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Document 62023TO0427
Order of the General Court (First Chamber) of 28 November 2024.#SJ AB v European Commission.#Action for annulment – Directive 2014/25/EU – Procurement procedures of entities operating in the water, energy, transport and postal services sectors – Request to establish that Directive 2014/25 does not apply to public procurement in the field of railway passenger transport in Sweden – Article 35(1) of Directive 2014/25 – Letter from the Commission requesting additional information – Act not open to challenge – Inadmissibility.#Case T-427/23.
Ordonnance du Tribunal (première chambre) du 28 novembre 2024.
SJ AB contre Commission européenne.
Recours en annulation – Directive 2014/25/UE – Procédures de passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux – Demande visant à faire établir que la directive 2014/25 ne s’applique pas à la passation de marchés publics dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs en Suède – Article 35, paragraphe 1, de la directive 2014/25 – Lettre de la Commission demandant des éléments d’information complémentaires – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité.
Affaire T-427/23.
Ordonnance du Tribunal (première chambre) du 28 novembre 2024.
SJ AB contre Commission européenne.
Recours en annulation – Directive 2014/25/UE – Procédures de passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux – Demande visant à faire établir que la directive 2014/25 ne s’applique pas à la passation de marchés publics dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs en Suède – Article 35, paragraphe 1, de la directive 2014/25 – Lettre de la Commission demandant des éléments d’information complémentaires – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité.
Affaire T-427/23.
ECLI identifier: ECLI:EU:T:2024:881
DOCUMENT DE TRAVAIL
ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)
28 novembre 2024 (*)
« Recours en annulation – Directive 2014/25/UE – Procédures de passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux – Demande visant à faire établir que la directive 2014/25 ne s’applique pas à la passation de marchés publics dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs en Suède – Article 35, paragraphe 1, de la directive 2014/25 – Lettre de la Commission demandant des éléments d’information complémentaires – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »
Dans l’affaire T‑427/23,
SJ AB, établie à Stockholm (Suède), représentée par Mes J. Karlsson et M. Johansson, avocats,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par MM. G. Wils, S. Baches Opi et G. Gattinara, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (première chambre),
composé, lors des délibérations, de MM. R. Mastroianni, faisant fonction de président, I. Gâlea et S. L. Kalėda (rapporteur), juges,
greffier : M. V. Di Bucci,
vu la phase écrite de la procédure,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, SJ AB, demande l’annulation de la prétendue décision de la Commission européenne contenue dans la lettre que celle-ci lui a adressée le 10 mai 2023, visant à solliciter de sa part des informations actualisées à la suite de l’arrêt du 1er février 2023, SJ/Commission (T‑659/20, non publié, ci-après l’« arrêt d’annulation », EU:T:2023:32).
Antécédents du litige
2 La requérante est une entreprise publique détenue par le Royaume de Suède. Elle exerce son activité dans le secteur du transport ferroviaire de voyageurs.
3 Le 13 décembre 2019, la requérante a soumis à la Commission une demande au titre de l’article 35, paragraphe 1, de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE (JO 2014, L 94, p. 243), visant à faire établir que ladite directive ne s’appliquait pas à la passation de marchés publics dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs en Suède, en tant qu’activité visant l’exploitation de réseaux, au sens de l’article 11 de la même directive (ci-après la « demande d’exemption du 13 décembre 2019 »).
4 Le 2 juillet 2020, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2020/1193, sur l’applicabilité de l’article 34 de la directive 2014/25 au transport ferroviaire de voyageurs en Suède (JO 2020, L 262, p. 18, ci-après la « décision d’exemption partielle »). L’article 1er de cette décision a disposé que la directive 2014/25 ne s’appliquait pas aux marchés attribués par des entités adjudicatrices et destinés à permettre l’exécution, sur le territoire suédois, d’activités liées à la fourniture de services de transport ferroviaire de voyageurs dans le cadre d’une obligation de service public. L’article 2 de cette décision a disposé que la directive 2014/25 continuait à s’appliquer aux marchés attribués par des entités adjudicatrices et destinés à permettre l’exécution, sur le territoire suédois, d’activités liées à la fourniture de services commerciaux de transport ferroviaire de voyageurs.
5 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 octobre 2020, la requérante a demandé, sur le fondement de l’article 263 TFUE, l’annulation de l’article 2 de la décision d’exemption partielle.
6 Par l’arrêt d’annulation, le Tribunal a fait droit au recours et, en conséquence, annulé l’article 2 de la décision d’exemption partielle, motif pris d’une violation du droit de la requérante d’être entendue.
7 Par lettre du 20 mars 2023, la Commission a informé la requérante que, dans l’hypothèse où celle-ci souhaiterait, à la suite de l’arrêt d’annulation, introduire une nouvelle demande d’exemption au titre de l’article 35, paragraphe 1, de la directive 2014/25, elle statuerait dans le cadre d’une nouvelle procédure conforme aux exigences rappelées dans cet arrêt et qu’elle adopterait une nouvelle décision d’exécution sur l’applicabilité de l’article 34 de ladite directive, dans les délais prévus à l’article 35, paragraphe 3, de cette directive.
8 Par lettre du 30 mars 2023, la requérante a répondu à la Commission que l’annulation de l’article 2 de la décision d’exemption partielle n’entraînait pas l’annulation de la demande d’exemption du 13 décembre 2019, ni de l’ensemble de la procédure qui avait précédé l’adoption de la décision d’exemption partielle. Elle a ajouté que, afin de donner effet à l’arrêt d’annulation conformément à l’article 266 TFUE, la Commission devrait adopter dans un délai raisonnable une nouvelle décision sur la demande d’exemption du 13 décembre 2019 en modifiant la décision d’exemption partielle, soit sans tenir compte des données tarifaires qu’elle avait elle-même collectées, soit, à titre subsidiaire, en tenant dûment compte de ses observations sur ces données.
9 Par lettre du 10 mai 2023, la Commission a invité la requérante à fournir des informations destinées à compléter et à actualiser les données contenues dans la demande d’exemption du 13 décembre 2019, en vue d’adopter une nouvelle décision d’exécution ayant pour objet de statuer sur ladite demande.
Conclusions des parties
10 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision contenue dans la lettre de la Commission du 10 mai 2023 et visant à solliciter de sa part des informations complémentaires ;
– condamner la Commission aux dépens.
11 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours ;
– déclarer le recours irrecevable ;
– rejeter le recours comme non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
12 En vertu de l’article 129 de son règlement de procédure, sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal peut, à tout moment, d’office, les parties entendues, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée sur les fins de non-recevoir d’ordre public.
13 En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sans poursuivre la procédure.
14 En vertu de l’article 263, premier alinéa, première phrase, TFUE, le juge de l’Union contrôle la légalité des actes législatifs, des actes du Conseil de l’Union européenne, de la Commission et de la Banque centrale européenne (BCE), autres que les recommandations et les avis, et des actes du Parlement européen et du Conseil européen destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers.
15 Pour déterminer si des mesures constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 263 TFUE, c’est à leur substance qu’il y a lieu de s’attacher, la forme dans laquelle elles sont prises étant, en principe, indifférente à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9).
16 Selon une jurisprudence constante, seules les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts des tiers en modifiant de façon caractérisée leur situation juridique constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation (voir, en ce sens, arrêts du 31 mars 1971, Commission/Conseil, 22/70, EU:C:1971:32, point 42 ; du 2 mars 1994, Parlement/Conseil, C‑316/91, EU:C:1994:76, point 8, et du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 36).
17 Un acte à caractère purement informatif ne saurait ni affecter les intérêts du destinataire ni modifier la situation juridique de celui-ci par rapport à la situation antérieure à la réception dudit acte (voir, en ce sens, ordonnance du 4 octobre 2007, Finlande/Commission, C‑457/06 P, non publiée, EU:C:2007:582, point 36).
18 Par ailleurs, lorsqu’il s’agit d’actes dont l’élaboration s’effectue en plusieurs étapes procédurales, ne constitue, en principe, un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation que la mesure qui, au terme de la procédure, fixe définitivement la position de l’institution, de l’organe ou de l’organisme de l’Union compétent, à l’exclusion des mesures intermédiaires dont l’objectif est de préparer cette mesure définitive et qui ne produisent pas d’effets juridiques autonomes (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 10 ; du 3 juin 2021, Hongrie/Parlement, C‑650/18, EU:C:2021:426, points 43 et 46, et du 22 septembre 2022, IMG/Commission, C‑619/20 P et C‑620/20 P, EU:C:2022:722, point 103).
19 En outre, un acte intermédiaire n’est également pas susceptible de recours s’il est établi que l’illégalité attachée à cet acte pourra être invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre la décision finale dont il constitue un acte d’élaboration. Dans de telles conditions, le recours introduit contre la décision mettant fin à la procédure assurera une protection juridictionnelle suffisante (arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 12, et du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission, C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 53).
20 Par la lettre du 10 mai 2023, la Commission a tout d’abord pris acte du fait que la requérante n’entendait pas soumettre une nouvelle demande d’exemption. Ensuite, d’une part, elle a informé la requérante qu’elle statuerait sur la demande d’exemption du 13 décembre 2019. D’autre part, elle a considéré que la nouvelle décision qu’elle était tenue d’adopter devait tenir compte de la situation actuelle sur les marchés des services de transport ferroviaire de voyageurs exploités commercialement en Suède et se fonder sur les informations disponibles les plus récentes pour les années 2019, 2020, 2021 et 2022. En conséquence, elle a invité la requérante à compléter sa demande d’exemption du 13 décembre 2019 et, pour ce faire, lui a demandé de répondre à onze questions en lui fournissant, notamment, des données actualisées et, si nécessaire, un avis actualisé de l’autorité nationale de concurrence ou du régulateur national, de même que toute observation pertinente pour l’évaluation desdites données. Enfin, elle a indiqué que, une fois ces éléments reçus, elle entamerait la procédure et statuerait dans les mêmes délais que s’il s’agissait d’une nouvelle demande d’exemption.
21 La requérante soutient que, par cette lettre, la Commission a décidé, d’une part, de n’adopter une nouvelle décision d’exécution que lorsqu’elle aurait reçu les informations supplémentaires demandées et, d’autre part, de statuer dans le même délai que celui applicable à une nouvelle demande d’exemption. Ainsi, cette lettre comporterait à l’égard de la requérante des effets de droit obligatoires, en subordonnant l’adoption par la Commission d’une décision d’exécution statuant sur la demande d’exemption du 13 décembre 2019 à la préparation et à la présentation par la requérante d’un grand nombre de nouvelles informations, destinées à compléter et à mettre à jour ladite demande, et en décidant de statuer dans le délai applicable en cas de nouvelle demande d’exemption.
22 L’argumentation de la requérante ne saurait prospérer.
23 En premier lieu, il est constant entre les parties que, à la suite de l’arrêt d’annulation et en l’absence de retrait par la requérante de sa demande d’exemption du 13 décembre 2019, il incombe à la Commission d’adopter une nouvelle décision d’exécution statuant sur cette demande.
24 Or, force est de constater que la lettre du 10 mai 2023 ne peut être regardée comme étant l’acte juridique par lequel la Commission a statué sur la demande d’exemption du 13 décembre 2019.
25 En deuxième lieu, la circonstance selon laquelle la Commission aurait, dans ladite lettre, implicitement subordonné l’adoption d’une nouvelle décision d’exécution à la réception des informations demandées ne permet pas, à la supposer avérée, de conclure que cette lettre contient une opinion, même provisoire, quant au sens ou au contenu de cette future décision d’exécution (voir, en ce sens, ordonnance du 24 juin 2014, Léon Van Parys/Commission, T‑603/13, non publiée, EU:T:2014:610, point 28).
26 En troisième lieu, la circonstance que, dans la lettre du 10 mai 2023, la Commission ait demandé à la requérante des informations complémentaires pour adopter une nouvelle décision d’exécution ne peut conduire à considérer que, dans cette mesure, ladite lettre produit des effets de droit obligatoires. En effet, ce faisant, la Commission s’est limitée à demander à celle-ci d’accomplir des actes et non à l’obliger à les effectuer, en formulant, par exemple, une injonction en ce sens.
27 En quatrième lieu, dans la lettre du 20 mars 2023, la Commission avait indiqué qu’elle adopterait une nouvelle décision d’exécution dans les délais prévus à l’article 35, paragraphe 3, de la directive 2014/25. Ainsi, en précisant, dans la lettre du 10 mai 2023, qu’elle statuerait, une fois les informations complémentaires demandées reçues, dans les mêmes délais que ceux applicables à l’égard d’une nouvelle demande d’exemption, la Commission n’a fait que porter à la connaissance de la requérante l’interprétation qu’elle a faite, dans le cas d’espèce, de l’article 35, paragraphe 3, de la directive 2014/25, relatif au délai dans lequel elle est tenue de statuer sur une demande d’exemption. Dès lors, cette indication n’a qu’un caractère informatif de la manière dont la Commission interprète l’article 35, paragraphe 3, de la directive 2014/25 et ne produit pas d’effet de droit obligatoire, au regard de la jurisprudence rappelée au point 17 ci-dessus.
28 En cinquième lieu, même à supposer que, par la lettre du 10 mai 2023, la Commission ait, d’une part, subordonné l’adoption d’une nouvelle décision d’exécution à la réception des informations demandées et, d’autre part, indiqué qu’elle statuerait, une fois lesdites informations reçues, dans le délai prévu en cas d’introduction d’une nouvelle demande d’exemption, il suffit de constater que ces circonstances ne modifient pas la situation existant antérieurement à l’envoi de cette lettre, seule étant à même de le faire, comme il ressort de la jurisprudence rappelée au point 18 ci-dessus, une nouvelle décision d’exécution statuant sur la demande d’exemption (voir, en ce sens, ordonnance du 24 juin 2014, Léon Van Parys/Commission, T‑603/13, non publiée, EU:T:2014:610, point 29).
29 En sixième et dernier lieu, eu égard à la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus, il n’est pas démontré que les éventuelles illégalités qui entacheraient la lettre du 10 mai 2023 ne pourraient pas être invoquées dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision d’exécution que la Commission sera amenée à adopter.
30 En effet, contrairement à ce que la requérante soutient, elle pourra, le cas échéant, faire valoir, à l’appui d’un recours en annulation dirigé contre la future décision d’exécution que la Commission devra adopter, les moyens qu’elle invoque dans le cadre du présent recours. Ainsi, la prétendue illégalité attachée à la lettre du 10 mai 2023 pourra être invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre la décision finale, à savoir la nouvelle décision d’exécution statuant sur la demande d’exemption de la requérante, dont ladite lettre constitue un acte d’élaboration. Dans ces conditions, le recours qui sera, le cas échéant, introduit contre cette décision mettant fin à la procédure assurera une protection juridictionnelle suffisante, conformément à la jurisprudence rappelée au point 19 ci-dessus.
31 Par conséquent, il résulte des points 23 à 30 ci-dessus que la lettre du 10 mai 2023 ne constitue pas un acte attaquable, faute de produire, en l’un de ses éléments, des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, au sens de la jurisprudence rappelée au point 16 ci-dessus.
32 En conséquence, le recours doit être rejeté dans son ensemble comme étant irrecevable.
Sur les dépens
33 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (première chambre)
ordonne :
1) Le recours est rejeté.
2) SJ AB est condamnée aux dépens.
Fait à Luxembourg, le 28 novembre 2024.
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Le greffier |
Le président faisant fonction |
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V. Di Bucci |
R. Mastroianni |
* Langue de procédure : l’anglais.