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Document 61998TJ0172
Sommaire de l'arrêt
Sommaire de l'arrêt
Recours en annulation - Personnes physiques ou morales - Actes les concernant directement et individuellement - Directive rapprochant les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité et de parrainage en faveur des produits du tabac - Recours d'entreprises intervenant sur le marché de la publicité en faveur desdits produits - Irrecevabilité
[Traité CE, art. 173, alinéa 4 (devenu, après modification, art. 230, alinéa 4, CE); directive du Conseil 98/43]
$$Est irrecevable le recours en annulation dirigé par des entreprises commercialisant des produits autres que ceux du tabac sous des noms de produits du tabac et des entreprises intervenant sur le marché de la publicité des produits du tabac contre la directive 98/43 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité et de parrainage en faveur des produits du tabac.
D'une part, en effet, l'article 173, quatrième alinéa, du traité (devenu, après modification, article 230, quatrième alinéa, CE) ne prévoit, pour les particuliers, aucun recours direct devant le juge communautaire contre les directives. À supposer même qu'il soit possible d'assimiler, contrairement au libellé de cette disposition, les directives aux règlements aux fins d'admettre un recours contre une décision «prise sous l'apparence» d'une directive, la directive 98/43 ne constitue pas une décision «déguisée» et ne contient pas de dispositions spécifiques qui auraient le caractère d'une décision individuelle. En réalité, il s'agit d'un acte normatif puisqu'il vise, de manière générale et abstraite, tous les opérateurs économiques des États membres qui, à partir d'un moment donné, remplissent les conditions y énoncées, et nécessite, de surcroît, pour pouvoir s'appliquer à l'intérieur des États membres, une transposition dans chaque ordre juridique interne par des dispositions nationales de mise en oeuvre.
D'autre part, si un acte normatif s'appliquant à la généralité des opérateurs économiques intéressés peut concerner directement et individuellement certains d'entre eux, tel n'est pas le cas de la directive en cause. En effet, l'affectation directe des requérantes requiert que la mesure communautaire attaquée produise directement des effets sur la situation juridique des requérantes et qu'elle ne laisse aucun pouvoir d'appréciation aux destinataires de cette mesure qui sont chargés de sa mise en oeuvre, celle-ci ayant un caractère purement automatique et découlant de la seule réglementation communautaire sans application d'autres règles intermédiaires. Or, la directive 98/43, qui contraint les États membres à imposer des obligations aux opérateurs économiques, ne peut par elle-même faire naître ces obligations à la charge des requérantes et n'est donc pas de nature à concerner directement celles-ci. Subsidiairement, elle laisse aux États membres un pouvoir d'appréciation d'une nature telle qu'il exclut que les requérantes soient directement concernées par ladite directive. Il s'ensuit qu'elle ne produit pas, en tant que telle, des effets sur la situation juridique des requérantes.
Enfin, le recours en annulation introduit par les requérantes ne saurait être déclaré recevable en raison du défaut de protection juridictionnelle suffisante qui résulterait de l'absence de voies de recours internes permettant, le cas échéant, un contrôle de validité de la directive attaquée par la voie du renvoi préjudiciel fondé sur l'article 177 du traité (devenu article 234 CE), étant donné que le principe d'égalité de tous les justiciables quant aux conditions d'accès au juge communautaire par le biais du recours en annulation requiert que ces conditions ne soient pas fonction des circonstances propres au système juridictionnel de chaque État membre et de l'ineffectivité relative du renvoi préjudiciel par rapport au recours direct en annulation, étant donné que cette circonstance, à supposer qu'elle soit établie, ne saurait autoriser le Tribunal à se substituer au pouvoir constituant communautaire en vue de procéder à une modification du système des voies de recours et des procédures établi par les articles 173 et 177 du traité ainsi que par l'article 178 du traité (devenu article 235 CE) et destiné à confier à la Cour et au Tribunal le contrôle de la légalité des actes des institutions.
Par ailleurs, il n'apparaît pas que les requérantes soient privées de tout droit de recours contre les conséquences éventuelles de la directive 98/43. En effet, les intéressées peuvent en tout état de cause, dans la mesure où elles s'estiment victimes d'un dommage découlant directement de cet acte, le mettre en cause dans le cadre de la procédure en responsabilité non contractuelle prévue aux articles 178 du traité et 215 du traité (devenu article 288 CE). (voir points 27-28, 30, 52, 70-71, 74-75, 77)