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Document 62014CC0522

Conclusions de l'avocat général M. M. Szpunar, présentées le 26 novembre 2015.
Sparkasse Allgäu contre Finanzamt Kempten.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesfinanzhof.
Renvoi préjudiciel – Liberté d’établissement – Article 49 TFUE – Réglementation d’un État membre imposant aux établissements de crédit l’obligation de communiquer à l’administration fiscale des informations relatives aux actifs de clients décédés, aux fins de la perception de l’impôt sur les successions – Application de cette réglementation aux succursales établies dans un autre État membre dans lequel le secret bancaire interdit, en principe, une telle communication.
Affaire C-522/14.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:786

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 26 novembre 2015 ( 1 )

Affaire C‑522/14

Sparkasse Allgäu

contre

Finanzamt Kempten

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne)]

«Liberté d’établissement — Réglementation d’un État membre imposant aux établissements de crédit l’obligation de communiquer à l’administration fiscale des informations sur les actifs de clients décédés aux fins de la perception de l’impôt sur les successions — Application de cette réglementation aux succursales établies dans un autre État membre où le secret bancaire interdit une telle communication»

Introduction

1.

La liberté d’établissement, qui est l’une des libertés fondamentales du marché unique, permet notamment aux sociétés établies dans l’un des États membres de créer des succursales dans un autre État membre. Cette modalité d’exercice d’une activité économique à l’échelle transfrontalière offre sans conteste de nombreux avantages tant aux entreprises qu’à leurs clients. Elle soulève également des difficultés dues au fait que la succursale étrangère est soumise à la législation de deux États membres: l’État d’origine et l’État d’accueil. Les disparités entre ces deux ordres juridiques peuvent entraîner des restrictions à l’exercice de ladite liberté.

2.

Tel est le cas en l’espèce. Les réglementations allemande et autrichienne, contradictoires, rendent plus difficile – voire impossible – l’exercice de l’activité bancaire transfrontalière au moyen d’une succursale. La Cour est ainsi appelée à dire si cette situation doit être regardée comme une conséquence naturelle de l’absence d’harmonisation des législations des États membres ou comme une restriction à l’exercice de la liberté d’établissement imputable à l’État membre et que celui‑ci doit donc éliminer.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3.

La présente affaire relève du champ d’application de l’article 49 TFUE, lu en combinaison avec l’article 54 TFUE (liberté d’établissement).

4.

En ce qui concerne le secteur bancaire, les règles applicables à l’exercice de la liberté d’établissement ont été définies dans la directive 2006/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et son exercice ( 2 ). Les articles 16, 23, 26, paragraphe 1, et 31 de la directive 2006/48, en particulier, se lisent comme suit:

«Article 16

Un agrément ou un capital de dotation ne peuvent être exigés par les États membres d’accueil en ce qui concerne les succursales d’établissements de crédit agréés dans d’autres États membres […].

[…]

Article 23

Les États membres prévoient que les activités dont la liste figure à l’annexe I peuvent être exercées sur leur territoire, selon les dispositions de l’article 25, de l’article 26, paragraphes 1 à 3, de l’article 28, paragraphes 1 et 2, et des articles 29 à 37, tant au moyen de l’établissement d’une succursale que par voie de prestation de services par tout établissement de crédit agréé et contrôlé par les autorités compétentes d’un autre État membre, sous réserve que ces activités soient couvertes par l’agrément.

[…]

Article 26

1.   Avant que la succursale d’un établissement de crédit ne commence à exercer ses activités, les autorités compétentes de l’État membre d’accueil […] prépar[ent] la surveillance de l’établissement de crédit […] et […] indiqu[ent], le cas échéant, les conditions dans lesquelles, pour des raisons d’intérêt général, ces activités sont exercées dans l’État membre d’accueil.

[…]

Article 31

Les dispositions des articles 29 et 30 n’affectent pas le pouvoir de l’État membre d’accueil de prendre des mesures appropriées pour prévenir ou réprimer les actes sur son territoire qui sont contraires aux dispositions légales qu’il a arrêtées pour des raisons d’intérêt général. Ceci comporte la possibilité d’empêcher un établissement de crédit en infraction de commencer de nouvelles opérations sur son territoire.»

Le droit allemand

5.

Conformément à l’article 33, paragraphe 1, de la loi sur les droits de succession et de donation (Erbschaftsteuer und Schenkungsteuergesetzes, ci-après l’«ErbStG»), toute personne qui a pour activité, à titre professionnel, le dépôt ou la gestion des actifs d’autrui est tenue de déclarer par écrit au centre des impôts en charge des droits de succession les actifs qui sont déposés auprès d’elle et les créances dirigées contre elle qui faisaient partie du patrimoine d’une personne décédée au moment de son décès.

Le droit autrichien

6.

Aux termes de l’article 9, paragraphes 1 et 7, de la loi sur le secteur bancaire (Bankwesengesetz, ci-après la «BWG»), les succursales des établissements de crédit ayant leur siège dans d’autres États membres peuvent exercer une activité en Autriche, tout en étant tenues de respecter un certain nombre de dispositions du droit autrichien, au rang desquelles figure l’article 38 de la BWG.

7.

Ce dernier article, qui instaure ce qu’il est convenu d’appeler le «secret bancaire», dispose que les établissements de crédit, leurs associés, les membres de leurs organes de direction, leurs salariés, de même que les personnes qui travaillent pour eux à un autre titre, ne sont pas autorisés à dévoiler ou à utiliser les secrets qui leur ont été confiés ou auxquels ils ont eu accès exclusivement en raison des relations d’affaires qu’ils entretiennent avec des clients. L’article 38, paragraphe 2, de la BWG énumère les dérogations au secret bancaire, parmi lesquelles ne figure pas d’obligation de déclaration aux autorités fiscales analogue à celle énoncée en droit allemand.

8.

L’article 101 de la BWG prévoit des sanctions pénales en cas de violation du secret bancaire.

Les faits, le déroulement de la procédure et la question préjudicielle

9.

Sparkasse Allgäu est un établissement de crédit au sens de la directive 2006/48 et exerce ses activités en vertu d’un agrément délivré par la République fédérale d’Allemagne. Cet établissement exploite notamment une succursale en Autriche.

10.

Le 25 septembre 2008, le Finanzamt Kempten (centre des impôts de Kempten, l’autorité fiscale allemande compétente) a demandé à Sparkasse Allgäu de fournir les informations requises à l’article 33 de l’ErbStG en ce qui concerne les clients de sa succursale autrichienne résidant en Allemagne, et ce pour la période débutant le 1er janvier 2001.

11.

Sparkasse Allgäu a formé une réclamation contre cette décision, qui a été rejetée, de même que son recours auprès du tribunal de première instance. Dans ces conditions, la requérante au principal a introduit un recours en «Revision» devant la juridiction de renvoi.

12.

Cette juridiction s’interroge sur le point de savoir si la requérante au principal peut contester utilement la décision susmentionnée en se fondant sur l’article 49 TFUE. C’est dans ce contexte que la juridiction de renvoi a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«La liberté d’établissement (article 49 TFUE, ancien article 43 CE) fait‑elle obstacle à la réglementation d’un État membre qui prévoit, pour le cas du décès d’un résident, que l’obligation d’un institut de crédit ayant son siège sur le territoire national de déclarer au Finanzamt (centre des impôts) en charge des droits de succession sur le territoire national porte également sur les actifs du de cujus qui sont déposés ou gérés dans une succursale non indépendante dudit institut de crédit située dans un autre État membre, lorsque ce dernier État membre ne connaît pas d’obligation de déclaration comparable et que les instituts de crédit y sont soumis à un secret bancaire protégé par des sanctions pénales?»

13.

La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 19 novembre 2014. Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal, par les gouvernements allemand, grec et polonais ainsi que par la Commission européenne. En application de l’article 76, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour de justice, cette dernière a décidé de ne pas tenir d’audience de plaidoiries.

Analyse

14.

Selon la juridiction de renvoi, la demande d’informations adressée par le Finanzamt Kempten à Sparkasse Allgäu est conforme au droit allemand. En effet, la succursale étrangère de cette banque n’ayant pas de personnalité juridique propre, elle est soumise à la réglementation allemande de la même manière que le siège de la banque et ses succursales en Allemagne. Par ailleurs, toutefois, les autorités autrichiennes ont mentionné, en application de l’article 26, paragraphe 1, de la directive 2006/48, les dispositions de leur législation nationale relatives au secret bancaire comme faisant partie de celles que doivent respecter les succursales des établissements de crédit d’autres États membres exerçant leurs activités sur le territoire autrichien. Sparkasse Allgäu doit ainsi faire face à deux obligations contradictoires, ce qui est de nature à entraver ou empêcher l’exercice, par l’intéressée, de ses activités en Autriche et, partant, de sa liberté d’établissement.

15.

Par conséquent, il convient de déterminer s’il existe une restriction contraire à l’article 49 TFUE et d’établir si cette restriction découle uniquement du concours des législations de deux États membres ou si ladite restriction est imputable à un seul de ces États. S’il est constaté qu’une telle restriction existe effectivement, il faudra examiner si elle est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général. Je commencerai toutefois par dissiper certains doutes d’ordre factuel émis par la partie défenderesse au principal ainsi que par le gouvernement allemand dans les observations qu’ils ont déposées dans la présente affaire.

Remarque liminaire

16.

Dans leurs observations, le Finanzamt Kempten et le gouvernement allemand remettent en cause l’affirmation de Sparkasse Allgäu selon laquelle le droit autrichien l’aurait empêchée d’exécuter l’obligation qui lui incombait de fournir des informations conformément à l’article 33 de l’ErbStG et selon laquelle l’éventuelle exécution de cette obligation l’aurait exposée à des sanctions pénales. Selon le Finanzamt Kempten et le gouvernement allemand, premièrement, le droit autrichien prévoit la possibilité de transmettre des informations avec l’accord du client et, deuxièmement, le risque de sanction pénale n’existe qu’en cas de violation du secret bancaire afin de se procurer ou de procurer à autrui un avantage financier, ce qui n’est pas le cas lorsque les informations sont communiquées aux autorités fiscales.

17.

Toutefois, dans sa demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi part clairement du principe que Sparkasse Allgäu n’est pas en mesure d’appliquer simultanément le droit allemand et le droit autrichien. À mon sens, cette hypothèse est fondée. D’une part, s’agissant de l’éventuel accord du client, il y a lieu d’indiquer que les informations dont l’article 33 de l’ErbStG exige la communication concernent des personnes décédées qui, par la force des choses, ne peuvent exprimer cet accord. Sparkasse Allgäu ne peut pas non plus exiger à l’avance un tel accord de ses clients et subordonner la prestation de services par sa succursale autrichienne à l’obtention de cet accord, car cela rendrait sans objet les dispositions autrichiennes sur le secret bancaire. D’autre part, pour ce qui est des éventuelles sanctions auxquelles Sparkasse Allgäu s’exposerait en cas de violation du secret bancaire, il suffit d’observer, sans qu’il y ait lieu ici d’interpréter en détail les dispositions pénales autrichiennes, que l’interdiction de fournir des informations, énoncée à l’article 38, paragraphe 1, de la BWG, est formulée de manière catégorique et, sous réserve des exceptions définies au paragraphe 2 dudit article, inconditionnelle. En outre, conformément à l’article 31 de la directive 2006/48, les États membres sont en droit d’appliquer des mesures appropriées pour prévenir ou réprimer toute activité exercée sur leur territoire par des succursales d’établissements de crédit étrangers en violation des dispositions qui s’imposent auxdites succursales, y compris le droit d’interdire tout exercice de cette activité.

18.

À la lumière des constatations de la juridiction de renvoi, Sparkasse Allgäu n’est donc pas en mesure d’exercer ses activités sur le territoire autrichien par l’entremise d’une succursale en respectant simultanément les dispositions du droit allemand relatives à l’obligation de fournir des informations prévue à l’article 33 de l’ErbStG et les dispositions du droit autrichien sur le secret bancaire.

Sur la question de l’existence d’une restriction à la liberté d’établissement

La liberté d’établissement et ses restrictions dans le secteur bancaire

19.

Les établissements de crédit exerçant leurs activités en vertu d’un agrément délivré dans l’un des États membres, comme Sparkasse Allgäu, sont des sociétés au sens de l’article 54, second alinéa, TFUE et bénéficient donc de la liberté d’établissement en vertu de l’article 54, premier alinéa, TFUE.

20.

Conformément à l’article 49, premier alinéa, TFUE, la liberté d’établissement comprend notamment le droit de créer des agences, des succursales et des filiales sur le territoire d’États membres autres que celui du siège ou du lieu de résidence de l’opérateur concerné ( 3 ). En ce qui concerne le secteur bancaire, l’exercice de cette liberté au moyen de l’établissement de succursales n’est que partiellement réglementé par la directive 2006/48. Par conséquent, dans les domaines qui ne sont pas régis par les dispositions de cette directive, il convient d’appliquer les principes généraux relatifs à la liberté d’établissement.

21.

En vertu d’une jurisprudence constante, bien que les dispositions du traité FUE garantissant la liberté d’établissement visent à assurer le bénéfice du traitement national dans l’État membre d’accueil, elles s’opposent également à ce que l’État d’origine entrave l’établissement dans un autre État membre d’un de ses ressortissants ou d’une société constituée en conformité de sa législation ( 4 ).

22.

De plus, la Cour a jugé que doivent être considérées comme des restrictions à la liberté d’établissement toutes les mesures qui interdisent, gênent ou rendent moins attrayant l’exercice de cette liberté, même si elles sont applicables sans discrimination tenant à la nationalité ( 5 ).

23.

L’élément de discrimination ne constitue donc pas une condition nécessaire de la restriction à la liberté d’établissement ( 6 ). Il en est de même des restrictions découlant des dispositions du droit de l’État d’origine. Il est indifférent que ces restrictions trouvent à s’appliquer également aux activités de l’opérateur dans l’État d’origine si, dans le même temps, elles entravent ou empêchent l’exercice par cet opérateur de ses activités dans les autres États membres et, partant, de sa liberté d’établissement ( 7 ).

24.

Conformément à l’article 49, premier alinéa, seconde phrase, TFUE, l’exercice de la liberté d’établissement comprend notamment le choix de la forme juridique sous laquelle l’opérateur concerné entend exercer une activité économique dans l’État membre d’accueil (agence, succursale ou filiale). Les dispositions nationales limitant ce choix ou influençant l’adoption d’une forme juridique au détriment d’une autre constituent donc une restriction à la liberté d’établissement ( 8 ).

25.

Le libre choix de la forme juridique sous laquelle l’opérateur concerné exercera ses activités dans un autre État membre est particulièrement important dans le secteur bancaire. En effet, conformément aux dispositions de la directive 2006/48 (et, actuellement, de la directive 2013/36), l’ouverture, par un établissement de crédit exerçant ses activités en vertu d’un agrément délivré dans un État membre, d’une succursale dans un autre État membre n’est soumise qu’au respect de certaines formalités administratives ( 9 ). En effet, en ce qui concerne les succursales d’établissements de crédit originaires d’autres États membres, le principe de la reconnaissance mutuelle des agréments est applicable ( 10 ). En revanche, pour entreprendre des activités sous la forme d’une filiale, et donc d’une société juridiquement distincte, il est nécessaire d’obtenir un agrément dans l’État membre où ces activités seront exercées ainsi que de respecter les conditions relatives au capital initial et aux qualifications des gestionnaires de la société et de ses actionnaires ou associés ( 11 ). De plus, ce n’est pas un hasard si la directive 2006/48 considère l’ouverture d’une succursale comme la principale modalité d’exercice de la liberté d’établissement par les établissements de crédit ( 12 ).

26.

Pour un établissement de crédit, entreprendre des activités dans un autre État membre sous la forme d’une filiale constitue donc un projet économique d’une tout autre ampleur que l’ouverture d’une succursale dans ce même État membre. En effet, cette opération nécessite des efforts d’organisation incomparablement supérieurs et des ressources financières beaucoup plus importantes. La création d’une filiale, qui est normalement une société indépendante non seulement juridiquement, mais aussi du point de vue financier et organisationnel, exige également le déploiement d’une activité à l’échelle appropriée, permettant le fonctionnement économiquement indépendant de cette société. En revanche, la succursale, qui exerce ses activités en s’appuyant sur l’infrastructure du siège, établi dans l’État membre d’origine, peut fonctionner à une échelle beaucoup plus réduite et sur une partie distincte du marché de l’État membre d’accueil, par exemple, exclusivement dans les régions frontalières.

27.

Il s’ensuit que, dans de nombreux cas dans lesquels la création d’une succursale dans un autre État membre aurait un sens du point de vue économique, la création d’une filiale peut s’avérer non rentable. En d’autres termes, l’opérateur concerné qui n’aura pas la possibilité de créer une succursale dans un autre État membre peut tout simplement renoncer à y entreprendre une activité. Par conséquent, limiter la liberté de choix de la forme juridique et, en particulier, rendre plus difficile la création d’une succursale constitue, dans le secteur bancaire, une restriction beaucoup plus importante à la liberté d’établissement que dans les secteurs moins réglementés. Dans les cas extrêmes, empêcher la création d’une succursale réduit très sensiblement l’attractivité de l’exercice de la liberté d’établissement en général et entraîne donc une violation de la substance même de cette liberté.

L’obligation d’information découlant de l’article 33 de l’ErbStG en tant que restriction à la liberté d’établissement

– Violation du principe du traitement national

28.

Aux termes de l’article 49, second alinéa, TFUE, la «liberté d’établissement comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises […], dans les conditions définies par la législation du pays d’établissement pour ses propres ressortissants» ( 13 ). Autrement dit, l’opérateur bénéficiant de la liberté d’établissement doit avoir la possibilité de concurrencer dans des conditions équivalentes les opérateurs locaux ( 14 ). Il s’ensuit, au premier chef, qu’aucune discrimination – directe ou indirecte – ne peut être exercée dans l’État membre d’accueil à l’encontre d’opérateurs originaires d’autres États membres.

29.

Toutefois, comme je l’ai indiqué au point 21 des présentes conclusions, l’interdiction des restrictions à la liberté d’établissement vise non seulement l’État membre d’accueil, mais aussi celui d’origine. Cela signifie que l’État membre d’origine doit également permettre aux opérateurs établis sur son territoire d’exercer des activités dans les autres États membres dans des conditions équivalentes à celles qui s’appliquent aux opérateurs locaux.

30.

Par conséquent, si les questions relatives à l’organisation de l’opérateur économique, à son enregistrement et à l’agrément peuvent être soumises au droit de l’État membre d’origine, les conditions mêmes de la prestation de services, et donc les relations entre cet opérateur et ses clients, devraient relever de la réglementation de l’État membre d’accueil, comme c’est le cas pour les opérateurs nationaux. En revanche, toute charge administrative supplémentaire, assortie de l’obligation de s’y conformer ( 15 ), imposée en vertu du droit de l’État membre d’origine à des opérateurs bénéficiant de la liberté d’établissement a pour effet de placer ces opérateurs dans une situation de marché plus défavorable que celle des opérateurs nationaux.

31.

À mon sens, l’obligation d’information découlant de l’article 33 de l’ErbStG gêne ou rend moins attrayant l’exercice, par les établissements de crédit allemands, de la liberté d’établissement au moyen de la création d’une succursale, c’est‑à‑dire sous la principale forme prévue par la directive 2006/48.

32.

Il importe peu à cet égard, comme le souligne notamment le gouvernement allemand dans ses observations, que l’obligation en cause vise de manière non discriminatoire aussi bien les succursales de banques allemandes créées et exerçant leurs activités sur le territoire allemand que les succursales de ces banques opérant dans d’autres États membres. En effet, selon la jurisprudence de la Cour, le critère de la discrimination n’est pas déterminant aux fins de l’appréciation de l’existence d’une restriction à la liberté d’établissement ( 16 ).

– La restriction au libre choix de la forme juridique sous laquelle l’activité est exercée

33.

L’obligation de fournir des informations, découlant de l’article 33 de l’ErbStG, vise les succursales d’établissements de crédit allemands exerçant leurs activités dans d’autres États membres. Comme il ressort des explications figurant dans la demande de décision préjudicielle, cette situation résulte du fait que la législation allemande étend à ces succursales l’obligation qui pèse sur les établissements de crédit exerçant leurs activités en Allemagne. A contrario, cette obligation ne vise donc pas les filiales créées dans d’autres États membres par des établissements de crédit allemands.

34.

Une succursale d’une banque allemande exerçant ses activités dans un autre État membre se trouve donc, en raison de l’obligation de fournir des informations qui lui incombe en vertu de l’article 33 de l’ErbStG, dans une situation moins favorable qu’une filiale de cette même banque. Cette obligation, dans la mesure où elle vise également les succursales créées dans d’autres États membres, influe donc sur le choix de la forme juridique sous laquelle les banques allemandes exercent leurs activités dans d’autres États membres, gênant ou rendant moins attrayante la création d’une succursale.

35.

Comme je l’ai rappelé plus haut, en vertu d’une jurisprudence constante, premièrement, l’interdiction des restrictions à la liberté d’établissement vise non seulement l’État membre d’accueil, mais aussi celui d’origine ( 17 ) et, deuxièmement, doivent être considérées comme des restrictions à cette liberté, entre autres, les dispositions qui ont une influence sur le choix de la forme juridique sous laquelle les activités transfrontalières sont exercées, en particulier lorsqu’elles privilégient les filiales au détriment des succursales ( 18 ). Si l’on considère ces principes conjointement, il semble logique de conclure que l’interdiction des restrictions à la liberté d’établissement vise également le traitement moins favorable que l’État membre d’origine accorde aux succursales de ses sociétés établies dans d’autres États membres par rapport aux filiales de ces mêmes sociétés.

– Le concours des dispositions réglementaires allemandes et de la réglementation de l’État d’accueil

36.

Cette situation est aggravée par le fait que, tout au moins dans certains États membres, l’obligation découlant de l’article 33 de l’ErbStG peut s’avérer incompatible avec les dispositions du droit national auxquelles les succursales opérant sur leur territoire et appartenant à des établissements de crédit originaires d’autres États membres, et notamment d’Allemagne, doivent se conformer en vertu de l’article 26, paragraphe 1, de la directive 2006/48. En pareil cas, la création d’une succursale dans ces États membres par des établissements de crédit allemands sera non seulement entravée et rendue moins attrayante, mais tout simplement impossible. Or, étant donné que, comme je l’ai indiqué au point 27 des présentes conclusions, l’impossibilité de choisir la succursale comme modalité d’exercice d’une activité économique est susceptible de priver l’usage de la liberté d’établissement de toute rentabilité économique, la restriction au libre choix de la forme juridique sous laquelle l’activité est exercée peut dissuader totalement les opérateurs concernés de faire usage de la liberté d’établissement.

– Conclusion

37.

L’obligation découlant de l’article 33 de l’ErbStG constitue donc une restriction à la liberté d’établissement, car, premièrement, cette disposition impose aux établissements de crédit allemands exerçant des activités dans d’autres États membres des obligations supplémentaires qui ne résultent pas de la législation de ces États; deuxièmement, elle limite le libre choix de la forme juridique de ces activités en privilégiant les filiales au détriment des succursales et, troisièmement, de manière potentielle mais non hypothétique, comme c’est le cas en l’espèce, elle peut empêcher l’exercice d’activités transfrontalières sous la forme d’une succursale et, de ce fait, rendre l’exercice de la liberté d’établissement non rentable économiquement.

Sur l’applicabilité de la jurisprudence de la Cour relative au concours de dispositions fiscales de différents États membres

38.

Dans leurs observations, le gouvernement allemand et la Commission proposent d’appliquer par analogie à la présente affaire la jurisprudence de la Cour relative au concours de législations de deux États membres en matière de fiscalité directe ( 19 ).

39.

En effet, la Cour a jugé qu’un État membre ne saurait être tenu de prendre en considération, aux fins de l’application de sa propre législation fiscale, les conséquences éventuellement défavorables découlant des particularités d’une réglementation d’un autre État membre applicable à un établissement stable situé sur le territoire dudit État et appartenant à une société dont le siège se trouve sur le territoire du premier État membre ( 20 ). La liberté d’établissement ne saurait donc être comprise en ce sens qu’un État membre soit obligé d’établir ses règles fiscales en fonction de celles d’un autre État membre afin de garantir, dans toutes les situations, une imposition qui efface toute disparité découlant des réglementations fiscales nationales ( 21 ).

40.

En premier lieu toutefois, comme je l’ai indiqué aux points 28 à 35 des présentes conclusions, l’obligation imposée conformément à l’article 33 de l’ErbStG aux succursales de banques allemandes originaires d’autres États membres constitue en elle-même une restriction à la liberté d’établissement. Son éventuelle conjonction avec la législation d’autres États membres ne peut qu’aggraver la situation en empêchant potentiellement tout exercice de cette liberté.

41.

En deuxième lieu, à la différence des affaires portant sur le concours de dispositions des États membres en matière de fiscalité directe ( 22 ), les règles nationales en cause en l’espèce ne concernent pas l’imposition d’un opérateur faisant usage de la liberté d’établissement. Certes, comme le soutient la partie défenderesse au principal dans ses observations, l’article 33 de l’ErbStG vise à faciliter la collecte de l’impôt, mais auprès des clients de la banque ainsi que de leurs ayants droit, et non auprès des banques elles-mêmes. Il en irait de même si les informations fournies en vertu de la disposition en cause concouraient non pas à la collecte de l’impôt mais, par exemple, à la lutte contre le blanchiment de capitaux. De leur côté, les dispositions autrichiennes régissant le secret bancaire ne concernent aucunement l’imposition.

42.

Alors que dans les affaires dont il est question au point précédent, la Cour avait à se prononcer sur des restrictions à la liberté d’établissement résultant de dispositions régissant les relations entre les contribuables et les autorités fiscales compétentes, en l’espèce, les dispositions en cause définissent les conditions d’exercice de l’activité économique, et concernent donc directement les relations entre la société et ses clients. Par conséquent, il n’existe en l’occurrence aucune analogie justifiant que la jurisprudence susmentionnée soit transposée à la présente affaire.

43.

En troisième lieu, les compétences des États membres en matière de fiscalité directe sont fondées sur les principes clairement définis par le droit international et consacrés par la jurisprudence de la Cour. Ces États membres sont notamment compétents pour imposer la totalité des revenus de leurs résidents fiscaux (assujettissement intégral) et, en ce qui concerne les non-résidents, pour imposer les revenus provenant de l’activité exercée sur leur territoire ( 23 ). Il en résulte que la préservation de la répartition du pouvoir d’imposition entre les États membres constitue, selon la jurisprudence de la Cour, l’une des conditions pouvant justifier une restriction aux libertés du marché unique, et notamment à la liberté d’établissement ( 24 ).

44.

À cet égard, les impôts directs relèvent d’un domaine particulier, car ils concernent l’une des compétences souveraines de base des États et l’une des principales sources de leurs recettes budgétaires. À ce jour, le législateur de l’Union n’a pas décidé d’harmoniser ce domaine, de sorte que chaque État membre reste libre d’organiser la prévention des éventuels inconvénients tels que la double imposition par la voie de conventions bilatérales. En l’absence d’une telle harmonisation, il est difficile d’appliquer dans toute leur rigueur, en matière de fiscalité directe, les règles exigeant l’élimination de toutes les restrictions à la liberté d’établissement. En effet, une telle situation aboutirait à remettre en cause les compétences souveraines des États membres ( 25 ).

45.

Les arguments qui précèdent ne sont pas applicables à des dispositions nationales qui, comme je l’ai indiqué au point 42 des présentes conclusions, régissent non pas les relations entre les contribuables et les autorités fiscales, mais les conditions d’exercice de l’activité économique. Dans ce domaine, les États membres se sont engagés, en vertu du traité FUE, à garantir le libre exercice de cette activité dans les situations transfrontalières. Il peut donc être exigé d’eux qu’ils définissent le champ d’application territorial de leurs dispositions nationales de telle façon que celles-ci n’entrent pas en conflit avec les dispositions d’autres États membres.

46.

En quatrième lieu, la présente espèce se distingue des affaires portant sur l’application concurrente des législations de deux États membres en matière de fiscalité directe en raison de la nature des restrictions à la liberté d’établissement qui peuvent découler des dispositions nationales en cause. Un traitement fiscal moins favorable peut évidemment avoir de lourdes conséquences financières pour l’opérateur économique concerné. Néanmoins, cela ne rend pas plus difficile, et a fortiori impossible, l’exercice par cet opérateur d’une activité économique au sens large ou sous une forme juridique déterminée. Ce traitement moins favorable influence tout au plus l’évaluation de la rentabilité de cette activité, mais, à cet égard, le montant de l’impôt n’est qu’un seul élément parmi d’autres, très nombreux, au rang desquels figurent les réalités du marché (le niveau de la demande, la concurrence, les coûts d’exploitation, le niveau des prix), qui jouent normalement un rôle beaucoup plus important. Les divergences entre les systèmes fiscaux des différents États membres ne sont d’ailleurs pas toujours défavorables aux sociétés exerçant leurs activités à l’échelle transfrontalière, puisque ces sociétés se trouvent souvent dans une situation plus favorable que les opérateurs nationaux. En outre, les opérateurs économiques disposent d’une certaine marge qui leur permet de compenser les charges fiscales soit par une réduction des coûts, soit par une hausse des prix. Le traitement fiscal réservé à la société ne constitue donc normalement pas un élément déterminant aux fins de la décision d’entreprendre une activité transfrontalière. Il s’agit plutôt, pour reprendre la formule utilisée par l’avocat général Geelhoed, de «quasi-restrictions» ( 26 ).

47.

Ces quasi-restrictions doivent être distinguées des restrictions réelles telles que celles qui visent les conditions mêmes de l’exercice de l’activité. D’une part, les opérateurs économiques disposent, dans ce cas, d’une marge d’adaptation très faible, voire inexistante. De fait, ils n’ont pas d’autre choix que de s’adapter aux règles en vigueur ou de renoncer à exercer les activités en cause. D’autre part, les dispositions régissant les conditions d’exercice des activités peuvent compliquer celles‑ci à un point tel qu’elles en deviennent, comme en l’espèce, pratiquement impossibles à réaliser ou dénuées de toute rentabilité. C’est pourquoi les restrictions à la liberté d’établissement visant les conditions d’exercice des activités ont une influence beaucoup plus grande sur la décision d’exercer cette liberté que les restrictions à caractère purement fiscal.

48.

Au vu de ce qui précède, j’estime que les règles définies par la Cour dans sa jurisprudence relative à l’application simultanée des législations de deux États membres en matière de fiscalité directe ( 27 ) ne peuvent être considérées comme des règles horizontales qui trouveraient à s’appliquer à tout type de restrictions à la liberté d’établissement. Par conséquent, elles ne peuvent s’appliquer à la présente affaire.

49.

La Commission invoque également à l’appui de son argumentation l’arrêt Hervein e.a. ( 28 ), qui porte sur un autre domaine, à savoir la sécurité sociale. Dans cet arrêt, la Cour a jugé que, compte tenu des disparités des législations de sécurité sociale des États membres, le traité ne garantit pas à un travailleur que l’extension de ses activités dans plus d’un État membre ou leur transfert dans un autre État membre soit neutre en matière de sécurité sociale ( 29 ). Il convient de noter, toutefois, que les cotisations de sécurité sociale sont des prélèvements publics analogues à des impôts directs. Les arguments que j’ai exposés aux points 40 à 47 des présentes conclusions trouvent donc à s’appliquer ici ( 30 ). Par conséquent, dans l’arrêt Hervein e.a. (C‑393/99 et C‑394/99, EU:C:2002:182), la Cour ne plaide pas non plus pour l’extension de l’application des principes dégagés dans la jurisprudence relative à la conjonction de dispositions des États membres en matière de fiscalité directe aux restrictions à la liberté d’établissement visant les conditions d’exercice de l’activité économique.

Les dispositions autrichiennes en tant que restrictions autonomes à la liberté d’établissement

50.

On pourrait éventuellement considérer, comme l’affirment la partie défenderesse au principal et le gouvernement allemand dans leurs observations, que les dispositions autrichiennes en matière de secret bancaire constituent également une restriction à la liberté d’établissement, dans la mesure où elles visent les succursales d’établissements de crédit originaires d’autres États membres et empêchent ces succursales de se conformer aux éventuelles obligations découlant du droit de l’État membre d’origine qui seraient contraires au secret bancaire.

51.

Tel n’est pas l’objet de la présente affaire et je ne développerai donc pas ce point plus longuement. Je me bornerai à observer que les dispositions relatives au secret bancaire représentent effectivement un engagement certain de la part de la banque mais que, dans le même temps, elles peuvent être vues comme bénéfiques par les clients. Si les succursales d’établissements de crédit originaires d’autres États membres devaient être libérées du secret bancaire, elles pourraient donc se trouver dans une situation concurrentielle défavorable par rapport aux banques nationales. Ainsi, en voulant éliminer une restriction à la liberté d’établissement, nous en introduirions une autre. Ce paradoxe confirme, à mon sens, que les restrictions à cette liberté doivent, en l’espèce, plutôt être recherchées du côté des dispositions allemandes.

52.

Toutefois, indépendamment des considérations qui précèdent, même en admettant l’existence d’une restriction parallèle à la liberté d’établissement en droit autrichien, il s’agirait en l’espèce non pas d’une restriction découlant de la conjonction des dispositions allemandes et autrichiennes, mais de deux restrictions indépendantes l’une de l’autre. Je ne pense pas, néanmoins, que l’existence d’une éventuelle restriction à l’une des libertés du marché unique dans l’État d’accueil constitue une raison suffisante pour renoncer à éliminer une telle restriction dans l’État membre d’origine. Même si l’on considérait que, dans la présente affaire, il aurait été préférable pour Sparkasse Allgäu de s’adresser aux juridictions autrichiennes afin de contester la conformité au droit de l’Union de l’applicabilité des dispositions autrichiennes sur le secret commercial à sa succursale autrichienne, ces juridictions auraient pu ne pas retenir ce grief en jugeant que le problème concernait plutôt l’article 33 de l’ErbStG et qu’il appartenait aux juridictions allemandes d’y remédier.

53.

On aboutirait ainsi à une situation paradoxale dans laquelle les restrictions aux libertés du marché unique découlant de la législation de l’État membre d’accueil ou de celle de l’État membre d’origine seraient intégralement éliminées, et ce relativement facilement, alors que les restrictions résultant, simultanément et indépendamment, de la législation de ces deux États membres seraient impossibles à éliminer, puisque l’on ne saurait pas quel est, de ces États membres, celui qui devrait le faire en premier.

Conclusion sur l’existence d’une restriction

54.

À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, je conclus que l’obligation d’information découlant de l’article 33 de l’ErbStG, dans la mesure où elle s’impose également aux succursales d’établissements de crédit allemands situées dans d’autres États membres, doit être regardée comme une restriction à la liberté d’établissement interdite, en principe, à l’article 49 TFUE.

Sur la justification de la restriction

55.

Selon la formule désormais classique consacrée par la jurisprudence de la Cour, la liberté d’établissement ne peut être limitée que si la restriction en cause est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général, si elle est propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et si elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ( 31 ). Il convient dès lors d’examiner si la restriction découlant de l’article 33 de l’ErbStG satisfait à ces conditions.

Sur la discrimination

56.

Cet examen doit être précédé d’une analyse visant à déterminer si les dispositions nationales présentent un caractère discriminatoire. Tant la juridiction de renvoi dans sa décision que le gouvernement allemand dans les observations qu’il a déposées dans la présente affaire affirment que l’article 33 de l’ErbStG ne revêt pas de caractère discriminatoire parce qu’il est applicable sans distinction aux succursales de banques allemandes établies dans d’autres États membres et aux banques qui exercent leurs activités sur le territoire allemand. Toutefois, cette constatation ne clôt pas le débat sur la question de la discrimination. À l’évidence, il ne s’agit pas d’une discrimination directe fondée sur la nationalité, car les situations nationales et transfrontalières sont traitées formellement de la même façon.

57.

La notion de «discrimination» en droit de l’Union ne se limite cependant pas à la discrimination directe. Suivant une formule devenue classique, la discrimination consiste à traiter des situations comparables de manière différente ( 32 ) et à traiter des situations différentes de manière égale ( 33 ), à moins que, dans les deux cas, un tel traitement soit objectivement justifié.

58.

De ce point de vue, la présente affaire, qui concerne des dispositions de l’État membre d’origine régissant les relations entre les succursales étrangères et leurs clients, fait naître des doutes s’articulant autour de trois questions. Premièrement, il faut se demander s’il est justifié de traiter de manière égale les succursales étrangères d’établissements de crédit allemands et les succursales de ces mêmes établissements situées sur le territoire allemand, étant entendu que les succursales étrangères évoluent dans un environnement économique et juridique différent. Deuxièmement, se pose la question de savoir s’il est justifié de traiter de manière différente les succursales étrangères d’établissements de crédit allemands et les établissements de crédit ayant leur siège dans d’autres États membres mais exerçant leurs activités économiques sur les mêmes marchés que ces succursales. Troisièmement, il convient de déterminer s’il est justifié de traiter de manière différente les établissements de crédit allemands opérant dans d’autres États membres sous la forme de succursales et ces mêmes établissements de crédit qui exercent une activité transfrontalière sous la forme de filiales.

59.

À mon sens, ce problème peut être appréhendé de deux façons.

60.

La première approche se fonde sur la situation juridique et organisationnelle particulière de la succursale en tant que modalité juridique de l’exercice d’une activité. La succursale n’a pas de personnalité juridique propre et n’est qu’une entité séparée de la personne juridique qu’est l’établissement principal. Cet établissement, avec toutes ses succursales, qu’elles soient nationales ou étrangères, est, en principe, soumis au droit de l’État membre de son siège social. En d’autres termes, les obligations découlant du droit de l’État membre du siège s’appliquent tout naturellement aussi aux succursales étrangères dudit établissement. Il s’ensuit que ces succursales se trouvent, d’une part, dans une situation objectivement comparable à celle des opérateurs nationaux et, d’autre part, dans une situation objectivement différente de celle des établissements étrangers ainsi que des filiales d’établissements nationaux. Selon cette approche, il serait objectivement justifié de traiter les succursales étrangères d’établissements de crédit allemands situées dans d’autres États membres de la même manière que les opérateurs nationaux et différemment des opérateurs étrangers et des filiales d’opérateurs nationaux.

61.

La seconde approche possible du problème consiste, à mon sens, à prendre en considération la nature économique de la succursale étrangère en tant que l’une des formes possibles de l’exercice d’une activité économique transfrontalière dans le cadre de la liberté d’établissement. Selon cette approche, une succursale étrangère, bien que juridiquement liée à l’État membre du siège de l’établissement principal, est, du point de vue fonctionnel, une entreprise étrangère et doit donc être traitée de la même manière que les autres sociétés étrangères (y compris les filiales étrangères de sociétés nationales). Le lien juridique avec l’État membre du siège (central) de l’établissement principal n’a donc plus la valeur d’un élément objectif de différenciation et ne devient qu’une caractéristique secondaire inapte à justifier un traitement différent. Selon cette approche, traiter les succursales étrangères d’établissements de crédit allemands situées dans d’autres États membres de la même manière que les opérateurs nationaux et différemment des opérateurs étrangers et des filiales d’opérateurs nationaux constitue une réelle discrimination.

62.

Le choix de l’une ou l’autre approche influence, à mon sens, la possibilité de justifier la restriction à la liberté d’établissement découlant de l’article 33 de l’ErbStG.

Sur la justification des dispositions en cause

63.

Dans leurs observations, la juridiction de renvoi et le gouvernement allemand invoquent la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux et le recouvrement effectif des impôts en tant que justification de l’article 33 de l’ErbStG. En effet, cette disposition tend à assurer, premièrement, le contrôle du respect, par l’ayant droit d’un client défunt de la banque, des obligations au titre de l’impôt sur les successions et, deuxièmement, le contrôle du respect, par ce même client, de son vivant, de ses obligations fiscales relatives aux actifs qu’il a déposés auprès d’une banque. Cette justification a été prise en compte dans la jurisprudence de la Cour ( 34 ) tant en ce qui concerne la liberté d’établissement que d’autres libertés du marché unique.

64.

Pour qu’une telle justification soit admise, il faut toutefois qu’elle respecte l’exigence de proportionnalité. À cette fin, les dispositions nationales en cause doivent, d’une part, être propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles poursuivent et, d’autre part, ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ( 35 ). C’est, en définitive, la juridiction de renvoi qui est la plus à même d’apprécier les éléments de fait et, partant, la proportionnalité des dispositions nationales. La Cour peut néanmoins donner à cet égard des indications formulées sur la base du dossier de l’affaire ( 36 ).

– Sur la question de la justification des dispositions litigieuses dans l’hypothèse où l’existence d’une discrimination serait constatée

65.

L’article 33 de l’ErbStG, s’agissant des établissements de crédit autorisés à détenir et à gérer les actifs de résidents allemands en dehors du territoire de l’Allemagne ( 37 ), s’applique uniquement aux succursales de banques allemandes. En revanche, cette disposition ne s’applique ni aux filiales de ces banques ni, pour des raisons évidentes, aux banques d’autres États.

66.

S’il fallait admettre que les succursales étrangères se trouvent dans une situation comparable à celle des sociétés ayant leur siège dans d’autres États membres, rien ne justifierait, à mon sens, la limitation de l’application des dispositions allemandes aux seules succursales. En pareil cas, en effet, la justification d’une restriction à la liberté d’établissement doit se fonder sur des critères objectifs au regard de la disposition qui constitue cette restriction. Or, de ce point de vue, tous les établissements de crédit autorisés à détenir et à gérer les actifs de résidents allemands se trouvent dans une situation comparable, puisque les actifs en question sont soumis de la même manière à l’impôt sur les successions et que le même contrôle effectif du respect de cette obligation fiscale est nécessaire. Par conséquent, si la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux peut justifier que soient imposées à ces opérateurs des exigences supplémentaires telles que l’obligation de communiquer des informations aux autorités fiscales, le traitement différent, à cet égard, des succursales exigerait une justification distincte, laquelle, toutefois, n’existe pas.

67.

Le lien d’une succursale étrangère avec l’ordre juridique de l’État membre d’origine constitue, dans cette optique, un facteur secondaire qui ne justifie pas que soient imposées à de telles succursales des obligations touchant aux conditions de la prestation de services par ces succursales. L’État membre d’origine doit donc s’abstenir d’imposer de telles obligations.

– Sur la possible justification des dispositions litigieuses dans l’hypothèse où la situation particulière des succursales serait reconnue

68.

J’estime toutefois qu’il est préférable de retenir la thèse selon laquelle les succursales d’établissements de crédit opérant dans des États membres autres que celui du siège de la société se trouvent, en raison du lien particulier qu’elles entretiennent avec l’ordre juridique de l’État membre d’origine, dans une situation différente de celle des établissements de crédit étrangers. Ce lien particulier justifie l’extension de certaines obligations qui pèsent sur les banques nationales à leurs succursales étrangères, même si les opérateurs étrangers ne sont pas soumis auxdites obligations. Il en va d’autant plus ainsi lorsque l’obligation en cause vise, comme en l’espèce, uniquement les relations entre la succursale étrangère et les clients résidant dans l’État membre d’origine. En effet, il est plus simple, pour ces résidents, d’ouvrir un compte dans une succursale étrangère d’une banque nationale que dans une banque étrangère. En pareil cas, la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux justifie une restriction à la liberté d’établissement, à condition que celle‑ci soit propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

69.

À mon sens, l’obligation de fournir des informations est à même d’assurer la réalisation de l’objectif consistant à garantir l’efficacité des contrôles fiscaux. Les informations obtenues de la banque permettent en effet aux autorités fiscales de vérifier les données qui leur sont fournies par les contribuables dans les déclarations fiscales. En outre, lorsque le contribuable ne respecte pas l’obligation de déposer une telle déclaration, ces informations permettent aux autorités fiscales de constater l’existence d’un fait générateur de l’impôt et d’adopter des mesures visant à recouvrer l’impôt dû.

70.

Je considère également que les dispositions allemandes en cause ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire. Premièrement, en effet, les autorités fiscales ne peuvent pas obtenir ces informations de manière aussi fiable et complète auprès d’autres sources. La vérification de l’exactitude des données figurant dans les déclarations fiscales serait donc beaucoup plus difficile.

71.

Deuxièmement, il convient de souligner que, dans la décision faisant l’objet de la procédure au principal, la demande de communication d’informations adressée à la succursale étrangère de Sparkasse Allgäu était limitée aux informations relatives aux clients de ladite succursale résidant en Allemagne. Je considère que cet aspect revêt une importance fondamentale. En effet, bien que l’obligation fiscale au titre de l’impôt sur les successions ait une portée un peu plus large ( 38 ), en pratique, elle vise indiscutablement, au premier chef, les successions de résidents allemands. Ainsi, si les autorités allemandes avaient demandé des informations relatives à tous les clients des succursales étrangères de banques allemandes, comme c’est le cas pour les succursales nationales, cela aurait constitué pour les succursales étrangères un obstacle important à l’exercice de leurs activités. En limitant la demande à des informations relatives aux résidents allemands, les autorités allemandes ont donc pris la mesure la moins contraignante au regard de la liberté d’établissement. Dès lors, les succursales d’établissements de crédit allemands situées dans d’autres États membres peuvent, à l’égard des clients qui ne résident pas en Allemagne, exercer leurs activités exactement dans les mêmes conditions que les banques locales.

72.

Par conséquent, j’estime que l’article 33 de l’ErbStG est proportionné à l’objectif qu’il poursuit et que, de ce fait, la restriction à la liberté d’établissement qui découle de cette disposition peut être considérée comme justifiée.

– Le problème relatif au secret bancaire en vigueur en Autriche

73.

J’ai bien évidemment conscience des imperfections d’une telle solution au regard de la nécessité de garantir la liberté d’établissement. Il est difficile en effet d’ignorer que si la juridiction de renvoi, sur la base de l’arrêt de la Cour, devait considérer l’article 33 de l’ErbStG comme compatible avec le droit de l’Union et, par conséquent, confirmer la décision faisant l’objet de la procédure au principal, cela ne résoudrait en rien les problèmes que Sparkasse Allgäu doit affronter. Cette banque continuerait en effet à faire face à deux obligations juridiques contradictoires. Il en va d’autant plus ainsi que la demande des autorités fiscales allemandes vise la communication d’informations relatives à des années antérieures et se rapportant donc à des clients décédés qui ne sont plus en mesure, notamment, de donner leur accord à la communication de ces informations.

74.

En pareil cas, les principes de coopération loyale et de primauté du droit de l’Union exigeraient à mon sens de la part des autorités autrichiennes une interprétation des dispositions sur le secret bancaire, ou une limitation de leur application, qui permettraient aux succursales d’établissements de crédit allemands opérant sur le territoire autrichien de communiquer les informations visées à l’article 33 de l’ErbStG ( 39 ). Cette solution vaut, à l’évidence, uniquement pour l’obligation de communication desdites informations dans la mesure où elle est compatible avec le droit de l’Union et donc, notamment, limitée au strict nécessaire.

Conclusion

75.

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances):

L’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne fait pas obstacle à la réglementation d’un État membre qui impose aux succursales d’établissements de crédit nationaux situées dans d’autres États membres l’obligation de déclarer aux autorités fiscales nationales les actifs déposés auprès de ces succursales, en cas de décès du propriétaire desdits actifs résidant dans le premier de ces États membres, sous réserve que cette obligation n’aille pas au‑delà de ce qui est strictement nécessaire pour garantir l’efficacité des contrôles fiscaux.


( 1 ) Langue originale: le polonais.

( 2 ) JO L 177, p. 1. Cette directive était en vigueur au moment de l’adoption de la décision en cause au principal. Elle a été remplacée par la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d’investissement, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO L 176, p. 338).

( 3 ) Voir notamment arrêt récent Verder LabTec, C‑657/13, EU:C:2015:331, point 32.

( 4 ) Voir, en particulier, arrêts Daily Mail and General Trust, 81/87, EU:C:1988:456, point 16, et Verder LabTec, C‑657/13, EU:C:2015:331, point 33.

( 5 ) Voir notamment arrêts Kraus, C‑19/92, EU:C:1993:125, point 32; Attanasio Group, C‑384/08, EU:C:2010:133, point 43, et Verder LabTec, C‑657/13, EU:C:2015:331, point 34.

( 6 ) Voir également, entre autres, Barnard, C., The Substantive Law of the EU. The Four Freedoms, 4e éd., Oxford University Press, 2013, p. 309 et suiv., ainsi que Szwarc‑Kuczer, M., «Komentarz do art. 49 TFUE», dans Wróbel, A. (sous la direction de), Traktat o funkcjonowaniu Unii Europejskiej. Komentarz Lex, Varsovie, 2012, tome 1, p. 866, à la page 867.

( 7 ) Voir, par analogie, s’agissant de la libre prestation de services, arrêt Alpine Investments, C‑384/93, EU:C:1995:126, points 32 à 38.

( 8 ) Voir en ce sens, entre autres, arrêts Commission/France, 270/83, EU:C:1986:37, point 22, et Philips Electronics UK, C‑18/11, EU:C:2012:532, point 13.

( 9 ) Voir articles 25 et 26 de la directive 2006/48.

( 10 ) Voir considérant 7 et article 16 de la directive 2006/48.

( 11 ) Voir articles 6 à 12 de la directive 2006/48.

( 12 ) La directive 2006/48 réglemente la création de succursales sous le titre III («Dispositions relatives au libre établissement et à la libre prestation de services»), section 3 («Exercice du droit d’établissement») (articles 25 à 27).

( 13 ) Mise en italique par mes soins.

( 14 ) Voir, en ce sens, arrêts Commission/Italie, C‑565/08, EU:C:2011:188, point 51, et SC Volksbank România, C‑602/10, EU:C:2012:443, point 80.

( 15 ) La juridiction de renvoi n’indique pas les sanctions qu’entraîne concrètement le non‑respect de l’obligation découlant de l’article 33 de l’ErbStG. Toutefois, il ne fait aucun doute qu’un opérateur économique, en particulier lorsqu’il exerce ses activités dans un secteur aussi fortement réglementé que le secteur bancaire, ne peut se permettre de se soustraire aux obligations que la loi lui impose à l’égard des autorités administratives.

( 16 ) Voir point 23 des présentes conclusions.

( 17 ) Voir point 21 des présentes conclusions.

( 18 ) Voir point 24 et jurisprudence citée des présentes conclusions.

( 19 ) Voir notamment arrêts Columbus Container Services, C‑298/05, EU:C:2007:754; Krankenheim Ruhesitz am Wannsee-Seniorenheimstatt, C‑157/07, EU:C:2008:588, et National Grid Indus, C‑371/10, EU:C:2011:785.

( 20 ) Arrêt Krankenheim Ruhesitz am Wannsee-Seniorenheimstatt, C‑157/07, EU:C:2008:588, point 49.

( 21 ) Voir notamment arrêt National Grid Indus, C‑371/10, EU:C:2011:785, point 62.

( 22 ) Voir note en bas de page 19 ci‑dessus.

( 23 ) Voir, entre autres, arrêt Marks & Spencer, C‑446/03, EU:C:2005:763, point 39.

( 24 ) Voir, en particulier, arrêt National Grid Indus, C‑371/10, EU:C:2011:785, point 45.

( 25 ) Voir, à cet égard, les réflexions particulièrement intéressantes développées dans Barnard, C., op. cit., p. 347 à 349.

( 26 ) Voir points 37 à 40 des conclusions que l’avocat général Geelhoed a présentées dans l’affaire Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation, C‑374/04, EU:C:2006:139.

( 27 ) Voir note en bas de page 19 ci‑dessus.

( 28 ) C‑393/99 et C‑394/99, EU:C:2002:182.

( 29 ) Ibidem, point 51.

( 30 ) L’avocat général Geelhoed a également souligné cette analogie à la note en bas de page 42 des conclusions qu’il a présentées dans l’affaire Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation, C‑374/04, EU:C:2006:139.

( 31 ) Voir, en particulier, arrêts Gebhard, C‑55/94, EU:C:1995:411, point 37, et Commission/Allemagne, C‑591/13, EU:C:2015:230, point 63.

( 32 ) Voir, entre autres, arrêt Ruckdeschel e.a., 117/76 et 16/77, EU:C:1977:160, point 7.

( 33 ) Voir, en particulier, arrêt Sermide, 106/83, EU:C:1984:394, point 28.

( 34 ) Voir, entre autres, arrêts Futura Participations et Singer, C‑250/95, EU:C:1997:239, point 31, ainsi qu’Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company,C‑190/12, EU:C:2014:249, point 71.

( 35 ) Voir point 55 et jurisprudence citée des présentes conclusions.

( 36 ) Voir point 80 et jurisprudence citée des conclusions que j’ai présentées dans les affaires jointes Trijber et Harmsen, C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:505.

( 37 ) Conformément à l’article 33, paragraphe 1, de l’ErbStG, l’obligation de communiquer des informations vise toute personne soumise à la législation allemande qui a pour activité, à titre professionnel, le dépôt ou la gestion des actifs d’autrui, et non pas seulement les succursales étrangères. La restriction à la liberté d’établissement résulte toutefois non pas de cette disposition en tant que telle, mais uniquement de son application aux succursales d’établissements de crédit allemands situées dans d’autres États membres. Cette disposition, dans la mesure où elle s’applique aux banques allemandes qui opèrent en Allemagne, ne fait pas l’objet de la présente affaire.

( 38 ) Ainsi qu’il ressort des informations figurant dans la demande de décision préjudicielle, les droits de succession au titre de l’ErbStG deviennent exigibles pour l’ensemble de la dévolution successorale lorsque le de cujus, au moment de son décès, avait la qualité de résident en Allemagne ou lorsque l’héritier, à la date du fait générateur des droits (il s’agit probablement du moment de l’acquisition de la succession), a une telle qualité. Sont considérées comme des résidents les personnes physiques qui ont un domicile sur le territoire allemand ou qui y séjournent habituellement, ainsi que les ressortissants allemands qui n’ont pas séjourné de manière permanente plus de cinq ans à l’étranger (article 2, paragraphe 1, point 1, de l’ErbStG).

( 39 ) Voir, par analogie, arrêt Hervein e.a., C‑393/99 et C‑394/99, EU:C:2002:182, point 63.

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