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Dokument 52018AE4011

Avis du Comité économique et social européen sur le «Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Rapport sur la politique de concurrence 2017» [COM(2018) 482 final]

EESC 2018/04011

JO C 110 du 22.3.2019., str. 46–51 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, HR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

22.3.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 110/46


Avis du Comité économique et social européen sur le «Rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Rapport sur la politique de concurrence 2017»

[COM(2018) 482 final]

(2019/C 110/08)

Rapporteure:

Baiba MILTOVIČA

Consultation

Commission européenne, 5.9.2018

Base juridique

Article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Compétence

Section spécialisée «Marché unique, production et consommation»

Adoption en section spécialisée

21.11.2018

Adoption en session plénière

12.12.2018

Session plénière no

539

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

188/1/9

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) approuve la concision et la précision du rapport 2017, qui est étayé par un document de travail détaillé des services de la Commission. Une politique de concurrence efficace et appliquée est le fondement d’une économie de marché durable. Elle peut garantir des conditions de concurrence équitables pour les producteurs de biens et de services, rassurer les consommateurs, stimuler la concurrence et réaliser des objectifs sociaux fondamentaux, tels que la liberté de choix des consommateurs, ainsi que des objectifs politiques, tels que le bien-être des citoyens européens et la promotion de l’intégration du marché européen. Envers les pays tiers, elle joue également un rôle important en favorisant une dynamique commerciale, environnementale et sociale positive dans les échanges internationaux.

1.2.

Le rapport de 2017 insiste avec force sur le respect et l’application de la législation, et fournit des exemples de mesures énergiques prises par la Commission. Les consommateurs et les petites et moyennes entreprises sont souvent lésés par de grandes entreprises susceptibles d’abuser de leur position dominante sur le marché, et de ce fait, les mesures visant à combattre les pratiques anticoncurrentielles sont particulièrement bienvenues.

1.3.

L’intensification des activités anticoncurrentielles sur les marchés européens s’est accompagnée du développement constant d’autorités nationales de la concurrence (ANC) en tant qu’actrices importantes de l’application du droit de la concurrence. La directive REC+, visant à donner aux ANC les moyens d’être plus efficaces, renforce les capacités nationales dans ce domaine.

1.4.

Le renforcement de l’autonomie des ANC et la mise à disposition de ressources adéquates sont essentiels. Une indépendance réelle, l’expertise et la formation sont autant d’éléments nécessaires à un travail efficace, et il conviendrait d’exercer un suivi étroit de la directive REC+ pour s’assurer que l’ambition affichée est bien suivie d’effet. Il convient d’encourager les mesures préventives afin d’éviter tout comportement anticoncurrentiel, et de durcir les sanctions pour en faire un moyen de dissuasion efficace.

1.5.

Le CESE soutient la Commission en ce qui concerne l’action privée en droit de la concurrence et affirme que les actions collectives doivent être facilitées par les systèmes juridiques de tous les États membres. La Commission devrait continuer à contrôler l’efficacité des mécanismes de recours collectif pour les infractions au droit de la concurrence dans les différents États membres et, le cas échéant, prendre des mesures supplémentaires. À cet égard, la déception prévaut en ce qui concerne la proposition de la Commission pour les recours collectifs, figurant dans celle relative à «Une nouvelle donne pour les consommateurs».

1.6.

Il convient d’envisager d’autres propositions en matière de franchise à inclure dans le règlement d’exemption par catégorie (1) afin de rétablir l’équilibre commercial et contractuel entre franchisés et franchiseurs.

1.7.

Lorsque des activités paracommerciales importantes menées par les collectivités locales sont susceptibles de bénéficier d’une subvention publique entraînant une concurrence déloyale, celles-ci devraient être étudiées pour déterminer si, en la matière, une adaptation des règles relatives aux aides d’État ou d’autres instruments s’impose.

1.8.

En ce qui concerne la directive sur les lanceurs d’alerte, il est recommandé que dans le cadre de sa transposition et de son application, la législation nationale dispose que lesdits lanceurs d’alerte doivent avoir à tout moment accès à des représentants syndicaux et qu’une protection intégrale doit leur être assurée en toutes circonstances.

1.9.

Dans les cas en rapport avec l’application du droit de la concurrence, il est suggéré qu’une analyse détaillée des pratiques des régulateurs de l’énergie dans l’ensemble des États membres soit menée par la Commission en collaboration avec le CEER et l’ACER afin de définir des actions susceptibles d’éliminer les pratiques restrictives, lesquelles continuent à porter préjudice aux consommateurs.

1.10.

Un réexamen du fonctionnement de la chaîne de distribution des denrées alimentaires dans les futurs rapports sur la politique de concurrence pourrait servir à définir et à proposer des mesures correctives propres à lutter contre l’exercice persistant d’un pouvoir de marché par les détaillants occupant une position dominante, qui peut se révéler inapproprié.

1.11.

Il existe déjà toute une série de pratiques anticoncurrentielles au sein de l’économie numérique, et d’autres apparaissent sans cesse. Le Comité est préoccupé par l’insuffisance des ressources consacrées à la surveillance de ce secteur en développement rapide et financièrement dynamique, et réclame une disposition spécifique à cet effet dans le cadre financier pluriannuel.

1.12.

Un certain nombre de facteurs échappent au champ d’application immédiat de la politique de concurrence, mais suscitent toutefois des inquiétudes quant aux distorsions du marché: les grandes disparités entre les États membres en ce qui concerne la fiscalité des entreprises, les pratiques en matière d’emploi communément désignées sous l’appellation de dumping social, les pratiques apparaissant dans l’économie dite «des petits boulots» et les questions relatives à l’économie circulaire et à la viabilité de l’économie mondiale. Le Comité invite instamment la Commission à exercer pleinement ses pouvoirs et sa capacité afin de veiller, dans la mesure du possible, à ce que ces «zones grises» où l’on observe des comportements anticoncurrentiels soient surveillées, clarifiées et corrigées.

1.13.

Le droit de la concurrence est l’un des éléments les plus anciens de l’acquis mais n’est pas toujours à la hauteur des défis de notre siècle. La séparation artificielle du marché et de la sphère socio-environnementale, notamment, aurait tout à gagner d’une révision globale et systématique du droit de la concurrence de l’Union européenne, qui tiendrait compte des objectifs économiques, environnementaux et sociaux.

2.   Contenu du rapport sur la politique de concurrence 2017

2.1.

La politique de concurrence est la pierre angulaire du marché unique, elle existe depuis le traité de Rome et elle constitue la base même de l’Union européenne d’aujourd’hui. Le cadre dans lequel elle s’inscrit repose sur des dispositions telles que celles visées aux articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui précisent son contenu et son champ d’application.

2.2.

En 2017, des actions spécifiques ont été menées au bénéfice des consommateurs et de l’industrie européenne dans des domaines clés: l’économie numérique, l’énergie, les secteurs pharmaceutique et agrochimique, les industries de réseau et les marchés financiers. Le présent résumé met en évidence les principaux éléments du rapport, lequel est lui-même une synthèse d’un vaste travail mené dans de nombreux secteurs économiques.

2.3.

Toute politique doit se traduire dans des règles et les règles doivent être appliquées. La Commission européenne est un membre fondateur du réseau international de la concurrence et elle joue également un rôle actif dans toutes les instances internationales s’intéressant à la concurrence, y compris l’OCDE, la Cnuced, l’OMC et la Banque mondiale. En particulier, la Commission travaille en étroite collaboration avec les autorités nationales de la concurrence, et elle propose de nouvelles règles sous la forme d’une directive (2) permettant aux autorités de la concurrence des États membres de mettre en œuvre plus efficacement les règles européennes en matière d’entente.

2.4.

Il importe que toute personne ayant connaissance de l’existence ou des agissements d’une entente ou de tout autre type de violation des règles de concurrence ait les moyens de dévoiler au grand jour de telles pratiques. Un nouvel instrument d’alerte anonyme a été mis en place qui facilite cette démarche, et il est activement utilisé.

2.5.

Les exigences relatives à la notification des mesures d’aide d’État plus limitées et moins problématiques ont été simplifiées, et des exonérations ont été introduites; 24 États membres ont rejoint la plateforme informatique baptisée Transparency Award Module (TAM) qui fournit des informations sur les aides d’État.

2.6.

Des mesures rigoureuses visant à faire respecter les règles de concurrence sur les marchés concentrés ont été prises. Le secteur pharmaceutique a découvert avec inquiétude la première enquête de la Commission faisant apparaître des pratiques tarifaires excessives dans l’industrie pharmaceutique; plusieurs fusions dans le secteur agrochimique ont été examinées, et une fusion dans l’industrie du ciment, qui risquait d’entraîner une réduction de la concurrence, a été proscrite.

2.7.

Dans le secteur de l’énergie, les mesures d’exécution de la législation en matière d’aides d’État et de mécanismes de capacité sont en cours de mise en œuvre, et des enquêtes sur les pratiques commerciales de Gazprom en Europe centrale et orientale se sont poursuivies, donnant lieu à une conclusion provisoire faisant apparaître que les règles européennes en matière d’entente auraient été enfreintes.

2.8.

Dans le domaine des transports, des acquisitions dans le secteur aérien ont été examinées; des actions anticoncurrentielles dans le domaine des transports ferroviaires ont été repérées en Lituanie, débouchant sur des amendes et des mesures correctives; et enfin, en Grèce et en Bulgarie, l’octroi d’aides d’État a été soutenu. Des mesures de lutte contre les ententes ont été prises à l’encontre de la société Scania en ce qui concerne le transport de marchandises par route, et plusieurs entreprises du secteur des pièces détachées automobiles ont été soumises à de lourdes amendes.

2.9.

L’extension du règlement général d’exemption par catégorie aux ports et aux aéroports a facilité la fourniture d’une aide d’État appropriée.

2.10.

L’enquête de la Commission visant le projet de fusion entre la Deutsche Börse et le London Stock Exchange Group a conclu que sa réalisation entraînerait une situation de monopole, et il a été, de ce fait, interdit.

2.11.

Il est à noter que la politique de concurrence de l’Union devra répondre de manière constructive et créative au défi que constitue le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Comme l’a souligné le Conseil européen, tout futur accord commercial se doit de garantir des conditions équitables, notamment sur le plan de la concurrence et des aides d’État.

3.   Observations générales

3.1.

Le CESE accueille favorablement le rapport 2017, qui contient de nombreux exemples de l’attention que porte la Commission à la promotion du bien-être des consommateurs ainsi qu’à la prévention des préjudices aux consommateurs. Cette approche a pour conséquence, non seulement de renforcer l’intégration du marché unique, mais aussi de doper le développement économique et de renforcer les objectifs de politique sociale qui y sont liés.

3.2.

Au cours de l’année écoulée, les avis du CESE ont souvent souligné l’importance d’une politique de concurrence efficace et dûment appliquée. La prospérité et le bien-être des consommateurs, au même titre que maintien d’une structure concurrentielle effective, constituent les principes qui sous-tendent l’exploitation, les pratiques d’exclusion et les accords restrictifs. En encourageant les bonnes pratiques économiques, une politique de concurrence stricte favorise le renforcement des entreprises européennes sur des marchés mondiaux concurrentiels et la promotion des objectifs sociaux sur lesquels elle est fondée.

3.3.   Émissions des véhicules

3.3.1.

Dans son avis sur les «Actions de l’Union européenne destinées à améliorer le respect de la législation environnementale» (3), le CESE considère que le respect insuffisant des mécanismes garantissant la mise en œuvre de la législation et de la gouvernance environnementales constitue un facteur regrettable de concurrence déloyale et de préjudice économique. Le Comité constate que le respect de l’état de droit est fondamental pour une politique de la concurrence forte.

3.3.2.

Dans ce contexte, le Comité apprécie que l’enquête préliminaire de la Commission sur une possible entente impliquant BMW, Daimler, Volkswagen, Audi et Porsche, visant à établir si lesdites entreprises avaient limité le développement des systèmes de réduction catalytique sélective et des filtres à particules, une intervention qui serait susceptible d’avoir bridé le déploiement de technologies plus respectueuses de l’environnement, ait maintenant incité l’équipe chargée de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles à ouvrir une procédure formelle d’examen.

3.4.   Mécanismes de recours collectif

3.4.1.

Le Comité prend acte de la transposition définitive de la directive relative aux dommages et intérêts (4) qui aborde en partie la question de la mise en place d’un mécanisme judiciaire pour les actions collectives. Toutefois, considéré en combinaison avec la récente proposition figurant dans le train de mesures relatif à «Une nouvelle donne pour les consommateurs», le retrait de la proposition de directive élaborée en 2009 par la direction générale de la concurrence témoigne d’un manque de volonté politique s’agissant de poser des jalons significatifs pour progresser vers la définition d’un régime réellement efficace de recours collectifs au niveau européen. Aussi le CESE demande-t-il instamment à la Commission de continuer à contrôler l’efficacité des mécanismes de recours collectif pour les infractions au droit de la concurrence dans les différents États membres et, le cas échéant, de prendre des mesures supplémentaires.

3.5.   Franchise dans le commerce de détail

3.5.1.

Le CESE fait observer que les contrats de franchise dans le secteur du commerce de détail posent un problème croissant qui peut avoir des conséquences graves en matière de concurrence. Aux Pays-Bas, par exemple, un différend majeur opposant le franchiseur HEMA et un certain nombre de franchisés sur un problème relatif à des contrats existants et à la part des bénéfices tirés des ventes sur l’internet a conduit à l’annulation des contrats des franchisés. Le Comité invite la Commission à analyser cette situation et à présenter des propositions complémentaires en matière de franchise qui pourraient être incluses dans le règlement d’exemption par catégorie afin de rétablir l’équilibre commercial et contractuel entre les franchisés et le franchiseur.

3.6.   Subventions au niveau des collectivités locales

3.6.1.

Dans de nombreux États membres, les collectivités locales se tournent vers le développement d’activités commerciales utilisant des ressources ou des installations publiques. Une telle démarche peut donner lieu à une concurrence déloyale si un élément de subvention est présent. Par exemple, les PME du secteur des services alimentaires et du tourisme sont confrontées à des activités subventionnées dans les cantines des clubs sportifs, des centres de loisirs, etc. Les autorités locales sont propriétaires de ces clubs et associations ou elles leur versent des fonds publics; ces structures sont souvent exemptées de l’obligation de payer la taxe sur la valeur ajoutée et bénéficient de primes sociales, comme du travail bénévole. Ces activités paracommerciales sont souvent organisées (sur le plan du chiffre d’affaires et des bénéfices) comme des entreprises commerciales ordinaires. Le Comité invite la Commission à surveiller ce phénomène et à établir si une adaptation des règles en matière d’aides d’État ou d’autres instruments pourraient être mis au point au niveau européen pour réglementer ces activités locales, qui, dans certains cas, se trouvent même subventionnées par des fonds de l’Union.

3.7.   Informations sur les aides d’État

3.7.1.

La disponibilité et l’utilisation de la plateforme informatique Transparency Award Module (TAM) sont particulièrement bienvenues, car celle-ci permet aux parties intéressées (la Commission, les concurrents et le public au sens large) de vérifier la conformité des aides d’État aux règles en vigueur. À ce jour, environ 30 000 subventions ont été publiées.

4.   Remarques spécifiques

4.1.   La directive REC+

4.1.1.

Le CESE est encouragé par le fait qu’une attention particulière est accordée, dans le rapport, au contrôle de l’application de la législation, et il saisit cette occasion pour réaffirmer son point de vue (5) sur la directive REC+ (6), laquelle confère aux ANC les moyens d’être plus efficaces.

4.1.2.

Le Comité a déjà indiqué précédemment qu’un règlement constituerait en la matière un instrument législatif plus efficace, mais il reconnaît la nécessité d’appliquer le principe de proportionnalité. En outre, la politique de concurrence devrait garantir l’égalité des chances, les ANC ayant à leur disposition les mesures et instruments juridiques nécessaires pour lutter contre les ententes secrètes.

4.1.3.

Bien qu’il appartienne à la directive REC+ de garantir l’indépendance, les ressources et une boîte à outils efficace pour faire appliquer la législation, des interrogations subsistent en ce qui concerne l’autonomie et les capacités des ANC. Une indépendance, une expertise et une formation véritables sont les conditions nécessaires d’un travail efficace. Il convient d’encourager les mesures préventives afin d’éviter tout comportement anticoncurrentiel ainsi que de renforcer les sanctions pour rendre tangible leur effet dissuasif. Les ANC devraient également se voir accorder le pouvoir d’ester en justice en leur nom propre.

4.2.   Protection des lanceurs d’alerte

4.2.1.

Il convient de poursuivre l’action d’information du public sur les règles de concurrence. Celle-ci consistera à renforcer l’efficacité des nouveaux outils disponibles pour signaler les infractions, notamment l’outil de lancement d’alerte. Même s’il se félicite de constater que ledit outil est utilisé sur une base régulière, le CESE se déclare préoccupé par plusieurs aspects de la proposition de directive qui vise à renforcer la protection des lanceurs d’alerte (7).

4.2.2.

Le CESE renvoie la Commission à son avis sur ce texte (8), où il recommande que le champ d’application matériel de la directive ne soit pas limité au respect du droit de l’Union, mais qu’il soit étendu au respect du droit national.

4.2.3.

Il est également important de faire référence à l’inclusion des droits des travailleurs, et de mentionner les représentants des syndicats et des organisations non gouvernementales comme exemples de personnes morales. Les lanceurs d’alertes devraient avoir accès à des représentants syndicaux à chaque étape de la procédure.

4.3.   L’économie numérique

4.3.1.

Le CESE fait observer que le nouveau règlement relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs (9) a été adopté à la fin de 2017, et que celui-ci devrait assurer une meilleure coordination entre les réseaux de consommateurs pour faire appliquer les mesures de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles transfrontières. Par exemple, le règlement recense les pratiques de blocage géographique dans le secteur du commerce électronique, lequel constitue, par sa nature même, une question transfrontière. Depuis de nombreuses années, les centres européens des consommateurs travaillent sur cette question en collectant des exemples et pratiques transfrontières. Avec l’action conjointe du réseau européen de la concurrence et du réseau de coopération en matière de protection des consommateurs, l’on peut désormais prévoir une meilleure coordination des mesures d’exécution.

4.3.2.

Dans le domaine de l’économie numérique, en croissance rapide, de nombreux autres types de pratiques anticoncurrentielles apparaissent sans cesse. Ainsi, l’utilisation d’algorithmes sophistiqués permet d’ajuster les prix sur la base des données d’une personne, collectées à partir de différentes sources en ligne, ce qui favorise la collusion en ligne entre diverses entreprises. La Commission devrait disposer de ressources budgétaires suffisantes pour pouvoir surveiller et contrer ces pratiques.

4.4.

Le CESE estime qu’une meilleure coopération entre les ANC et les organisations de consommateurs serait profitable aux deux parties, d’autant plus que les organisations de consommateurs nationales sont très bien placées pour informer les ANC en cas de soupçon d’infraction. En effet, elles peuvent fournir aux autorités des données précieuses tirées des plaintes qu’elles ont elles-mêmes traitées.

4.5.

L’Union de l’énergie peut stimuler le processus de mise en concurrence équitable du secteur de l’énergie de l’Union européenne qui reste un domaine où l’éventail des prix pour les consommateurs et les entreprises reste très large, et où le choix du marché peut être réduit. Le CESE estime qu’une analyse détaillée des pratiques réglementaires — qui varient considérablement d’un État membre à l’autre — servira de base à un dialogue constructif en vue de résoudre les divergences de vues; il considère que celle-ci devra être menée conjointement par les ANC, les régulateurs nationaux de l’énergie et la Commission. L’absence de choix et les pratiques restrictives à l’œuvre, par exemple, dans les systèmes de chauffage urbain pourraient se trouver, de la sorte, mises en lumière.

4.6.

L’exercice inapproprié du pouvoir de marché dans le secteur du commerce de détail alimentaire est un problème récurrent. La Commission soulève la question de savoir si les grandes chaînes de vente au détail se sont arrogées trop de pouvoir de négociation (dans le cadre des négociations bilatérales avec leurs fournisseurs) et de puissance d’achat (sur le marché en général) grâce à leur double rôle de clients et de concurrents (au moyen des marques de distributeur) vis-à-vis de leurs fournisseurs (10). Le Comité demande instamment que des mesures soient prises conformément à son récent avis sur ce sujet (11), et réitère sa recommandation que la Commission intègre un suivi du fonctionnement de la chaîne de distribution des denrées alimentaires dans les futurs rapports sur la politique de concurrence.

4.7.   Droit de la concurrence et intérêt public général

4.7.1.

Les distorsions du marché peuvent être provoquées par un certain nombre de facteurs qui ne relèvent pas du cadre strict de la politique de concurrence. Il s’agit notamment des grandes disparités entre les États membres en ce qui concerne la fiscalité des entreprises, des pratiques en matière d’emploi communément désignées sous l’appellation de dumping social, des pratiques apparaissant dans l’économie dite «des petits boulots» et des questions relatives à l’économie circulaire et à la viabilité de l’économie mondiale.

4.7.2.

Le droit de la concurrence, ancré dans les perspectives économiques du milieu du XXe siècle, doit désormais être à la hauteur des défis du XXIe siècle. Pour remédier à la séparation artificielle du marché et des sphères socio-environnementales, il conviendrait de lancer une révision globale et systématique du droit de la concurrence de l’Union européenne, qui tiendrait compte des objectifs économiques, environnementaux et sociaux.

4.7.3.

Le CESE estime que les engagements de l’Union européenne en ce qui concerne les objectifs de développement durable (ODD) et l’accord de Paris sur le changement climatique, en plus des engagements existants dans les traités, devraient être pris en compte en tant qu’objectifs d’intérêt public dans le cadre de l’application du droit de la concurrence, à l’instar des objectifs de défense des intérêts des consommateurs.

4.7.4.

Il y a lieu de reconnaître les effets des concentrations de marché sur les futures générations de consommateurs et de producteurs. Il faudrait évaluer différents modèles de calcul pour déterminer les effets préjudiciables à long terme, comme cela a déjà été fait dans le cadre des marchés publics, par exemple, avec le calcul du coût du cycle de vie.

4.8.

Dans plusieurs avis récents (12), le CESE a demandé que les mesures relatives à la fiscalité équitable adoptées par la Commission (concernant tant les multinationales que les particuliers) soient renforcées, sachant que de nombreuses questions restent en suspens. Il s’agit notamment de la lutte contre la fraude fiscale, les paradis fiscaux, la planification fiscale agressive ou la concurrence fiscale déloyale entre États membres.

4.9.

On observe, en particulier, des distorsions du marché continues et substantielles que provoquent les différences considérables existant entre régimes nationaux en matière de fiscalité des entreprises d’un État membre à l’autre, où les taux d’imposition des sociétés varient de 9 % à 35 %, pour atteindre même, dans certains d’entre eux, des niveaux encore inférieurs pour des catégories telles que les droits de propriété intellectuelle. Dans la mesure où la politique fiscale reste une compétence nationale, il faut que la politique de concurrence européenne poursuive sa lutte pour atténuer les distorsions qui en résultent.

4.10.

La directive sur la lutte contre l’évasion fiscale, qui devrait être appliquée par l’intermédiaire de la législation des États membres au plus tard le 1er janvier 2019, fixe des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale ayant une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur, et elle contient des éléments qui devraient permettre d’éviter certaines approches nationales divergentes. Cette ambition mérite d’être saluée.

Bruxelles, le 12 décembre 2018.

Le président du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  Règlement (UE) no 330/2010 de la Commission (JO L 102 du 23.4.2010, p. 1)

https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX:32010R0330

(2)  http://ec.europa.eu/competition/antitrust/proposed_directive_fr.pdf

(3)  JO C 283 du 10.8.2018, p. 69.

(4)  Directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil relative aux actions en dommages et intérêts (JO L 349 du 5.12.2014, p. 1).

(5)  JO C 345 du 13.10.2017, p. 70.

(6)  Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur [COM(2017) 142 final].

(7)  Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la protection des personnes dénonçant les infractions au droit de l’Union [COM(2018) 218 final].

(8)  Avis du CESE sur le thème «Renforcer la protection des lanceurs d’alerte au niveau de l’Union européenne». Rapporteure: Franca Salis-Madinier (JO C 62 du 15.2.2019, p. 155).

(9)  Règlement (UE) 2017/2394 du Parlement européen et du Conseil (JO L 345 du 27.12.2017, p. 1).

(10)  Document de travail des services de la Commission, SWD(2018) 349 final.

(11)  JO C 283 du 10.8.2018, p. 69.

(12)  JO C 262 du 25.7.2018, p. 1; JO C 197 du 8.6.2018, p. 29; JO C 81 du 2.3.2018, p. 29.


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