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Document 62007CJ0185

Sommaire de l'arrêt

Affaire C-185/07

Allianz SpA, anciennement Riunione Adriatica di Sicurtà SpA et Generali Assicurazioni Generali SpA

contre

West Tankers Inc.

(demande de décision préjudicielle, introduite par la House of Lords)

«Reconnaissance et exécution des sentences arbitrales étrangères — Règlement (CE) no 44/2001 — Champ d’application — Compétence d’un tribunal d’un État membre pour prononcer une injonction interdisant à une partie d’engager ou de poursuivre une procédure devant une juridiction d’un autre État membre au motif que cette procédure serait contraire à une convention d’arbitrage — Convention de New York»

Conclusions de l’avocat général Mme J. Kokott, présentées le 4 septembre 2008   I - 666

Arrêt de la Cour (grande chambre) du 10 février 2009   I - 686

Sommaire de l’arrêt

Coopération judiciaire en matière civile – Compétence judiciaire et exécution des décisions en matière civile et commerciale – Règlement no 44/2001 – Champ d’application

[Règlement du Conseil no 44/2001, art. 1er, § 2, d), et 5, point 3]

L’adoption, par une juridiction d’un État membre, d’une injonction visant à interdire à une personne d’engager ou de poursuivre une procédure devant les juridictions d’un autre État membre, au motif qu’une telle procédure serait contraire à une convention d’arbitrage, est incompatible avec le règlement no 44/2001 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale.

En effet, si, par l’objet du litige, c’est-à-dire par la nature des droits à sauvegarder dans une procédure, telle qu’une demande en dommages-intérêts, une procédure relève du champ d’application du règlement no 44/2001, une question préalable portant sur l’applicabilité d’une convention d’arbitrage, y compris notamment sur sa validité, rentre également dans le champ d’application de ce règlement.

Il s’ensuit que l’exception d’incompétence tirée de l’existence d’une convention d’arbitrage, y compris la question de la validité de cette dernière, relève du champ d’application dudit règlement no 44/2001 et qu’il appartient alors exclusivement à la juridiction de statuer sur cette exception ainsi que sur sa propre compétence en vertu des articles 1er, paragraphe 2, sous d), et 5, point 3, de ce règlement.

Partant, le fait d’empêcher, au moyen d’une «anti-suit injunction», une juridiction d’un État membre, normalement compétente pour trancher un litige conformément à l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001, de se prononcer, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, sous d), de ce règlement, sur l’applicabilité même de ce dernier au litige qui lui est soumis revient nécessairement à lui ôter le pouvoir de statuer sur sa propre compétence en vertu dudit règlement.

Il s’ensuit, tout d’abord, qu’une «anti-suit injunction» ne respecte pas le principe général selon lequel chaque juridiction saisie détermine elle-même, en vertu des règles qui lui sont applicables, si elle est compétente pour trancher le litige qui lui est soumis. À cet égard, il convient de rappeler que le règlement no 44/2001 n’autorise pas, en dehors de quelques exceptions limitées, le contrôle de la compétence d’une juridiction d’un État membre par une juridiction d’un autre État membre.

Ensuite, en entravant la juridiction d’un autre État membre dans l’exercice des pouvoirs que le règlement no 44/2001 lui confère, à savoir décider, sur la base des règles qui définissent le champ d’application matériel de ce règlement, dont son article 1er, paragraphe 2, sous d), si ledit règlement est applicable, une telle «anti-suit injunction» va en même temps à l’encontre de la confiance que les États membres accordent mutuellement à leurs systèmes juridiques ainsi qu’à leurs institutions judiciaires et sur laquelle repose le système de compétences du règlement no 44/2001.

Enfin, si, au moyen d’une «anti-suit injunction», la juridiction nationale était empêché d’examiner elle-même la question préalable de la validité ou de l’applicabilité de la convention d’arbitrage, une partie pourrait se soustraire à la procédure en se bornant à exciper de ladite convention et le requérant, qui considère que cette dernière est caduque, inopérante ou non susceptible d’être appliquée, se verrait ainsi fermer l’accès à la juridiction étatique qu’il a saisie en vertu de l’article 5, point 3, du règlement no 44/2001 et serait dès lors privé d’une forme de protection juridictionnelle à laquelle il a droit.

Cette conclusion se trouve corroborée par l’article II, paragraphe 3, de la convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, signée à New York le 10 juin 1958, selon lequel c’est le tribunal d’un État contractant, saisi d’un litige sur une question au sujet de laquelle les parties ont conclu une convention d’arbitrage, qui renverra les parties à l’arbitrage, à la demande de l’une d’elles, à moins qu’il ne constate que ladite convention est caduque, inopérante ou non susceptible d’être appliquée.

(cf. points 26-31, 33, 34 et disp.)

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