Choose the experimental features you want to try

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62007CJ0337

Sommaire de l'arrêt

Affaire C-337/07

Ibrahim Altun

contre

Stadt Böblingen

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Verwaltungsgericht Stuttgart)

«Accord d'association CEE-Turquie — Article 7, premier alinéa, de la décision no 1/80 du conseil d'association — Droit de séjour d'un enfant d'un travailleur turc — Appartenance du travailleur au marché régulier de l'emploi — Chômage involontaire — Applicabilité dudit accord aux réfugiés turcs — Conditions de la perte des droits acquis»

Conclusions de l'avocat général M. Y. Bot, présentées le 11 septembre 2008   I - 10327

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 18 décembre 2008   I - 10347

Sommaire de l'arrêt

  1. Accords internationaux – Accord d'association CEE-Turquie – Conseil d'association institué par l'accord d'association CEE-Turquie – Décision no 1/80 – Regroupement familial – Droit, pour les membres de la famille d'un travailleur turc appartenant au marché régulier de l'emploi d'un État membre, d'exercer un emploi dans cet État membre – Conditions

    (Décision no 1/80 du conseil d'association CEE-Turquie, art. 7, al. 1)

  2. Accords internationaux – Accord d'association CEE-Turquie – Conseil d'association institué par l'accord d'association CEE-Turquie – Décision no 1/80 – Regroupement familial – Reconnaissance du droit d’accès au marché de l’emploi de l’État membre d’accueil d'un membre de la famille d'un travailleur turc

    (Décision no 1/80 du conseil d'association CEE-Turquie, art. 7, al. 1)

  3. Accords internationaux – Accord d'association CEE-Turquie – Conseil d'association institué par l'accord d'association CEE-Turquie – Décision no 1/80 – Regroupement familial – Limitation des droits des membres de la famille d'un travailleur turc au marché régulier de l'emploi de l'État membre d'accueil en raison du comportement frauduleux de ce travailleur – Conditions

    (Décision no 1/80 du conseil d'association CEE-Turquie, art. 7, al. 1, et 14, § 1)

  1.  L’article 7, premier alinéa, premier tiret, de la décision no 1/80 du conseil d’association CEE-Turquie doit être interprété en ce sens que l’enfant d’un travailleur turc peut bénéficier des droits ouverts au titre de cette disposition lorsque, durant la période de trois années de cohabitation de cet enfant avec ce travailleur, ce dernier a exercé une activité professionnelle pendant deux ans et demi avant d’être au chômage au cours des six mois suivants.

    En effet, le droit accordé à un enfant d’un travailleur turc de répondre à toute offre d’emploi dans l’État membre d’accueil est soumis à deux conditions, selon lesquelles ce travailleur doit appartenir au marché régulier de l’emploi de cet État et l’enfant doit y résider régulièrement depuis trois ans au moins. La circonstance que la condition d’ouverture du droit d’accès au marché du travail dans l’État membre d’accueil disparaît pour le travailleur après que le membre de sa famille a lui-même acquis ce droit n’est, quant à elle, pas susceptible de le remettre en cause. Il s'ensuit que, aux fins de l’acquisition du droit d’accès au marché du travail dans l’État membre d’accueil par le membre de la famille d’un travailleur turc, la condition d’appartenance de ce dernier au marché régulier de l’emploi doit avoir été remplie durant, à tout le moins, la période de trois années de résidence commune. La situation de chômage involontaire ne saurait, à elle seule, faire obstacle à ce qu’un travailleur turc continue d’appartenir au marché régulier de l’emploi de l’État membre d’accueil.

    (cf. points 22, 26, 36, 37, 40, disp. 1)

  2.  Le fait qu’un travailleur turc a obtenu le droit de séjour dans un État membre et, partant, le droit d’accès au marché de l’emploi de cet État en tant que réfugié politique ne fait pas obstacle à ce qu’un membre de sa famille puisse bénéficier des droits ouverts au titre de l’article 7, premier alinéa, de la décision no 1/80 du conseil d’association CEE-Turquie. En effet, l’exercice des droits que les ressortissants turcs tirent de la décision no 1/80 n’est subordonné à aucune condition relative au motif pour lequel un droit d’entrée et de séjour leur a été initialement accordé dans l’État membre d’accueil.

    Au regard d'un éventuel «double avantage» conféré aux réfugiés, d'une part, par la décision no 1/80 et, d'autre part, par la convention de Genève relative au statut des réfugiés, cette dernière énonce, à son article 5, qu’aucune de ses dispositions ne porte atteinte aux autres droits et avantages accordés, indépendamment de cette convention, aux réfugiés. Or, la décision no 1/80 accorde aux membres de la famille d'un travailleur turc des droits qu'ils ne sauraient invoquer au titre de cette convention, puisque celle-ci ne confère aucun droit de la nature de ceux prévus par l'article 7 de la décision no 1/80. Si la décision no 1/80 n’empiète pas sur la compétence des États membres de réglementer tant l’entrée sur leur territoire des ressortissants turcs que les conditions de leur premier emploi, toutefois, le refus d’appliquer la décision no 1/80 en raison du statut de réfugié politique dont a bénéficié un travailleur turc lors de la délivrance de son autorisation d’entrée et de séjour dans un État membre mettrait en cause les droits que lui-même et les membres de sa famille tirent de cette décision.

    (cf. points 42-50, disp. 2)

  3.  L’article 7, premier alinéa, de la décision no 1/80 du conseil d’association CEE-Turquie doit être interprété en ce sens que, lorsqu’un travailleur turc a obtenu le statut de réfugié politique sur la base de déclarations inexactes, les droits au marché régulier de l'emploi de l'État membre d'accueil qu’un membre de sa famille tire de cette disposition ne peuvent être remis en cause si ce dernier, à la date du retrait de l’autorisation de séjour délivrée à ce travailleur, remplit les conditions prévues à ladite disposition.

    En effet, si, à la date à laquelle l’autorisation de séjour d’un travailleur turc est retirée, les droits des membres de sa famille sont en cours d’acquisition, dans la mesure où la condition relative à la période de cohabitation effective avec le travailleur prévue à l’article 7, premier alinéa, de la décision no 1/80 n’est pas encore remplie, les États membres sont en droit de tirer les conséquences du comportement frauduleux de ce travailleur à l’égard des membres de sa famille. En revanche, dès lors que ces derniers ont acquis un droit propre d’accès au marché du travail dans l’État membre d’accueil et, corrélativement, un droit de séjour dans celui-ci, ces droits ne peuvent plus être remis en cause en raison des irrégularités qui, dans le passé, ont affecté le droit de séjour dudit travailleur. Toute autre solution irait à l’encontre du principe de sécurité juridique qui exige, notamment, que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir sur les individus des conséquences défavorables.

    Les limites aux droits que l’article 7, premier alinéa, de la décision no 1/80 reconnaît aux membres de la famille d’un travailleur turc qui remplissent les conditions énoncées audit alinéa ne peuvent être que de deux ordres, à savoir soit le fait que la présence du migrant turc sur le territoire de l’État membre d’accueil constitue, en raison de son comportement personnel, un danger réel et grave pour l’ordre public, la sécurité ou la santé publiques, au sens de l’article 14, paragraphe 1, de la même décision, soit la circonstance que l’intéressé a quitté le territoire de cet État pendant une période significative et sans motifs légitimes. Le caractère exhaustif de ces limites serait mis en cause si les autorités nationales étaient en mesure de soumettre à des conditions, de restreindre ou d’écarter les droits propres acquis par les membres de la famille du travailleur migrant au moyen du réexamen ou d’une nouvelle appréciation des circonstances de l’octroi à ce dernier du droit d’entrée et de séjour.

    (cf. points 58-60, 62-64, disp. 3)

Top