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Document 52004IE0961

    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «2ème pilier de la PAC: les perspectives d'adaptation de la politique de développement des territoires ruraux (Les suites de la conférence de Salzbourg)»

    JO C 302 du 7.12.2004, p. 53–59 (ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, SK, SL, FI, SV)

    7.12.2004   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    C 302/53


    Avis du Comité économique et social européen sur le thème «2ème pilier de la PAC: les perspectives d'adaptation de la politique de développement des territoires ruraux (Les suites de la conférence de Salzbourg)»

    (2004/C 302/13)

    Le 29 janvier 2004, le Comité économique et social européen, conformément à l'article 29, paragraphe 2 de son Règlement intérieur, a décidé d'élaborer un avis sur le thème suivant: «2ème pilier de la PAC: les perspectives d'adaptation de la politique de développement des territoires ruraux (Les suites de la conférence de Salzbourg)».

    La section spécialisée «Agriculture, développement rural, environnement», a été chargée de préparer les travaux du Comité en la matière.

    Par lettre en date du 3 mai 2004 adressée au CESE par M. Silva Rodriguez, DG Agriculture, la Commission européenne a fait savoir qu'elle souhaiterait connaître la position du Comité économique et social européen à ce sujet dans les meilleurs délais. Compte tenu de l'urgence des travaux, lors de sa 410ème session plénière des 30 juin et 1er juillet 2004 (séance du 30 juin 2004), le Comité économique et social européen a désigné M. Gilbert BROS comme rapporteur général et adopté le présent avis par 127 voix pour et 9 abstentions.

    1.   Introduction

    1.1

    La Commission a organisé en novembre 2003 une conférence, à Salzbourg, sur l'avenir de la politique communautaire de développement rural dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne. Cette conférence a permis, à l'image de celle de Cork en faveur «d'un milieu rural vivant» (1), de:

    réunir les principaux acteurs impliqués dans l'élaboration et la mise en œuvre de la politique de développement rural;

    proposer, dans une déclaration, les principales orientations politiques des acteurs du développement rural;

    préciser les axes d'intervention d'un «fonds rural» en amont du débat budgétaire sur les perspectives financières pour la période 2007-2013.

    C'est pourquoi, le Comité propose que la réflexion sur les adaptations de la politique de développement des territoires ruraux pour la période 2007-2013 s'appuie sur les conclusions de cette conférence.

    1.2

    Constatant que l'élargissement de l'Union européenne introduit une plus grande diversité des territoires ruraux mais surtout la prééminence de la question sociale et de l'emploi dans les nouveaux États membres, le Comité considère qu'il importe de cerner la cohérence et l'articulation entre la politique régionale et le second pilier de la PAC.

    1.3

    La Commission a publié deux documents présentant les perspectives financières pour la future période de programmation (2) et le 3ème rapport sur la Cohésion (3). Il ressort de ces documents que la politique régionale intègre pleinement la stratégie de Lisbonne en faveur d'une économie compétitive et de la connaissance et la future politique de développement rural se situe dans une rubrique intitulée «Gestion durable et protection des ressources naturelles» qui fait référence à la stratégie de développement durable. Cette rubrique comprend également le 1er pilier de la PAC et les programmes communautaires de protection de l'environnement.

    1.4

    Les conclusions du Sommet européen de GÖTEBORG, du 15 et 16 juin 2001 (4), ont permis l'adoption d'une stratégie européenne en faveur du développement durable, dans laquelle il est précisé que la Politique Agricole Commune «… devrait viser entre autre à contribuer à un développement durable en encourageant davantage les produits sains et de qualité élevée, des méthodes de production écologiquement viables...;» (5).

    1.5

    Les conclusions du Conseil «Agriculture et pêche» de Luxembourg de juin 2003 confirment un renforcement du 2ème pilier de la PAC en vue «… de promouvoir l'environnement, la qualité et le bien-être des animaux et pour aider les agriculteurs à se conformer aux normes de production européenne qui entreront en vigueur en 2005 (6)». C'est pourquoi, cet avis d'initiative devra analyser et approfondir la réflexion sur les 3 axes d'action retenus à Salzbourg, à savoir: une agriculture compétitive, la protection de l'environnement et la contribution à la cohésion économique et sociale dans les territoires ruraux.

    1.6

    Les acteurs du développement rural ont également souligné dans la déclaration finale de Salzbourg qu'une simplification notable de la politique communautaire de développement rural était à la fois nécessaire et urgente. Cette simplification doit dans le même temps accorder davantage de responsabilités aux partenariats de programmes pour définir et mettre en œuvre les stratégies d'ensemble.

    1.7

    Le Comité se propose donc d'examiner dans le cadre de cet avis d'initiative la cohérence entre la future politique régionale et la future politique de développement rural afin de limiter les «zones grises», d'approfondir la proposition des trois futurs axes constituant la politique de développement rural et de cibler les éléments de simplification administrative.

    A.   LA COMPLÉMENTARITÉ ENTRE POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL ET DE DÉVELOPPEMENT RURAL

    2.   La politique régionale: du principe de cohésion économique et sociale au principe de solidarité territoriale

    2.1

    L'adoption de l'Acte Unique en 1986 a accéléré le processus d'intégration des économies des États membres. Toutefois, la diversité des niveaux de développement des régions du territoire de l'Union européenne et leur mises en concurrence ont jeté les prémices d'une véritable politique de cohésion devant apporter une contrepartie aux contraintes du marché unique pour les pays du sud de l'Europe et les régions défavorisées. Par la suite, le traité de Maastricht sur l'Union européenne, qui est entré en vigueur en 1993, a institutionnalisé la politique de cohésion économique et sociale.

    2.2

    Parallèlement, le développement des relations commerciales de l'Union et l'ouverture progressive du marché intérieur ont exacerbé la mise en concurrence des régions européennes alors qu'elles ne disposaient pas toutes des mêmes atouts. Au cours des années 90, la politique structurelle visait donc à répondre aux principaux enjeux suivants:

    réduire les écarts de développement par le soutien à la création d'emplois dans les zones défavorisées;

    compenser les handicaps des régions ne bénéficiant pas des mêmes atouts et accès au marché mondial;

    soutenir les facteurs créateurs de richesse pour les zones défavorisées.

    2.3

    Prolongeant les éléments de la politique structurelle existante, la réforme décidée en 1999 (Agenda 2000) a visé à:

    accentuer un transfert financier des régions «les mieux dotées» vers les régions en retard de croissance (réduction du nombre des objectifs et 75 % des fonds consacrés à l'objectif 1),

    développer les liens économiques entre ces régions (Interreg III),

    appuyer l'intégration des régions en retard de développement dans le marché unique grâce au fonds de Cohésion.

    2.4

    La déclaration des Ministres des États membres de l'Union européenne en charge de l'aménagement du territoire (Postdam, 10-11 mai 1999 (7)) et les conclusions du Conseil européen de Göteborg (juin 2001) sur la définition d'une stratégie européenne en faveur du développement durable soulignent la nécessité d'une cohésion territoriale pour un développement équilibré et durable des territoires de l'Union européenne. Fait ultime de cette évolution, la Convention a proposé dans l'article 3 du projet de Constitution pour l'Europe d'inscrire la cohésion territoriale dans les objectifs de l'Union (8).

    2.5

    De plus, le règlement No1260/99 (9) portant sur les dispositions générales des fonds structurels reconnaît que le développement du potentiel endogène des zones rurales reste un objectif prioritaire de développement et d'ajustement structurel des régions en retard de développement.

    2.6

    Au vu de l'évolution des principes qui guident la politique structurelle, à savoir le soutien de la croissance et le développement durable, le Comité invite la Commission et le Conseil à rappeler, dans le cadre de la cohésion territoriale, que le développement des territoires ruraux doit rester un des objectifs prioritaires de la politique régionale. Ainsi, les problématiques de création d'emplois, de formation continue et d'accès aux nouvelles technologies de l'information en milieu rural doivent trouver pleinement leur réponse dans cette politique.

    3.   La politique de développement rural: de l'Europe verte au compromis de Luxembourg

    3.1

    Les changements intervenus dans l'agriculture depuis près de cinquante ans sont substantiels. Au fil du temps, ils ont modelé l'évolution de la politique communautaire des structures agricoles. De 1962 à 1972, l'intervention communautaire se limitait à la coordination des mesures de gestion des marchés, car celles-ci étaient en cours de création. De 1972 à 1985, deux grandes catégories d'actions supplémentaires ont émergé: d'une part les actions horizontales, applicables dans tous les États membres (formation professionnelle, préretraite …), d'autre part les actions régionales visant à réduire les handicaps naturels structurels et à promouvoir l'ensemble de l'agriculture.

    3.2

    De 1985 à 1999, la recherche d'un équilibre entre l'amélioration nécessaire de la compétitivité de l'agriculture européenne et l'ajustement du potentiel de production aux besoins du marché, la protection de l'environnement et le développement des régions défavorisées font que la politique des structures agricoles devient le volet agricole de la nouvelle stratégie de la politique régionale. Ainsi, la politique des structures met en œuvre, en plus des actions horizontales, des actions de maintien de l'espace rural, de protection de l'environnement, de développement des infrastructures rurales, touristiques et des activités agricoles.

    3.3

    Sur la base de la conférence de Cork, «l'Agenda 2000» a permis la mise en place d'une politique intégrée de développement rural au moyen de deux instruments juridiques (FEOGAGarantie et FEOGA-Orientation). Ceux-ci tendent à une meilleure cohérence entre la politique de développement rural (2ème pilier de la PAC) et la politique des marchés (1er pilier de la PAC) en promouvant notamment la diversification de l'économie rurale.

    3.4

    De plus, le mécanisme optionnel de modulation des aides directes fut introduit. Il permet d'augmenter les moyens financiers pour les mesures agri-environnementales, de préretraite, de boisement ou celles destinées aux zones défavorisées par un prélèvement sur les soutiens compensatoires aux baisses de prix institutionnels décidés dans les organisations communes de marchés des produits agricoles.

    3.5

    Le règlement no1257/99 (10) concernant le soutien au développement rural par le FEOGA s'appuie sur les considérations suivantes:

    les mesures de développement rural doivent accompagner et compléter la politique des marchés;

    les trois mesures d'accompagnement instituées par la réforme de la PAC en 1992 doivent compléter le régime en faveur des zones défavorisées (contraintes naturelles) et des zones soumises à des contraintes environnementales;

    d'autres mesures de développement rural peuvent s'insérer dans les programmes de développement intégré en faveur des régions d'objectifs no1 et no2.

    3.6

    La série de 22 mesures, que les États membres peuvent inclure dans leur programmation en matière de développement rural, se répartit de la manière suivante dans la programmation 2000-2006 (11): 39,2 % pour l'amélioration de la compétitivité et l'adaptation de l'agriculture, 35 % pour les zones défavorisées et les mesures agri-environnementales et 25,8 % pour l'adaptation et le développement des zones rurales.

    3.7

    La réforme de la PAC, adoptée en juin 2003, a conforté l'une des missions de la politique de développement rural, à savoir l'accompagnement de l'adaptation de l'agriculture aux exigences de la société. Le champ des mesures a été élargi à la promotion de la qualité des produits, l'amélioration des standards de production (environnement, bien-être animal), la mise en œuvre de Natura 2000 et le renforcement des mesures en faveur de l'installation des jeunes agriculteurs.

    3.8

    De plus, le mécanisme de la modulation est désormais obligatoire au niveau européen. Il devrait correspondre à un transfert financier de près de 1,2 milliards d'euros, en année pleine, de la politique des marchés vers la politique de développement rural.

    3.9

    Au regard de cette évolution, le Comité souligne que le 2ème pilier de la PAC doit poursuivre comme premier objectif l'accompagnement de l'agriculture dans son adaptation pour répondre aux évolutions structurelles des attentes des citoyens.

    3.10

    La communication de la Commission sur les perspectives financières pour la période 2007-2013 présente un budget stable et modeste en retenant un niveau des ressources propres de l'Union européenne à hauteur de 1,24 % du PNB. Le Comité soutient la proposition de la Commission et souligne qu'une baisse des ressources communautaires serait un mauvais signal au moment de la réalisation effective de l'élargissement de l'Union européenne.

    3.11

    Ce constat vaut également pour la politique de développement rural. En effet, la seule ressource «supplémentaire» pour cette politique serait l'application de la modulation. Ce qui revient à permettre uniquement un transfert financier entre le 1er et le 2ème piliers de la PAC. C'est pourquoi, le Comité demande instamment au Conseil et au Parlement européen de veiller à attribuer les moyens financiers adéquats à cette politique sous peine de la vider de sa substance.

    3.12

    Enfin, la future politique de développement rural sera mise en œuvre par une nouvelle Commission qui devrait comprendre 25 Commissaires. Une gestion des deux piliers de la PAC par des Commissaires distincts représenterait des risques réels de perte de cohérence entre ces deux politiques. Le Comité tient à souligner son opposition à toute volonté de mettre en place des Directions générales distinctes et à la nomination de Commissaires différents pour les questions agricoles et de développement rural.

    4.   Le rôle de la multifonctionnalité de l'agriculture dans la politique de développement rural

    4.1

    Le Comité a déjà rappelé, dans ses précédents avis (12), que les marchés agricoles sont instables par nature et largement soumis à des variations de prix. C'est pourquoi, les mécanismes de régulation de l'offre et du marché sont la condition sine qua non pour que les exploitations agricoles puissent satisfaire aux conditions d'une production agricole durable. Le Comité souligne que le maintien d'une politique en faveur de la régulation des marchés des produits agricoles contribue également à la réussite d'une politique de développement des territoires ruraux.

    4.2

    Par ailleurs, la suppression du lien entre l'acte de production et le soutien public à l'agriculture a été introduite lors de la dernière réforme de la PAC du 26 juin 2003. Cette évolution renforce la nécessité d'une perspective de développement économique des activités agricoles pour une meilleure prise en compte des nouvelles exigences comme la biodiversité, l'entretien de paysages spécifiques ou la création d'emplois par ce secteur. Le Comité tient donc à rappeler que l'activité de production agricole concourt en premier lieu à l'émergence de campagnes vivantes car elle permet de développer un lien direct entre les activités humaines et leur territoire.

    4.2.1

    L'ancrage territorial des systèmes de production, les moyens de valorisation des productions agricoles, notamment par le développement des Appellations d'origine protégée (AOP) et les Indications Géographiques de Production (IGP), et la vente directe sont quelques uns des aspects de la multifonctionnalité de l'agriculture en faveur du développement rural.

    4.3

    L'agriculture représentera dans une Union à 25 États membres plus de 13 millions d'emplois directs et plus de 5 millions d'emplois indirects dans le secteur amont et aval de l'agriculture. Ces emplois sont fortement «territorialisés» par leur nature. Et l'évolution des échanges intracommunautaires vers une part de plus en plus prépondérante des produits agroalimentaires transformés, renforce le lien entre secteur agricole et secteur agroalimentaire. Le maintien et la répartition de l'activité agricole dans les territoires ruraux deviennent donc une priorité sous peine d'être un facteur limitatif pour l'intégration des zones rurales dans l'économie régionale.

    4.4

    L'activité agricole s'étendra sur 45 % du territoire européen soit 190 millions d'ha (UE à 27). En 2001, plus de 10 % de la Surface agricole utile (SAU) était sous contrat de mesures agri-environnementales. 15 % des zones classées sous la directive «protection des habitats et oiseaux» sont des terres agricoles. Et 38 % des terres agricoles dans l'UE à 15 ont été désignées «zone vulnérable aux nitrates». Ces mesures répondent à des objectifs locaux d'entretien de l'environnement et/ou d'aménagement du territoire. Il va sans dire que l'activité agricole occupera toujours une place primordiale dans la gestion des territoires.

    4.5

    Le Comité tient à rappeler que les aspects multifonctionnels de la production agricole concourent sous plusieurs aspects au maintien d'une campagne vivante. La Commission et le Conseil doivent le rappeler en préambule de toute nouvelle orientation de la politique de développement rural.

    4.6

    Tout en appuyant les conclusions de la conférence de Salzbourg sur la diversification de l'économie rurale, le Comité souligne qu'il conviendrait d'éviter le travers de «la rurbanisation de la campagne», c'est-à-dire appliquer les mêmes actions de développement des zones urbaines aux zones rurales. A ce titre, le Comité élabore actuellement un avis d'initiative sur l'agriculture péri-urbaine (13). C'est pourquoi, l'axe «diversification de l'économie rurale» dans le cadre de la politique de développement rural devrait se concentrer autour de quelques thématiques en lien étroit avec l'agriculture, notamment les services à la population agricole améliorant leur condition de vie, le développement de l'agritourisme et le soutien à la pluriactivité basé sur une activité agricole.

    5.   Les spécificités et limites de la politique de développement rural

    5.1

    Les conclusions du 3ème rapport sur la cohésion montrent que les disparités persistantes entre les régions en matière de production durable, de productivité et de création d'emplois résultent d'insuffisances structurelles concernant les principaux facteurs de compétitivité. Le Comité souligne que la politique de développement rural doit également s'inspirer de ces principes pour s'inscrire dans une démarche de développement structurel des territoires ruraux.

    5.2

    L'élargissement de l'Union européenne renforce la problématique de développement économique des territoires ruraux de par la forte présence d'un «chômage caché» dans les nouveaux États membres. Ce qui complexifie encore plus la distinction entre la politique régionale et celle de développement rural. Le Comité propose que les thématiques communes à la politique régionale et de développement rural soient précisées dans le cadre d'un nouveau règlement sur les fonds structurels et que le nombre des mesures pouvant être financées par l'une ou l'autre de ces politiques soit limité afin de favoriser une meilleure lisibilité de chacune d'entre elles.

    5.3

    Si l'agriculture ne peut pas prétendre, à elle seule, assurer le développement des territoires ruraux, il s'avère que ce secteur d'activité reste indispensable à toute réussite d'une politique de développement rural. Le lien des emplois directs et indirects avec le territoire, l'étendue de l'espace entretenu font que l'accompagnement de l'agriculture dans son adaptation aux évolutions des attentes des citoyens reste prioritaire. De plus le 1er comme le 2ème pilier de la PAC participent aux objectifs de développement rural en maintenant ou renforçant les activités agricoles.

    5.4

    L'élargissement de l'Union européenne représente également un défi important pour l'avenir de la PAC. Le Comité souligne que les échanges d'expérience et les transferts de méthodologies devraient également occuper une place particulière dans les conditions de mise en œuvre du 2ème pilier de la PAC pour la future période.

    5.5

    Le Comité tient à souligner que les régions à faible densité de population comme les îles, les espaces arctiques et les zones de montagnes relèvent toujours, de par leurs handicaps naturels permanents, de l'objectif de l'aboutissement du marché unique. La politique régionale comme la politique de développement rural doivent tenir compte de cet aspect dans leurs modalités de mise en oeuvre, notamment en proposant un taux de cofinancement supérieur pour prendre en compte ces contraintes. Par ailleurs, le Comité élabore actuellement un avis d'initiative (14) qui traite plus particulièrement des modalités permettant une meilleure intégration des zones à handicap naturel dans l'économie régionale.

    5.6

    Enfin, le Comité souligne que la politique de développement rural et la politique régionale ne sont pas les seuls moyens d'action des pouvoirs publics en faveur d'un développement harmonieux des territoires de l'Union européenne. Le Comité rappelle qu'un ancrage territorial adéquat des services publics à la population participe également à l'objectif de cohésion territoriale.

    B.   APPROFONDIR LES PROPOSITIONS D'AMÉLIORATION DES MESURES

    6.   Les mesures décidées dans le cadre du compromis de Luxembourg du 26 juin 2003

    6.1

    La réforme de la PAC intervenue en juin 2003 a mis en exergue un lien renforcé entre le second pilier de la PAC, dédié au développement rural, et l'adaptation du 1er pilier. Ainsi, un ensemble de nouvelles mesures d'accompagnement du 1er pilier de la PAC a été introduit faisant passer de 22 à 26 le nombre de celles-ci.

    6.1.1

    Deux nouvelles mesures ont été introduites en faveur de la qualité des aliments (participation volontaire à un programme national de signes de qualité reconnus et actions de promotion et d'information de ces produits auprès des consommateurs). Les deux autres nouvelles mesures s'attachent à l'adaptation des techniques de production aux standards européens concernant l'environnement, le bien être animal, la santé des plantes et des animaux.

    6.1.2

    Plusieurs mesures existantes ont été adaptées ( prise en compte des questions de bien-être animal dans le cadre des mesures agri-environnementales, renforcement du soutien public à l'installation des jeunes agriculteurs, mise en œuvre de la Directive «Habitat et oiseaux» et financement d'investissements forestiers dans le cadre des forêts gérées selon des critères environnementaux et sociaux).

    6.2

    Concernant les nouveaux États membres, un programme de développement rural temporaire a été adopté pour la période 2004-2006. Celui-ci financera, en plus des quatre nouvelles mesures d'accompagnement: l'aide au groupement des agriculteurs, un soutien aux exploitations de semi-subsistance, l'assistance technique et un complément aux aides directes du 1er pilier de la PAC.

    7.   De nouvelles pistes pour les 3 axes retenus à Salzbourg

    7.1

    L'aboutissement du marché unique et l'ouverture progressive du marché intérieur à des économies agricoles bénéficiant d'avantages comparatifs naturels ou de moindres normes environnementales font que le modèle agricole européen reste sous la contrainte d'une nécessaire amélioration de sa compétitivité.

    7.2

    Le Comité soutient donc que l'axe «aide aux investissements dans les exploitations agricoles», dans le cadre de la politique de développement rural, devrait toujours être renforcé. Les investissements qui permettent aux exploitations agricoles de prendre en compte tant les exigences environnementales que l'amélioration du bien-être animal et les conditions de travail devraient être soutenus, d'autant plus s'ils contribuent à conforter l'activité agricole dans un territoire.

    7.3

    Le Comité souligne que la mise en oeuvre de la mesure «Conseil agricole» permettant un soutien pour l'adaptation aux nouveaux standards de production devra être anticipée. En effet, elle ne pourra être mise en œuvre de manière effective au sein des États membres qu'à partir de 2006. Or, la conditionnalité s'appliquera dès 2005.

    7.4

    L'affaiblissement des outils de régulation des marchés des produits agricoles, les évolutions climatiques et les mesures liées aux crises sanitaires font ressortir, depuis quelques années, l'importance de la maîtrise du chiffre d'affaires des exploitations. Dans le cadre de la réforme de la PAC intervenue en 2003, la Commission a prévu d'étudier dans un rapport la possibilité qu'un pourcentage de la modulation puisse être utilisé au niveau national pour des mesures spécifiques destinées à faire face aux risques, aux crises et aux catastrophes naturelles. Le Comité rappelle que la Commission doit communiquer ce rapport avant la fin 2004 et devrait aborder également les pistes, tant nationales que communautaires, de développement des systèmes d'assurance agricole. Il demande, le cas échéant, que la contribution du second pilier de la PAC soit analysée comme un instrument d'accompagnement.

    7.5

    La future politique de développement rural devrait confirmer comme second axe la protection de l'environnement et la gestion de l'espace, avec comme outil principal les mesures agri-environnementales et la compensation de handicaps naturels, sur la base de critères communs en vue d'assurer le maintien de l'équilibre territorial.

    7.6

    La réforme de la PAC a introduit le principe de la conditionnalité des soutiens directs à l'agriculture au respect de la législation communautaire (19 directives et règlements) portant sur l'environnement, la santé publique, celle des animaux et des végétaux et le bien-être animal. Le Comité souligne que ce nouvel aspect du 1er pilier de la PAC ne doit pas être confondu avec les mesures agri-environnementales (MAE). Ces dernières ne répondent pas à une logique réglementaire mais soutiennent des actions volontaires et participatives des agriculteurs dans l'objectif de mettre en œuvre des méthodes de production agricole conçues pour protéger l'environnement et préserver l'espace naturel.

    7.7

    Le Comité souligne que les dispositions administratives de mise en œuvre des MAE devraient être simplifiées. Ainsi la définition des objectifs de ces mesures devrait relever de la subsidiarité. Il s'interroge également sur la nécessité d'élargir encore le champ de ces mesures à d'autres problématiques environnementales compte tenu de la stabilité budgétaire. Toutefois, un accent particulier devrait être donné aux MAE qui privilégient la diversité des systèmes de production agricole dans le but de préserver l'équilibre des agro-systèmes.

    7.7.1

    Étant donné la déclaration du Sommet européen de Göteborg, les mesures agri-environnementales devraient être rendues obligatoires dans chacun des programmes nationaux.

    7.7.2

    Le Comité souligne que le financement de Natura 2000 ne devrait pas se faire au détriment de mesures existantes. C'est pourquoi, il souhaite que la Commission identifie de nouveaux financements pour la compensation des coûts engendrés par l'application de la Directive «Habitat et Oiseaux».

    7.8

    Le troisième axe de la future politique de développement rural devrait être centré sur la diversification de l'économie rurale en lien avec l'activité agricole afin de contribuer au maintien de la population en espace rural.

    7.9

    La Commission souligne dans son 3ème rapport de cohésion que trois types d'actions, à savoir le tourisme, l'artisanat et le patrimoine rural, devraient relever du champ commun de la politique régionale et de la politique de développement rural. Le Comité tient à ce que cet équilibre soit conservé. Il semble que les infrastructures rurales ne devraient plus être financées par les fonds structurels. Le Comité s'oppose donc à ce qu'un transfert de prise en charge de ce type d'investissements s'opère de la politique régionale vers la politique de développement rural.

    7.10

    De plus, le Comité propose, qu'au vu de l'évolution de la politique régionale, les actions de rénovation ou de valorisation du patrimoine rural ne s'inscrivant pas dans un projet «agritouristique» ne relèvent plus de la politique de développement rural.

    7.11

    Enfin, le Comité propose que l'axe «économie rurale» prenne en charge un certain nombre de services permettant une amélioration de la qualité de vie en faveur de la population agricole (services de remplacement des agriculteurs par exemple).

    C.   AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE GESTION DE LA POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT RURAL

    8.

    Le premier point sur lequel l'amélioration des conditions de gestion doit être poursuivie est la continuité de la programmation des plans de développement rural. Le Comité appuie donc la Commission dans son effort d'élaboration de la nouvelle politique de développement rural afin de limiter au maximum les «temps de latence» entre deux périodes de programmation.

    8.1

    Les difficultés intervenues dans certains États membres concernant la mise en œuvre administrative de la politique de développement rural montrent que l'intervention de plusieurs instruments financiers aux règles différentes peut aller à l'encontre d'une meilleure lisibilité de l'action publique. Ainsi l'avancée que représentait le regroupement des actions en faveur du développement rural au sein d'un même règlement a pu être perçue par les bénéficiaires comme une source de complexité administrative supplémentaire.

    8.2

    La simplification de la programmation revient à ce qu'il n'y ait plus qu'un seul fonds qui gère les actions relevant de la politique de développement rural. Toutefois, le Comité souligne que les modalités de gestion de ce fonds unique doivent être en cohérence avec celle appliquées pour les fonds structurels.

    8.3

    La structuration de la future politique de développement rural en trois axes (compétitivité de l'agriculture, gestion de l'espace et diversification de l'économie rurale) devrait également se retrouver dans l'élaboration du prochain règlement sur le développement rural. Celui-ci pourrait préciser les principes d'intervention, les objectifs des trois axes et lister les types d'action possibles (aide à l'investissement, prêt bonifié, soutien public pluriannuel en garantie de certaines spécifications, assistance technique, ingénierie financière ….). Les modalités de mise en œuvre de chacune des mesures retenues devraient relever de la subsidiarité nationale. Le Comité souligne que la gestion d'une seule décision par État membre à travers un document stratégique aurait l'avantage d'établir un cadre communautaire fixe pour la période de programmation.

    8.4

    La procédure actuelle d'adoption des modifications des mesures en comité STAR (Comité de Gestion des Structures Agricoles et du Développement Rural) manque de souplesse car la procédure d'évaluation ex-ante reste trop longue. Le Comité propose que la nouvelle procédure à mettre en place s'inspire de celle de la validation des aides d'État. C'est à dire que lorsque le plan de développement rural est adopté en début de programmation, les modifications d'intervention des mesures pourraient être transmises pour examen de légalité à la Commission (évaluation ex-post).

    8.5

    La validation des programmes opérationnels devrait relever de la subsidiarité nationale ou infranationale selon l'organisation des États membres. La Commission aurait donc en charge la responsabilité de veiller à éviter toute distorsion de concurrence de par les actions mises en oeuvre, de vérifier la légalité des modalités d'intervention et de s'assurer de la cohérence avec les fonds structurels. Le Comité souligne également que la Commission, de par son expérience acquise, pourrait accompagner les actions de transfert d'expériences dans le cadre de l'assistance technique, notamment pour les nouveaux États membres.

    8.6

    Le Comité souhaite que le nombre des étapes pour la validation des programmes soit diminué en délimitant la responsabilité de chacun des niveaux de décision: Commission, États membres et collectivités territoriales.

    8.7

    Le choix d'un fonds unique pour les actions relevant de la politique de développement rural tend à simplifier également la gestion financière. Dans la logique des fonds structurels, ce nouveau fonds devrait reprendre leurs principales caractéristiques à savoir:

    être basé sur un calendrier prévisionnel et annuel,

    effectuer une programmation pluriannuelle,

    bénéficier de modalités de paiement plus souples que celles du FEOGA-Garantie (crédits d'engagement – crédits de paiement).

    8.8

    La question des contrôles relève également de la simplification de gestion administrative de la politique de développement rural. Le Comité appuie les orientations de la Commission présentées dans le cadre du 3ème rapport sur la Cohésion, notamment celle concernant la proportionnalité des tâches de contrôle. En dessous d'un certain seuil, l'État membre pourrait choisir d'appliquer son système national de contrôle pour les programmes concernés. Le Comité souligne que ces orientations devraient s'appliquer pour la gestion de la politique de développement rural dans la mesure où elles assurent la même efficacité des contrôles et donc la bonne utilisation des fonds communautaires.

    8.9

    La réserve de performance instituée pour les fonds structurels dans le cadre de l'Agenda 2000 est plus vécue comme une mesure de frustration suite aux aléas de mise en œuvre administrative des programmes. De plus, son attribution en fonction du seul critère reposant sur la consommation des crédits pourrait avoir des incidences négatives en incitant à une programmation rapide puis à un strict suivi de l'exécution de ces opérations, ce qui n'est pas en cohérence avec une animation d'un programme pluriannuel de développement rural. C'est pourquoi, le Comité souligne que le principe de la réserve de performance ne devrait pas être appliqué à la future politique de développement rural.

    8.10

    La question du partenariat répond également à une logique de simplification dans la mise en œuvre des programmes. A l'image de ce qui se passe dans le cadre de la politique régionale, le Comité souhaite que chaque État membre s'efforce d'organiser les coopérations entre les différents niveaux d'administration mais aussi avec les partenaires sociaux et les représentants de la société civile organisée, de la phase de conception à la phase de mise en œuvre et de suivi des programmes.

    8.11

    Depuis le lancement de l'initiative Leader en 1989, la place centrale de la recherche de nouvelles pistes de développement en zone rurale a participé au succès de cette initiative de la Commission. De plus, l'actuelle phase de programmation a mis en évidence l'effet démultiplicateur des échanges d'expériences en facilitant les partenariats entre groupements d'actions locales de pays différents. Le Comité souligne que l'initiative Leader devrait continuer à accompagner les initiatives locales explorant de nouvelles pistes de développement pour les zones rurales, notamment à travers une ligne identifiée dans la politique de développement rural: comment anticiper les besoins de formation continue sur un territoire, la recherche de nouveaux débouchés pour les produits agricoles, le développement de synergies entre acteurs économiques au sein d'un même territoire sont autant de sujets qui peuvent apporter un éclairage nouveau pour l'avenir de la politique de développement rural. Le Comité soutient donc la poursuite de l'initiative Leader dans le cadre de la politique de développement en vue de la recherche de solutions innovantes pour le développement de zones rurales.

    Bruxelles, le 30 juin 2004.

    Le Président

    du Comité économique et social européen

    Roger BRIESCH


    (1)  Conférence Européenne sur le Développement Rural, Cork (Irlande), du 7 au 9 novembre 1996. sur:

    http://www.europa.eu.int/comm/agriculture/rur/cork_fr.htm.

    (2)  COM(2004) 101.

    (3)  COM(2004) 107.

    (4)  Conseil Européen de Göteborg, 15-16 juin 2001, sur:

    http://europa.eu.int/comm/gothenburg_council/sustainable_fr.htm.

    (5)  Conclusions de La Présidence, Conseil Européen de Göteborg, 15 et 16 juin 2001, point 31. Document Nr: 200/1/01.

    (6)  2516ème session du Conseil- AGRICULTURE ET PÊCHE - Luxembourg, les 11, 12, 17, 18, 19, 25 et 26 juin 2003; 10272/03 (Presse 164), page. 7, point 3.

    (7)  Potsdam, Mai 1999;

    http://europa.eu.int/comm/regional_policy/sources/docoffic/official/reports/som_fr.htm.

    (8)  Article 3: Les objectifs de l'Union: «3. L'Union […] promeut la cohésion économique, sociale et territoriale, et la solidarité entre les États membres.»

    http://europa.eu.int/futurum/constitution/part1/title1/index_fr.htm#Article3.

    (9)  Règlement (CE) no 1260/1999 du Conseil du 21 juin 1999 portant dispositions générales sur les Fonds structurels; JO no L 161 du 26/06/1999 p. 0001 – 0042.

    (10)  Règlement (CE) no 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999 concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) et modifiant et abrogeant certains règlements; JO no L 160 du 26/06/1999 p. 0080 – 0102.

    (11)  Fact Sheet «le développement rural dans l'Union européenne», - page 9, Office des publications de l'Union européenne 2003.

    (12)  «Une politique visant à consolider le modèle agricole européen», CES 953/99, J.O. no C 368 du 20.12.99, pp. 76-86.

    «Le futur de la PAC», CES 362/2002, J.O. no C 125 du 27.5.2002, pp. 87-99.

    (13)  «L'agriculture péri-urbaine», Projet d'avis CES 1324/2003 (adoption en session plénière de septembre 2004).

    (14)  «Comment garantir une meilleure intégration des régions souffrant de handicaps naturels et structurels permanents», Avant-projet d'avis R/CESE 631/2004 (adoption en session plénière de septembre 2004).


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