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Document 62001TO0184(02)

Ordonnance du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 10 mars 2005.
IMS Health, Inc. contre Commission des Communautés européennes.
Recours en annulation - Sursis à exécution puis abrogation de la décision attaquée en cours d'instance - Non-lieu à statuer.
Affaire T-184/01.

Recueil de jurisprudence 2005 II-00817

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2005:95

Ordonnance du Tribunal

Affaire T-184/01

IMS Health, Inc.

contre

Commission des Communautés européennes

« Recours en annulation — Sursis à exécution puis abrogation de la décision attaquée en cours d’instance — Non-lieu à statuer »

Ordonnance du Tribunal (cinquième chambre) du 10 mars 2005 

Sommaire de l’ordonnance

1.     Recours en annulation — Recours dirigé contre une décision ayant fait l’objet successivement d’un sursis à exécution et d’une abrogation en cours d’instance — Disparition de tout effet juridique préjudiciable au requérant — Recours devenu sans objet — Non-lieu à statuer

(Art. 230 CE)

2.     Procédure — Dépens — Non-lieu à statuer — Recours devenu sans objet du fait de l’abrogation de la décision attaquée — Modification des circonstances ayant présidé à l’adoption de cette décision — Prise en charge par chaque partie de ses propres dépens

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 87, § 6)

1.     La partie requérante peut conserver un intérêt à voir annuler un acte abrogé en cours d’instance si l’annulation de cet acte est susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques.

Lorsqu’il a été sursis à l’exécution de la décision attaquée, celle-ci n’a pas pu produire d’effets juridiques entre le moment où il a été sursis à son exécution et l’entrée en vigueur de la décision qui l’abroge, de sorte que, faute que subsistent des effets préjudiciables à la requérante pour la période précédant le sursis, le recours est devenu sans objet, avec la conséquence qu’il y a lieu de prononcer un non-lieu à statuer.

(cf. points 38, 40-41, 47, 49)

2.     Dans un cas où la Commission a abrogé, en cours d’instance, une décision relative à une procédure d’application de l’article 82 CE en raison de la modification des circonstances ayant présidé à l’adoption de celle-ci, à savoir l’état de la concurrence, et où ni la décision d’abrogation ni les pièces versées au dossier ne permettent de considérer que la Commission a admis que cette décision était entachée d’illégalité au regard des griefs soulevés par la partie requérante, une juste appréciation des circonstances commande que chaque partie supporte ses propres dépens.

(cf. points 53, 55)




ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
10 mars 2005(1)

« Recours en annulation – Sursis à exécution puis abrogation de la décision attaquée en cours d'instance – Non-lieu à statuer »

Dans l'affaire T-184/01,

IMS Health, Inc., établie à Fairfield, Connecticut (États-Unis), représentée par MM. N. Levy, J. Temple-Lang, solicitors, et R. O'Donoghue, barrister,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. A. Whelan, É. Gippini Fournier et Mme F. Siredey-Garnier, puis par M. Whelan, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenue parNDC Health Corp., anciennement National Data Corp., établie à Atlanta, Géorgie (États-Unis), représentée initialement par MM. I. Forrester, QC, F. Fine, solicitor, Mes C. Price et A. Gagliardi, avocats, puis par Mes Price, J. Bourgeois, avocats, et M. Fine, enfin par M. Fine,parNDC Health GmbH & Co. KG, établie à Bad Camberg (Allemagne), représentée initialement par MM. I. Forrester, QC, F. Fine et M. Powell, solicitors, Mes C. Price et A. Gagliardi, avocats, puis par M. Fine, Mes Price et J. Bourgeois, avocats, enfin par M. Fine, et parAzyX Deutschland GmbH Geopharma Information Services, établie à Neu-Isenburg (Allemagne), représentée initialement par Mes G. Vandersanden, L. Levi et D. Dugois, avocats, puis par Mes Vandersanden et Levi,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 2002/165/CE de la Commission, du 3 juillet 2001, relative à une procédure d'application de l'article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO 2002, L 59, p. 18),



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),



composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse et D. Šváby, juges,

greffier : M. H. Jung,

rend la présente



Ordonnance




Antécédents du litige

1
IMS Health, Inc. (ci-après « IMS »), société de droit américain, offre dans plusieurs pays des services d’information aux entreprises des secteurs des produits pharmaceutiques et des soins de santé.

2
En Allemagne, IMS exerce ses activités par l’intermédiaire de sa filiale IMS Health GmbH & Co. OHG. Elle fournit aux laboratoires pharmaceutiques intéressés un service de données relatives aux ventes régionales. Ce service est fondé sur une structure modulaire dénommée « structure à 1 860 modules », qui correspond à un découpage du territoire allemand en 1 860 zones géographiques servant à l’établissement de données sur les ventes de médicaments.

3
Considérant que certaines sociétés – en l’occurrence Pharma Intranet Information AG (ci-après « PII ») et AzyX Deutschland GmbH Geopharma Information Services (ci-après « AzyX ») – utilisaient des reproductions de la structure à 1 860 modules, IMS a intenté des procédures judiciaires pour atteinte à son droit d’auteur devant le Landgericht Frankfurt-am-Main (ci-après le « Landgericht Frankfurt »). Ces procédures ont été engagées le 26 mai 2000 à l’encontre de PII et le 22 décembre 2000 à l’encontre d’AzyX.

4
Par ordonnance du 12 octobre 2000, le Landgericht Frankfurt a interdit à PII d’utiliser la structure à 1 860 modules. Par ordonnance du 27 octobre 2000, confirmée par jugement du 16 novembre 2000, le Landgericht Frankfurt a interdit à PII d’utiliser aussi les structures à 2 847 ou à 3 000 modules, ou tout autre structure de ce type dérivée de la structure à 1 860 modules. L’ordonnance du 12 octobre 2000 et le jugement du 16 novembre 2000 ont été confirmés respectivement les 17 septembre 2002 et 19 juin 2001, par l’Oberlandesgericht Frankfurt-am-Main (ci-après l’« Oberlandesgericht Frankfurt »).

5
Après l’acquisition de PII par NDC Health Corp. (anciennement National Data Corp.), société de droit américain (ci-après « NDC ») qui exerce désormais ses activités en Allemagne par l’intermédiaire de sa filiale NDC Health GmbH & Co. KG, la même interdiction a été faite à NDC par ordonnance du 28 décembre 2000 du Landgericht Frankfurt, confirmée par jugement du 12 juillet 2001.

6
Par ordonnance du 28 décembre 2000, le Landgericht Frankfurt a également interdit à AzyX de fournir, de mettre sur le marché ou de proposer des données fondées sur la structure à 1 860 modules. Le Landgericht Frankfurt a confirmé cette ordonnance par jugement rendu le 15 février 2001.

7
Parallèlement à ces procédures judiciaires, NDC et AzyX ont demandé une licence à IMS en vue de l’utilisation de la structure à 1 860 modules, en contrepartie d’une redevance. IMS a refusé d’accéder à ces demandes, respectivement les 28 novembre 2000 et 28 mai 2001.

8
C’est dans ce contexte que NDC a introduit une plainte, le 19 décembre 2000, auprès de la Commission, sur le fondement de l’article 82 CE.

9
Le 3 juillet 2001, à la suite de cette plainte, la Commission a adopté la décision 2002/165/CE relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO 2002, L 59, p. 18, ci-après la « décision attaquée »).

10
Dans cette décision, la Commission a conclu qu’il existait une présomption de comportement abusif, au sens de l’article 82 CE, dans la mesure où IMS refusait de concéder une licence d’utilisation de la structure à 1 860 modules. Par ailleurs, la Commission concluait à une probabilité de préjudice grave et irréparable pour l’intérêt général. Elle a relevé à cet égard que les concurrents d’IMS, à savoir NDC et AzyX, risquaient de se retirer du marché allemand si des licences ne leur étaient pas concédées.

11
Pour ces raisons, la Commission a décidé d’adopter des mesures provisoires prenant la forme d’une injonction adressée à IMS d’accorder sans délai et sur une base non discriminatoire, à toutes les entreprises présentes sur le marché des services de fourniture de données sur les ventes régionales en Allemagne, une licence d’utilisation de la structure à 1 860 modules.


Procédure et conclusions des parties

12
Le 6 août 2001, IMS a introduit, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, un recours en annulation contre la décision attaquée.

13
Par acte séparé déposé le même jour au greffe du Tribunal, IMS a également demandé, en vertu des articles 242 CE et 243 CE, que soit ordonné le sursis à l’exécution de la décision attaquée tant que le Tribunal n’aurait pas statué sur le recours au principal.

14
Par ordonnance du 10 août 2001, adoptée en vertu de l’article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, le juge des référés a suspendu à titre conservatoire l’exécution de la décision attaquée jusqu’à ce qu’il soit statué sur la demande de mesures provisoires (ordonnance du président du Tribunal du 10 août 2001, IMS Health/Commission, T‑184/01 R, Rec. p. II‑2349).

15
Par ordonnance du 26 octobre 2001, le président du Tribunal a suspendu l’exécution de la décision attaquée (ordonnance du président du Tribunal du 26 octobre 2001, IMS Health/Commission, T‑184/01 R, Rec. p. II‑3193). Sur pourvoi de NDC, cette ordonnance a été confirmée par ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2002, NDC Health/IMS Health et Commission [C‑481/01 P(R), Rec. p. I‑3401].

16
Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 5 février 2002, AzyX, NDC et NDC Health GmbH & Co. KG ont été admises à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

17
Par ordonnance du 26 septembre 2002, le président de la troisième chambre du Tribunal a suspendu la procédure dans la présente affaire jusqu’à ce que la Cour statue sur les questions préjudicielles relatives à l’interprétation de l’article 82 CE posées par le Landgericht Frankfurt, dans le cadre des procédures judiciaires pendantes en Allemagne et opposant IMS à NDC.

18
Le 13 août 2003, la Commission a adopté la décision 2003/741/CE relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP D3/38.044 – NDC Health/IMS Health : mesures provisoires) (JO L 268, p. 69, ci‑après la « décision du 13 août 2003 »), par laquelle elle a retiré la décision attaquée.

19
Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 16 septembre 2003, la Commission a demandé au Tribunal de constater qu’il n’y a plus lieu de statuer dans la présente affaire et a fourni, à l’appui de sa demande, une copie de la décision du 13 août 2003. La Commission demandait également la condamnation de chaque partie à supporter ses propres dépens.

20
Les parties ont été invitées à se prononcer par écrit sur la question de savoir s’il y avait toujours lieu de statuer dans la présente affaire.

21
Dans ses observations sur la demande de non-lieu à statuer, déposées au greffe du Tribunal le 28 novembre 2003, IMS conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter en totalité la demande de la Commission et, lorsqu’il sera statué dans la procédure principale, condamner la Commission aux dépens, y compris ceux afférents aux présentes observations ;

subsidiairement, au cas où il serait fait droit à la demande de la Commission, condamner celle-ci aux dépens.

22
Dans leurs observations communes sur la demande de non-lieu à statuer, déposées au greffe du Tribunal le 4 novembre 2003, NDC et NDC Health GmbH & Co. KG estiment qu’il n’y a plus lieu pour le Tribunal de statuer sur la demande d’annulation de la décision attaquée et demandent que chaque partie soit condamnée à supporter ses propres dépens.

23
Dans ses observations sur la demande de non-lieu à statuer, déposées au greffe du Tribunal le 14 octobre 2003, AzyX précise qu’elle n’a pas d’observations particulières à formuler, mais demande à ne pas être condamnée à supporter ses propres dépens.

24
Le 29 avril 2004, la Cour a rendu, sur renvoi préjudiciel, l’arrêt IMS Health (C‑418/01, non encore publié au Recueil).

25
Le 8 juin 2004, au titre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, plusieurs questions ont été posées aux parties principales quant à la portée de la décision du 13 août 2003. Elles y ont répondu dans les délais impartis.


Sur la demande de non-lieu à statuer

Arguments des parties

26
La Commission, dans sa demande de non-lieu à statuer, considère que le présent recours est devenu sans objet.

27
Dans sa réponse aux questions posées par le Tribunal, le 8 juin 2004, sur la portée de la décision du 13 août 2003, la Commission précise que cette dernière repose sur des éléments intervenus après l’adoption de la décision attaquée. Elle indique, dès lors, que la décision du 13 août 2003 n’a pas, en soi, un caractère rétroactif.

28
La Commission soutient néanmoins qu’aucun effet juridique n’a résulté de la décision attaquée. Elle fait valoir, premièrement, que la décision attaquée n’imposait que des mesures « provisoires » et n’était donc pas fondée sur la constatation définitive d’une violation de l’article 82 CE. La Commission relève, deuxièmement, que la décision attaquée a été suspendue pendant toute la durée de son application potentielle.

29
Pour la Commission, le seul effet juridique concevable serait celui qui pourrait peser sur les juridictions allemandes dans le cadre des procédures nationales. Toutefois, la Commission considère qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la présente procédure et souligne que la décision attaquée, en l’espèce, n’est plus susceptible de produire des effets sur ces juridictions, compte tenu du retrait opéré par la décision du 13 août 2003. Pour la Commission, il n’y aurait, dès lors, pas de risque de décisions contradictoires allant à l’encontre du principe de sécurité juridique.

30
IMS considère, pour sa part, qu’un non-lieu à statuer ne doit pas être prononcé en l’espèce.

31
Premièrement, IMS estime que le retrait de la décision attaquée n’a pas fait disparaître ses effets juridiques. Rappelant que le non-lieu à statuer peut être prononcé quand l’acte concerné a été intégralement rapporté ou lorsque l’acte a été remplacé par un acte postérieur lui-même attaqué, la requérante estime que les procédures juridictionnelles peuvent continuer à avoir un objet si la décision retirée continue à produire des effets juridiques, notamment parce que le retrait n’a d’effet que pour l’avenir. IMS ajoute que, dès l’instant où le retrait opéré n’a pas d’effet rétroactif, un non-lieu à statuer en l’espèce lui ôterait toute possibilité de contester la validité et les effets de la décision attaquée.

32
Deuxièmement, IMS considère que le bien-fondé de la décision attaquée serait un élément pertinent pour la solution de litiges pendants devant les juridictions allemandes et rappelle, à cet égard, les procédures en cours qui l’opposent à NDC. IMS relève en particulier, dans ce contexte, que NDC avance l’argument suivant lequel, selon l’appréciation prima facie de la décision attaquée, IMS a exploité abusivement sa position dominante en refusant de lui délivrer une licence. IMS ajoute, par ailleurs, que NDC pourrait faire valoir que, entre le 3 juillet 2001 et le 13 août 2003, la décision attaquée n’a été ni retirée ni annulée et qu’elle avait le droit d’obtenir une licence pour cette période. Se référant notamment à l’arrêt de la Cour du 14 décembre 2000, Masterfoods et HB (C‑344/98, Rec. p. I‑11369), IMS estime que les juridictions allemandes pourraient avoir des doutes quant au sens dans lequel elles devraient statuer dans l’hypothèse où la décision attaquée n’aurait été ni annulée ni rétroactivement retirée. Enfin, IMS précise que les questions préjudicielles posées par le Landgericht Frankfurt à la Cour n’abordaient pas certains des points avancés dans la requête en annulation.

33
Troisièmement, IMS soutient que des considérations d’économie de procédure justifieraient le rejet de la demande de non-lieu à statuer. IMS considère, à ce titre, qu’elle conserve un intérêt à la poursuite d’une procédure d’annulation, dès lors qu’elle est exposée à un risque de se trouver confrontée à l’avenir à des actes analogues à celui contesté. Par ailleurs, IMS note que la Commission aurait toujours refusé de se prononcer sur la question de savoir si l’enquête devait être ajournée, voire sur celle de savoir si la procédure était close. Enfin, IMS considère qu’il existe un risque que NDC ou d’autres entreprises se fondent sur la décision attaquée pour éventuellement demander la délivrance d’une licence.

Appréciation du Tribunal

34
Par sa demande de non-lieu à statuer, la Commission soulève un incident de procédure qu’il convient, en vertu de l’article 114, paragraphe 3, du règlement de procédure, de régler sans ouvrir la procédure orale, le Tribunal s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier.

35
Il convient de constater que, en cours d’instance et par la décision du 13 août 2003, la Commission a expressément retiré la décision attaquée.

36
Il résulte de la motivation de la décision du 13 août 2003 que le « retrait » opéré ne présente pas, ainsi que le souligne la Commission, un caractère rétroactif et qu’il y a lieu, dès lors, de considérer ladite décision comme abrogeant la décision attaquée.

37
Dans ces circonstances, la décision attaquée ne produit plus d’effets juridiques obligatoires à l’égard de la requérante depuis l’entrée en vigueur de la décision du 13 août 2003.

38
Cependant, selon la jurisprudence, la partie requérante peut conserver un intérêt à voir annuler un acte abrogé en cours d’instance si l’annulation de cet acte est susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques (voir ordonnance du Tribunal du 14 mars 1997, Arbeitsgemeinschaft Deutscher Luftfahrt-Unternehmen et Hapag-Lloyd/Commission, T‑25/96, Rec. p. II‑363, point 16, et la jurisprudence citée).

39
En l’espèce, la requérante soutient précisément qu’elle conserve un intérêt à demander l’annulation de la décision attaquée eu égard aux effets juridiques de cette dernière pendant la période antérieure à la décision d’abrogation.

40
Or, il y a lieu de rappeler qu’il a été sursis à l’exécution de la décision attaquée, tout d’abord par une ordonnance du président du Tribunal du 10 août 2001, puis par une ordonnance du président du Tribunal du 26 octobre 2001. La décision attaquée n’a, dès lors, pas pu produire d’effets juridiques entre le moment où il a été sursis, pour la première fois, à son exécution, à savoir le 10 août 2001, et l’entrée en vigueur de la décision du 13 août 2003.

41
Il apparaît que la seule période pendant laquelle la décision attaquée a produit des effets juridiques est celle comprise entre le moment de son entrée en vigueur et le moment où son exécution a été suspendue. Toutefois, l’examen du dossier révèle que, si la décision attaquée a fait l’objet d’un début d’exécution, il n’en subsiste aucun effet de nature à justifier l’existence d’un intérêt à demander l’annulation de la décision attaquée.

42
Ainsi, il résulte de l’article 2 de la décision attaquée que l’obligation de délivrer une licence, prévue à l’article 1er de cette même décision, ne pouvait être mise en œuvre que dans le cadre d’une demande des concurrents d’IMS et d’un accord sur les redevances à acquitter, éventuellement par voie d’expertise.

43
Il ressort du dossier que les concurrents d’IMS, en l’occurrence AzyX et NDC, ont déposé une demande de licence après l’adoption de la décision attaquée. Les parties n’ont pas pu se mettre d’accord sur les redevances appropriées et la procédure de sélection d’un expert a débuté. Toutefois, compte tenu de l’ordonnance rendue par le président du Tribunal le 10 août 2001, cette procédure n’a pas abouti et la Commission a sursis à la désignation d’un expert.

44
Il est donc constant que la requérante n’a pas été contrainte d’octroyer, sur le fondement de la décision attaquée, une licence à l’un de ses concurrents et qu’elle ne peut plus, aujourd’hui, y être contrainte sur cette même base, la décision attaquée ayant été abrogée le 13 août 2003.

45
De même, il est constant que l’astreinte envisagée par l’article 3 de la décision attaquée n’a pas pu être appliquée pour la période concernée et qu’elle ne pourra plus l’être du fait de l’abrogation de ladite décision.

46
S’agissant des arguments de la requérante liés au sort des procédures judiciaires pendantes en Allemagne et à la prise en compte de l’arrêt Masterfoods et HB, point 32 supra, il convient de relever que l’objectif visé par cet arrêt est de prévenir tout risque de contradiction entre les décisions des juridictions nationales et celles de la Commission. Or, il suffit de rappeler que la décision attaquée a disparu de l’ordre juridique communautaire depuis le 13 août 2003 et que ce risque de contradiction n’existe pas en l’espèce. Les juridictions allemandes ont donc toute liberté dans leur choix décisionnel, étant rappelé que la décision attaquée n’avait pour objet, en tout état de cause, que l’adoption de mesures provisoires.

47
Il convient d’ajouter que, en raison des éléments déjà évoqués aux points 40, 44 et 45 ci-dessus, aucun effet juridique de la décision attaquée ne subsiste. Le fait que des concurrents de la requérante en Allemagne ou d’autres opérateurs intéressés puissent, le cas échéant, faire état devant les juridictions nationales de la simple existence passée de la décision attaquée pour obtenir une licence ou une indemnisation est par lui-même sans effet sur la situation juridique de la requérante.

48
Enfin, s’agissant de l’argument d’IMS selon lequel elle pourrait être confrontée à l’avenir à un acte identique à celui contesté, le Tribunal observe que, en tout état de cause, la situation de la requérante ne pourrait se voir affectée, le cas échéant, que par des décisions distinctes de la décision attaquée, dont la contestation éventuelle donnerait lieu à des litiges distincts de la présente demande en annulation.

49
Pour l’ensemble de ces raisons, il y a lieu de conclure qu’IMS n’a fourni aucun élément permettant de conclure que, malgré l’abrogation de la décision attaquée, elle conserve un intérêt à voir annuler cette décision. Il s’ensuit que le présent recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la présente affaire.


Sur les dépens

50
La Commission considère que chaque partie devrait être condamnée à supporter ses propres dépens dans la mesure où la décision contestée a été retirée en raison d’une modification substantielle des circonstances. Ce retrait ne signifierait pas, dès lors, que la Commission a modifié sa position initiale quant à l’existence, à première vue, d’un abus de position dominante. De plus, ce retrait ne remet en cause ni l’appréciation du critère d’urgence, ni la mise en balance des intérêts effectuée dans la décision attaquée, ni le caractère approprié des mesures provisoires qui y étaient ordonnées.

51
IMS estime au contraire que la Commission doit être condamnée aux dépens de l’instance. Elle considère, tout d’abord, que la valeur relative des griefs initiaux soulevés par les parties est un élément permettant au Tribunal d’exercer son pouvoir d’appréciation en ce qui concerne les dépens. IMS renvoie ici, notamment, à l’ordonnance du 26 octobre 2001, IMS Health/Commission, point 15 supra. Par ailleurs, IMS estime qu’il serait juste et équitable que la Commission soit condamnée aux dépens et explique, en substance, que la présente affaire et les erreurs commises ont entraîné des frais élevés pour elle.

52
Aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

53
Il y a lieu de relever que la Commission a abrogé la décision attaquée en raison de la modification des circonstances ayant présidé à l’adoption de celle-ci, à savoir l’état de la concurrence. Ni la décision du 13 août 2003 ni les pièces versées au dossier ne permettent de considérer que la Commission a admis que la décision attaquée était entachée d’illégalité au regard des griefs soulevés par la requérante.

54
Il convient également de rappeler que, en vertu de l’article 107, paragraphe 4, du règlement de procédure, les ordonnances rendues par le juge des référés n’ont qu’un caractère provisoire et ne préjugent en rien la décision du Tribunal statuant sur le principal.

55
Le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en condamnant chaque partie à supporter ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)
Il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.

2)
Chaque partie supportera ses propres dépens, y compris ceux afférents à la procédure de référé.

Fait à Luxembourg, le 10 mars 2005.

Le greffier

Le président

H. Jung

M. Vilaras


1
Langue de procédure : l'anglais.

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