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Document 62016CC0367

Conclusions de l'avocat général M. Y. Bot, présentées le 6 septembre 2017.
Dawid Piotrowski.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le hof van beroep te Brussel.
Renvoi préjudiciel – Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Décision-cadre 2002/584/JAI – Mandat d’arrêt européen – Procédures de remise entre États membres – Motifs de non-exécution obligatoire – Article 3, point 3 – Mineurs – Exigence de vérification de l’âge minimal pour être tenu pénalement responsable ou appréciation au cas par cas des conditions supplémentaires prévues par le droit de l’État membre d’exécution pour pouvoir concrètement poursuivre ou condamner un mineur.
Affaire C-367/16.

Court reports – general – 'Information on unpublished decisions' section

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:636

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 6 septembre 2017 ( 1 )

Affaire C‑367/16

Procédure pénale

contre

Dawid Piotrowski

[demande de décision préjudicielle formée par le hof van beroep te Brussel (cour d’appel de Bruxelles, Belgique)]

« Décision-cadre 2002/584/JAI-Mandat d’arrêt européen-Procédures de remise entre États membres-Motifs de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen-Mineur-Responsabilité pénale-Principe de la “préférence éducative”-Droit des enfants-Article 24, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

1. 

La présente demande de décision préjudicielle, formée par le hof van beroep te Brussel (cour d’appel de Bruxelles, Belgique), s’inscrit dans le cadre de l’exécution en Belgique d’un mandat d’arrêt européen émis le 17 juillet 2014 par les autorités polonaises à l’encontre de M. Dawid Piotrowski, ressortissant polonais résidant en Belgique, aux fins de l’exécution de deux peines d’emprisonnement.

2. 

Plus précisément, dans cette affaire, la Cour est invitée, pour la première fois, à interpréter l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres ( 2 ), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 ( 3 ) (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »). Cette disposition prévoit un motif de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen lorsque la personne faisant l’objet de ce mandat ne peut, en raison de son âge, être tenue pénalement responsable des faits à l’origine dudit mandat selon le droit de l’État membre d’exécution.

3. 

Dans les présentes conclusions, nous expliquerons pourquoi l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584 doit être interprété en ce sens que le motif de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen prévu à cette disposition ne s’applique pas du seul fait que l’auteur de l’infraction à l’encontre duquel a été émis ce mandat est mineur.

4. 

Puis nous indiquerons les raisons pour lesquelles nous considérons que l’article 3, point 3, de cette décision-cadre, lu à la lumière de l’article 24, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 4 ), doit être interprété en ce sens que l’État membre d’exécution peut refuser la remise d’un mineur lorsque ce dernier, compte tenu de son âge au moment de la commission de l’infraction, ne peut se voir appliquer aucune peine en vertu du droit de cet État. En revanche, l’État membre d’exécution devra procéder à la remise du mineur chaque fois que, compte tenu de l’âge au moment de la commission de l’infraction, la peine encourue dans l’État membre d’émission correspond, dans sa nature et dans son ordre de grandeur, à une peine qui aurait également pu être encourue ou prononcée dans l’État membre d’exécution.

5. 

Dans le cas d’un refus de remise du mineur par l’État membre d’exécution, ce dernier devra remplir, à l’égard de ce mineur, les obligations de prise en charge dans le cadre de l’assistance éducative à laquelle il est tenu.

I. Le cadre juridique

A.  Le droit de l’Union

6.

Les considérants 5 à 8 et 10 de la décision-cadre 2002/584 sont rédigés de la manière suivante :

« (5)

L’objectif assigné à l’Union de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice conduit à supprimer l’extradition entre États membres et à la remplacer par un système de remise entre autorités judiciaires. Par ailleurs, l’instauration d’un nouveau système simplifié de remise des personnes condamnées ou soupçonnées, aux fins d’exécution des jugements ou de poursuites, en matière pénale permet de supprimer la complexité et les risques de retard inhérents aux procédures d’extradition actuelles. Aux relations de coopération classiques qui ont prévalu jusqu’ici entre États membres, il convient de substituer un système de libre circulation des décisions judiciaires en matière pénale, tant pré-sentencielles que définitives, dans l’espace de liberté, de sécurité et de justice.

(6)

Le mandat d’arrêt européen prévu par la présente décision-cadre constitue la première concrétisation, dans le domaine du droit pénal, du principe de reconnaissance mutuelle que le Conseil européen a qualifié de “pierre angulaire” de la coopération judiciaire.

(7)

Comme l’objectif de remplacer le système d’extradition multilatéral fondé sur la convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957 ne peut pas être réalisé de manière suffisante par les États membres agissant unilatéralement et peut donc, en raison de sa dimension et de ses effets, être mieux réalisé au niveau de l’Union, le Conseil peut adopter des mesures, conformément au principe de subsidiarité tel que visé à l’article [3 TUE] et à l’article 5 [TUE]. Conformément au principe de proportionnalité, tel que prévu par ce dernier article, la présente décision-cadre n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

(8)

Les décisions relatives à l’exécution du mandat d’arrêt européen doivent faire l’objet de contrôles suffisants, ce qui implique qu’une autorité judiciaire de l’État membre où la personne recherchée a été arrêtée devra prendre la décision de remise de cette dernière.

[...]

(10)

Le mécanisme du mandat d’arrêt européen repose sur un degré de confiance élevé entre les États membres [...] »

7.

Aux termes de l’article 1er de cette décision-cadre, intitulé « Définition du mandat d’arrêt européen et obligation de l’exécuter » :

« 1.   Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté.

2.   Les États membres exécutent tout mandat d’arrêt européen, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre.

3.   La présente décision-cadre ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 [TUE]. »

8.

L’article 3 de ladite décision-cadre énonce les motifs de non‑exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen. Il dispose :

« L’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution (ci-après dénommée “autorité judicaire d’exécution”) refuse l’exécution du mandat d’arrêt européen dans les cas suivants :

[...]

3)

si la personne qui fait l’objet du mandat d’arrêt européen ne peut, en raison de son âge, être tenue pénalement responsable des faits à l’origine de ce mandat selon le droit de l’État membre d’exécution. »

9.

Aux termes de l’article 15 de la décision-cadre 2002/584 :

« 1.   L’autorité judiciaire d’exécution décide, dans les délais et aux conditions définis dans la présente décision-cadre, la remise de la personne.

2.   Si l’autorité judiciaire d’exécution estime que les informations communiquées par l’État membre d’émission sont insuffisantes pour lui permettre de décider la remise, elle demande la fourniture d’urgence des informations complémentaires nécessaires, en particulier en relation avec les articles 3 à 5 et 8, et peut fixer une date limite pour leur réception, en tenant compte de la nécessité de respecter les délais fixés à l’article 17.

3.   L’autorité judiciaire d’émission peut, à tout moment, transmettre toutes les informations additionnelles utiles à l’autorité judiciaire d’exécution. »

B.  Le droit belge

10.

L’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584 a été transposé, en droit belge, par l’article 4, point 3, de la wet betreffende het Europees aanhoudingsbevel (loi relative au mandat d’arrêt européen) du 19 décembre 2003 (ci-après la « loi relative au mandat d’arrêt européen ») ( 5 ). Cette disposition prévoit que l’exécution d’un mandat d’arrêt européen est refusée si la personne qui fait l’objet de ce mandat ne peut encore être, en vertu du droit belge, tenue pénalement responsable des faits à l’origine dudit mandat en raison de son âge.

11.

La juridiction de renvoi précise, à cet effet, que, en droit belge, l’âge de la responsabilité pénale a été fixé à 18 ans. Toutefois, la responsabilité pénale d’un mineur de plus de seize ans peut être engagée si ce dernier a commis des infractions routières ou si le juge de la jeunesse s’est dessaisi à son égard.

12.

En effet, en vertu de l’article 36, point°4, de la wet betreffende de jeugdbescherming, het ten laste nemen van minderjarigen die een als misdrijf omschreven feit hebben gepleegd en het herstel van de door dit feit veroorzaakte schade (loi relative à la protection de la jeunesse, à la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié infraction et à la réparation du dommage causé par ce fait), du8 avril 1965 ( 6 ), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi relative à la protection de la jeunesse »), le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse, Belgique) connaît des réquisitions du ministère public à l’égard des personnes poursuivies du chef d’un fait qualifié d’infraction commis avant l’âge de 18 ans accomplis.

13.

L’article 57 bis, paragraphe 1, de cette loi indique que, si la personne déférée au familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse), en raison d’un fait qualifié d’infraction, était âgée de seize ans ou plus au moment de ce fait et que le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse) estime inadéquate une mesure de garde, de préservation ou d’éducation, ce tribunal peut, par décision motivée, se dessaisir et renvoyer l’affaire au ministère public aux fins de poursuites soit devant une chambre spécifique au sein du familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse), soit devant une cour d’assises, selon l’infraction commise.

14.

Cette disposition prévoit que le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et la jeunesse) peut, cependant, se dessaisir uniquement si l’une des conditions suivantes est remplie, à savoir si la personne concernée a déjà fait l’objet d’une ou de plusieurs mesures visées à l’article 37, paragraphes 2, 2 bis ou 2 ter, de la loi relative à la protection de la jeunesse ou d’une offre restauratrice telle que visée aux articles 37 bis à 37 quinquies de cette loi, ou bien s’il s’agit d’un fait visé aux articles 373, 375, 393 à 397, 400, 401, 417 ter, 417 quater, 471 à 475 du code pénal ou de la tentative de commettre un fait visé aux articles 393 à 397 de ce code.

15.

L’article 57 bis, paragraphe 1, de la loi relative à la protection de la jeunesse prévoit, également, que la motivation du familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse) porte sur la personnalité de la personne concernée et de son entourage, ainsi que sur le degré de maturité de cette personne. Cet article peut être appliqué même si ladite personne a atteint l’âge de 18 ans au moment du jugement. Dans ce cas, celle-ci est assimilée à un mineur.

16.

Conformément à l’article 57 bis, paragraphe 2, de cette loi, le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse) ne peut se dessaisir d’une affaire en application de cet article qu’après avoir fait procéder à une étude sociale et à un examen médico-psychologique. Ce dernier a pour but d’évaluer la situation en fonction de la personnalité de la personne concernée et de son entourage, ainsi que du degré de maturité de la personne concernée. À cet effet, la nature, la fréquence et la gravité des faits qui lui sont reprochés sont prises en considération dans la mesure où elles sont pertinentes pour l’évaluation de sa personnalité.

17.

Sous certaines conditions, le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse) peut se dessaisir d’une affaire sans faire procéder à une étude sociale et/ou sans disposer du rapport de l’examen médico-psychologique.

II. Les faits du litige au principal

18.

Le 17 juillet 2014, le Sąd Okręgowy w Białymstoku (tribunal régional de Białystok, Pologne) a émis un mandat d’arrêt européen à l’encontre de M. Piotrowski, ressortissant polonais, sur le fondement de deux condamnations définitives.

19.

Ainsi, ce tribunal a condamné M. Piotrowski, par un jugement du 15 septembre 2011, à une peine d’emprisonnement de six mois pour avoir commis des faits de vol et, plus précisément, pour le vol d’une bicyclette, et, par un jugement du 10 septembre 2012, à une peine d’emprisonnement de deux ans et six mois pour avoir donné de fausses informations relatives à un attentat grave. Les deux peines prononcées restent intégralement à purger.

20.

Par une ordonnance du 6 juin 2016, l’onderzoekrechter van de Nederlandstalige rechtbank van eerste aanleg Brussel (juge d’instruction du tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles, Belgique) a ordonné la mise en détention de M. Piotrowski aux fins d’exécution du mandat d’arrêt européen et de la remise de ce dernier aux autorités polonaises sur le fondement de la condamnation du 10 septembre 2012. En revanche, par la même ordonnance, ce juge d’instruction a indiqué que le mandat d’arrêt européen ne pouvait pas être exécuté concernant la condamnation du 15 septembre 2011 au motif que M. Piotrowski était mineur à l’époque des faits.

21.

Le 7 juin 2016, le procureur des Konings (procureur du Roi, Belgique) a interjeté appel de cette ordonnance pour ce qui concerne le refus d’exécution du mandat d’arrêt européen relatif à la condamnation prononcée le 15 septembre 2011. Il explique qu’un mineur de plus de seize ans peut faire l’objet d’un mandat d’arrêt européen émis par les autorités belges si le familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse) s’est dessaisi de l’affaire, conformément à la loi relative à la protection de la jeunesse. Dans ce cas, ce dernier apprécie in concreto la situation du mineur afin de déterminer si sa responsabilité pénale peut être engagée et s’il peut faire l’objet de poursuites pénales.

22.

En revanche, il estime que, lorsqu’il s’agit d’exécuter un mandat d’arrêt européen émis par les autorités d’un autre État membre, il n’est pas nécessaire d’effectuer cette appréciation in concreto et que seul doit être pris en compte le critère de l’âge, à savoir déterminer si l’âge de seize ans était atteint au moment des faits. Selon le procureur des Konings (procureur du Roi), à partir de cet âge, la responsabilité pénale est, en effet, possible sans qu’il importe de savoir, dans le cadre du droit de la remise ou de l’extradition, quelles conditions supplémentaires doivent être remplies pour engager des poursuites conformément au droit belge. À cet égard, le procureur des Konings (procureur du Roi) précise que le juge belge est sans juridiction pour statuer sur l’action pénale et ne peut pas davantage imposer à l’autorité qui a émis la demande de remise ou d’extradition des conditions étrangères au droit national de cette autorité.

23.

La juridiction de renvoi, le hof van beroep te Brussel (cour d’appel de Bruxelles), est, en réalité, confrontée à deux jurisprudences contradictoires quant au fait de savoir si un mineur de seize ans peut être remis ou non dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen.

24.

En effet, par un arrêt du 6 février 2013 ( 7 ), la deuxième chambre, section francophone, du Hof van Cassatie (Cour de cassation, Belgique) a jugé, en substance, que, dans la mesure où la procédure de dessaisissement n’est pas applicable à une personne poursuivie par les autorités d’un autre État, cette procédure ne pouvait pas être appliquée dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen qui concerne un mineur. Dès lors, la remise de ce mineur ne peut pas être effectuée.

25.

Cependant, par un arrêt du 11 juin 2013 ( 8 ), le Hof van Cassatie (Cour de cassation), statuant en assemblée plénière, a estimé, en substance, que le principe de reconnaissance mutuelle qui fonde le mandat d’arrêt européen implique que le juge de l’État membre d’exécution ne peut se prononcer sur l’action publique. Dès lors, cela exclut, pour le juge belge, toute appréciation préalable du caractère adéquat d’une mesure de garde, de préservation ou d’éducation quant à l’adoption ou non d’une mesure de dessaisissement du familie- en jeugdrechtbank (tribunal de la famille et de la jeunesse). En conséquence, la remise de la personne âgée de seize ans ou plus au moment de la commission de l’infraction – en l’occurrence il s’agissait d’un meurtre – n’est pas subordonnée à une décision de dessaisissement et cette personne peut donc être tenue pénalement responsable au sens de l’article 4, point°3, de la loi relative au mandat d’arrêt européen.

26.

Confrontée à cette incertitude jurisprudentielle, la juridiction de renvoi a donc décidé de saisir la Cour.

III. Les questions préjudicielles

27.

Éprouvant des doutes quant à l’interprétation qu’il convient de donner de la décision-cadre 2002/584, le hof van beroep te Brussel (cour d’appel de Bruxelles) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Faut-il interpréter l’article 3, point 3, de la décision-cadre [2002/584] en ce sens que seule peut être autorisée la remise de personnes considérées comme majeures en droit de l’État membre d’exécution ou bien la disposition précitée permet-elle également à l’État membre d’exécution d’autoriser la remise de mineurs qui, sur le fondement des règles nationales, peuvent être tenus pénalement responsables à partir d’un âge déterminé (le cas échéant moyennant le respect d’un certain nombre de conditions) ?

2)

Dans l’hypothèse où l’article 3, point 3, de [cette] décision-cadre n’interdirait pas la remise de mineurs, faut-il alors interpréter cette disposition :

a)

en ce sens que l’existence, en droit national, d’une possibilité (théorique) de sanctionner pénalement les mineurs à partir d’un âge déterminé est un critère suffisant pour autoriser la remise (en d’autres termes, qu’il suffit d’une appréciation in abstracto sur le fondement du critère de l’âge à partir duquel une personne peut être tenue pénalement responsable, sans devoir tenir compte d’éventuelles conditions supplémentaires), ou

b)

en ce sens que ni le principe de la reconnaissance mutuelle consacré à l’article 1er, paragraphe 2, de la décision-cadre [2002/584] ni l’article 3, point 3, de [cette] décision-cadre ne s’opposent à ce que l’État membre d’exécution procède à une appréciation in concreto au cas par cas, permettant d’exiger, s’agissant de la personne recherchée dans le cadre de la remise, le respect des mêmes conditions de responsabilité pénale que celles applicables aux nationaux de l’État membre d’exécution, en tenant compte de leur âge au moment des faits et de la nature de l’infraction reprochée, voire d’interventions judiciaires antérieures dans l’État membre d’émission ayant abouti à une mesure de nature éducative, quand bien même ces conditions n’existeraient pas dans l’État membre d’émission ?

3)

Si l’État membre d’exécution peut procéder à une appréciation in concreto, ne convient-il pas alors, pour éviter l’impunité, d’opérer une distinction entre une remise pour l’exercice de poursuites pénales et une remise à des fins d’exécution d’une peine ? »

IV. Notre analyse

28.

D’emblée, il convient d’indiquer que, selon nous, il ne fait aucun doute que le motif de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen prévu à l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584 ne s’applique pas du seul fait que l’auteur de l’infraction à l’encontre duquel a été émis ce mandat est mineur.

29.

En effet, il ressort des travaux préparatoires ayant mené à l’adoption de cette décision-cadre que le législateur de l’Union a précisément pris en compte les situations des personnes mineures en insérant un amendement au cours de la procédure législative prévoyant qu’un État membre pouvait ne pas remettre un mineur à l’encontre duquel a été émis un mandat d’arrêt européen lorsqu’il ne peut pas, en raison de son âge, être tenu pour pénalement responsable selon le droit de l’État membre d’exécution. Plus précisément, le Parlement européen, auteur de cet amendement, a justifié ce dernier en indiquant que « [l]orsque la personne recherchée est considérée comme une personne mineure dans l’État membre d’exécution, cet État membre doit avoir la possibilité de refuser d’exécuter le mandat d’arrêt » ( 9 ).

30.

Ce motif de non-exécution, qui était facultatif à l’origine, est devenu un des motifs de non-exécution obligatoire, formulé aujourd’hui à l’article 3, point 3, de ladite décision-cadre.

31.

Nous ajoutons que l’âge de la responsabilité pénale ne doit pas être confondu avec l’âge de la majorité pénale, qui sont deux notions bien distinctes. Les mineurs peuvent être tenus pénalement responsables des infractions qu’ils commettent. La majorité pénale, elle, est une notion qui définit l’âge à partir duquel une personne est soumise au droit commun de la responsabilité pénale.

32.

Il est donc évident que le législateur de l’Union, en précisant à cette disposition que l’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution refuse de remettre aux autorités de l’État membre d’émission une personne qui « ne peut, en raison de son âge, être tenue pénalement responsable » des faits qu’elle a commis, visait non pas les personnes n’ayant pas encore acquis la majorité pénale, mais bien les mineurs qui ne peuvent pas être tenus pénalement responsables selon le droit de l’État membre d’exécution.

33.

Dès lors, nous estimons que l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584 doit être interprété en ce sens que le motif de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen prévu à cette disposition ne s’applique pas du seul fait que l’auteur de l’infraction à l’encontre duquel a été émis ce mandat est mineur.

34.

Il convient, à présent, de déterminer, ainsi que se le demande, en substance, la juridiction de renvoi, si la notion de « pénalement responsable », au sens de cette disposition, autorise l’État membre d’exécution, aux fins de la remise du mineur à l’État membre d’émission, de procéder à un examen de la situation de ce mineur afin de déterminer si toutes les conditions requises par son droit national pour qu’il soit tenu pénalement responsable sont remplies.

35.

Les questions préjudicielles posées concernent le droit pénal applicable aux mineurs. Il ne peut donc y être répondu qu’en tenant compte des caractères spécifiques de ce droit qui, d’une part, met en jeu les mécanismes classiques de la responsabilité pénale, mais, d’autre part, y introduit des règles qui en modifient fondamentalement le fonctionnement et l’approche.

36.

S’agissant, tout d’abord, des règles classiques du mécanisme de la responsabilité en matière pénale, il convient de rappeler que, pour être reconnu responsable pénalement d’un acte matériel que la loi du lieu où il a été commis a érigé en infraction pénale, l’auteur doit présenter les caractéristiques suivantes :

avoir eu conscience de ce qu’il faisait ;

avoir su que l’acte était interdit, et

avoir voulu néanmoins le commettre.

37.

Ces caractéristiques (conscience, discernement et volonté) s’apprécient concrètement, au cas par cas, et constituent, dans l’observance des règles du procès équitable, la mission des autorités judiciaires d’enquête, d’instruction et de jugement. Il s’agit ici de celles de l’État membre d’émission.

38.

S’agissant, ensuite, des particularités substantielles introduites par le droit des mineurs, il convient d’indiquer en quoi, fondamentalement, elles consistent.

39.

Au vu des règles générales qui gouvernent la notion de responsabilité pénale il apparaît sans peine que leur mise en évidence revêt une difficulté d’autant plus grande que le mineur est jeune. Pour résoudre cette difficulté, certains États membres ont une approche in concreto, telle que nous venons de la décrire aux points 36 et 37 des présentes conclusions, d’autres ont instauré un système qui exclut toute responsabilité pénale au-dessous d’un âge fixé par la loi.

40.

Au regard de la sanction applicable, ensuite, apparaît une différence essentielle avec le droit applicable aux délinquants majeurs qui consiste, en réalité, à introduire une distinction entre responsabilité et punissabilité. Ainsi, un délinquant mineur pourra être reconnu responsable, mais, en raison de son âge, la loi interdira qu’une peine puisse lui être appliquée.

41.

Cette solution, qui peut apparaître comme singulière, voire singulièrement compliquée, est, en fait, la concrétisation d’un des principes fondamentaux qui sous-tendent le droit des mineurs, à savoir le principe de la préférence éducative.

42.

L’apparition de ce principe est la conséquence de l’évolution historique de cette branche du droit pénal, évolution qui s’est accélérée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sous l’effet notamment des théories dites de la « défense sociale » mettant l’accent sur la prévention, l’éducation et la réinsertion.

43.

La particularité du droit pénal des mineurs est aujourd’hui soulignée par de nombreux instruments internationaux auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré. Parmi ceux-ci, nous pouvons citer la convention relative aux droits de l’enfant ( 10 ), ainsi que l’Ensemble de règles minima des Nations unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing) ( 11 ).

44.

L’Union a d’ores et déjà intégré cette spécificité et veille à ce que celle-ci soit intégrée dans toutes les politiques de l’Union. Ainsi, dans le Programme de l’Union européenne en matière de droits de l’enfant ( 12 ), la Commission explique qu’« [a]dapter le système judiciaire aux enfants en Europe est une des actions phare [de ce programme] » et précise que « [l]e placement en détention d’enfants devrait être décidé en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible » ( 13 ). La directive (UE) 2016/800 du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2016, relative à la mise en place de garanties procédurales en faveur des enfants qui sont des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales ( 14 ), met particulièrement en lumière la prise en compte de cette spécificité du droit pénal des mineurs dans le droit de l’Union.

45.

Cette même nécessité a été soulignée par le Conseil de l’Europe dans le rapport « Une justice pénale des mineurs adaptée aux enfants : de la rhétorique à la réalité » ( 15 ). Dans ce rapport, le Conseil de l’Europe se fait encore plus précis et appelle les États membres, notamment, à fixer un âge minimal de la responsabilité pénale à au moins quatorze ans, en définissant un éventail de solutions adaptées aux plus jeunes délinquants pour remplacer les poursuites pénales traditionnelles et à veiller à ce que la détention de mineurs ne soit qu’une mesure de dernier ressort et d’une durée aussi brève que possible, en particulier en mettant au point des mesures et des sanctions alternatives non privatives de liberté en remplacement de la détention provisoire et de l’incarcération après le procès, comme les avertissements ou les blâmes, les mesures éducatives, les amendes, les ordonnances de surveillance, les programmes de formation, etc. Toutes ces recommandations reprennent, en substance, les règles inscrites dans la convention relative aux droits de l’enfant ( 16 ) et dans les Règles de Beijing ( 17 ).

46.

Il ressort de ce qui précède que, en matière de droit pénal des mineurs, la peine n’a qu’un caractère subsidiaire et l’éducatif doit primer. C’est pourquoi l’on parle de « préférence éducative ».

47.

Cette spécificité est si forte que, selon nous, elle se rapporte à la notion de droits fondamentaux. Nous en trouvons l’affirmation à l’article 24, paragraphe 2, de la Charte qui prévoit que « [d]ans tous les actes relatifs aux enfants, qu’ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ».

48.

C’est d’ailleurs cet intérêt supérieur qui justifie et impose que le schéma traditionnel de la réponse du droit pénal soit modifié en fonction de ce qu’impose la prise en compte de l’intérêt de l’enfant en raison de son âge et du but à atteindre, à savoir faire en sorte que l’intervention judiciaire répressive permette d’assurer au maximum sa réinsertion et son éducation.

49.

S’agissant d’une personne humaine dont, en raison de son âge, la personnalité est en formation, la prise en compte de cet intérêt supérieur, qui rejoint d’ailleurs celui de la société tout entière, justifie que des mesures particulières soient prises au regard tant des procédures d’enquête et d’instruction que de jugement et que l’éventail des réponses applicables soit diversifié au point qu’une mesure éducative puisse être prononcée à titre de sanction pénale lorsque la loi le permet.

50.

La loi peut, en effet, l’interdire en estimant que, au-dessous d’un certain âge, la notion même de sanction pénale est inadéquate et que, à l’égard du jeune mineur, la mesure prise ne doit être reçue que dans un cadre purement éducatif et non mélangé à la fois de sanction et d’éducation, ce qui risquerait d’en fausser la signification, de compromettre la participation du mineur à cette mesure et, partant, l’efficacité de celle-ci.

51.

Compte tenu des principes que nous avons rappelés plus haut, il faut, à notre sens, convenir que tout système qui n’établirait aucune différence entre les peines applicables à un délinquant majeur et celles applicables à un délinquant mineur violerait, en réalité, les droits fondamentaux du mineur en question, l’individualisation de la peine – condition nécessaire au jeu du principe de la préférence éducative – étant alors rendue impossible dans la mesure où la liberté d’appréciation du juge se trouverait ici paralysée par la loi elle-même.

52.

En réalité, le droit comparé enseigne que, au moins dans le droit des États membres de l’Union, ces derniers ont mis en vigueur un système qui permet au juge d’assurer cette individualisation par deux approches complémentaires. D’abord, par la diversification des peines que le juge peut prononcer, ensuite, en ne rendant possible de prononcer celles se rapprochant des peines classiques d’emprisonnement ou d’amende qu’à partir de certaines tranches d’âge.

53.

Ainsi, au-dessous d’un certain âge, aucune peine ne peut être prononcée. Au-dessus, pour les infractions commises dans une tranche d’âge immédiatement supérieure, la peine prononcée ne pourra consister qu’en une mesure éducative. Pour la tranche d’âge suivante, les peines normalement encourues, mais considérées comme subsidiaires, compte tenu du principe de préférence éducative, seront de toute façon impérativement minorées et le principe de leur application à un cas précis spécialement motivé. C’est par paliers successifs correspondant à des tranches d’âge successives que le délinquant mineur se rapproche graduellement d’un statut qui est celui de la majorité pénale.

54.

Dans le cadre de cette approche, nous sommes alors dans un domaine dans lequel la référence à l’âge devient cohérente pour tous les États membres. D’un côté, ce domaine laisse à chacun la liberté de choisir le mode selon lequel il entend déterminer la responsabilité pénale des mineurs, mais oblige à reconnaître celui retenu par les autres États membres, et, de l’autre, par référence à la peine encourue ou prononcée, il permet de fixer un critère objectif de correspondance qui déterminera l’acceptation ou le refus de la remise.

55.

Il en résulte que c’est en ce sens que doit s’interpréter l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584. La référence à l’âge qui y est faite concerne l’âge auquel une peine peut être appliquée à un auteur mineur. En effet, il ne saurait être admis que certains États membres, au motif que leur droit national retient une technique d’appréciation au cas par cas de la responsabilité pénale des mineurs par la recherche in concreto de la réunion concomitante des trois critères dégagés aux points 36 et 37 des présentes conclusions, puissent reprendre cette analyse en qualité d’État membre d’exécution. Cela reviendrait, en fait, à restaurer un système d’extradition exigeante nécessitant que l’État membre d’exécution se fasse communiquer l’entier dossier de la poursuite ou de la condamnation et qu’il vérifie qu’il correspond dans tous ses éléments à ceux de sa propre procédure nationale.

56.

Une telle hypothèse serait incompatible avec le principe de la reconnaissance mutuelle. Celle-ci oblige l’État membre d’exécution à accepter l’analyse de l’État membre d’émission concernant la culpabilité, éventuelle en cas de poursuites ou avérée en cas de condamnation prononcée dans l’État membre d’émission. Or, cette décision-cadre est fondée sur le principe de la reconnaissance mutuelle ( 18 ). Elle ne peut donc être interprétée dans un sens qui aboutirait à renier ce principe.

57.

En revanche, le point essentiel demeure de savoir si, en raison de son âge, le mineur peut se voir appliquer une peine. Cette question fondamentale est posée par l’article 3, point 3, de ladite décision-cadre qui, en cas de réponse négative, en fait un motif automatique de refus de remise. Cette disposition assure le respect absolu par tous les États membres d’une des conceptions fondamentales du droit des mineurs. Ce faisant, elle observe les droits fondamentaux découlant, notamment, de l’article 24, paragraphe 2, de la Charte.

58.

Pour être complet, il convient d’ajouter que la nature du droit des mineurs, fondamentalement tourné vers la priorité éducative, fait que la décision de refus de la remise sur la base de l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584 ne saurait aboutir à relâcher purement et simplement « dans la nature » le mineur. Il en résulte, au contraire, dans la logique de la prise en compte de l’intérêt supérieur du mineur, l’obligation de le prendre en charge sous une autre voie, à savoir celle de l’assistance éducative. Cette dernière est un mode de prise en charge et de protection du mineur, dans l’intérêt supérieur de celui-ci, chaque fois que sa santé, sa sécurité et sa moralité sont compromises.

59.

Or, ici, si la question d’une remise se pose, c’est bien parce qu’il s’agit d’une infraction commise dans l’État membre d’émission, infraction que l’irresponsabilité pénale, quelle que soit la définition de cette expression, ne saurait faire disparaître. Il ne saurait, dès lors, être considéré que l’accomplissement d’un acte prohibé, d’une gravité certaine puisqu’il remplissait les critères permettant la délivrance d’un mandat d’arrêt européen, soit considéré comme normal. C’est donc bien une obligation de prise en charge qui pèse ici sur l’État membre d’exécution, au titre, ici encore, des droits fondamentaux de l’enfant. Rappelons-nous, d’ailleurs, qu’il s’agit d’un refus de remise parce que le mineur est trop jeune pour subir une peine, consisterait-elle en une mesure éducative, dans l’État membre d’exécution. L’obligation de prise en charge par cet État n’en est donc que plus prégnante.

60.

Cette interprétation, axée sur la complémentarité des différents aspects du droit des mineurs, nous paraît être de nature à respecter le fondement des règles spécifiques du droit des mineurs qui, au premier chef, exprime la solidarité essentielle entre les générations et les peuples. Nous pensons profondément que le jeu des règles qui permettent la construction de l’espace de liberté, de sécurité et de justice ne saurait être interprété dans un sens contrariant cet idéal, mais, au contraire, le favorisant.

61.

S’agissant du cas présent, la demande de remise s’applique à un mineur pour lequel, en droit belge, le prononcé d’une sanction n’est pas exclu. Cependant, cela nécessiterait, pour les autorités de l’État membre d’exécution, de procéder à un examen de la personnalité du mineur, de ses antécédents et de l’existence ou non de discernement au moment de la commission de l’infraction. Or, ces questions et, notamment, celle de savoir quelle sanction peut être appliquée au mineur en raison de sa personnalité et de son âge se posent aussi dans l’État membre d’émission. La réponse auxdites questions relève donc d’une appréciation qui appartient à la seule juridiction de cet État. Refuser cette solution reviendrait, sous un autre angle, à rejeter le principe de la confiance mutuelle.

62.

Par conséquent, pour l’ensemble des raisons qui précèdent, nous pensons que l’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584, lu à la lumière de l’article 24, paragraphe 2, de la Charte, doit être interprété en ce sens que l’État membre d’exécution peut refuser la remise d’un mineur lorsque ce dernier, compte tenu de son âge au moment de la commission de l’infraction, ne peut se voir appliquer aucune peine en vertu du droit de cet État. En revanche, l’État membre d’exécution devra procéder à la remise du mineur chaque fois que, compte tenu de l’âge au moment de la commission de l’infraction, la peine encourue dans l’État membre d’émission correspond, dans sa nature et dans son ordre de grandeur, à une peine qui aurait également pu être encourue ou prononcée dans l’État membre d’exécution.

63.

Dans le cas d’un refus de remise du mineur par l’État membre d’exécution, ce dernier devra remplir, à l’égard de ce mineur, les obligations de prise en charge dans le cadre de l’assistance éducative à laquelle il est tenu.

V. Conclusion

64.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le hof van beroep te Brussel (cour d’appel de Bruxelles, Belgique) de la manière suivante :

1)

L’article 3, point 3, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI, du 26 février 2009, lu à la lumière de l’article 24, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens que :

le motif de non-exécution obligatoire du mandat d’arrêt européen prévu à cette disposition ne s’applique pas du seul fait que l’auteur de l’infraction à l’encontre duquel a été émis ce mandat est mineur ;

l’État membre d’exécution peut refuser la remise d’un mineur lorsque ce dernier, compte tenu de son âge au moment de la commission de l’infraction, ne peut se voir appliquer aucune peine en vertu du droit de cet État, et

en revanche, l’État membre d’exécution devra procéder à la remise du mineur chaque fois que, compte tenu de l’âge au moment de la commission de l’infraction, la peine encourue dans l’État membre d’émission correspond, dans sa nature et dans son ordre de grandeur, à une peine qui aurait également pu être encourue ou prononcée dans l’État membre d’exécution.

2)

Dans le cas d’un refus de remise du mineur par l’État membre d’exécution, ce dernier devra remplir, à l’égard de ce mineur, les obligations de prise en charge dans le cadre de l’assistance éducative à laquelle il est tenu.


( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) JO 2002, L 190, p. 1.

( 3 ) JO 2009, L 81, p. 24.

( 4 ) Ci-après la « Charte ».

( 5 ) Belgisch Staatsblad,22 décembre 2003, p. 60075.

( 6 ) Belgisch Staatsblad,15 avril 1965, p. 4014.

( 7 ) Arrêt no P.13.0172.F, disponible à l’adresse Internet suivante : http://jure.juridat.just.fgov.be/pdfapp/download_blob?idpdf=F-20130206-3.

( 8 ) Arrêt no P.13.0780.N, disponible à l’adresse Internet suivante : http://jure.juridat.just.fgov.be/pdfapp/download_blob?idpdf=F-20130611-2.

( 9 ) Voir rapport du Parlement européen, du 14 novembre 2001, sur la proposition législative de la Commission de décision-cadre du Conseil relative à la lutte contre le terrorisme (A5-0397/2001, amendement 72), disponible à l’adresse Internet suivante : http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//NONSGML+REPORT+A5-2001-0397+0+DOC+PDF+V0//FR (italique ajouté par nos soins).

( 10 ) Convention adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies dans sa résolution 44/25 du 20 novembre 1989 et entrée en vigueur le 2 septembre 1990.

( 11 ) Adopté par cette même assemblée dans sa résolution 40/33 du 29 novembre 1985.

( 12 ) Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au comité économique et social européen et au comité des régions, COM(2011) 60 final.

( 13 ) Voir p. 6 et suiv. de cette communication.

( 14 ) JO 2016, L 132, p. 1.

( 15 ) Rapport du 19 mai 2014, Doc. 13511.

( 16 ) Voir article 40 de cette convention.

( 17 ) Voir, notamment, article 17 de ces règles.

( 18 ) Voir arrêt du 29 juin 2017, Popławski (C‑579/15, EU:C:2017:503, point 19 et jurisprudence citée).

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