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Document 61996CC0041

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 27 février 1997.
VAG-Händlerbeirat eV contre SYD-Consult.
Demande de décision préjudicielle: Landgericht Hamburg - Allemagne.
Article 85, paragraphe 3, du traité CE - Règlement (CEE) nº 123/85 - Système de distribution sélective - Etanchéité du système en tant que condition de son opposabilité aux tiers.
Affaire C-41/96.

Recueil de jurisprudence 1997 I-03123

ECLI identifier: ECLI:EU:C:1997:97

61996C0041

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 27 février 1997. - VAG-Händlerbeirat eV contre SYD-Consult. - Demande de décision préjudicielle: Landgericht Hamburg - Allemagne. - Article 85, paragraphe 3, du traité CE - Règlement (CEE) nº 123/85 - Système de distribution sélective - Etanchéité du système en tant que condition de son opposabilité aux tiers. - Affaire C-41/96.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-03123


Conclusions de l'avocat général


1 La question préjudicielle objet de la présente procédure, introduite par le Landgericht Hamburg, soumet à nouveau à l'attention de la Cour la théorie de l'tanchéité, élaborée par la jurisprudence allemande en matière d'efficacité et d'opposabilité aux tiers des systèmes de distribution sélective.

En particulier, le juge a quo demande à la Cour si le droit communautaire fait obstacle à l'application d'un principe de droit national en matière de concurrence déloyale sur la base duquel un système de distribution sélective ne lie les tiers que s'il est en théorie et en pratique tanche, c'est-à-dire uniquement si les produits relevant de ce système peuvent être vendus, et sont en fait vendus, au consommateur final exclusivement par un revendeur autorisé.

Le contexte factuel et normatif et la question préjudicielle

2 Pour mieux comprendre la portée et le sens de la question qui nous occupe, il est utile d'exposer d'abord brièvement les faits qui sont à l'origine du litige au principal, le cadre normatif et jurisprudentiel, ainsi que les arguments avancés par les parties devant le juge national.

3 Volkswagen AG (ci-après «VW»), société allemande qui construit des automobiles, distribue ses véhicules à l'intérieur de l'Union européenne exclusivement par l'intermédiaire de concessionnaires agréés qui traitent directement avec le consommateur final. Les contrats de distribution souscrits par ces concessionnaires disposent, entre autres, qu'il leur est interdit de vendre des véhicules neufs à des revendeurs non autorisés. La requérante au principal, VAG-Haendlerbeirat eV (ci-après «VAG») est une association allemande de concessionnaires agréés par VW.

La défenderesse, SYD-Consult, est un revendeur indépendant d'automobiles, qui commercialise, entre autres, des véhicules neufs de marque VW. Il se fournit auprès d'un importateur allemand qui, à son tour, achète les véhicules à un revendeur italien à des prix inférieurs à ceux pratiqués en Allemagne (1). SYD-Consult est donc en mesure d'offrir au public des véhicules neufs de la gamme VW à des prix compétitifs par rapport à ceux pratiqués par ses concurrents autorisés.

4 Estimant que ce comportement constituait un cas de concurrence déloyale au sens de l'article 1er de la Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (UWG) (2), VAG a introduit une action contre SYD-Consult, en l'accusant de profiter de la violation, de la part du revendeur italien, des obligations contractuelles qui lui sont imposées par le système de distribution sélective prévu par VW. Devant le juge de renvoi, VAG a souligné, par ailleurs, que ce système est conforme au droit communautaire de la concurrence, dans la mesure où il bénéficie de l'exemption par catégorie de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité, prévue par le règlement (CEE) n_ 123/85 (3).

5 Ainsi qu'il résulte de l'ordonnance de renvoi, la jurisprudence allemande subordonne l'existence de la violation des dispositions en matière de concurrence déloyale, de la part du revendeur indépendant qui commercialise des produits relevant d'un système de distribution sélective, à la double condition que le système soit lui-même légal ainsi qu'étanche en théorie et en pratique. Cette jurisprudence repose sur l'idée que le producteur ne peut imposer au revendeur agréé le respect des obligations contractuelles que si le système ne présente pas de failles, étant donné que, dans le cas contraire, le revendeur agréé serait exposé à la concurrence déloyale de la part des revendeurs indépendants.

En d'autres termes, comme le précise l'ordonnance, sur la base du droit allemand, un système de distribution sélective lie les parties et peut aussi être opposé aux tiers uniquement s'il est absolument étanche; lorsque l'étanchéité du système est garantie, en effet, on présume que le revendeur indépendant n'a réussi à se procurer des produits en dehors du réseau officiel de distribution qu'en profitant de l'éventuelle violation par un revendeur agréé de ses obligations contractuelles.

6 Devant le juge national, SYD-Consult s'est défendue en soutenant que le système de distribution de VW n'était pas étanche et que, donc, sur la base de la jurisprudence précitée, on ne se trouvait pas en l'espèce en présence d'un cas de concurrence déloyale.

VAG a pour sa part invoqué l'incompatibilité de la jurisprudence allemande en question avec le droit communautaire; cette incompatibilité aurait été établie par la Cour dans l'arrêt Cartier (4). Selon VAG, donc, compte tenu de cet arrêt, ainsi qu'en vertu du principe de la primauté du droit communautaire sur le droit national, il ne serait plus permis de subordonner à la condition de l'étanchéité l'opposabilité aux tiers d'un système de distribution sélective.

7 C'est donc pour obtenir l'interprétation de cet arrêt, par rapport aux faits de l'espèce, que le Landgericht Hamburg a décidé de suspendre la procédure pendante devant lui et de saisir la Cour de la question suivante:

«Eu égard à l'arrêt rendu par la Cour de justice le 13 janvier 1994 dans l'affaire C-376/92, Metro/Cartier S.A., une application du droit national allemand est-elle compatible avec le droit communautaire, et en particulier avec le principe de l'application pleine et uniforme du droit communautaire, lorsqu'elle se caractérise comme suit:

Les tiers, qui en dehors d'un système de distribution sélective exempté de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité CEE, en vertu d'un règlement d'exemption par catégories adopté par la Commission des Communautés européennes, achètent des produits relevant de ce système, ne peuvent se voir interdire la distribution de ces produits que si - outre les autres conditions de l'article 1er de la Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb (loi allemande sur la concurrence déloyale) - le système de distribution sélective est étanche; la réponse sera-t-elle différente selon que le système de distribution sélective n'est étanche qu'en théorie, ou bien en théorie et en pratique?»

Sur la question préjudicielle

8 La réponse que la Cour est appelée à fournir dans la présente procédure dépend donc en premier lieu de l'interprétation de l'arrêt Cartier, qui, nous le répétons, aurait, selon VAG, établi l'incompatibilité avec le droit communautaire du principe de l'étanchéité, en particulier comme condition d'opposabilité aux tiers d'un système de distribution sélective.

Il est donc nécessaire de rappeler d'abord les termes essentiels de cet arrêt, dans lequel la Cour, saisie à titre préjudiciel par l'Oberlandesgericht Duesseldorf, s'est prononcée sur le principe de l'étanchéité par rapport au droit communautaire de la concurrence.

9 Le litige qui est à l'origine de l'arrêt en question opposait l'entreprise Cartier, leader mondial pour certaines catégories de produits de luxe, à une société du groupe Metro, grossiste indépendant. Metro réussissait à s'approvisionner (de manière licite) en produits Cartier en dehors du réseau de distribution sélective prévu pour la commercialisation de ces produits (et expressément approuvé par la Commission) et les vendait dans ses propres points de vente à des prix inférieurs à ceux pratiqués par les distributeurs officiels.

Pour résoudre le litige entre les parties, né du refus de Cartier de fournir une garantie pour les montres vendues par Metro, le caractère non étanche du système de distribution sélective prévu par Cartier jouait un rôle essentiel. Selon le juge national, en effet, l'éventuelle incompatibilité de ce système (due à son absence d'étanchéité) avec l'article 85 du traité aurait aussi entraîné l'illégalité de la limitation de garantie pour les produits vendus en dehors du réseau officiel. Le juge national posait donc à la Cour une question destinée à établir si l'étanchéité du système en question constituait une condition de sa validité au sens de l'article 85, paragraphes 1 et 2, du traité.

10 La Cour a d'abord examiné les implications pratiques, en droit allemand, de l'application du principe visé (5). Elle a relevé que, outre une importance sur le plan de l'administration de la preuve, qui implique, en présence d'un système étanche, le renversement de la charge de la preuve en faveur du producteur qui agit contre un tiers en l'accusant de concurrence déloyale, le critère de l'étanchéité a une portée de nature substantielle: si le système est étanche, le producteur peut en effet agir contre le distributeur agréé pour le contraindre à respecter ses engagements contractuels, alors que la présence de failles dans le système, en exposant le distributeur agréé à la concurrence des tiers, l'exonère en substance du respect de ces obligations (6).

Répondant plus spécifiquement à la question du juge de renvoi, la Cour a affirmé que l'étanchéité d'un système de distribution sélective n'est pas une condition de sa validité au regard du droit communautaire (7). Elle a notamment précisé que l'interdiction des ententes édictée par le traité ne saurait dépendre d'une condition particulière à un système national, comme celui de l'étanchéité, élaboré par le droit allemand et «inconnu des droits de presque tous les autres États membres» (8). L'inapplicabilité de l'article 85, paragraphes 1 et 2, du traité à un système de distribution sélective ne peut donc pas être remise en question du seul fait que le producteur ne réussit pas à en assurer l'étanchéité. Une autre solution, toujours selon la Cour, aurait «pour résultat paradoxal que les systèmes de distribution les plus rigides et les plus fermés seraient traités plus favorablement ... que des systèmes de distribution plus souples et plus ouverts au commerce parallèle»; en outre, de toute façon, la Cour a précisé que l'on ne saurait imposer au producteur de réaliser partout l'étanchéité du réseau, alors même que la législation de certains États tiers peut faire obstacle à la réalisation de cet objectif ou même empêcher de l'atteindre (9).

11 Or, contrairement à ce qu'a soutenu VAG (tant devant le juge national que dans les observations qu'elle a déposées devant la Cour), nous ne pensons pas que l'arrêt en question ait affirmé l'incompatibilité du principe de l'étanchéité avec le droit communautaire de la concurrence. La Cour s'est bornée à déclarer, en réponse à la question précise du juge de renvoi, que la validité d'un système de distribution sélective au sens de l'article 85 ne saurait dépendre de son étanchéité.

Cela signifie simplement, à notre avis, que la condition de l'étanchéité d'un système de distribution, dont une législation nationale fait découler des conséquences déterminées, de nature processuelle et substantielle, en matière de concurrence déloyale, opère exclusivement au niveau national et est donc sans incidence, au moins dans le principe, sur la validité du système (par ailleurs conforme au droit communautaire) au regard de l'article 85 du traité (10). L'arrêt n'ajoute rien d'autre sur ce point; le lire comme une condamnation de la condition d'étanchéité, au regard du droit communautaire, paraît donc arbitraire (11).

12 Nous ajoutons que, même indépendamment de ce qui résulte de l'arrêt Cartier, nous n'estimons pas que le principe de l'étanchéité, tel qu'élaboré par la jurisprudence allemande, puisse être considéré comme pouvant être incompatible avec le droit communautaire de la concurrence, comme le soutient VAG.

Cette dernière allègue en effet que - en admettant que le système de distribution de VW, bien que non étanche, soit pleinement conforme au droit communautaire - un principe de droit national qui subordonne, comme en l'espèce, la possibilité de faire respecter le système à la condition de l'étanchéité ne pourrait pas ne pas être jugé incompatible avec le principe de la primauté du droit communautaire et, en tout cas, de nature à priver d'effet utile l'article 85, paragraphe 3, du traité en matière d'exemptions. A l'appui de sa thèse, VAG invoque la jurisprudence Wilhelm e.a. (12), en relevant que le principe en question, qui est propre à l'ordre juridique allemand, est contraire à l'exigence de l'application uniforme du droit communautaire de la concurrence à l'intérieur de la Communauté.

13 Nous commencerons par relever que la procédure communautaire d'exemption d'un système de distribution de l'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité, qu'il soit individuel comme dans l'affaire Cartier ou par catégorie comme en l'espèce, se borne à permettre une dérogation au régime général. Celui-ci s'inspire du critère d'une structure concurrentielle du marché et donc ne tolère pas seulement mais considère comme bénéfiques les importations parallèles, c'est-à-dire la non-étanchéité des systèmes de distribution. L'exemption n'impose donc rien et se borne à autoriser, par dérogation au régime général de la concurrence, le fabricant à convenir par contrat avec le distributeur de rendre «étanche» le système, sans que cela implique (du moins pas nécessairement) l'exclusion de ces «failles» du système de distribution considérées comme des facteurs de stimulation de la concurrence et qui sont donc tolérées, et dans certains cas même imposées, par le droit communautaire (13).

Dans ces conditions, il va de soi que l'application d'un principe national qui fait dépendre le bien-fondé d'une action en concurrence déloyale, intentée par le producteur (ou par le revendeur agréé) contre un revendeur indépendant (qui s'est procuré de manière licite des marchandises relevant d'un système de distribution sélective) de la capacité du premier (ou du second) à prouver que ledit système est étanche, n'est aucunement contraire aux exigences ni aux impératifs du droit communautaire de la concurrence, et n'est pas de nature à priver d'effet utile l'article 85, paragraphe 3, du traité. Elle est au contraire, et beaucoup plus simplement, sans pertinence: le principe en question, comme l'a déjà relevé la Cour dans l'arrêt Cartier, reste en effet un principe de droit national qui opère en matière de concurrence déloyale et ne concerne pas directement le droit communautaire de la concurrence.

14 Cela dit, il y a néanmoins lieu de rappeler que l'article 3, paragraphe 11, du règlement n_ 123/85 (14), sur lequel repose l'exemption par catégorie de l'interdiction visée à l'article 85, paragraphe 1, du traité, du système de distribution prévu par VW, subordonne expressément l'exemption à la condition que le système permette les ventes par des intermédiaires, étant entendu que ces derniers sont les revendeurs étrangers au système officiel mais ayant reçu un mandat écrit (15). L'exemption dans le secteur de la distribution des véhicules automobiles est donc subordonnée, entre autres, à la possibilité de vente aux mandataires des consommateurs finals et donc, en définitive, aux importations parallèles qui en constituent la conséquence naturelle.

Il en résulte, à l'évidence, que l'étanchéité d'un système de distribution sélective des automobiles - quelle que soit la configuration théorique et/ou pratique éventuellement attribuée à la notion d'étanchéité en droit national et quels que soient les effets qui y sont liés - ne pourra en aucun cas conduire à interdire les importations parallèles effectuées par des intermédiaires qui, bien qu'étrangers au réseau de distribution, sont munis d'un mandat écrit conféré par des consommateurs finals.

15 En conséquence, si le principe de l'étanchéité était interprété et appliqué de manière à faire dépendre le succès de l'action en concurrence déloyale de la preuve, de la part du producteur ou du distributeur agréé, d'une étanchéité absolue du système, en ce sens que l'activité commerciale des intermédiaires visés à l'article 3, paragraphe 11, du règlement n_ 123/85 serait interdite (ou en tout état de cause entravée), il en résulterait, de toute évidence, que le système en question serait privé du bénéfice de l'exemption, car il serait contraire au règlement et aussi, a fortiori, à l'article 85, paragraphe 1, du traité.

Toutefois, une telle hypothèse devrait conduire à exclure toute possibilité de poursuivre les tiers pour concurrence déloyale, la condition de la violation par le distributeur agréé de ses obligations contractuelles faisant défaut: et ce, bien entendu, au regard du règlement d'exemption qui devrait constituer pour chaque contrat de distribution le paramètre de légalité sous l'angle qui importe ici. D'autre part, il ne ressort de l'ordonnance de renvoi aucun élément de nature à laisser penser que les «tiers» qui se trouvent «en dehors d'un système de distribution sélective», auxquels le juge a quo fait référence, comprennent aussi les mandataires des consommateurs finals.

En définitive, nous estimons que la condition de l'étanchéité, en principe non pertinente aux fins d'établir la validité d'un système de distribution sélective au regard de l'article 85, paragraphe 1, du traité, n'est en tout cas pas incompatible avec le droit communautaire de la concurrence.

16 A la lumière des considérations qui précèdent, nous proposons donc à la Cour de répondre de la manière suivante à la question posée par le Landgericht Hamburg:

«Le droit communautaire ne s'oppose pas à l'application d'un principe de droit national en matière de concurrence déloyale sur la base duquel un système de distribution sélective ne lie les tiers que s'il est étanche.»

(1) - Il s'agit, en définitive, d'un exemple typique d'importation parallèle de véhicules, qui se fonde, comme on le sait, sur les avantages qui découlent des différences entre les prix pratiqués dans les différents États membres, ainsi que de l'évolution des taux de change des différentes monnaies des États dans lesquels les véhicules sont vendus. Dans le passé, en particulier dans la première moitié des années 80, le phénomène se produisait exactement en sens inverse, en raison des conditions de prix et des taux de change différents à l'époque, en ce sens que les opérateurs parallèles italiens achetaient les voitures aux concessionnaires allemands de VW et les commercialisaient en Italie à des conditions et prix compétitifs.

(2) - Sur la base de cette disposition, les tiers étrangers à un système de distribution sont coupables de concurrence déloyale dans trois hypothèses: quand ils achètent des marchandises soumises au système par le biais d'informations fausses et sous de fausses apparences; quand ils incitent des distributeurs autorisés à violer leurs obligations contractuelles; et quand ils retirent un avantage concurrentiel de la violation des obligations contractuelles commise par un distributeur agréé.

(3) - Règlement de la Commission, du 12 décembre 1984, concernant l'application de l'article 85, paragraphe 3, du traité CEE à des catégories d'accords de distribution et de service de vente et d'après-vente de véhicules automobiles (JO 1985, L 15, p. 16), entre-temps abrogé et remplacé par le règlement (CE) n_ 1475/95 de la Commission, du 28 juin 1995 (JO L 145, p. 25).

(4) - Arrêt du 13 janvier 1994 (C-376/92, Rec. p. I-15).

(5) - Il est utile de préciser que, comme l'a mis en évidence la Cour, alors que l'étanchéité théorique suppose seulement que le fabricant ait conclu avec les distributeurs qu'il a sélectionnés un ensemble de contrats qui assurent que les produits ne parviendront au consommateur final que par l'intermédiaire de distributeurs agréés, l'étanchéité pratique implique que le fabricant prouve aussi qu'il fait respecter son système, en agissant contre ses partenaires infidèles ou contre les tiers qui se procureraient les marchandises auprès de distributeurs violant leurs obligations contractuelles (arrêt Cartier, point 21).

(6) - Arrêt Cartier, points 22 et 23.

(7) - Arrêt Cartier, point 28.

(8) - Arrêt Cartier, point 25.

(9) - Arrêt Cartier, points 26, 27 et 29. D'ailleurs, dans le même arrêt, après avoir déclaré que l'étanchéité d'un système de distribution n'est pas une condition de sa compatibilité avec le traité, dans la mesure où invoquer l'étanchéité du système équivaudrait à empêcher un volume raisonnable et naturel de ventes parallèles, la Cour a ensuite affirmé que Cartier était en droit de refuser de fournir la garantie sur les produits vendus par Metro, réduisant de cette façon, sous l'angle commercial, les possibilités de marché des opérateurs parallèles, mais au détriment surtout des consommateurs. Pour être complet, il convient enfin de relever que, dans un communiqué de presse légèrement postérieur à l'arrêt Cartier, la Commission a déclaré ne pas retenir le principe jugé applicable par la Cour aux accords de distribution de véhicules automobiles qui bénéficient de l'exemption par catégorie visée au règlement n_ 123/85; l'article 5, paragraphe 1, de ce règlement subordonne en effet l'exemption à la condition que le service d'assistance gratuite soit fourni au consommateur final, indépendamment du fait que ce dernier ait acquis le véhicule auprès d'un revendeur agréé ou indépendant (IP/94/488 du 6 juillet 1994).

(10) - Voir en ce sens nos conclusions du 27 octobre 1993 dans l'affaire Cartier (Rec. p. I-17, points 11 à 23).

(11) - La doctrine aussi (voir toutefois Bechtold: «Ende des Erfordernisses der Lueckenlosigkeit», dans Neue juristische Wochenschrift, 1994, p. 3211 et suiv., dont, de toute évidence, la thèse avancée par VAG s'inspire largement, ainsi que les auteurs allemands qui y sont cités) semble d'ailleurs d'accord en substance avec cette interprétation de l'arrêt Cartier. Voir, par exemple, Idot: «Distribution sélective», dans Europe, 1994, Act. N. 117, p. 10 et suiv.; et Kovar: «Le dernier métro - L'étanchéité des réseaux de distribution: un réseau peut être ouvert ou fermé», dans La Semaine juridique - édition entreprise, 1994, Suppl. n_ 4, p. 2 et suiv., dans lequel l'auteur va jusqu'à affirmer: «Par ailleurs, rien n'autorise à considérer que la Cour de justice ait voulu interdire aux droits nationaux, le droit allemand en particulier, de tenir compte de l'étanchéité de la distribution sélective pour régler les conditions dans lesquelles un fabricant peut agir en concurrence déloyale contre des tiers non autorisés qui commercialisent ses produits» (p. 5, in fine).

(12) - Arrêt du 13 février 1969 (14/68, Rec. p. 1).

(13) - La Cour, comme on le sait, a toujours été favorable aux possibilités de ventes en dehors des réseaux et donc aux importations parallèles, jugées bénéfiques et nécessaires pour tempérer des phénomènes d'une rigidité excessive. Voir, par exemple, arrêt du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission (100/80, 101/80, 102/80 et 103/80, Rec. p. 1825, points 81 à 89). Dans l'arrêt Cartier aussi, comme nous l'avons déjà dit, la Cour a expressément rappelé sa préférence pour les systèmes de distribution «plus souples et plus ouverts au commerce parallèle» (point 26). En ce qui concerne, en outre, le secteur spécifique de l'achat et de la vente d'automobiles, voir arrêt du 17 juin 1987, Commission/Italie (154/85, Rec. p. 2717).

(14) - Cité à la note 5.

(15) - A cet égard, voir arrêts du 15 février 1996, Grand garage albigeois e.a. (C-226/94, Rec. p. I-651), et Nissan France e.a. (C-309/94, Rec. p. I-677). Dans ces arrêts, la Cour a d'ailleurs précisé que le règlement n_ 123/85, dans la mesure où il ne concerne que les rapports contractuels entre fournisseurs et distributeurs officiels de leur réseau, ne peut en tout état de cause pas être interprété en ce sens qu'il interdit aux tiers qui n'ont pas la qualité d'intermédiaires mandatés d'exercer une activité d'importation parallèle de véhicules neufs d'une marque faisant partie d'un réseau officiel de distribution (points 16 à 20). Une éventuelle action destinée à empêcher l'activité des tiers en cause ne peut donc être entreprise que sur la base du droit national applicable.

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