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Document 62019CJ0428

Arrêt de la Cour (première chambre) du 8 juillet 2021.
OL e.a. contre Rapidsped Fuvarozási és Szállítmányozási Zrt.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Gyulai Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság.
Renvoi préjudiciel – Directive 96/71/CEE – Article 1er, paragraphe 1, ainsi que articles 3 et 5 – Détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services – Chauffeurs routiers internationaux – Respect du taux de salaire minimal du pays de détachement – Indemnité journalière – Règlement (CE) no 561/2006 – Article 10 – Rémunération attribuée aux employés en fonction du carburant consommé.
Affaire C-428/19.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2021:548

 ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

8 juillet 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 96/71/CEE – Article 1er, paragraphe 1, ainsi que articles 3 et 5 – Détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services – Chauffeurs routiers internationaux – Respect du taux de salaire minimal du pays de détachement – Indemnité journalière – Règlement (CE) no 561/2006 – Article 10 – Rémunération attribuée aux employés en fonction du carburant consommé »

Dans l’affaire C‑428/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Gyulai Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Gyula, Hongrie), par décision du 20 mai 2019, parvenue à la Cour le 4 juin 2019, dans la procédure

OL,

PM,

RO

contre

Rapidsped Fuvarozási és Szállítmányozási Zrt.,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, M. L. Bay Larsen (rapporteur), Mme C. Toader, MM. M. Safjan et N. Jääskinen, juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour OL, PM et RO, par Me Gy. Lupkovics, ügyvéd,

pour Rapidsped Fuvarozási és Szállítmányozási Zrt., par Me D. Kaszás, ügyvéd,

pour le gouvernement hongrois, par MM. M. Z. Fehér et G. Koós ainsi que par Mme M. M. Tátrai, en qualité d’agents,

pour le gouvernement français, par Mmes A.–L. Desjonquières et C. Mosser, en qualité d’agents,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman et P. Huurnink, en qualité d’agents,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, initialement par MM. W. Mölls, B.‑R. Killmann et L. Havas, puis par MM. B.‑R. Killmann et L. Havas, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 mai 2021,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 1, ainsi que des articles 3 et 5 de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services (JO 1997, L 18, p. 1), et de l’article 10 du règlement (CE) no 561/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) no 3821/85 et (CE) no 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil (JO 2006, L 102, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant OL, PM et RO à Rapidsped Fuvarozási és Szállítmányozási Zrt. (ci-après « Rapidsped ») au sujet d’une demande des premiers, en leur qualité de chauffeurs routiers internationaux, visant à obtenir de Rapidsped, leur employeur, le versement d’un salaire prenant en compte le salaire minimum français au titre du temps de travail accompli en France.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 96/71

3

L’article 1er de la directive 96/71, intitulé « Champ d’application », dispose :

« 1.   La présente directive s’applique aux entreprises établies dans un État membre qui, dans le cadre d’une prestation de services transnationale, détachent des travailleurs, conformément au paragraphe 3, sur le territoire d’un État membre.

2.   La présente directive ne s’applique pas aux entreprises de la marine marchande en ce qui concerne le personnel navigant.

3.   La présente directive s’applique dans la mesure où les entreprises visées au paragraphe 1 prennent l’une des mesures transnationales suivantes :

a)

détacher un travailleur, pour leur compte et sous leur direction, sur le territoire d’un État membre, dans le cadre d’un contrat conclu entre l’entreprise d’envoi et le destinataire de la prestation de services opérant dans cet État membre, pour autant qu’il existe une relation de travail entre l’entreprise d’envoi et le travailleur pendant la période de détachement

[...] »

4

L’article 2 de cette directive, intitulé « Définition », est libellé comme suit :

« 1.   Aux fins de la présente directive, on entend par travailleur détaché, tout travailleur qui, pendant une période limitée, exécute son travail sur le territoire d’un État membre autre que l’État sur le territoire duquel il travaille habituellement.

2.   Aux fins de la présente directive, la notion de travailleur est celle qui est d’application dans le droit de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché. »

5

L’article 3 de ladite directive, intitulé « Conditions de travail et d’emploi », prévoit :

« 1.   Les États membres veillent à ce que, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail, les entreprises visées à l’article 1er paragraphe 1 garantissent aux travailleurs détachés sur leur territoire les conditions de travail et d’emploi concernant les matières visées ci‑après qui, dans l’État membre sur le territoire duquel le travail est exécuté, sont fixées :

par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives

et/ou

par des conventions collectives ou sentences arbitrales déclarées d’application générale au sens du paragraphe 8, dans la mesure où elles concernent les activités visées en annexe :

[...]

c)

les taux de salaire minimal, y compris ceux majorés pour les heures supplémentaires ; le présent point ne s’applique pas aux régimes complémentaires de retraite professionnels ;

[...]

Aux fins de la présente directive, la notion de taux de salaire minimal visée au second tiret point c) est définie par la législation et/ou la pratique nationale(s) de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché.

[...]

7.   Les paragraphes 1 à 6 ne font pas obstacle à l’application de conditions d’emploi et de travail plus favorables pour les travailleurs.

Les allocations propres au détachement sont considérées comme faisant partie du salaire minimal, dans la mesure où elles ne sont pas versées à titre de remboursement des dépenses effectivement encourues à cause du détachement, telles que les dépenses de voyage, de logement ou de nourriture.

[...] »

6

L’article 5 de la même directive, intitulé « Mesures », dispose :

« Les États membres prennent des mesures adéquates en cas de non-respect de la présente directive.

Ils veillent en particulier à ce que les travailleurs et/ou leurs représentants disposent de procédures adéquates aux fins de l’exécution des obligations prévues par la présente directive. »

7

Aux termes de l’article 6 de la directive 96/71, intitulé « Compétence judiciaire » :

« Pour faire valoir le droit aux conditions de travail et d’emploi garanties à l’article 3, une action en justice peut être intentée dans l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est ou était détaché, sans préjudice, le cas échéant, de la faculté d’intenter, conformément aux conventions internationales existantes en matière de compétence judiciaire une action en justice dans un autre État. »

La directive 2003/59/CE

8

La directive 2003/59/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2003, relative à la qualification initiale et à la formation continue des conducteurs de certains véhicules routiers affectés aux transports de marchandises ou de voyageurs, modifiant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil ainsi que la directive 91/439/CEE du Conseil et abrogeant la directive 76/914/CEE du Conseil (JO 2003, L 226, p. 4), énonce à son considérant 10, que le développement de la conduite préventive, qui va de pair avec la rationalisation de la consommation de carburant, aura des effets positifs aussi bien pour la société que pour le secteur des transports routiers lui-même.

9

L’article 1er de cette directive, intitulé « Champ d’application », est libellé comme suit :

« La présente directive s’applique à l’activité de conduite :

a)

des ressortissants d’un État membre, et

b)

des ressortissants d’un pays tiers employés ou utilisés par une entreprise établie dans un État membre,

ci-après dénommés “conducteurs”, effectuant des transports par route à l’intérieur de la Communauté, sur des routes ouvertes à l’usage public, au moyen de :

véhicules pour lesquels un permis de conduire d’une des catégories C1, C1 + E, C ou C + E, telles que définies par la directive 91/439/CEE [du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (JO 1991, L 237, p. 1)], ou un permis reconnu comme équivalent est exigé,

[...] »

10

L’annexe I de ladite directive est intitulée « Exigences minimales pour la qualification et la formation ». Aux termes de la section 1, point 1.3., de celle-ci, les connaissances à prendre en considération pour la constatation de la qualification initiale et de la formation continue du conducteur par les États membres doivent porter, notamment, sur l’optimisation de la consommation de carburant en lien avec les permis C, C + E, C1, C1 + E.

La directive 2006/126/CE

11

La directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire (JO 2006, L 403, p. 18), a abrogé et remplacé la directive 91/439 à compter du 19 janvier 2013. Il découle de l’article 4 de la directive 2006/126, lu en combinaison avec le tableau de correspondance figurant à l’annexe III de la directive 2003/59, que les permis C, C + E, C1, C1 + E visés par cette dernière directive concernent des véhicules servant notamment au transport sur route de marchandises, dont la masse maximale autorisée dépasse 3,5 tonnes.

12

Aux termes de l’article 17, troisième alinéa, de la directive 2006/126, les références faites à la directive 91/439 abrogée s’entendent comme faites à la directive 2006/126.

Le règlement no 561/2006

13

En vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous a), du règlement no 561/2006, ce dernier s’applique au transport routier notamment de marchandises par des véhicules, y compris des véhicules à remorque ou à semi-remorque, dont la masse maximale autorisée dépasse 3,5 tonnes.

14

L’article 10, paragraphe 1, de ce règlement prévoit :

« Il est interdit aux entreprises de transport de rémunérer les conducteurs qu’elles emploient ou qui sont mis à leur disposition en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises transportées, même par l’octroi de primes ou de majorations de salaire si une telle rémunération est de nature à compromettre la sécurité routière et/ou à encourager les infractions au présent règlement. »

Le règlement (CE) no 44/2001

15

L’article 68 du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1), prévoyait, à son paragraphe 1, que ce règlement remplaçait, entre les États membres, la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32), telle que modifiée par les conventions successives relatives à l’adhésion des nouveaux États membres à cette convention (ci-après la « convention de Bruxelles »), sauf en ce qui concerne certains territoires des États membres, et, à son paragraphe 2, que, dans la mesure où ce règlement remplaçait entre les États membres les dispositions de la convention de Bruxelles, toute référence faite à celle-ci s’entendait comme faite audit règlement.

Le règlement (UE) no 1215/2012

16

Le règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1), énonce, à son considérant 8 :

« Le 22 décembre 2000, le Conseil a adopté le règlement [no 44/2001] qui remplace la [convention de Bruxelles] en ce qui concerne les territoires des États membres couverts par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, entre les États membres à l’exception du Danemark. Par la décision 2006/325/CE du Conseil, [du 27 avril 2006, concernant la conclusion de l’accord entre la Communauté européenne et le Royaume de Danemark sur la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2006, L 120, p. 22),] la Communauté a conclu avec le Danemark un accord garantissant l’application des dispositions du règlement [no 44/2001] à ce pays. [...] »

17

En vertu de l’article 21, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile.

18

Selon l’article 62, paragraphe 1, dudit règlement, pour déterminer si une partie a un domicile sur le territoire de l’État membre dont les juridictions sont saisies, le juge applique sa loi interne.

19

Aux termes de l’article 80 du règlement no 1215/2012, celui-ci abroge le règlement no 44/2001. Les références faites au règlement abrogé s’entendent comme faites au règlement no 1215/2012.

Le droit hongrois

20

L’article 3, paragraphe 2, de l’a Munka törvénykönyvéről szóló 2012. évi I. törvény (loi no I de 2012, établissant le code du travail, ci-après le « code du travail »), prévoit que, sauf disposition contraire, ce dernier s’applique lorsque le travailleur accomplit habituellement son travail en Hongrie.

21

L’article 285 du code du travail est libellé comme suit :

« 1.   Les travailleurs et les employeurs peuvent intenter une action devant une juridiction découlant de la relation de travail ou de la présente loi, tandis que les syndicats et les comités d’entreprise peuvent intenter une action découlant de la présente loi, d’une convention collective ou d’un accord d’entreprise.

[...]

4.   Conformément à l’article 295, les travailleurs peuvent également intenter des actions devant les tribunaux hongrois en ce qui concerne les heures travaillées en Hongrie. »

22

L’article 295, paragraphe 1, de ce code dispose :

« Si, sur la base d’un accord conclu avec un tiers, un employeur étranger recrute un travailleur sur le territoire de la Hongrie en établissant une relation de travail à laquelle ne s’applique pas la présente loi en vertu de son article 3, paragraphe 2, les règles du droit hongrois, y compris les dispositions de la convention collective applicable à la relation de travail, s’appliquent à cette relation de travail, sans préjudice du paragraphe 4, en ce qui concerne :

a)

la durée de la période maximale de travail ou de la période minimale de repos,

b)

la durée minimale du congé annuel rémunéré,

c)

le montant du salaire minimum,

d)

les conditions fixées aux articles 214 à 222 pour la mise à disposition de main-d’œuvre,

e)

les conditions en matière de sécurité au travail,

f)

les conditions d’emploi et de travail des femmes enceintes et des femmes ayant de jeunes enfants, ainsi que des jeunes travailleurs, ainsi que

g)

l’exigence de l’égalité de traitement. »

23

Conformément à l’article 299 dudit code, celui-ci a pour objet de transposer, notamment, la directive 96/71 dans le droit interne.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

24

OL, PM et RO (ci-après les « chauffeurs en cause au principal ») ont conclu chacun, respectivement, les 12 juin 2015, 7 juillet 2016 et 26 août 2016, un contrat de travail relatif à un emploi de chauffeur de camion avec Rapidsped, une société ayant son siège en Hongrie.

25

Ces contrats, qui sont rédigés de manière uniforme, stipulent que, bien que le travailleur ait pour tâche, outre l’exécution de transports internationaux de marchandises, l’exécution de transports nationaux de marchandises, il doit normalement exécuter son travail dans des lieux qui seront fréquemment et principalement situés à l’étranger, sans pour autant que le travail effectué à l’étranger ait un caractère permanent.

26

En vertu du droit hongrois, le travailleur a droit à des indemnités journalières pour le travail accompli à l’étranger. Il ressort du dossier dont dispose la Cour et, notamment, d’un document d’information des travailleurs émis par Rapidsped, que le montant de ces indemnités était d’autant plus élevé que la période de détachement du travailleur à l’étranger, laquelle, conformément au contrat, pouvait varier, en principe, de trois à cinq semaines, au choix du travailleur, était longue. Ce même document précisait que lesdites indemnités étaient destinées à couvrir les frais exposés à l’étranger.

27

Par ailleurs, les contrats de travail des chauffeurs en cause au principal prévoyaient pour ceux-ci, lorsqu’ils réalisaient des économies de carburant, une prime, à la discrétion de l’employeur, basée sur une formule rapportant la consommation de carburant à la distance parcourue.

28

Les chauffeurs en cause au principal exécutaient leur travail en se rendant en France au moyen d’un minibus. Pendant toute la durée du détachement, les services de répartition de Rapidsped fixaient les tâches de transport à effectuer, c’est-à-dire à quelle date, au moyen de quel véhicule et selon quels trajets les marchandises devaient être transportées. En raison des règles relatives au cabotage, lesdits chauffeurs traversaient la frontière à plusieurs reprises.

29

Au début de chaque période de détachement, Rapidsped fournissait aux chauffeurs en cause au principal une déclaration certifiée par un notaire hongrois et une attestation de détachement du ministère français du Travail établissant que leur salaire horaire s’élevait à 10,40 euros par heure, soit plus que le salaire horaire minimum français applicable au secteur du transport routier, qui était fixé à 9,76 euros par heure.

30

Les chauffeurs en cause au principal ont introduit une action devant la juridiction de renvoi, le Gyulai Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Gyula, Hongrie), contre Rapidsped au motif que leur salaire correspondant au temps de travail accompli en France n’atteignait pas le salaire minimum français.

31

En vertu des contrats de travail des chauffeurs en cause au principal, ceux-ci ont effectivement perçu, au cours de l’année 2018, un salaire mensuel de 545 euros brut, soit 3,24 euros par heure. S’agissant de la différence de 6,52 euros par heure entre le salaire minimum français et le salaire horaire perçu par lesdits chauffeurs, Rapidsped soutient devant la juridiction de renvoi qu’elle était couverte par le montant des indemnités journalières et de la prime d’économie de carburant qui leur étaient versées, car elles faisaient partie de leur salaire, ce que ces chauffeurs contestent.

32

Selon la juridiction de renvoi, à supposer que la directive 96/71 s’applique aux transports internationaux de marchandises, la situation faisant l’objet du litige au principal relève de cette directive, dès lors que l’employeur enregistré en Hongrie, Rapidsped, détache des travailleurs hongrois, les chauffeurs en cause au principal, employés en vertu du droit du travail hongrois dans d’autres États membres de l’Union européenne, pour son compte et sous sa direction, en vue de fournir des services de transport de marchandises aux clients du lieu de détachement. Les travailleurs, durant toute la période, ont été en relation de travail avec Rapidsped, responsable du détachement.

33

Dans ces conditions, le Gyulai Közigazgatási és Munkaügyi Bíróság (tribunal administratif et du travail de Gyula) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Faut-il interpréter l’article 1er, paragraphe 1, de la directive [96/71], compte tenu de ses articles 3 et 5, ainsi que des articles 285 et 299 du code du travail hongrois, en ce sens que la violation de cette directive et des dispositions de droit français en matière de salaire minimum peut être invoquée dans une procédure entamée par des travailleurs hongrois devant une juridiction hongroise contre l’employeur hongrois ?

2)

Les indemnités journalières destinées à couvrir les dépenses exposées pendant la durée du détachement des travailleurs à l’étranger doivent-elles être considérées comme une part de la rémunération ?

3)

L’article 10 du [règlement no 561/2006] fait-il obstacle à une pratique en vertu de laquelle l’employeur accorde aux chauffeurs une prime, basée sur une formule permettant de calculer les économies réalisées sous la forme d’une diminution de la consommation de carburant rapportée au trajet effectué, qui ne fait pas partie du salaire prévu par le contrat de travail de ces chauffeurs, et sur laquelle ils ne paient aucune taxe ou cotisation sociale, alors que, pour réaliser ces économies de carburant, les chauffeurs sont incités à conduire d’une manière susceptible d’accroître les risques pour la sécurité routière (par exemple, en roulant le plus longtemps possible en roue libre dans les descentes) ?

4)

La directive [96/71] s’applique-t-elle aux transports internationaux de marchandises, en particulier compte tenu du fait que la Commission européenne a engagé une procédure d’infraction contre la République française et la République fédérale d’Allemagne au motif que ces États membres appliquent leur réglementation sur le salaire minimum au secteur des transports routiers ?

5)

Une directive peut-elle en soi, en l’absence de transposition [dans le] droit national, faire naître une obligation telle pour un particulier que cette directive est en soi susceptible de fonder un recours [contre] ce particulier dans le cadre d’une procédure devant une juridiction nationale ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la quatrième question

34

Par sa quatrième question, qu’il convient d’examiner en premier lieu, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 96/71 doit être interprétée en ce sens qu’elle est applicable aux prestations de services transnationales dans le secteur du transport routier.

35

Il y a lieu de rappeler que, au point 41 de l’arrêt du 1er décembre 2020, Federatie Nederlandse Vakbeweging (C‑815/18, EU:C:2020:976), la Cour a jugé que tel était le cas.

36

Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la quatrième question que la directive 96/71 doit être interprétée en ce sens qu’elle est applicable aux prestations de services transnationales dans le secteur du transport routier.

Sur la première question

37

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 96/71, lu en combinaison avec les articles 3 et 5 de cette directive, doit être interprété en ce sens que la méconnaissance, par l’employeur établi dans un État membre, des dispositions d’un autre État membre en matière de salaire minimum peut être invoquée contre cet employeur par des travailleurs détachés du premier État membre, devant une juridiction de celui-ci.

38

À cet égard, il importe de rappeler que, afin d’assurer le respect d’un noyau de règles impératives de protection minimale, l’article 3, paragraphe 1, de la directive 96/71 prévoit que les États membres veillent à ce que, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail, les entreprises établies dans un État membre garantissent, dans le cadre d’une prestation de services transnationale, aux travailleurs détachés sur le territoire d’un autre État membre les conditions de travail et d’emploi applicables sur le territoire de celui-ci en ce qui concerne les matières énumérées dans cette disposition et, notamment, les taux de salaire minimal (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2015, Sähköalojen ammattiliitto, C‑396/13, EU:C:2015:86, point 29 et jurisprudence citée).

39

Quant à l’article 5 de la directive 96/71, le second alinéa de cette disposition impose aux États membres de veiller en particulier à ce que les travailleurs détachés disposent de procédures adéquates aux fins de l’exécution des obligations prévues par cette directive. Partant, lesdits travailleurs doivent pouvoir invoquer en justice le respect des conditions de travail et d’emploi visées à l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive, telles que celle relative aux taux de salaire minimal.

40

L’article 6 de la directive 96/71 dispose que, outre la faculté pour les travailleurs détachés d’intenter, dans un État membre dont les juridictions sont compétentes conformément aux conventions internationales existantes en matière de compétence judiciaire, une action en justice pour faire valoir le droit aux conditions de travail et d’emploi garanties à l’article 3 de cette directive, ces travailleurs peuvent également intenter une telle action devant les juridictions compétentes de l’État membre sur le territoire duquel ils sont ou étaient détachés.

41

Il s’ensuit que l’article 3, paragraphe 1, ainsi que les articles 5 et 6 de la directive 96/71 doivent être interprétés comme garantissant au travailleur détaché, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail, le droit d’invoquer et de faire valoir, devant l’une ou l’autre des juridictions compétentes visées au point précédent, les dispositions de l’État membre d’accueil relatives aux conditions de travail et d’emploi concernant les matières énumérées à cette première disposition et, notamment, les taux de salaire minimal.

42

Enfin, il convient de relever que, aux termes de l’article 21, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1215/2012, auquel l’article 6 de la directive 96/71 renvoie indirectement par référence aux « conventions internationales existantes en matière de compétence judiciaire », un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile.

43

En outre, l’article 62, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 prévoit que, pour déterminer si une partie a un domicile sur le territoire de l’État membre dont les juridictions sont saisies, le juge applique sa loi interne.

44

Ainsi, en l’occurrence, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, aux fins d’établir si elle est compétente en vertu du règlement no 1215/2012, si l’employeur des chauffeurs en cause au principal doit être considéré comme domicilié en Hongrie en vertu de la loi de cet État membre.

45

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 3, paragraphe 1, et l’article 6 de la directive 96/71, lus en combinaison avec l’article 5 de celle‑ci, doivent être interprétés en ce sens qu’ils exigent que la méconnaissance, par l’employeur établi dans un État membre, des dispositions d’un autre État membre en matière de salaire minimum puisse être invoquée contre cet employeur par des travailleurs détachés du premier État membre, devant une juridiction de celui-ci, si celle-ci est compétente.

Sur la deuxième question

46

Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 3, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 96/71 doit être interprété en ce sens que des indemnités journalières destinées à couvrir les dépenses exposées pendant la durée du détachement des travailleurs à l’étranger doivent être considérées comme faisant partie du salaire minimal.

47

À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, que l’article 3, paragraphe 1, second alinéa, de la directive 96/71 renvoie expressément à la législation ou à la pratique nationale de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché pour la détermination du taux de salaire minimal visé à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive (arrêt du 12 février 2015, Sähköalojen ammattiliitto, C‑396/13, EU:C:2015:86, point 32 et jurisprudence citée).

48

D’autre part, l’article 3, paragraphe 7, second alinéa, de ladite directive précise, en ce qui concerne les allocations propres au détachement, dans quelle mesure ces éléments de rémunération sont considérés comme faisant partie du salaire minimal dans le contexte des conditions de travail et d’emploi fixées à l’article 3 de la même directive (arrêt du 12 février 2015, Sähköalojen ammattiliitto, C‑396/13, EU:C:2015:86, point 33).

49

S’agissant de la question de savoir si une indemnité journalière, telle que celle en cause au principal, fait partie du salaire minimal, au sens de l’article 3 de la directive 96/71, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 3, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 96/71, une indemnité doit être qualifiée d’« allocation propre au détachement » faisant partie du salaire minimal lorsqu’elle n’est pas versée aux travailleurs à titre de remboursement de dépenses effectivement encourues à cause du détachement.

50

En l’occurrence, même si l’indemnité journalière en cause au principal est décrite, dans la note d’information établie par Rapidsped à l’intention de son personnel, comme étant destinée à couvrir les frais exposés à l’étranger par les travailleurs détachés, il n’en demeure pas moins que le montant de cette indemnité diffère selon que ce détachement dure trois, quatre ou cinq semaines, voire plus. Or, ce second élément, en particulier le caractère forfaitaire et progressif de ladite indemnité, semble indiquer que cette dernière a pour objet non pas tant la couverture des frais exposés par les travailleurs à l’étranger, mais plutôt, à l’instar de l’indemnité en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 février 2015, Sähköalojen ammattiliitto (C‑396/13, EU:C:2015:86, point 48), la compensation des inconvénients dus au détachement, consistant dans l’éloignement de ces travailleurs de leur environnement habituel.

51

En outre, il ne ressort pas du dossier dont dispose la Cour que cette indemnité serait versée à titre de remboursement de dépenses effectivement encourues, telles que les dépenses de voyage, de logement ou de nourriture.

52

Cependant, il convient de rappeler que les majorations et les suppléments, qui ne sont pas définis en tant qu’éléments faisant partie du salaire minimal par la législation ou la pratique nationale de l’État membre sur le territoire duquel le travailleur est détaché, et qui modifient le rapport entre la prestation du travailleur, d’une part, et la contrepartie que celui-ci perçoit, d’autre part, ne sauraient, en vertu des dispositions de la directive 96/71, être considérés comme de tels éléments. En effet, il est tout à fait normal que, si l’employeur exige que le travailleur fournisse un surplus de travail ou des heures de travail dans des conditions particulières, cette prestation supplémentaire soit compensée pour ce travailleur sans que cette compensation soit prise en compte pour le calcul du salaire minimal (arrêt du 14 avril 2005, Commission/Allemagne, C‑341/02, EU:C:2005:220, points 39 et 40).

53

En l’occurrence, à défaut pour la Cour de disposer de toutes les informations pertinentes, il incombe à la juridiction de renvoi d’effectuer les vérifications nécessaires à cet égard.

54

Compte tenu de toutes les considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la deuxième question que l’article 3, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 96/71 doit être interprété en ce sens qu’une indemnité journalière dont le montant diffère selon la durée du détachement du travailleur constitue une allocation propre au détachement faisant partie du salaire minimal, à moins qu’elle ne soit versée à titre de remboursement des dépenses effectivement encourues à cause du détachement, telles que les dépenses de voyage, de logement ou de nourriture ou qu’elle corresponde à une majoration qui modifie le rapport entre la prestation du travailleur, d’une part, et la contrepartie que celui-ci perçoit, d’autre part.

Sur la troisième question

55

Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 10 du règlement no 561/2006 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’une entreprise de transport routier accorde aux conducteurs une prime calculée sur les économies réalisées sous la forme d’une diminution de la consommation de carburant rapportée au trajet effectué.

56

Conformément à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 561/2006, il est interdit aux entreprises de transport de rémunérer les conducteurs qu’elles emploient ou qui sont mis à leur disposition en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises transportées, même par l’octroi de primes ou de majorations de salaire, si une telle rémunération est de nature à compromettre la sécurité routière et/ou à encourager les infractions à ce règlement.

57

Ainsi, l’applicabilité de cette disposition présuppose que deux conditions soient remplies. D’une part, la rémunération des conducteurs, quand bien même serait-elle allouée sous la forme de primes ou de majorations de salaire, doit être calculée en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises transportées. D’autre part, une telle rémunération doit être de nature à compromettre la sécurité routière et/ou à encourager les infractions au règlement no 561/2006.

58

Il peut, en outre, être noté qu’il ressort de la directive 2003/59, et en particulier de son considérant 10 ainsi que de son annexe I, lue en combinaison avec la directive 2006/126, que l’exigence selon laquelle les conducteurs de véhicules servant au transport sur route de marchandises, dont la masse dépasse 3,5 tonnes et qui relèvent du règlement no 561/2006, soient formés à l’optimalisation de la consommation de carburant est de nature à avoir des effets positifs aussi bien pour la société que pour le secteur des transports routiers lui‑même.

59

Partant, dès lors que le droit de l’Union exige que les conducteurs desdits véhicules disposent de la capacité de conduire de manière rationnelle et économique, l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 561/2006 ne saurait être considéré comme interdisant, en principe, aux entreprises de transport de promouvoir ce type de conduite par une incitation pécuniaire sous la forme d’une prime.

60

Toutefois, une telle prime ne serait pas compatible avec ladite disposition si, au lieu d’être uniquement liée à l’économie de carburant, elle récompensait une telle économie en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises à transporter selon des modalités incitant le conducteur à des comportements de nature à compromettre la sécurité routière et/ou à commettre des infractions au règlement no 561/2006.

61

Il appartient, dès lors, à la juridiction de renvoi de déterminer, au regard de ces considérations relatives à la portée de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 561/2006, les caractéristiques et les effets de la prime en cause au principal.

62

À toutes fins utiles, il importe de relever que l’économie de carburant dépend d’une multitude de facteurs, de sorte que la simple hypothèse qu’une prime à l’économie de carburant pourrait inciter certains conducteurs à rouler en roue libre dans les descentes ne saurait permettre, à elle seule, de conclure qu’une telle prime viole l’interdiction établie à l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 561/2006.

63

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 561/2006 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas, en principe, à ce qu’une entreprise de transport routier accorde aux conducteurs une prime calculée sur les économies réalisées sous la forme d’une diminution de la consommation de carburant rapportée au trajet effectué. Toutefois, une telle prime violerait l’interdiction établie à cette disposition si, au lieu d’être uniquement liée à l’économie de carburant, elle récompensait une telle économie en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises à transporter selon des modalités incitant le conducteur à des comportements de nature à compromettre la sécurité routière ou à commettre des infractions au règlement no 561/2006.

Sur la cinquième question

64

Par sa cinquième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une directive qui n’a pas été transposée dans le droit national peut faire naître dans le chef d’un particulier une obligation qui peut être invoquée contre lui en justice par un autre particulier.

65

À cet égard, s’il est de jurisprudence constante que, lorsqu’une interprétation conforme du droit national s’avère impossible, même une disposition claire, précise et inconditionnelle d’une directive visant à conférer des droits ou à imposer des obligations aux particuliers ne saurait trouver application en tant que telle dans le cadre d’un litige qui oppose exclusivement des particuliers (voir, en ce sens, arrêt du 7 août 2018, Smith, C‑122/17, EU:C:2018:631, points 41 et 43 ainsi que jurisprudence citée), il convient de constater, à l’instar de ce qu’a relevé M. l’avocat général au point 74 de ses conclusions, que, en l’occurrence, la juridiction de renvoi n’a fourni de précisions ni sur les raisons qui l’ont amenée à poser la présente question ni sur le lien existant entre les dispositions pertinentes de la directive 96/71, qui, au demeurant, n’ont pas été identifiées par cette juridiction, et la législation nationale applicable au litige au principal.

66

Or, en vertu de l’article 94, sous c), du règlement de procédure de la Cour, toute demande de décision préjudicielle contient notamment « l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal. »

67

Par ailleurs, selon une jurisprudence constante de la Cour, afin de lui permettre de remplir sa mission conformément aux traités dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, il est indispensable que les juridictions nationales expliquent les raisons précises pour lesquelles elles considèrent qu’une réponse à leurs questions est nécessaire à la solution du litige au principal (ordonnance du 14 avril 2021, Casa di Cura Città di Parma, C‑573/20, non publiée, EU:C:2021:307, point 30 et jurisprudence citée).

68

Il s’ensuit que la cinquième question est irrecevable.

Sur les dépens

69

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

 

1)

La directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, doit être interprétée en ce sens qu’elle est applicable aux prestations de services transnationales dans le secteur du transport routier.

 

2)

L’article 3, paragraphe 1, et l’article 6 de la directive 96/71, lus en combinaison avec l’article 5 de celle-ci, doivent être interprétés en ce sens qu’ils exigent que la méconnaissance, par l’employeur établi dans un État membre, des dispositions d’un autre État membre en matière de salaire minimum puisse être invoquée contre cet employeur par des travailleurs détachés du premier État membre, devant une juridiction de celui-ci, si celle-ci est compétente.

 

3)

L’article 3, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 96/71 doit être interprété en ce sens qu’une indemnité journalière dont le montant diffère selon la durée du détachement du travailleur constitue une allocation propre au détachement faisant partie du salaire minimal, à moins qu’elle ne soit versée à titre de remboursement des dépenses effectivement encourues à cause du détachement, telles que les dépenses de voyage, de logement ou de nourriture ou qu’elle corresponde à une majoration qui modifie le rapport entre la prestation du travailleur, d’une part, et la contrepartie que celui-ci perçoit, d’autre part.

 

4)

L’article 10, paragraphe 1, du règlement (CE) no 561/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, relatif à l’harmonisation de certaines dispositions de la législation sociale dans le domaine des transports par route, modifiant les règlements (CEE) no 3821/85 et (CE) no 2135/98 du Conseil et abrogeant le règlement (CEE) no 3820/85 du Conseil, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas, en principe, à ce qu’une entreprise de transport routier accorde aux conducteurs une prime calculée sur les économies réalisées sous la forme d’une diminution de la consommation de carburant rapportée au trajet effectué. Toutefois, une telle prime violerait l’interdiction établie à cette disposition si, au lieu d’être uniquement liée à l’économie de carburant, elle récompensait une telle économie en fonction de la distance parcourue et/ou du volume des marchandises à transporter selon des modalités incitant le conducteur à des comportements de nature à compromettre la sécurité routière ou à commettre des infractions au règlement no 561/2006.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le hongrois.

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