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Document 62011CC0254

    Conclusions de l'avocat général Cruz Villalón présentées le 6 décembre 2012.
    Szabolcs-Szatmár-Bereg Megyei Rendőrkapitányság Záhony Határrendészeti Kirendeltsége contre Oskar Shomodi.
    Demande de décision préjudicielle: Legfelsőbb Bíróság - Hongrie.
    Espace de liberté, de sécurité et de justice - Petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres - Règlement (CE) nº 1931/2006 - Règlement (CE) nº 562/2006 - Durée maximale du séjour - Règles de calcul.
    Affaire C-254/11.

    Court reports – general

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2012:773

    CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

    M. PEDRO CRUZ VILLALÓN

    présentées le 6 décembre 2012 ( 1 )

    Affaire C‑254/11

    Szabolcs-Szatmár-Bereg Megyei Rendőrkapitányság Záhony Határrendészeti Kirendeltsége

    contre

    Oskar Shomodi

    [demande de décision préjudicielle formée par la Magyar Köztársaság Legfelsőbb Bírósága (Hongrie)]

    «Espace de liberté, de sécurité et de justice — Petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures de l’Union — Règlement (CE) no 1931/2006 — Article 5 — Frontaliers — Calcul de la durée maximale de séjour ininterrompu autorisé — Convention bilatérale — Durée maximale de séjour ininterrompu de trois mois sur une période de six mois — Respect de la vie privée — Article 7 de la Charte — Article 8 de la CEDH — Liberté de franchissement de la frontière — Raisons légitimes — Prévention et sanction des abus — Juste équilibre»

    1. 

    La Cour est pour la première fois invitée à interpréter les dispositions du règlement (CE) no 1931/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, fixant des règles relatives au petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres et modifiant les dispositions de la convention de Schengen ( 2 ).

    2. 

    Le régime propre au petit trafic frontalier, qui déroge aux règles générales régissant le contrôle des personnes aux frontières terrestres extérieures des États membres, s’efforce, d’une manière générale, de répondre à la situation des populations établies dans les zones frontalières, qui souvent perçoivent le tracé des frontières étatiques comme une circonstance artificielle portant préjudice ou, à tout le moins, constitutive d’un obstacle pratique au développement de leur vie sociale dans ses différentes dimensions. Cette constatation vaut tout particulièrement pour les populations qui ont été affectées par des déplacements des frontières relativement fréquents au cours du siècle dernier.

    3. 

    La ratio legis de cette réglementation singulière, qui présente la particularité de déléguer aux États membres le soin de conclure avec les États tiers concernés des accords bilatéraux de mise en œuvre du régime qu’il établit, nous conduira à inviter la Cour à déclarer qu’un régime de franchissement des frontières institué dans le contexte du petit trafic frontalier, tel que celui en cause dans l’affaire au principal, ne peut, eu égard à la logique propre au régime établi par le règlement no 1931/2006 et aux impératifs découlant, notamment, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 3 ) et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 ( 4 ), trouver un appui dans les dispositions de l’article 5 dudit règlement, quand bien même cette disposition serait lue en combinaison avec l’article 20 de la convention d’application de l’accord de Schengen, signée à Schengen le 19 juin 1990 ( 5 ).

    I – Le cadre juridique

    4.

    La présente affaire s’inscrit dans un cadre juridique singulier. Ce cadre est, en effet, principalement constitué, d’une part, d’un acte de droit international, en l’occurrence l’accord relatif au petit trafic frontalier, signé le 18 septembre 2007 à Oujgorod entre le gouvernement hongrois et le cabinet des ministres de l’Ukraine ( 6 ), et, d’autre part, d’un acte de droit dérivé de l’Union, le règlement no 1931/2006, le premier adopté sur «autorisation» du second. Seules les principales dispositions pertinentes dudit accord bilatéral et dudit règlement sont reprises ci-dessous, bien qu’ils s’inscrivent dans un cadre juridique plus général, constitué notamment de l’acquis de Schengen ( 7 ), du code frontières Schengen ( 8 ) et du code des visas ( 9 ).

    A – Le droit international: l’accord bilatéral conclu par la Hongrie

    5.

    L’article 1er, paragraphes 1 et 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie dispose:

    «1.   Les personnes qui résident depuis au moins trois ans de façon permanente dans les lieux situés dans la zone frontalière énumérés dans l’annexe 1 au présent accord en possession du permis de franchissement local de la frontière visé à l’article 2 peuvent entrer et séjourner sans autre autorisation dans la zone frontalière de l’État de l’autre partie contractante.

    […]

    5.   Le permis prévu à l’article 2 autorise son titulaire à des entrées multiples et à un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois au cours d’une période de six mois dans la zone frontalière de l’État de l’autre partie contractante, en particulier pour des raisons sociales, culturelles ou familiales, ou pour des raisons économiques justifiées qui ne sont pas qualifiables d’activités professionnelles au sens de la législation nationale. Les frontaliers entrés avec ledit permis ne sont pas autorisés à séjourner en dehors de la zone frontalière de l’État de l’autre partie contractante.

    […]»

    B – Le droit de l’Union: le règlement no 1931/2006

    6.

    Les considérants 2 à 4, 9 et 13 du règlement no 1931/2006 prévoient:

    «(2)

    Il est de l’intérêt de la Communauté élargie de faire en sorte que les frontières avec ses voisins ne soient pas une barrière aux échanges commerciaux, sociaux et culturels, ni à la coopération régionale. C’est pourquoi il convient de mettre en place un régime efficace pour le petit trafic frontalier.

    (3)

    Le régime propre au petit trafic frontalier constitue une dérogation aux règles générales régissant le contrôle des personnes aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne qui sont fixées dans le [code frontières Schengen].

    (4)

    La Communauté devrait arrêter les critères et conditions à remplir lorsque le franchissement des frontières terrestres extérieures des États membres en vertu du régime propre au petit trafic frontalier est facilité pour les frontaliers. Ces critères et conditions devraient assurer un équilibre entre, d’une part, le franchissement facilité de la frontière par les frontaliers de bonne foi qui ont des raisons légitimes de franchir fréquemment une frontière terrestre extérieure et, d’autre part, la nécessité d’empêcher l’immigration clandestine et de contrer les menaces potentielles que les activités criminelles font peser sur la sécurité.

    […]

    (9)

    Afin d’assurer l’application du régime propre au petit trafic frontalier, les États membres devraient être autorisés à maintenir ou à conclure bilatéralement, en tant que de besoin, des accords bilatéraux avec des pays tiers voisins, sous réserve que ces accords soient conformes aux règles fixées par le présent règlement.

    […]

    (13)

    Le présent règlement respecte les libertés et droits fondamentaux et observe les principes qui sont notamment reconnus par la [Charte].»

    7.

    L’article 2, sous a) et b), du règlement no 1931/2006 dispose:

    «Le présent règlement s’applique sans préjudice des dispositions de droit communautaire et de droit national applicables aux ressortissants de pays tiers en matière:

    a)

    de séjour de longue durée;

    b)

    d’accès à une activité économique et d’exercice d’une telle activité».

    8.

    L’article 5 du règlement no 1931/2006, intitulé «Durée du séjour dans la zone frontalière», dispose:

    «Les accords bilatéraux visés à l’article 13 précisent la durée maximale autorisée dans le cadre du régime propre au petit trafic frontalier pour chaque séjour non interrompu effectué, celle-ci ne pouvant dépasser trois mois.»

    9.

    La conclusion par les États membres des accords bilatéraux avec les pays tiers voisins visés à l’article 5 du règlement no 1931/2006 est régie par l’article 13 dudit règlement, qui prévoit:

    «1.   Aux fins de la mise en œuvre du régime propre au petit trafic frontalier, les États membres sont autorisés à conclure avec les pays tiers voisins des accords bilatéraux conformes aux règles énoncées dans le présent règlement.

    Les États membres peuvent aussi maintenir des accords bilatéraux déjà conclus avec les pays tiers voisins en matière de petit trafic frontalier. Si ces accords ne sont pas compatibles avec le présent règlement, les États membres concernés les modifient de manière à éliminer les incompatibilités constatées.

    2.   Avant de conclure ou de modifier tout accord bilatéral en matière de petit trafic frontalier avec un pays tiers voisin, l’État membre concerné consulte la Commission afin d’en vérifier la compatibilité avec le présent règlement.

    Si la Commission estime que l’accord est incompatible avec le présent règlement, elle en informe l’État membre concerné. L’État membre prend toutes les mesures nécessaires afin de modifier ledit accord dans un délai raisonnable, de manière à éliminer les incompatibilités constatées.

    3.   Lorsque la Communauté ou l’État membre concerné n’a pas conclu un accord général de réadmission avec un pays tiers, les accords bilatéraux en matière de petit trafic frontalier conclus avec ce pays tiers comportent des dispositions visant à faciliter la réadmission des personnes ayant fait une utilisation abusive du régime propre au petit trafic frontalier établi par le présent règlement.»

    10.

    L’article 14 du règlement no 1931/2006 dispose:

    «Dans les accords bilatéraux visés à l’article 13, les États membres font en sorte que les pays tiers accordent aux personnes jouissant du droit communautaire à la libre circulation et aux ressortissants de pays tiers qui résident légalement dans la zone frontalière de l’État membre concerné un traitement au moins comparable à celui qui est accordé aux frontaliers du pays tiers concerné.»

    11.

    L’article 20 du règlement no 1931/2006 a, par ailleurs, modifié l’article 136, paragraphe 3, de la CAAS. Ledit article 136, tel que modifié, dispose:

    «1.   Une Partie Contractante qui envisage de mener avec un État tiers des négociations relatives aux contrôles frontaliers en informe en temps utile les autres Parties Contractantes.

    2.   Aucune Partie Contractante ne conclura avec un ou plusieurs États tiers des accords portant simplification ou suppression des contrôles aux frontières sans l’accord préalable des autres Parties Contractantes, sous réserve du droit des États membres des Communautés européennes de conclure en commun de tels accords.

    3.   Le paragraphe 2 ne s’applique pas aux accords bilatéraux relatifs au petit trafic frontalier qui sont visés à l’article 13 du règlement [no 1931/2006].»

    C – Le droit hongrois

    12.

    L’article 40, paragraphe 1, de la loi no II de 2007, relative à l’entrée et au séjour des ressortissants de pays tiers (2007. évi II. törvény a harmadik országbeli állampolgárok beutazásáról és tartózkodásáról ( 10 )), prévoit:

    «Sur le fondement des dispositions du code frontières Schengen, l’autorité compétente en matière de contrôle du trafic frontalier refuse l’entrée sur son territoire d’un ressortissant d’un pays tiers souhaitant séjourner sur son territoire pour une durée inférieure ou égale à trois mois, et – tout en tenant compte de ses intérêts – le refoule […]»

    II – Les faits à l’origine du litige au principal

    13.

    M. Shomodi ( 11 ), est un ressortissant ukrainien titulaire d’un permis de franchissement local de la frontière, délivré conformément au règlement no 1931/2006 et en cours de validité, qui s’est présenté, le 2 février 2010, au poste frontière routier de Záhony (Hongrie) en vue d’accéder à la zone frontalière du territoire hongrois définie en application dudit règlement.

    14.

    La Szabolcs-Szatmár-Bereg Megyei Rendőrkapitányság Záhony Határrendészeti Kirendeltsége (direction départementale de la police de Szabolcs-Szatmár-Bereg, commissariat de la police des frontières de Záhony) ( 12 ) a, toutefois, refusé son entrée sur le territoire hongrois dans le cadre du petit trafic frontalier, sur le fondement de l’article 40, paragraphe 1, de la loi no II de 2007. Elle avait, en effet, constaté, en consultant les données du système d’entrée et de sortie du territoire que le défendeur au principal avait passé, au cours de la période du 3 septembre 2009 au 2 février 2010, 105 jours sur le territoire hongrois en comptant les entrées et les sorties multiples, dépassant ainsi les 93 jours autorisés.

    15.

    Le consul général d’Ukraine à Nyíregyháza (Hongrie) et le défendeur au principal ont introduit un recours devant la Szabolcs-Szatmár-Bereg megyei bíróság (cour départementale de Szabolcs-Szatmár-Bereg, Hongrie) contre cette décision, faisant valoir qu’elle était entachée d’une violation de l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie.

    16.

    La Szabolcs-Szatmár-Bereg megyei bíróság a accueilli le recours, en considérant que l’article 1er, paragraphe 5, l’accord bilatéral conclu par la Hongrie devait être compris, à la lumière du droit de l’Union, en ce sens que le titulaire d’un permis de franchissement local de la frontière dispose, d’une part, d’un nombre illimité d’entrées sur le territoire hongrois et, d’autre part, d’un droit de séjour non interrompu ne pouvant excéder trois mois au cours d’une période de six mois. Il a ainsi estimé que le titulaire d’un permis de franchissement local de la frontière disposait d’un nombre illimité d’entrées et que la limite temporelle de trois mois ne concernait que le séjour non interrompu. Il a également jugé que ni le code frontières Schengen ni les dispositions de la loi no II de 2007 n’étaient applicables dans le cadre du petit trafic frontalier.

    17.

    La requérante au principal a introduit un pourvoi en cassation devant la Magyar Köztársaság Legfelsőbb Bírósága contre le jugement de la Szabolcs-Szatmár-Bereg megyei bíróság, dans le cadre duquel elle fait valoir que l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie retenue par cette dernière est contraire à l’article 20, paragraphe 1, de la CAAS, au considérant 3 du code frontières Schengen, ainsi qu’aux articles 2, sous a), et 5 du règlement no 1931/2006. Elle fait valoir que le séjour non interrompu visé par cette disposition de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie doit être compris en ce sens que le permis de franchissement local de la frontière est valable pour une durée maximale de trois mois, à raison de 31 jours chacun, soit 93 jours au total compris dans une période de six mois à compter de la première entrée.

    III – Les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

    18.

    C’est dans ces circonstances que la Magyar Köztársaság Legfelsőbb Bírósága a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)

    La disposition de l’article 5 du règlement [no 1931/2006], autorisant un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois, doit-elle être interprétée – compte tenu notamment de l’article 2, sous a), et de l’article 3, point 3, de ce même règlement – en ce sens que ledit règlement permet, sur le fondement des accords bilatéraux entre les États membres et les pays tiers voisins visés à l’article 13 de ce même règlement, des entrées et des sorties multiples et un séjour non interrompu d’au maximum trois mois de telle sorte que, avant l’expiration du délai de séjour de trois mois, un frontalier disposant d’un permis de franchissement local de la frontière peut interrompre le séjour non interrompu puis, après avoir de nouveau franchi la frontière, a de nouveau un droit de séjour non interrompu de trois mois?

    2)

    Dans l’hypothèse d’une réponse affirmative à la première question, le séjour non interrompu au sens de l’article 5 du règlement no 1931/2006 peut-il être considéré comme étant interrompu lorsque l’entrée et la sortie ont lieu le même jour, ou lors de deux jours consécutifs?

    3)

    Dans l’hypothèse d’une réponse affirmative à la première question, mais d’une réponse négative à la deuxième question, quel intervalle ou quel autre critère d’appréciation est-il alors nécessaire de prendre en considération pour constater une interruption du séjour non interrompu aux fins de l’application de l’article 5 du règlement no 1931/2006?

    4)

    Dans l’hypothèse d’une réponse négative à la première question, la disposition autorisant un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois en application de l’article 5 du règlement no 1931/2006 peut-elle être interprétée en ce sens qu’il convient d’additionner le temps passé pendant les sorties et les entrées multiples et que, eu égard à l’article 20, paragraphe 1, de la [CAAS] – ou à toute autre règle concernant le droit de l’espace Schengen – dès lors que le total des jours ainsi décomptés atteint 93 jours, soit trois mois, il convient de considérer que le permis de franchissement local de la frontière ne confère plus de droit de séjour pour la période de six mois à compter de la date de première entrée?

    5)

    Dans l’hypothèse d’une réponse affirmative à la quatrième question, convient-il de prendre également en compte, aux fins de cette addition, des entrées et des sorties multiples au cours d’une même journée, ou une entrée et sortie unique au cours d’une même journée, et quelle méthode de calcul convient-il de retenir à cette fin?»

    19.

    Des observations écrites ont été présentées par le défendeur au principal, la Hongrie, la République de Pologne, la Roumanie, la République slovaque ainsi que par la Commission.

    20.

    La requérante au principal, la Hongrie, la Roumanie ainsi que la Commission ont également présenté des observations orales lors de l’audience qui s’est tenue le 14 juin 2012.

    IV – Analyse

    A – Observations liminaires sur l’ordre d’examen des questions préjudicielles

    21.

    Il convient de préciser d’emblée que, eu égard aux faits en cause dans le litige au principal ainsi qu’au cadre juridique dans lequel ce dernier s’inscrit, et en particulier aux dispositions pertinentes de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, c’est essentiellement le problème soulevé par la quatrième question préjudicielle formulée par la juridiction de renvoi qui doit retenir l’attention.

    22.

    En effet, et tout d’abord, il ressort du dossier que le défendeur au principal s’est vu refuser l’accès au territoire hongrois parce que la somme des séjours qu’il y avait accompli dépassait trois mois au cours d’une période de six mois. Plus précisément, la décision litigieuse n’était, d’une part, motivée que par la durée totale cumulée des séjours de l’intéressé en Hongrie et était, d’autre part, fondée sur les seules dispositions de l’article 40, paragraphe 1, de la loi no II de 2007, renvoyant au seul code frontières Schengen.

    23.

    Or, la quatrième question de la juridiction de renvoi porte, en relation directe avec les faits en cause au principal, sur la compatibilité avec l’article 5 du règlement no 1931/2006 du régime découlant de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie. L’article 1er, paragraphe 5, dudit accord autorise, en effet, «des entrées multiples et un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois», conformément à l’article 5 du règlement no 1931/2006, mais seulement, en référence implicite à l’article 20 de la CAAS ou à l’article 5 du code frontières Schengen, «au cours d’une période de six mois dans la zone frontalière» couverte par ledit accord. Cette même disposition permettrait, en outre, suivant l’hypothèse soumise par la juridiction de renvoi, d’additionner la durée des multiples séjours accomplis par une personne en Hongrie aux fins du calcul de la durée maximale de trois mois de séjour au cours d’une période de six mois.

    24.

    En revanche, les trois premières questions de la juridiction de renvoi reposent sur un fondement hypothétique. Ces questions envisagent, en effet, l’hypothèse d’une personne utilisant son permis de franchissement local de la frontière pour, en quelque sorte, optimiser légalement son temps de présence sur le territoire d’un État membre, en y séjournant de manière ininterrompue pendant le délai maximal de trois mois prévu à l’article 5 du règlement no 1931/2006 puis repassant la frontière, le cas échéant dans la même journée, de manière à se rouvrir un droit de séjour de trois mois, en dénaturant ainsi la finalité du régime propre au petit trafic frontalier.

    25.

    Enfin, la cinquième question, qui complète en quelque sorte la quatrième question en l’ouvrant, porte quant à elle sur les modalités de calcul de la durée des séjours résultant de déplacements uniques ou multiples inférieurs à 24 heures.

    26.

    Une réponse négative à la quatrième question implique qu’il ne sera pas nécessaire de répondre à la cinquième question. Par ailleurs, les trois premières questions envisageant une hypothèse d’abus de droit, dans la mesure où elles se référent à des déplacements transfrontaliers susceptibles de camoufler une résidence dissimulée et dénaturant la finalité du régime propre au petit trafic frontalier, c’est dans cette perspective qu’elles seront abordées, dans le cadre de la réponse à apporter à la quatrième question.

    B – La mise en œuvre du règlement no 1931/2006

    1. Les accords bilatéraux prévus à l’article 13 du règlement no 1931/2006

    27.

    Le règlement no 1931/2006 présente l’originalité de déléguer certains aspects de sa mise en œuvre aux États membres concernés, en les habilitant à conclure ( 13 ), conformément à son article 13, des accords bilatéraux conformes aux règles dudit règlement, appelés à se substituer à ceux qui existaient antérieurement ( 14 ).

    28.

    L’article 5 du règlement no 1931/2006 prévoit ainsi que ces accords bilatéraux doivent préciser la durée maximale autorisée pour chaque séjour non interrompu accompli au titre dudit régime, étant précisé que cette durée ne saurait dépasser trois mois.

    29.

    Les États membres disposent donc, dans le cadre de l’obligation qui leur est ainsi imposée, c’est-à-dire pour autant que soit fixée une durée maximale de séjour ininterrompu de trois mois au plus, et sous réserve, plus largement, du respect du droit de l’Union ( 15 ), d’une réelle marge de négociation avec les États tiers concernés pour préciser les modalités, notamment temporelles, d’exercice des droits découlant du régime propre au petit trafic frontalier.

    30.

    La pratique suivie par les différents États membres et États tiers concernés témoigne du reste, pour autant que l’on puisse en juger ( 16 ), de cette latitude. Certains de ces accords peuvent prévoir une durée maximale de séjour relativement courte ( 17 ), sans autres conditions. D’autres, fixent, à l’instar de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, la durée maximale de séjour ininterrompu autorisé, mais sur une période déterminée, comme c’est le cas des accords conclus par la République de Pologne avec, respectivement, l’Ukraine ( 18 ) et la République de Biélorussie ( 19 ), ou encore de l’accord conclu par la République slovaque avec l’Ukraine ( 20 ). L’accord conclu par la Roumanie avec la République de Moldavie, se borne quant à lui à prévoir une limite maximale de séjour non interrompu de trois mois dans la disposition définissant le petit trafic frontalier ( 21 ).

    31.

    Il importe toutefois de souligner également que, conformément à l’article 13 du règlement no 1931/2006, la conclusion ou le maintient de ces accords bilatéraux intervient sur «autorisation» de l’Union et sous contrôle préalable par la Commission, avant leur conclusion ou leur modification, de leur compatibilité avec les règles dudit règlement. Partant, s’il est vrai que les États membres disposent, dans le cadre des règles établies par le règlement no 1931/2006, d’une réelle latitude pour définir d’un commun accord avec les États tiers les modalités précises de mise en œuvre dudit règlement, les autorités et juridictions compétentes des États membres doivent également interpréter et appliquer les dispositions adoptées à la lumière du texte et de la finalité dudit règlement et en conformité avec l’ensemble des dispositions du droit de l’Union.

    2. L’accord bilatéral conclu par la Hongrie

    32.

    L’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie s’inscrit dans les exigences posées par l’article 5 du règlement no 1931/2006, mais dans des termes qui ne sont pas dénués d’ambiguïté.

    33.

    Cette disposition prévoit, en effet, que le permis de franchissement local de la frontière prévu à son article 2 «autorise son titulaire à des entrées multiples et à un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois au cours d’une période de six mois dans la zone frontalière». Elle fixe, ce faisant, clairement la durée maximale de séjour non interrompu autorisé au titre du petit trafic frontalier à trois mois, tout en limitant ces possibilités de séjour ininterrompu «au cours d’une période de six mois».

    34.

    Telle qu’ainsi formulée cette disposition se prête, toutefois, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, à des interprétations divergentes de la part des autorités et des juridictions hongroises.

    35.

    Suivant la première approche, suivie par la Szabolcs-Szatmár-Bereg megyei bíróság, le défendeur au principal et le consul général d’Ukraine en Hongrie, l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie autoriserait, d’une part, de multiples entrées et, d’autre part, un séjour non interrompu d’une durée maximale de trois mois au cours d’une période de six mois.

    36.

    Suivant la seconde approche, défendue par les autorités hongroises compétentes, cette disposition devrait être interprétée et appliquée de telle sorte que la durée maximale de trois mois sur une période de six mois puisse être calculée par addition de la durée des éventuels multiples séjours accomplis par une personne, quelle que soit leur durée respective.

    37.

    L’accord bilatéral conclu par la Hongrie reposerait ainsi, suivant cette seconde approche, sur l’idée que l’article 5 du règlement no 1931/2006, lu en combinaison avec l’article 20 de la CAAS ou l’article 5 du code frontières Schengen, établirait un régime de «crédit-temps», chaque unité de présence continue étant comptabilisée aux fins du calcul de la durée maximale de trois mois sur une période de six mois autorisée. Les titulaires d’un permis de franchissement local de la frontière disposeraient ainsi, par période de six mois, d’un droit de séjour total de trois mois, susceptible d’être réparti librement, en ce compris de manière concentrée et continue sur une seule période, étant précisé que, dans ce dernier cas, toute possibilité de franchir la frontière sous le régime du petit trafic pendant la période de trois mois suivante serait exclue. Par conséquent, un frontalier qui séjournerait de manière ininterrompue pendant trois mois dans la zone frontalière d’un État membre au tout début d’une période de six mois et qui retournerait dans son État tiers au terme de cette période ne pourrait plus franchir à nouveau la frontière pendant les trois mois suivants.

    C – La compatibilité avec l’article 5 du règlement no 1931/2006 de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie et de son interprétation

    38.

    L’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie répond «formellement» à l’exigence posée par l’article 5 du règlement no 1931/2006, en fixant la durée maximale de séjour non interrompu autorisé à trois mois. Cette disposition ne saurait donc être considérée comme étant incompatible en tant que telle avec les dispositions pertinentes du règlement no 1931/2006 et peut même être considérée comme étant littéralement conforme à ces dernières ( 22 ). Le point est que cette interprétation grammaticale ne saurait suffire.

    39.

    En effet, le simple constat du respect textuel du règlement no 1931/2006 ne saurait permettre de conclure que l’article 5 de ce dernier admette une interprétation selon laquelle le régime ainsi établi par l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, tel qu’interprété et appliqué par les autorités hongroises compétentes, est parfaitement compatible avec le droit de l’Union, nonobstant les dispositions de l’article 20 de la CAAS et de l’article 5 du code frontières Schengen.

    40.

    Il convient, en effet, d’examiner en particulier si l’exigence supplémentaire consistant à limiter les possibilités de séjour ininterrompu à trois mois «au cours d’une période de six mois» ( 23 ) jointe à la méthode de calcul de la durée maximale de séjour de trois mois sur une période de six mois, par addition de la durée de l’ensemble des séjours multiples effectués dans la zone frontalière, sont parfaitement compatibles avec le texte et la finalité du règlement no 1931/2006 et, plus largement, avec l’ensemble des dispositions du droit de l’Union et notamment du droit primaire.

    1. Sur le sens du règlement no 1931/2006

    a) Sur la logique du régime propre au petit trafic frontalier

    41.

    Les considérants du règlement no 1931/2006 fournissent quelques indications sur les fondements et les finalités du régime propre au petit trafic frontalier qu’il institue ( 24 ). Ils indiquent que cette réglementation spécifique a été spécialement adoptée afin d’éviter que les frontières terrestres de l’Union avec ses voisins ne constituent «une barrière aux échanges commerciaux, sociaux et culturels [ainsi qu’à] la coopération régionale» ( 25 ). L’article 3, point 3, du règlement no 1931/2006, qui définit le «petit trafic frontalier», évoque également des raisons sociales et culturelles, mais aussi des «raisons économiques justifiées» ou des raisons «d’ordre familial» ( 26 ).

    42.

    Dans cette perspective, le régime propre au petit trafic frontalier institué par le règlement no 1931/2006 a fondamentalement pour objet de garantir un équilibre entre, d’une part, la nécessité de faciliter le franchissement des frontières terrestres extérieures de l’Union par «les frontaliers de bonne foi qui ont des raisons légitimes de franchir fréquemment [celles-ci]» et, d’autre part, «la nécessité d’empêcher l’immigration clandestine et de contrer les menaces potentielles que les activités criminelles font peser sur la sécurité» ( 27 ).

    43.

    En termes très généraux, l’institution d’un «système efficace et convivial de gestion du petit trafic frontalier» ( 28 ) est ainsi envisagée à la fois comme un «volet essentiel de toute politique de développement régional» ( 29 ) et une pièce indispensable à l’efficacité du dispositif de contrôle aux frontières extérieures mis en place par l’Union concomitamment à la suppression des frontières intérieures dans le cadre de la constitution de l’espace de liberté, de sécurité et de justice ( 30 ).

    44.

    C’est donc en tenant compte du contexte historique, culturel, économique et social, dans lequel s’inscrit le régime qu’il institue que la ratio legis du règlement no 1931/2006 doit être dégagée, ses dispositions interprétées et sa mise en œuvre appréciée.

    45.

    Il peut être utile de rappeler, à cet égard, que la région, dans laquelle s’est concrétisé le litige au principal a été le théâtre d’une histoire mouvementée au cours du XXe siècle, marquée par de multiples modifications des frontières ( 31 ).

    46.

    Dans ce contexte, le règlement no 1931/2006 instaure le «permis local de franchissement de la frontière» ( 32 ), dont il définit les principales conditions et modalités de délivrance ( 33 ) ainsi que les conditions de validité ( 34 ), et définit les conditions d’entrée et de sortie du territoire des États membres des titulaires dudit permis, tout en autorisant les États membres à maintenir ou à conclure avec les États tiers voisins les accords bilatéraux nécessaires à la mise en œuvre du régime ainsi institué.

    47.

    Il importe à cet égard d’insister tout d’abord sur le fait que ni l’article 5 du règlement no 1931/2006 ni aucune autre disposition de ce dernier ne prévoient que la durée totale du droit de séjour des bénéficiaires du régime propre au petit trafic frontalier doive être limitée à la durée maximale de séjour non interrompu calculée sur une période déterminée de six mois ( 35 ).

    48.

    Il doit être relevé, ensuite, que le régime propre au petit trafic frontalier se caractérise essentiellement, d’une part, par la limitation tant ratione personæ ( 36 ) que ratione loci ( 37 ), sous peine de sanction ( 38 ), de son champ d’application et, d’autre part, par sa finalité, qui est de permettre à ses bénéficiaires de franchir «fréquemment» ( 39 ) et «régulièrement» ( 40 ) une frontière terrestre extérieure, pour autant qu’ils aient des raisons légitimes de le faire.

    49.

    Force est cependant de constater que le règlement no 1931/2006 ne fournit que peu de précisions sur ce que cette fréquence et cette régularité impliquent. Il appartient donc à la Cour de se prononcer, pour autant que nécessaire, sur ce point, en tenant compte des raisons légitimes susceptibles de justifier le bénéfice du régime propre au petit trafic.

    50.

    Or, il importe de constater, à cet égard, que, si l’article 9, sous b), du règlement no 1931/2006 subordonne la délivrance d’un permis de franchissement local de la frontière à la condition que le demandeur produise des documents justifiant, outre de son statut de frontalier, «de l’existence de raisons légitimes de franchir fréquemment une frontière terrestre extérieure en vertu du régime du petit trafic frontalier», ledit règlement dit également très peu sur la nature des raisons légitimes susceptibles d’être accueillies ( 41 ).

    51.

    Le considérant 2 du règlement no 1931/2006 se borne, ainsi que nous l’avons déjà souligné, à évoquer les «échanges commerciaux, sociaux et culturels», et son article 3, point 3, définit le «petit trafic frontalier» comme étant «le franchissement régulier d’une frontière terrestre extérieure par des frontaliers, en vue d’effectuer un séjour dans une zone frontalière, par exemple pour des raisons sociales, culturelles ou d’ordre familial» mais également pour des «raisons économiques justifiées», étant toutefois précisé, dans ce dernier cas, que conformément à l’article 2, sous b), du règlement no 1931/2006, ce dernier s’applique sans préjudice des dispositions du droit de l’Union et du droit national applicables aux ressortissants d’États tiers en matière d’accès à une activité économique et d’exercice d’une telle activité ( 42 ).

    52.

    Il ressort ainsi des considérations qui précèdent que la ratio legis de la réglementation propre au petit trafic frontalier est de permettre aux résidents des zones frontalières concernées de franchir facilement, c’est-à-dire sans contraintes administratives excessives ( 43 ), de manière fréquente ( 44 ), mais également régulière ( 45 ), pour des raisons légitimes d’ordre économique, social, culturel ou familial, les frontières terrestres extérieures de l’Union, étant toutefois précisé que cette liberté ne saurait être dénaturée, détournée de sa finalité et frauduleusement ou abusivement exploitée sous peine de sanction ( 46 ).

    53.

    C’est aux autorités nationales compétentes qu’il incombe d’apprécier ces raisons légitimes lors de la délivrance des permis de franchissement local de la frontière ( 47 ), en tenant compte du contexte historique, culturel, économique et social dans lequel chaque accord bilatéral mettant en œuvre le régime propre au petit trafic frontalier est négocié et conclu par les États membres et les États tiers concernés. Elles doivent également prendre en considération ces mêmes raisons légitimes lorsqu’elles exercent le pouvoir de contrôle des entrées et des sorties que l’article 6 du règlement no 1931/2006 leur reconnaît aux fins de garantir le respect des conditions prévues à l’article 4 de ce règlement ou le pouvoir de sanction des abus que leur octroie l’article 17 dudit règlement.

    b) Sur la logique propre à la CAAS et au code frontières Schengen

    54.

    Les autorités hongroises compétentes font toutefois valoir, en substance, que le régime propre au petit trafic frontalier s’inscrit dans le cadre plus général du régime établi par la CAAS et le code frontières Schengen et que les dispositions du règlement no 1931/2006 doivent donc être interprétées à la lumière de ces derniers. Or, les deux régimes ne procèdent pas de la même inspiration.

    55.

    Il ressort de l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie que c’est, implicitement mais clairement, par référence au régime applicable au court séjour des ressortissants d’États tiers, tel qu’établi par les articles 5 et 20 de la CAAS, d’une part, et par l’article 5 du code frontières Schengen et l’article 2 du code des visas, d’autre part, que les deux États concernés ont donné corps à l’exigence posée par l’article 5 du règlement no 1931/2006.

    56.

    L’article 20 de la CAAS prévoit la libre circulation des ressortissants d’États tiers non soumis à l’obligation de visa dans l’espace Schengen pendant une durée maximale de trois mois au cours d’une période de six mois à compter de la date de première entrée ( 48 ), sous réserve du respect des conditions visées à l’article 5, paragraphe 1, sous a) et c) à e), de la CAAS.

    57.

    Cette même limitation à trois mois sur une période de six mois de la durée autorisée de séjour se retrouve à l’article 5 du code frontières Schengen, fixant les conditions générales d’entrée des ressortissants d’États tiers sur le territoire de l’Union pour un séjour de courte durée, ainsi qu’à l’article 2, point 2, sous a), du code des visas, définissant la notion de visa ( 49 ).

    58.

    À la différence du règlement no 1931/2006, dont le champ d’application ratione loci et ratione personæ est strictement limité, la CAAS, tout comme le code frontières Schengen et le code des visas, s’appliquent, sauf exceptions, aux séjours de courte durée de tous les ressortissants d’États tiers sur l’ensemble du territoire des États membres concernés.

    59.

    La limitation de droit commun, applicable à l’ensemble des ressortissants d’États tiers, du séjour de courte durée à une durée n’excédant pas trois mois sur une période de six mois ne s’applique donc pas au régime dérogatoire propre au petit trafic frontalier.

    60.

    L’argument avancé par la Hongrie, selon lequel le caractère dérogatoire du règlement no 1931/2006 ne serait pas total et ne concernerait que les formalités d’entrées, de sorte que son article 5 devrait être lu à la lumière des dispositions de l’article 20 de la CAAS ou de l’article 5 du code frontières Schengen, doit à cet égard être rejeté.

    61.

    En effet, le considérant 3 du règlement no 1931/2006 indique expressément que le régime propre au petit trafic frontalier constitue une dérogation aux règles générales régissant le contrôle des personnes aux frontières extérieures des États membres de l’Union qui sont fixées dans le code frontières Schengen ( 50 ). L’article 35 du code frontières Schengen précise d’ailleurs, parallèlement, qu’il est sans préjudice des règles de l’Union applicables au petit trafic frontalier et des accords bilatéraux existants en la matière.

    62.

    Il s’ensuit que c’est l’ensemble des dispositions du règlement no 1931/2006, dont l’objet est précisément de fixer les règles relatives au petit trafic frontalier, qui doit être considéré comme dérogeant au régime des séjours de courte durée fixé par le code frontières Schengen.

    63.

    Le caractère dérogatoire du règlement no 1931/2006 n’implique cependant pas que ses dispositions doivent nécessairement faire l’objet d’une interprétation stricte ou restrictive. Cela implique surtout, comme nous le verrons ci-dessous, que, en tant que lex specialis, les dispositions dudit règlement ne sauraient être exploitées à des fins non prévues par celui-ci et utilisées dans le but de contourner les règles du droit de l’Union et de droit national applicables notamment, d’une part, aux séjours de longue durée ( 51 ) et, d’autre part, à l’accès ou à l’exercice d’une activité économique ( 52 ).

    64.

    En définitive, et pour conclure, il ressort des développements qui précèdent que les dispositions de l’article 20 de la CAAS ou de l’article 5 du code frontières Schengen ne sauraient altérer la logique propre au petit trafic frontalier établi par le règlement no 1931/2006, qui est de permettre aux frontaliers éligibles de franchir, autant que possible, normalement les frontières locales, c’est-à-dire avec facilité et aussi fréquemment que nécessaire, sauf fraude ou abus.

    2. Sur le respect de la Charte et de la CEDH

    65.

    Eu égard à ce qui précède, la question principale qui se trouve ainsi soumise à l’appréciation de la Cour est celle de savoir si le régime établi par l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, tel qu’interprété et/ou appliqué par les autorités hongroises compétentes, est compatible, en premier lieu, avec l’esprit du régime propre au petit trafic frontalier que nous venons d’examiner en détail, tel qu’interprété en conformité avec le droit primaire de l’Union ( 53 ), et, plus précisément, les dispositions pertinentes de la Charte ( 54 ) ou, le cas échéant, de la CEDH et, en second lieu et plus largement, avec l’ensemble du droit de l’Union ( 55 ), conformément à l’article 4, paragraphe 3, TUE ( 56 ).

    66.

    Il doit être relevé, à cet égard, que le considérant 13 du règlement no 1931/2006 prévoit que ce dernier respecte les libertés et les droits fondamentaux et observe les principes notamment reconnus par la Charte.

    67.

    Par ailleurs, la conclusion des accords bilatéraux tels que celui en cause dans l’affaire au principal relève de la mise en œuvre ( 57 ) du régime propre au petit trafic frontalier, de sorte que lesdits accords, qui doivent être conformes aux règles du règlement no 1931/2006, doivent, plus largement, être conclus dans le respect du droit primaire et en particulier des dispositions de la Charte, conformément à l’article 51, paragraphe 1, de cette dernière ou, à défaut et le cas échéant, des dispositions de la CEDH, conformément à l’article 6, paragraphe 3, TUE.

    68.

    Il pourrait tout d’abord, de manière très intuitive, être envisagé d’aborder la question sous l’angle de la liberté de circulation.

    69.

    Il faut cependant souligner, tout en réservant la situation des «personnes qui jouissent du droit communautaire à la libre circulation» ou de droits équivalents ( 58 ), au sens de l’article 3, point 4, du règlement no 1931/2006, que l’article 45, paragraphe 1, de la Charte, qui prévoit le droit pour tout citoyen de l’Union de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, ne trouve pas à s’appliquer ratione personæ au litige au principal, pas plus que l’article 45, paragraphe 2, de la Charte, prévoyant la possibilité d’accorder ces mêmes droits aux ressortissants d’États tiers résidant légalement sur le territoire d’un État membre ( 59 ).

    70.

    Toutefois, et sans qu’il soit besoin de s’interroger sur la question de savoir si le litige au principal tombe, de quelque façon que cela puisse être, dans le champ d’application de l’article 2 du protocole no 4 à la CEDH ( 60 ), consacrant le droit à la liberté de circulation, il est clair qu’il relève, en tout état de cause ( 61 ), compte tenu de la logique du régime propre au petit trafic frontalier, des dispositions de l’article 7 de la Charte, qui garantit le respect de la vie privée et familiale, disposition qui doit, conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, être interprétée à la lumière des dispositions de l’article 8 de la CEDH ( 62 ).

    71.

    Les ressortissants d’États tiers qui ne relèvent pas de la définition des membres de la famille d’un citoyen de l’Union, au sens de la directive 2004/38, et qui ne bénéficient donc pas d’un droit automatique d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil, mais qui relèvent du champ d’application du règlement no 1931/2006, doivent pouvoir jouir, à mon avis, dans le cadre de l’application de ce dernier, des garanties découlant du droit à la vie privée et familiale au sens large ( 63 ), de même que, réciproquement, les frontaliers résidant dans les États membres.

    D – L’application de l’article 7 de la Charte et de l’article 8 de la CEDH

    72.

    C’est donc bien, en définitive, à la lumière des dispositions pertinentes de la Charte et de la CEDH ainsi que des principes généraux du droit de l’Union, et en particulier du principe de proportionnalité, que le règlement no 1931/2006 doit être interprété et que l’application de la disposition en cause de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie doit être appréciée.

    73.

    Or, une application purement mécanique de la règle posée à l’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, telle qu’interprétée suivant l’approche défendue par les autorités hongroises compétentes et conduisant à refuser au bénéficiaire d’un permis de franchissement local de la frontière, justifiant de liens personnels et familiaux ou plus largement de liens sociaux ( 64 ) avec des citoyens de l’Union résidant dans la zone frontalière d’un État membre couverte par le règlement no 1931/2006, le droit d’entrer sur le territoire dudit État membre du simple fait qu’il a cumulé trois mois de présence sur ledit territoire sur une période de six mois, porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale.

    74.

    Comme la Cour européenne des droits de l’homme l’a jugé, certes dans des contextes différents ( 65 ), l’article 8 de la CEDH protège, au-delà de la vie familiale stricto sensu, le droit de nouer et d’entretenir des liens avec ses semblables et avec le monde extérieur et peut englober des aspects de l’identité sociale d’un individu ( 66 ).

    75.

    Dès lors, et de même que, indépendamment de l’existence ou pas d’une «vie familiale», l’expulsion d’un immigré établi dans un État membre s’analyse en une atteinte à son droit au respect de sa vie privée, le refus d’entrer sur le territoire d’un État membre opposé au titulaire d’un permis de franchissement local de la frontière peut s’analyser comme tel et doit, partant, être conforme à la loi et nécessaire dans une société démocratique, c’est-à-dire justifié par un besoin social impérieux et, notamment, proportionné au but légitime poursuivi ( 67 ).

    76.

    C’est aux autorités nationales compétentes qu’il appartient, sous le contrôle des juridictions nationales, d’assurer un juste équilibre entre les intérêts en présence, en l’occurrence le droit du défendeur au principal de pleinement bénéficier de son permis de franchissement local de la frontière et la nécessité pour les autorités compétentes de l’État membre de prévenir et de sanctionner les abus conformément à l’article 17 du règlement no 1931/2006. Il leur appartient, dans cette perspective, d’examiner au cas par cas si un permis de franchissement local de la frontière est utilisé de manière abusive ou frauduleuse par son bénéficiaire, en tenant dûment compte des raisons légitimes invoquées par ce dernier, au moment de la délivrance dudit permis, en vue d’obtenir celui-ci.

    77.

    Dans ces conditions, une pratique des autorités compétentes d’un État membre consistant à refuser systématiquement aux titulaires d’un permis de franchissement local de leur frontière, valablement délivré en conformité aux dispositions du règlement no 1931/2006, le droit d’entrer sur le territoire dudit État membre au seul motif que ces derniers ont, au cours d’une période de six mois, effectué plusieurs séjours d’une durée cumulée de plus de trois mois, sans qu’il soit tenu compte ni des raisons légitimes justifiant ces séjours ni des circonstances dans lesquelles ces derniers se sont déroulés et sans que ne soit établi l’existence d’une utilisation abusive ou frauduleuse desdits permis, ne répond pas, en toute hypothèse, quand bien même elle serait commandée par les dispositions d’un accord bilatéral mettant en œuvre ledit règlement, aux exigences découlant du principe de proportionnalité.

    78.

    Il s’ensuit que le règlement no 1931/2006 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un accord bilatéral adopté en application de l’article 13 dudit règlement, tel que l’accord bilatéral conclu par la Hongrie, ou l’interprétation qui en est donnée par les autorités et juridictions nationales compétentes, exclue la possibilité pour une personne éligible au bénéfice dudit régime de franchir la frontière d’un État membre dans des circonstances telles que celles en cause dans le litige au principal, à moins que l’existence d’une fraude ou d’un abus ne soit établie.

    V – Conclusion

    79.

    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de répondre aux questions posées par la Magyar Köztársaság Legfelsőbb Bírósága (Hongrie) dans les termes suivants:

    «L’article 5 du règlement (CE) no 1931/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, fixant des règles relatives au petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres et modifiant les dispositions de la convention de Schengen, en tant qu’il fixe à trois mois la durée maximale de séjour non interrompu autorisé sous le régime propre au petit trafic frontalier, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un accord bilatéral adopté en application de l’article 13 dudit règlement, ou l’interprétation qui en est donnée, exclue la possibilité pour une personne éligible au bénéfice dudit régime de franchir la frontière d’un État membre:

    lorsque celle-ci est titulaire d’un permis de franchissement local de la frontière délivré en conformité avec ledit règlement en cours de validité;

    au seul motif qu’elle a, au cours d’une période d’une durée déterminée, fait des séjours multiples dans la zone frontalière dudit État membre d’une durée cumulée équivalente à la durée maximale de séjour non interrompu prévue audit accord, quelle que soit cette dernière durée, et

    à moins qu’il ne soit établi que lesdits séjours relèvent d’un comportement frauduleux ou abusif.

    C’est aux autorités nationales compétentes qu’il appartient, sous le contrôle des juridictions nationales, d’établir que le permis de franchissement local de la frontière est utilisé de façon abusive ou frauduleuse.»


    ( 1 )   Langue originale: le français.

    ( 2 )   JO L 405, p. 1, et rectificatif JO 2007, L 29, p. 3. Sur ce règlement, voir Peers, S., EU Justice and Home Affairs Law, 3e éd., Oxford EU Law Library, 2011, p. 210 et suiv.; Beaudu, G., «La politique européenne des visas de court séjour», Cultures & Conflits, mis en ligne le 29 septembre 2003, consulté le 4 novembre 2012, http://conflits.revues.org/909.

    ( 3 )   Ci-après la «charte».

    ( 4 )   Ci-après la «CEDH».

    ( 5 )   JO 2000, L 239, p. 19; ci-après la «CAAS».

    ( 6 )   Ci-après «l’accord bilatéral conclu par la Hongrie». Accord promulgué par la loi no CLIII de 2007, portant promulgation de l’accord conclu entre le gouvernement hongrois et le cabinet des ministres de l’Ukraine aux fins de la réglementation du petit trafic frontalier (2007. évi CLIII. Törvény a Magyar Köztársaság Kormánya és Ukrajna Miniszteri Kabinetje között a kishatárforgalom szabályozásáról szóló Egyezmény kihirdetéséről).

    ( 7 )   L’accord entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 14 juin 1985, ainsi que la CAAS, font, depuis l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam (voir protocole intégrant l’acquis de Schengen dans le cadre de l’Union européenne, annexé au traité sur l’Union européenne et au traité instituant la Communauté européenne par le traité d’Amsterdam), partie de l’acquis de Schengen, lequel s’applique à la Hongrie en vertu de l’article 2 du protocole no 19 sur l’acquis de Schengen intégré dans le cadre de l’Union européenne. L’acquis de Schengen s’est appliqué à la Hongrie à compter du 21 décembre 2007. Voir article 1er de la décision 2007/801/CE du Conseil, du 6 décembre 2007, sur l’application de la totalité des dispositions de l’acquis de Schengen à la République tchèque, à la République d’Estonie, à la République de Lettonie, à la République de Lituanie, à la République de Hongrie, à la République de Malte, à la République de Pologne, à la République de Slovénie et à la République slovaque (JO L 323, p. 34).

    ( 8 )   Règlement (CE) no 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO L 105, p. 1).

    ( 9 )   Règlement (CE) no 810/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas (code des visas) (JO L 243, p. 1).

    ( 10 )   Ci-après la «loi no II de 2007».

    ( 11 )   Ci-après le «défendeur au principal».

    ( 12 )   Ci-après la «requérante au principal».

    ( 13 )   Ou à maintenir, pour les accords conclus avant l’entrée en vigueur du règlement no 1931/2006 et qui peuvent continuer à produire leurs effets pour autant qu’ils soient conformes au droit de l’Union, voir en ce sens, également, rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur la mise en œuvre et le fonctionnement du régime propre au petit trafic frontalier instauré par le règlement (CE) no 1931/2006 du Parlement européen et du Conseil fixant des règles relatives au petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres [COM(2009) 383 final, ci-après le «premier rapport de la Commission sur le régime propre au petit trafic frontalier»]. Tel est, notamment, le cas de l’accord conclu entre la République de Slovénie et la République de Croatie, en vigueur depuis l’année 2001, mentionné par ledit rapport.

    ( 14 )   Sur cet «acquis» constitué des accords bilatéraux sur le petit trafic frontalier préexistants, voir document de travail de la Commission du 9 septembre 2002, intitulé «Développement de l’acquis sur le petit trafic frontalier» [SEC(2002) 947].

    ( 15 )   Comme nous le verrons ci-dessous.

    ( 16 )   Nonobstant les dispositions de l’article 19 du règlement no 1931/2006, en vertu desquelles la Commission doit rendre accessible aux États membres et au public les informations concernant les accords bilatéraux conclus par les États membres concernés notifiées par ces derniers, il n’a pas été possible de recenser de manière certaine tous les accords conclus ni, par conséquent, de recueillir toutes les informations pertinentes à cet égard. Voir, cependant, informations figurant dans le premier rapport de la Commission sur le régime propre au petit trafic frontalier ainsi que celles figurant dans la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, intitulée «Deuxième rapport sur la mise en œuvre et le fonctionnement du régime propre au petit trafic frontalier instauré par le règlement (CE) no 1931/2006» [COM(2011) 47 final, ci-après le «deuxième rapport de la Commission sur le régime propre au petit trafic frontalier»], rapports publiés conformément à l’article 18 du règlement no 1931/2006, desquels il ressort que quatorze accords auraient été conclus ou seraient en passe de l’être. Voir également Eckstein, A., «Cross-border travel to become easier in Kaliningrad area», Europolitics,29 juillet 2011.

    ( 17 )   Voir article 3, paragraphes 2 et 3, de l’accord entre la République de Slovénie et la République de Croatie concernant le petit trafic frontalier et la coopération, qui limite le séjour ininterrompu à sept jours, tout en réservant l’hypothèse de la force majeure. Voir, également, article 2, paragraphe 2, de l’accord entre la République d’Autriche et la Confédération helvétique sur le franchissement des frontières par les personnes dans le cadre du petit trafic frontalier, signé à Vienne le 13 juin 1973.

    ( 18 )   Voir article 4 de l’accord entre le gouvernement de la République de Pologne et le conseil des ministres de l’Ukraine sur les règles propres au petit trafic frontalier, signé à Kiev le 28 mars 2008, qui prévoit une durée maximale de séjour ininterrompu de 60 jours, mais limitée à un total de 90 jours sur une période de six mois, à compter du premier franchissement de la frontière. Voir également l’article 4, paragraphe 5, de l’accord conclu par la République de Lettonie avec la République de Biélorussie, signé à Riga le 23 août 2010.

    ( 19 )   Voir article 4 de l’accord entre le gouvernement de la République de Pologne et le gouvernement de la République de Biélorussie sur les règles propres au petit trafic frontalier, signé à Varsovie le 12 févier 2010, qui prévoit une durée maximale de séjour ininterrompu de 30 jours sur une période de six mois, à compter du premier franchissement de la frontière.

    ( 20 )   Il ressort des observations présentées par la République slovaque que ledit accord, dans sa version initiale, limitait le délai de séjour non interrompu à 30 jours et la durée totale de séjour à 90 jours sur une période de 180 jours. Le nouvel accord, signé à Bratislava le 17 juin 2011, prévoit une durée maximale de séjour ininterrompu de 90 jours sur une période de 180 jours.

    ( 21 )   Voir article 1, sous c), de l’accord entre le gouvernement de la République de Moldavie et le gouvernement de la Roumanie sur le petit trafic frontalier, signé à Bucarest le 13 novembre 2009.

    ( 22 )   Il doit d’ailleurs être observé que, dans le cadre de la mission de contrôle de la compatibilité des accords bilatéraux que lui confie l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 1931/2006, la Commission n’a, ainsi qu’il ressort tant de son premier que de son deuxième rapport sur le régime propre au petit trafic frontalier, pas relevé cette «discordance» comme étant constitutive d’une incompatibilité, sans doute pour les raisons évoquées ci-dessous, en note en bas de page 23.

    ( 23 )   Il faut, à cet égard, souligner que la Commission elle-même entretient une certaine ambiguïté. Ainsi, dans son premier rapport sur le régime propre au petit trafic frontalier, elle constate que tous les accords bilatéraux dont elle a eu connaissance «fixent des restrictions supplémentaires à la durée de séjour dans la zone frontalière qui est de 90 jours par semestre» (p. 7, point 4), c’est nous qui soulignons, alors même qu’elle a par ailleurs précisé, dans le même rapport, que la possibilité d’effectuer un séjour ininterrompu de 90 jours constituait «une dérogation à la règle générale instituée par le code frontières Schengen qui limite les séjours de courte durée à 90 jours maximum par semestre (180 jours)» (p. 3, point 2). Elle souligne également dans son deuxième rapport sur le régime propre au petit trafic frontalier que le règlement no 1931/2006 «permet à une personne de séjourner dans un État membre jusqu’à trois mois pendant une période déterminée» (p. 4, point 3.1), c’est nous qui soulignons).

    ( 24 )   La problématique du petit trafic frontalier a été plus précisément exposée par la Commission dans son document de travail du 9 septembre 2002, susmentionné, à l’origine du processus législatif aboutissant à l’adoption du règlement no 1931/2006.

    ( 25 )   Voir considérant 2 du règlement no 1931/2006. Voir, également, considérant 1 du règlement (UE) no 1342/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, modifiant le règlement (CE) no 1931/2006 aux fins d’inclure l’oblast de Kaliningrad et certains districts administratifs polonais dans la zone à considérer comme la zone frontalière (JO L 347, p. 41).

    ( 26 )   Dans le même ordre d’idée, le code frontières Schengen précise, à son considérant 11, que «les États membres devraient veiller à ce que les procédures de contrôle aux frontières extérieures ne constituent pas une entrave majeure aux échanges économiques, sociaux et culturels».

    ( 27 )   Voir considérant 4 du règlement no 1931/2006.

    ( 28 )   Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 11 mars 2003, intitulée «L’Europe élargie – Voisinage: un nouveau cadre pour les relations avec nos voisins de l’Est et du Sud» [COM(2003) 104 final].

    ( 29 )   Voir, outre la communication du 11 mars 2003 susmentionnée, communication de la Commission du 12 mai 2004, intitulée «Politique européenne de voisinage – Document d’orientation» [COM(2004) 373 final].

    ( 30 )   Comme la Commission l’a elle-même exposé, le règlement no 1931/2006 forme avec le code frontières Schengen et le règlement (CE) no 2007/2004 du Conseil, du 26 octobre 2004, portant création d’une Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (JO L 349, p. 1), un «cadre juridique opérationnel grâce auquel un plus haut niveau de contrôle peut être exercé aux frontières». Voir, à cet égard, communication de la Commission du 19 juillet 2006, sur les priorités d’action en matière de lutte contre l’immigration clandestine de ressortissants de pays tiers [COM(2006) 402 final, point 18]. Voir, également, communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 7 mai 2002, intitulée «Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des États membres de l’Union européenne» [COM(2002) 233 final], qui évoque un corpus commun de législation relatif aux frontières extérieures.

    ( 31 )   La population en cause dans l’affaire au principal a ainsi fait partie de cinq États différents en un siècle. La région, intégrée au Royaume de Hongrie, faisait partie de l’empire austro-hongrois. Après la naissance de la Tchécoslovaquie le 28 octobre 1918, elle est rattachée à cette dernière en vertu du traité de Trianon du 4 juin 1920. Puis, elle est de nouveau rattachée à la Hongrie en vertu du premier arbitrage de Vienne du 2 novembre 1938, arbitrage ultérieurement déclaré nul et non avenu par le traité de Paris du 10 février 1947. La région est alors intégrée à l’URSS jusqu’à la proclamation de l’indépendance de l’Ukraine le 24 août 1991. Selon les chiffres publiés dans le deuxième rapport de la Commission sur le régime propre au petit trafic frontalier, entre 400000 et 450000 personnes seraient éligibles au permis de franchissement local de la frontière en Hongrie (point 3.2.1).

    ( 32 )   Voir articles 1er, paragraphe 1, et 7, paragraphe 1, du règlement no 1931/2006. La terminologie employée, le terme de «permis», a, il convient de le souligner, été préférée à celle de visa, initialement proposée par la Commission. Le Conseil de l’Union européenne a, du reste, et pour tenir compte des dispositions du règlement no 1931/2006 adopté le même jour le règlement (CE) no 1932/2006, du 21 décembre 2006, modifiant le règlement (CE) no 539/2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO L 405, p. 23). En l’occurrence, l’article 1er, paragraphe 2, second alinéa, premier tiret, du règlement (CE) no 539/2001 du Conseil, du 15 mars 2001, fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (JO L 81, p. 1), ainsi modifié, exempte de l’obligation de visa les personnes, titulaires d’un permis de franchissement local de la frontière, ressortissantes des États tiers visés à l’annexe I de ce dernier, annexe qui dresse la liste exhaustive des États tiers dont les ressortissants doivent être munis d’un visa lors du franchissement des frontières extérieures des États membres, dont l’Ukraine en cause dans l’affaire au principal.

    ( 33 )   Articles 7 à 12 du règlement no 1931/2006.

    ( 34 )   Article 10 du règlement no 1931/2006, pour ce qui est de la durée de validité, et article 7, paragraphe 2, dudit règlement, pour ce qui est de l’espace de validité, en l’occurrence, la zone frontalière définie à son article 3, point 2.

    ( 35 )   Dans son deuxième rapport sur le régime propre au petit trafic frontalier (p. 5, point 3.2.3), la Commission relève que ce point a fait l’objet de discussions pendant les négociations de l’année 2006. Il faut souligner, à cet égard, que dans sa proposition initiale, la Commission n’envisageait un droit de séjour dans la zone frontalière que pendant sept jours consécutifs au maximum, la durée totale des visites successives ne pouvant pas dépasser trois mois par semestre. Voir article 6 de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 février 2005 fixant des règles relatives au petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres et modifiant la Convention de Schengen et les Instructions consulaires communes [COM(2005) 56 final]. Le texte de l’article 5 du règlement no 1931/2006 est celui qui résulte de l’amendement proposé par le Parlement européen. Voir rapport de Brejc, M., du 13 décembre 2005, sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil fixant des règles relatives au petit trafic frontalier aux frontières terrestres extérieures des États membres et modifiant la Convention de Schengen et les Instructions consulaires communes (A6-0406/2005).

    ( 36 )   Voir article 3, point 6, du règlement no 1931/2006, définissant le frontalier éligible au bénéfice du régime propre au petit trafic frontalier, ainsi que article 4 dudit règlement, fixant les conditions d’entrée desdits frontaliers sur le territoire des États membres.

    ( 37 )   Voir article 3, point 2, du règlement no 1931/2006, définissant la zone frontalière comme une zone qui ne s’étend pas, sauf exception, à plus de 30 kilomètres de la frontière. Voir, également, considérant 5 ainsi que article 7 dudit règlement, limitant la validité territoriale du permis de franchissement local de la frontière.

    ( 38 )   Voir article 7, paragraphe 3, alinéa 2, du règlement no 1931/2006.

    ( 39 )   Voir considérant 4 ainsi que article 9, sous b), du règlement no 1931/2006.

    ( 40 )   Voir articles 3, point 3, et 15, paragraphe 3, du règlement no 1931/2006, définissant le petit trafic frontalier.

    ( 41 )   Le rapporteur de la proposition de règlement no 1931/2006 devant le Parlement européen, susmentionné, évoquait à cet égard «des raisons académiques ou professionnelles [comme] l’existence de liens familiaux». La Commission semble, en revanche, plus restrictive, dans la mesure où elle conçoit le régime du petit trafic frontalier comme permettant, seulement, «d’améliorer les contacts de personne à personne dans les régions frontalières». Voir, outre la communication du 12 mai 2004, susmentionnée, qui évoque le maintien des «contacts traditionnels», communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil du 5 décembre 2007, intitulée «Une politique européenne de voisinage forte» [COM(2007) 774 final, p. 6].

    ( 42 )   L’article 1er, paragraphe 5, de l’accord bilatéral conclu par la Hongrie précise, d’ailleurs, que le franchissement de la frontière est permis «pour des raisons économiques justifiées qui ne sont pas qualifiables d’activités professionnelles».

    ( 43 )   Il s’agit, comme la Commission l’a relevé, de «permettre aux populations des régions frontalières de maintenir des contacts traditionnels sans se heurter à des obstacles administratifs excessifs». Voir communication du 12 mai 2004, susmentionnée, p. 18. Voir, également, avis de la commission des affaires étrangères du Parlement européen du 25 novembre 2005 sur la proposition de règlement no 1931/2006.

    ( 44 )   Cette fréquence pouvant, dans certain cas, être quotidienne, comme le souligne le rapport de Brejc, M., du 13 décembre 2005, susmentionné.

    ( 45 )   C’est, nous semble-t-il, le principal point en discussion dans le cadre de la présente affaire.

    ( 46 )   Voir considérant 4 ainsi que articles 7, paragraphe 3, alinéa 2, et 17 du règlement no 1931/2006.

    ( 47 )   Conformément à l’article 9, sous b), du règlement no 1931/2006.

    ( 48 )   Sur la notion de «première entrée» et ses implications, voir arrêt du 3 octobre 2006, Bot (C-241/05, Rec. p. I-9627). Il est à noter que, en considération de cet arrêt, la Commission a proposé d’adopter «une définition claire de la méthode de calcul des ‘séjour[s] n’excédant pas trois mois sur une période de six mois’». Voir proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement no 562/2006 et la convention d’application de l’accord de Schengen [COM(2011) 118 final].

    ( 49 )   Cette même limitation est rappelée systématiquement dans les décisions du Conseil portant signature et application provisoire des accords conclus par la Communauté européenne avec des États tiers concernant l’exemption de visa pour les séjours de courte durée. Voir, par exemple, décision 2009/478/CE du Conseil, du 6 avril 2009, concernant la signature et l’application provisoire de l’accord entre la Communauté européenne et Antigua-et-Barbuda relatif à l’exemption de visa pour les séjours de courte durée (JO L 169, p. 1), ainsi que les décisions 2009/479/CE, 2009/480/CE, 2009/481/CE et 2009/483/CE du Conseil du même jour et de même objet concernant, respectivement, la Barbade (JO L 169, p. 9), la République de Maurice (JO L 169, p. 16); le Commonwealth des Bahamas (JO L 169, p. 23), la République des Seychelles (JO L 169, p. 30) et Saint-Christophe-et-Nevis (JO L 169, p. 37).

    ( 50 )   L’article 3 de la CAAS prévoyait déjà que le comité exécutif Schengen devait adopter des dispositions concernant «les exceptions et les modalités du petit trafic frontalier», dispositions qui ne l’ont cependant jamais été avant l’adoption du règlement no 1931/2006.

    ( 51 )   Notamment, ainsi que la République de Pologne l’a fait observer, les dispositions de la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (JO L 16, p. 44).

    ( 52 )   Voir article 2 du règlement no 1931/2006.

    ( 53 )   Notamment les articles 67 TFUE et 8 TUE. Il doit être rappelé, à cet égard, que, conformément à l’article 8 TUE «l’Union développe avec les pays de son voisinage des relations privilégiées, en vue d’établir un espace de prospérité et de bon voisinage, fondé sur les valeurs de l’Union et caractérisé par des relations étroites et pacifiques reposant sur la coopération». Sur cette «clause de voisinage», voir, notamment, Hanf, D., «The European Neighbourhood Policy in the Light of the new ‘Neighbourhood Clause’ (Article 8 TEU)», dans Lannon, E., The European Neighbourhood Policy Challenges – Les défis de la politique européenne de voisinage, Peter Lang, 2012, p. 109 à 123.

    ( 54 )   Arrêts du 6 novembre 2003, Lindqvist (C-101/01, Rec. p. I-12971, point 87); du 26 juin 2007, Ordre des barreaux francophones et germanophone e.a. (C-305/05, Rec. p. I-5305, point 28); du 23 décembre 2009, Detiček (C-403/09 PPU, Rec. p. I-12193, point 34); du 21 décembre 2011, N. S. e.a., C-411/10 et C-493/10, Rec. p. I-13905, point 77), ainsi que du 22 novembre 2012, M. (C‑277/11, point 93).

    ( 55 )   Il importe de souligner que, conformément au protocole no 23 sur les relations extérieures des États membres en ce qui concerne le franchissement des frontières extérieures, annexé au traité UE et au traité FUE, si les États membres conservent, en l’absence de dispositions adoptées sur le fondement de l’article 77, paragraphe 1, sous b), TFUE, une compétence pour négocier et conclure des accords avec des pays tiers, ce n’est que pour autant que lesdits accords respectent le droit de l’Union et les autres accords internationaux. A fortiori en va-t-il ainsi dans le cas d’accords bilatéraux dont la conclusion est prévue, commandée, par un acte de droit dérivé adopté sur le fondement de l’article 77, paragraphe 2, sous a), TFUE, tel que le règlement no 1931/2006.

    ( 56 )   Voir, à cet égard, outre arrêts du 15 janvier 2002, Gottardo (C-55/00, Rec. p. I-413, point 33), et du 14 juillet 2005, Commission/Allemagne (C-433/03, Rec. p. I-6985), concernant les accords bilatéraux dits «de ciel ouvert», par exemple, arrêt du 5 novembre 2002, Commission/Danemark (C-467/98, Rec. p. I-9519, points 110 à 112). Voir, également, arrêt du 24 avril 2007, Commission/Pays-Bas (C-523/04, Rec. p. I-3267, points 74 à 76).

    ( 57 )   Tel est, du reste, l’intitulé du chapitre IV du règlement no 1931/2006, dans lequel s’insère l’article 13 prévoyant la conclusion d’accords bilatéraux.

    ( 58 )   Ces derniers relèvent des dispositions de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO L 158, p. 77).

    ( 59 )   Le régime du petit trafic transfrontalier s’applique non pas, par définition, aux ressortissants d’États tiers résidant légalement sur le territoire d’un État membre, mais aux frontaliers, tels que définis à l’article 3, point 6, du règlement no 1931/2006.

    ( 60 )   Protocole reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la CEDH et dans le premier protocole additionnel à la CEDH.

    ( 61 )   Plusieurs dispositions de la Charte et/ou de la CEDH sont certainement susceptibles d’être plus ou moins directement affectées. Eu égard à la fonction principalement sociale et culturelle du règlement no 1931/2006, nous pouvons, à titre d’exemple, citer l’article 9 de la Charte (article 12 de la CEDH), garantissant le droit de se marier et de fonder une famille, l’article 14 de la Charte (article 2 du premier protocole additionnel à la CEDH) consacrant le droit à l’éducation, mais aussi l’article 17 de la Charte sur le droit de propriété (article 1er du premier protocole à la CEDH), ou l’article 35 de la Charte sur la protection de la santé, dans la mesure où l’exercice ou la jouissance de ces droits peuvent dépendre d’un droit de circuler librement de part et d’autre des frontières et où, par conséquent, toute limite à cette liberté de circulation peut affecter l’exercice desdits droits.

    ( 62 )   Voir, également, explications relatives à la Charte des droits fondamentaux (JO 2007, C 303, p. 17).

    ( 63 )   C’est, du reste, très précisément ce que relève le considérant 6 de la directive 2004/38, susmentionnée, qui prévoit la possibilité pour les États membres de prévoir, sur la base de leur propre législation, la possibilité de décider si un droit d’entrée ou de séjour ne pourrait pas être accordé à ces personnes «en vue de maintenir l’unité de la famille au sens large du terme», «compte tenu de leur lien avec le citoyen de l’Union et d’autres circonstances telles que leur dépendance pécuniaire ou physique envers ce citoyen».

    ( 64 )   En ce sens, Cour eur. D. H., arrêt Niemietz c. Allemagne du 16 décembre 1992, Recueil des arrêts et décisions 1992, requête no 13710/88, série A no 251-B, § 29. La Cour européenne des droits de l’homme juge dans cet arrêt que, s’il n’est «ni possible ni nécessaire de chercher à définir de manière exhaustive la notion de ‘vie privée’», il serait toutefois «trop restrictif de la limiter à un ‘cercle intime’ où chacun peut mener sa vie personnelle à sa guise et d’en écarter entièrement le monde extérieur à ce cercle». Elle ajoute que «[l]e respect de la vie privée doit aussi englober, dans une certaine mesure, le droit pour l’individu de nouer et développer des relations avec ses semblables». Voir aussi, Cour eur. D. H., arrêt C. c. Belgique du 7 août 1996, Recueil des arrêts et décisions 1996-III, requête no 21794/93, § 25. Sur l’élasticité de la notion de vie privée, voir notamment Cour eur. D. H., arrêts Burghartz c. Suisse du 22 février 1994, requête no 16213/90, série A no 280-B, § 24 (conservation du nom patronymique après un mariage); Pretty c. Royaume-Uni du 29 avril 2002, Recueil des arrêts et décisions 2002-III, requête no 2346/02, § 61 (droit au décès assisté); Bigaeva c. Grèce du 28 mai 2009, requête no 26713/05, § 22 à 25 (refus d’inscription au barreau); M. c. Suisse du 26 avril 2011, requête no 41199/06, § 36 et 37 (non renouvellement d’une passeport); Fernández Martínez c. Espagne du 15 mai 2012, requête no 56030/07, § 56 à 60 (non renouvellement du contrat de travail d’un professeur de religion), ainsi que Godelli c. Italie du 25 septembre 2012, requête no 33783/09, § 46 (recherche de l’identité des géniteurs).

    ( 65 )   Il s’agissait, en l’occurrence, d’affaires concernant l’expulsion d’étrangers. Voir Cour eur. D. H., arrêts Üner c. Pays-Bas du 18 octobre 2006, Recueil des arrêts et décisions 2006-XII, .requête no 46410/99, § 59, ainsi que Maslov c. Autriche du 23 juin 2008, Recueil des arrêts et décisions 2008, requête no 1638/03, § 63.

    ( 66 )   Cour eur. D. H., arrêt Mikulić c. Croatie du 7 février 2002, Recueil des arrêts et décisions 2002-I, requête no 53176/99, § 53.

    ( 67 )   Voir, notamment, en matière d’expulsion, Cour eur. D. H., arrêts Mehemi c. France du 26 septembre 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-VI, requête no 25017/94, § 34, ainsi que Dalia c. France du 19 février 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-I, requête no 26102/95, § 52; pour un refoulement, Cour eur. D. H., arrêt Mubilanzila Mayeka et Kniki Mitunga c. Belgique du 12 octobre 2006, Recueil des arrêts et décisions 2006-XI, requête no 13178/03, § 80. Voir, également, Cour eur. D. H., arrêt Kurić et autres c. Slovénie du 13 juillet 2010, requête no 26828/06, § 351 et suiv.

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