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Document 52025IE0856

Avis du Comité économique et social européen — Réflexion sur l’avenir des relations entre l’UE et le Royaume-Uni: réexamen en 2026 de l’accord de commerce et de coopération (ACC), du point de vue de la société civile (avis d’initiative)

EESC 2025/00856

JO C, C/2025/5144, 28.10.2025, ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2025/5144/oj (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, GA, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2025/5144/oj

European flag

Journal officiel
de l'Union européenne

FR

Série C


C/2025/5144

28.10.2025

Avis du Comité économique et social européen

Réflexion sur l’avenir des relations entre l’UE et le Royaume-Uni: réexamen en 2026 de l’accord de commerce et de coopération (ACC), du point de vue de la société civile

(avis d’initiative)

(C/2025/5144)

Rapporteure:

Tanja BUZEK

Corapporteur:

Peter BYRNE

Conseillers

Elena CRASTA (pour la rapporteure)

Jonathan PEEL (pour le corapporteur)

Décision de l’assemblée plénière

23.1.2025

Base juridique

Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur

Compétence

Section «Relations extérieures»

Adoption en section

12.6.2025

Adoption en session plénière

16.7.2025

Session plénière no

598

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

147/0/2

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Les relations privilégiées de l’UE avec le Royaume-Uni sont différentes de celles qu’elle entretient avec tout autre partenaire commercial et politique. Affinitaires, l’Union et le Royaume-Uni ont des valeurs, des perspectives et des intérêts communs, leur proximité géographique en fait des partenaires commerciaux tout désignés et ils sont unis par des liens étroits au niveau de la société civile. On a souvent tendance à l’oublier, mais toutes les grandes organisations européennes représentatives des entreprises, des syndicats, des consommateurs et d’intérêts sociaux, environnementaux ou liés à la jeunesse comptent toujours des affiliés britanniques parmi leurs membres.

1.2.

La dynamique est actuellement très favorable à un approfondissement et une amélioration de ce partenariat entre l’UE et le Royaume-Uni, notamment en raison de l’émergence d’impératifs géopolitiques. Le réexamen en 2026 de l’accord de commerce et de coopération (ci-après «l’ACC»), combiné au nouveau départ politique à la suite du sommet UE-Royaume-Uni de mai, est susceptible de marquer une étape importante dans l’évolution des relations post-Brexit. L’objectif doit être un partenariat stable, prévisible et coopératif, quelles que soient les majorités politiques dominantes.

1.3.

Le sommet UE-Royaume-Uni et le réexamen de l’ACC doivent maintenant donner lieu à des améliorations et à des possibilités tangibles pour tous. Le Comité économique et social européen (CESE) se félicite des nouvelles possibilités offertes par le sommet, notamment en ce qui concerne l’alignement dynamique sur les règles et les normes, la sécurité et la prévisibilité en matière de commerce et de pêche, ainsi que la reprise de la participation à Erasmus+ et la perspective d’un futur programme d’expérience en faveur des jeunes. Le présent avis devrait servir de boussole aux acteurs institutionnels de l’UE et du Royaume-Uni dans l’élaboration de la feuille de route commune pour le futur programme de travail.

1.4.

Il importe de faire participer les groupes consultatifs internes (GCI) de l’UE et du Royaume-Uni au réexamen et au futur processus de travail, étant donné qu’ils constituent une source de contribution essentielle tant dans l’UE qu’au Royaume-Uni. Si les parties cherchent avant tout à «mettre en œuvre un accord commercial», c’est sur nous, en tant que société civile, en tant qu’entreprises, travailleurs, consommateurs et citoyens, que ses effets se feront sentir au quotidien. Le CESE plaide en outre en faveur de l’organisation d’un sommet UE-Royaume-Uni consacré spécifiquement au dialogue social en marge de la réunion des dirigeants, de manière à associer les partenaires sociaux aux délibérations.

1.5.

Le renforcement de la coopération réglementaire en matière d’obstacles non tarifaires offre la meilleure occasion d’améliorer les relations commerciales bilatérales. Plus les deux systèmes réglementaires seront proches, moins on verra apparaître de tensions, avec des gains considérables pour tous. Le Comité salue les négociations en vue d’un accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) entre l’UE et le Royaume-Uni, compte tenu de ses avantages commerciaux plus larges, et il souligne l’importance d’adhérer au principe de précaution en tant que valeur fondamentale de l’UE. L’application des droits des consommateurs devrait figurer dans le programme de coopération et permettre aux autorités de surveillance du marché de protéger conjointement les consommateurs, tandis qu’une unité d’évaluation des divergences spécialement créée devrait suivre les divergences en collaboration avec les parties prenantes et qu’un portail commun de l’UE et du Royaume-Uni pourrait donner accès à des informations réglementaires actualisées et des orientations plus claires, notamment pour les PME des deux territoires.

1.6.

Faire progresser le programme de reconnaissance mutuelle réduirait les contrôles aux frontières et améliorerait les flux commerciaux bilatéraux, ce qui serait bénéfique pour la croissance et la création d’emplois. Il y a lieu qu’un éventail élargi d’accords porte sur les qualifications professionnelles, les normes chimiques et les déclarations d’évaluation de la conformité, de manière à réduire les coûts des échanges commerciaux et à favoriser un alignement étroit des réglementations. Il convient de rationaliser autant que possible les doubles exigences en matière de franchissement des frontières afin d’éviter toute augmentation de la congestion et de réduire au minimum les perturbations potentielles.

1.7.

Le commerce des services offre le plus grand potentiel pour ce qui est de développer les relations entre l’UE et le Royaume-Uni après le Brexit. Plus les nouveaux cadres réglementaires visant à faciliter les services transfrontières seront alignés, plus le potentiel d’amélioration de l’accès au marché sera important. Le Comité demande instamment que des mesures soient prises pour relever les défis en matière de mobilité, en particulier une réforme du système britannique de parrainage des visas afin de favoriser une plus grande mobilité et une concurrence loyale entre les prestataires de services de l’Union et du Royaume-Uni. Les futures négociations sur la mobilité devront respecter des normes mutuelles élevées en matière de droits du travail et encourager un nivellement par le haut.

1.8.

Le maintien des clauses de non-régression et de conditions de concurrence équitables doit rester une priorité essentielle pour les parties. Le contrôle de conformité assuré par les GCI doit se poursuivre sans relâche. Il devrait y avoir un dialogue, des échanges et une coopération réguliers sur l’amélioration des droits des travailleurs et des droits environnementaux, afin de progresser dans la réalisation de cet objectif, combinés à une application effective de la législation. Afin de renforcer le dialogue social, le CESE recommande d’étudier les moyens de faciliter la participation des travailleurs britanniques aux comités d’entreprise européens.

1.9.

L’action pour le climat et la politique industrielle active nécessitent un alignement réglementaire et stratégique plus étroit. Le CESE se félicite que les systèmes d’échange de quotas d’émission (SEQE) des deux parties soient liés, et préconise de mettre en place une coopération afin de permettre les investissements nécessaires pour soutenir la transition vers une énergie et une industrie propres.

1.10.

Un «ACC à l’épreuve du temps» doit intégrer le point de vue des jeunes, en supprimant progressivement les obstacles qui empêchent de saisir de nouvelles possibilités. Le Brexit ne doit pas devenir un nouveau «mur de Berlin» pour les générations futures. Les jeunes des deux côtés ont plaidé vigoureusement pour que le Royaume-Uni participe à nouveau au programme Erasmus+, qui soutient également la formation professionnelle et l’apprentissage. Cet apprentissage doit répondre à des critères de qualité, assortis de conditions décentes, et bénéficier à tous les jeunes et jeunes travailleurs sans être limité à certains secteurs.

1.11.

Il importe de préserver le statut unique de l’Irlande du Nord et les conditions commerciales dont elle bénéficie. Le CESE souligne le rôle primordial et les retombées positives de l’accord de Belfast de 1998 (dit «accord du Vendredi saint») s’agissant d’éviter tout retour à la violence. Il se félicite des progrès accomplis grâce au cadre de Windsor de 2023 et demande instamment que la non-diminution des droits de l’Irlande du Nord demeure au cœur du réexamen prévu.

1.12.

Il convient de mettre en œuvre un réexamen ambitieux allant au-delà d’une simple démarche exploratoire. Le CESE invite instamment les parties à conclure un ou plusieurs accords globaux et mutuellement bénéfiques en accordant une attention particulière aux arrangements inachevés dans les domaines mentionnés dans les annexes à l’ACC. Tout accord supplémentaire doit respecter l’architecture générale des principes de l’ACC et les engagements en matière de conditions de concurrence équitables, et relever du champ d’application du suivi par les GCI.

2.   Contexte de l’avis d’initiative

2.1.

L’ACC établit le cadre juridique actuel des relations commerciales bilatérales entre l’UE et le Royaume-Uni, et prévoit un statut unique pour l’Irlande du Nord. Malgré le Brexit, le Royaume-Uni reste un partenaire potentiel dans divers domaines, notamment l’environnement, le changement climatique, les échanges de jeunes, les intérêts des consommateurs, la sécurité extérieure et la défense.

2.2.

La relation unique entre l’UE et le Royaume-Uni est également déterminée par les liens toujours plus étroits entre les sociétés civiles européenne et britannique qui la caractérisent. Bénéficiant des travaux de son comité de suivi UE-Royaume-Uni, le CESE a maintenu ses relations avec la société civile britannique après le Brexit et s’est investi dans l’établissement de nouvelles relations, en s’appuyant sur les travaux de suivi relatifs à ses avis connexes. L’ACC a mis en place deux organes de la société civile en Europe et au Royaume-Uni: les GCI, qui ont pour mission de suivre la mise en œuvre de l’accord.

2.3.

Les orientations politiques 2024-2029 d’Ursula von der Leyen, présidente de la Commission, indiquent clairement l’engagement européen à renforcer les relations avec le Royaume-Uni sur des questions d’intérêt commun, telles que l’énergie, la sécurité, la résilience et les contacts interpersonnels. Le réexamen de l’ACC, légalement requis après cinq ans et prévu pour 2026, se borne à évaluer la mise en œuvre des dispositions existantes, mais rien ne devrait empêcher d’améliorer l’accord à un niveau fondamental. Le tout premier sommet UE-Royaume-Uni, qui s’est tenu le 19 mai 2025, a mis en évidence qu’après plusieurs années difficiles, un nouveau cadre stratégique pourrait être envisagé.

2.4.

En ce qui concerne les prochaines étapes, le principal objectif du présent avis d’initiative est de mettre en évidence les principaux défis auxquels sont confrontés les entreprises, les travailleurs, les consommateurs et les citoyens, et de signaler les domaines dans lesquels les relations peuvent être améliorées, comme la coopération réglementaire entre l’UE et le Royaume-Uni. Il devrait également servir de boussole aux acteurs institutionnels européens et britanniques dans l’élaboration de la feuille de route commune prévue dans le prolongement du sommet de mai 2025.

3.   Relations commerciales entre l’UE et le Royaume-Uni après le Brexit

3.1.

Les relations commerciales entre l’Union et le Royaume-Uni, les deuxièmes plus importantes au niveau mondial, restent cruciales pour les deux parties. Pour mieux illustrer la proximité des marchés, précisons que le Royaume-Uni continue d’échanger davantage de biens et de services avec l’Allemagne, les Pays-Bas, la France et l’Irlande qu’avec les États-Unis et la Chine combinés (1). Toutefois, l’intensité des échanges entre l’union douanière britannique et l’UE devrait diminuer de 15 % en raison du Brexit (2).

3.2.

L’UE tire profit de son marché unique intégré — auquel s’ajoute un réseau d’accords commerciaux préférentiels avec différents pays — qui fournit un accès à un marché attrayant de 448 millions de consommateurs. Si le Royaume-Uni a cherché à conclure de nouveaux accords commerciaux en dehors de l’UE (Inde, Nouvelle-Zélande) et a adhéré à l’accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), il éprouve toutefois des difficultés à reproduire le volume des accords préférentiels de l’Union, en raison de l’attractivité réduite qu’offre un marché de 68 millions de consommateurs situé en dehors de l’union douanière de l’UE. Par conséquent, les options commerciales de l’Union sont plus positives.

3.3.

Le commerce mondial se reconfigure selon des lignes géopolitiques, à mesure que des économies telles que la Chine et les États-Unis réorientent les modèles commerciaux, faisant peser une incertitude croissante et remettant toujours plus en question l’existence d’un ordre fondé sur des règles. L’UE et le Royaume-Uni doivent gérer ces changements et devraient reconnaître qu’ils étaient tous deux des acteurs commerciaux plus forts avant le Brexit et qu’un alignement plus étroit dans le domaine des échanges commerciaux serait bénéfique pour les deux parties.

3.4.

L’ACC régit désormais les échanges entre l’UE et le Royaume-Uni, en maintenant les échanges en franchise de droits et sans contingent, mais sans les avantages de l’adhésion à l’Union. Les deux parties mettent en œuvre des outils qui modifient la manière dont les marchandises et les personnes franchissent les frontières, ce qui devrait avoir d’importantes incidences opérationnelles et économiques. Le Royaume-Uni a mis en place son modèle opérationnel cible pour les frontières (BTOM), qui prévoit des contrôles fondés sur les risques pour les marchandises importées. L’UE a élaboré son système d’entrée/de sortie (EES) pour les ressortissants de pays tiers, et le Royaume-Uni son équivalent, à savoir l’autorisation de voyage électronique (ETA).

3.5.

Les doubles exigences imposées par l’EES et l’ETA risquent d’accroître la congestion aux principaux points de passage entre l’UE et le Royaume-Uni, qu’il s’agisse de gares ou de ports. De même, elles éloignent davantage les parties d’un système aux caractéristiques communes et ajoutent de nouveaux obstacles aux relations bilatérales.

3.6.

Le réexamen de l’ACC devrait s’accompagner d’analyses coûts-avantages facilement accessibles pour les deux parties. Cela permettrait, idéalement, qu’elles s’engagent conjointement et soient en mesure d’étayer les arguments politiques en examinant l’intérêt de rester sur des trajectoires parallèles. Au-delà des garanties des négociations, il s’agirait de montrer quels seraient les avantages économiques directs — et civiques à long terme — pour les deux parties.

4.   Recalibrage du partenariat stratégique

4.1.

La dynamique est aujourd’hui très favorable à un recalibrage et à une relance des relations bilatérales, en particulier pour rationaliser les relations commerciales, conclure un pacte de sécurité ambitieux, aplanir les divergences actuelles concernant les droits des citoyens et susciter une coopération plus étroite dans d’autres domaines.

4.2.

À la suite des élections de 2024, le Royaume-Uni a appelé de ses vœux un nouveau départ et a convenu d’un commun accord avec l’UE de renforcer la coopération dans des domaines tels que l’économie, l’énergie, la sécurité et la résilience. Le tout premier sommet bilatéral UE-Royaume-Uni, qui s’est tenu le 19 mai à Londres, marque une étape importante dans l’évolution des relations post-Brexit et sur la voie d’un cadre de coopération stratégique clair. Cette évolution, combinée au réexamen de l’ACC en 2026 et aux nouveaux besoins géopolitiques, offre l’occasion d’approfondir et d’améliorer le partenariat entre l’Union et le Royaume-Uni. Compte tenu de l’incidence que certaines décisions futures auront sur le monde du travail, le CESE recommande d’organiser un sommet UE-Royaume-Uni consacré spécifiquement au dialogue social en marge de la réunion des dirigeants, de manière à s’assurer que les partenaires sociaux soient associés aux délibérations.

4.3.

L’ACC permettant des échanges en grande partie en franchise de droits entre l’UE et le Royaume-Uni, une coopération renforcée sur les obstacles non tarifaires offrirait la meilleure occasion qui soit d’améliorer les relations commerciales bilatérales. Il semble opportun de réaligner de manière pragmatique les intérêts ancrés dans des avantages économiques mutuels et des priorités géopolitiques communes, en laissant derrière nous les turbulences immédiates qui ont découlé du Brexit. Si les deux parties ont campé sur des principes essentiels (la souveraineté pour le Royaume-Uni, l’intégrité du marché unique pour l’UE et la préservation de conditions de concurrence globalement équitables), les modifications apportées à l’accord existant devront refléter un nouvel esprit de coopération.

4.4.

L’ACC contient les clauses environnementales et liées au travail les plus innovantes que l’Union ait jamais négociées dans le cadre de ses accords commerciaux: les clauses de non-régression et de conditions de concurrence équitables. Les GCI ont un rôle particulier à jouer à cet égard. Le CESE appelle de ses vœux le respect de normes mutuelles élevées en matière de droits des travailleurs et de droits environnementaux au Royaume-Uni et dans l’UE, et encourage la promotion d’un nivellement par le haut en s’appuyant sur ces clauses. Plus les deux systèmes réglementaires seront proches, moins il y aura de tensions, avec des avancées considérables pour tous et un risque réduit de contentieux dans le cadre de l’ACC.

4.5.

Un ACC mis à jour pourrait offrir à chaque partie des gains politiques concrets. Pour l’UE, il préserverait les règles fondamentales du marché unique et renforcerait la crédibilité de sa politique commerciale extérieure. Pour le Royaume-Uni, l’accord permettrait d’améliorer l’accès au marché européen et de réduire les tensions commerciales. Les deux parties bénéficieraient d’une plus grande prévisibilité, d’une stabilité économique renforcée et d’une capacité accrue à relever des défis communs, que ce soit dans le domaine de la recherche, de la sécurité ou de la politique climatique. Leurs relations avec d’autres partenaires commerciaux importants tels que les États-Unis ne doivent pas porter atteinte aux principes fondamentaux et à la stabilité de l’ACC.

4.6.

L’environnement géopolitique a radicalement changé depuis le référendum sur le Brexit et la conclusion de l’accord de retrait et de l’ACC. Cette situation accentue l’importance cruciale, pour tous nos citoyens, d’une coopération optimale entre l’Union et le Royaume-Uni et d’un degré d’alignement aussi large que possible.

4.7.

Le réexamen prévu offre la possibilité d’un règlement politique pleinement abouti, qui reconnaît la valeur d’un engagement constructif sans nécessiter une intégration politique complète. Dans un contexte mondial marqué par l’incertitude économique, la guerre sur le continent européen et la montée des tensions géopolitiques, un ACC révisé enverrait le signal que le Royaume-Uni et l’UE restent déterminés à travailler ensemble là où les intérêts s’alignent.

4.8.

Le réexamen de l’ACC ne peut pas ignorer le point de vue de la société civile organisée, étant donné que c’est elle qui se trouve sur le terrain pour signaler les cas où l’accord n’a pas porté les fruits escomptés ou doit être amélioré. Une participation plus étroite de la société civile tout au long de ce processus et au-delà peut contribuer à façonner l’avenir des relations entre l’UE et le Royaume-Uni de manière moins politisée. Le CESE estime que les GCI établis par l’ACC sont essentiels pour garantir une représentation équilibrée des intérêts des travailleurs, des entreprises et de la société civile.

5.   Observations spécifiques

Commerce de marchandises

5.1.

Les entreprises doivent pouvoir passer les contrôles douaniers rapidement et sans formalités administratives injustifiées.

5.2.

Droits de douane et contingents: l’ACC permet des échanges en franchise de droits et sans contingents entre l’UE et le Royaume-Uni, à condition que les marchandises respectent les règles d’origine convenues et d’autres exigences administratives introduites du fait que le Royaume-Uni ne fait plus partie du marché intérieur de l’Union. Il est absolument nécessaire de réduire les tensions dans la mise en œuvre de ces exigences administratives dans tout accord révisé, pour peu que l’alignement réglementaire du côté britannique soit suffisant pour permettre des échanges commerciaux entre l’UE et le Royaume-Uni aussi fluides que possible.

5.3.

Obstacles non tarifaires: malgré l’absence de droits de douane, les obstacles non tarifaires (tels que les contrôles douaniers) et les divergences réglementaires ont contribué à une baisse significative des flux commerciaux bilatéraux. Plus la convergence en matière de réglementation entre le Royaume-Uni et l’UE sera étroite, plus il deviendra possible de réduire significativement ces obstacles.

5.4.

Évaluation de la conformité: l’absence de reconnaissance mutuelle entre les deux systèmes accroît la complexité des déclarations de conformité. Un accord dans ce domaine permettrait d’éviter de tester inutilement une seconde fois tous les produits certifiés conformes aux normes de l’UE qui entrent sur le marché britannique, ce qui réduirait les coûts de mise en conformité.

Commerce des services

5.5.

Le commerce des services offre le plus grand potentiel pour ce qui est de développer les relations entre l’UE et le Royaume-Uni après le Brexit.

5.6.

Accès au marché: l’ACC n’offre pas le même niveau d’accès pour les services que pour les marchandises. Le secteur des services financiers a été particulièrement touché par la perte des droits de passeportage, ce qui a nécessité de nouveaux cadres réglementaires pour faciliter les services transfrontières. Dans ce domaine également, plus ces cadres seront alignés, plus le potentiel d’amélioration de l’accès au marché sera important.

5.7.

Commerce électronique: les seuils d’immatriculation à la TVA en vigueur au Royaume-Uni constituent un obstacle non tarifaire qui rend difficile pour les PME de l’UE de vendre directement aux consommateurs britanniques par le biais du commerce électronique.

5.8.

Qualifications professionnelles: il n’existe plus de reconnaissance mutuelle automatique, ce qui crée des obstacles pour les professionnels qui cherchent à travailler de l’autre côté de la frontière entre l’Union et le Royaume-Uni. Il y a lieu de traiter cette question en priorité dans tout accord révisé.

5.9.

Services financiers: le protocole d’accord de 2023 a établi un cadre pour une coopération réglementaire structurée dans le domaine des services financiers qui ne relèvent actuellement pas du champ d’application de l’ACC. Cette possibilité de renforcer la coopération n’est pas pleinement exploitée. Les travaux de coopération devraient être intensifiés, notamment dans le secteur des assurances.

5.10.

Mobilité des prestataires de services: le système britannique de parrainage des visas aujourd’hui imposé aux employeurs rend le recours à des prestataires de services contractuels de l’UE plus cher pour les entités basées au Royaume-Uni. Le Comité appelle instamment de ses vœux une réforme en faveur d’une plus grande mobilité et d’une concurrence loyale entre les prestataires européens et britanniques.

5.11.

Services de transport: si l’incidence opérationnelle des nouveaux outils de gestion des frontières peut varier d’un mode de transport à l’autre, les points de passage frontaliers entre l’UE et le Royaume-Uni et les ports maritimes sont particulièrement vulnérables à la congestion du trafic de voyageurs et aux défis opérationnels. Il convient d’assurer la préparation à l’utilisation des nouveaux outils en organisant des campagnes de sensibilisation de masse pour les passagers et les transporteurs, en prévoyant des essais et des mesures de flexibilité, et en veillant à former le personnel et à mettre à disposition les effectifs nécessaires.

Coopération et normes réglementaires

5.12.

L’ACC permettant des échanges en grande partie en franchise de droits entre l’UE et le Royaume-Uni, une coopération renforcée sur les obstacles non tarifaires constituerait la meilleure occasion qui soit d’améliorer les relations commerciales. Tant que l’Union et le Royaume-Uni poursuivent leurs propres priorités réglementaires, les divergences sont susceptibles de mettre à mal la libre circulation des biens et des services. En tant que telle, la coopération réglementaire est essentielle pour éviter des conséquences involontaires.

5.13.

Divergences: les différences entre les normes réglementaires ont entraîné une augmentation des coûts de mise en conformité pour les entreprises, en particulier dans des secteurs comme ceux des produits chimiques et pharmaceutiques.

5.14.

Conditions de concurrence équitables: l’ACC comprend des dispositions visant à prévenir les avantages concurrentiels déloyaux en veillant à ce que les deux parties maintiennent des normes communes dans des domaines tels que les droits des travailleurs et la protection de l’environnement. Il est essentiel de surveiller et de faire appliquer ces dispositions, étant donné que l’ACC exige également la non-régression par rapport au niveau de protection en vigueur au moment où le Royaume-Uni a quitté l’Union.

5.15.

Droits des consommateurs: si l’ACC encourage la coopération dans une série de domaines, l’application des droits des consommateurs n’en fait pas partie et devrait être incluse à la faveur du réexamen. Il est nécessaire de rendre pleinement opérationnelles les dispositions de l’ACC relatives aux entraves techniques au commerce et de permettre aux autorités de surveillance du marché de protéger conjointement les consommateurs.

Mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS)

5.16.

Renforcement des contrôles et de la certification: l’Union considère désormais le Royaume-Uni comme un pays tiers, ce qui implique de soumettre les produits agroalimentaires à des contrôles sanitaires et phytosanitaires afin d’atténuer les risques en matière de sûreté biologique. Ce changement a donné lieu à des exigences en matière de documentation et à des inspections supplémentaires, sources de retards et de coûts accrus pour les exportateurs. Le CESE se félicite de l’accord conclu lors du sommet entre l’UE et le Royaume-Uni en vue de négocier un accord agroalimentaire visant à réduire de manière significative les certificats et les contrôles liés aux SPS et qui concernent les mouvements d’animaux, de produits d’origine animale, de végétaux et de produits végétaux, et appelle de ses vœux une conclusion rapide. Le respect du principe de précaution demeure une valeur fondamentale de l’UE, comme en témoigne l’exigence posée par l’accord concernant un alignement dynamique en temps utile des réglementations britanniques sur les règles de l’UE.

5.17.

Pénurie de personnel vétérinaire: l’augmentation des exigences en matière de certification SPS a entraîné une hausse de la demande de vétérinaires. Toutefois, la capacité du Royaume-Uni à répondre à cette demande est incertaine, en partie en raison de l’absence de reconnaissance mutuelle des qualifications vétérinaires. Cette situation entrave les flux commerciaux de l’UE vers le Royaume-Uni et retarde considérablement les livraisons dans ce pays d’envois provenant de l’Union.

5.18.

Normes agroalimentaires: les normes en matière de consommation alimentaire en Europe et au Royaume-Uni sont très similaires. Lorsqu’ils traitent avec des partenaires commerciaux tiers, l’UE et le Royaume-Uni devraient éviter tout risque de compromettre les normes et principes mutuels garantis par l’ACC.

Droits des travailleurs

5.19.

Le réexamen de l’ACC doit continuer à offrir un bon accord aux travailleurs des deux parties.

5.20.

Le CESE se félicite de l’adoption de la loi britannique sur les droits en matière d’emploi, qui garantit le respect de normes mutuelles élevées. Toutefois, des éclaircissements sont nécessaires en ce qui concerne le statut des propositions relatives aux frais de justice du travail, aux modifications des droits de consultation collective (prévus par la directive 2001/23/CE sur le maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises), à la pratique dite du «rolled-up holiday pay» (remplacement des congés payés par une indemnité financière) et à l’enregistrement des heures de travail.

5.21.

Au Royaume-Uni, des milliers de travailleurs risquent de perdre ou ont déjà perdu l’accès aux informations et consultations transnationales auxquelles ils avaient droit, dans de nombreux cas, depuis plus de 20 ans. Il n’existe aucune obligation légale de maintenir les représentants du Royaume-Uni au sein des comités d’entreprise européens, mais le réexamen de l’ACC doit se pencher de toute urgence sur les conséquences pratiques de cette situation. La présence des travailleurs dépend de la bonne volonté de la direction et les questions qui ont une incidence sur le Royaume-Uni et un seul État membre ne sont plus considérées comme transnationales, ce qui signifie qu’aucun partage d’informations ni aucune consultation n’a lieu. Rien ne garantit que les activités britanniques entreront dans le champ d’application des futurs comités d’entreprise européens. Compte tenu de l’incidence négative susmentionnée sur ces comités d’entreprise, le CESE encourage la recherche de moyens de faciliter la participation des travailleurs britanniques aux comités d’entreprise européens de manière à renforcer le dialogue social.

5.22.

Le CESE souligne également qu’il importe de prévenir toute perturbation de la vie des travailleurs autour du Campo de Gibraltar et de veiller à ce que les droits des travailleurs de l’UE comme du Royaume-Uni soient protégés.

Des chances pour tous

5.23.

La fin de la libre circulation a rendu les voyages d’affaires, l’employabilité des travailleurs et les échanges de chercheurs, d’étudiants et de jeunes plus compliqués.

5.24.

Affectation temporaire: de nouvelles règles ont un impact sur les secteurs qui dépendent de la mobilité de courte durée et entravent la capacité des ressortissants de l’UE autres que les ressortissants irlandais à travailler et à séjourner au Royaume-Uni.

5.25.

Opportunités professionnelles: le Royaume-Uni a déjà repris sa participation aux programmes Horizon et Copernicus. Il existe également de solides arguments en faveur d’une reprise de la participation au programme Erasmus+, qui soutient aussi la formation professionnelle et l’apprentissage. L’apprentissage devrait répondre à des critères spécifiques de qualité, assortis de conditions décentes. Le Comité demande instamment la création de nouvelles voies pour permettre aux travailleurs, aux chercheurs, aux étudiants et aux apprentis d’améliorer leur employabilité.

5.26.

Échanges de jeunes: il est essentiel que les possibilités créées par Erasmus+ profitent aux jeunes et aux travailleurs, et pas seulement à certains secteurs. Le CESE appelle à supprimer progressivement les obstacles qui empêchent les jeunes travailleurs de saisir de nouvelles possibilités.

5.27.

Non-discrimination: un nombre limité de dispositions de l’ACC, qui concernent notamment la coordination de la sécurité sociale, tiennent compte des préoccupations des personnes handicapées. Une personne ayant des besoins supplémentaires ne peut assurément pas se déplacer et voyager sans une assistance garantie. Il est nécessaire de se pencher sur l’interopérabilité des systèmes européen et britannique de reconnaissance mutuelle du statut de personne handicapée.

Divergences réglementaires

5.28.

C’est inévitable: il existera toujours des divergences législatives entre l’UE et le Royaume-Uni, qu’elles soient dues à l’inertie ou à une action législative d’un côté ou de l’autre. Par conséquent, la Commission européenne devrait mettre en place une unité spécialement chargée d’évaluer les divergences afin d’en assurer le suivi en collaboration avec toutes les parties prenantes.

5.29.

Accès à des informations réglementaires actualisées et à des orientations plus claires, et contacts directs avec les autorités douanières: il convient de mettre en place un portail commun permettant notamment aux PME des deux territoires de bénéficier des conseils proposés. Un tel outil serait également utile pour renforcer la coopération, la communication et la confiance.

5.30.

Normes en matière de bien-être animal: en tant que partenaires partageant les mêmes valeurs, l’UE et le Royaume-Uni ont une occasion unique de coopérer dans les domaines du bien-être animal et de la santé des végétaux, et de contribuer à la lutte contre des problèmes communs tels que l’augmentation de la résistance aux antimicrobiens, la propagation des zoonoses et la perte de biodiversité.

5.31.

Bien que l’ACC reconnaisse le lien entre le bien-être animal et la production alimentaire durable, des différences d’approches réglementaires sont apparues. L’UE a mis en œuvre des normes plus strictes dans des domaines tels que les pesticides, tandis que le Royaume-Uni a fait de même en matière de bien-être animal. Ce genre de divergences rend plus difficile la mise en conformité des entreprises opérant sur les deux marchés.

5.32.

Essais chimiques: l’absence de reconnaissance mutuelle des données d’essais chimiques peut entraîner une duplication des efforts, une augmentation des coûts et, potentiellement, une multiplication des essais sur les animaux au Royaume-Uni.

Irlande du Nord

5.33.

Le protocole a créé des conditions commerciales uniques et consacre l’engagement en faveur de la non-diminution des droits, qui doivent continuer à être respectés.

5.34.

Le cadre de Windsor de 2023, qui ouvre la voie au rétablissement du partage du pouvoir en Irlande du Nord, visait à relever certains défis politiques et économiques, mais sa mise en œuvre et son efficacité restent sujets à controverse au sein de certaines parties de la communauté.

Bruxelles, le 16 juillet 2025.

Le président

du Comité économique et social européen

Oliver RÖPKE


(1)   https://www.gov.uk/government/statistics/trade-and-investment-core-statistics-book/trade-and-investment-core-statistics-book.

(2)  Pour de plus amples informations, veuillez consulter en ligne l’annexe du présent avis: https://www.eesc.europa.eu/sites/default/files/2025-05/Annex-to-REX-600-Opinion.pdf.


ELI: http://data.europa.eu/eli/C/2025/5144/oj

ISSN 1977-0936 (electronic edition)


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