire » dont elle est saisie et, d’autre part, que cette affaire porte sur le même accord, la même décision d’association ou la même pratique (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, points 33 et 34).

32      À cet égard, il convient de relever que l’expression « traitée par » a une large portée en ce qu’elle est de nature à englober tous les cas de plaintes ayant été examinées par une autre autorité de concurrence, quelle qu’en ait été l’issue, y compris si aucune décision n’a été prise (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 26).

33      Toutefois, l’expression « traitée par » suppose que la Commission, sur la base des informations dont elle dispose à la date à laquelle elle rend sa décision, s’assure que l’autorité de concurrence d’un État membre enquête ou a enquêté sur l’affaire et la Commission ne peut donc pas rejeter une plainte au seul motif que cette autorité était saisie d’une plainte ou qu’elle s’était autosaisie sans que ces actes donnent lieu à un quelconque traitement de l’affaire en cause (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, points 48 et 50).

34      Dès lors, si le « traitement » de l’affaire ne se limite pas à la seule saisine de l’autorité de concurrence d’un État membre, la Commission peut, en revanche, se limiter à vérifier que l’autorité a effectivement examiné les pratiques en cause (arrêt du 12 mars 2020, LL-Carpenter, T‑531/18, non publié, EU:T:2020:91, point 53).

35      En outre, le Tribunal a précisé que ce qui importait n’était pas l’issue de l’examen de la plainte par l’autorité de concurrence, mais le fait qu’elle ait été examinée par cette dernière au regard des règles du droit de la concurrence de l’Union. Ainsi, la Commission peut, pour rejeter une plainte sur le fondement de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, se fonder à bon droit sur le motif tiré de ce que l’autorité de concurrence d’un État membre a précédemment rejeté cette plainte à la suite d’un examen au regard des règles de concurrence de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, points 27, 44 et 46).

36      Or, en l’espèce, le traitement effectif de l’affaire par le président de l’UOKiK est confirmé par plusieurs pièces du dossier, en particulier la demande d’informations supplémentaires adressée par le président de l’UOKiK à la requérante le 10 novembre 2017 et son courrier du 21 mars 2018 informant la requérante de ce qu’il estimait que l’exposé des faits ne justifiait pas l’adoption de mesures, ces éléments n’étant d’ailleurs pas contestés par la requérante. Le traitement de l’affaire par le président de l’UOKiK est encore conforté par sa lettre adressée à Toyota Motor Poland en date du 6 juillet 2018, lui demandant de répondre à une série de questions relatives à la plainte.

37      En outre, ainsi que le fait valoir la Commission, l’UOKiK avait traité les faits décrits dans la plainte de la requérante sous l’angle de leur conformité au droit de la concurrence polonais, ainsi qu’au droit primaire et dérivé de l’Union. Il ressort en effet de la lettre que le président de l’UOKiK a adressé à la requérante le 21 mars 2018 que celui-ci a examiné sa plainte, d’une part, au regard de l’article 6 de la loi sur la concurrence polonaise et la protection des consommateurs ainsi que des critères d’appréciation des accords verticaux et des pratiques concertées dans la législation polonaise et, d’autre part, au regard de l’article 101 TFUE et du règlement (UE) no 330/2010 de la Commission, du 20 avril 2010, concernant l’application de l’article 101, paragraphe 3 [TFUE], à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées (JO 2010, L 102, p. 7), et du règlement (UE) no 461/2010 de la Commission, du 27 mai 2010, concernant l’application de l’article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans le secteur automobile (JO 2010, L 129, p. 52).

38      De plus, il ressort de la lettre du président de l’UOKiK du 9 août 2018 confirmant sa décision de rejet de la plainte que celui-ci a estimé, au regard des informations qu’il avait recueilli, que le comportement de Toyota Motor Poland ne pouvait être considéré comme une pratique anticoncurrentielle. Ces faits ne sont d’ailleurs pas contestés par la requérante.

39      Ainsi, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la Commission n’a pas rejeté sa plainte au seul motif que le président de l’UOKiK avait déjà été saisi d’une plainte de la requérante. Au contraire, elle a estimé, à juste titre, qu’un traitement effectif de la plainte au regard du droit de la concurrence de l’Union avait déjà été réalisé par le président de l’UOKiK.

40      Enfin, il convient de souligner que, dans un cas d’application de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, si la Commission doit s’assurer que l’autorité de concurrence d’un État membre a traité l’affaire au regard des règles de concurrence du droit de l’Union, il n’appartient pas à cette institution de porter une appréciation sur le bien-fondé de la méthodologie ou de la décision adoptée par cette autorité de concurrence, ni de vérifier si celle-ci a commis des erreurs matérielles dans l’analyse des pratiques alléguées, si elle a procédé à l’ouverture d’une procédure administrative ou si elle a clos l’enquête en adoptant une décision formelle, ce dernier rôle relevant des seules juridictions nationales (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 49 ; du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 51, et du 12 mars 2020, LL-Carpenter/Commission, T‑531/18, non publié, EU:T:2020:91, points 52 et 53).

41      Dès lors, la prétendue absence de conclusion formelle de la procédure, le supposé envoi tardif des questions à Toyota Motor Poland par le président de l’UOKiK, l’absence de référence aux réponses de Toyota Motor Poland dans la décision du président de l’UOKiK ou la demande d’accès de la requérante à la réponse de Toyota Motor Poland ne sont pas des éléments pertinents aux fins d’évaluer la légalité de la décision attaquée en l’espèce.

42      Par conséquent, la requérante n’a pas établi que la Commission aurait commis une erreur de droit ou une erreur manifeste d’appréciation en considérant que le président de l’UOKiK avait déjà traité la plainte de la requérante au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.

43      Aucun des autres arguments avancés par la requérante n’est susceptible de remettre en cause cette conclusion.

44      En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante fondé sur le point 22 de la communication sur la coopération (voir point 25 ci-dessus), tel que ce point aurait été interprété par le Tribunal dans l’arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission (T‑355/13, EU:T:2015:36), il convient de relever que cet argument repose sur une prémisse erronée. En effet, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 36 ci-dessus, en l’espèce, le président de l’UOKiK a fait preuve d’initiative dans la recherche des éléments de preuves et n’a aucunement transféré sur la requérante l’intégralité de la charge de la preuve. En effet, il n’a pas rejeté la plainte faute de preuve, mais bien parce qu’il ressortait des informations qu’il avait recueillies que le comportement de Toyota ne constituait pas une pratique anticoncurrentielle.

45      En tout état de cause, à supposer même que l’UOKiK eût été en mesure d’obtenir des informations et des éléments de preuve supplémentaires avant de rejeter la plainte de la requérante, cette dernière ne saurait déduire du point 22 de la communication sur la coopération que la Commission ne pouvait pas, de ce fait, rejeter sa plainte sur le fondement de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003.

46      En effet, le point 22 de la communication sur la coopération précise qu’« [u]ne autorité nationale de concurrence a la faculté, mais non l’obligation, de suspendre ou de clore sa procédure. L’article 13 du règlement du Conseil laisse une marge d’appréciation des spécificités de chaque espèce. Cette souplesse est importante : si une plainte a été rejetée par une autorité à la suite de l’examen du fond de l’affaire, une autre autorité peut ne pas vouloir réexaminer le dossier. En revanche, si une plainte a été rejetée pour d’autres motifs (par exemple, l’autorité n’a pas pu recueillir les preuves nécessaires pour démontrer l’infraction), une autre autorité peut vouloir effectuer sa propre enquête et traiter l’affaire ».

47      Le point 29 de l’arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission (T‑355/13, EU:T:2015:36), sur lequel la requérante fonde son argument précise à cet égard que « [l]e paragraphe 22 de cette communication [sur la coopération] envisage, lui, de manière explicite, l’hypothèse dans laquelle une plainte a été examinée par une autorité de concurrence, mais a été rejetée pour d’autres motifs que l’examen au fond de l’affaire, en citant l’exemple du cas dans lequel l’autorité n’a pas pu recueillir les preuves nécessaires pour démontrer l’infraction, et en indiquant qu’il importait de faire preuve de souplesse en permettant à une autre autorité d’effectuer sa propre enquête et de traiter elle-même l’affaire ».

48      Il en découle que le point 22 de la communication sur la coopération vise à préciser le fonctionnement du réseau européen des autorités de concurrence en indiquant que, même si l’un des objectifs du règlement no 1/2003 est que chaque affaire ne soit traitée que par une seule autorité, une autorité d’un État membre doit avoir la possibilité de traiter une affaire lorsque celle-ci a été rejetée par une autre autorité pour d’autres motifs que l’examen au fond de cette affaire. La Cour a ainsi précisé, s’agissant de l’article 13, paragraphe 1, dudit règlement, que chaque autorité avait la possibilité et non l’obligation de rejeter une plainte dont elle était saisie, lorsqu’une autre autorité traitait déjà la même affaire (voir, en ce sens, arrêt du 14 février 2012, Toshiba Corporation e.a., C‑17/10, EU:C:2012:72, point 90).

49      Partant, contrairement à ce que fait valoir la requérante, ni l’article 13, paragraphe 1, dudit règlement, ni le point 22 de la communication sur la coopération n’imposent à la Commission une obligation positive de traiter une affaire lorsqu’une autorité de concurrence rejette une plainte sans avoir tout mis en œuvre pour recueillir les éléments de preuves et d’information nécessaires à l’établissement d’une infraction.

50      À cet égard, l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 dispose au contraire que, « lorsqu[e les autorités de concurrence des États membres] considèrent, sur la base des informations dont elles disposent, que les conditions d’une interdiction ne sont pas réunies, elles peuvent également décider qu’il n’y a pas lieu pour elles d’intervenir ». Or, le Tribunal a précisé, dans le même arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission (T‑355/13, EU:T:2015:36), sur lequel se fonde la requérante, que cette disposition recouvre tous les cas dans lesquels l’autorité de concurrence d’un État membre considère que les informations dont elle dispose ne lui permettent pas de considérer que les conditions d’une interdiction sont réunies, sans qu’il soit nécessaire qu’elle ait procédé à des mesures préalables d’instruction (arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 34).

51      En outre, la Commission n’a pas à procéder systématiquement à l’examen d’une plainte, lorsqu’une autorité de concurrence d’un État membre a instruit une plainte, mais n’a pas adopté l’une des décisions prévues par les dispositions de l’article 5 du règlement no 1/2003, ou a adopté une décision de rejet pour des raisons de priorité. En effet, une telle interprétation serait incompatible avec l’objectif de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, qui est de mettre en place, dans un souci d’efficacité, une allocation optimale des ressources au sein du réseau européen de concurrence (arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 37).

52      Dès lors, il ressort des considérations qui précèdent que le point 22 de la Communication sur la coopération n’empêchait pas la Commission de rejeter la plainte de la requérante au titre de l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, à supposer même que l’UOKiK eût pu entreprendre des démarches additionnelles pour recueillir des informations et enquêter sur l’affaire dont elle était saisie.

53      Partant, l’argument de la requérante, fondé sur le point 22 de la communication sur la coopération, tel qu’interprété par l’arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission (T‑355/13, EU:T:2015:36), doit être rejeté.

54      En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante fondé sur le considérant 18 du règlement no 1/2003 et sur le fait que sa plainte n’aurait été examinée par aucune autorité, il convient de rappeler que, selon ledit considérant, « [a]fin d’assurer une attribution optimale des affaires au sein du réseau, il convient de prévoir une disposition générale permettant à une autorité de concurrence de suspendre ou de clôturer une affaire au motif qu’une autre autorité traite ou a traité la même affaire, l’objectif étant que chaque affaire ne soit traitée que par une seule autorité ».

55      Or, il ressort des développements précédents que la Commission n’a pas commis d’erreur en estimant que la plainte de la requérante avait été traitée par le président de l’UOKiK.

56      Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel sa plainte n’aurait été examinée par aucune autorité, ce qui serait contraire aux objectifs du règlement no 1/2003, tels que reflétés dans son considérant 18, doit nécessairement, par voie de conséquence, être rejeté également.

57      Au vu de l’ensemble de ces considérations, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant manifestement non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration

58      Par ce moyen, la requérante estime, en premier lieu, que, en s’abstenant d’examiner l’affaire, la Commission l’aurait privée d’une voie de droit protégée par l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

59      En effet, elle soutient que le principe de bonne administration consacré par l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, vise à assurer aux particuliers la possibilité d’exercer légalement leurs droits et que, en l’espèce, elle ne dispose pas d’une telle possibilité dans la mesure où aucune autorité ne se serait saisie de son cas.

60      La requérante explique, d’une part, que les règles de droit national ne prévoient pas la possibilité d’introduire un recours contre le rejet opposé à une plainte par le président de l’UOKiK, seule une décision de classement sans suite pouvant être contestée devant les juridictions nationales et, d’autre part, que la Commission s’est en l’espèce abstenue erronément d’examiner l’affaire en considérant qu’elle avait déjà été traitée.

61      En second lieu, la requérante fait valoir que, en s’abstenant de prendre en considération toutes les circonstances du cas d’espèce, la Commission aurait manqué au devoir de diligence qui lui incombait en vertu du principe de bonne administration protégé par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux. Elle estime que la Commission n’aurait ni examiné minutieusement si et comment la plainte avait été traitée, ni vérifié avec soin la substance et la portée des interventions de l’UOKiK.

62      Elle souligne également que la Commission aurait violé le principe de bonne administration en ne respectant pas l’obligation qui lui incombait en vertu de l’article 105, paragraphe 1, TFUE de veiller à l’application des principes énoncés aux articles 101 et 102 TFUE. Selon la requérante, la Commission aurait dû considérer que le rejet de sa plainte par le président de l’UOKiK avait laissé irrésolu un cas éventuel d’infraction aux règles de la concurrence.

63      La Commission conteste cette argumentation.

64      À titre liminaire, il convient de rappeler que le considérant 37 du règlement no 1/2003 précise que celui-ci « respecte les droits fondamentaux et les principes reconnus en particulier par la charte des droits fondamentaux » et qu’il « doit être interprété et appliqué dans le respect de ces droits et principes ».

65      À cet égard, en premier lieu, l’article 41, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux dispose que « [t]oute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union ».

66      En outre, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante relative au principe de bonne administration, dans les cas où les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figure, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir arrêt du 9 décembre 2014, SP/Commission européenne, T‑472/09 et T‑55/10, EU:T:2014:1040, point 186 et jurisprudence citée).

67      Or, il suffit de constater que la requérante n’explique pas en quoi, au-delà des erreurs alléguées dans le cadre du premier moyen, qui a été rejeté comme étant manifestement non fondé, la Commission n’aurait pas examiné sa plainte avec soin et impartialité.

68      En outre, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la Commission n’a commis aucune erreur en constatant, dans la décision attaquée, qu’en cas de rejet d’une plainte en vertu de l’article 13, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, elle n’est pas tenue d’évaluer la validité des arguments, des conclusions et des méthodes utilisées par une autorité nationale de concurrence qui a déjà traité une affaire donnée (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 49 ; du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 37, et du 12 mars 2020, LL-Carpenter/Commission, T‑531/18, non publié, EU:T:2020:91, point 52).

69      Partant, le grief de la requérante tiré d’une violation du principe de bonne administration doit être rejeté.

70      En deuxième lieu, dans la mesure où il ressort de ses écritures que la requérante invoque également, en substance, le droit à un recours effectif garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, il convient de rappeler que l’article 6 du règlement no 1/2003 dispose que « les juridictions nationales sont compétentes pour appliquer les articles [101 et 102 TFUE] » et il n’appartient qu’à elles de contrôler les décisions des autorités de concurrence des États membres (arrêts du 20 septembre 2001, Courage et Crehan, C‑453/99, EU:C:2001:465, points 23 et 25, et du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 20).

71      Ainsi, il incombe aux États membres d’établir les voies de recours nécessaires pour assurer aux justiciables le respect de leur droit à une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union et non pas à la Commission de pallier, par l’ouverture d’une enquête, les éventuelles insuffisances de la protection juridictionnelle au niveau national (arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 87).

72      En effet, la Commission n’a pas le rôle d’instance de recours dans le régime de protection de la concurrence au niveau de l’Union (arrêt du 30 septembre 2016, Trajektna luka Split/Commission, T‑70/15, EU:T:2016:592, point 34). Le Tribunal a ainsi précisé que le règlement no 1/2003 a pour objet de mettre en place un mécanisme de coopération entre la Commission et les autorités de concurrence des États membres, mais qu’il ne prévoit pas de mécanisme de substitution de la Commission aux juridictions nationales (arrêt du 21 janvier 2015, easyJet Airline/Commission, T‑355/13, EU:T:2015:36, point 39).

73      Dès lors, à supposer même que, comme le fait valoir la requérante, il lui soit impossible en l’espèce d’exercer un recours devant les juridictions nationales pour obtenir le respect des droits qu’elle tire des articles 101 et 102 TFUE, en l’absence d’une décision formelle de classement sans suite par le président de l’UOKiK, un tel constat ne serait pas à même de remettre en cause la légalité de la décision attaquée. Il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle se substitue aux juridictions nationales en contrôlant le bien-fondé de la décision du président de l’UOKiK.

74      Par conséquent, il convient de rejeter le second moyen comme étant manifestement non fondé, ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

75      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit.

2)      Car-Master 2 sp. z o.o. sp.k. est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 17 janvier 2022.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

J. Svenningsen


*      Langue de procédure : le polonais.

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