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Document 32014D0882

2014/882/UE: Décision de la Commission du 20 novembre 2013 concernant les aides d’État SA.16237 (C58/02) (ex N118/02) mises à exécution par la France en faveur de la SNCM [notifiée sous le numéro C(2013) 7066] Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE

JO L 357 du 12.12.2014, p. 1–50 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

Legal status of the document In force

ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/2014/882/oj

12.12.2014   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 357/1


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 20 novembre 2013

concernant les aides d’État SA.16237 (C58/02) (ex N118/02) mises à exécution par la France en faveur de la SNCM

[notifiée sous le numéro C(2013) 7066]

(Le texte en langue française est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2014/882/UE)

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 108 (1), paragraphe 2, premier alinéa,

vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1, point a),

après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles (2) et vu ces observations,

considérant ce qui suit:

I.   PROCÉDURE

(1)

Le 18 février 2002, la France a notifié à la Commission un projet d’aide à la restructuration en faveur de la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (ci-après «la SNCM»), complété le 3 juillet 2002 (3). Ce projet de restructuration faisait suite à la notification par les autorités françaises le 20 décembre 2001 d’une avance de trésorerie consentie par la Compagnie générale maritime et financière (ci-après «la CGMF») (4) à la SNCM pour un montant de 22,5 millions d'EUR au titre d’aide au sauvetage. Par décision du 17 juillet 2002 (5) (ci-après «la décision de 2002»), la Commission a autorisé l’aide au sauvetage en faveur de la SNCM dans le cadre de la procédure préliminaire d’examen des aides prévue par l’article 88, paragraphe 3, du traité CE. L’aide à la restructuration notifiée consistait à recapitaliser la SNCM par le biais de la CGMF pour un montant de 76 millions d'EUR.

(2)

Par lettre du 19 août 2002, la Commission a notifié aux autorités françaises la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen (6) en application de l’article 88, paragraphe 2, du traité CE et de l’article 6 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil (7).

(3)

Le 8 octobre 2002 (8), les autorités françaises ont communiqué à la Commission leurs observations sur la décision du 19 août 2002 (9).

(4)

À la demande des autorités françaises, des réunions de travail ont été organisées avec les services de la Commission le 24 octobre 2002, le 3 décembre 2002 et le 25 février 2003.

(5)

Dans le cadre de l’ouverture de procédure, la Commission a reçu des observations de la part de deux entreprises, à savoir Corsica Ferries France (ci-après «CFF») le 8 janvier 2003 (10) et STIM d’Orbigny groupe STEF-TFE (ci-après «STIM») le 7 janvier 2003, ainsi que de différentes collectivités territoriales françaises le 18 décembre 2002 et les 9 et 10 janvier 2003. Elle a transmis ces observations à la France pour commentaires par lettres des 13 et 16 janvier et des 5 et 21 février 2003.

(6)

Les autorités françaises ont communiqué à la Commission leurs commentaires sur les observations de CFF et de la STIM les 13 février (11) et 27 mai 2003 (12).

(7)

Le 16 janvier 2003, les services de la Commission ont envoyé une demande de renseignements complémentaires à laquelle les autorités françaises ont répondu le 21 février 2003.

(8)

Par lettre du 10 février 2003 (13), les autorités françaises ont développé des arguments visant à démontrer que le projet d’aide respectait en tout point les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (14) (ci-après dénommées «les lignes directrices de 1999»).

(9)

Le 25 février 2003 (15), les autorités françaises ont transmis copie du pacte d’actionnaires liant la SNCM et la STIM, à la demande de la Commission.

(10)

Par la décision 2004/166/CE (16) (ci-après «la décision de 2003»), la Commission a approuvé, sous certaines conditions, l’octroi de l’aide à la restructuration en faveur de la SNCM payable en deux tranches, l’une de 66 millions d'EUR, l’autre d’un montant maximal de 10 millions d'EUR qui sera à déterminer en fonction des produits nets issus des cessions d’actifs réalisées après l’adoption de la décision de 2003. Le versement de la première tranche a été autorisé par la décision de 2003.

(11)

Le 13 octobre 2003, CFF a introduit un recours en annulation de la décision de 2003 devant le Tribunal de première instance des Communautés européennes (ci-après «le Tribunal») (affaire T-349/03).

(12)

Par la décision 2005/36/CE (17) (ci-après «la décision de 2004»), la Commission a décidé de considérer que les modifications demandées par la France le 23 juin 2004, à savoir la permutation du navire Aliso par le navire Asco sur la liste des navires que la SNCM était autorisée à utiliser à la suite de la décision de 2003 et la vente du navire Aliso à la place du navire Asco, n’étaient pas de nature à remettre en cause la compatibilité avec le marché commun de l’aide à la restructuration autorisée par la décision de 2003.

(13)

Par la décision du 16 mars 2005 (ci-après «la décision de 2005») (18), la Commission a approuvé le versement d’une seconde tranche de l’aide à la restructuration, d’un montant de 3,3 millions d'EUR, ce qui a porté le montant total de l’aide à la restructuration autorisée à 69,3 millions d'EUR.

(14)

Le 15 juin 2005, dans l’affaire T-349/03 (19), le Tribunal a annulé la décision de 2003 en raison d’une appréciation erronée du caractère minimal de l’aide.

(15)

Le 25 octobre 2005 (20), les autorités françaises ont transmis à la Commission des informations relatives à la situation financière de la compagnie depuis la notification du projet d’aide à la restructuration du 18 février 2002.

(16)

Le 17 novembre 2005 (21), les autorités françaises ont fourni des éléments relatifs à l’actualisation du projet de restructuration de 2002 et à la reconstitution des capitaux propres de la SNCM (22).

(17)

Le 15 mars 2006, une note de synthèse sur le marché, le business plan (partie revenus) et le compte de résultats prévisionnels ont été transmis à la Commission par les autorités françaises (23). D’autres documents ont été remis aux services de la Commission le 28 mars 2006 et le 7 avril 2006 (24). Dans ce dernier courrier, les autorités françaises ont par ailleurs invité la Commission à considérer que, en raison de sa nature alléguée de «compensation de service public», une partie de l’aide à la restructuration de 2002, notamment le montant de 53,48 millions d'EUR, ne soit pas qualifiée de mesure prise dans le cadre d’un plan de restructuration mais de non-aide au titre de la jurisprudence Altmark  (25) ou comme mesure autonome et indépendante du plan de restructuration au titre de l’article 86, paragraphe 2, du traité CE.

(18)

Le 21 avril 2006, un projet de concentration, par lequel les entreprises Veolia Transport (ci-après «VT») (26) et Butler Capital Partners (ci-après «BCP») ont acquis le contrôle en commun de la SNCM (27), a été notifié à la Commission au titre de l’article 4 du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil (28). La Commission a décidé de ne pas s’opposer à l’opération notifiée et l’a déclarée compatible avec le marché commun par décision du 29 mai 2006 (29).

(19)

Le 21 juin 2006 (30), les autorités françaises ont transmis à la Commission l’arrêté du 26 mai 2006 du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie portant approbation d’opérations financières décidées par la Société nationale des chemins de fer français (ci-après «SNCF») et le décret no 2006-606 du 26 mai 2006 portant transfert de la SNCM au secteur privé.

(20)

Des renseignements concernant la délégation de service public et les aides à caractère social relatifs à la desserte de la Corse ont été transmis à la Commission le 7 juin 2006 (31).

(21)

Par lettre du 13 septembre 2006, la Commission a notifié aux autorités françaises la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, du traité CE et à l’article 6 du règlement (CE) no 659/1999 concernant les nouvelles mesures mises en œuvre en faveur de la SNCM et le plan de restructuration notifié en 2002 (32) (ci-après «la décision de 2006»).

(22)

Le 16 novembre 2006, la France a fait parvenir à la Commission ses observations à la suite de la décision de 2006 (33).

(23)

Ayant été saisie par certaines parties intéressées d’une demande de proroger d’un mois le délai pour présenter leurs observations (34), la Commission a décidé d’accorder ce délai supplémentaire à toute partie intéressée (35).

(24)

La Commission a reçu de la part de CFF (36) et de la STIM (37) des observations qui ont été transmises aux autorités françaises par courrier du 20 février 2007. Un tiers intéressé a également fait parvenir des commentaires, également transmis aux autorités françaises, qu’il a retirés le 28 mai 2008.

(25)

Les autorités françaises ont communiqué leurs observations sur les commentaires des tiers intéressés le 30 avril 2007 (38).

(26)

Le 20 décembre 2007, CFF a déposé une plainte auprès de la Commission à l’encontre de la SNCM qui complète les envois d’informations du 15 juin 2007 et du 30 novembre 2007. Cette plainte porte sur l’article 3 de la nouvelle convention de délégation de service public signée en juin 2007 entre la Collectivité territoriale de Corse et le groupement Compagnie méridionale de navigation-SNCM pour 2007-2013. D’après CFF, la mise en œuvre de cette clause mobiliserait de nouvelles ressources financières pour la SNCM de l’ordre de 10 millions d'EUR pour l’année 2007. En outre, la compensation versée à la SNCM au titre des obligations de service public serait une aide d’État, illégale de surcroît puisque non notifiée à la Commission.

(27)

La Commission a informé les parties intéressées de sa décision d’étendre le délai de présentation des observations des tiers au 14 mars 2008.

(28)

La Commission a transmis le 26 mars 2008 les observations des tiers intéressés à la France qui a communiqué ses commentaires le 28 mars 2008, le 10 avril 2008 et le 28 avril 2008.

(29)

Par décision du 8 juillet 2008, la Commission a considéré que les nouvelles mesures de 2006 ne constituaient pas des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE, et que les mesures notifiées en 2002 étaient des aides compatibles avec le marché commun.

(30)

Cette décision a été annulée partiellement par le Tribunal le 11 septembre 2012 (39). Le Tribunal a estimé que les conclusions de la Commission sur les mesures mises en œuvre en 2006 étaient entachées d’erreurs manifestes d’appréciation. S’agissant des mesures de restructuration de 2002, il a considéré que leur analyse devait être revue puisque la décision annulée se fondait sur le fait que les mesures de 2006 étaient exemptes d’aides.

(31)

Seule échappe à l’annulation la déclaration de compatibilité de l’aide de 53,4 millions d'EUR d’apport au titre de la compensation des obligations de service public de la SNCM pour la période 1991-2001. Par conséquent, ce point ne sera pas abordé dans la présente décision.

(32)

La Commission doit par conséquent adopter une nouvelle décision finale. Il n’y a pas lieu de rechercher des éléments postérieurs à la date d’adoption de la décision annulée. En effet, consécutivement à l’annulation, la Commission est amenée d’une part, à apprécier si certaines des mesures en cause correspondent au comportement d’un investisseur privé en économie de marché, et d’autre part, pour autant que les mesures examinées constituent des aides d’État, si les conditions de compatibilité posées par les lignes directrices pertinentes sont remplies. Pour chacun de ces deux examens, conformément à la jurisprudence du Tribunal (40), la Commission ne peut prendre en compte que les informations dont elle disposait à la date de l’adoption de la décision annulée, soit le 8 juillet 2008 (41).

(33)

Une réunion a eu lieu le 13 novembre 2012 en présence de la Commission, des autorités françaises et des représentants de la SNCM.

(34)

Par lettres du 6 décembre 2012 et du 5 février 2013, les autorités françaises ont demandé à deux reprises une décision de réouverture de la procédure pour les raisons suivantes: en précisant les critères du test de l’investisseur avisé en économie de marché, le Tribunal aurait rendu un arrêt novateur en jurisprudence qui rendrait nécessaire une réouverture de la procédure contradictoire. Par courriers des 15 janvier et 13 février 2013, la Commission a rejeté ces demandes, en soulignant que la procédure pouvait être reprise au point précis où l’illégalité était intervenue et en rappelant que la décision d’ouverture de 2006 n’était, pour sa part, entachée d’aucune illégalité. Toutefois, elle a également informé les autorités françaises qu’il leur était loisible de lui faire parvenir tout élément d’information complémentaire de réflexion, d’analyse ou tout document qui leur apparaîtrait approprié.

(35)

Les autorités françaises ont adressé à la Commission une note d’information le 16 mai 2013.

(36)

Par lettre du 19 juin 2013, la SNCM a également demandé une décision de réouverture de la procédure formelle d’examen pour des raisons similaires à celles des autorités françaises. La Commission a rejeté cette demande par lettre du 10 juillet 2013. Toutefois, elle a également informé la SNCM qu’il lui était loisible de lui faire parvenir tout élément d’information complémentaire de réflexion, d’analyse ou tout document qui leur apparaîtrait approprié.

(37)

Le 27 août 2013, la SNCM a envoyé une note d’information et un nouveau rapport relatif à la cession de la SNCM.

II.   DESCRIPTION

2.1.   LE BÉNÉFICIAIRE DES MESURES COUVERTES PAR LA PRÉSENTE DÉCISION

(38)

Le bénéficiaire des mesures couvertes par la présente décision est la SNCM qui regroupe plusieurs filiales dans le secteur maritime et qui effectue du transport maritime de passagers, voitures et poids lourds sur les liaisons entre la France continentale et la Corse, l’Italie (Sardaigne) et le Maghreb (Algérie et Tunisie).

(39)

La SNCM est une société anonyme née en 1969 de la fusion de la Compagnie générale transatlantique et de la Compagnie de navigation mixte, toutes deux créées en 1850. Appelée à l’époque Compagnie générale transméditerranéenne, elle a été rebaptisée Société nationale maritime Corse-Méditerranée en 1976, après que la Société nationale des chemins de fer (SNCF) eut pris une participation à son capital. La compagnie avait été en effet choisie par le gouvernement français pour mettre en œuvre le principe de continuité territoriale avec la Corse, à savoir l’alignement des tarifs de transports maritimes sur les tarifs de la SNCF pour le transport ferroviaire, sur la base d’une convention conclue le 31 mars 1976 pour vingt-cinq ans. La Compagnie générale transatlantique avait déjà été chargée par le gouvernement français de la desserte de la Corse par une convention antérieure conclue le 23 décembre 1948.

(40)

Au moment de la notification de la recapitalisation en 2002, la SNCM était détenue à 20 % par la SNCF et à 80 % par la CGMF. À l’issue de l’ouverture du capital de la SNCM le 30 mai 2006 (voir considérant 18 de la présente décision), BCP et VT détiennent respectivement 38 % et 28 % du capital de la SNCM, la CGMF restant présente dans le capital à concurrence de 25 % (9 % du capital sont réservés aux salariés).

(41)

En 2008, les principales filiales de la SNCM sont la Compagnie méridionale de navigation (ci-après «CMN») (42), la Compagnie générale de tourisme et d’hôtellerie (CGTH) (43), Aliso Voyage (44), Sud-Cargos (45), la Société aubagnaise de restauration et d’approvisionnement (SARA) (46), Ferrytour (47) et Les Comptoirs du Sud (48).

(42)

À la suite de la cession des navires à grande vitesse Aliso en septembre 2004 et Asco  (49) en mai 2005, la flotte de la SNCM se compose de dix navires [cinq car-ferries (50), quatre navires mixtes (fret et passagers) (51) et un navire à grande vitesse (NGV) opérant principalement au départ de Nice (52)] dont sept en détention propre (53).

(43)

Dans un souci d’exhaustivité, il y a lieu de rappeler que les services de transport maritime réguliers entre les ports de la France continentale et de la Corse ont été assurés depuis 1948 dans le cadre d’un service public dont la SNCM et la CMN étaient les concessionnaires entre 1976 et 2001 en vertu d’une convention-cadre conclue initialement pour vingt-cinq ans. Conformément aux règles communautaires en vigueur (54) et à la suite de l’appel d’offres européen (55) organisé par la collectivité territoriale de Corse (56), la SNCM et la CMN ont remporté conjointement la délégation de service public (ci-après «la DSP») portant sur la desserte de la Corse au départ de Marseille en échange de compensations financières pendant la période 2002-2006.

(44)

La DSP venant à échéance fin 2006, le service public maritime sus-indiqué, ayant fait l’objet d’un nouvel appel d’offres au niveau européen (57), a été attribué au groupement SNCM-CMN à compter du 1er mai 2007 et jusqu’au 31 décembre 2013 pour une subvention d’environ 100 millions d'EUR par an.

(45)

En parallèle, des obligations de fréquence de dessertes sont imposées à tous les opérateurs desservant l’île au départ de Toulon et de Nice. Sur ces lignes, les résidents corses ainsi que d’autres catégories de passagers bénéficient depuis 2002 et jusqu’en 2013 d’aides sociales mises en place en vertu des décisions de la Commission du 2 juillet 2002 (58) et du 24 avril 2007 (59).

2.2.   CONTEXTE CONCURRENTIEL

(46)

La SNCM opère principalement dans deux domaines distincts, celui du trafic de passagers et celui du trafic de marchandises. Elle dessert d’une part, la Corse et le Maghreb, à partir de la France, et d’autre part, à titre accessoire, l’Italie et l’Espagne.

2.2.1.   La desserte de la Corse

2.2.1.1.   Le transport de passagers

(47)

La desserte de la Corse pour le transport de passagers est un marché caractérisé par sa forte saisonnalité. Il se caractérise en effet par des pics de fréquentation saisonnière qui peuvent atteindre dix fois ceux du mois le plus creux, ce qui exige des opérateurs une flotte dimensionnée pour absorber ces pointes. La moitié du chiffre d’affaires est réalisé en juillet et en août. Il existe en outre un déséquilibre selon le sens du trajet, même en période de pointe: en juillet, par exemple, le départ s’effectue à plein du continent alors que le retour est presqu’à vide. Ce faisant, les taux de remplissage annuel moyen des navires sont relativement bas.

(48)

La SNCM est l’opérateur historique reliant la Corse au continent français. Schématiquement, les deux tiers de son activité sont réalisés entre Marseille et la Corse dans le cadre d’une délégation de service public; le dernier tiers de son activité est constitué de liaisons ayant d’autre points d’origine ou de destination (Nice-Corse, Toulon-Corse, liaisons internationales vers la Sardaigne ou le Maghreb).

(49)

La SNCM a longtemps vécu en situation de monopole sur son activité principale. Depuis 1996, cependant, elle est confrontée à une concurrence qui s’est développée très rapidement. Ainsi, la société CFF est aujourd’hui l’acteur dominant des liaisons maritimes entre le continent et la Corse et sa part de marché ne cesse de progresser. Alors qu’elle n’est présente sur ce marché que depuis 1996, CFF a vu son trafic «passagers» augmenter de 44 % par an entre 2000 et 2005 et cette croissance se poursuit. Ainsi, en 2008, près de […] (60) % des passagers par mer entre le continent et la Corse prennent un bateau de CFF, tandis que seulement […] (60) % utilisent un navire de la SNCM, la CMN transportant le solde des passagers, soit […] (60) %.

(50)

La position acquise depuis 2000 par CFF sur le marché considéré se manifeste également au regard du nombre de passagers transportés par saison entre la Corse et la France continentale. Il ressort du graphique ci-dessous que la part de marché de CFF est passée de 45 % en 2000 à 70 % en 2007 et celle de la SNCM de 53 % à 26 % pendant la même période, avec un écart supérieur à un million de voyageurs transportés.

Graphique

Nombre de passagers transportés par saison (mai-septembre) entre la France continentale et la Corse – saisons 2000 à 2007

Image

Source:

Observatoire régional des transports de la Corse.

(51)

Les autres concurrents mineurs de la SNCM sur la desserte de la Corse sont la Compagnie méridionale de navigation (CMN), Moby Lines, Happy Lines et TRIS.

(52)

Depuis 2006, l’offre de la SNCM et ses parts de marché pour les liaisons avec la Corse se sont réduites, avec une baisse de 8 % de l’offre de places (– 20 % pour les dessertes à partir de Nice et – 3 % pour celles à partir de Marseille).

(53)

Toutefois, la poursuite de la baisse des parts de marché démontre que le retour de la confiance de la part des passagers, qui avait été très largement entamée par les grèves et les perturbations engendrées par les conflits sociaux de 2004 et 2005, notamment à l’occasion de la privatisation de l’entreprise, se fait très lentement.

(54)

Le marché du transport maritime de passagers entre le continent et la Corse a crû en moyenne de 4 % depuis 1993; sa croissance devrait se poursuivre, avec une augmentation de […] (60) % également prévue pour 2008 (à l’époque pertinente pour l’examen des faits) puis une croissance modérée sur les années suivantes. Pour autant, de nouveaux acteurs ne semblent pas chercher à se développer sur ce marché. À l’occasion de l’appel d’offres lancé par l’Office des transports de Corse pour attribuer, sur la période 2007-2013, la délégation de service public de desserte maritime de certains ports de la Corse, aucune autre candidature que celles de CFF et de SNCM-CMN ne s’est manifestée, alors même que des réponses partielles sur une ligne donnée étaient possibles.

(55)

S’agissant du principal concurrent de la SNCM, CFF a augmenté fortement son offre de places de 500 000 à 4,5 millions entre 1999 et 2007 (dont 30 % d’augmentation entre 2006 et 2007), ce qui lui a permis d’augmenter ses trafics (de 1,3 million en 2005 à 1,6 million en 2007) et sa part de marché. Cette politique se traduit néanmoins par des taux de remplissage structurellement moins élevés pour CFF que pour la SNCM, avec un écart de l’ordre de 10 points de pourcentage en 2007. Pour la SNCM, le taux de remplissage moyen sur l’année 2007 s’élevait à 48 %, ce qui est normal compte tenu de la forte saisonnalité du marché (voir supra).

2.2.1.2.   Le transport de fret

(56)

S’agissant du trafic de fret avec la Corse, la SNCM détenait en 2005 environ 45 % du marché Marseille-Toulon vers la Corse.

(57)

Pour le trafic de marchandises générales (non accompagnées), la SNCM et la CMN disposent d’un quasi-monopole de fait. Dans le cadre du contrat de délégation de service public, les deux compagnies assurent des dessertes fréquentes depuis Marseille vers l’ensemble des ports de la Corse.

(58)

Pour les remorques accompagnées, chargées sur des ferries, qui représentent globalement 24 % du trafic de marchandises générales mesuré en mètres linéaires, il existe une concurrence entre l’ensemble des opérateurs passagers. La SNCM et la CMN détiennent également la majorité de ce trafic accompagné. Les autres opérateurs, en particulier CFF, en détiennent 10 %, soit 2 % du marché global.

(59)

Pour les automoteurs accompagnés (61), chargés sur des ferries (environ 24 % du trafic de marchandises générales en 2003), la SNCM et la CMN détiennent également la majorité du marché en cause. Toutefois, à partir de 2002, CFF a développé une offre et détient environ 15 % du marché.

2.2.2.   La desserte du Maghreb

(60)

La Tunisie et l’Algérie présentent un marché important, d’environ 5 millions de passagers dominé par l’aérien. Dans ce contexte, le transport maritime représente environ 15 % des flux. Alors que l’Algérie représente un marché maritime significatif de l’ordre de 560 000 passagers, la Tunisie représente un marché moins important de l’ordre de 250 000 passagers.

(61)

Le marché du transport maritime de la France vers le Maghreb a connu une croissance soutenue de l’ordre de 13 % entre 2001 et 2005. Compte tenu des perspectives de croissance du tourisme vers cette région, il était prévu (à l’époque pertinente pour l’examen des faits) que le transport maritime connaisse un taux de croissance annuel de l’ordre de 4 % à l'horizon 2010.

(62)

En Algérie, la SNCM se positionne comme le deuxième acteur du marché après l’Entreprise nationale de transport maritime de voyageurs (ENTMV), entreprise publique algérienne. La part de marché de la SNCM est passée de 24 % en 2001 à 35 % en 2005.

(63)

La SNCM se positionne comme deuxième opérateur sur le marché vers la Tunisie derrière la Compagnie tunisienne de navigation (CTN). Bien que, depuis 2001, la SNCM ait perdu des parts de marché au profit de la CTN passant de 44 % à 39 % en 2004, une amélioration est toutefois à enregistrer en 2005 (40 %).

2.3.   DESCRIPTION DES MESURES COUVERTES PAR LA PRÉSENTE DÉCISION

2.3.1.   La recapitalisation de la SNCM de 2002

(64)

À la suite de la décision de la Commission du 17 juillet 2002 d’autoriser une aide au sauvetage à la SNCM (62), les autorités françaises ont notifié à la Commission le 18 février 2002 un projet d’aide à la restructuration en faveur de la SNCM. Cette mesure consistait à recapitaliser la SNCM, via sa société mère, la CGMF, pour un montant de 76 millions d'EUR, dont 46 millions d'EUR au titre de charges de restructuration (63). Cette augmentation de capital avait pour objectif de porter les capitaux propres de la SNCM de 30 millions d'EUR à 106 millions d'EUR.

(65)

Conformément aux lignes directrices de 1999, les autorités françaises ont soumis à la Commission un plan de restructuration (64) pour la SNCM portant sur cinq points:

i)

une baisse du nombre de traversées et le redéploiement de ses navires entre les différentes lignes (une baisse des dessertes vers la Corse et un renforcement sur la desserte du Maghreb). Le plan de restructuration prévoyait une baisse du nombre des traversées de 4 138 (3 835 pour la SNCM et 303 pour sa filiale Corsica Marittima) à 3 410 en 2003 avec les modifications suivantes des dessertes:

la modification des dessertes entre Marseille et la Corse conformément au cahier des charges du contrat de service public 2001-2006,

la quasi-suppression des liaisons entre Toulon et la Corse,

la réduction des dessertes entre Nice et la Corse,

la fermeture de la ligne Livourne-Bastia avec du matériel dédié, effectivement fermée en 2003,

le renforcement de la desserte de l’Algérie et de la Tunisie avec les navires le Méditerranée, l’Île de Beauté et le Corse et la suspension de la desserte Gênes-Tunis.

ii)

une réduction de quatre navires de sa flotte qui devait apporter 21 millions d'EUR de liquidités;

iii)

la cession de certains actifs immobiliers;

iv)

une baisse des effectifs (65) d’environ 12 % qui, combinée à une politique salariale raisonnable, devaient permettre de réduire les charges d’équipage de 61,8 millions d'EUR en 2001 à 54,8 millions d'EUR en moyenne de 2003 à 2006 et les charges à terre de 50,3 millions d'EUR en 2001 à 45,8 millions d'EUR sur la même période;

v)

la suppression de deux de ses filiales, la Compagnie maritime toulonnaise et la société Corsica Marittima, dont les activités résiduelles seraient reprises par la SNCM.

(66)

À la suite des observations formulées par la Commission dans sa décision du 19 août 2002, les autorités françaises ont décrit, dans leur lettre du 31 janvier 2003, les améliorations apportées au plan de restructuration sur les points suivants:

des engagements et des précisions sur la politique salariale,

un plan de réduction des coûts dans les achats intermédiaires,

un engagement que la SNCM ne serait pas à l’origine d’une guerre tarifaire avec ses concurrents sur la Corse.

(67)

Sur ce dernier point, les autorités françaises précisent que «la SNCM prend cet engagement sans réserves, car elle considère qu’une guerre tarifaire de son fait ne serait conforme ni à son positionnement stratégique, ni à son intérêt, car elle conduirait à une baisse de ses recettes, ni à ses pratiques habituelles et à son savoir-faire».

(68)

Dans leur plan de restructuration, les autorités françaises ont présenté à la Commission une maquette financière détaillée pour la période 2002-2007 sur la base d’hypothèses médianes concernant une série de variables (66). Les projections financières indiquent, entre autres, un retour à des résultats courants positifs dès 2003.

Tableau 1

Maquette financière pour la période 2002-2007

en millions d’EUR

2000 Réalisé

2001 Réalisé

2002 Plan

2002 Réalisé

2003 Plan

2004 Plan

2005 Plan

2006 Plan

2007 Plan

Chiffre d’affaires

204,9

204,1

178

205,8

190,4

192,9

195,2

197,1

193,9

Subventions d’exploitation

85,4

86,7

74,5

77,7

69,9

68,8

68,4

67

68,5

Résultat courant

–14,7

–5,1

1,2

–5,8

6,8

10,6

10,7

8,1

9

Résultat net

–6,2

–40,4

23

4,2

12

14

1

3

3

Fonds propres

67,5

29,7

119

33,8

124

134

145

160

169

Dettes financières nettes (hors crédit-bail)

135,8

134,5

67,7

144,8

55,2

38,2

57,1

115,7

228,1

Ratios financiers

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Résultat courant/CA + subventions

–5 %

–2 %

0 %

–2 %

3 %

4 %

4 %

3 %

3 %

Fonds propres/endettement au bilan

50 %

22 %

176 %

23 %

225 %

351 %

254 %

138 %

74 %

Chiffres 2000, 2001et 2002 extraits des rapports annuels 2001 et 2002 de la SNCM.

(69)

L’apport en capital de 76 millions d'EUR ainsi que le retour à la rentabilité de l’exploitation envisagé dès 2003, devaient permettre, selon les autorités françaises, de faire passer les capitaux propres de leur niveau d’environ 30 millions d'EUR à la fin de l’année 2001 à 120 millions d'EUR à court terme (2003), puis à 160-170 millions d'EUR à la fin du plan (2006-2007). Ceci devait permettre une réduction de l’endettement financier de 145 millions d'EUR en 2002 à des niveaux de 40 à 55 millions d'EUR de 2003 à 2005. Dans les dernières années du plan, une hausse de l’endettement était envisagée par la compagnie pour le renouvellement, en pleine propriété, d’un ou deux navires.

(70)

Les autorités françaises ont également fourni une étude de sensibilité des résultats escomptés par rapport aux hypothèses de travail relatives au trafic sur les différentes lignes. Sur cette base, les différentes simulations démontraient que la SNCM aurait dû retrouver la voie de la rentabilité dans les cas de figure envisagés.

(71)

Dans un premier temps, les autorités françaises ont évoqué deux méthodes alternatives qu’elles ont écartées car trop coûteuses.

i)

La première méthode d’évaluation consistait à additionner les coûts de l’ensemble des mesures de restructuration. Elle permettait d’aboutir à un besoin de financement de 90,9 millions d'EUR, en retenant:

les pertes cumulées de 1991 à 2001, soit 41,7 millions d'EUR [soit 29 millions d'EUR – chiffre validé par la décision 2002/149/CE du 30 octobre 2001 (JO L 50 du 21.2.2002, p. 66), 6,1 millions d'EUR au titre de 2000 et 6,6 millions d'EUR, avant frais de restructuration, au titre de 2001),

la baisse de la ressource constituée par les amortissements dérogatoires entre ces mêmes dates, soit 24 millions d'EUR (le poste baisse de 86 à 62 millions d'EUR au bilan sur la période, ce qui traduit l’allongement de douze à vingt ans de la période d’amortissement, le moindre recours à cette ressource et le recours au «leasing» pour les dernières unités livrées),

la plus-value de cession engendrée lors de cette restructuration, soit 21 millions d'EUR, venant en réduction des besoins de financement, et

l’effet cumulé des charges de restructuration qui s’élève à 46,2 millions d'EUR (voir note 58 de bas de page).

ii)

La seconde méthode d’évaluation consistait à déterminer quel serait le montant des capitaux propres requis par des établissements bancaires pour l’ensemble de la flotte, sachant que ces derniers réclament en général pour financer l’achat d’un navire des fonds propres correspondant à 20 à 25 % de la valeur du navire. Le calcul effectué par les autorités françaises, sur la base d’un coût d’acquisition historique de la flotte de 843 millions d'EUR, amenait à des besoins en fonds propres de 157 à 196 millions d'EUR. Déduction faite des capitaux propres existant à la fin de 2001, cette approche aboutissait à un besoin de recapitalisation de 101 à 140 millions d'EUR.

(72)

La méthode finalement retenue par les autorités françaises pour déterminer le montant de la recapitalisation consiste à calculer le besoin de financement sur la base du ratio moyen des fonds propres sur les dettes financières constaté en 2000 auprès de cinq compagnies maritimes européennes. En dépit des disparités des bilans de ces entreprises, la moyenne retenue par les autorités françaises s’établit à 79 %. Les autorités françaises soutiennent que les projections financières sur la période de 2002 à 2007 aboutissent à un ratio moyen de capitaux propres sur dettes financières de 77 % avec des capitaux propres qui atteindraient 169 millions d'EUR en 2007. Un tel niveau de fonds propres devait être obtenu moyennant une recapitalisation de 76 millions d'EUR ainsi que la réussite des actions prévues au plan de restructuration.

2.3.2.   Mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

2.3.2.1.   Remarque préliminaire

(73)

La recapitalisation et le plan de restructuration de 2002 n’ont pas apporté les résultats escomptés et, à partir de 2004, la situation économique et financière de la SNCM s’est fortement dégradée. À cette dégradation ont contribué tant des facteurs internes (conflits sociaux, réalisation insuffisante et tardive des objectifs de productivité, perte de parts de marché) que des facteurs exogènes à la SNCM [moindre attractivité de la destination de la Corse, acquisition de parts de marché par CFF, fautes de gestion de la part de l’État (67)] ainsi que la hausse du coût des carburants.

(74)

Ainsi, le résultat courant de la SNCM s’est établi à – 32,6 millions d'EUR en 2004 et – 25,8 millions d'EUR en 2005. Le résultat net, quant à lui, était de – 29,7 millions d'EUR en 2004 et de – 28,8 millions d'EUR en 2005.

(75)

La dégradation de la situation économique et financière de la SNCM a conduit les autorités françaises à céder des actifs au-delà de ce qui était prévu par le plan de restructuration de 2002 et requis par la décision de 2003 ainsi qu’à lancer une procédure de recherche de partenaires privés.

Tableau 2

Liste des actifs cédés par la SNCM depuis 2002

 

Produit net de cessions

Date

Cessions proposées dans la notification de 2002 (en milliers d'EUR)

25 165

 

Aliso

(en remplacement de l’Asco, conformément à la décision du 8.9.2004 de la Commission)

(315)

30.9.2004

Napoléon

6 396

6.5.2002

Monte Rotondo

591

31.7.2002

Liberté

10 088

27.1.2003

Ensemble immobilier Schuman

8 405

20.1.2003

 

 

 

Cessions supplémentaires imposées par la Commission dans sa décision du 9.7.2003 (en milliers d'EUR)

5 022

 

SCI Espace Schuman

765,7

24.6.2003

Southern Trader

2 153

22.7.2003

Someca

1 423,9

30.4.2004

Amadeus

680

12.10.2004

CCM

 (68)

 

 

 

Cessions supplémentaires intervenues depuis la décision de juillet 2003 (en milliers d'EUR)

12 600

 

Asco

7 100

24.5.2005

Sud-Cargos

4 300

15.9.2005

Ventes d’appartements du parc immobilier de la SNCM

(autrefois occupés par du personnel SNCM)

1 200

9.2003 à 2006

TOTAL (en milliers d'EUR)

42 385

 

2.3.2.2.   Les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(76)

Le processus de sélection des partenaires privés s’est déroulé du 26 janvier 2005 à fin septembre 2005.

(77)

Les 26 janvier et 17 février 2005, le gouvernement français a annoncé qu’il allait engager la recherche d’un partenaire privé pour entrer au capital de la SNCM, en vue de renforcer sa structure financière et de l’accompagner dans les évolutions nécessaires à son développement.

(78)

Après avoir nommé une personnalité indépendante pour superviser le processus de recherche, l’Agence des participations de l’État («APE») a donné mandat à une banque conseil («HSBC») pour contacter des repreneurs potentiels.

(79)

Dans ce cadre, soixante-douze investisseurs industriels et financiers ont été contactés, avec l’objectif de définir les conditions financières d’une offre visant à conforter le projet industriel de la compagnie et à préserver l’emploi et la bonne exécution du service public. Vingt-trois d’entre eux ont exprimé des marques d’intérêt, quinze accords de confidentialité ont été signés et quinze mémorandums d’information envoyés. Six entreprises ont présenté des offres au premier tour le 5 avril 2005 et trois offres [Connex, devenue depuis Veolia Transdev (VT), Caravelle et BCP] ont été reçues au deuxième tour le 17 juin 2005 ainsi qu’une marque d’intérêt pour une participation minoritaire (Comanav). Trois offres ont été reçues pour le troisième tour le 28 juillet 2005.

(80)

Le 14 septembre 2005, chaque entreprise a été invitée à remettre son offre ferme et définitive avant le 15 septembre 2005. À cette date, la société Connex s’étant désistée, les services de l’État ont reçu deux offres fermes d’apport en capital et de reprise de la totalité du capital émanant des groupes BCP et Caravelle.

(81)

Le 27 septembre 2005, la France a publié un communiqué de presse indiquant que, sur la base d’un examen approfondi des deux offres, l’offre déposée par le groupe BCP était retenue car, tout en étant la plus acceptable au point de vue financier, elle était la plus à même de répondre aux intérêts de la compagnie, du service public et de l’emploi. L’offre initiale de BCP proposait un prix négatif de 113 millions d'EUR et constituait l’estimation la plus faible du prix négatif.

(82)

Cette offre initiale des repreneurs potentiels prévoyait explicitement la possibilité d’ajuster leur offre initiale au terme des audits réalisés. Les autorités françaises ont indiqué que le prix négatif initial a été revu à la hausse à la suite des audits remis le 16 décembre 2005 en raison d’éléments objectifs influant sur le contexte réglementaire et économique dans lequel opère la SNCM et survenu postérieurement à la remise de l’offre le 15 septembre 2005. Le prix négatif a ainsi été revu à 200 millions d'EUR.

(83)

Les négociations menées entre les autorités françaises et les futurs repreneurs, à savoir BCP associé au groupe Connex, devenu par la suite Veolia Transdev, filiale de Veolia, ont permis de ramener ce chiffre à 142,5 millions d'EUR, augmenté de la prise en charge d’une partie des dépenses relatives aux mutuelles des retraités de la SNCM (soit 15,5 millions d'EUR).

(84)

À l’issue de ce processus de sélection ouvert, transparent et non discriminatoire, un accord a finalement été trouvé le 13 octobre 2005 entre l’État, BCP et VT dans un contexte social et financier très difficile. VT est ainsi l’opérateur industriel de la SNCM (participation à 28 %) tandis que BCP est l’actionnaire de référence avec une participation de 38 %. L’État s’est engagé, notamment à l’égard des salariés, à rester actionnaire de la compagnie à hauteur de 25 % (69). BCP et VT ont établi un plan d’affaires pour la SNCM qui a été communiqué le 7 avril 2006 à la Commission européenne.

a)   Le contenu du protocole d’accord

(85)

Le protocole d’accord, aux termes duquel 75 % du capital de la SNCM est cédé aux repreneurs privés, a été signé le 16 mai 2006 entre les parties (BCP, VT et CGMF).

(86)

À la section II du protocole d’accord, il est prévu que la CGMF s’engage à approuver, souscrire et libérer entièrement une augmentation de capital de la SNCM d’un montant global de 142,5 millions d'EUR.

(87)

En complément de l’augmentation de capital, la CGMF s’engage à mettre à disposition de la SNCM, sous la forme d’une avance en compte courant, la somme de 38,5 millions d'EUR. Cette avance en compte courant, qui sera versée par la SNCM entre les mains d’un séquestre (la banque CIC), est destinée au financement de la fraction de coût dit de «surgénérosité» qui viendrait en complément des sommes dues en application des dispositions légales et conventionnelles dans l’éventualité d’un plan de réduction des effectifs mis en œuvre par les repreneurs. Le versement des compensations venant en sus des indemnités perçues en application des dispositions légales et conventionnelles se fait sur une base individuelle et nominative correspondant à des salariés qui ont quitté l’entreprise et dont le contrat de travail a été rompu.

(88)

Ce mécanisme est prévu à l’article II.2 du protocole de cession du 16 mai 2006 qui dispose que ce compte est destiné «au financement de la fraction du coût des éventuels départs volontaires ou ruptures de contrat de travail […] qui viendrait en complément de sommes de toute nature devant être payées par l’employeur en application des dispositions légales et conventionnelles». Le séquestre a «pour mission de libérer les fonds au fur et à mesure où les salariés concernés ne faisant pas l’objet d’un reclassement interne au groupe SNCM quitteront effectivement la société et de libérer le solde du montant séquestré à l’expiration de sa mission de séquestre». Le fonctionnement de ce compte fait l’objet d’une convention de séquestre annexée au protocole d’accord. Pour permettre l’actionnement du séquestre, la SNCM doit fournir au président de la CGMF la liste nominative des personnes dont le contrat de travail a été rompu et pour lequel il est demandé l’actionnement du séquestre ainsi qu’un état mensuel des dépenses nettes qui est le décompte exhaustif de l’ensemble des indemnités et frais versés aux salariés concernés. Concomitamment, la SNCM notifie au séquestre le «coût mensuel effectif additionnel» détaillé par salarié, qui correspond au complément au-delà des sommes de toute nature devant être payées par l’employeur en application des dispositions légales et conventionnelles. Le montant global des mesures complémentaires de surgénérosité de l’État ne pourrait en aucun cas dépasser 38,5 millions d'EUR et dans l’hypothèse où ces mesures sociales supplémentaires n’atteindraient pas ce seuil dans les trois ans suivant la réalisation de la cession, l’excédent serait reversé à l’État.

(89)

À la suite de ces opérations, la section III du protocole d’accord prévoit que la CGMF cède aux repreneurs privés ses actions représentant 75 % des actions composant le capital social de l’entreprise et le compte séquestre destiné à financer la partie du plan social allant au-delà des obligations conventionnelles et légales.

(90)

La section III du protocole d’accord prévoit également une augmentation de capital complémentaire de 8,75 millions d'EUR par BCP/VT, mis à disposition de la SNCM en fonction de ses besoins de trésorerie. Au paragraphe III.2.7 du protocole d’accord, il est prévu que la valeur des actions de la CGMF est égale, à tout instant, à leur valeur nominale initiale augmentée de […] (60) % de sa valeur nominale libérée, multipliée par J/365, J étant le nombre de jours depuis la date de réalisation, sous déduction de toute somme perçue (par exemple dividendes). Ces modalités ne sont pas applicables en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de la société.

(91)

Le protocole d’accord (section III.5) comporte une clause résolutoire de cession de la SNCM qui peut être exercée concomitamment par les repreneurs en cas de survenance de l’un des événements suivants dans la mesure où ces hypothèses auraient pour effet de remettre en cause la crédibilité de leur plan d’affaires et le retour à la viabilité de la société:

la non-attribution du contrat de délégation de service public de desserte maritime de la Corse pour la période débutant le 1er janvier 2007 ou son attribution dans des conditions substantiellement dégradées,

toute décision négative de la Commission européenne ou un arrêt du Tribunal ou de la Cour de Justice, tels qu’un refus de l’opération ou l’imposition de conditions ayant un impact substantiel sur la valeur de la société, et ce dans un délai de six ans à compter du jour de l’acquisition par les partenaires des droits sur la société.

(92)

La section VII du protocole d’accord prévoit que la CGMF prenne à sa charge une partie des engagements sociaux de la SNCM au titre des frais de mutuelles de ses retraités pour un montant évalué à 15,5 millions d'EUR à compter du jour du transfert de propriété de l’entreprise.

(93)

Les modalités de gouvernance de l’entreprise sont précisées dans la section IV du protocole d’accord. Il est prévu qu’il sera procédé à une modification du mode de gestion de la SNCM qui sera transformée en société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Ce dernier sera composé de 10, puis de 14 membres. Sa présidence sera attribuée transitoirement à un représentant de l’État. Si la DSP est attribuée à la SNCM, le président du conseil de surveillance sera remplacé par un représentant de BCP. Le directoire a quant à lui pour fonction d’assurer la gestion opérationnelle de la SNCM.

(94)

Le 26 mai 2006, le gouvernement français a entériné la cession de la SNCM de même que les mesures précitées.

b)   Les mesures

(95)

À la lumière de ce qui précède, le protocole d’accord contient trois types de mesures étatiques justifiant un examen au regard des règles de l’Union dans le domaine des aides d’État:

la cession de 75 % de la SNCM à un prix négatif de 158 millions d'EUR (apport en capital de 142,5 millions d'EUR et prise en charge des frais de mutuelle pour un montant de 15,5 millions d'EUR),

l’avance en compte courant par la CGMF pour un montant de 38,5 millions d'EUR en faveur des personnels licenciés de la SNCM,

l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR souscrite par la CGMF conjointement et concomitamment à l’apport de 26,25 millions d'EUR réalisé par VT et BCP,

la clause résolutoire de cession (70).

2.4.   PORTÉE DE LA PRÉSENTE DÉCISION

(96)

La présente décision finale porte sur les mesures mises en œuvre par la France en faveur de la SNCM depuis le 18 février 2002, à savoir:

le reliquat de l’apport en capital de la CGMF à la SNCM pour un montant de 76 millions d'EUR octroyés en 2002, soit 15,81 millions d'EUR,

le prix de vente négatif de la SNCM par la CGMF pour un montant de 158 millions d'EUR,

l’avance en compte courant par la CGMF de 38,5 millions d'EUR en faveur des personnels licenciés de la SNCM,

l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR souscrite par la CGMF.

(97)

La présente décision ne concerne pas la compensation des obligations de service public de la SNCM pour la période 1991-2001 dont la compatibilité a été confirmée par l’arrêt du Tribunal du 11 septembre 2012 (71).

(98)

Elle ne porte pas non plus sur l’examen des compensations financières perçues ou à percevoir par la SNCM au titre des obligations de service public pour la période 2007-2013, lesquelles ont fait l’objet d’une procédure distincte (72).

(99)

Par ailleurs, il y a lieu d’observer que l’arrêt du 11 novembre 2012 a fait l’objet de deux pourvois devant la Cour présentés respectivement par la SNCM et par la France dans les affaires jointes C-533/12 P et C-536/12 P. Or, la présente décision est prise en exécution de l’arrêt querellé, dans la seule mesure où cet arrêt a annulé la décision du 8 juillet 2008. Dans ces conditions, si l’examen des pourvois devait aboutir à l’annulation partielle ou complète de l’arrêt du 11 novembre 2012 et entraîner le rétablissement de certaines parties annulées par cet arrêt du dispositif de la décision du 8 juillet 2008, la présente décision deviendrait caduque, du fait même de ces arrêts de pourvoi, pour autant qu’elle vise des mesures ainsi rétablies.

2.5.   RAISONS AYANT CONDUIT À L’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE FORMELLE D’EXAMEN EN 2002 ET À SON EXTENSION EN 2006

2.5.1.   L’ouverture de la procédure formelle d’examen de 2002

(100)

Dans sa décision d’ouverture de procédure du 19 août 2002, la Commission, tout en reconnaissant à la SNCM le caractère d’entreprise en difficulté, a exprimé des doutes quant à la compatibilité de la mesure notifiée avec les critères exposés au point 3.2.2 des lignes directrices de 1999, en vigueur à l’époque.

(101)

La Commission a émis certains doutes sur le plan de restructuration compte tenu de l’absence d’analyse des causes des pertes de l’entreprise. En particulier, la Commission a posé des questions concernant les liens entre les pertes et les obligations de service public, l’impact de la politique d’achat de navires de la SNCM sur ses comptes de résultat et les mesures envisagées pour augmenter la productivité de l’entreprise.

(102)

La Commission a en outre souligné certaines lacunes du plan de restructuration, notamment l’absence de mesures concrètes pour réduire le montant des consommations intermédiaires et l’absence d’indication sur la future politique tarifaire de la SNCM.

(103)

La Commission s’est également interrogée sur la pertinence de la méthode de calcul retenue par les autorités françaises pour arrêter le montant de la recapitalisation et sur certaines des hypothèses retenues pour établir les simulations financières.

2.5.2.   L’extension de la procédure formelle d’examen de 2006

(104)

Par sa décision du 13 septembre 2006, la Commission a décidé d’étendre la procédure formelle d’examen de 2002 aux mesures prévues dans le cadre de la cession de la SNCM au secteur privé.

(105)

Dans l’hypothèse où ce montant serait qualifié d’aide d’État compatible au titre de l’article 86, paragraphe 2, du traité CE, la Commission a estimé qu’il devait être évalué à la lumière des lignes directrices communautaires concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté (ci-après «les lignes directrices de 2004») (73). Dans la mesure où le montant d’aide à la restructuration serait sensiblement plus bas que celui notifié en 2002 et approuvé en 2003, la Commission a exprimé ses doutes sur l’opportunité de maintenir l’ensemble des contreparties imposées à la SNCM par la décision de 2003.

(106)

La Commission a également exprimé ses doutes sur le respect des conditions imposées par la décision de 2003, à savoir le principe de price leadership et le nombre de rotations sur la Corse.

(107)

S’agissant du prix de cession négatif de la SNCM, la Commission a émis des doutes au sujet de la conformité au principe de l’investisseur privé en économie de marché de la recapitalisation par l’État préalable à la cession de la SNCM. En particulier, la Commission a exprimé ses doutes sur la validité du calcul des coûts de liquidation que l’État actionnaire serait tenu de payer en cas de liquidation de la SNCM.

(108)

La Commission a mis en doute le fait que les mesures financières puissent se justifier au titre des lignes directrices de 2004.

(109)

Elle a par ailleurs exprimé ses doutes au sujet de la seconde recapitalisation de 8,75 millions d'EUR pour ce qui est du respect des principes de concomitance entre l’investissement privé et public et l’identité des conditions de souscription au sens de la jurisprudence.

(110)

La Commission a enfin émis des doutes sur le fait que les mesures sociales complémentaires de 38,5 millions d'EUR d’aide à la personne puissent constituer un avantage indirect à l’entreprise. Elle a également souligné le risque de contradiction avec la prise en compte des indemnités complémentaires de licenciement comme faisant partie des risques supportés par un investisseur avisé.

III.   OBSERVATIONS DES AUTORITÉS FRANÇAISES SUR LA DÉCISION D’OUVERTURE

3.1.   SUR LA RECAPITALISATION DE 2002

(111)

Le plan de restructuration notifié en 2002 consistait en un apport en capital de 76 millions d'EUR, dont 53,48 millions consistaient en une compensation de service public. Si l’on tient compte des cessions d’actifs effectués par la SNCM (74), le montant de l’aide effectivement versé s’élève désormais à 69 292 400 EUR. Les autorités françaises considèrent que si le montant de 53,48 millions d'EUR est une aide compatible, le montant de l’aide à considérer comme aide à la restructuration au titre de la notification de 2002 s’élèverait finalement à 15,81 millions.

3.2.   SUR LES MESURES POSTÉRIEURES À LA RECAPITALISATION DE 2002

(112)

La France rappelle, à titre liminaire, que la gravité des mouvements sociaux de 2004/2005 et la détérioration de la situation économique et financière de la SNCM ont conduit l’État actionnaire à lancer en janvier 2005 une procédure de sélection d’investisseurs privés et à mettre en œuvre des mesures d’urgence [notamment la cession de l’Asco et de la participation dans Sud-Cargos (75)].

3.2.1.   Sur le prix de cession négatif de la SNCM

(113)

En application de la jurisprudence communautaire en la matière, en vigueur à l’époque, les autorités françaises invitent la Commission à considérer que le prix de cession négatif de la SNCM de 158 millions d'EUR ne contient aucune mesure qualifiable d’aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE dans la mesure où l’État français se serait comporté comme un investisseur privé en économie de marché.

(114)

À titre liminaire, la France fait observer que le prix final de 158 millions d'EUR, qui est inférieur au prix négatif que demandaient initialement les repreneurs au terme de leur audit de la SNCM, est le résultat d’une négociation de cession de contrôle menée dans le cadre d’une mise en concurrence ouverte, transparente et non discriminatoire, et, à ce titre, constitue bien un prix de marché.

(115)

La France considère que, dans la mesure où cette recherche d’un partenaire privé pour la SNCM a été opérée dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence ouverte, transparente et non discriminatoire, à l’issue de laquelle la meilleure offre a été retenue, le prix de cession est un prix de marché.

(116)

D’après les autorités françaises, la cession au prix négatif de 158 millions d'EUR aurait eu lieu dans les conditions les plus avantageuses pour l’État conformément à la jurisprudence communautaire en vigueur à l’époque, et à la pratique décisionnelle de la Commission et ne contiendrait donc aucun élément d’aide. En effet, la France estime que ce prix négatif est inférieur au coût de liquidation que l’État aurait dû supporter en cas de liquidation de l’entreprise.

(117)

Cette conclusion s’imposerait tant en appliquant l’approche issue de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes [ci-après jurisprudence «Gröditzer» (76)] qu’en appliquant l’approche reposant sur l’analyse des coûts de liquidation effectifs de la SNCM [décision «ABX» (77)].

(118)

S’agissant de la première méthode, se fondant sur la jurisprudence Gröditzer, la France expose que cet arrêt aurait confirmé l’appréciation de la Commission dans sa décision du 8 juillet 1999, selon laquelle «seule la valeur de liquidation […] des actifs, […], doit être prise en considération comme coût de la liquidation» (78).

(119)

À cet égard, les rapports de la CGMF (79) et Oddo-Hastings (80) estiment la valeur de liquidation des actifs à un minimum de 190,3 millions d'EUR au 30 septembre 2005 (81).

(120)

Par conséquent, dans la mesure où l’État, en tant que propriétaire actionnaire d’une société, n’est responsable de ses dettes qu’à concurrence de la valeur de liquidation de leurs actifs [jurisprudence «Hytasa» (82)], la France affirme que la valeur de liquidation des actifs de la compagnie estimée au minimum à 190,3 millions d'EUR est nettement supérieure au prix négatif de cession de 158 millions d'EUR.

(121)

Sur la seconde méthode, la France indique qu’elle découle de la décision de la Commission concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics, dans laquelle la Commission a examiné un prix de cession négatif, présentant, comme en l’espèce, le caractère d’un prix de marché, en le comparant aux coûts que l’État actionnaire aurait effectivement supportés dans le cadre d’une liquidation amiable ou judiciaire tels qu’expertisés par un tiers indépendant. D’après la France, la Commission reconnaît notamment dans cette décision la validité d’un certain nombre de coûts pouvant résulter d’une action en comblement de passif de la part des créanciers ou de la liquidation aux autres branches du groupe liquidant sa filiale.

(122)

Sur la base des rapports CGMF et Oddo-Hastings précités, les autorités françaises estiment que l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire la République française, s’élèverait entre 312,1 et 361 millions d'EUR au 30 septembre 2005 et se décompose comme suit:

[70-80]  (60) millions d'EUR au titre du plan social conventionnel, qui regroupe l’ensemble des coûts liés à la rupture du contrat de travail et conventionnellement à la charge de l’entreprise,

[30-40]  (60) millions d'EUR au titre du plan social extraconventionnel, qui regroupe l’ensemble des coûts liés aux mesures d’accompagnement liées aux obligations légales et réglementaires de la SNCM en matière de licenciement et des coûts indirects liés au plan social conventionnel,

entre [200-210]  (60) et [250-260]  (60) millions d'EUR au titre du paiement d’indemnités complémentaires de licenciement qui seraient mises à la charge de l’État par le juge, en complément des indemnités versées dans le cadre du plan social conventionnel et extraconventionnel, en application de la jurisprudence Aspocomp Group Oyj de la cour d’appel de Rouen du 22 mars 2005.

(123)

Cette méthode tient notamment compte du risque que l’État français eût été appelé en «comblement de passif» si un tribunal avait dû le considérer comme dirigeant de fait de la SNCM. Les autorités françaises estiment que le risque d’action en comblement de passif ne peut être écarté, particulièrement au regard d’un précédent jugé par la Cour de cassation en France (83). Ainsi, dans plusieurs courriers à la Commission, les autorités françaises ont soutenu que l’hypothèse d’une condamnation de l’État par un juge national à combler le passif de l’entreprise qu’il dirige constituait un scénario plus que plausible et qu’elle se devait d’être retenue dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(124)

Au 30 septembre 2005, la valeur résiduelle de l’actif de la SNCM (soit 190,3 millions d'EUR) serait, après paiement des dettes privilégiées, de 36,5 millions d'EUR. Les autres éléments de coûts pris en compte au titre de l’action en comblement de passif envers l’État comprennent notamment les coûts de résiliation des principaux contrats d’exploitation, les coûts liés à la résiliation des conditions de crédit-bail des navires et le paiement des dettes chirographaires, ce qui conduirait à une insuffisance d’actifs à hauteur de 134,4 millions d'EUR. Les autorités françaises considèrent que l’État aurait été condamné à prendre en charge entre 85 et 100 % de ce montant.

(125)

En outre, les autorités françaises considèrent que, du fait de son lien de dépendance avec la SNCM, et selon une autre jurisprudence française (84), la liquidation de l’entreprise aurait pu conduire le juge à ordonner le versement de dommages et intérêts aux salariés. Selon cette jurisprudence, les autorités françaises estiment qu’il serait plus que probable qu’un juge aurait fixé le montant des indemnités complémentaires sur la base des indemnités qui auraient été versées dans le cadre d’un plan social présenté antérieurement à la liquidation.

(126)

Selon cette approche, l’analyse des coûts effectifs qui auraient été mis à la charge de l’État actionnaire démontre que le coût pour l’État de la vente de la SNCM à un prix négatif de 158 millions d'EUR est inférieur au coût effectif qu’il aurait dû supporter en cas de liquidation judiciaire de l’entreprise.

(127)

En conclusion, les autorités françaises considèrent que ce montant ne saurait être qualifié d’aide d’État.

3.2.2.   Sur l’apport en capital conjoint des actionnaires

(128)

La France considère que, au travers de cette prise de participation, elle s’est comportée comme un investisseur avisé car, d’une part, elle est intervenue de manière concomitante et minoritaire aux côtés de BCP et VT et, d’autre part, cette participation bénéficie d’une rémunération en capital fixe de […] (60) % par an, ce qui exonère l’État du risque d’exécution du plan d’affaires. En effet, la France expose que ce taux de rentabilité est très satisfaisant pour un investisseur privé (85). Elle précise toutefois qu’aucune rémunération ne serait due en cas de redressement ou liquidation judiciaire de la SNCM ou de l’exercice de la clause résolutoire par les repreneurs.

3.2.3.   Sur les mesures sociales complémentaires (aide à la personne)

(129)

La France considère, en invoquant la pratique décisionnelle de la Commission, notamment dans le dossier SFP – Société française de production (86), que ce financement constitue une aide à la personne qui ne bénéficie pas à l’entreprise. Dès lors, la mise en œuvre grâce à des fonds publics de mesures sociales supplémentaires en faveur des personnes licenciées, sans que ces mesures allègent l’employeur de ses charges normales, relèverait de la politique sociale des États membres et ne constituerait pas une aide d’État.

3.2.4.   Sur la levée des restrictions posées par la décision annulée de 2003

(130)

Les autorités françaises rappellent, d’une part, que les conditions imposées par la décision de 2003 ont été toutes mises en œuvre et respectées sur la période 2003-2006. D’autre part, les autorités françaises considèrent que ces mesures ne sont plus nécessaires à prévenir une distorsion de la concurrence et que leur maintien serait contraire au principe de proportionnalité eu égard à la limitation du montant des aides à la restructuration, désormais réduit à 15,81 millions d'EUR. En particulier, les autorités françaises considèrent qu’il y a lieu de lever les conditions qui pourraient encore trouver application, à savoir celles portant sur l’interdiction de moderniser la flotte de la SNCM, sur le respect de principe du price leadership en matière tarifaire et sur le maintien d’un certain nombre de fréquences.

3.3.   CONCLUSION

(131)

Si la Commission devait toutefois qualifier d’aide d’État tout ou partie des nouvelles mesures, la France attire l’attention de la Commission sur le fait que les nouvelles mesures, en assurant le retour à la viabilité de la SNCM, permettraient le maintien d’un jeu concurrentiel sur les marchés en cause, notamment sur le marché de la desserte de la Corse. Cet élément, d’après la France, est un des principes des lignes directrices dans le sauvetage d’une entreprise en difficulté comme rappelé, dans le dossier présent, par la Commission (considérant 283 de sa décision annulée) et par le Tribunal dans son arrêt du 15 juin 2005 (considérant 117). En particulier, ce dernier aurait rappelé que la Commission pouvait estimer, dans l’exercice de son large pouvoir d’appréciation, que la présence d’une entreprise était nécessaire pour prévenir l’émergence d’une structure oligopolistique renforcée des marchés en cause.

(132)

S’agissant de la détermination des contreparties éventuelles à imposer à la SNCM, la France suggère que la Commission tienne compte de la structure de marché. Ainsi, une réduction des capacités de la SNCM serait de nature à renforcer la position désormais dominante de CFF sur le marché de la desserte de la Corse (87).

(133)

D’après les autorités françaises, le plan de restructuration, tel qu’actualisé, serait conforme aux critères de compatibilité énoncés par la Commission dans ses lignes directrices de 1999 et de 2004. L’ensemble des mesures exposées dans le contexte de la privatisation de la SNCM devait, selon ces autorités, permettre également de rétablir dès fin 2009 la viabilité à long terme de la SNCM et serait limité au minimum nécessaire à ce retour à la viabilité.

IV.   OBSERVATIONS DES INTÉRESSÉS

4.1.   SUR LA DÉCISION D’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE FORMELLE D’EXAMEN DE 2002

4.1.1.   Observations de Corsica Ferries (CFF)

(134)

Contestant d’abord que la SNCM soit une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices (88), CFF s’interroge sur la capacité de la SNCM à devenir rentable sur ses lignes non-subventionnées. CFF constate par ailleurs que, contrairement à ce qui est annoncé dans le plan de restructuration (89), Livourne est toujours desservi.

(135)

Sur la question de la réduction des coûts, CFF regrette de ne pas avoir accès à certains éléments du plan de restructuration au sujet duquel ses représentants ont émis des critiques (90).

(136)

CFF est d’avis que le calcul des autorités françaises aboutissant à la somme de 76 millions d'EUR est purement fictif (91) alors que le ratio des capitaux propres sur les dettes financières de 79 % arrêté par les autorités françaises lui paraît exagéré (92). Pour ce qui concerne les participations de la SNCM, CFF note que certaines des filiales ne sont pas utiles aux activités de la compagnie maritime (93).

(137)

En conclusion, selon CFF, le projet d’aide vise à contourner le règlement cabotage et à vider de sens l’appel d’offres lancé pour la desserte de la Corse à partir de Marseille. CFF insiste pour que l’aide projetée n’aboutisse pas à permettre une offre commerciale plus agressive de la part de la SNCM. Elle suggère qu’une aide à la restructuration ne soit octroyée qu’en 2007 et seulement dans le cas où la SNCM perdrait le prochain appel d’offres en 2006, seul scénario, selon elle, qui mettrait véritablement la compagnie maritime publique en difficulté.

4.1.2.   Observations de la STIM

(138)

La STIM, l’actionnaire de référence de la CMN, fait valoir que les participations de la SNCM dans la CMN doivent être analysées comme des actifs purement financiers. Selon la STIM, la CMN et la SNCM sont indépendantes et en concurrence pour les lignes autres que celles au départ de Marseille, même si elles sont toutes les deux cocontractantes dans le cadre du contrat de délégation de service public.

(139)

La lettre indique que la STIM s’engagerait «à racheter, tout ou partie, et de préférence la totalité des participations de la SNCM dans la CMN», dont il estime la valeur entre 15 et 17 millions d'EUR, si la Commission devait estimer, dans les conditions qu’elle pourrait imposer dans sa décision finale qu’«une telle cession est nécessaire au bon équilibre du plan de restructuration».

4.1.3.   Observations de représentants de collectivités locales

(140)

Le maire de la ville de Marseille, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône et le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur soulignent l’importance économique que joue la SNCM dans l’économie régionale.

(141)

Le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur ajoute que les conditions pour que le plan de restructuration de la SNCM garantisse la viabilité de l’entreprise lui apparaissaient réunies.

(142)

Le président du conseil exécutif de l’assemblée de Corse a transmis une délibération de ladite assemblée en date du 18 décembre 2002 au cours de laquelle l’assemblée de Corse émettait «un avis favorable» au projet de recapitalisation de la SNCM.

4.1.4.   Observations de l’Office des transports de Corse

(143)

L’OTC indique que, la SNCM étant aujourd’hui la seule compagnie capable de remplir les exigences du contrat en ce qui concerne le trafic de passagers, sa disparition «entraînerait immédiatement une diminution importante des services». Il rappelle en outre le poids de la SNCM dans l’économie de la Corse.

4.2.   SUR LA DÉCISION D’EXTENSION DE PROCÉDURE DE 2006

4.2.1.   Observations de Corsica Ferries France (CFF)

(144)

CFF souligne l’importance des montants financiers en question, leur caractère disproportionné par rapport au chiffre d’affaires de la SNCM et le fait qu’ils ont été versés à la SNCM avant que la Commission ne se prononce sur la qualification au titre de l’article 87, paragraphe 1, du traité CE.

(145)

CFF attire l’attention de la Commission sur le fait que le soutien de l’État français à la SNCM revêt un caractère stratégique pour le développement de CFF. Ces mesures non autorisées permettraient à la SNCM d’avoir une politique tarifaire très agressive sur les lignes où CFF est positionnée depuis 10 ans et où, pour la première fois depuis son implantation, elle perdrait des parts de marché.

(146)

S’agissant du processus de mise en concurrence pour la cession de la compagnie, CFF considère qu’il n’a pas été complètement transparent dans la mesure où l’entreprise sélectionnée, à savoir BCP, n’est plus aux commandes opérationnelles de la SNCM, ayant cédé sa place au groupe VT. En outre, les conditions financières ayant évolué pour devenir beaucoup plus favorables aux acquéreurs, CFF s’interroge sur le principe d’égalité de traitement des investisseurs qui aurait dû présider à l’ensemble de l’opération.

(147)

Concernant le prix de cession négatif de 158 millions d'EUR, CFF doute de l’application au cas d’espèce du critère de l’investisseur avisé en économie de marché. D’une part, CFF se demande si l’on peut considérer que l’opération en cause a été menée par l’État parallèlement à une intervention significative et concomitante des opérateurs privés concernés dans des conditions comparables alors que l’État a recapitalisé la compagnie avant la recapitalisation conjointe des actionnaires et le nouveau plan de restructuration. D’autre part, CFF considère que, face aux conditions financières graves de la SNCM, un investisseur avisé serait intervenu plus tôt pour ne pas laisser déprécier son investissement (94).

(148)

CFF estime que la référence à l’affaire «ABX Logistics» n’est pas pertinente. Outre le fait que les circonstances de cette affaire ne sont pas transposables au cas d’espèce, CFF souligne une contribution significative du bénéficiaire des aides dans cette affaire, ce qui ne serait manifestement pas le cas de la SNCM. Par ailleurs, selon CFF, la décision de la Commission de 2006 n’aurait pas tenu compte des coûts liés au risque d’actions judiciaires dans le cadre d’une liquidation de l’entreprise concernée. À ce sujet, CFF estime que la jurisprudence nationale invoquée par la France afin de justifier les coûts qui seraient liés à la liquidation de la SNCM n’est pas applicable au cas d’espèce. En effet, d’après CFF, la Cour de cassation, dans l’affaire des Mines et produits chimiques de Salsignes, n’évoque nullement la responsabilité directe de l’État actionnaire en cas de liquidation d’une entreprise dont il serait actionnaire mais plutôt la possibilité de diriger une action en payement de dettes sociales contre un établissement public à caractère industriel et commercial et l’impossibilité de leur dirigeants de se soustraire à leurs obligations en invoquant l’intervention des pouvoirs publics.

(149)

S’agissant de l’applicabilité au cas d’espèce de la jurisprudence de la cour d’appel de Rouen dans l’affaire Aspocomp, CFF fait valoir que le cas objet de cette jurisprudence, portant sur la condamnation d’une société mère à verser aux salariés d’une filiale des indemnités sociales pour le «non-respect d’un accord» validé par la première, est bien loin des circonstances du dossier SNCM. Il n’existe donc pas un risque certain de voir la CGMF ou l’État condamné à payer des indemnités de licenciement en cas de liquidation judiciaire. D’ailleurs, CFF doute de l’estimation chiffrée des autres coûts sociaux en raison du fait qu’ils semblent diverger selon les experts invités à les établir.

(150)

CFF considère que l’application de la jurisprudence communautaire «Gröditzer» et «Hytasa» au cas d’espèce ne peut qu’amener à conclure que l’État ne se serait pas comporté en investisseur privé dans la mesure où, conformément à ladite jurisprudence, l’apport en capital de l’État a été lié à la vente de 75 % de sa participation dans la SNCM, diminuant d’autant les perspectives de bénéfice en retour.

(151)

Enfin, CFF considère que la comparaison entre les coûts de liquidation et les coûts d’une recapitalisation devraient prendre en compte la valeur des actifs, qui est, dans les deux cas, transférée à l’acquéreur. CFF estime que la valeur de l’actif cédé aux repreneurs oscillerait entre 640 millions d'EUR et 755 millions d'EUR (95), compte tenu de la valeur vénale de la flotte utilisée par la SNCM que CFF évalue entre 644 et 664 millions d'EUR en août 2006.

(152)

S’agissant de l’appréciation des mesures postérieures à la recapitalisation de 2002 comme aides à la restructuration, CFF estime que, si la SNCM remplit les conditions d’entreprise en difficulté des lignes directrices de 2004 dans la période précédant la première recapitalisation de 142,5 millions d'EUR, cette qualification devient très contestable pour la période qui précède la seconde augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR dans la mesure où les fonds propres de l’entreprise ont été reconstitués.

(153)

S’agissant de la viabilité de l’entreprise, CFF souligne que la cession de la SNCM n’est que partielle et n’est pas irrévocable compte tenu des clauses résolutoires négociées avec les repreneurs. Ces éléments représentent d’importants éléments d’incertitude sur la volonté et la capacité des repreneurs à redresser la SNCM et, partant, hypothèquent les perspectives de viabilité durable de l’entreprise. En outre, CFF indique que, contrairement à ce qui est exigé par les lignes directrices de 2004, les autorités françaises n’ont pas envisagé l’abandon des activités qui resteraient structurellement déficitaires même après la restructuration (96). De surcroît, CFF exprime son scepticisme quant au plan de réduction des coûts alors même que la flotte de la SNCM se serait agrandie (97) et du plan de réduction des effectifs notamment à la lumière de l’échec du plan social de 2002.

(154)

CFF exprime ses doutes quant au fait que les nouvelles aides soient limitées au minimum en raison, d’une part, d’un manque de clarté sur ce que recouvrent les coûts sociaux et, d’autre part, du contenu du procès-verbal de l’assemblée de la SNCM du 28 avril 2006 dont il ressort qu’une partie de ces aides auraient servi à couvrir les pertes d’exploitation de la compagnie en 2006 et en 2007. CFF considère également que les repreneurs de la SNCM ne contribuent pas de manière substantielle à la restructuration de l’entreprise.

(155)

Afin de prévenir des distorsions indues de la concurrence, CFF estime nécessaire de reconduire et de préciser les contreparties imposées à la SNCM en 2003 ainsi que d’en ajouter de nouvelles portant sur la réduction de la présence de la SNCM sur le marché (98). CFF estime en outre qu’une partie des mesures imposées à la SNCM par la décision de 2003 n’ont pas été respectées. La SNCM aurait procédé à l’acquisition de nouveaux navires en violation de l’article 2 de la décision de la Commission de 2003. Par ailleurs, la SNCM n’aurait pas cédé sa participation dans la CCM en violation de l’article 3 de la décision de la Commission. Enfin, la SNCM pratiquerait depuis 2003 une politique tarifaire agressive avec des prix inférieurs à ceux pratiqués par CFF en violation de l’article 4 de ladite décision (billets jusqu’à 30 % moins chers pour des services identiques ou comparables).

(156)

Sur la nature de la seconde recapitalisation de 8,75 millions d'EUR, CFF estime que, outre la concomitance de l’investissement public et privé, l’intervention privée doit être significative et réalisée dans des conditions comparables de sorte que soit validée l’intervention de l’État. Dans le cas d’espèce, ces deux conditions ne seraient pas satisfaites. D’une part, la participation des repreneurs, strictement liée à la première augmentation de capital de 142,5 millions d'EUR, ne serait pas significative. D’autre part, l’intervention des repreneurs n’aurait pas été effectuée à des conditions comparables à celles de l’État notamment du fait des clauses résolutoires et de la rentabilité attendue de la participation minoritaire de la CGMF.

(157)

S’agissant des mesures sociales d’un montant de 38,5 millions d'EUR, CFF conteste la qualification de ce montant comme aide à la personne. En effet, s’il est vrai que ce montant bénéficie directement aux employés de la SNCM, CFF souligne que cette mesure pourrait générer des effets positifs indirects pour la SNCM, notamment en termes d’apaisement du climat social.

4.2.2.   Observations de la STIM

4.2.2.1.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(158)

S’agissant du prix de cession négatif de 158 millions d'EUR, la STIM estime que ce prix ne constitue pas un prix de marché issu d’une procédure de mise en concurrence ouverte et non discriminatoire car la recapitalisation est intervenue dans des conditions différentes de celles qui doivent normalement guider un investisseur privé. La STIM considère en effet que l’actif net comptable réévalué permettrait, dans la pire des hypothèses, une liquidation sans coûts pour l’État, voire dégageant une plus-value de liquidation, que le prix de cession est dérisoire par rapport à la valeur de l’entreprise (estimée par la STIM à 350 millions d'EUR) et que l’aide est disproportionnée par rapport aux besoins de l’entreprise.

(159)

La STIM attire également l’attention de la Commission sur le caractère exorbitant de la clause résolutoire du transfert au secteur privé.

(160)

La STIM conteste enfin la justification de la vente à un prix négatif reposant sur l’hypothèse d’une liquidation socialement difficile, qui semble peu réaliste.

(161)

Concernant la seconde recapitalisation de 8,75 millions d'EUR, la STIM considère que cet apport en capital ne respecte pas le principe de l’investisseur privé en économie de marché compte tenu de l’insuffisance des garanties de retour sur investissement. La STIM conteste l’argument tiré de la concomitance de l’investissement privé et public pour dénier à cet apport la qualité d’aide d’État. Une telle concomitance, pour autant qu’elle soit établie, ne constitue qu’un indice et ne saurait être à elle seule un critère de qualification (99). La STIM affirme enfin que cet apport constituerait une garantie donnée aux repreneurs par le gouvernement français que la SNCM serait bien attributaire de la DSP pour la desserte de la Corse.

(162)

S’agissant des 38,5 millions d'EUR d’aides à la personne, la STIM estime que ce montant vise en réalité à donner les moyens à la SNCM de respecter certains aspects essentiels du plan de redressement soumis à la Commission qui n’ont pas été mis en œuvre, notamment la réduction des effectifs.

4.2.2.2.   Sur la compatibilité avec les lignes directrices de 2004

(163)

La STIM est d’avis que les aides reçues par la SNCM ne sont pas limitées au minimum. La contribution de la SNCM et des repreneurs au plan de restructuration serait insuffisante au regard des conditions imposées dans les lignes directrices de 2004 et il ne serait pas démontré que la situation de la SNCM eût été exceptionnelle au point de justifier une contribution propre moins élevée. En outre, la STIM souligne le caractère disproportionné des aides octroyées en 2006 dans la mesure où elles ont permis à la SNCM de constituer des réserves pour couvrir des pertes futures. Enfin, le fait que la SNCM n’ait pas prévu de céder les actifs non indispensables à la survie de l’entreprise serait contraire aux exigences posées par les lignes directrices de 2004.

(164)

La STIM estime que les sommes versées l’ont été en violation du principe d’unicité établi par les lignes directrices de 2004. La dégradation de la situation financière de l’entreprise ainsi que les conflits sociaux ne sauraient s’analyser comme des circonstances exceptionnelles, imprévisibles et non imputables à l’entreprise bénéficiaire.

(165)

Partant, la STIM exige des compensations supplémentaires à hauteur de la moitié des aides apportées, soit 98,25 millions d'EUR au travers de la cession d’un navire supplémentaire ainsi que de ses participations directes et indirectes de la SNCM dans la CMN. À cet égard, la STIM affirme que ces participations ne sont pas stratégiques aux termes des lignes directrices de 2004 sur les aides à la restructuration car elles ne seraient pas «indispensables à la survie de l’entreprise» ni ne revêtiraient le caractère d’actif inaliénable.

(166)

La STIM fait également valoir que les prétendues synergies entre la SNCM et la CMN n’existent pas dans la mesure où la SNCM n’a aucun rôle effectif dans la gestion et le développement de la CMN. La STIM souligne enfin que le pacte d’actionnaire reliant les deux entreprises n’existe plus depuis le 15 mars 2006, date à laquelle il a été dénoncé par la CMN, ainsi que l’a constaté la cour d’appel de Paris.

4.2.3.   Observations de la SNCM

(167)

La SNCM a communiqué à la Commission un dossier faisant le point sur sa situation économique et concurrentielle, accompagné d’une consultation juridique appréciant, dans le cadre d’une procédure de liquidation, le risque d’une qualification judiciaire de l’intervention de l’État en tant que gestionnaire de fait de la compagnie pour la période précédant la privatisation.

(168)

Consulté par la SNCM, le cabinet Baker & McKenzie arrive à la conclusion que, sur la base des documents sociaux de la société complétés par les correspondances, les interventions et les comptes rendus des organes de contrôle, l’État a […] (60) décisions (100) […] (60) organes (101), […] (60) organes sociaux (102). Le rapport souligne en outre que […] (60) SNCM (103). Enfin, le même rapport fait état de ce que […] (60) SNCM.

(169)

Sur cette base, l’expert de la SNCM conclut qu’il est très probable que la qualité de gérant de fait de l’État aurait été retenue par le tribunal de commerce de Marseille.

(170)

En outre, il ressortirait des faits, notamment établis par des rapports de la Cour des comptes, que des fautes de gestion imputables à l’État français, dirigeant de fait de la SNCM, ont contribué à l’insuffisance d’actifs constatée de la SNCM. Le rapport épingle entre autres les fautes de gestion suivantes: le choix […] (60) commercial. Le préjudice résultant des fautes de gestion de l’État s’élèverait à […] (60).

(171)

Dans ce contexte, selon l’expert de la SNCM, la condamnation de l’État à supporter tout ou partie de l’insuffisance d’actif dans le cadre d’une action en comblement de passif ne ferait donc aucun doute, compte tenu de l’implication très forte de l’État dans la gestion de la SNCM, de ses fautes de gestion manifestes et de l’étendue de ses ressources financières.

(172)

Sur la base de la jurisprudence pertinente, l’expert de la SNCM conclut que, si la SNCM avait été liquidée, l’État aurait très certainement été condamné à prendre à sa charge l’intégralité des dettes sociales de la SNCM. Ceci aurait conduit à mettre à la charge de l’État actionnaire une part estimée entre 85 % et 100 % de l’insuffisance d’actifs constatée (soit entre 316,6 et 385,7 millions d'EUR). En conséquence, en décidant de privatiser la SNCM tout en renforçant préalablement ses fonds propres pour un montant de 158 millions d'EUR, l’État se serait comporté comme un investisseur avisé.

V.   COMMENTAIRES DES AUTORITÉS FRANÇAISES SUR LES OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES

5.1.   COMMENTAIRES DES AUTORITÉS FRANÇAISES SUR LES OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES RELATIVES À LA DÉCISION D’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE FORMELLE D’EXAMEN DE 2002

5.1.1.   Sur les observations de CFF

(173)

Les autorités françaises ont indiqué que certaines des données présentées par CFF concernant l’offre de la SNCM sont inexactes.

(174)

L’État considère, contrairement aux affirmations de CFF, que le plan de restructuration a été bâti de façon à permettre le rétablissement de la SNCM dans les meilleurs délais et à créer les conditions de sa viabilité à moyen et long termes. Les autorités françaises précisent qu’une part importante du programme de réduction des coûts a déjà été mise en œuvre. Les moyens nautiques ont été réduits et le programme de cessions d’actifs se déroule conformément au projet industriel. Les dessertes ont été redéployées et le plan d’action sur la réduction des consommations intermédiaires produit ses premiers résultats. Enfin, le volet emploi du projet industriel est progressivement mis en œuvre. En outre, la SNCM a provisionné, en 2001, 21,3 millions d'EUR destinés au financement de mesures de restructuration, et particulièrement du plan de sauvegarde des emplois.

(175)

Concernant la détermination du montant de l’aide, les autorités françaises confirment qu’un ratio de capitaux propres sur endettement global de 0,79 est bien caractéristique des bilans propres à la plupart des compagnies maritimes, sauf situation particulière. Quant au ratio de 0,497 annoncé par CFF pour la CMN en 2001, il est inexact selon les autorités françaises, car il omet de prendre en compte les disponibilités à l’actif du bilan. Corrigé de ce manquement, le ratio de la CMN est de 0,557. Selon les autorités françaises, ce niveau demeure en tout état de cause insuffisant pour la CMN et la situation de trésorerie difficile rencontrée par la CMN en 2002 en est l’illustration. La CMN a dû en effet emprunter jusqu’à 8 millions d'EUR auprès de la STIM pour financer un déficit de trésorerie non couvert par ses banques.

5.1.2.   Sur les observations de la STIM

(176)

Les autorités françaises maintiennent que la participation de la SNCM dans le capital de la CMN ne peut pas s’analyser comme un actif purement financier, ainsi que semble l’affirmer la STIM. La France défend la position que les participations de la SNCM dans la CMN revêtent un caractère hautement stratégique. Leur cession constituerait selon elle en effet non seulement un contresens industriel mais également une erreur stratégique majeure.

5.1.3.   Sur les observations de représentants de collectivité locales

(177)

Si la France approuve globalement le contenu de la lettre du président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, elle tient néanmoins à indiquer que, contrairement à ce qui est affirmé au point 2 de ladite lettre (104), l’offre sur la desserte entre la France continentale et la Corse n’est pas «surdimensionnée par rapport à la demande» et que la politique tarifaire de la SNCM est conforme aux engagements qu’elle a pris de ne pas être à l’origine d’une guerre tarifaire et de ne pas être price leader.

5.2.   SUR LES OBSERVATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES RELATIVES À LA DÉCISION DE 2006

(178)

De manière générale, la France note que bon nombre des observations de STIM et CFF sont identiques aux commentaires que ces sociétés avaient déjà formulés devant la Commission en 2003. En particulier, elles soulignent que les commentaires de CFF ont été présentés devant le Tribunal de première instance dans le cadre du recours en annulation de la décision de la Commission du 9 juillet 2003 et ont déjà, pour la plupart, été rejetés tant par la Commission que par le Tribunal.

5.2.1.   Sur la mise en exécution anticipée des mesures prévues par le premier plan de restructuration et ses modifications

(179)

À la remarque générale concernant la mise en œuvre anticipée des mesures qualifiables d’aides par la France, les autorités françaises répondent que ladite mise en œuvre se justifie par la particularité de la procédure, à savoir l’annulation en 2005 de la décision d’autorisation de la Commission du 9 juillet 2003, et non par la volonté des autorités françaises de méconnaître leurs obligations issues du traité CE. D’ailleurs, la France précise avoir toujours tenu la Commission informée de l’évolution du dossier et des différentes mesures adoptées depuis janvier 2005, en vertu du principe de coopération loyale entre les États membres et la Commission.

(180)

Concernant ces dernières mesures, les autorités françaises considèrent que puisqu’aucune d’entre elles ne constituent des aides, l’article 88, paragraphe 3, du traité CE, in fine, ne leur serait pas applicable, et que, dès lors, il n’y aurait aucune obligation pour que leur exécution soit suspendue.

5.2.2.   Sur les mesures postérieures à la recapitalisation de 2002

(181)

S’agissant du processus de cession, la France précise qu’elle prévoyait dès son origine des critères de sélection classiques se fondant principalement sur le prix proposé pour la valorisation des titres de la SNCM et, à titre secondaire, sur d’autres paramètres (projet industriel, projet social, etc.), parmi lesquels le montant que les candidats étaient prêts à investir dans la société au titre d’une recapitalisation. La France conteste fermement l’argument avancé par les tiers, selon lequel le processus de mise en vente n’aurait pas été transparent et rappelle que, dans le cas d’espèce, l’État est même allé au-delà de ses obligations légales et réglementaires, déjà fortes et contraignantes, prévues en cas de cession de participations publiques. La France rappelle que l’évolution faisant suite à l’offre de BCP de reprendre 100 % des titres de la SNCM s’est déroulée dans un contexte financier et social très difficile et que l’association de VT à l’offre de BCP n’a pas changé les termes commerciaux et financiers de l’opération (hors répartition du capital).

(182)

En ce qui concerne le prix négatif de 158 millions d'EUR, les autorités françaises rappellent que, compte tenu de la situation financière de la SNCM au 30 septembre 2005, l’entreprise a été vendue à un prix de marché et que la vente a été économiquement plus avantageuse qu’une liquidation de l’entreprise. À cet égard, les autorités françaises précisent que l’application du critère de l’investisseur privé au cas d’une cession d’entreprise proche de la liquidation ne doit pas être considérée comme la recherche de la «rentabilité de l’intervention publique», mais comme la prévention de pertes plus importantes qu’aurait à subir l’actionnaire au travers d’une liquidation plus coûteuse.

(183)

S’agissant du prix payé, la France conteste l’argument selon lequel la SNCM aurait été cédée à un prix ne correspondant pas à sa valeur réelle. En particulier, elle réfute l’estimation de la valeur de l’entreprise à près de 350 millions d'EUR faite par la STIM qui ne prend en compte que les éléments du bilan qui améliorent la valorisation à partir des fonds propres comptables (amortissements dérogatoires, plus-values résiduelles des navires etc.) sans tenir compte des éléments de passif qui viendraient la réduire. Cette méthode de calcul de nature purement comptable ne correspondrait pas à la réalité économique d’une entreprise maritime, telle que la SNCM, dotée d’actifs de valeur figurant au bilan mais disposant également d’une rentabilité limitée et de passifs hors bilan importants.

(184)

Les autorités françaises réfutent également l’argument de CFF d’avoir sous-estimé la valeur vénale de la flotte de la SNCM, que CFF chiffrerait entre 406,5 millions d'EUR et 426,5 millions d'EUR. Les autorités françaises exposent que les navires pris en compte dans le calcul de CFF ne correspondent pas à ceux détenus en propre par la SNCM au 30 septembre 2005. L’absence de décotes appliquées à la valeur vénale des navires ne tiendrait pas compte du contexte dans lequel se serait déroulée une éventuelle liquidation judiciaire de ces actifs et enfin, la date retenue pour calculer cette valeur vénale, à savoir août 2006, n’est pas la date de liquidation potentielle de la SNCM à laquelle il convient de se référer, cette date étant celle du 30 septembre 2005. D’ailleurs, la France note que, si le calcul proposé par CFF devait être retenu, le prix négatif serait trois fois moins élevé que la valeur de liquidation des actifs requise par la jurisprudence Gröditzer, ce qui serait donc plus favorable que les hypothèses présentées à la Commission par les autorités françaises.

(185)

À l’argument avancé par CFF remettant en cause l’application de la jurisprudence Gröditzer en se référant au fait que l’apport en capital de l’État dans la SNCM a été lié à la vente de 75 % de sa participation, diminuant d’autant les perspectives de bénéfice en retour, les autorités françaises rappellent que le prix de cession négatif de 158 millions d'EUR correspond bien à la cession de la totalité du capital de la SNCM, suivie d’un nouvel investissement par l’État à hauteur de 25 % bénéficiant d’un retour de […] (60) % par an. Dès lors, la France considère que le retour sur l’investissement reste garanti du fait de sa participation dans l’actionnariat de la compagnie à hauteur de 25 % dans la mesure où cette participation bénéficie d’une garantie de retour très élevé.

(186)

La France conteste également l’argument avancé par CFF sur la non-applicabilité au cas d’espèce de l’approche ABX, reposant notamment sur l’analyse des coûts de liquidation effectifs de la SNCM et sur le risque que l’État aurait pu être considéré responsable du passif de l’entreprise au titre d’une action en comblement de passif telle que prévue par les procédures collectives françaises et confirmée par la jurisprudence nationale (arrêt de la cour d’appel de Rouen du 22 mars 2005). Bien que les autorités françaises estiment que leur comportement en tant que gestionnaire de la SNCM ne saurait être qualifié de «fautif» au titre de cette action, elles insistent sur l’existence d’un risque très élevé de condamnation de l’État par un juge national pour l’insuffisance d’actifs de la SNCM en raison des critères souples de qualification de la faute de gestion au sens de l’article L. 651-2 du code de commerce et en vertu de la jurisprudence précitée qui serait transposable au cas d’espèce.

(187)

S’agissant de la recapitalisation de 8,75 millions d'EUR, la France rappelle que, contrairement aux affirmations de CFF et STIM, cet apport en capital ne constitue pas une aide d’État en raison de la concomitance de cet investissement, la similitude des conditions de sa souscription et la rémunération supérieure à la moyenne obtenue par l’État via la CGMF.

(188)

En particulier, les autorités françaises précisent que le principe d’égalité des investisseurs ne serait pas remis en cause par l’existence des clauses résolutoires dans la mesure où ces dernières ont été prévues dans le cadre de la cession de 100 % de la SNCM et non dans le cadre de la recapitalisation de 35 millions d'EUR qui a suivi celle-ci.

(189)

En outre, la France rappelle que son investissement est bien inférieur à celui des repreneurs dans la mesure où ce n’est que le montant de 8,75 millions d'EUR qui est à comparer avec l’investissement effectué par les repreneurs (26,25 millions d'EUR). En effet, l’examen de la première recapitalisation de 142,5 millions d'EUR ne devrait être fait que dans le cadre de la comparaison avec le prix de liquidation.

(190)

Enfin, la France conteste l’argument avancé par la STIM concernant le fait que cet apport constituerait une garantie donnée aux repreneurs privés que la SNCM serait bien attributaire de la DSP pour la desserte de la Corse. Les autorités françaises font valoir que cette augmentation de capital est avisée et indépendante de la performance de l’entreprise et que l’attribution de la DSP à la SNCM ne permettrait pas d’améliorer le rendement attendu de cet investissement.

(191)

Concernant les 38,5 millions d'EUR de mesures sociales, la France réitère l’argument selon lequel ces mesures sont des aides à la personne et que leur prise en charge par l’État ne peut être considérée comme fournissant un avantage indirect à l’entreprise dans la mesure où celles-ci viennent en supplément des obligations légales et conventionnelles à la charge de la SNCM. En outre, la France rappelle que ces mesures ne permettraient pas le départ de salariés qui resteraient, en leur absence, à la charge de la SNCM.

(192)

Contrairement à l’argument avancé par CFF, les autorités françaises précisent que les 38,5 millions d'EUR ne correspondent pas à la mise en œuvre des réductions d’effectifs prévues dans le cadre du plan social de 2003 car ces réductions ont, malgré le retard, déjà été mises en œuvre. Le nouveau plan social vient donc en complément des premières mesures sociales de 2003.

5.2.3.   Sur la compatibilité avec les lignes directrices

(193)

La France considère que, à la lumière de ce qui précède, le montant d’aide à analyser est de 15,81 millions d'EUR.

(194)

Contrairement aux affirmations de CFF, les autorités françaises considèrent que, eu égard au point 11 des lignes directrices de 2004, la première recapitalisation, tout en ayant permis à la SNCM de reconstituer ses fonds propres, ne lui a pas fait perdre son caractère d’entreprise en difficulté dans la mesure où cette recapitalisation a eu pour but d’assurer le maintien de l’activité de la société.

(195)

La France réfute les allégations de CFF selon lesquelles elle n’aurait pas dû effectuer de nouvelles injections financières dans l’entreprise étant donné que la SNCM aurait pu avoir recours au crédit bancaire. À cet égard, les autorités françaises précisent que, le 24 août 2005, les banques avaient refusé l’octroi de nouvelles lignes de trésorerie en faveur de la SNCM et que, dès lors, les seules alternatives envisageables étaient la privatisation ou la liquidation de l’entreprise.

(196)

La France conteste les arguments avancés par CFF et la STIM concernant l’échec du plan de restructuration de 2002 qui, malgré un certain retard, a été mis en œuvre et a permis d’atteindre les objectifs en 2005. La dégradation de la situation économique et financière de la SNCM due à des facteurs exogènes à l’entreprise même aurait ensuite rendu nécessaire le prolongement du plan notifié en 2002 et l’introduction de nouvelles mesures.

(197)

La France estime que la SNCM a de bonnes perspectives de redressement et que les mesures envisagées par les nouveaux actionnaires, notamment la mise en œuvre du plan social, le redressement des dessertes et le renouvellement de certains navires, permettront le retour à la viabilité de l’entreprise. À cet égard, la France observe qu’en raison des revenus tirés de la DSP (environ [50-70] (60) % du chiffre d’affaires de la SNCM) et compte tenu de l’importance des coûts fixes et des difficultés de redéploiement des 6 navires utilisés sur la desserte Marseille-Corse, la DSP constitue un élément essentiel de la stratégie de l’entreprise et de sa viabilité.

(198)

Sur la limitation de l’aide au minimum, la France estime avoir limité au strict minimum les coûts de restructuration nécessaire pour permettre la réalisation de la restructuration. À cet effet, les autorités françaises rappellent que, comme la Commission l’a reconnu dans sa décision de 2003, l’entreprise a elle-même contribué suffisamment au plan de restructuration sur ses propres ressources en raison de la cession d’actifs pour un montant de 30,2 millions d'EUR. De surcroît, compte tenu d’autres cessions réalisées par la SNCM pour un montant de 12,2 millions d'EUR, le total de contributions propres de l’entreprise se chiffrerait à 42,38 millions d'EUR. La France estime que ce montant est largement supérieur au montant de contributions propres nécessaires pour approuver des aides à la restructuration, qui se chiffreraient finalement à 15,81 millions d'EUR dans la mesure où les autres mesures ne seraient pas des aides d’État.

5.2.4.   Sur les conditions imposées par décision de la Commission de 2003 et sur les éventuelles nouvelles contreparties

(199)

Contrairement aux allégations de la STIM et CFF, les autorités françaises affirment avoir respecté toutes les conditions imposées par la décision de 2003, auxquelles elles étaient tenues jusqu’à fin 2006, en particulier le maintien de la flotte à 11 navires et l’application de tarifs inférieurs à ceux des concurrents.

(200)

D’ailleurs, la France considère que, dans le cadre de la nouvelle décision finale, le niveau de contreparties à imposer à la SNCM devrait être adapté dans la mesure où le montant d’aides à la restructuration serait désormais de 15,81 millions d'EUR au lieu de 69,3 millions d'EUR.

(201)

À cet égard, la France conteste les observations de la STIM concernant la possibilité que la Commission impose à la SNCM comme contrepartie la cession de sa participation dans la CMN. La France conteste l’argument avancé par la STIM, selon lequel la définition d’actifs stratégiques aurait été remise en cause dans les lignes directrices de 2004 par rapport à celles de 1999.

(202)

S’agissant des mesures évoquées par CFF visant à réduire la présence de la SNCM sur le marché, les autorités françaises précisent que, comme l’aurait relevé, par ailleurs, la Commission dans sa décision de 2003 (considérant 87), les marchés concernés (France – Corse et Maghreb) ne sont pas en surcapacité et qu’une reconfiguration des lignes desservant la Corse sous et hors DSP remettrait en péril la viabilité de l’entreprise.

(203)

Quant à l’argument soulevé par CFF selon lequel la mise en œuvre au bénéfice de la SNCM des mesures décrites ci-dessus emporterait un risque sérieux de faire disparaître du marché France continentale-Corse son principal concurrent, à savoir CFF, les autorités françaises font valoir que, eu égard à la configuration actuelle de ce marché sur lequel CFF est désormais majoritaire, le maintien d’une structure concurrentielle dépend de l’autorisation du plan de restructuration de la SNCM et de la présence de cette dernière sur le marché en cause.

VI.   APPRÉCIATION DES MESURES

6.1.   EXISTENCE D’UNE AIDE AU SENS DE L’ARTICLE 107, PARAGRAPHE 1, DU TFUE

(204)

L’article 107, paragraphe 1, du TFUE prévoit que, «sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions».

(205)

La qualification d’une mesure nationale en tant qu’aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE suppose que les conditions cumulatives suivantes soient remplies, à savoir que: 1) la mesure en cause confère un avantage économique sélectif; 2) cet avantage soit financé au moyen de ressources d’État; 3) cet avantage fausse ou menace de fausser la concurrence et, enfin; 4) cet avantage affecte les échanges entre États membres (105).

(206)

La Commission constate que la SNCM a reçu des ressources étatiques pour un montant total de 274,54 millions d'EUR (106) via la CGMF détenue à 100 % par l’État.

(207)

La SNCM opérant dans le secteur du transport maritime, ouvert à la concurrence intra-européenne, l’avantage économique potentiel qu’elle a perçu est susceptible de fausser la concurrence et d’affecter les échanges entre les États membres.

(208)

La circonstance que le marché du cabotage avec les îles de la Méditerranée était, jusqu’au 1er janvier 1999, temporairement exempté de l’application du règlement (CEE) no 3577/92 ne permet pas d’exclure a priori que les subventions versées pour la desserte des liaisons de cabotage avec les îles de la Méditerranée dans le cadre de la DSP aient pu affecter les échanges entre États membres et fausser la concurrence.

(209)

En tout état de cause, même si des subventions octroyées pour la desserte de lignes en cabotage pouvaient ne pas affecter les échanges et ne pas comporter de distorsions de concurrence avant le 1er janvier 1999, la situation a changé depuis cette date, puisque, conformément au règlement no 3577/92, les activités de cabotage sont désormais ouvertes à l’ensemble des opérateurs de l’Union européenne. De surcroît, il est à souligner que la SNCM n’exerce pas uniquement du transport de cabotage mais opère également sur le marché du transport maritime international, qui a été libéralisé par le règlement (CEE) no 4055/86 du Conseil (107).

(210)

Dès lors, la Commission considère qu’en l’espèce les trois derniers critères de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE cités au considérant 205 de la présente décision sont remplis. Par conséquent, elle doit examiner successivement pour chaque mesure l’existence d’un avantage économique sélectif, conformément à l’arrêt du Tribunal du 11 septembre 2012.

6.1.1.   Cadre temporel de l’analyse

(211)

Conformément à la jurisprudence du Tribunal (108), la Commission doit, après l’annulation d’une de ses décisions, fonder sa nouvelle analyse exclusivement sur les informations dont elle disposait au moment de l’adoption de la décision annulée, en l’espèce au 8 juillet 2008.

(212)

Les événements postérieurs qui ont pu se produire depuis le 8 juillet 2008 ne doivent donc pas être pris en considération. Les changements ou évolutions du marché ou concernant la situation du bénéficiaire de l’aide, doivent être écartés de l’analyse. De même, la Commission ne prend pas en considération la période d’exécution du plan de restructuration postérieure au mois de juillet 2008 (109).

(213)

De même, la Commission n’a pas l’obligation de reprendre l’instruction de l’affaire, ni même de la compléter par de nouvelles expertises techniques (110). L’annulation d’un acte mettant un terme à une procédure administrative comprenant différentes phases n’entraîne pas nécessairement l’annulation de toute la procédure. Lorsque, comme en l’espèce, malgré des actes d’instruction permettant une analyse exhaustive de la compatibilité de l’aide, l’analyse effectuée par la Commission s’avère incomplète et entraîne ainsi l’illégalité de la décision, la procédure visant à remplacer cette décision peut être reprise sur la base des actes d’instruction déjà réalisés (111).

(214)

Par ailleurs, dès lors que la Commission doit fonder sa nouvelle analyse exclusivement sur des informations dont elle disposait en juillet 2008, informations sur lesquelles les autorités françaises et la SNCM ont déjà pris position, il n’y a pas lieu de les consulter à nouveau (112). Enfin, le droit des tiers intéressés de faire valoir leurs observations a été assuré par la publication au Journal officiel de la décision d’ouverture de la procédure (113) et aucune disposition du règlement (CE) no 659/1999 n’impose de leur offrir à nouveau cette possibilité lorsque le plan de restructuration initial est modifié en cours d’examen (114).

(215)

La présente décision est ainsi fondée, à titre principal, uniquement sur des éléments disponibles à la date du 8 juillet 2008. Toutefois, à titre subsidiaire, le Commission montrera que l’éventuelle prise en compte de la note des autorités françaises du 16 mai 2013 pour les faits évoqués avant la date du 8 juillet 2008 ainsi que des informations produites par la SNCM le 27 août 2013 ne serait pas de nature à modifier ses conclusions.

6.1.2.   La cession de la SNCM à un prix de vente négatif de 158 millions d'EUR

(216)

En l’espèce, la Commission doit examiner si l’apport en capital de l’État de 158 millions d'EUR préalable à la cession de la SNCM aux repreneurs privés, c’est-à-dire, in fine, le «prix de vente négatif» de l’entreprise pour un montant équivalent, est exempt d’éléments d’aide d’État.

(217)

Une procédure publique de sélection ouverte, transparente et non discriminatoire au terme de laquelle l’État cède l’entreprise après une recapitalisation préalable (pour un montant supérieur au prix de vente) ne permet pas nécessairement d’exclure la présence d’une aide, susceptible de bénéficier à la fois à l’entreprise privatisée et à son acheteur (115).

(218)

Afin de vérifier si une entreprise a bénéficié d’un avantage économique induit par un apport en capital de l’État, la Commission applique, en principe, le critère de l’«investisseur privé opérant dans une économie de marché» (ci-après «le critère de l’investisseur privé») pour autant que le bénéficiaire ne soit pas astreint au remboursement d’autres aides d’État et que cet apport soit susceptible d’être analysé au regard de ce critère. Le critère de l’investisseur privé est une émanation du principe d’égalité de traitement entre les secteurs public et privé qui découle de l’article 345 du TFUE. Selon ce principe, les capitaux mis à la disposition d’une entreprise par l’État, directement ou indirectement, dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, ne sauraient être qualifiés d’aides d’État (116).

(219)

À cette fin, la Commission peut notamment évaluer si le pourvoyeur des ressources s’est comporté comme un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle, et guidé par des perspectives de rentabilité à long terme des capitaux investis. La validité de cette approche a été reconnue par le juge de l’Union européenne dans le cadre de plusieurs affaires (117).

(220)

Selon une jurisprudence constante, un apport en capital réalisé par un investisseur public en l’absence de toute perspective de profit, même à long terme, constitue une aide d’État (118).

(221)

Le juge de l’Union européenne a également établi qu’un investisseur privé poursuivant une politique structurelle, globale ou sectorielle guidée par des perspectives de rentabilité à long terme ne saurait raisonnablement se permettre, après des années de pertes ininterrompues, de procéder à un apport en capital qui, en termes économiques, non seulement s’avère plus coûteux qu’une liquidation des actifs, mais est en outre lié à la vente de l’entreprise, ce qui lui enlève toute perspective de bénéfice, même à terme (119).

(222)

Plus précisément, dans son arrêt «Gröditzer», la Cour a jugé que, en vue de déterminer si la privatisation d’une entreprise pour un prix de vente négatif comportait des éléments d’aide d’État: «il y a lieu d’apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d’une taille qui puisse être comparée à celle des organismes gérant le secteur public aurait pu être amené à procéder à des apports de capitaux de cette importance dans le cadre de la vente de ladite entreprise ou aurait opté pour la liquidation de celle-ci» (120).

(223)

À la lumière de ce qui précède, afin de déterminer la nature d’aide de la mesure en cause, la Commission doit «évaluer si la solution choisie par l’État est, dans l’absolu, et par rapport à toute autre solution y compris celle de la non-intervention, la moins coûteuse, ce qui conduirait, si tel était le cas, à la conclusion que l’État a agi comme un investisseur privé» (121).

(224)

En d’autres termes, la Commission doit vérifier que le choix de procéder à un apport en capital de cette importance s’avère effectivement moins coûteux qu’une liquidation.

6.1.2.1.   Sur l’évaluation des coûts d’une liquidation

a)   Sur la prise en compte du versement des indemnités complémentaires de licenciement

(225)

Afin de quantifier le coût d’une liquidation pour l’actionnaire, les autorités françaises considèrent que les grands groupes d’entreprises ne sauraient actuellement, lorsqu’ils procèdent à des fermetures de sites ou à des liquidations de filiales, se désintéresser des conséquences sociales que de telles fermetures ou liquidations impliquent. Ainsi mettent-ils le plus souvent en œuvre des plans sociaux qui peuvent inclure des mesures de reconversion du personnel, des aides à la recherche d’emploi, des indemnités de licenciement, voire des actions sur le tissu économique local, qui vont au-delà de ce que la loi et les conventions collectives imposent.

(226)

Dans ce contexte, les autorités françaises ont retenu, sur la base du plan social de 2005, fondé lui-même sur le plan social de 2002, la fourchette de [90 000-100 000] (60) à [120 000-130 000] (60) EUR par salarié, soit un montant total entre [200-210] (60) millions d'EUR et [250-260] (60) millions d'EUR. Les autorités françaises précisent que la borne basse de la fourchette précitée appréhende le fait que le coût du plan social de référence est majoré en raison de la proportion très importante de salariés approchant l’âge de la retraite et dont le départ s’effectue dans des conditions particulièrement avantageuses. Par ailleurs, il est également tenu compte du fait que le contexte de liquidation de la société et de licenciement de l’ensemble du personnel n’est pas comparable à celui d’un ajustement des effectifs permettant une poursuite des activités comme c’est le cas du plan social de référence.

(227)

Enfin, les autorités françaises considèrent que, même en appliquant la grille d’analyse définie par le Tribunal dans son arrêt du 15 septembre 2012, la cession du contrôle de la SNCM pour un prix négatif de 158 millions d'EUR ne comportait pas d’éléments d’aides d’État. Elles considèrent en effet que la Commission dispose de tous les éléments nécessaires pour répondre aux critiques du Tribunal.

(228)

La Commission ne partage pas cette analyse en l’espèce.

(229)

Conformément à l’arrêt du Tribunal (122), le versement d’indemnités complémentaires de licenciement est en principe susceptible de constituer une pratique légitime et opportune, selon les circonstances de l’espèce, dans le but de favoriser un dialogue social apaisé et de maintenir l’image de marque d’une société ou d’un groupe de sociétés. En vertu du principe d’égalité de traitement entre les secteurs privé et public, la faculté de verser des indemnités complémentaires de licenciement est ainsi ouverte aux États membres en cas de liquidation d’une entreprise publique, quand bien même leurs obligations ne sauraient a priori dépasser le strict minimum légal et conventionnel. Cependant, le Tribunal précise que «[…] la prise en charge de ces coûts additionnels, en raison de préoccupations légitimes, ne saurait poursuivre un but exclusivement social, voire politique, sous peine de sortir du cadre du test de l’investisseur privé […]. En l’absence de toute rationalité économique, même à long terme, la prise en compte de coûts allant au-delà des strictes obligations légales et conventionnelles doit donc être considérée comme une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE» (123).

(230)

S’agissant de l’argument de l’image de marque de l’État, soulevé par les autorités françaises, le Tribunal considère que «[…] la protection de l’image de marque d’un État membre en tant qu’investisseur global dans l’économie de marché ne saurait constituer, hors de circonstances particulières et sans une motivation particulièrement convaincante, une justification suffisante pour démontrer la rationalité économique à long terme de coûts additionnels tels que des indemnités complémentaires de licenciement» (124). Or, de telles circonstances particulières font défaut en l’espèce.

(231)

La Commission constate que, à la suite de l’ouverture, les autorités françaises sont restées en défaut de définir les activités économiques de l’État français, notamment au niveau géographique et sectoriel, par rapport auxquelles il convient d’apprécier la rationalité économique à long terme des mesures en cause, même si elles ont finalement indiqué dans leur courrier du 16 mai 2013 que le comportement de l’État devait être comparé à celui d’un holding diversifié, cherchant à maximiser ses profits et à protéger son image de marque en tant qu’industriel global, notamment sur le plan de la gestion de son personnel.

(232)

S’agissant de l’image de marque de la CGMF, la Commission note que celle-ci n’avait aucun autre actif que la SNCM dans le secteur du transport maritime. Par conséquent, cet argument ne peut la concerner.

(233)

En ce qui concerne l’image de marque de l’État actionnaire, les autorités françaises ont avancé l’existence d’un risque de conflits sociaux élevé au sein des entreprises contrôlées par l’État non seulement à proximité géographique des activités de la SNCM mais aussi quel que soit le secteur et en particulier dans le secteur des transports. La Commission note d’une part que les autorités françaises n’ont pas démontré la réalité de ce risque de contagion à toutes les entreprises publiques et considère d’autre part qu’elles n’ont pas démontré non plus que le versement de ces indemnités complémentaires aurait permis d’empêcher l’apparition de nouvelles grèves. Enfin, la Commission est d’avis que la justification exclusivement sociale de la prise en charge par l’État de ces indemnités complémentaires est insuffisante pour écarter la présence d’aide d’État.

(234)

Par ailleurs, la Commission considère que les autorités françaises n’ont pas avancé d’éléments suffisamment objectifs et vérifiables à même de démontrer que le versement d’indemnités complémentaires de licenciement, dans des circonstances similaires, serait une pratique établie parmi les entrepreneurs privés du même secteur. La Commission relève en effet que le simple renvoi à un nombre limité de plans sociaux n’est pas susceptible de démontrer l’existence d’une pratique suffisamment établie dans des cas comparables à ceux de l’espèce, que les plans sociaux cités par les autorités françaises se rapportent à des plans de restructuration et non de liquidation et qu’un grand nombre d’entre eux concernent des secteurs qui a priori n’ont rien en commun avec les infrastructures de transport, tels que les cosmétiques (Yves Saint-Laurent Haute couture), l’agroalimentaire (Danone) ou l’électronique (Hewlett Packard). En outre, le tableau produit par les autorités françaises dans la note du 16 mai 2013, qui énumère une liste de plans sociaux, fait état de six plans postérieurs à la privatisation de la SNCM et qui ne peuvent donc pas être pris en compte pour justifier la prise en compte des indemnités complémentaires de licenciement.

(235)

La SNCM a produit une nouvelle liste de cinq plans sociaux dans la note du 27 août 2013. La Commission estime que cette liste ne permet pas d’établir que le versement d’indemnités complémentaires de licenciement, dans des circonstances similaires, serait une pratique établie parmi les entrepreneurs privés du même secteur. En effet, la Commission observe tout d’abord que sur les cinq plans cités, deux d’entre eux concernent la SNCM dont celui qui fait l’objet de la présente décision. Ces deux plans ne peuvent donc servir d’éléments objectifs de comparaison pour deux raisons: d’une part, la SNCM ne peut pas se prévaloir de ses propres pratiques antérieures dans ce domaine pour justifier à suffisance du caractère établi de cette pratique et d’autre part, le plan social de 2002 correspond à une période où la SNCM était toujours une entreprise publique alors que le Tribunal a posé comme critère de comparaison des entreprises privées du même secteur. À ce titre, la Commission note que le plan social du port de Marseille ne peut être retenu car en 2004, le port était un établissement public et non une entreprise privé. Enfin, s’agissant des deux derniers plans sociaux cités, ceux d’Air Lib et d’Eurostar, la Commission observe qu’il s’agit de plans de restructuration et non de plans de liquidation. À titre superfétatoire, la Commission observe que l’indemnité complémentaire moyenne de ces deux plans est inférieure de plus de la moitié à la moyenne des indemnités complémentaires retenue par la SNCM.

(236)

Enfin, la Commission note que les autorités françaises n’ont pas établi que le comportement de l’État français aurait été motivé par une probabilité raisonnable d’en tirer un profil matériel indirect, même à long terme, en évitant une dégradation supplémentaire du climat social au sein de l’entreprise, puisque précisément dans l’hypothèse d’une liquidation, l’entreprise devait disparaître. Quant à l’hypothèse d’un bénéfice plus large auprès des salariés d’autres entreprises publiques, elle est insuffisamment étayée. Il en va d’autant plus ainsi que, même dans le cadre d’un raisonnement d’investisseur global tel que celui avancé par les autorités françaises, l’octroi d’indemnités de départ très élevées aux salariés d’une société est susceptible de compliquer l’éventuelle restructuration d’autres sociétés appartenant au même investisseur. En outre, les autorités françaises n’ont pas quantifié le caractère significatif des éventuels coûts sociaux qu’elles invoquent comme justification du paiement des indemnités complémentaires de licenciement.

(237)

Les autorités françaises ont aussi avancé qu’une procédure de liquidation aurait été plus longue et potentiellement plus risquée pour l’État actionnaire, par rapport à la cession de la SNCM à un prix négatif. La Commission note que les autorités françaises n’ont fourni aucune preuve de ce risque et n’ont pas expliqué pourquoi la durée de la procédure de liquidation aurait été prise en compte par un actionnaire privé. Le cas Frucona Kosice (125) cité par les autorités françaises n’est pas pertinent dans le cas d’espèce car il concerne le test du créditeur privé. La durée d’une procédure de liquidation est pertinente pour analyser si l’État, dans la position d’un créditeur de Frucona Kosice, a maximalisé le remboursement de ses créances en acceptant un remboursement partiel mais immédiat ou s’il aurait dû attendre le résultat de liquidation de l’entreprise. La situation dans le cas d’espèce est différente car l’État est dans la position d’un actionnaire de la SNCM et non dans celle d’un créditeur privé. Étant donné qu’en cas de liquidation de la SNCM, les actifs seraient clairement insuffisants pour couvrir les passifs, l’État serait dans l’impossibilité de récupérer son apport. Par conséquent, invoquer la durée d’une procédure de liquidation n’est pas pertinent en l’espèce.

(238)

Les autorités françaises n’ont donc pas démontré que la prise en charge du coût de ces indemnités complémentaires par l’État agissant en tant qu’investisseur privé dans le scénario d’une liquidation était justifiée.

(239)

À ce stade de l’analyse, la Commission doit maintenant déterminer la valeur de liquidation de la SNCM hors indemnités complémentaires de licenciement.

b)   Sur la valeur de liquidation de la SNCM

(240)

Selon la méthode de l’actif net réévalué, l’insuffisance d’actifs est constatée lorsque la valeur économique des actifs réels (généralement supérieure à la valeur nette comptable) ne couvre pas la valeur économique des dettes réelles.

(241)

Aux fins de constater l’insuffisance d’actifs dans le cas d’espèce, la Commission, à l’aide de son expert (126), a vérifié comme expliqué ci-après qu’en date du 30 septembre 2005, la valeur de l’actif de la SNCM n’était pas suffisante pour désintéresser les créanciers privilégiés et les créanciers non privilégiés.

(242)

La Commission estime que la valorisation de l’actif net est une méthode couramment utilisée pour valoriser des sociétés dans le secteur du transport maritime. Elle juge par ailleurs que cette méthode est particulièrement adaptée à la situation de la SNCM dans la mesure où son actionnaire de référence n’a comme choix alternatif à la cession que la liquidation.

(243)

S’agissant d’autres méthodes de valorisation, en particulier de la méthode des cash flows libres opérationnels actualisés, la Commission estime que, compte tenu du fait qu’elle suppose la poursuite de l’activité de la société, ce qui ne serait pas le cas dans l’hypothèse envisagée d’une liquidation de la SNCM, elle n’est pas pertinente pour le cas d’espèce.

(244)

La Commission retient la date du 30 septembre 2005 comme date de référence pour l’évaluation de la SNCM, étant donné qu’il s’agit de la date à laquelle a été effectivement opéré le choix entre l’acceptation de l’offre de reprise ou la liquidation de la société, la sélection de BCP ayant été décidée le 27 septembre 2005.

i)   Sur la valeur de l’actif de la SNCM

(245)

La Commission observe en particulier que l’actionnaire de la SNCM a procédé, en collaboration avec le cabinet Ernst & Young, à une quantification du coût de liquidation de l’entreprise (le rapport CGMF précité) au 30 septembre 2005 qui a été contre-expertisée par Oddo Corporate Finance et le cabinet Paul Hastings. La Commission rappelle que le rapport Oddo-Hastings précité a valorisé l’actif de la SNCM à 190,3 millions d'EUR.

(246)

S’agissant de la valorisation de la flotte en détention propre (127), la valeur vénale brute des navires de la SNCM ayant été évaluée par le courtier spécialisé BRS à 224 millions d'EUR au 30 septembre 2005, la flotte de la SNCM a été valorisée par le rapport Oddo à 150,7 millions d'EUR après décote (128), commission de courtage (129) et aléa judiciaire (130).

Tableau 3

Scénarios de valorisation de l’actif de la SNCM au 30 septembre 2005

 

Valeur de l’actif

rapport Oddo

en millions d’EUR

Valeur de l’actif

expert Commission

en millions d’EUR

Immobilisation incorporelle

Immobilisations corporelles

 

 

Flotte en détention propre

150,7

151,7

Immeubles  (131)

11,2

11,2

Immobilisations financières  (132)

32,7

38,3

Actif immobilisé

194,6

201,2

Stocks

Avances et acomptes

Créances clients

0,8

0,8

Autres créances  (133)

9,4

9,4

Trésorerie nette

–14,5

Comptes de régularisation

Autres actifs

–4,3

10,20

Total actifs

190,3

211,4

Sources:

rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission.

(247)

À la lecture du tableau ci-dessus, la Commission constate que la flotte de navires constitue l’élément principal de la valorisation de l’actif de l’entreprise. À cet égard, l’expert de la Commission a jugé, après avoir effectué lorsque cela était possible une analyse comparée, que la décote appliquée à la valeur vénale brute des navires et l’aléa judiciaire étaient cohérents. Sur cette base, il a conclu ne pas avoir d’arguments pour rejeter l’évaluation de la valeur de la flotte établie par l’État.

(248)

S’agissant de la décote, la Commission estime que son niveau est cohérent avec les décotes observées lors de ventes de navires en cas de liquidation judiciaire. Selon l’expert de la Commission, la Régie des transports maritimes, société nationale belge exploitant la ligne Ostende-Ramsgate, a par exemple cédé deux car-ferries en 1997 avec des décotes estimées à 35 % et 45 %. Plus récemment, la société Festival Cruises a cédé trois navires de croisière avec une décote moyenne de 20 %. Les décotes observées dans des cas similaires sont donc de l’ordre des décotes appliquées par les autorités françaises dans le cas d’espèce.

(249)

Sur l’aléa judiciaire, aucune transaction comparable n’ayant eu lieu sur le marché, la Commission considère que les arguments justifiant l’application de l’aléa judiciaire sont cohérents avec l’étroitesse du marché pour des navires types, conçus pour une exploitation assez spécifique.

(250)

La Commission note par ailleurs que son expert indépendant a revu à la hausse la valorisation des immobilisations financières, en particulier celle de la participation de la SNCM dans la CMN (de 21,8 millions d'EUR à 28 millions d'EUR). À cet égard, compte tenu de l’offre de rachat de cette participation par STEF-TFE à 35,2 millions d'EUR transmise à la Commission dans le cadre de la présente instruction, la Commission considère que la valorisation de la participation de la SNCM dans la CMN à 28 millions d'EUR est raisonnable dans un contexte de liquidation de société.

(251)

S’agissant de la valorisation des autres postes de l’actif, l’expert de la Commission n’a pas émis d’objection particulière. Il n’a toutefois pas retenu le poste «trésorerie nette» à l’actif, celui-ci étant en déficit. La Commission estime qu’effectivement, ce poste doit être reclassé au passif de la SNCM.

(252)

Compte tenu des ajustements opérés, la Commission valorise l’actif de la SNCM à 211,4 millions d'EUR au 30 septembre 2005.

ii)   Sur l’évaluation du passif de la SNCM

(253)

La Commission constate que les autorités françaises quantifient le montant dû au titre des créances privilégiées à 153,8 millions d'EUR, et à 170,9 millions d'EUR le montant dû au titre des créances non privilégiées (hors indemnités complémentaires de licenciement).

(254)

S’agissant en particulier du passif social, les autorités françaises évaluent le coût du plan social conventionnel à [70-80] (60) millions d'EUR. Les coûts afférents au plan social conventionnel ont été établis sur une base individuelle tenant compte du type de contrat (contrat à durée indéterminée – CDI, et contrat à durée déterminée – CDD), des statuts et conventions collectives applicables (personnel navigant, sédentaire et État-major), de l’ancienneté, du classement et de la rémunération de chaque salarié. Ce montant couvre les indemnités de préavis ([20-30] (60) millions d'EUR), les indemnités de congés payés sur préavis ([0-10] (60) millions d'EUR), les indemnités conventionnelles de licenciement ([30-40] (60) millions d'EUR) et la contribution Delalande ([0-10] millions d'EUR) (134).

(255)

Le coût du plan social extraconventionnel est évalué par les autorités françaises à [30-40]* millions d'EUR. Ce plan social regroupe l’ensemble des mesures d’accompagnement liées aux obligations légales et réglementaires de la SNCM en matière de licenciement (135) et des coûts indirects liés au plan social conventionnel (136).

(256)

Le coût de résiliation des principaux contrats d’exploitation porte essentiellement sur la mise en jeu de la caution bancaire d’un montant de 7,4 millions d'EUR donnée en garantie de la bonne exécution par la SNCM de ses obligations de service public, à laquelle s’ajouterait la pénalité prévue à ladite convention, égale à 2 % de la compensation financière de référence d’un montant de 63 millions d'EUR pour l’année 2005, soit environ 1,2 million d'EUR en cas de défaillance du délégataire.

(257)

En ce qui concerne le passif net lié à la cession des navires en crédit-bail (137), les autorités françaises soulignent que, sur la base de certaines hypothèses (138), le produit net de cession est évalué, par le courtier spécialisé BRS, à 144,8 millions d'EUR au 30 septembre 2005 après décote, commission de courtage et coût financier de portage. Les économies d’impôt et dettes bancaires s’élevant à 193,5 millions d'EUR, il subsiste un solde de dettes bancaires relatives aux navires en crédit-bail à rembourser de 48,7 millions d'EUR.

Tableau 4

Scénarios de valorisation du passif de la SNCM au 30 septembre 2005

 

Valeur du passif

rapport Oddo

en millions d’EUR

Valeur du passif

expert Commission

en millions d’EUR

Dettes privilégiées dont:

 

 

Dettes sociales et fiscales

[20-30]*

[20-30]*

Dettes financières garanties par des actifs  (139)

15,9

15,9

Coût du plan social conventionnel

[70-80]*

[70-80]*

Coût des mutuelles des retraités  (140)

10,2

10,2

Coût du processus de liquidation

4,7

4,7

Pertes d’exploitation intercalaires  (141)

26,5

26,5

Désintéressement des créanciers privilégiés

153,8

153,8

Dettes chirographaires  (142)

69,7

84,2

Coût du plan social extraconventionnel

[30-40]*

[30-40]*

Coût de résiliation des principaux contrats d’exploitation

[10-20]*

[10-20]*

Coût additionnel lié à la cession des navires en crédit-bail

48,7

48,7

Désintéressement des créanciers non privilégiés

170,9

181,1

Sources:

rapport Oddo-Hastings, rapport de l’expert de la Commission.

(258)

La Commission note que le passif social constitue l’élément principal du passif de la SNCM. S’agissant du coût du plan social conventionnel, l’expert de la Commission a vérifié les formules de calcul de toutes les composantes du plan sur la base de sondages et n’a constaté ni anomalie ni erreur. Compte tenu de cette vérification, la Commission estime raisonnable le montant de [70-80] (60) millions d'EUR avancé par les autorités françaises au titre du plan social conventionnel.

(259)

S’agissant des pertes d’exploitation intercalaires, la Commission estime que l’estimation est prudente au regard de la législation, en particulier les articles L. 622-10 du code du commerce et 119-2 du décret no 85-1388 du 27 décembre 1985 en vertu desquels la SNCM serait susceptible d’être obligée par le tribunal de commerce compétent à poursuivre son exploitation pour une durée de deux mois renouvelable à la demande du ministère public en raison de ses obligations de service public.

(260)

Pour ce qui concerne les dettes chirographaires, l’expert de la Commission n’a pas émis d’objection particulière. Il a toutefois corrigé le montant de 69,7 millions d'EUR du montant de 14,5 millions d'EUR issu du retraitement du poste d’actif «Trésorerie nette». La Commission estime que ce retraitement est en ligne avec les modifications opérées dans la valorisation de l’actif de la SNCM.

(261)

S’agissant du coût du plan social extraconventionnel (hors indemnités complémentaires de licenciement), l’expert de la Commission estime que le chiffrage du coût des contentieux juridiques devrait être ramené à [0-5] (60) millions d'EUR au lieu des [0-10] (60) millions avancés par les autorités françaises. Sur ce point, si la Commission considère qu’il est certain que les organisations syndicales demanderaient une requalification des contrats CDD en contrats CDI (143), elle considère par contre que le chiffrage ne doit concerner que les salariés en CDD pour lesquels ce risque est quasiment certain (soit 150 CDD). Considérant un salaire mensuel brut de [2 000-2 500] (60) euros avec une indemnité de 9 mois de salaire pour les [100-120] (60) premiers CDD et 6 mois pour les [50-70] (60) suivants, le montant s’établit à [0-10] (60) millions d'EUR.

(262)

En ce qui concerne le passif net lié à la cession des navires en crédit-bail, la Commission considère que les hypothèses sous-jacentes au calcul sont justifiées notamment en raison du formalisme contractuel des GIE, qui limite toute substitution de tiers à la SNCM et conditionne les avantages fiscaux à l’exploitation des navires sous pavillon français. Il est par ailleurs également justifié que l’aléa judiciaire ne s’applique pas dans le cadre des navires exploités en crédit-bail car ces navires sont cédés par les banques créditrices des GIE. Dans ce contexte, la Commission estime qu’il est justifié qu’un coût financier de portage soit pris en compte entre le 30 septembre 2005 et la date de cession effective du navire.

(263)

Eu égard à ce qui précède, la Commission estime qu’au 30 septembre 2005, le passif privilégié de la SNCM s’élève à 153,8 millions d'EUR et le passif non privilégié de la SNCM à 181,1 millions d'EUR.

iii)   Sur la constatation de l’insuffisance d’actifs

(264)

À la lumière de ce qui précède, la Commission estime qu’en date du 30 septembre 2005, la valeur de l’actif de la SNCM (soit 211,4 millions d'EUR) n’était pas suffisante pour désintéresser les créanciers privilégiés (153,8 millions d'EUR) et les créanciers non privilégiés (181,1 millions d'EUR), soit la somme totale de 334,9 millions d'EUR. L’insuffisance d’actifs s’élève par conséquent à environ 123,5 millions d'EUR.

c)   Sur la prise en compte d’une action en comblement de passif

(265)

La Commission a également examiné l’argument des autorités françaises et de la SNCM, selon lequel l’État, en tant qu’actionnaire majoritaire, pourrait être appelé en comblement de passif en cas de liquidation de l’entreprise. L’une des parties intéressées, CFF, a contesté l’application de la jurisprudence nationale citée par les autorités françaises au cas d’espèce. En effet, CFF considère que s’agissant de la jurisprudence de la Cour d’appel de Rouen dans l’affaire Aspocomp Group Oyj, le juge a condamné la maison mère finlandaise au paiement d’indemnités aux salariés de sa filiale française mise en liquidation, car ces indemnités avaient été prévues par un plan social sur la base d’un accord d’entreprise validé par la société mère et n’avaient pas été finalement versées.

(266)

Les autorités françaises estiment que l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire l’État, au travers de la CGMF, s’élèverait entre 312,1 et 361 millions d'EUR au 30 septembre 2005. Toujours selon elles, cette estimation tient notamment compte du risque que l’État soit appelé en «comblement de passif» si un tribunal avait dû le considérer comme dirigeant de fait de la SNCM et du risque que l’État soit condamné à payer des indemnités complémentaires de licenciement au personnel licencié. Les autorités françaises estiment que ces risques se doivent d’être retenus dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(267)

Dès lors se pose la question de l’évaluation de l’ensemble des coûts réels qu’aurait probablement eu à supporter en tant qu’actionnaire la France en cas de liquidation judiciaire de la SNCM afin de déterminer si, au vu du risque d’être condamné à supporter ces coûts et au vu de l’ampleur de ceux-ci, un actionnaire privé avisé aurait préféré vendre immédiatement sa filiale à un prix négatif de 158 millions d'EUR plutôt que de courir ce risque.

(268)

En droit français, le mandataire liquidateur d’une société en liquidation judiciaire a la faculté d’introduire une action en responsabilité à l’encontre des anciens dirigeants de la société, dite «action en comblement de passif», en cas de résolution d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire ainsi qu’en cas de liquidation judiciaire (144).

(269)

L’introduction d’une action en comblement de passif à l’encontre des anciens dirigeants de la société en liquidation est motivée par la nécessité de reconstituer le patrimoine de la société, qui est l’une des missions confiées au mandataire liquidateur.

(270)

Dans plusieurs courriers à la Commission, les autorités françaises ont soutenu que l’hypothèse d’une condamnation de l’État par un juge national à combler le passif de l’entreprise qu’il dirige, constituait un scénario plus que plausible et que cette hypothèse se devait d’être retenue dans le calcul du coût effectif d’une éventuelle liquidation de la SNCM.

(271)

Dans ses écritures du 28 février 2008, la SNCM a fourni le rapport Baker & McKenzie évaluant les conséquences juridiques d’une action en comblement de passif opposable à l’État français. Ce rapport conclut qu’un tribunal de commerce saisi de cette affaire aurait retenu très probablement la responsabilité de l’État de ce chef et l’aurait condamné à prendre à sa charge l’intégralité des dettes sociales de la SNCM.

(272)

La législation pertinente prévoit que les dettes sociales de la société en liquidation peuvent être mises à la charge de ses anciens dirigeants de droit ou de fait sous réserve de la réunion cumulative de quatre conditions.

i)   La reconnaissance de l’État en tant que dirigeant de droit ou de fait de l’entreprise en liquidation judiciaire

(273)

Le rapport Baker & McKenzie, qui lui a été transmis par la SNCM, a fourni à la Commission une analyse aboutissant à la conclusion que […] (60). En substance, le rapport d’expertise susmentionné entend démontrer, conformément à la jurisprudence pertinente (145), que l’État avait commis […] (60) récurrente. En particulier, selon ce même rapport, l’État aurait pris […] (60) décisions. En outre, il apparaîtrait que les organes dirigeants […] (60) l’entreprise. Enfin, l’État se serait […] (60).

(274)

La Commission constate que les autorités françaises, dans leurs écritures du 28 mars 2008, n’ont pas émis de réserves […] (60). Dans leur courrier du 20 novembre 2006, les autorités françaises indiquent elles-mêmes que le juge […] (60) l’entreprise.

(275)

Toutefois, la Commission est d’avis que la déclaration des autorités françaises du 20 novembre 2006, rendue dans le cadre d’une procédure en matière d’aides d’État, ne peut pas en soi suffire pour établir à suffisance de droit si un juge aurait considéré les autorités nationales comme dirigeants de fait de l’entreprise bénéficiaire des mesures en question et, surtout, le degré de probabilité d’une telle éventualité.

(276)

Surtout, s’agissant des décisions controversées, il est loin d’être établi que la prise de décision ultime par l’État s’écarte notablement de la pratique suivie dans la gestion par l’État de ses participations. Même le rapport Baker & McKenzie rappelle l’existence d’une controverse récurrente sur le degré d’intervention souhaitable de l’État dans la gestion de ses participations et mentionne le rôle très étendu, dans le cas général, de […] (60).

(277)

Or les éléments de jurisprudence nationale avancés par l’État comme par la SNCM n’appréhendent pas directement ce type de situation. Les principaux cas appréhendés concernent des collectivités locales et l’arrêt BRGM du 6 février 2001 se rapporte à un établissement public industriel et commercial.

(278)

Il est en tout cas loin d’être établi que l’État agissant comme puissance publique serait considéré comme gestionnaire de fait.

ii)   L’existence d’une ou de plusieurs fautes de gestion dans le chef de l’État français, dirigeant de fait de l’entreprise en liquidation judiciaire

(279)

En l’espèce, la Commission relève que le rapport de l’expert de la SNCM a, sur la base d’une liste non exhaustive d’éléments factuels, mentionné une série d’éléments afin de démontrer que l’État, […] (60), aurait commis des fautes de gestion.

(280)

En particulier, il est indiqué que l’État français aurait commis des fautes en matière d’investissements liés […] (60) la SNCM. L’État aurait également commis de nombreuses fautes de gestion en matière de dimensionnement […] (60) SNCM.

(281)

Dans leur courrier du 30 avril 2007, les autorités françaises ont qualifié de très élevé le risque d’une condamnation de l’État en responsabilité compte tenu des critères de qualification de la faute de gestion au sens de l’article L. 651-2 du code de commerce.

(282)

À nouveau, la Commission considère que cette déclaration du 30 avril 2007, faite dans le cadre d’une procédure en matière d’aides d’État, ne peut pas suffire en soi pour établir à suffisance de droit si un juge aurait considéré que les autorités nationales ont commis les fautes alléguées et, surtout, le degré de probabilité d’une telle éventualité. Il en va d’autant plus ainsi que les autorités françaises contestent l’existence même de fautes de gestion, qui sont pourtant nécessaires à la mise en œuvre d’une action en comblement de passif.

(283)

De manière plus fondamentale, on observera que la SNCM comme les autorités françaises s’attachent dans une grande mesure à des décisions de gestion fort anciennes. Ainsi le rapport Baker & McKenzie se focalise-t-il sur […] (60) réalisés jusqu’en 2000. Il n’hésite pas à se référer à des rapports de la Cour des comptes pour les exercices 1993-1999. C’est vers le milieu des années 1990 que se situeraient les principales fautes de gestion alléguées. Or les créanciers de la SNCM étaient informés de ce mode de gestion au moment où ils lui consentaient un crédit. Ils acceptaient donc au moins implicitement le risque associé à ce type de gestion. Rien n’indique que la responsabilité de l’État puisse être utilement engagée au titre du comblement de passif en pareille situation.

(284)

Au surplus, ces prétendues fautes de gestion s’expliqueraient par des choix politiques effectués par les pouvoirs publics et rien n’indique non plus que ces choix politiques puissent être qualifiés d’erreurs de gestion au sens de la jurisprudence sur le comblement de passif.

(285)

Enfin, le rapport Baker & McKenzie manque de crédibilité notamment lorsqu’il estime que la situation de la SNCM serait imputable à des fautes de communication externe commises par l’État au sujet de la situation de la SNCM. Il ressort en effet seulement de ce rapport que l’État a évoqué une situation qui était déjà notoire. Le comportement de l’État ne s’apparente donc pas à une faute de gestion.

iii)   La constatation d’une insuffisance d’actifs

(286)

Dans le cas d’espèce, la Commission constate que le rapport Oddo-Hastings relève une insuffisance d’actifs à hauteur de 134,4 millions d'EUR au 30 septembre 2005, calculée comme la différence entre, d’une part, la valeur de l’actif de la SNCM (190,3 millions d'EUR) et, d’autre part, la valeur du passif de l’entreprise (dettes privilégiées et non privilégiées évaluées respectivement à 153,8 millions d'EUR et à 170,9 millions d'EUR).

(287)

La Commission a précédemment estimé l’insuffisance d’actifs de la SNCM à 123,5 millions d'EUR au 30 septembre 2005 (voir considérant 264).

iv)   L’existence d’un lien de causalité entre les fautes et l’insuffisance d’actifs constatée

(288)

Selon les autorités françaises, le dirigeant d’une personne morale peut être déclaré responsable, sur le fondement de l’article L. 624-3 du code de commerce, même si la faute de gestion qu’il a commise n’est que l’une des causes de l’insuffisance d’actifs, et peut être condamné à supporter en totalité ou en partie les dettes sociales, même si sa faute n’est à l’origine que d’une partie d’entre elles (146). Selon les autorités françaises, l’État français serait amené à supporter une part estimée entre 85 % et 100 % de l’insuffisance d’actifs constatée, soit une fourchette comprise entre 114,3 millions d'EUR et 134,4 millions d'EUR.

(289)

Cette analyse ne repose sur aucun fondement solide. En effet, dans toute la mesure où les fautes de gestion alléguées reposent sur des décisions prises au milieu des années 1990 et ayant engendré un surcoût immédiat pour le SNCM, il est très difficile d’y voir la cause d’une insuffisance d’actifs en 2005 surtout que de nombreux événements se sont produits entre les deux dates.

(290)

De plus, s’il semble en effet qu’il n’y ait pas de lien automatique entre le montant du dédommagement accordé au titre du comblement de passif et le montant de l’aggravation du passif engendrée par la faute de gestion du dirigeant (à la supposer établie), cela signifie aussi que le juge peut décider de fixer le montant de la condamnation du dirigeant à une somme très inférieure à l’insuffisance d’actif constatée (147).

(291)

Or, contrairement à ce que semblent croire les autorités françaises (et la SNCM), rien n’indique que les décisions ici en cause seraient considérées par le juge du comblement de passif comme des décisions tellement graves qu’elles justifieraient la mise à la charge des pouvoirs publics d’une partie importante du passif constaté. À suivre les allégations examinées, il s’agirait en effet de décisions à visées protectionnistes prises dans un cadre politique (qui plus est, pour la plupart dix ans auparavant) ou de décisions plus récentes prises afin d’épargner aux salariés l’obligation de réaliser des gains de productivité ou afin de tenter de rétablir un meilleur climat social.

v)   Détermination d’une prise en charge éventuelle des indemnités complémentaires de licenciement dans l’hypothèse d’une liquidation judiciaire de la SNCM

(292)

En sus de l’insuffisance d’actifs, selon les autorités françaises, compte tenu de la jurisprudence en la matière (148), un juge aurait certainement été amené à condamner l’État à prendre à sa charge les indemnités complémentaires de licenciement (soit entre [200-210] (60) et [250-260] (60) millions d'EUR). Selon les autorités françaises, l’ensemble des coûts réels qu’aurait eu à supporter en tant qu’actionnaire l’État s’élèverait à une fourchette comprise entre 212,1 millions d'EUR et 361 millions d'EUR.

(293)

Les autorités françaises précisent que, dans des jugements récents, des tribunaux français ont condamné le dirigeant de droit ou de fait à prendre en charge, en sus de l’insuffisance d’actifs, des indemnités complémentaires de licenciement calculées sur la base d’un plan social établi par l’entreprise avant sa mise en liquidation.

(294)

Les autorités françaises indiquent en particulier que, dans l’affaire Aspocomp, la société française Aspocomp SAS, filiale à 99 % de la société finlandaise Aspocomp Group Oyj, avait signé un accord d’entreprise le 18 janvier 2002 décrivant les conditions d’indemnisation d’un plan social concernant 210 salariés sur 550 au total. Cet accord décrivait notamment le montant des indemnités compensatrices et complémentaires ainsi que les aides au départ volontaire. Or, à la suite d’un changement de stratégie du groupe, la société mère Aspocomp Group Oyj a décidé le 21 février 2002 de ne plus financer sa filiale Aspocomp SAS et a ainsi provoqué le dépôt de bilan de cette dernière. Cette décision a empêché de facto la filiale d’honorer les engagements pris dans le cadre de l’accord d’entreprise et l’a conduite à licencier l’ensemble des autres salariés.

(295)

Dans ce contexte, l’arrêt de la cour d’appel de Rouen a confirmé le jugement du conseil des prud’hommes d’Évreux et ainsi condamné la société Aspocomp Group Oyj, qui contrôlait à 99 % sa filiale à verser: i) aux salariés concernés par l’accord d’entreprise, l’intégralité des indemnités compensatrices et complémentaires prévues dans ce seul accord d’entreprise, ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse; et ii) aux salariés licenciés dans le cadre du dépôt de bilan d’Aspocomp des indemnités équivalentes en considérant qu’en n’honorant pas les engagements pris, la société mère avait eu un comportement déloyal et une légèreté blâmable.

(296)

Bien que la France ait également invoqué un arrêt du 19 avril 2005 de la chambre commerciale de la Cour de cassation (149) au soutien de leur théorie, la Commission n’aperçoit dans cet arrêt aucun élément déterminant au regard de la présente controverse. La Cour de cassation se limite en effet à observer qu’une cour d’appel n’a pas caractérisé à suffisance de droit la confusion du patrimoine entre une société mère et sa filiale. En tout état de cause, la Commission constate que les faits relatifs à la jurisprudence Aspocomp ne sont pas les mêmes que ceux en l’espèce. En effet, en l’espèce, il n’y a pas eu un défaut de la CGMF d’honorer ses engagements de verser des indemnités de licenciement complémentaires.

(297)

On notera que tant la SNCM que les autorités françaises semblent accorder de l’importance au fait qu’un plan social […] (60).Il est extrêmement douteux que […] (60) puisse être considéré comme une faute de gestion susceptible d’engager la responsabilité de l’État auprès des salariés […] (60). À supposer même que, par extraordinaire, […] (60), l’État ait pu engager sa responsabilité à l’égard des salariés et leur donner un droit à une indemnité payée par l’État (150), l’octroi d’un tel droit constituerait en lui-même un avantage accordé à l’entreprise SNCM, et donc une aide d’État, pour des motifs analogues à ceux exposés ci-dessous à propos des mesures d’aides à la personne de 38,5 millions d'EUR. En effet, cette mesure était susceptible d’apaiser quelque peu le climat social dans l’entreprise.

vi)   Conclusion sur la prise en compte d’une action en comblement de passif

(298)

Il n’est pas établi à suffisance de droit que les autorités françaises auraient été, avec un degré suffisant de probabilité, condamnées par une juridiction nationale en dommages et intérêts au titre du comblement de passif, et encore moins qu’une telle condamnation aurait dépassé le prix négatif auquel la SNCM a été «vendue».

(299)

Il faut également tenir compte du fait que l’action de l’État, à supposer même qu’il ait été en l’espèce un mauvais gestionnaire, viserait à protéger les industries et services nationaux, y compris la SNCM et ses salariés, en évitant notamment de leur imposer une évolution qui aurait pu être mal acceptée socialement. En réalité, même si les personnes publiques, y compris l’État, peuvent être considérées dans certaines circonstances comme gestionnaires de fait d’une entreprise, rien n’indique que l’action en comblement de passif puisse être utilisée pour appréhender les choix politiques de l’État, particulièrement en de pareilles circonstances. On est ici très éloigné des circonstances de l’affaire Aspocomp qui ne concernait aucunement une telle problématique.

(300)

La Commission considère en toute hypothèse que les autorités françaises ne peuvent pas aujourd’hui se prévaloir des choix politiques du passé pour justifier des interventions publiques destinées à remédier aux effets des interventions antérieures. Au contraire, ces deux interventions, à savoir les ingérences du passé et les nouvelles interventions publiques, s’analysent comme deux distorsions de concurrence cumulatives. En effet, accepter la responsabilité de l’État en comblement de passif reviendrait à permettre à l’État de reconnaître avoir commis des fautes dans la gestion de l’entreprise pour justifier l’apport financier comme ne constituant pas une aide d’État, ce qui entraînerait une nouvelle distorsion de concurrence. L’État se prévaudrait alors de ses propres fautes de gestion pour justifier un apport financier supplémentaire, en contradiction avec le principe général selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre faute (151).

(301)

Il serait également parfaitement artificiel de dissocier le comportement de l’État «mauvais gestionnaire» (à supposer même le fait établi) et celui de l’État venant renflouer l’entreprise qu’il a mal gérée. Or la faute de gestion ne fait pas partie du comportement normal de l’investisseur privé avisé en économie de marché. Dès lors, le mécanisme de renflouement indissociable de cette faute ne relève pas non plus de ce dernier comportement.

(302)

L’acceptation de la théorie avancée par les autorités françaises et par la SNCM aurait en outre pour conséquence de permettre à l’État d’accorder une garantie à une entreprise en commettant sciemment une «faute de gestion», ce qui n’est guère acceptable au regard de la discipline des aides.

(303)

En l’espèce, les comportements qui engendreraient la responsabilité de l’État, selon la théorie défendue par la SNCM et par les autorités françaises, seraient en réalité des comportements de l’État agissant comme puissance publique et pas comme un actionnaire. Étant donné qu’un actionnaire privé avisé n’aurait pas pris des décisions basées sur ces considérations politiques et publiques, le risque de comblement de passif résultant de telles décisions ne peut pas être pris en compte pour un test de l’investisseur privé avisé en économie de marché (152).

(304)

Les autorités françaises rappellent que dans sa décision ABX du 7 décembre 2005, la Commission a envisagé de tenir compte du fait que «dans certains cas exceptionnels, certaines législations nationales prévoient la possibilité pour des tiers de se retourner contre les actionnaires d’une société liquidée, notamment si ces actionnaires peuvent être considérés des [supprimé dans le texte] et/ou ayant commis des fautes de gestion» (153).

(305)

Cependant, la Commission rappelle que la notion d’aide doit être appréciée de manière objective et note que la décision d’ouverture relative à la même affaire, précisait qu’ «[e]nfin, même dans l’hypothèse peu vraisemblable où toutes ces conditions exigées par le droit national pour engager la responsabilité […] seraient remplies, ceci n’exclurait pas pour autant le caractère d’aide d’État de ces interventions en faveur de la filiale» (154).

(306)

En l’espèce, la Commission considère que les autorités françaises n’ont pas suffisamment levé les doutes de la Commission sur le fait que l’actionnaire de la SNCM se serait trouvé exposé, d’une manière suffisamment certaine, à la mise en cause de sa responsabilité.

(307)

Dans ces conditions et ayant rejeté la prise en compte des indemnités complémentaires de licenciement (voir considérants 225 et suivants), la Commission conclut que les coûts de la liquidation de la SNCM auraient été nuls pour l’État. En effet, la Commission considère que l’État en tant qu’actionnaire ne peut se voir imputer les coûts de la liquidation car l’exposition de l’actionnaire est liée à sa valeur d’apport au capital social de l’entreprise.

6.1.2.2.   Conclusion

(308)

La Commission considère ainsi qu’un investisseur privé aurait privilégié la solution la moins coûteuse, c’est-à-dire la liquidation de la SNCM. La Commission conclut, par conséquent, que le prix négatif de 158 millions d'EUR constitue une aide d’État.

6.1.3.   L’apport en capital de la CGMF pour un montant de 8,75 millions d'EUR

(309)

Dans leurs observations consécutives à la décision d’ouverture, les autorités françaises considèrent que la recapitalisation de 8,75 millions d'EUR par l’État a été faite de manière concomitante à l’apport des investisseurs privés. Elles expliquent que la concomitance est renforcée par la part minoritaire prise par l’État alors que la majorité des fonds est apportée par le marché. En outre, elles considèrent que le taux de rémunération de l’apport de l’État, soit […] (60) % par an, constitue une rentabilité à long terme adéquate des capitaux investis pour un investisseur privé. Enfin, dans la note du 16 mai 2013, elles estiment également que les risques liés à la clause résolutoire sont contrebalancés par une option de rachat par les actionnaires privés.

(310)

L’apport de l’État doit à présent être comparé à l’apport des repreneurs privés, soit 26,25 millions d'EUR. Or, ainsi qu’il a été démontré dans la section 6.1.2, l’apport de l’État s’élève à 158 millions d'EUR auxquels doivent s’ajouter les 38,5 millions d’aides à la personne et les 15,81 millions versés au titre du plan de 2002 comme il sera démontré dans les sections 6.1.4 et 6.1.5.

(311)

En effet, l’ensemble des mesures de 2006 sont contenues dans le protocole d’accord. Les parties à ce protocole, la CGMF, BCP et VT, ont convenu de la réalisation de l’apport de 158 millions, de l’avance en compte courant de 38,5 millions et de l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR dans ce même document. En l’espèce, ces trois mesures constituent une seule et même opération, opération qui vise à privatiser la SNCM. Ainsi que le relève le Tribunal au point 125 de l’arrêt du 11 septembre 2012, «cet apport en capital [de 8,75 millions d'EUR] prend place dans le cadre d’un protocole global de vente, issu d’une négociation unique, où les apports des repreneurs sont la contrepartie d’engagements lourds, sous différentes formes, de l’État français». Ce sont donc les trois mesures précitées qui doivent être considérées globalement comme un apport du fonds à la SNCM par l’État et comparées à l’apport des investisseurs privés afin d’apprécier le caractère significatif ou non de leur intervention.

(312)

À la lumière de ce qui précède, la Commission conclut que l’apport des actionnaires privés, soit 10,6 % de la totalité de l’apport, ne peut être considéré comme significatif.

(313)

Ainsi qu’il a déjà été constaté au considérant 311, les trois mesures en l’espèce constituent une seule opération de privatisation. La Commission considère que les apports en capitaux public et privés sont dès lors supposés concomitants.

(314)

Enfin en ce qui concerne le critère des apports réalisés dans des conditions comparables, la Commission note tout d’abord que les parties intéressées, CCF et la STIM, ont mis en doute le caractère significatif de l’intervention privée et surtout la présence de conditions comparables entre l’investissement public et les investisseurs privés, en raison de la présence d’une clause résolutoire.

(315)

La Commission considère que les conditions de cette augmentation de capital démontrent à elles seules que les risques encourus par les investisseurs privés et publics ne sont pas identiques. La présence et les conditions de la clause résolutoire de cession démontrent à elles seules que le sort respectif des investisseurs privés et de l’investisseur public en termes de risques n’est pas le même en cas de réalisation des conditions énumérées par la clause. Selon le protocole d’accord, les investisseurs privés ont la faculté de se retirer et de récupérer leur mise en cas de décision négative de la Commission, du Tribunal ou de la Cour, ou de non-renouvellement de la délégation de service public. Cette dernière partie de la clause résolutoire est d’autant plus pénalisante pour l’État qu’elle concerne le cœur d’activité de la SNCM. La SNCM est en effet l’opérateur historique reliant la Corse au continent français. Schématiquement, les deux tiers de son activité sont réalisés entre Marseille et la Corse dans le cadre de la délégation de service public. Les investisseurs privés sont donc protégés par la clause résolutoire contre le risque commercial pour la majorité des activités de la SNCM. Ce risque est en effet supporté seulement par l’État.

(316)

Or l’exercice de la clause résolutoire précitée entraînerait d’une part une obligation de remboursement de l’ensemble des apports des repreneurs par la SNCM au profit de ces investisseurs privés. D’autre part, la CGMF se retrouverait à nouveau détentrice de 100 % du capital de la SNCM, alors que le risque de liquidation et donc de la perte d’une partie significative des investissements publics aura augmenté de manière substantielle.

(317)

En ce qui concerne la promesse d’achat par les actionnaires privés, elle ne peut être activée par la CGMF en cas de redressement judiciaire ou de liquidation de la SNCM. Cela confirme qu’en cas de difficultés, cette option ne peut être activée et les risques reposent essentiellement sur la CGMF, donc l’État. La Commission considère donc que cette promesse d’achat ne peut être analysée comme la contrepartie de la clause résolutoire.

(318)

Par ailleurs, la Commission ne peut retenir l’argument des autorités françaises selon lequel le protocole d’accord contenait une série de garanties afin de protéger l’investissement de l’État. En effet, les obligations imposées aux repreneurs ne constituent pas des risques ou des contraintes supplémentaires mis à la charge des repreneurs qui les placeraient dans une situation comparable à celle de la CGMF. Elles visent uniquement à s’assurer que pendant la période au cours de laquelle la clause résolutoire peut être actionnée par les repreneurs privés, ces derniers n’apportent aucune modification juridique à la SNCM et ne réalisent que des actes nécessaires à la mise en œuvre du plan d’affaires et du pacte social.

(319)

En outre, comme le souligne le Tribunal dans l’arrêt du 11 septembre 2012, la seule analyse de la rentabilité escomptée ne suffit pas à conclure que l’investissement a été fait par l’État aux conditions de marché, dans la mesure où les risques ne sont pas partagés de façon équitable entre actionnaires public et privés.

(320)

Même si la condition de l’investissement pari passu n’est pas remplie, la mesure peut toujours être conforme au principe de l’investisseur privé en économie de marché. Il faudrait alors démontrer que le comportement de l’État était celui qu’aurait adopté un investisseur privé avisé dans une situation similaire, par exemple par les analyses ex ante de la rentabilité de l’investissement. Cependant, les autorités françaises n’ont fourni aucune preuve d’une telle analyse ex ante. Les autorités françaises ont seulement considéré ex post dans leurs observations que le taux de rémunération fixe de […] (60) % serait adéquat pour un investisseur privé, en le comparant à des taux de rendement d’une OAT (obligation assimilable du Trésor) émise par l’État dont le rendement était à l’époque entre 3,72 et 3,95 %. Mais elles n’ont fourni aucune analyse démontrant que le taux de 10 % aurait été acceptable pour un investisseur privé vu les risques portés par l’État, par exemple celui de la clause résolutoire et ceux liés à la situation de l’entreprise.

(321)

Surtout, le taux de […] (60) % s’applique seulement à l’apport en capital à hauteur de 8,75 millions d'EUR mais une telle analyse aurait dû prendre en compte la totalité de l’apport par l’État accepté dans le protocole. Étant donné qu’il n’y a aucun rendement associé au prix négatif de 158 millions d'EUR ou à l’avance en compte courant de 38,5 millions d'EUR, le taux de rendement pour la totalité de l’investissement de l’État dans la SNCM au moment de la privatisation de 2006 aurait été clairement inférieur au taux de rendement d’une OAT. En raison des risques associés, un investisseur privé en économie de marché n’aurait pas accepté un tel taux.

(322)

À la lumière de ce qui précède, la Commission considère que les critères établis par la jurisprudence pour exclure d’emblée la nature d’aide de la mesure en cause ne sont pas remplis. Partant, la Commission considère que l’apport en capital de l’État à hauteur de 8,75 millions d'EUR confère un avantage économique à la SNCM en ce que cet apport a été réalisé parallèlement à un apport de capitaux privés dans des conditions non comparables au sens de la jurisprudence de l’Union. La mesure en cause constitue par conséquent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE.

6.1.4.   Les mesures d’aides à la personne (38,5 millions d'EUR)

(323)

Les autorités françaises considèrent que ce financement constitue une aide à la personne qui ne bénéficie pas à l’entreprise et qui ne serait donc pas une aide d’État. Les parties intéressées, CCF et la STIM, ont contesté la qualification de cette mesure en tant qu’aide à la personne parce qu’elles considèrent notamment que cette mesure peut générer des effets indirects positifs pour la SNCM.

(324)

La Commission considère que le fait que les bénéficiaires directs de l’aide à la personne soient des salariés ne suffit pas à démontrer une absence d’aide en faveur de leur employeur. Le Tribunal précise en effet ce qui suit: «[…] le fait que les bénéficiaires directs de l’aide à la personne soient des employés ne peut suffire à démontrer une absence d’aide en faveur de leur employeur» (155).

(325)

Comme l’indique également le Tribunal au point 138 de l’arrêt du 11 septembre 2012, «[a]fin d’examiner si ces aides à la personne constituent une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, il convient […] de déterminer si la SNCM perçoit un avantage économique indirect qui lui permet de ne pas avoir à supporter des coûts qui auraient normalement dû grever ses ressources financières propres et donc empêche que les forces du marché ne produisent leurs conséquences normales».

(326)

Par ailleurs, la Commission note que selon le protocole d’accord, cette mesure est un engagement de l’État envers les partenaires privés à financer «la fraction du coût des éventuels départs volontaires ou ruptures des contrats de travail (quelle qu’en soit la nature), dite de «surgénérosité», qui viendraient en complément de sommes de toute nature devant être payées par l’employeur […]». Ainsi que le relève le Tribunal au point 145 de l’arrêt du 11 septembre 2012, la présence de ces aides à la personne dans le protocole «de vente» tend à montrer qu’elles créent un avantage. Les parties y ont recouru parce qu’elles pouvaient en retirer un certain bénéfice.

(327)

Ces aides sont par conséquent de nature à créer un avantage économique en faveur de la SNCM en lui permettant de ne pas supporter l’intégralité du coût du départ éventuel et futur de certains salariés. Si une entreprise est déchargée par l’État de tels coûts, ceci constitue donc un avantage pour elle La Commission rappelle que ces mesures sociales complémentaires visent à faciliter l’exécution des plans de licenciement qui sont nécessaires pour atteindre les objectifs de l’entreprise et qu’elles ne découlent pas d’une obligation légale. En l’espèce, la fréquence des mouvements sociaux au sein de la SNCM démontre que la réalisation d’un plan social dans cette entreprise entraîne quasi systématiquement l’apparition de grèves et autres actions syndicales. Ces mesures sociales complémentaires constituent sans aucun doute un avantage pour la SNCM.

(328)

Par conséquent, la Commission considère que cette mesure constitue une aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE.

6.1.5.   Le solde de 15,81 millions d'EUR versé au titre des aides à la restructuration de 2002

(329)

Les mesures de 2006 apportent une augmentation substantielle du montant d’aide à la restructuration examinée au titre du plan de 2002 dont le montant s’élève à 69,29 millions d'EUR et s’analyse comme une modification du plan de restructuration et de son coût. En effet, lorsque la privatisation a été envisagée, le plan de restructuration était toujours en cours. Mais ses objectifs de retour à la viabilité n’étaient pas atteints par la SNCM. Le Tribunal a précisé qu’«[à] cet égard, il convient en effet de relever que la décision de 2006 est explicite sur le fait que, en présence d’éléments d’aide à la restructuration dans le plan de 2006, ces derniers devraient être analysés conjointement avec l’aide à la restructuration du plan de 2002 […]» (156). Le Tribunal souligne que cette analyse a été faite «à juste titre». Le montant de 69,29 millions d'EUR correspond à la somme des 66 millions d'EUR accordés en 2002 au titre de la première tranche du plan de restructuration et des 3,29 millions d'EUR d’aides accordées en 2005 au titre de la deuxième tranche.

(330)

Sur ce montant d’aides accordées au titre du plan de restructuration de 2002, 53,4 millions d'EUR concernent en réalité la délégation de service public. La légalité de cette aide ayant été confirmée par l’arrêt du Tribunal du 11 septembre 2012, la Commission doit examiner conjointement la compatibilité de l’aide à la restructuration proprement dite, soit 15,81 millions d'EUR accordés lors de la restructuration de 2002 et la compatibilité de l’ensemble des mesures de 2006, à la lumière des lignes directrices de 2004.

6.2.   EXAMEN DE LA COMPATIBILITÉ DES AIDES À LA RESTRUCTURATION VERSÉES EN 2002 ET 2006

6.2.1.   Lignes directrices à considérer

(331)

La Commission note que le plan de restructuration de 2002 a été examiné dans le cadre des lignes directrices de 1999. Elle note également que les nouvelles mesures de 2006 intégrant le plan de 2002 sont postérieures à l’entrée en vigueur des nouvelles lignes directrices de 2004 et ont été mises en œuvre avant que la Commission ne les autorise.

(332)

Conformément aux règles de transition prévues par les lignes directrices de 2004 (157), celles-ci s’appliquent, s’agissant d’une aide illégale qui a été pour partie octroyée après leur entrée en vigueur.

(333)

Par conséquent, dès lors que les mesures de 2006 constituent des aides, elles s’inscrivent dans le cadre des opérations de restructuration déclenchées en 2002 et s’analysent conjointement avec ces dernières. La compatibilité de l’ensemble de ces aides sera donc analysée dans le cadre des lignes directrices de 2004.

6.2.2.   Caractère d’entreprise en difficulté

(334)

Pour être éligible à une aide à la restructuration, l’entreprise doit pouvoir être qualifiée d’entreprise en difficulté au sens des lignes directrices.

(335)

En l’espèce, la Commission rappelle qu’elle a constaté que cette condition était remplie tant dans la décision de la Commission du 17 juillet 2002 concernant l’aide au sauvetage en faveur de la SNCM (158) que dans celle du 19 août 2002 ouvrant la procédure formelle d’investigation à l’encontre du projet de recapitalisation, sur la base des comptes annuels de la SNCM pour l’année 2001.

(336)

Aux fins de la présente décision, la Commission a vérifié que la SNCM remplissait cette condition sur la base des comptes annuels de l’entreprise pour l’année 2002. Ainsi, les capitaux propres hors provisions réglementées (159) restent toujours négatifs à - 26,5 millions d'EUR en 2002, après - 30,7 millions d'EUR en 2001. Un tel niveau traduit la disparition de plus de la moitié du capital social de l’entreprise, capital social dont plus d’un quart a disparu au cours des douze derniers mois qui ont suivi la notification, vérifiant ainsi la condition décrite au point 5 a) des lignes directrices.

(337)

Outre l’évolution du capital social, la Commission constate entre autres que:

entre 2001 et 2002, le résultat courant avant impôts est passé de - 5,1 millions d'EUR en 2001 à - 5,8 millions d'EUR en 2002, les pertes nettes en 2002 n’ayant pu être amoindries que grâce à la vente de certains navires,

la capacité d’autofinancement de la SNCM qui atteignait 39,2 millions d'EUR fin 2001, est ramenée à 35,7 millions d'EUR à la fin 2002,

les dettes financières nettes hors crédits-baux sont passées de 135,8 millions d'EUR à 144,8 millions d'EUR entre 2000 et 2002,

les charges financières (intérêts et charges assimilées) sont passées de 7,0 millions d'EUR en 2000 à 9,503 millions d'EUR en 2002.

(338)

Les autorités françaises ont confirmé par ailleurs à la Commission que les banques refusaient désormais de prêter de l’argent à la SNCM en raison de son endettement, en dépit du fait que celle-ci ait proposé d’apporter en garantie ses derniers navires libres d’hypothèques ou d’autres servitudes similaires.

(339)

Enfin, le contrat de DSP ne modifiait en rien cette analyse. Si ce contrat devait certes permettre à la SNCM, conjointement avec la réussite du plan de restructuration, d’atteindre à terme des résultats d’exploitation positifs, il n’en demeure pas moins que son manque aigu de fonds propres, son endettement croissant et le coût des mesures opérationnelles du plan de restructuration devraient conduire la SNCM, dans un certain laps de temps, à la cessation de paiement.

(340)

La période de restructuration s’étendant de 2002 à 2006, il est nécessaire de vérifier que la SNCM remplit cette condition durant cette période, et notamment au moment où ont été décidés de nouveaux apports de fonds publics.

(341)

La décision de 2003 a observé que la SNCM remplissait ce critère sur les exercices 2001 et 2002 (160).

(342)

Il convient à présent de vérifier que la SNCM remplit toujours cette condition sur les exercices 2003 à 2005, soit le dernier exercice comptable complet avant la mise en œuvre des nouvelles mesures de 2006 concernant la privatisation de la SNCM.

(343)

Ainsi qu’il a été déjà dit aux considérants 73 et suivants, la situation de la SNCM s’est fortement dégradée en 2004 et 2005. Ainsi, le résultat courant de la SNCM s’est établi à - 32,6 millions d'EUR en 2004 et - 25,8 millions d'EUR en 2005. Le résultat net, quant à lui, était de - 29,7 millions d'EUR en 2004 et de - 28,8 millions d'EUR en 2005. Les capitaux propres en 2005 (- 1,7 million) ont enregistré une baisse de 25,5 millions par rapport à 2004. Cette baisse correspond à la disparition de plus de la moitié de son capital social, plus du quart de ce capital ayant été perdu au cours des douze derniers mois, vérifiant ainsi la condition suffisante décrite au point 10 a) des lignes directrices de 2004.

(344)

À la lumière de ce qui précède, la Commission considère que la SNCM peut être qualifiée d’entreprise en difficulté au sens des lignes directrices de 2004.

6.2.2.1.   Contribution propre

(345)

En vertu du point 43 des lignes directrices, «[l]e montant et l’intensité de l’aide doivent être limités au strict minimum des coûts de restructuration nécessaire pour permettre la réalisation de la restructuration en fonction des disponibilités financières de l’entreprise, de ses actionnaires ou du groupe dont elle fait partie. Cette appréciation tiendra compte de toute aide au sauvetage accordée précédemment. Les bénéficiaires de l’aide doivent contribuer de manière importante au plan de restructuration sur leurs propres ressources, y compris par la vente d’actifs qui ne sont pas indispensables à la survie de l’entreprise, ou par un financement extérieur obtenu aux conditions du marché. Cette contribution est un signe indiquant que les marchés croient à la faisabilité du retour à la viabilité. Elle doit être réelle, c’est-à-dire effective, à l’exclusion de tous bénéfices potentiels, tels que du cash flow, et doit être la plus élevée possible».

(346)

Le point 44 des lignes directrices précise que «[l]a Commission considérera normalement que les contributions suivantes à la restructuration seront appropriées: au moins 25 % dans le cas des petites entreprises, au moins 40 % pour les entreprises de taille moyenne et au moins 50 % pour les grandes entreprises. Dans des circonstances exceptionnelles et dans des situations de difficulté particulière qui doivent être démontrées par l’État membre, la Commission pourra accepter une contribution propre réelle moins élevée».

(347)

Le point 7 des lignes directrices précise également qu’«il convient de réaffirmer plus clairement le principe que [la contribution substantielle du bénéficiaire à la restructuration] doit être réelle et exempte d’aide. La contribution du bénéficiaire vise un double objectif: d’une part, elle servira à démontrer que les marchés (propriétaires, créanciers) croient à la faisabilité du retour à la viabilité dans un délai raisonnable. D’autre part, elle garantira que l’aide à la restructuration est limitée au minimum nécessaire pour rétablir la viabilité tout en limitant les distorsions de concurrence. […]».

(348)

La jurisprudence a également souligné que la contribution propre doit indiquer que les marchés croient à la faisabilité du retour à la viabilité (161). La Commission souligne que cette exigence est particulièrement pertinente s’agissant de la SNCM en raison de sa situation depuis 2002. En effet, la Commission rappelle que les mesures initiales de restructuration de 2002 n’ont pas apporté les résultats escomptés. Certaines d’entre elles soit n’ont pas été respectées, soit n’ont pas été atteintes (voir considérant 351). La SNCM n’ayant pas été en mesure de mettre en œuvre intégralement ces premières mesures de restructuration, à partir de 2004, sa situation économique et financière a continué à se dégrader (voir considérants 73 à 75).

(349)

Les coûts de restructuration s’élevaient à 46 millions d'EUR en 2002. S’agissant des mesures de 2006, la Commission considère que le montant des coûts de restructuration correspondait au montant de l’aide (162), soit 202,55 millions d'EUR auxquels doit être ajoutée l’augmentation de capital des partenaires privés, soit 26,25 millions d'EUR, soit au total 274,8 millions d'EUR. La contribution propre se compose de 42,385 millions d'EUR de cession nette d’actifs et de 26,25 millions d'EUR d’augmentation de capital des partenaires privés, soit une contribution propre totale de 68,635 millions d'EUR. Par conséquent, en tenant compte des nouvelles mesures de 2006, la contribution propre atteint 25 % alors que les lignes directrices exigent une contribution d’au moins 50 %. La Commission précise que les autorités françaises n’ont pas invoqué de circonstances exceptionnelles et de situations de difficultés particulières pour que la Commission accepte une contribution propre réelle moins élevée. En tout état de cause, la Commission considère qu’il n’y a pas en l’espèce de circonstances exceptionnelles justifiant une baisse du niveau de la contribution propre exigée par les lignes directrices de 2004.

(350)

La Commission considère donc que la contribution propre de la SNCM à l’effort de restructuration demeure insuffisante au regard des dispositions des lignes directrices.

6.2.2.2.   Retour à la viabilité à long terme

(351)

Dans la décision d’ouverture, la Commission avait exprimé des doutes quant au retour à la viabilité à long terme de la SNCM, au regard notamment des faits suivants:

la SNCM n’envisageait pas la suppression de toutes ses activités déficitaires,

la réussite du plan de restructuration était étroitement liée à l’attribution de la DSP entre Marseille et la Corse pour la période comprise entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2012,

les prévisions de réduction du personnel navigant prévue par le plan de 2002 n’ont pas été respectées et l’augmentation de la productivité de 10 % n’a pas été atteinte,

le caractère insuffisant de la réduction de 400 emplois équivalents temps plein et des mesures de productivité prévues par le plan de 2006 en raison des écarts avec le plan de 2002.

(352)

Les autorités françaises ont répondu que le changement d’actionnaires et la mise en œuvre des trois mesures du plan de privatisation allaient permettre à la SNCM de développer son activité sur des bases saines et que le caractère déficitaire de certains pans de son activité n’avait donc rien d’irrémédiable.

(353)

La Commission constate que les mesures prévues par le plan de restructuration de 2002 n’ont pu être menées à terme, entraînant une forte dégradation des résultats de la société en 2004 et 2005. En 2006, l’augmentation du chiffre d’affaires de 20 millions d'EUR et l’augmentation de la compensation de service public de 9 millions d'EUR n’ont pas permis un rétablissement du résultat d’exploitation car la hausse du prix du combustible et l’augmentation des charges d’exploitation ont été très largement supérieures aux prévisions. L’expert de la Commission a constaté que l’exécution du plan d’affaires des repreneurs a été fortement ralentie par plusieurs événements (163) et en conclut que les pertes cumulées risquaient d’être beaucoup plus importantes que celles prévues initialement pour 2007.

(354)

Par conséquent, la Commission considère que les réponses des autorités françaises n’ont pas supprimé tous ses doutes. En effet, lier le retour à la viabilité à l’attribution de la délégation de service public 2007-2013 et à la mise en place des trois mesures du plan de privatisation dont la légalité et la compatibilité avec le marché intérieur n’avaient pas été confirmées, apparaît hasardeux. La crédibilité d’un plan de retour à la viabilité à long terme d’une entreprise suppose à tout le moins que les hypothèses retenues soient réalistes. Or, en l’espèce, la réussite du plan s’appuie quasi exclusivement sur la réalisation de deux événements hypothétiques que la SNCM ne maîtrise pas. Par ailleurs, étant donné la situation financière de la SNCM de l’époque, la Commission s’interroge sur ses capacités à financer le renouvellement nécessaire de certains de ses ferries. Or ce renouvellement est présenté par les autorités françaises comme permettant d’atteindre les objectifs de retour à la viabilité.

(355)

La Commission considère donc que la condition de retour à la viabilité à long terme exigée par les lignes directrices n’est pas remplie.

6.2.2.3.   Prévention de toute distorsion excessive de la concurrence (mesures compensatoires)

(356)

La décision annulée de 2008 mentionnait quatre mesures compensatoires:

la fermeture de la filiale Corsica Marittima (82 000 passagers en 2000), qui était chargée des liaisons entre l’Italie et la Corse, et donc le retrait du groupe SNCM du marché afférent aux dessertes entre l’Italie et la Corse,

le quasi-retrait de la SNCM des liaisons entre Toulon et la Corse, marché qui représentait en 2002 pas moins de 460 000 passagers,

la limitation du nombre total de places offertes et du nombre de rotations opérées chaque année à compter de 2003 par la SNCM, notamment sur la desserte entre Nice et la Corse,

la vente de quatre navires.

(357)

La Commission souhaite rappeler que ces mesures avaient été proposées par les autorités françaises par rapport au montant de 15,81 millions d'EUR d’aide, montant correspondant à l’aide à la restructuration octroyée en 2002.

(358)

À la suite de l’annulation de la décision de 2008 par l’arrêt du 11 septembre 2012, le montant total de l’aide s’élève désormais à plus de 210 millions d'EUR. La Commission considère que ses doutes n’ont pas pu être levés pour les raisons suivantes.

(359)

S’agissant de la vente des quatre navires prévue lors de la restructuration de 2002, la Commission note que ces cessions ont été partiellement compensées par la livraison du Danielle Casanova en juin 2002 et des cargos mixtes Paglia Orba et Pascal Paoli, en 2003.

(360)

S’agissant de la fermeture de Corsica Marittima, le point 40 des lignes directrices précise notamment que «[l]es radiations comptables et la fermeture d’activités déficitaires qui seraient en tout état de cause nécessaires pour rétablir la viabilité ne sont pas considérées comme une réduction de la capacité ou de la présence sur le marché aux fins de l’appréciation des contreparties». Par conséquent, la fermeture de Corsica Marittima, qui a été déficitaire depuis sa création en 1990, ne peut être qualifiée de mesure compensatoire, mais plutôt de mesure participant au retour de la viabilité à long terme.

(361)

Ce même raisonnement s’applique aussi pour la desserte entre la Corse et Nice. La Commission note que la SNCM dispose d’une part de marché minoritaire, Corsica Ferries France détenant 70 % des parts de marché (164). Selon le rapport Stephens, le trafic au départ de Nice et en particulier pendant la période estivale fait l’objet d’une forte demande. Par ailleurs, une demande en dehors de la saison estivale existe également sur cette ligne. Cependant, le résultat courant sur cette ligne était déficitaire entre 2004 et 2007. Par conséquent, cette mesure ne peut être qualifiée de mesure compensatoire mais plutôt de mesure contribuant au retour à la viabilité à long terme.

(362)

La Commission note également que le trafic passager a considérablement augmenté entre la Corse et le port de Toulon, passant de moins de 200 000 passagers par an en 1999 à presque 1 million en 2007 (165). Par conséquent, le quasi-retrait de la SNCM de cette desserte pourrait être qualifié de mesure compensatoire. La Commission note cependant que la ligne Toulon-Corse est la ligne la moins importante de la SNCM en termes de passagers.

(363)

Néanmoins, même si cette mesure était qualifiée de mesure compensatoire, la Commission considère que celle-ci serait largement insuffisante. En effet, le point 40 des lignes directrices énonce que «(l)es contreparties doivent être en proportion des effets de distorsion causés par l’aide […]». Comme déjà rappelé aux considérants 341 et 342, la Commission constate que ces mesures avaient été proposées par les autorités françaises par rapport au montant de 15,81 millions d'EUR d’aide, montant correspondant à l’aide à la restructuration octroyée en 2002. Or le montant total de l’aide s’élevant désormais à environ 218 millions d'EUR, la Commission est d’avis que les mesures proposées sont insuffisantes par rapport à la distorsion de concurrence créée par l’octroi de ces aides.

(364)

Par conséquent, la Commission constate que les doutes concernant la qualification de ces mesures, soit de mesures compensatoires, soit de mesures nécessaires au retour à la viabilité, n’ont pu être levés. En tout état de cause, les mesures proposées demeurent largement insuffisantes.

(365)

Les autorités françaises ont soulevé le risque de monopole en faveur de CFF si la SNCM disparaissait. La Commission considère que les autorités françaises n’ont pas démontré suffisamment l’existence et l’importance de ce risque. En effet, le transport des passagers et du fret entre la France continentale et la Corse est un marché ouvert et concurrentiel à tous les opérateurs présents en Méditerranée. Ce marché se caractérise également par l’absence de barrières à l’entrée. Quoi qu’il en soit, la position de Corsica Ferries n’est pas de nature à justifier que la concurrence soit faussée par les mesures litigieuses.

(366)

À la lumière de ce qui précède, la Commission en conclut que les mesures proposées ne remplissent pas les critères énumérés aux points 38 à 42 des lignes directrices.

VII.   CONCLUSION

7.1.   INCOMPATIBILITÉ ET RÉCUPÉRATION DE L’APPORT DE CAPITAL NOTIFIÉ PAR LES AUTORITÉS FRANÇAISES EN 2002 ET DES TROIS NOUVELLES MESURES MISES EN ŒUVRE PAR LES AUTORITÉS FRANÇAISES EN 2006

(367)

L’apport de capital de 15,81 millions d'EUR notifié par les autorités françaises en 2002 et les trois nouvelles mesures mises en œuvre par les autorités françaises en 2006, à savoir la cession de 100 % de la SNCM au prix négatif de 158 millions d'EUR, l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR souscrite par la CGMF et l’avance en compte courant de 38,5 millions d'EUR en faveur des salariés de la SNCM, constituent des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE. Ces aides sont incompatibles avec le marché intérieur.

(368)

La Commission rappelle qu’en application de l’article 14, paragraphe 1, du règlement (CE) no 659/1999, toute aide illégale et incompatible avec le marché intérieur doit être récupérée auprès de son bénéficiaire.

(369)

Aux fins de cette récupération, les autorités françaises doivent en outre ajouter au montant de l’aide les intérêts de récupération courant à compter de la date à laquelle l’aide en cause a été mise à la disposition de l’entreprise, et ce jusqu’à sa récupération effective (166), conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 de la Commission (167).

7.2.   INCOMPATIBILITÉ ET RÉCUPÉRATION DE L’AIDE AU SAUVETAGE

(370)

À partir du moment où les mesures notifiées au titre de l’aide à la restructuration ne remplissent pas les conditions de compatibilité prévues par les lignes directrices, il y a lieu normalement de tirer les conséquences de cette incompatibilité quant à l’aide au sauvetage autorisée à la SNCM par les autorités françaises ayant fait l’objet de la décision de la Commission du 17 juillet 2002, et d’en exiger la récupération.

(371)

Le 19 novembre 2002, les autorités françaises ont transmis à la Commission copie des conventions d’avance de trésorerie entre la SNCM et la CGMF ainsi que les preuves du remboursement de l’avance de la CGMF à la SNCM par deux virements en date des 13 mai et 14 juin 2002,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

L’apport de capital de 15,81 millions d'EUR et les trois nouvelles mesures mises en œuvre par les autorités françaises en 2006, à savoir la cession de 75 % de la SNCM au prix négatif de 158 millions d'EUR, l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR souscrite par la CGMF et l’avance en compte courant de 38,5 millions d'EUR en faveur des salariés de la SNCM, mises en œuvre par la France, en violation de l’article 108, paragraphe 3, du TFUE, en faveur de la SNCM constituent des aides d’État illégales et incompatibles avec le marché intérieur.

Article 2

1.   La France est tenue de se faire rembourser par le bénéficiaire les aides visées à l’article 1er.

2.   Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire, jusqu’à leur récupération effective.

3.   Les intérêts sont calculés sur une base composée conformément au chapitre V du règlement (CE) no 794/2004 et au règlement (CE) no 271/2008 de la Commission (168) modifiant le règlement (CE) no 794/2004.

Article 3

1.   La récupération des aides visées à l’article 1er est immédiate et effective.

2.   La France veille à ce que la présente décision soit mise en œuvre dans les quatre mois suivant la date de sa notification.

Article 4

1.   Dans les deux mois suivant la notification de la présente décision, la France communique les informations suivantes à la Commission:

a)

le montant total (principal et intérêts) à récupérer auprès du bénéficiaire;

b)

une description détaillée des mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision;

c)

les documents démontrant que le bénéficiaire a été mis en demeure de rembourser l’aide.

2.   La France tient la Commission informée de l’avancement des mesures nationales prises pour mettre en œuvre la présente décision jusqu’à la récupération complète des aides visées à l’article 1er. Elle transmet immédiatement, sur simple demande de la Commission, toute information sur les mesures déjà prises et prévues pour se conformer à la présente décision. Elle fournit aussi des informations détaillées concernant les montants des aides et les intérêts déjà récupérés auprès du bénéficiaire.

Article 5

La République française est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 20 novembre 2013.

Par la Commission

Joaquín ALMUNIA

Vice-président


(1)  À compter du 1er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne (traité CE) sont devenus respectivement les articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne («TFUE»). Dans les deux cas, les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, les références faites aux articles 107 et 108 du TFUE s’entendent, s’il y a lieu, comme faites respectivement aux articles 87 et 88 du traité CE. Le TFUE a également introduit certaines modifications de terminologie, telles que le remplacement de «Communauté» par «Union», de «marché commun» par «marché intérieur» et de «Tribunal de première instance» par «Tribunal». La terminologie du TFUE est utilisée dans la présente décision.

(2)  JO C 303 du 13.12.2006, p. 53.

(3)  Enregistrée sous la référence TREN A/61846.

(4)  La CGMF est un holding financier détenu à 100 % par l’État français qui sert de relais à ce dernier pour toute opération de transport maritime, d’armement et d’affrètement de navires en Méditerranée.

(5)  JO C 148 du 25.6.2003, p. 7.

(6)  JO C 308 du 11.12.2002, p. 29.

(7)  Règlement (CE) no 659/1999 du Conseil du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (JO L 83 du 27.3.1999, p. 1). Les autorités françaises ayant demandé le 11 septembre 2002 la correction de quelques erreurs factuelles dans la décision du 19 août 2002, la Commission a adopté une décision le 27 novembre 2002 modifiant la décision du 19 août 2002 (publiée dans le JO C 308 du 11.12.2002 p. 29). Les parties intéressées ont été invitées à présenter leurs observations sur le projet d’aide à compter de cette date.

(8)  Le 11 septembre 2002, les autorités françaises ont demandé un délai supplémentaire pour apporter leurs commentaires à la décision du 19 août 2002, délai que les services de la Commission ont accepté le 17 septembre 2002.

(9)  Enregistrées sous la référence SG(2002) A/10050.

(10)  Enregistrées le 15 janvier 2003 sous la référence DG TREN A/10962.

(11)  Enregistré sous la référence SG(2003) A/1691.

(12)  Enregistré sous la référence TREN A/21531.

(13)  Enregistrée sous la référence SG(2003) A/1546.

(14)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

(15)  Enregistré sous la référence TREN A/21701.

(16)  Décision 2004/166/CE de la Commission du 9 juillet 2003 concernant l’aide à la restructuration que la France envisage de mettre à exécution en faveur de la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (SNCM) (JO L 61 du 27.2.2004, p. 13).

(17)  Décision 2005/36/CE de la Commission du 8 septembre 2004 modifiant la décision 2004/166/CE concernant l’aide à la restructuration que la France envisage de mettre à exécution en faveur de la Société Nationale Maritime Corse-Méditerranée (SNCM) (JO L 19 du 21.1.2005, p. 70).

(18)  JO C 16 du 21.1.2006, p. 20.

(19)  Voir arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Corsica Ferries France SAS/Commission (T-349/03, Rec. 2005 p. II-2197).

(20)  Enregistré sous la référence TREN A/27546.

(21)  Enregistré sous la référence TREN A/30842.

(22)  Des compléments d’information ont été transmis par courrier du 30 novembre 2005 [SG(2005) A/10782], du 14 décembre 2005 [SG(2005) A/11122] et du 30 décembre 2005 (TREN A/10016).

(23)  Enregistré sous la référence TREN A/16904.

(24)  Enregistré sous la référence TREN A/19105.

(25)  Arrêt de la Cour du 24 juillet 2003, Altmark Trans GmbH e. Nahverkehrsgesellschaft Altmark GmbH, (C-280/00, Rec. 2003, p. 7747).

(26)  Veolia Transport était une filiale à 100 % de Veolia Environnement. Elle exploitait sous le nom de Connex des services de transport de voyageurs pour le compte de collectivités publiques (transports collectifs en agglomération, transports collectifs interurbains et régionaux) et gérait à ce titre des réseaux routiers et ferroviaires et, dans une moindre mesure, des services de transport maritime.

(27)  JO C 103 du 29.4.2006, p. 28.

(28)  Règlement (CE) no 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises («le règlement CE sur les concentrations») (JO L 24 du 29.1.2004, p. 1).

(29)  JO C 148 du 24.6.2006, p. 42.

(30)  Enregistré sous la référence TREN A/25295.

(31)  Enregistré sous la référence TREN A/24111.

(32)  Voir note 2 de bas de page.

(33)  Enregistré sous la référence TREN A/37907.

(34)  Par le groupe STEF-TFE le 28 décembre 2007 (A/20313) et par Corsica Ferries le 27 décembre 2006 (A/20056).

(35)  Lettres du 4 janvier 2007 (D 2007 300067) adressée au groupe STEF-TFE et (D 2007 300068) au groupe Corsica Ferries.

(36)  Les 11 janvier, 16 janvier et 9 février 2007, enregistrés respectivement sous les références TREN A/21142, A/21669 et A/23798.

(37)  En date du 13 février 2007, enregistrés sous les références TREN A/24473 et TREN A/23981.

(38)  Enregistré par les services de la Commission sous la référence TREN A/30979. Les autorités françaises ont demandé et obtenu deux délais supplémentaires d’un mois pour apporter leurs commentaires par courriers des 15 mars et 19 avril 2007 enregistrés sous les références TREN A/27002 et A/29928.

(39)  Voir arrêt du Tribunal du 11 septembre 2012, T-565/08, Corsica Ferries France SAS/Commission, non encore publié au Recueil (ci-après «l’arrêt du 11 septembre 2012»).

(40)  Voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2008, Alitalia/Commission (T-301/01, Rec. 2008, p. II-01753), notamment points 137 et 146.

(41)  Voir aussi l’arrêt de la Cour du 5 juin 2012, EDF/Commission (C-124/10 P), non encore publié au Recueil, points 83-85 et 104-105, en ce qui concerne les éléments à prendre en compte pour déterminer si un État s’est comporté comme un investisseur privé avisé en économie de marché.

(42)  La SNCM détient une participation non majoritaire directe à hauteur de 45 % dans la CMN et une participation non majoritaire indirecte via la Compagnie générale de tourisme et d’hôtellerie (CGTH) de 24,1 %. Le contrôle effectif a été confié depuis 1992 au groupe STEF-TFE par le biais de sa participation à hauteur de 49 % dans la Compagnie méridionale de participations (CMP). La SNCM et la CMN étaient partenaires dans le cadre de la DSP sur la période 2001-2006 et ont remporté conjointement le nouveau contrat de délégation de service public pour la période 2007-2012/2013.

(43)  La CGTH est une société holding, détenue à 100 % par la SNCM.

(44)  Aliso Voyage constitue le canal de distribution en propre de la SNCM. Formée par 17 agences réparties dans toute la France, cette société gère les ventes de billetterie maritime, dont 49,9 % en billetterie SNCM.

(45)  À l’époque de l’adoption de la décision de 2003, la SNCM détenait, à parité avec le groupe de transport Delmas, une participation dans la compagnie maritime française de transport de marchandises Sud-Cargos, spécialisée dans la desserte du Maroc. Cette participation a été par la suite cédée fin 2005 pour un montant de 3,3 millions d'EUR comme il résulte du plan d’investissement 2005 transmis par les autorités françaises le 28 mars 2006.

(46)  La SNCM détient 100 % de cette société qui assure l’avitaillement des navires de la SNCM.

(47)  Société en nom collectif détenue à 100 % par la SNCM, Ferrytour exerce le métier d’organisateur de voyages. Elle offre des voyages par voie maritime sur la Corse, la Sardaigne et la Tunisie, mais également des vols sur un grand nombre de destinations. De manière accessoire, elle propose également des mini-croisières et des prestations pour le tourisme d’affaires.

(48)  Filiale créée en 1996 et détenue à 100 % par la SNCM, les Comptoirs du Sud gèrent l’ensemble des boutiques à bord des navires.

(49)  Voir note 16 de bas de page.

(50)  Le Napoléon Bonaparte (capacité de 2 150 passagers et de 708 voitures, puissance de 43 MW, vitesse de 23,8 nœuds), grand navire car-ferry de grand standing; le nouveau Danielle Casanova, livré en mai 2002 (capacité de 2 204 passagers et de 700 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 23,8 nœuds), également grand navire car-ferry de grand standing; l’Île de Beauté (capacité de 1 554 passagers et de 520 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 21,5 nœuds), mis en service en 1979 et réhabilité en 1989/1990; le Méditerranée (capacité de 2 254 passagers et de 800 voitures, puissance de 35,8 MW, vitesse de 24 nœuds) et le Corse (capacité de 2 150 passagers et de 600 voitures, puissance de 27,56 MW, vitesse de 23,5 nœuds).

(51)  Le Paglia Orba, (capacité de 500 passagers, de 2 000 mètres linéaires de fret et de 120 voitures, puissance de 19,7 MW, vitesse de 19 nœuds); le Monte d’Oro (capacité de 508 passagers, de 1 615 mètres de fret et de 130 voitures, puissance de 14,8 MW, vitesse de 19,5 nœuds); le Monte Cinto (capacité de 111 passagers, de 1 200 mètres de fret, puissance de 8,8 MW, vitesse de 18 nœuds); depuis mai 2003, le Pascal Paoli (capacité de 594 passagers, de 2 300 mètres de fret et de 130 voitures, puissance de 37,8 MW, vitesse de 23 nœuds).

(52)  Le NGV Liamone (capacité de 1 116 passagers et 250 voitures, puissance de 65 MW, vitesse de 42 nœuds) qui réalise également des traversées sur Toulon.

(53)  Tous, sauf Danielle Casanova, Pascal Paoli, Liamone en crédit-bail.

(54)  Règlement (CEE) no 3577/92 du Conseil du 7 décembre 1992 concernant l’application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l’intérieur des États membres (règlement cabotage) (JO L 364 du 12.12.1992, p. 7).

(55)  JO S 2001/10 – 007-005.

(56)  Autorité concédante pour les obligations de service public depuis 1991 en vertu de ladite loi française no 91-428 du 13 mai 1991.

(57)  JO 2006/S 100-107350.

(58)  Aide d’État N 781/2001 autorisée par décision de la Commission du 2 juillet 2002 (JO C 186 du 6.8.2002, p. 3).

(59)  Aide d’État N 13/2007 autorisée par décision de la Commission du 24 avril 2007, publiée sur le site internet de la Commission: http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/transports_2007.htm

(60)  Informations confidentielles.

(61)  Le conducteur accompagne l’ensemble routier au cours de la traversée. Dans certains cas, un conducteur charge le véhicule au départ et un autre le décharge à l’arrivée. Ceci est comptabilisé comme trafic accompagné, par opposition au trafic roulier pour lequel la remorque voyage sans tracteur.

(62)  Voir note 5 de bas de page.

(63)  Ce montant étant détaillé comme suit: 20,4 millions d'EUR en tant que plan de restructuration proprement dit, 1,8 million d'EUR de frais de désarmement de navires en vente, 14,8 millions d'EUR pour la dépréciation du Liamone et 9 millions d'EUR pour le coût de redéploiement de l’activité vers le Maghreb.

(64)  Ce plan a été adopté le 17 décembre 2001 par le conseil d’administration de la SNCM.

(65)  Les réductions d’effectifs devaient s’opérer grâce à des départs naturels ou anticipés sur la base de critères d’âge (cessation anticipée d’activité), de congés de mobilité et du non-remplacement de contrats à durée déterminée. Elles devaient néanmoins représenter un coût estimé de 20,4 millions d'EUR pour la SNCM.

(66)  Telles que le trafic, la croissance prévisionnelle du produit intérieur brut (1,5 %), le taux des emprunts (5,5 %), le taux de rendement des produits financiers (4,5 %) et le taux des dettes à court terme (5 %).

(67)  Voir infra.

(68)  La SNCM n’a pas trouvé de repreneur pour sa participation dans la CCM.

(69)  Le processus interne à la SNCM relatif à la mise en œuvre des opérations de recapitalisation et de privatisation a démarré formellement le 12 avril 2006 pour se conclure le 31 mai 2006. Il est à souligner qu’au 27 novembre 2007, la mise en place de la participation des salariés au capital n’a pas été mise en œuvre.

(70)  Cette clause sera analysée dans le cadre de l’examen de l’augmentation de capital, étant précisé que cette clause a elle-même une valeur substantielle.

(71)  Affaire T 565/08 Corsica Ferries France SAS/Commission européenne, non encore publié au Recueil.

(72)  Décision C(2013) 1926 final du 2 mai 2013.

(73)  JO C 244 du 1.10.2004, p. 2.

(74)  Voir tableau 2.

(75)  Les autorités françaises avaient défendu en 2002 le caractère stratégique de la participation de la SNCM dans Sud-Cargos. L’évolution du trafic de marchandises (développement du conteneur au détriment du trafic roro), le rachat de Delmas, autre actionnaire de Sud-Cargos, par CMA CGM et les difficultés économiques de Sud-Cargos sont autant de facteurs qui expliquent que cette participation n’a plus été considérée comme stratégique et a pu être cédée en 2005 par la SNCM.

(76)  Arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, République fédérale d’Allemagne/Commission (C-334/99, Rec. 2003, p. I -1139).

(77)  Décision de la Commission du 7 décembre 2005 concernant l’aide d’État mise à exécution par la Belgique en faveur d’ABX Logistics [no C 53/2003 (ex NN 62/2003)] (JO L 383 du 28.12.2006, p. 21).

(78)  Décision de la Commission du 8 juillet 1999 concernant l’aide d’État mise à exécution par l’Allemagne en faveur de Gröditzer Stahlwerke GmbH et de sa filiale Walzwerk Burg GmbH (JO L 292 du 13.11.1999, p. 27).

(79)  Ce rapport a été transmis à la Commission en mars 2006 et a été établi par la CGMF avec l’appui de Ernst & Young, l’auditeur légal de la SNCM (ci-après «rapport CGMF»).

(80)  Le rapport établi le 29 mars 2006 par Oddo Corporate Finance et le cabinet Paul Hastings (rapport Oddo-Hastings) a été transmis le 7 avril 2006 à la Commission. Il consiste en une revue critique, demandée par l’Agence des participations de l’État (APE), des rapports CGMF et une approche des coûts de liquidation jugés acceptables au plan communautaire.

(81)  Compte tenu d’immobilisations corporelles (161,9 millions d'EUR) et financières (32,7 millions d'EUR), des créances clients (0,8 million d'EUR), d’autres créances (9,4 millions d'EUR) et d’un déficit de trésorerie de - 14,5 millions d'EUR. La France a précisé qu’une estimation plus réaliste, tenant compte d’éléments financiers ultérieurs, porterait cette valeur à 330 millions d'EUR.

(82)  Arrêt de la Cour du 14 septembre 1994, Espagne c/Commission, (C-278/92, C-279/92 et C-280/92, Rec. 1994, p. I-4103).

(83)  Arrêt no 98-15129 de la Cour de cassation du 6 février 2001. Cette affaire concerne un établissement public, le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) condamné à payer l’intégralité de l’insuffisance de l’actif de sa filiale, les Mines de Salsignes, au motif que le dirigeant de fait, le BRGM, malgré sa connaissance des conditions de dégradation de l’activité et des alertes données, avait eu un comportement fautif en laissant l’activité se poursuivre.

(84)  Affaire Aspocomp Group Oyj; arrêt de la cour d’appel de Rouen du 22 mars 2005.

(85)  À titre de comparaison, les taux de rendement d’une OAT (obligation assimilable du Trésor, obligation émise par l’État français) de maturité 30 ans, 10 ans, 5 ans et 2 ans sont respectivement de 3,95 %, 3,82 %, 3,75 % et 3,72 % au 31 octobre 2006.

(86)  Décision de la Commission du 17 juillet 2002, Société française de production, C(2002) 2593 final (JO C 71 du 25.3.2003, p. 3).

(87)  En effet, selon une étude de marché indépendante transmise par la France à cet égard, CFF détient près de 60 % du marché passagers tandis que la SNCM est passée de 82 % de parts de marché en 2000 à 33 % en 2005 et a connu une très forte croissance sur le marché de fret où la SNCM est encore le principal transporteur grâce à sa participation dans la CMN.

(88)  CFF rappelle que le contrat de délégation de service public assure à la compagnie une subvention publique de l’ordre de 64,3 millions d'EUR en moyenne par an, soit au total 321,5 millions d'EUR sur 5 ans. Selon elle, l’article 5 du contrat de délégation de service public garantit à la SNCM un cash-flow de 72,8 millions d'EUR. Par ailleurs, Corsica Ferries souligne que des 40,6 millions d'EUR de pertes enregistrées en 2001 par la SNCM, 15 millions d'EUR proviennent d’une dépréciation de navire appliquée au NGV Liamone.

(89)  La décision d’ouverture de procédure indiquait que le plan de restructuration prévoyait, entre autres, «la fermeture de la ligne Bastia-Livourne avec du matériel dédié».

(90)  Les critiques émises par CFF portent sur les points suivants: pas de réelle diminution des effectifs, pas de mobilisation des participations de la SNCM pour l’effort de restructuration, pas de prise en compte des plus-values sur les navires.

(91)  La somme de 76 millions d'EUR correspondrait selon CFF aux 500 millions de francs français (FRF) que la compagnie devrait perdre sur sa dotation de continuité territoriale sur la nouvelle période 2002-2006.

(92)  Par rapport aux ratios qu’elle a elle-même relevés sur un panel de dix compagnies maritimes. Ces ratios varient de 23,69 % (pour Moby Lines) à 55,09 % (pour Grimaldi) en passant par 49,7 % pour la CMN.

(93)  CFF cite la participation de 50 % dans la compagnie maritime Sud-Cargos, la participation de 13 % dans Amadeus, entreprise spécialisée dans les systèmes de réservation dans le transport aérien, la participation dans la CMN et le patrimoine immobilier de la CGTH.

(94)  À cet égard, CFF rappelle que, dans le second semestre 2005, une procédure d’alerte avait été entamée devant le tribunal de commerce de Marseille et qu’un dépôt de bilan aurait pu être envisagé dès l’automne 2005 pour des pertes estimées en 2005 à 30 millions d'EUR.

(95)  À cet effet, CFF estime que la valeur réelle des navires telle qu’indiquée par la SNCM lors de la présentation de son offre dans la cadre de la DSP aurait dû être prise en compte dans l’estimation des actifs de la SNCM effectuée par les rapports Oddo et CGMF.

(96)  D’après CFF, la France insiste sur le caractère essentiel de l’intégrité de la desserte de Nice, sur le maintien de la flotte au niveau actuel et sur le caractère supposé stratégique de la participation de la SNCM dans le groupe CMN.

(97)  Au 1er janvier 2007, avec l’arrivée du Superfast X.

(98)  CFF propose de limiter au niveau de 2005 les capacités offertes sur chacun des marchés concurrentiels (Nice, Tunisie et Algérie), de s’abstenir de l’ouverture de toute nouvelle ligne et de reconfigurer en cargo mixtes la desserte Marseille-Corse afin d’alléger les coûts.

(99)  Arrêt de la Cour du 8 mai 2003, Italie et SIM 2 Multimedia/Commission (C-328/99 et C-399/00, Rec. 2003, p. I-4035).

(100)  Parmi les faits invoqués par ce rapport, il ressort que le conseil d’administration de la SNCM […] () son pouvoir d’autorisation préalable.

(101)  À l’appui d’un rapport de la Cour des Comptes, le rapport mentionne par exemple que l’État a décidé […] () puisse en débattre.

(102)  Parmi les faits invoqués par ce rapport, il ressort que l’État […] () projet industriel.

(103)  L’État a par exemple […] () des dirigeants de la SNCM.

(104)  Dans sa lettre du 9 janvier 2003, le conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur citait en effet l’étude de marché qui avait été transmise à la Commission dans le cadre de la notification et dont il avait visiblement une copie en soulignant le constat suivant: «L’offre [sur la desserte entre la Corse et le continent français] est surdimensionnée par rapport à la demande. Le taux de remplissage des navires varie en moyenne, de 20 % en hiver à 50 % en été.»

(105)  Voir, par exemple, l’arrêt de la Cour du 10 janvier 2006, Ministero dell’Economia e delle Finanze/Cassa di Risparmio di Firenze (C-222/04, Rec. 2006, p. I-289, point 129).

(106)  Ce montant correspond à l’addition de l’apport de capital de 15,81 millions d'EUR notifié en 2002 et le montant de la DSP, soit 53,48 millions, et les trois nouvelles mesures mises en œuvre par les autorités françaises en 2006, à savoir, la cession de 100 % de la SNCM au prix négatif de 158 millions d'EUR, l’augmentation de capital de 8,75 millions d'EUR souscrite par la CGMF et l’avance en compte courant de 38,5 millions d'EUR en faveur des salariés de la SNCM.

(107)  Règlement (CEE) no 4055/86 du Conseil du 22 décembre 1986 portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (JO L 378 du 31.12.1986, p. 1).

(108)  Arrêt Alitalia/Commission, précité à la note 40 de bas de page.

(109)  Arrêt Alitalia/Commission précité, point 137.

(110)  Arrêt Alitalia/Commission précité, points 144 et 159.

(111)  Voir, en ce sens, l'arrêt Alitalia/Commission précité, points 99 à 101 et 142.

(112)  Arrêt Alitalia/Commission précité, point 174.

(113)  Voir note 29 de bas de page.

(114)  Voir note 110 de bas de page.

(115)  Arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission (C-334/99, Rec. 2003, p. I-1139, point 142).

(116)  Communication de la Commission aux États membres: application des articles 92 et 93 du traité CE et de l’article 5 de la directive 80/723/CEE de la Commission aux entreprises publiques du secteur manufacturier (JO C 307 du 13.11.1993, p. 3, point 11). Cette communication traite du secteur manufacturier, mais s’applique par analogie de la même manière à tous les autres secteurs économiques.

(117)  Voir notamment l’arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale/Commission (T-228/99 et T-233/1999, Rec. 2003, p. II-435).

(118)  Arrêt du Tribunal du 21 janvier 1999, Neue Maxhütte Stahlwerke GmbH et Lech-Stahlwerke GmbH/Commission des Communautés européennes (T-129/95, T-2/96 et T-97/96, Rec. 1999, p. II-17, point 116).

(119)  Voir note 80 de bas de page.

(120)  Voir note 113 de bas de page.

(121)  Décision 98/204/CE de la Commission du 30 juillet 1997 portant approbation conditionnée des aides accordées par la France au groupe GAN (JO L 78 du 16.3.1998, p. 1).

(122)  Arrêt Corsica Ferries France SAS/Commission, précité dans la note 39 de bas de page, points 81 à 83.

(123)  Point 84 de l’arrêt précité.

(124)  Point 85 de l’arrêt précité.

(125)  Affaire C-73/11 P, Frucona Kosice/Commission européenne.

(126)  À l’issue d’une procédure d’appel d’offres, la Commission a mandaté un expert indépendant, Moore Stephens, Chartered Accountants, dont le rapport final a été remis le 25 janvier 2008.

(127)  Il s’agit des 7 navires suivants: Corse, Île de Beauté, Méditerranée, Napoléon Bonaparte, Paglia Orba, Monte d’Oro, Monte Cino.

(128)  Cette décote, qui est de 52,2 millions d'EUR (soit en moyenne 25 à 30 % de la valeur vénale brute), est entre autres justifiée par la spécificité des navires de la SNCM qui sont adaptés aux dessertes assurées par l’entreprise, par l’état des navires et par le contexte d’une mise sur le marché de l’ensemble de la flotte (notamment la faiblesse de la position du vendeur). La valorisation de BRS repose notamment sur l’hypothèse d’une vente de navires complètement en ordre et à jour, en bon état d’entretien et de fonctionnement dans des conditions commerciales normales.

(129)  Estimée à 4,6 millions d'EUR.

(130)  L’aléa judiciaire est justifié par la probabilité que le mandataire liquidateur soit contraint à procéder très rapidement à la cession des navires et par un effet d’engorgement du marché en raison de sa capacité d’absorption limitée.

(131)  En ce qui concerne les immeubles (dont le siège social de la SNCM), les autorités françaises précisent que la valeur liquidative retenue repose sur l’évaluation d’un expert immobilier en date de novembre 2003 actualisée de + 20 % afin de tenir compte de la hausse des prix.

(132)  Les immobilisations financières concernent essentiellement les titres de participation de la SNCM dans Sud-Cargos, Aliso, CGTH, CMN et Ferrytour.

(133)  Ce poste concerne essentiellement des créances sur l’État, notamment la compensation au titre des obligations de service public du mois de septembre 2005 et le remboursement des charges sociales patronales par les Assedic au titre de l’exercice 2004.

(134)  Il s’agit d’une obligation instaurée par l’article L.321-13 du code du travail qui prévoit le versement par l’employeur d’une indemnité lors du licenciement d’un salarié d’au moins 50 ans.

(135)  Coût de revitalisation du bassin d’emploi ([0-10]* millions d'EUR), coût des conventions de reclassement ([10-20]* millions d'EUR), coût de la cellule d’accompagnement et d’aide au reclassement dite «mobilité» ([0-10]* millions d'EUR).

(136)  Coût du licenciement du personnel sous contrat SNCM détaché auprès de sociétés affiliées et du personnel des filiales liquidées ([0-5]* million EUR) et coût des contentieux afférents à la rupture des contrats de travail et aux demandes de requalification de contrat de travail ([0-10]* millions d'EUR).

(137)  Au 30 septembre 2005, la SNCM exploite trois navires en crédit-bail: le NGV Liamone (détenu par le GIE Véronique Bail), le Danielle Casanova (GIE Joliette Bail) et le Pascal Paoli (GIE Castellane Bail).

(138)  Les hypothèses sous-jacentes à cette évaluation sont les suivantes: la SNCM met fin à ses contrats de crédit-bail au 30 septembre 2005, ce qui signifie que les navires sont restitués à leurs propriétaires respectifs (GIE) et qu’aucun loyer n’est payé; les options d’achat ne peuvent pas être exercées; les navires sont cédés par les banques créditrices des GIE au 30 septembre 2005; le produit net de la vente des navires est consacré en priorité au remboursement des dettes bancaires et fiscales.

(139)  Les navires Napoléon Bonaparte et Paglia Orba garantissent le montant des emprunts navals qui ont servi à leur financement.

(140)  Ce poste relève de l’usage au terme duquel la SNCM s’engage à prendre en charge une partie des coûts de mutuelle complémentaire en faveur de ses retraités.

(141)  Jusqu’à la clôture de la liquidation. Les pertes intercalaires prennent pour hypothèse sous-jacente le versement des salaires sur un seul mois. Elles incluent également le coût de désarmement des navires en détention propre, non décompté de la valeur des actifs. Ce coût correspond au coût d’immobilisation des navires à quai dans l’attente de leur cession.

(142)  Les dettes chirographaires sont ventilées comme suit: provisions pour risques et charges (3,3 millions d'EUR), dettes rattachées/participations (0,1 million d'EUR), fournisseurs d’exploitation (28,6 millions d'EUR), représentation générale (23 millions d'EUR), dettes groupe et associés (7,8 millions d'EUR), compte de régularisation passif (6,9 millions d'EUR).

(143)  Compte tenu du recours intensif par la SNCM aux CDD à répétition.

(144)  Loi no 85-98 du 25 janvier 1985 sur le redressement et la liquidation judiciaire des entreprises codifiée dans le code de commerce aux articles L. 620-1 et suivants; Loi no 2005-845 du 26 juillet 2005 portant sur la sauvegarde, le redressement et la liquidation des entreprises, codifiée aux articles 620-1 à 670-8 du code de commerce.

(145)  La jurisprudence française exige du dirigeant de fait qu’il ait commis des actes positifs de gestion ou de direction de façon récurrente.

(146)  Arrêt de la Cour de cassation, 30 novembre 1993, no 91-20.554, Bull. civ. IV, no 440, p. 319.

(147)  Voir pages 46 à 48 du rapport Baker & McKenzie.

(148)  Voir notamment les deux arrêts rendus par la cour d’appel de Rouen le 22 mars 2005: arrêt no RG 04/02549 Aspocomp Group Oyj et arrêt no RG 01/02667 – 04/02675.

(149)  Cass. com., 19 avril 2005, Métaleurop.

(150)  Ou qu’il ait pris à cette occasion un engagement d’indemnisation dans l’hypothèse de futures suppressions d’emplois.

(151)  Dans ce sens, voir aussi la décision 98/204/CE, point 3.3.

(152)  Voir par exemple l’arrêt de la Cour du 28 janvier 2003, Allemagne/Commission (Gröditzer) (C-334/99, Rec. 2003, p. I-1139), points 133-141, et l’arrêt du Tribunal du 28 février 2012, Land Burgenland e.a./Commission (affaires jointes T-268/08 et T-281/08, non encore publié au Recueil), points 152-159.

(153)  Considérant 208 de la décision

(154)  JO C 142 du 11.6.2005, p. 2, considérant 63.

(155)  Point 137 de l’arrêt du 11 septembre 2012.

(156)  Point 150 de l’arrêt du 11 septembre 2012.

(157)  Points 102 à 104 des lignes directrices de 2004.

(158)  Voir note 5 de bas de page.

(159)  Les provisions réglementées sont des charges passées en comptabilité en application de règles fiscales.

(160)  Considérants 209 à 297.

(161)  Arrêt du Tribunal du 7 décembre 2010, Frucona Košica/Commission, T-11/07, non encore publié au Recueil, points 244 et 245.

(162)  Les mesures de 2006 consistent en une privatisation de la SNCM.

(163)  Voir rapport Stephens, Étude sur la restructuration de la compagnie maritime SNCM, p. 85, paragraphe 3: mise en œuvre de la DSP en juillet 2007 au lieu de janvier; nombreux contentieux avec CFF.

(164)  Voir rapport Stephens, Étude sur la restructuration de la compagnie maritime SNCM, p. 96.

(165)  Voir Autorité de la concurrence, avis no 12-A-05 du 17 février 2012, paragraphes 124 et 125.

(166)  Voir article 14, paragraphe 2, du règlement (CE) no 659/1999.

(167)  Règlement (CE) no 794/2004 de la Commission du 21 avril 2004 concernant la mise en œuvre du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil portant modalités d'application de l'article 93 du traité CE (JO L 140 du 30.4.2004, p. 1).

(168)  Règlement (CE) no 271/2008 de la Commission du 30 janvier 2008 modifiant le règlement (CE) no 794/2004 concernant la mise en œuvre du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (JO L 82 du 25.3.2008, p. 1).


ANNEXE

INFORMATIONS SUR LES MONTANTS REÇUS, À RÉCUPÉRER ET DÉJÀ RÉCUPÉRÉS

Identité du bénéficiaire

Montant total de l’aide reçue au titre du régime (1)

Montant total de l’aide à récupérer (1)

(Principal)

Montant total déjà remboursé (1)

Principal

Intérêts

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


(1)  En millions de la devise nationale.


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