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Document 61995CJ0263

Arrêt de la Cour du 10 février 1998.
République fédérale d'Allemagne contre Commission des Communautés européennes.
Rapprochement des législations - Produits de construction - Comité permanent de la construction.
Affaire C-263/95.

Recueil de jurisprudence 1998 I-00441

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1998:47

61995J0263

Arrêt de la Cour du 10 février 1998. - République fédérale d'Allemagne contre Commission des Communautés européennes. - Rapprochement des législations - Produits de construction - Comité permanent de la construction. - Affaire C-263/95.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-00441


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Communauté européenne - Régime linguistique - Envoi d'un document par la Commission à un État membre dans une langue autre que celle de l'État membre - Inadmissibilité

(Règlement du Conseil n_ 1, art. 3)

2 Rapprochement des législations - Produits de construction - Directive 89/106 - Décision de la Commission portant détermination de la procédure d'attestation de conformité des produits - Consultation du comité permanent de la construction - Obligation pour la Commission de faire parvenir le projet de décision tant aux représentations permanentes des États membres qu'à leurs représentants au sein du comité dans le délai prévu par le règlement intérieur du comité - Méconnaissance - Violation des formes substantielles - Nullité de la décision de la Commission

(Directive du Conseil 89/106, art. 20, § 2; règlement intérieur du comité permanent de la construction, art. 2, § 6)

Sommaire


1 L'envoi aux représentants d'un État membre, par la Commission, d'un document rédigé dans une langue autre que la langue de cet État membre ne respecte pas l'article 3 du règlement n_ 1 du Conseil portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne.

2 Les projets de dispositions visées à l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les produits de construction, devant faire l'objet d'un vote du comité permanent de la construction doivent, selon l'article 2, paragraphe 6, du règlement intérieur du comité parvenir tant aux représentations permanentes des États membres qu'à leurs représentants au sein du comité au plus tard 20 jours avant la date prévue pour la session, sans qu'aucune possibilité d'abrègement du délai ne soit indiquée. Cet impératif d'envois distincts, d'une part, aux représentations permanentes des États membres et, d'autre part, à leurs représentants au comité ainsi que le caractère incompressible du délai d'envoi attestent à suffisance de la volonté de garantir aux États membres le temps nécessaire à l'étude de ces documents qui peuvent être particulièrement complexes, nécessiter de nombreux contacts et discussions entre diverses administrations, la consultation d'experts dans différentes matières ou encore la consultation d'organisations professionnelles.

Par conséquent, l'adoption de l'avis du comité permanent de la construction en méconnaissance de l'obligation de procéder à ce double envoi dans le délai imparti et en omettant de reporter le vote malgré la demande formulée en ce sens par un État membre est viciée par une violation des formes substantielles qui entraîne la nullité de la décision de la Commission prise en conformité à l'avis.

Parties


Dans l'affaire C-263/95,

République fédérale d'Allemagne, représentée par MM. Ernst Röder, Ministerialrat au ministère fédéral de l'Économie, et Bernd Kloke, Oberregierungsrat au même ministère, en qualité d'agents, D - 53107 Bonn,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Ulrich Wölker et Antonio Aresu, membres du service juridique, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision 95/204/CE de la Commission, du 31 mai 1995, portant application de l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106/CEE du Conseil sur les produits de construction (JO L 129, p. 23),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, H. Ragnemalm, M. Wathelet et R. Schintgen, présidents de chambre, G. F. Mancini, J. C. Moitinho de Almeida, P. J. G. Kapteyn, D. A. O. Edward, G. Hirsch, L. Sevón (rapporteur) et K. M. Ioannou, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme Lynn Hewlett, administrateur,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 16 octobre 1997, au cours de laquelle la République fédérale d'Allemagne était représentée par M. Claus-Dieter Quassowski, Regierungsdirektor au ministère fédéral de l'Économie, en qualité d'agent, et la Commission par MM. Ulrich Wölker et Hans Støvlbæk, membre du service juridique, en qualité d'agent,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 11 novembre 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 7 août 1995, la République fédérale d'Allemagne a, en vertu de l'article 173 du traité CE, demandé l'annulation de la décision 95/204/CE de la Commission, du 31 mai 1995, portant application de l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106/CEE du Conseil sur les produits de construction (JO L 129, p. 23, ci-après la «décision attaquée»).

2 Cette décision définit les procédures d'attestation de conformité des produits de construction aux spécifications techniques.

Cadre juridique

La directive 89/106

3 La directive 89/106/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les produits de construction (JO 1989, L 40, p. 12), vise à éliminer les entraves à la libre circulation des produits de construction.

4 Selon son quatrième considérant, dans la mesure où les entraves techniques dans le domaine de la construction ne peuvent être éliminées par la reconnaissance mutuelle de l'équivalence entre tous les États membres, leur élimination doit suivre la nouvelle approche prévue dans la résolution du Conseil du 7 mai 1985 (JO C 136, p. 1), qui impose la définition d'exigences essentielles concernant la sécurité et d'autres aspects présentant une importance pour le bien-être général, sans réduire les niveaux existants et justifiés de protection dans les États membres.

5 L'article 1er, paragraphe 2, de la directive 89/106 définit le «produit de construction» comme étant «tout produit qui est fabriqué en vue d'être incorporé de façon durable dans des ouvrages de construction, qui couvrent tant les bâtiments que les ouvrages du génie civil».

6 L'article 2, paragraphe 1, de la directive 89/106 dispose:

«Les États membres prennent toutes dispositions nécessaires pour assurer que les produits visés à l'article 1er et destinés à être utilisés dans des ouvrages ne peuvent être mis sur le marché que s'ils sont aptes à l'usage prévu, c'est-à-dire s'ils ont des caractéristiques telles que les ouvrages dans lesquels ils doivent être incorporés, assemblés, utilisés ou installés puissent, à condition d'avoir été convenablement conçus et construits, satisfaire aux exigences essentielles visées à l'article 3 dans les cas où ces ouvrages font l'objet d'une réglementation contenant de telles exigences.»

7 Selon le cinquième considérant de la directive 89/106, les exigences essentielles constituent à la fois les critères généraux et les critères spécifiques auxquels doivent répondre les ouvrages de construction. Ces exigences doivent être interprétées comme signifiant que les ouvrages de construction sont conformes, avec un degré de fiabilité approprié, à une, à plusieurs ou à l'ensemble de ces exigences dans les cas où une réglementation le prévoit.

8 Ces exigences essentielles, qui, selon l'article 3, paragraphe 1, de la directive 89/106, sont énoncées en termes d'objectifs à l'annexe I de cette directive, sont les suivantes:

- résistance mécanique et stabilité; - sécurité en cas d'incendie; - hygiène, santé et environnement; - sécurité d'utilisation; - protection contre le bruit; - économie d'énergie et isolation thermique.

9 A côté des spécifications techniques nationales existantes, la directive 89/106 prévoit le développement de spécifications techniques européennes. Celles-ci peuvent être:

a) des normes harmonisées établies par les organismes européens de normalisation (le CEN, comité européen de normalisation, et le Cenelec, comité européen de normalisation électrotechnique) selon les mandats que leur donne la Commission (les «mandats de normalisation» visés à l'article 7, paragraphe 1, de la directive 89/106);

b) des agréments techniques européens, adoptés par l'organisation regroupant les organismes d'agrément désignés par les États membres (EOTA, European Organisation of Technical Approvals), c'est-à-dire l'«appréciation technique favorable de l'aptitude d'un produit à l'usage prévu, fondée sur la satisfaction des exigences essentielles prévues pour les ouvrages dans lesquels le produit doit être utilisé» (article 8 de la directive 89/106). Cette organisation travaille également sur la base de mandats, donnés par la Commission, pour l'établissement des guides d'agrément technique européen pour un produit ou une famille de produits (article 11, paragraphe 1, de la directive 89/106).

10 L'article 3, paragraphe 3, de la directive 89/106 prévoit que les liens nécessaires entre les exigences essentielles et les mandats de normalisation, les mandats concernant des guides d'agrément technique européen ou la reconnaissance d'autres spécifications techniques sont établis dans des documents interprétatifs dans lesquels sont précisées les exigences essentielles. Ces documents interprétatifs sont élaborés par des comités techniques auxquels participent les États membres.

11 Selon l'article 13, paragraphe 2, de la directive 89/106, les produits qui font l'objet d'une attestation de conformité sont présumés conformes aux spécifications techniques. Cette conformité est établie au moyen d'essais ou d'autres vérifications sur la base des spécifications techniques, conformément à l'annexe III.

12 Selon l'article 13, paragraphes 3 et 4, de la directive 89/106:

«3. Le fait d'attester la conformité d'un produit suppose:

a) que le fabricant dispose, à l'usine, d'un système de contrôle de la production permettant d'assurer que la production est conforme aux spécifications techniques pertinentes;

ou

b) que, pour certains produits mentionnés dans les spécifications techniques pertinentes, en plus du système de contrôle de la production appliqué à l'usine, un organisme agréé de certification est intervenu dans l'évaluation et la surveillance des contrôles de la production ou des produits eux-mêmes.

4. Après consultation du comité visé à l'article 19, la Commission détermine laquelle des procédures visées au paragraphe 3 est applicable à un produit ou groupe de produits déterminés, conformément aux dispositions particulières indiquées à l'annexe III, en fonction:

a) de l'importance du rôle du produit par rapport aux exigences essentielles, et notamment celles qui ont trait à la santé et à la sécurité;

b) de la nature du produit;

c) de l'incidence que la variabilité des caractéristiques du produit peut avoir sur la capacité du produit à remplir la fonction pour laquelle il a été conçu;

d) des probabilités de défauts de fabrication du produit.

Dans chaque cas, on choisit la procédure la moins onéreuse possible qui soit compatible avec la sécurité.

La procédure ainsi déterminée est indiquée dans les mandats ainsi que dans les spécifications techniques ou dans la publication de celles-ci.»

13 L'article 19 de la directive 89/106 prévoit l'institution d'un comité permanent de la construction, composé de deux représentants désignés par chaque État membre et présidé par un représentant de la Commission. Les représentants des États membres peuvent se faire accompagner par des experts. L'article 19, paragraphe 3, précise que «Le comité arrête son règlement intérieur».

14 De nombreuses dispositions de la directive 89/106 prévoient la consultation du comité permanent de la construction. Selon l'article 13, paragraphe 4, il doit notamment être consulté avant la détermination, par la Commission, de la procédure d'attestation de conformité des produits.

15 Dans un certain nombre de cas visés à l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106, dont fait partie la définition de la procédure d'attestation de conformité, cette directive prévoit le respect d'une procédure particulière, décrite à l'article 20, paragraphes 3 et 4, en ces termes:

«3. Le représentant de la Commission soumet au comité un projet des mesures à prendre. Le comité émet son avis sur le projet dans un délai que le président peut fixer en fonction de l'urgence de la question en cause. L'avis est émis à la majorité prévue à l'article 148, paragraphe 2, du traité pour l'adoption des décisions que le Conseil est appelé à prendre sur proposition de la Commission. Lors des votes au sein du comité, les voix des représentants des États membres au sein du comité sont affectées de la pondération définie à l'article précité. Le président ne prend pas part au vote.

4. La Commission arrête les mesures envisagées lorsqu'elles sont conformes à l'avis du comité.

Lorsque les mesures envisagées ne sont pas conformes à l'avis du comité, ou en l'absence d'avis, la Commission soumet sans tarder au Conseil une proposition relative aux mesures à prendre. Le Conseil statue à la majorité qualifiée.

Si, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle il a été saisi, le Conseil n'a pas statué, la Commission arrête les mesures proposées.»

Le règlement intérieur du comité permanent de la construction

16 Le comité permanent de la construction a adopté son règlement intérieur lors de sa troisième séance, les 7 et 8 octobre 1989.

17 L'article 2, paragraphes 4 à 7, de ce règlement intérieur prévoit notamment:

«4. Le président adresse les convocations, le projet d'ordre du jour, les projets de dispositions, les documents préparatoires et tous les documents de travail aux représentants titulaires et suppléants des États membres au comité selon la procédure prévue à l'article 12, paragraphe 3, du présent règlement intérieur.

5. Le délai est de 20 jours pour les documents préparatoires et tous les autres documents de travail. En cas d'urgence, le président peut abréger le délai de 20 jours visé ci-dessus, en respectant toutefois un délai minimum de 10 jours francs non fériés.

6. Cependant les projets de dispositions visées à l'article 20.2 de la directive devant faire l'objet d'un vote doivent parvenir aux représentations permanentes des États membres ainsi qu'à leur représentants au Comité au plus tard 20 jours avant la date prévue pour la session.

7. Si le délai prévu au 6e alinéa n'est pas respecté, soit ce point de l'ordre du jour doit être reporté à une prochaine réunion, soit la date de la réunion doit être, si le représentant d'un État membre le demande, renvoyée à une date ultérieure afin que ce délai soit respecté.»

18 Selon l'article 9 du règlement intérieur, «Chaque délégation nationale a un droit de vote exprimé selon la pondération de l'article 148 du traité».

19 L'article 10, paragraphes 2 à 5, du règlement intérieur, relatif aux comptes rendus des réunions, dispose:

«2. Il est également établi après chaque réunion un compte rendu succinct contenant les résultats et conclusions ainsi qu'en annexe la liste des présents.

3. Le Comité adopte le texte du procès-verbal lors de sa prochaine réunion ou exceptionnellement lors d'une réunion ultérieure.

4. Le compte rendu n'est soumis à l'adoption du Comité que si le projet en a été envoyé aux représentants 20 jours au moins avant la réunion.

5. Les propositions de modifications aux comptes rendus devraient autant que possible être présentées, par écrit, au plus tard une semaine avant la réunion au cours de laquelle ce document doit être adopté.»

20 L'article 12, paragraphe 3, du règlement intérieur prévoit que toute correspondance est adressée directement aux représentants au comité et une copie est envoyée aux représentations permanentes.

Examen des moyens d'annulation

21 La République fédérale d'Allemagne invoque quatre moyens d'annulation. Les deux premiers sont tirés de vices de la procédure qui s'est déroulée devant le comité permanent de la construction à savoir, en premier lieu, l'absence d'envoi, dans le délai prévu par le règlement intérieur, des documents préparatoires de la réunion du 30 novembre 1994 et, en second lieu, l'absence de décision du comité permanent de la construction. Le troisième moyen est tiré de la violation de l'article 13, paragraphe 4, de la directive 89/106, car la décision attaquée négligerait d'importantes caractéristiques ou propriétés des produits liées à des exigences essentielles. Le quatrième moyen est tiré de la violation de l'obligation de motivation, car il ne ressortirait pas de la décision attaquée les raisons pour lesquelles une série d'exigences essentielles n'ont pas été prises en considération dans le cadre de la procédure d'attestation de conformité.

Sur le premier moyen

22 Par son premier moyen, la République fédérale d'Allemagne reproche à la Commission de ne pas avoir envoyé, dans le délai prévu, le projet de décision de la Commission qui devait être discuté lors de la réunion du 30 novembre 1994 du comité permanent de la construction et au sujet duquel le comité devait rendre un avis. Elle précise que la version allemande de ce projet n'a pas été envoyée à sa représentation permanente et qu'elle n'a été reçue par télécopie par les membres allemands du comité permanent de la construction que le 11 novembre 1994, soit 19 jours avant la réunion et non 20, ainsi que cela est prévu à l'article 2, paragraphe 6, du règlement intérieur. La délégation allemande avait signalé ce retard par écrit la veille de la séance du comité permanent et avait demandé le report du vote. Elle aurait réitéré cette demande en cours de séance. La République fédérale d'Allemagne souligne que le retard dans l'envoi du projet constitue un vice de procédure substantiel, entraînant la nullité de l'avis du comité permanent de la construction. Elle relève que, si la délégation allemande avait disposé du projet de décision en temps voulu, ses membres auraient eu davantage de facilité pour en débattre.

23 La Commission reconnaît le léger retard dans l'envoi à la délégation allemande, mais indique que la version anglaise du texte avait été envoyée à toutes les délégations des États membres le 10 novembre 1994, c'est-à-dire dans les délais. Par ailleurs, toutes les délégations auraient été en possession du projet initial de décision (Construct 94/124) depuis le mois de septembre 1994, y compris la délégation allemande qui disposait d'un tel projet en allemand. La délégation allemande aurait d'ailleurs fait une contre-proposition rédigée en allemand et en anglais, ce qui montrerait qu'elle connaissait le projet de façon très précise. Par rapport au texte original de septembre 1994, la version «Rev. 1», qui devait être distribuée, n'aurait présenté que quelques petites différences et aucune des modifications n'aurait concerné les critiques émises par le gouvernement fédéral dans sa requête. Le vice de procédure serait donc minime et n'aurait eu aucune incidence sur les discussions et sur le vote au sein du comité. Enfin, la Commission prétend qu'il est abusif de demander le report d'un vote la veille du jour auquel doit se tenir une réunion. Elle relève que ce gouvernement n'a pas réitéré sa demande lors de la réunion, mais a approuvé sans réserve l'ordre du jour, a participé aux discussions de fond ainsi qu'au vote.

24 La République fédérale d'Allemagne considère, en revanche, que l'envoi du texte en anglais ne respecte pas l'article 3 du règlement n_ 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), et est insuffisant quant au fond, car ce n'est que lorsqu'elle a reçu le texte allemand que la position de la Commission a été claire. Par ailleurs, elle maintient que la délégation allemande a sollicité le report du vote par lettre du 29 novembre 1994, a réitéré cette demande en séance et a fait corriger le procès-verbal afin que soit acté son refus de voter lors de la réunion.

25 A cet égard, la Commission conteste la portée de la modification du procès-verbal. Elle souligne notamment qu'elle procède à ce genre d'ajout ultérieur, qu'une délégation souhaite voir figurer dans le compte rendu, sans examiner pour autant son contenu, à défaut de quoi il ne serait pas possible que la Commission et les États membres coopèrent dans un climat de confiance.

26 Il est constant que le projet de décision qui devait être discuté lors de la réunion du 30 novembre 1994 n'a pas été envoyé à la représentation permanente et n'est parvenu qu'avec retard aux représentants de la République fédérale d'Allemagne au sein du comité permanent de la construction, en violation de l'article 2, paragraphe 6, du règlement intérieur. Il est également établi que la République fédérale d'Allemagne a, par lettre du 29 novembre, demandé formellement le report du vote, demande dont la Commission n'a pas tenu compte, contrairement aux termes de l'article 2, paragraphe 7, du règlement intérieur.

27 S'agissant de l'envoi, dans le délai, d'une version anglaise du document à la délégation allemande, il y a lieu de constater qu'elle ne respecte pas l'article 3 du règlement n_ 1 du Conseil, précité, selon lequel les textes que les institutions adressent à un État membre doivent être rédigés dans la langue de cet État.

28 Par ailleurs, il n'est pas établi que ce document ait été envoyé parallèlement à la représentation permanente de la République fédérale d'Allemagne, ainsi qu'il est mentionné à l'article 2, paragraphe 6, du règlement intérieur.

29 S'agissant de l'argument de la Commission, selon lequel la demande de report aurait dû être formulée en séance, il y a lieu de relever que l'article 2, paragraphe 7, du règlement intérieur ne prévoit pas une telle exigence lorsque la demande de report a déjà été formulée par lettre. Au demeurant, il résultait du procès-verbal de la réunion tel que modifié à la demande de la République fédérale d'Allemagne et approuvé ensuite lors de la réunion du 29 mai 1995, seul document authentique faisant foi, que les représentants de cet État avaient effectivement réitéré leur demande de report de vote lors de la séance du comité permanent de la construction.

30 Ainsi que l'a souligné M. l'avocat général aux points 13 et 14 de ses conclusions, il résulte d'une comparaison des paragraphes 5 et 6 de l'article 2 du règlement intérieur qu'une distinction a été établie entre les documents de travail ordinaires et les projets de dispositions visées à l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106. Alors que les documents de travail ordinaires sont envoyés aux représentants titulaires et suppléants des États membres au sein du comité permanent de la construction, avec copie aux représentations permanentes, et que, selon le paragraphe 5, le président du comité peut, en cas d'urgence, réduire à 10 jours francs non fériés le délai d'envoi, le paragraphe 6 précise que les projets de dispositions visées à l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106 devant faire l'objet d'un vote doivent parvenir tant aux représentations permanentes des États membres qu'à leurs représentants au sein du comité au plus tard 20 jours avant la date prévue pour la session, sans qu'aucune possibilité d'abrègement du délai soit indiquée.

31 Cet impératif d'envois distincts, d'une part, aux représentations permanentes des États membres et, d'autre part, à leurs représentants au comité ainsi que le caractère incompressible du délai d'envoi attestent à suffisance de la volonté de garantir aux États membres le temps nécessaire à l'étude de ces documents qui peuvent être particulièrement complexes, nécessiter de nombreux contacts et discussions entre diverses administrations, la consultation d'experts dans différentes matières ou encore la consultation d'organisations professionnelles.

32 Par conséquent, il y a lieu de considérer que l'adoption de l'avis du comité permanent de la construction en méconnaissance de l'obligation de procéder à ce double envoi dans le délai imparti et en omettant de reporter le vote malgré la demande formulée en ce sens par un État membre est viciée par une violation des formes substantielles qui entraîne la nullité de la décision attaquée.

33 Le premier moyen étant fondé, il y a lieu d'annuler la décision attaquée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

34 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. La République fédérale d'Allemagne a conclu à la condamnation de la Commission. Celle-ci ayant succombé en sa défense, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) La décision 95/204/CE de la Commission, du 31 mai 1995, portant application de l'article 20, paragraphe 2, de la directive 89/106/CEE du Conseil sur les produits de construction, est annulée.

2) La Commission est condamnée aux dépens.

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