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Document 52021IE2457

Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Transport intermodal et logistique multimodale — Rendre les modes de transport complémentaires dans le cadre de l’écologisation des transports» (avis d’initiative)

EESC 2021/02457

JO C 374 du 16.9.2021, p. 1–5 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

16.9.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 374/1


Avis du Comité économique et social européen sur le thème «Transport intermodal et logistique multimodale — Rendre les modes de transport complémentaires dans le cadre de l’écologisation des transports»

(avis d’initiative)

(2021/C 374/01)

Rapporteur: Stefan BACK

Décision de l’assemblée plénière

25.3.2021

Base juridique

Article 32, paragraphe 2, du règlement intérieur

 

Avis d’initiative

Compétence

Section «Transports, énergie, infrastructures et société de l’information»

Adoption en section

24.6.2021

Adoption en session plénière

7.7.2021

Session plénière no

562

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

230/0/6

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

La seule solution viable à long terme pour développer une logistique et des transports multimodaux efficaces et durables consiste à s’attaquer aux problèmes qui rendent le transport multimodal plus onéreux, plus lent et moins fiable que le transport unimodal, en particulier par route. Des incitations financières et un soutien réglementaire ne sont pas suffisants pour ce faire.

1.2.

Une approche de ce type ferait en outre preuve de sobriété normative puisqu’elle ne nécessiterait pas l’adoption d’un cadre réglementaire spécifique.

1.3.

Pour améliorer le trafic multimodal, outre l’innovation technique et la résolution des problèmes de compétitivité, le CESE recommande d’internaliser entièrement les coûts externes liés à tous les modes de transport afin de garantir des conditions de concurrence équitables. Il préconise par ailleurs l’adoption de mesures rigoureuses visant à sauvegarder et/ou à relancer un système européen de transport par wagon isolé, à connecter les infrastructures stratégiques, telles que les ports, avec les systèmes ferroviaires, à investir dans les raccordements de sites industriels et à associer les grandes entreprises logistiques à une réorientation modale de leurs flux.

1.4.

Afin de garantir une concurrence loyale entre les différents modes de transport, le CESE préconise qu’ils soient tous exemplaires sur le plan social et offrent des services de transport, des emplois et des conditions sociales de qualité permettant d’assurer des conditions équitables pour tous les acteurs du marché.

1.5.

Outre les coûts supplémentaires liés aux opérations de transbordement et aux frais de transaction additionnels, le transport multimodal présente actuellement un certain nombre d’inconvénients, tels que des délais de livraison accrus, une certaine complexité, des risques plus élevés et une fiabilité moindre, qui l’empêchent de prendre son essor.

1.6.

Aussi des mesures s’imposent-elles pour rendre le transport multimodal de marchandises pleinement compétitif et s’assurer que ses flux soient efficaces et fluides, pour un coût identique à celui du transport unimodal.

1.7.

Il est par ailleurs indispensable que le chemin de fer soit mieux adapté à un contexte de marché ouvert et s’attèle aux problèmes de ponctualité, de fiabilité, de prévisibilité et de flexibilité, qui ont une incidence négative sur les solutions multimodales impliquant le rail.

1.8.

S’agissant du transport par voies navigables intérieures, il paraît nécessaire d’améliorer la capacité de transport transfrontalier.

1.9.

Des infrastructures de terminaux adéquates sont essentielles pour assurer le succès de l’intermodalité. En vue d’une utilisation efficace des ressources, il serait en outre utile que les États membres acceptent de coopérer concernant la planification des infrastructures des terminaux dans les régions frontalières. La distance entre les terminaux devrait être adaptée à la demande, à la densité du réseau et à d’autres conditions locales.

1.10.

S’agissant de la dette publique, le CESE recommande que les investissements publics dans les infrastructures intermodales soient exemptés des dispositions du pacte de stabilité et de croissance (PSC), y compris après la crise liée à la COVID-19.

1.11.

Pour que la multimodalité fonctionne correctement, il importe que les réglementations relatives, par exemple, à la manutention des marchandises dangereuses entre les différents modes de transport soient cohérentes et que d’autres questions réglementaires ou pratiques susceptibles de poser des difficultés au niveau de l’interface entre modes de transport ou du transport entre États membres soient résolues.

1.12.

Un certain nombre des obstacles auxquels se heurte le transport intermodal pourraient être surmontés grâce à des solutions numériques intelligentes, comme les possibilités de suivi et de traçage ou d’autres solutions numériques facilitant une gestion efficace des flux de transport multimodal.

1.13.

Dès le mois d’août 2024, le règlement (UE) 2020/1056 du Parlement européen et du Conseil (1) concernant les informations électroniques relatives au transport de marchandises facilitera l’échange d’informations réglementaires entre opérateurs et autorités au moyen de plateformes numériques et améliorera le flux de transport intermodal.

1.14.

Le CESE invite la Commission européenne à tenir compte de ces propositions lorsqu’elle élaborera sa prochaine révision du cadre réglementaire pour le transport intermodal, et à faire en sorte que celui-ci puisse jouer pleinement son rôle dans le système de transports, sans mesures de soutien spécifiques.

2.   Informations générales

2.1.

La communication de la Commission européenne sur une stratégie de mobilité durable et intelligente [COM(2020) 789] souligne que pour soutenir l’écologisation des opérations de fret en Europe, le cadre existant pour le transport intermodal doit être remanié en profondeur et transformé en un instrument efficace. Elle insiste sur la nécessité de revoir le cadre réglementaire, y compris la directive sur les transports combinés [directive 92/106/CEE du Conseil (2), ci-après dénommée «la directive»] et la possibilité d’introduire des incitations économiques tant pour les opérations que pour les infrastructures. Ces mécanismes d’incitation devraient reposer sur la surveillance des émissions.

2.2.

Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 90 % à l’horizon 2050 est un élément clé de la stratégie pour une mobilité durable et intelligente. Le transport multimodal joue un rôle important dans cette stratégie, qui vise à garantir une interaction des modes de transport optimisée sur le plan environnemental, notamment en réduisant la prédominance du transport de marchandises par route.

2.3.

La stratégie de mobilité durable et intelligente souligne en outre l’importance de la logistique multimodale, y compris au sein des zones urbaines, ainsi que la nécessité de mener une planification efficace pour éviter les trajets à vide et d’inclure le fret dans la planification de la mobilité urbaine.

2.4.

La stratégie de mobilité durable et intelligente met par ailleurs en évidence le problème que constitue la rareté des infrastructures de transbordement, notamment des terminaux multimodaux terrestres, et la nécessité d’améliorer les technologies de transbordement, y compris l’échange multimodal de données et les systèmes de gestion du trafic intelligents pour tous les modes de transport. La Commission a l’intention de mettre des fonds à disposition et de prendre des initiatives, y compris en ce qui concerne la recherche et l’innovation, pour résoudre ces problèmes. Les règles en matière d’aides d’État concernant les chemins de fer peuvent également contribuer utilement à la réalisation de cet objectif.

2.5.

Le plan d’action de la Commission qui accompagne la stratégie de mobilité durable et intelligente prévoit un réexamen du cadre réglementaire pour le transport intermodal, y compris la directive, en 2022.

2.6.

Dans une proposition de 2017 [COM(2017) 648], la Commission a proposé de modifier la directive et a souligné la nécessité d’améliorer la coordination entre les États membres concernant la construction de terminaux intermodaux et de procéder à diverses simplifications administratives, tout en maintenant une approche selon laquelle des actions de promotion sont nécessaires, y compris des règles spécifiques en matière d’accès au marché, en particulier s’agissant des transports routiers. Cette proposition a fait l’objet d’importantes modifications au cours du processus législatif et la Commission a dès lors choisi de la retirer.

2.7.

Le règlement (UE) 2020/1055 du Parlement européen et du Conseil (3) portant modification du règlement (CE) no 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil (4) a toutefois permis aux États membres de s’écarter des règles spécifiques relatives à l’accès au marché du transport routier et d’appliquer les règles habituelles en matière de cabotage.

3.   Observations générales

3.1.

La seule solution viable à long terme pour développer une logistique et des transports multimodaux efficaces et durables consiste à s’attaquer aux problèmes qui rendent le transport multimodal plus onéreux, plus lent et moins fiable que le transport unimodal, en particulier par route. Des incitants financiers et un soutien réglementaire ne sont pas suffisants à cet effet.

3.2.

Une approche de ce type permettrait en outre de renoncer à des règles complexes pour définir le transport combiné ou multimodal et garantir que les opérateurs bénéficient du droit à un soutien financier et de règles spécifiques en matière d’accès au marché. Elle ferait dès lors également preuve de sobriété réglementaire.

3.3.

Pour améliorer le trafic multimodal, outre l’innovation technique et la résolution des problèmes de compétitivité, le CESE recommande d’internaliser entièrement les coûts externes liés à tous les modes de transport en vue de réaliser des conditions de concurrence équitables. Il préconise par ailleurs l’adoption de mesures rigoureuses visant à sauvegarder et/ou à relancer un système européen de transport par wagon isolé, à connecter les infrastructures stratégiques, telles que les ports, avec les systèmes ferroviaires, à investir dans les raccordements de sites industriels et à associer les grandes entreprises logistiques à une réorientation modale de leurs flux.

3.4.

Afin de garantir une concurrence loyale entre les différents modes de transport, le CESE préconise qu’ils soient tous exemplaires sur le plan social et offrent des services de transport, des emplois et des conditions sociales de qualité en vue d’assurer des conditions équitables pour tous les acteurs du marché.

3.5.

Le CESE souligne que des travailleurs qualifiés et motivés et de bonnes conditions de travail sont une condition préalable essentielle au succès du transport multimodal. Le CESE demande que les règles en matière de détachement fassent l’objet d’une révision pour prendre en compte l’importante mobilité du personnel ferroviaire. Le CESE préconise en outre l’adoption de réglementations simples, claires et vérifiables ainsi que d’un système adéquat de contrôle de la conformité afin d’assurer des conditions de travail équitables pour tous les travailleurs du secteur des transports dans le but de garantir une concurrence saine et loyale. Ces conditions de travail équitables concernent notamment la formation, les horaires de travail et les périodes de repos, le niveau de langue, le salaire, la santé et la sécurité au travail, des installations sanitaires modernes ainsi qu’un hébergement de nuit décent.

3.6.

Outre les coûts supplémentaires liés aux opérations de transbordement et aux frais de transaction additionnels, le transport multimodal présente un certain nombre d’inconvénients, comme de longs délais de livraison, une certaine complexité, des risques plus élevés et une fiabilité moindre, qui l’empêchent de prendre pleinement son essor.

3.7.

Il ressort d’une étude récente (5) que la différence de coût entre les solutions unimodales (route uniquement) et intermodales est considérable. Les coûts additionnels découlent de la charge de travail supplémentaire que représente l’organisation du transport multimodal (50 à 100 EUR par envoi), des délais de transit plus longs (de 4 à 120 heures, et 25 heures en moyenne) pour un surcoût de 75 à 100 EUR par envoi, et de l’absence de procédure documentaire harmonisée, qui induit une perte par transfert de l’ordre de 5 à 150 EUR.

3.8.

L’étude conclut néanmoins qu’un point d’équilibre financier peut être trouvé sur les longues distances et mentionne à cet égard, sans compter les mesures de soutien, 595 km pour la combinaison rail/route, 266 km pour la combinaison voies navigables intérieures/route et 736 km pour la combinaison transport maritime à courte distance/route.

3.9.

En particulier, l’étude déplore l’absence fréquente de mécanismes de suivi et de traçage, ainsi que l’impossibilité d’utiliser des documents électroniques.

3.10.

Une analyse d’impact de la proposition législative de 2017 concernant la directive fait apparaître un surcoût global de près de 60 % pour les solutions de transport intermodal, qui est essentiellement dû à la mise en œuvre, aux retards, aux coûts de transaction, etc. (6).

3.11.

Il est dès lors évident que des mesures s’imposent pour rendre le transport multimodal de marchandises pleinement compétitif, résoudre les problèmes décrits ci-dessus et faire en sorte que les flux de transport multimodal de marchandises soient efficaces et fluides, pour un coût identique à celui du transport unimodal.

3.12.

À cet égard, il convient par ailleurs de souligner que le chemin de fer doit être mieux adapté à un contexte de marché ouvert et s’attaquer aux problèmes de manque de ponctualité, de fiabilité, de prévisibilité et de flexibilité, qui ont de toute évidence eu une incidence négative sur les solutions multimodales impliquant le rail.

3.13.

S’agissant du transport par voies navigables intérieures, il semble nécessaire d’améliorer la capacité de transport transfrontalier.

3.14.

Les goulets d’étranglement dus au manque de capacité des terminaux multimodaux et des plateformes logistiques posent également problème. Selon le document de travail des services de la Commission accompagnant la stratégie de mobilité intelligente et durable (7), des distances entre terminaux supérieures à 300 km, comme c’est le cas par exemple en Finlande et dans certaines régions de Suède, sont excessives car elles limitent la possibilité de courts trajets routiers de 150 km environ. S’il est vital que les terminaux disposent d’une capacité suffisante, en particulier le long des corridors du réseau central RTE-T, il ne faut toutefois pas perdre de vue que la distance qui les sépare dépend également des volumes de transport dans une région donnée et de la densité du réseau qui varie d’une région d’Europe à l’autre.

3.15.

La coordination, entre États membres limitrophes, de la planification des terminaux dans les régions frontalières est par ailleurs essentielle pour garantir une utilisation efficace des ressources.

3.16.

À cet égard, il convient de noter qu’une étude récente (8) portant sur l’analyse des conséquences des restrictions en matière de cabotage sur les trajets routiers dans le cadre du transport combiné a conclu que le recours au «combi-cabotage» est assez fréquent, en raison des problèmes liés à la disponibilité et à la flexibilité des conducteurs ainsi que des différences de coûts, et que les restrictions applicables à ce type de cabotage sont dès lors susceptibles d’avoir un certain nombre d’effets négatifs immédiats pour les personnes concernées, notamment un retour au transport routier unimodal et une réduction des services de fret ferroviaire, alors que les opérateurs de terminaux estiment qu’à long terme, l’amélioration des services et de la productivité des terminaux permettrait de compenser d’éventuelles hausses du coût du transport.

3.17.

Il importe en outre de veiller à ce que les réglementations concernant par exemple la manutention des marchandises dangereuses entre les différents modes de transport soient cohérentes et à ce que d’autres problèmes réglementaires ou pratiques susceptibles de poser des difficultés au niveau de l’interface entre modes de transport ou dans le cadre du transport entre États membres soient résolus.

3.18.

Il est possible de résoudre certains des problèmes susmentionnés au moyen de solutions numériques intelligentes. Les possibilités de suivi et de traçage ainsi que d’autres solutions numériques facilitant la gestion efficace des flux de transport multimodal en sont un exemple.

3.19.

Dès le mois d’août 2024, le règlement (UE) 2020/1056 concernant les informations électroniques relatives au transport de marchandises facilitera l’échange d’informations réglementaires entre opérateurs et autorités au moyen de plateformes numériques et éliminera au moins une partie des problèmes liés aux document normalisés et à l’échange électronique de documents.

3.20.

Il devrait par conséquent être possible de remédier à la plupart des difficultés évoquées ci-dessus qui entravent l’essor du fret multimodal.

3.21.

À cette fin, il faut toutefois disposer d’infrastructures de terminaux adéquates. En vue d’une utilisation efficace des ressources, il serait en outre utile que les États membres acceptent de coopérer concernant la planification des infrastructures des terminaux dans les régions frontalières.

3.22.

S’agissant de la dette publique, le CESE recommande d’exempter les investissements publics dans les infrastructures multimodales des dispositions du pacte de stabilité et de croissance (PSC) y compris après la crise lié à la COVID-19.

3.23.

Comme cela a déjà été souligné, les chemins de fer et les terminaux de voies navigables intérieures en particulier doivent adopter une approche davantage axée sur le marché.

3.24.

Si les difficultés exposées ci-dessus sont résolues de manière adéquate, le transport multimodal pourra pleinement jouer son rôle dans le système de transports, sans qu’il soit nécessaire d’adopter des mesures de soutien spécifiques.

Bruxelles, le 7 juillet 2021.

La présidente du Comité économique et social européen

Christa SCHWENG


(1)  Règlement (UE) 2020/1056 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2020 concernant les informations électroniques relatives au transport de marchandises (JO L 249 du 31.7.2020, p. 33).

(2)  Directive 92/106/CEE du Conseil du 7 décembre 1992 relative à l’établissement de règles communes pour certains transports combinés de marchandises entre États membres (JO L 368 du 17.12.1992, p. 38).

(3)  Règlement (UE) 2020/1055 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2020 modifiant les règlements (CE) no 1071/2009, (CE) no 1072/2009 et (UE) no 1024/2012 en vue de les adapter aux évolutions du secteur du transport par route (JO L 249 du 31.7.2020, p. 17).

(4)  Règlement (CE) no 1072/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché du transport international de marchandises par route (JO L 300 du 14.11.2009, p. 72).

(5)  TRL (2017) — Gathering additional data on EU combined transport (Collecter des données supplémentaires sur le transport combiné de l’UE) — Rapport final.

(6)  Document de travail des services de la Commission — Impact Assessment (Analyse d’impact) [SWD(2017) 362].

(7)  SWD(2020) 331.

(8)  Train de mesures sur la mobilité 1 — Collecte de données et analyse de l’impact des restrictions en matière de cabotage sur les trajets routiers dans le cadre du transport combiné, TRT Trasporti e Territorio SRL.


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