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Document 62023TJ0340

Arrêt du Tribunal (deuxième chambre) du 24 septembre 2025.
Barry’s Bootcamp Holdings LLC contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.
Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative représentant deux chevrons inversés – Recours en annulation – Délais de recours – Recevabilité – Usage sérieux de la marque – Article 18, paragraphe 1, sous a), et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Nature de l’usage de la marque – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001.
Affaire T-340/23.

Identifiant ECLI: ECLI:EU:T:2025:887

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

24 septembre 2025 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative représentant deux chevrons inversés – Recours en annulation – Délais de recours – Recevabilité – Usage sérieux de la marque – Article 18, paragraphe 1, sous a), et article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 – Nature de l’usage de la marque – Forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif – Obligation de motivation – Article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑340/23,

Barry’s Bootcamp Holdings LLC, établie à Miami, Floride (États-Unis), représentée par Mes M. Hawkins, T. Dolde et C. Zimmer, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. R. Raponi, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Hummel Holding A/S, établie à Aarhus (Danemark), représentée par Me S. Pedersen, avocat,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé, lors des délibérations, de Mme A. Marcoulli, présidente, M. J. Schwarcz (rapporteur) et Mme L. Spangsberg Grønfeldt, juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’ordonnance du 11 janvier 2024 joignant au fond l’examen de l’exception d’irrecevabilité soulevée par Hummel Holding A/S,

à la suite de l’audience du 9 janvier 2025,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Barry’s Bootcamp Holdings LLC, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 10 mars 2023 (affaire R 1422/2022-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 13 mai 2019, la requérante a introduit devant l’EUIPO une demande tendant à ce que l’intervenante, Hummel Holding A/S, soit déchue de ses droits en ce qui concerne l’enregistrement international du 13 décembre 2006 désignant l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services couverts par cet enregistrement international pour lesquels la déchéance était demandée concernaient les domaines de l’hygiène, de la maroquinerie, des vêtements et des jeux. Plus précisément, ils relevaient  des classes 3, 18, 25, 28 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        Le motif invoqué à l’appui de la demande en déchéance était celui visé à l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO2017, L 154, p. 1), à savoir l’absence d’usage sérieux.

5        Le 1er juin 2022, la division d’annulation a prononcé une déchéance partielle, l’enregistrement étant maintenu pour les produits suivants (ci-après les « produits en cause ») :

–        classe 18 : « Sacs, à savoir sacs de sport » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, articles de chapellerie, à savoir vêtements, chaussures et articles de chapellerie de sport ; vêtements, chaussures et articles de chapellerie de loisirs et vêtements, chaussures et articles de chapellerie de mode ; vêtements, chaussures et articles de chapellerie de sport ; vêtements, chaussures et articles de chapellerie de loisirs ; vêtements, chaussures et articles de chapellerie de mode » ;

–        classe 28 : « Balles et ballons de sport et de jeu ».

6        Le 1er août 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation, en ce que celle-ci avait rejeté la demande en déchéance et donc maintenu l’enregistrement international contesté pour les produits en cause.

7        Par la décision attaquée, la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

8        Après avoir relevé que l’enregistrement international contesté était purement figuratif et qu’il consistait en deux chevrons noirs pointant vers le bas, représentés sur un fond blanc et caractérisés par des angles à 90 degrés, un espace identique entre les deux chevrons, ainsi que des côtés verticaux plats, la chambre de recours a considéré, en premier lieu, qu’il convenait d’analyser les trois variantes de cet enregistrement qui se trouvaient dans les preuves d’usage présentées par l’intervenante. La chambre de recours a constaté que, conformément à l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, deux de ces variantes étaient des formes qui différaient par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de l’enregistrement international contesté dans la forme sous laquelle celui-ci avait été enregistré et qu’il y avait donc lieu de les prendre en compte aux fins de l’appréciation de l’usage sérieux de cet enregistrement.

9        En second lieu, en application des dispositions combinées de l’article 10, paragraphe 3, et de l’article 19, paragraphe 1, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), la chambre de recours a vérifié que les preuves déposées par l’intervenante établissaient le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage de l’enregistrement international contesté pour les produits en cause. Elle a considéré qu’un usage sérieux avait été démontré pour ces produits et que le recours de la requérante devait être rejeté.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de tenue d’une audience.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant irrecevable et, en tout état de cause, non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés devant la chambre de recours.

 En droit

13      La requérante invoque deux moyens. Elle allègue, au titre du premier, la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et, au titre du second, la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), dudit règlement.

14      Avant d’examiner les moyens présentés par la requérante, il convient de se prononcer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’intervenante, dont l’examen a été joint à celui du fond par ordonnance du Tribunal du 11 janvier 2024, adoptée en application de l’article 130, paragraphe 7, du règlement de procédure du Tribunal.

 Sur la recevabilité du recours

15      L’intervenante fait valoir que le recours devant le Tribunal est irrecevable, au motif qu’il n’aurait pas été introduit dans le délai applicable. Plus précisément, elle fait valoir que, d’une part, la requérante n’a pas introduit le recours dans le délai prévu par l’article 72, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et que, d’autre part, l’octroi d’un délai forfaitaire supplémentaire de dix jours, prévu par l’article 60 du règlement de procédure, n’est pas applicable aux délais impartis en application du règlement 2017/1001.

16      La requérante soutient que l’exception d’irrecevabilité soulevée par l’intervenante est irrecevable et, en tout état de cause, non fondée. L’EUIPO n’a pas formulé d’observations sur la recevabilité du recours.

17      Il y a lieu de constater que, conformément à l’article 72, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, un recours contre une décision d’une chambre de recours de l’EUIPO doit être formé devant le Tribunal dans un délai de deux mois à compter de la notification de ladite décision. En outre, il ressort de l’article 60 du règlement de procédure que les délais de procédure des recours introduits devant le Tribunal sont augmentés d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

18      Le délai de distance forfaitaire de dix jours prévu par l’article 60 du règlement de procédure s’applique à tous les délais de procédure prévus par les traités, le statut de la Cour de justice de l’Union européenne et le règlement de procédure [voir arrêt du 1er décembre 2021, Inditex/EUIPO – Ffauf Italia (ZARA), T‑467/20, non publié, EU:T:2021:842, point 33 et jurisprudence citée].

19      En l’espèce, la décision attaquée a été placée le 5 avril 2023 dans la boîte de réception du mandataire ad litem de la requérante sur la plateforme de communication électronique sécurisée de l’EUIPO (voir annexe A.4 de la requête).

20      Selon l’article 4, paragraphe 5, de la décision no EX-20-9 du directeur exécutif de l’EUIPO du 3 novembre 2020 relative à la communication par voie électronique, applicable ratione temporis en l’espèce, « [u]ne notification est réputée avoir eu lieu le cinquième jour civil suivant la date à laquelle l’[EUIPO] a placé le document dans la boîte de réception de l’utilisateur ». Par conséquent, en l’espèce, la notification de la décision attaquée est réputée avoir eu lieu le 10 avril 2023.

21      Conformément à l’article 72, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, la requérante pouvait former un recours dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la décision, auquel s’ajoutait le délai de distance prévu à l’article 60 du règlement de procédure.

22      Dès lors, le délai de recours devant le Tribunal a expiré le 20 juin 2023 à minuit.

23      Dans la mesure où le recours a été introduit le 20 juin 2023, il n’est pas tardif et, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur la recevabilité de l’exception de l’intervenante, il y a lieu de la rejeter comme étant non fondée.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

24      Au titre du premier moyen, la requérante soutient que la décision attaquée ne permet pas de déterminer pour quels motifs la chambre de recours a considéré que les preuves présentées par l’intervenante étaient suffisantes pour établir l’usage sérieux de l’enregistrement international contesté en ce qui concerne les produits en cause. Ce défaut de motivation porterait, d’une part, sur l’usage de l’enregistrement international contesté en tant que marque et, d’autre part, sur l’identification des produits et des preuves d’usage.

25      Premièrement, la requérante fait valoir que la décision attaquée ne contient pas de réponse à son argument selon lequel la chambre de recours ne devait pas tenir compte de l’usage décoratif de l’enregistrement international contesté pour des vêtements et des chaussures, un tel usage ressemblant à celui d’une marque de position dont l’enregistrement avait précédemment été refusé. Selon la requérante, la chambre de recours n’a pas expliqué pour quelles raisons cet usage décoratif, donc dépourvu de caractère distinctif, pouvait constituer un usage en tant que marque.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante. 

27      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO sont motivées.

28      L’obligation de motivation ainsi consacrée a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE. Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle [voir arrêts du 11 décembre 2014, CEDC International/OHMI – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑235/12, EU:T:2014:1058, point 42 et jurisprudence citée, et du 7 juillet 2021, Ardagh Metal Beverage Holdings/EUIPO (Combinaison de sons à l’ouverture d’une canette de boisson gazeuse), T‑668/19, EU:T:2021:420, point 63 et jurisprudence citée].

29      La chambre de recours n’est pas obligée de prendre position sur tous les arguments avancés par les parties. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du 29 novembre 2016, Chic Investments/EUIPO (eSMOKING WORLD), T‑617/15, non publié, EU:T:2016:679, point 102 et jurisprudence citée].

30      En outre, eu égard à la continuité fonctionnelle entre la division d’annulation et la chambre de recours, la motivation de la décision de la division d’annulation fait partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, contexte qui est connu de la requérante et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI), T‑512/15, EU:T:2016:527, point 46, et du 30 juin 2021, Wolf Oil/EUIPO – Rolf Lubricants (ROLF), T‑531/20, non publié, EU:T:2021:406, point 79 et jurisprudence citée].

31      Enfin, il convient de distinguer le contrôle du respect de l’obligation de motivation d’une décision soumise au contrôle du juge de l’Union européenne, lequel relève de la violation des formes substantielles et porte sur le point de savoir si la décision fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de son auteur, de celui du bien-fondé de cette décision, lequel relève de la violation des règles de droit applicables (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, points 63 et 67).

32      En l’espèce, la chambre de recours a constaté que l’enregistrement international contesté avait été apposé de manière systématique sur les catalogues présentés par l’intervenante et qu’il apparaissait aussi sur des étiquettes de prix d’articles vestimentaires, ainsi que directement sur des articles de chapellerie et des chaussettes de sport. Elle en a déduit que l’enregistrement international contesté avait été utilisé conformément à sa fonction essentielle d’indicateur d’origine.

33      En outre, s’agissant de la décision de la deuxième chambre de recours du 2 novembre 2017 dans l’affaire R 1232/2017-2, invoquée par la requérante, la chambre de recours a relevé, dans la décision attaquée, que cette affaire n’était pas pertinente, car elle concernait une marque de position, alors que, en l’espèce, il s’agissait d’une marque figurative composée de deux chevrons identiques.

34      Enfin, il convient de noter, conformément à la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus, que, dans sa décision, la division d’annulation de l’EUIPO a explicitement écarté l’argument de la requérante tiré d’un usage décoratif de l’enregistrement international contesté, en considérant que celui-ci ne faisait pas nécessairement l’objet d’un tel usage. La chambre de recours n’a pas infirmé la décision de la division d’annulation à cet égard.

35      Il résulte de ces considérations énoncées dans la décision attaquée que, ainsi que le soutient l’EUIPO, la chambre de recours a examiné l’argument de la requérante tiré d’un usage décoratif de l’enregistrement international contesté, y compris la décision antérieure dans l’affaire R 1232/2017-2 invoquée par la requérante à l’appui de cet argument.

36      Les motifs retenus dans la décision attaquée et rappelés aux points 32 à 34 ci-dessus pour rejeter l’argument de la requérante tiré d’un usage décoratif de l’enregistrement international contesté sont par ailleurs suffisants pour permettre au Tribunal de contrôler leur bien-fondé et ils ont mis la requérante en mesure de contester leur légalité, ce qui fait d’ailleurs l’objet de la deuxième branche du second moyen examiné ci-après.

37      Par conséquent, le premier grief du premier moyen doit être écarté.

38      Deuxièmement, la requérante fait également grief à la chambre de recours de ne pas avoir identifié précisément les preuves et les produits sur lesquels elle a fondé la décision attaquée. En particulier, elle fait observer qu’aucun élément de preuve n’a été fourni concernant la période, le territoire et le nombre de ventes de produits liés à des étiquettes volantes comportant deux chevrons.

39      L’EUIPO et l’intervenante réfutent l’argumentation de la requérante.

40      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a, aux points 33, 58, 63, 99 et 101, indiqué avec précision les produits et les preuves sur lesquels elle s’est fondée pour constater l’usage sérieux de l’enregistrement international contesté, notamment en ce qui concerne des chaussettes, des T-shirts, des gants, des chaussures et des sacs de sport.

41      Au surplus, dans l’hypothèse où les arguments de la requérante tirés d’une prétendue absence d’indication, dans la décision attaquée, des produits et des preuves permettant de constater un usage sérieux de l’enregistrement international contesté, viseraient à contester l’insuffisance des éléments de preuve sur lesquels la chambre de recours a fondé la décision attaquée et, partant, le bien-fondé de cette dernière, un tel grief devrait être rejeté comme inopérant aux fins de l’examen du premier moyen pris de la violation de l’obligation de motivation. En effet, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux [voir arrêt du 14 décembre 2022, SY/Commission, T‑312/21, EU:T:2022:814, point 46 (non publié) et jurisprudence citée].

42      Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que les motifs pour lesquels la chambre de recours a conclu que l’enregistrement international contesté, apposé sur des produits vestimentaires, était utilisé en tant que marque, de même que les produits pour lesquels elle a estimé que l’usage sérieux de l’enregistrement international contesté était établi et les éléments de preuve sur lesquels elle s’est appuyée, ressortent à suffisance de droit de la décision attaquée.

43      Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001

44      En substance, le second moyen se divise en trois branches. Au titre de la première branche, la requérante reproche à la chambre de recours une appréciation erronée des étiquettes volantes qui ont été présentées comme éléments de preuve d’usage. Par la deuxième branche, la requérante fait valoir que l’usage de l’enregistrement international contesté est purement décoratif et n’est donc pas un usage en tant que marque. Enfin, par la troisième branche, elle soutient que la chambre de recours devait refuser de prendre en considération les formes de l’enregistrement international contesté qui altéraient le caractère distinctif de celui-ci.

 Sur la première branche du second moyen, relative aux étiquettes volantes présentées comme preuves de l’usage sérieux de l’enregistrement international contesté

45      Par la première branche du second moyen, la requérante considère que c’est à tort que, dans le cadre de l’appréciation de l’usage sérieux de l’enregistrement international contesté, la chambre de recours a tenu compte des étiquettes volantes sur lesquelles cette marque était apposée, alors que, selon la requérante, ces éléments de preuve ne fournissaient pas d’indications sur la nature, le lieu, la période et l’importance de l’usage.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

47      Aux termes de l’article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, le titulaire d’une marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et s’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

48      L’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625, applicable aux procédures de déchéance en vertu de l’article 19, paragraphe 1, du règlement 2018/625, prévoit notamment que la preuve de l’usage d’une marque doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque.

49      Il ressort de la jurisprudence qu’une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits et des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et ces services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [voir arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 39 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 36].

50      Ainsi que cela ressort également de la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation de la preuve de l’usage sérieux d’une marque, l’article 10 du règlement délégué 2018/625 n’indique pas que chaque élément de preuve doit nécessairement contenir des informations sur chacun des quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage [arrêt du 16 novembre 2011, Buffalo Milke Automotive Polishing Products/OHMI – Werner & Mertz (BUFFALO MILKE Automotive Polishing Products), T‑308/06, EU:T:2011:675, point 61]. En effet, la question de savoir si une marque a fait l’objet d’un usage sérieux doit être appréciée globalement en prenant en compte l’ensemble des éléments disponibles. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42]. Il ne s’agit donc pas d’analyser chacune des preuves de façon isolée, mais de les analyser conjointement, afin d’en identifier le sens le plus probable et cohérent. Dans le cadre d’une telle analyse, il ne peut être exclu qu’un faisceau d’éléments de preuve permette d’établir les faits à démontrer, alors même que chacun de ces éléments, pris isolément, serait impuissant à rapporter la preuve de l’exactitude de ces faits [voir arrêt du 16 juin 2015, Polytetra/OHMI – EI du Pont de Nemours (POLYTETRAFLON), T‑660/11, EU:T:2015:387, point 94 et jurisprudence citée].

51      Il y a lieu de relever que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 50 ci-dessus, il n’était pas requis que les étiquettes présentées comme éléments de preuve comportent des informations sur chacun des quatre éléments sur lesquels doit porter la preuve de l’usage sérieux, à savoir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage. Dès lors, la chambre de recours pouvait à juste titre les prendre en considération, au motif qu’elles permettaient d’établir que, du fait de l’apposition de l’enregistrement international contesté sur celles-ci, qui plus est dans sa forme enregistrée, ce signe était une marque utilisée publiquement et vers l’extérieur.

52      Partant, la première branche du second moyen doit être écartée comme étant non fondée.

 Sur la deuxième branche du second moyen, tirée de l’absence d’usage de l’enregistrement international contesté en tant que marque

53      Par la deuxième branche du second moyen, la requérante fait observer que l’usage de l’enregistrement international contesté, dans sa forme enregistrée, est strictement décoratif et donc dépourvu de caractère distinctif. Dans ces conditions, il ne saurait constituer un usage en tant que marque permettant d’établir l’usage sérieux de celui-ci. De plus, certaines décisions des chambres de recours de l’EUIPO et la jurisprudence du Tribunal feraient obstacle à ce que des éléments graphiques simples tels que les deux chevrons noirs sur fond blanc, qui constituent l’enregistrement international contesté, puissent être utilisés en tant que marque sur les produits en cause.

54      L’EUIPO et l’intervenante rejettent les arguments de la requérante.

55      Il y a lieu de constater que les éléments de preuve produits par l’intervenante devant l’EUIPO confirment que l’enregistrement international contesté, dans sa forme enregistrée, a été utilisé notamment dans les catalogues de produits de l’intervenante.

56      Ainsi que l’a constaté à bon droit la chambre de recours au point 84 de la décision attaquée, bien qu’il n’existe pas de preuve de la distribution desdits catalogues, les éléments de preuve doivent être appréciés de manière globale.

57      Or, appréciés en combinaison avec les factures produites par l’intervenante, lesdits catalogues établissent que l’usage de l’enregistrement international contesté, dans sa forme enregistrée, était tourné vers l’extérieur dans le but d’acquérir une position commerciale sur le marché pertinent pour les produits en cause (voir points 82 et 84 de la décision attaquée).

58      En effet, ainsi que cela est expliqué aux points 33 , 76 et 85 de la décision attaquée, les catalogues produits par l’intervenante montrent des articles vestimentaires sur lesquels est apposé l’enregistrement international contesté et auxquels correspondent un code modèle unique et un code couleur qui se retrouvent également sur les factures émises à l’attention de clients de l’intervenante établis dans divers États membres. En outre, puisque ces codes se retrouvent dans les factures adressées par l’intervenante à ses clients, il est possible d’identifier les modèles de vêtements vendus sous la forme enregistrée de l’enregistrement international contesté, ainsi que les volumes correspondants.

59      Partant, conformément à la jurisprudence rappelée au point 49 ci-dessus, la chambre de recours a pu conclure à juste titre que l’enregistrement international contesté avait été utilisé conformément à sa fonction essentielle d’indicateur d’origine, donc en tant que marque.

60      Ces constatations ne sauraient être remises en cause par les arguments de la requérante tirés de certaines décisions antérieures des chambres de recours de l’EUIPO et du Tribunal.

61      Premièrement, la requérante soutient que l’usage de l’enregistrement international contesté ne peut pas être assimilé à un usage en tant que marque, car il serait très similaire à l’usage de certaines marques de position dont l’enregistrement a été rejeté par décision de la deuxième chambre de recours du 2 novembre 2017 (affaire R 1232/2017‑2) et par décision de la cinquième chambre de recours du 15 février 2019 (affaire R 2604/2017‑ 5).

62      À cet égard, il ressort de l’article 3, paragraphe 3, sous d), du règlement d’exécution (UE) 2018/626 de la Commission, du 5 mars 2018, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2017/1431 (JO 2018, L 104, p. 37) qu’une marque de position est caractérisée par la façon spécifique dont elle est placée ou apposée sur les produits et qu’elle est représentée par la soumission d’une reproduction identifiant dûment la position de la marque et sa taille ou sa proportion par rapport aux produits concernés.

63      En l’espèce, l’enregistrement international contesté a été enregistré en tant que marque figurative et non en tant que marque de position, ce que la requérante a, au demeurant, reconnu lors de l’audience.

64      En outre, la représentation de l’enregistrement international contesté n’inclut pas les produits sur lesquels celui-ci est censé être apposé ni, a fortiori, une identification précise de la position de l’enregistrement international contesté ainsi que de sa taille ou proportion par rapport aux produits concernés. Ainsi, l’enregistrement international contesté ne présente pas les caractéristiques d’une marque de position.

65      Partant, les appréciations faites dans la décision de la deuxième chambre de recours du 2 novembre 2017 (affaire R 1232/2017‑2) et dans la décision de la cinquième chambre de recours du 15 février 2019 (affaire R 2604/2017‑5) ne sont pas transposables en l’espèce.

66      Dès lors, l’argument de la requérante tiré, en substance, d’une analogie entre l’enregistrement international contesté et les marques de position en cause dans ces décision s de chambres de recours de l’EUIPO doit être rejeté.

67      Deuxièmement, la requérante invoque l’arrêt du 4 mai 2022, Deichmann/EUIPO – Munich (Représentation de deux rayures croisées sur le côté d’une chaussure) (T‑117/21, non publié, EU:T:2022:271), qui aurait confirmé que des éléments graphiques simples figurant sur des chaussures ne sont pas perçus comme des marques et dont la solution serait, en subst ance, transposable en l’espèce.

68      Au point 61 de l’arrêt du 4 mai 2022, Représentation de deux rayures croisées sur le côté d’une chaussure (T‑117/21, non publié, EU:T:2022:271), le Tribunal a jugé qu’admettre que toute forme géométrique, y compris la plus simple, était dotée d’un caractère distinctif parce qu’elle se trouve sur la partie latérale d’une chaussure de sport permettrait à certains fabricants de s’approprier des formes simples, avant tout décoratives, qui doivent rester accessibles à tous.

69      Or, l ’enregistrement international contesté n’est pas une figure géométrique de base et n’a pas été qualifié de forme simple et banale par la chambre de recours.

70      Dès lors, contrairement à ce que prétend la requérante, la solution consacrée par l’arrêt du 4 mai 2022, Représentation de deux rayures croisées sur le côté d’une chaussure (T‑117/21, non publié, EU:T:2022:271), n’est pas transposable en l’espèce.

71      Eu égard à tout ce qui précède, la requérante est restée en défaut d’établir l’existence d’une erreur entachant l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’enregistrement international contesté a fait l’objet d’un usage en tant que marque pour les produits en cause.

72      Dès lors, la deuxième branche du second moyen doit être écartée.

 Sur la troisième branche du second moyen, relative à l’usage de l’enregistrement international contesté sous des formes autres que celle enregistrée

73      Par la troisième branche du second moyen, la requérante soutient que, en ce qui concerne une partie des éléments de preuve présentés à la chambre de recours, l’enregistrement international contesté n’est pas apposé sur les produits sous la forme dans laquelle il a été enregistré et que ces preuves ne devaient pas être prises en compte aux fins de la preuve de l’usage sérieux. Selon la requérante, les variations comportant d’autres couleurs que celles de la forme enregistrée de l’enregistrement international contesté modifient ladite marque à un degré tel qu’elles altèrent son caractère distinctif et qu’elles ne peuvent pas être prises en compte sans méconnaître l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001. En effet, l’enregistrement international contesté aurait tout au plus un faible degré de caractère distinctif, ce qui impliquerait que des modifications, mêmes mineures, constitueraient des variations inadmissibles par rapport à la forme enregistrée. En l’espèce, la modification des couleurs de la marque serait suffisante pour en altérer le caractère distinctif.

74      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

75      Aux termes de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, la preuve de l’usage sérieux d’une marque comprend également la preuve de l’utilisation de celle-ci sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de cette marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée.

76      L’objet de l’article 18, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001, qui évite d’imposer une conformité stricte entre la forme utilisée de la marque et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, est de permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés. Conformément à son objet, le champ d’application matériel de cette disposition doit être considéré comme limité aux situations dans lesquelles, le signe concrètement utilisé par le titulaire d’une marque pour désigner les produits ou les services pour lesquels celle-ci a été enregistrée constitue la forme sous laquelle cette même marque est commercialement exploitée. Dans de pareilles situations, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susvisée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie en rapportant la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [voir arrêts du 15 décembre 2015, LTJ Diffusion/OHMI – Arthur et Aston (ARTHUR & ASTON), T‑83/14, EU:T:2015:974, point 18 et jurisprudence citée ; du 8 juin 2022, Muschaweck/EUIPO – Conze (UM), T‑293/21, EU:T:2022:345, point 113 (non publié) et jurisprudence citée, et du 16 novembre 2022, Epsilon Data Management/EUIPO – Epsilon Technologies (EPSILON TECHNOLOGIES), T‑512/21, non publié, EU:T:2022:710, point 23 et jurisprudence citée].

77      Ainsi, le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés en se fondant sur les qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que sur la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir arrêts du 23 septembre 2020, CEDC International/EUIPO – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑796/16, EU:T:2020:439, point 139 (non publié) et jurisprudence citée, et du 8 juin 2022, UM, T‑293/21, EU:T:2022:345, point 114 (non publié) et jurisprudence citée].

78      Il convient, aux fins d’un tel constat, de tenir compte également des qualités intrinsèques et, en particulier, du degré plus ou moins élevé de caractère distinctif de la marque enregistrée. En effet, plus le caractère distinctif de celle-ci est faible, plus il sera aisément altéré par l’adjonction d’un élément lui-même distinctif et plus la marque en question perdra son aptitude à être perçue comme une indication de l’origine du produit. La considération inverse s’impose également [voir, en ce sens, arrêts du 13 septembre 2016, hyphen/EUIPO – Skylotec (Représentation d’un polygone), T‑146/15, EU:T:2016:469, point 29 et jurisprudence citée, et du 23 septembre 2020, Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille, T‑796/16, EU:T:2020:439, point 140].

79      Dès lors, la question de savoir si une marque contestée a fait l’objet d’un usage sous une forme qui diffère par des éléments altérant le caractère distinctif de ladite marque dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée appelle une analyse en deux temps. Il convient, dans un premier temps, de se prononcer sur le degré de caractère distinctif de ladite marque, puis, dans un second temps, de déterminer si ce caractère distinctif a été altéré dans la forme modifiée de la marque [voir, en ce sens, arrêts du 10 octobre 2017, Klement/EUIPO – Bullerjan (Forme d’un four), T‑211/14 RENV, non publié, EU:T:2017:715, points 37 et 38, et du 16 novembre 2022, EPSILON TECHNOLOGIES, T‑512/21, non publié, EU:T:2022:710, points 24, 25 et 37].

–       Sur le degré de caractère distinctif de l’enregistrement international contesté

80      Premièrement, au point 47 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que l’enregistrement international contesté bénéficiait d’une présomption de validité du fait de son enregistrement et ne pouvait donc pas être considéré comme dépourvu de caractère distinctif, ce que la requérante n’a, au demeurant, pas contesté.

81      Cette appréciation est conforme à la jurisprudence constante selon laquelle il doit être reconnu un certain degré de caractère distinctif à une marque ayant fait l’objet d’un enregistrement et dont il découle qu’une marque enregistrée ne saurait être considérée comme générique, descriptive ou dépourvue de tout caractère distinctif, à défaut de quoi sa validité dans le cadre d’une procédure de déchéance serait mise en cause (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2016, Représentation d’un polygone, T‑146/15, EU:T:2016:469, point 43 et jurisprudence citée). Ainsi, en l’espèce, l’enregistrement international contesté présente à tout le moins un degré minimal de caractère distinctif qui ne saurait être remis en cause dans le cadre de la présente procédure de déchéance.

82      Deuxièmement, au point 53 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé que le degré de caractère distinctif de l’enregistrement international contesté était « légèrement inférieur à la moyenne ».

83      La requérante ne remet pas en cause la description de l’enregistrement international contesté effectuée par la chambre de recours, dont il ressort que ledit signe est composé de deux chevrons noirs pointant vers le bas, représentés sur un fond blanc et caractérisés par des angles à 90 degrés, un espace identique entre les deux chevrons, ainsi que des côtés verticaux plats. Comme cela a déjà été indiqué au point 69 ci-dessus, l’enregistrement international contesté n’est pas constitué d’une figure géométrique de base. Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que ledit enregistrement possédait un caractère distinctif intrinsèque « légèrement inférieur à la moyenne ».

–       Sur l’absence d’altération du caractère distinctif de l’enregistrement international contesté

84      Il ressort des points 27, 53, 54 et 61 de la décision attaquée que les éléments conférant un caractère distinctif à l’enregistrement international contesté sont le contour des deux chevrons, leur épaisseur et leur largeur égales, la distance égale entre eux, ainsi que le contraste entre leur couleur et celle du fond dans lequel ils s’insèrent. En outre, la chambre de recours a estimé que, dans les éléments de preuve montrant des chevrons blancs sur fond noir ou des chevrons noirs sur fond coloré, les caractéristiques distinctives de l’enregistrement international contesté n’étaient pas altérées, les variations de couleurs étant de nature décorative (voir points 54, 55, 61 et 62 de la décision attaquée).

85      La requérante fait grief à la chambre de recours, en substance, de ne pas avoir inclus la combinaison de couleurs résultant de la représentation de chevrons noirs sur un fond blanc parmi les éléments distinctifs de l’enregistrement international contesté et, partant, d’avoir commis une erreur d’appréciation en estimant qu’une modification de ces couleurs n’altérait pas son caractère distinctif.

86      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

87      Premièrement, il ressort de la jurisprudence que la combinaison des couleurs noire et blanche est banale, de sorte qu’elle ne saurait, à elle seule, conférer à l’enregistrement international une caractéristique susceptible d’être perçue, par le public pertinent, comme une indication de l’origine des produits concernés [voir, en ce sens, arrêts du 24 novembre 2005, GfK/OHMI – BUS (Online Bus), T‑135/04, EU:T:2005:419, point 35, et du 5 octobre 2022, Philip Morris Products/EUIPO (Représentation de lignes en noir et blanc), T‑502/21, non publié, EU:T:2022:611, point 22].

88      Dès lors, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en n’incluant pas la combinaison de couleurs de l’enregistrement international contesté parmi ses éléments distinctifs.

89      Deuxièmement, il y a lieu d’observer, à l’instar de la chambre de recours, que lorsque des éléments de preuve montrent des chevrons blancs sur fond noir, les caractéristiques principales et distinctives des chevrons représentés dans l’enregistrement international contesté, à savoir leur contour, la distance qui les sépare, leur épaisseur, leur largeur et le contraste entre les couleurs noire et blanche, sont maintenues (voir points 53 et 54 de la décision attaquée).

90      En outre, s’agissant des éléments de preuve montrant des chevrons noirs sur un fond de couleur vive, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a, au point 61 de la décision attaquée, estimé que les éléments composant l’enregistrement international contesté restaient visibles dans la même disposition et les mêmes proportions et que le contraste entre des chevrons noirs sur un fond plus clair était également maintenu.

91      Ainsi, il résulte des considérations qui précèdent que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en tenant compte des éléments de preuve concernant l’usage de deux chevrons blancs sur fond noir ou de deux chevrons noirs sur un fond de couleur vive, lesdits usages n’altérant pas le caractère distinctif de l’enregistrement international contesté.

92      L’arrêt du 19 juin 2019, adidas/EUIPO – Shoe Branding Europe (Représentation de trois bandes parallèles) (T‑307/17, EU:T:2019:427), invoqué par la requérante, ne remet pas en cause cette conclusion. Dans cet arrêt, le Tribunal a considéré que la chambre de recours avait écarté à bon droit les éléments de preuve montrant le signe concerné dans un schéma de couleurs inversé dès lors que ladite variation n’était pas négligeable par rapport à la forme enregistrée dudit signe, lequel présentait très peu de caractéristiques, était extrêmement simple et était dépourvu de caractère distinctif intrinsèque (arrêt du 19 juin 2019, Représentation de trois bandes parallèles, T‑307/17, EU:T:2019:427, points 10, 71, 76 et 77).

93      Au contraire, l’enregistrement international contesté n’est pas extrêmement simple et a un caractère distinctif intrinsèque, lequel est « légèrement inférieur à la moyenne » (voir points 82 et 83 ci-dessus). Partant, une variation du schéma de couleurs de l’enregistrement international contesté n’a pas la même incidence que dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 juin 2019, Représentation de trois bandes parallèles (T‑307/17, EU:T:2019:427).

94      La troisième branche du second moyen n’étant pas fondée, il y a lieu de l’écarter et, partant, de rejeter le second moyen.

95      Aucun des moyens n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

96      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

97      La requérante ayant succombé et compte tenu de l’audience de plaidoiries du 9 janvier 2025, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’EUIPO, conformément aux conclusions de celui-ci.

98      L’intervenante n’ayant pas conclu à la condamnation de la requérante aux dépens afférents à la procédure devant le Tribunal, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens.

99      Enfin, s’agissant de la demande de l’intervenante tendant à ce que la requérante soit condamnée aux dépens exposés devant la chambre de recours, il suffit de relever que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée et que, partant, c’est le dispositif de celle-ci qui continue à régler les dépens en cause [voir, en ce sens, arrêt du 28 avril 2021, Comercializadora Eloro/EUIPO – Zumex Group (JUMEX), T‑310/20, non publié, EU:T:2021:227, point 45].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Barry’s Bootcamp Holdings LLC supportera ses propres dépens et ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

3)      Hummel Holding A/S supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Schwarcz

Spangsberg Grønfeldt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 septembre 2025.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.

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