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Document 52000AC1181

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des prescriptions et des procédures harmonisées pour le chargement et le déchargement sûrs des vraquiers"

JO C 14 du 16.1.2001, p. 37–40 (ES, DA, DE, EL, EN, FR, IT, NL, PT, FI, SV)

52000AC1181

Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des prescriptions et des procédures harmonisées pour le chargement et le déchargement sûrs des vraquiers"

Journal officiel n° C 014 du 16/01/2001 p. 0037 - 0040


Avis du Comité économique et social sur la "Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil établissant des prescriptions et des procédures harmonisées pour le chargement et le déchargement sûrs des vraquiers"

(2001/C 14/08)

Le 23 juin 2000, le Conseil a décidé, conformément aux dispositions de l'article 80, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social sur la proposition susmentionnée.

La section "Transports, énergie, infrastructures, société de l'information", chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a élaboré son avis le 28 septembre 2000 (Rapporteuse: Mme Bredima-Savopoulou).

Lors de sa 376e session plénière du 19 octobre 2000, le Comité a adopté l'avis suivant à l'unanimité.

1. Introduction

1.1. Dans le monde, plus de 5000 vraquiers transportent 30 % des cargaisons transportées sur les océans de la planète (cargaisons sèches en vrac). Ils sont confrontés à des conditions de marché difficiles et à des exigences de fonctionnement très élevées. Les vraquiers doivent être manoeuvrés avec soin, dans les ports comme en mer. Les contraintes et les avaries résultant accidentellement du chargement ou du déchargement sont susceptibles d'entraîner des défaillances structurelles et, partant, des pertes inacceptables en vies humaines.

1.2. Ces dernières années, le nombre de vraquiers qui se sont perdus en mer et les pertes en vies humaines qui en ont résulté suscitent une préoccupation de plus en plus vive. Selon de récentes statistiques, 131 vraquiers ont coulé pendant la période 1994-1998, entraînant la perte de 731 vies humaines(1). Les recherches montrent que les contraintes excessives dues à un chargement incorrect, à des taux de charge excessifs dans le cadre d'une procédure mal contrôlée ou à des avaries de structures des cales au cours du déchargement ont contribué à des défaillances structurelles de la coque et, partant, à des pertes de navires. Les opérations de manutention des cargaisons sèches en vrac ont un impact le plus souvent invisible, mais non moins potentiellement dangereux sous l'action des forces dynamiques des vagues.

1.3. La sécurité des vraquiers est l'une des plus importantes questions dont s'occupe l'Organisation maritime internationale (OMI). Celle-ci a récemment instauré une série de mesures de sécurité qui couvrent tant les aspects structurels qu'opérationnels de ces navires. Les règles pratiques pour la sécurité du chargement et du déchargement des vraquiers (recueil BLU) sont une de ces mesures. Ces règles ont pour objet d'aider les personnes responsables du chargement et du déchargement sûrs des vraquiers d'exercer leurs fonctions et de promouvoir la sécurité des vraquiers.

1.4. L'avis du CES a été demandé sur la proposition de directive présentée par la Commission en vue d'établir des prescriptions et des procédures harmonisées pour le chargement et le déchargement sûrs des vraquiers.

2. La proposition de la Commission

2.1. Dans sa communication pour une politique commune de la sécurité maritime (1993), la Commission soulignait le problème des naufrages de navires vraquiers, et appelait à une action prioritaire concernant cette catégorie vulnérable de navires.

2.2. L'évaluation des causes des pertes de vraquiers effectuée par Intercargo indique que les disparitions soudaines dont les causes n'ont pu être établies soulèvent la question de savoir si des opérations de manutention erronées ne pourraient être à l'origine de certains des problèmes. Les résultats d'une étude spéciale de la Commission européenne font clairement apparaître la nécessité d'améliorer les procédures de coopération et de communication entre les vraquiers et les terminaux de manutention des cargaisons sèches en vrac dans les ports européens. L'étude suggère que les terminaux se conforment à une politique d'assurance qualité.

2.3. En ce qui concerne les aspects opérationnels pouvant affecter la sûreté des vraquiers, la Commission est d'avis qu'il convient de prêter une attention particulière aux aspects liés à l'interface navire/port. Cependant, la manutention des cargaisons étant intrinsèquement liée à la sûreté des navires, l'absence d'application uniforme des règles de sécurité d'un port à l'autre peut fausser le jeu de la concurrence.

2.4. L'objet de la mesure proposée est d'assurer une meilleure protection des navires vraquiers faisant escale aux terminaux de la Communauté pour le chargement ou le déchargement de cargaisons solides en vrac. La proposition établit des exigences en ce qui concerne l'aptitude des vraquiers et des terminaux, les responsabilités des capitaines et des représentants de terminaux, les procédures entre les vraquiers et les terminaux et le rôle des autorités compétentes.

2.5. La proposition vise à établir un cadre juridique communautaire pour l'application harmonisée des dispositions pertinentes du recueil de règles pratiques pour la sécurité du chargement et du déchargement des vraquiers (recueil BLU), adopté par l'OMI en décembre 1997 dans la résolution A.862(20) de l'assemblée de l'OMI. Les dispositions fondamentales obligatoires proposées sont basées sur les sections fondamentales du recueil BLU, vu qu'il n'a pas été jugé nécessaire d'intégrer dans la proposition toutes les dispositions dudit recueil.

3. Observations générales

3.1. Le CES, dans son avis sur la communication de la Commission "Pour une politique commune de la sécurité maritime"(2) a souscrit au point de vue selon lequel "la politique des transports maritimes de la Communauté doit assurer la compétitivité des services de transport et faire en sorte que ces services puissent s'effectuer à un niveau de risque minimum pour l'équipage, les passagers, les marchandises et les navires, le milieu marin et les activités côtières". La proposition suit cette approche et étend le champ d'application du programme d'action "Pour une politique commune de la sécurité maritime" à un domaine important des aspects opérationnels de la sûreté dans lequel le respect des règles et l'harmonisation sont pour l'instant limités.

3.2. Le CES a également précisé dans l'avis susmentionné(3) qu'"il appartient aux armateurs, aux compagnies maritimes, aux gens de mer, aux assureurs, aux affréteurs, aux États du pavillon, aux sociétés de classification et aux États du port de conjuguer leurs efforts ... [pour] trouver la formule permettant d'obtenir des mers plus propres et plus sûres". De même, la Charte de l'industrie maritime signée lors de la conférence Mare Forum d'Amsterdam le 22 juin 1999, par 24 organisations de l'industrie maritime, y compris les 2 organisations portuaires (ESPO(4) et FEPORT(5)), dispose expressément que les considérations de sécurité doivent faire partie intégrante des activités de tous les maillons de la chaîne de responsabilité, tant en mer qu'à terre.

3.3. Il y a environ 100 ports/terminaux commerciaux dans l'UE où les vraquiers secs chargent ou déchargent leur cargaison. Les agents portuaires, les exploitants de terminaux et, ce qui est tout aussi important, les affréteurs qui sont susceptibles d'être propriétaires des terminaux, doivent être persuadés du caractère dangereux de leurs pratiques de manutention des cargaisons. Depuis trop longtemps, les ports et les terminaux recourent à des pratiques de manutention des cargaisons dictées par la nécessité de charger et décharger les cargaisons à un rythme aussi élevé que le permettent leurs équipements. Dans les ports de chargement, la pression est constante pour que les navires acceptent les cargaisons à un rythme de plus en plus soutenu. Dans les ports de déchargement, l'utilisation de bennes preneuses très lourdes ou de marteaux pneumatiques pour traiter la cargaison ainsi que le recours à du gros matériel de terrassement doté de lames en acier sont courants sur de nombreux quais. À cet égard, les recherches de l'AISC(6) montrent que la manutention incorrecte de lourdes cargaisons à haute densité durant le chargement ou le déchargement peut produire des contraintes excessives et des avaries de structure aux cales et aux cloisons et endommager le revêtement qui protège les cales à cargaison de la corrosion. À la longue, cela peut réduire ou menacer la sécurité structurelle des navires lorsque ceux-ci essuient du mauvais temps.

3.3.1. Nombreux sont les vraquiers qui, poussés par des considérations commerciales à ne pas dévier de leur route ou à ne pas ralentir en vue de rejoindre leur port à temps, se sont perdus en mer ou ont subi des avaries de structure dans des zones où régnaient de mauvaises conditions météorologiques.

3.3.2. Le capitaine et l'équipage sont responsables de la maintenance de leur navire dans des conditions normales d'exploitation. Toutefois, dans de nombreux cas, la nécessité de garantir la sécurité du navire pour assurer la propre sécurité des membres d'équipage peut être subordonnée à des pressions économiques, comme le montre l'exploitation de navires ne répondant pas aux normes. En outre, le travail astreignant et les différentes tâches dont doivent s'acquitter les capitaines et leur équipage dans les ports provoquent la fatigue et sont par conséquent préjudiciables à la sécurité d'exploitation des navires.

3.3.3. Le CES est d'avis que ce genre de pressions économiques sur les navires et les équipages ne doivent pas être autorisées à éroder les marges de sécurité applicables.

3.4. Les officiers ont l'obligation de s'employer à prévenir les avaries sur leur navire. Toutefois, dans la plupart des cas, tant que le déchargement n'est pas terminé, il est difficile d'établir que des avaries de structure sont survenues, et il est encore plus ardu de les empêcher dans l'absolu. Il est également très difficile d'établir la culpabilité du terminal, vu que les navires quittent rapidement les quais une fois le déchargement intervenu. Afin de permettre que les problèmes potentiels soient rapidement identifiés, l'OMI, dans sa résolution A.862(20), a établi des orientations à l'intention des équipages de navire et du personnel des terminaux concernant les principales zones des vraquiers susceptibles d'être touchées par des avaries ou par la corrosion. Les orientations recommandent que les exploitants de terminaux et les équipages de navires procèdent eux-mêmes à des inspections régulières des cales à cargaison, des panneaux d'écoutille et des ballasts afin de déceler les éventuels avaries ou défauts. Elles soulignent également que du point de vue de la sécurité, il est souhaitable que les inspections des cales à cargaison par les équipages de navire et les exploitants de terminaux interviennent bien avant toute opération de chargement et après toute opération de déchargement, quoiqu'il soit nécessaire de tenir compte de limitations pratiques.

3.5. Le CES remarque que, même si le recueil BLU de l'OMI n'est pas en soi un instrument juridiquement contraignant, certaines parties du recueil ont été intégrées dans la règle VI/7 de la convention SOLAS entrée en vigueur le 1er juillet 1998, et qu'elles sont donc devenues contraignantes à cette date. La règle susmentionnée couvre spécifiquement les interactions entre les navires et les terminaux de chargement et de déchargement des cargaisons en vrac. Il est estimé que la manière la plus appropriée et la plus efficace de parvenir à renforcer la sécurité des vraquiers consiste à rendre les principales dispositions des résolutions de l'OMI contraignantes via la législation communautaire et à introduire les mesures complémentaires voulues, notamment la mise en oeuvre d'un système de gestion de la qualité par les terminaux.

3.6. Le CES accueille favorablement la proposition, qui n'a que trop tardé, et souscrit à son principal objectif, à savoir mettre en oeuvre dans l'UE, de manière harmonisée, les principes essentiels et les dispositions des résolutions de l'assemblée de l'OMI concernant la sécurité des navires transportant des cargaisons solides en vrac et le chargement ou le déchargement sûrs de ces navires, en particulier les cinq principes fondamentaux visés dans le dispositif de la résolution A.862 (20) de l'OMI. Le CES estime que la proposition devrait également intégrer les chapitres pertinents de la résolution A.866 (20) de l'OMI. L'instrument juridique proposé, à savoir la directive, offrira aux États membres une grande marge de flexibilité, conformément au principe de subsidiarité.

4. Observations spécifiques

4.1. Article 2 - Champ d'application

Le CES partage le point de vue de la Commission selon lequel, vu que le recueil BLU ne restreint pas son champ d'application en fonction de la taille des terminaux ni des vraquiers, il convient d'éviter de créer un régime de sécurité à deux vitesses, dans lequel certaines catégories de vraquiers ou de terminaux seraient exclus du champ d'application de la présente directive en fonction de leur taille.

4.2. Article 3 - Définitions

Le CES fait observer que la définition de "représentant du terminal" est susceptible d'être entendue comme nécessitant que le terminal désigne un représentant pour chaque navire. Quoique cela serait possible dans la pratique, il convient qu'une seule personne assume les fonctions de représentant du terminal, vu qu'il s'agit du pendant de la "personne désignée" prévue dans le Recueil ISM(7), et qu'elle ait la responsabilité générale d'assurer le respect par le terminal de ses obligations au titre de l'annexe VI.

4.3. Article 5 - Exigences concernant l'aptitude des terminaux

L'article 5 est un élément indispensable de l'ensemble garantissant des responsabilités équilibrées entre les navires et les terminaux en vue d'une exploitation sûre. L'obligation qui est faite aux terminaux d'élaborer, de mettre en oeuvre et de maintenir un système de gestion de la qualité certifié conformément aux normes ISO 9001:2000 doit être considérée comme le pendant de l'obligation faite aux navires et aux compagnies de navigation de conformer leurs activités au recueil ISM. Il est estimé que seuls 20 % des terminaux ont un système de gestion de la qualité. En outre, certains terminaux d'Europe occidentale sont en mauvaise condition comparés à certains terminaux des PVD. Le CES félicite la Commission de sa prévoyance et de son objectif consistant à garantir, aussi bien à bord des vraquiers que dans les terminaux, un niveau équivalent d'engagement en faveur de l'application des principes convenus internationalement pour la gestion de la sécurité et de la qualité.

4.4. Article 6 - Responsabilités des capitaines et des représentants de terminaux

Le recueil BLU et la directive proposée définissent avec précision les responsabilités respectives et distinctes du capitaine et du représentant du terminal. La responsabilité générale du capitaine doit être considérée comme une reconnaissance de son rôle primordial pour les questions afférentes à la sécurité de son navire et de la primauté de son jugement en cas de divergences portant sur des problèmes opérationnels liés à l'interface navire/port. En revanche, elle ne doit pas être considérée comme une responsabilité qui lui serait également attribuée pour des pratiques, des actions ou des omissions du terminal.

4.5. Article 9 - Réparation des avaries survenues au cours du chargement ou du déchargement

Le recueil BLU prévoit qu'en cas d'avaries survenues au cours du chargement ou du déchargement, les mesures à prendre, à savoir effectuer immédiatement des réparations ou les reporter, doivent satisfaire l'administration ou un organisme agréé par elle et les autorités compétentes de l'État du port. Il dispose également que lorsque des réparations immédiates sont jugées nécessaires, elles doivent être effectuées à la satisfaction du capitaine avant que le navire ne quitte le port. Selon la directive proposée, la décision sera prise par les autorités de contrôle par l'État du port, qui pourront se baser sur la recommandation d'un organisme agréé (apparemment différent de l'organisme agréé par l'administration). Il pourrait être opportun de préciser que le choix de recourir à un organisme différent doit être limité aux seuls cas des navires certifiés par des organismes non agréés par l'UE.

4.6. Article 10 - Surveillance et établissement de rapports

Le CES est d'avis que la portée de la surveillance devrait être étendue à la surveillance et au contrôle de l'élaboration, de la mise en oeuvre et de la maintenance par les terminaux d'un système de gestion de la qualité tel que prévu à l'article 5, paragraphe 4.

4.7. Annexes V et VI - Obligations du capitaine et du représentant du terminal avant et pendant les obligations de chargement ou de déchargement

Les obligations du capitaine et du représentant du terminal devraient également inclure lorsque c'est possible l'obligation de procéder à des inspections des cales à cargaison bien avant le commencement du chargement et après tout déchargement, en vue de déceler tout dommage ou déficience.

5. Conclusions

5.1. Le CES estime que la mise en oeuvre de la directive proposée renforcera la sécurité des vraquiers dans les ports communautaires et qu'elle pourrait donner un signe fort témoignant de la volonté des États membres de soutenir les mesures arrêtées au niveau international. La directive réduira également les risques de concurrence entre terminaux.

5.2. Le CES souscrit aux objectifs proposés, qui répondent aux préoccupations légitimes de l'industrie du transport maritime. La sécurité des vraquiers est bien réglementée et les mécanismes sont en place pour assurer la mise en oeuvre et le respect des législations en vigueur aux niveaux international et communautaire. Les mesures complémentaires introduites par la directive permettront de trouver l'équilibre qui convient entre les intérêts des navires et ceux des terminaux. Cet équilibre devrait être préservé si l'on entend parvenir à améliorer la sécurité.

Bruxelles, le 19 octobre 2000.

Le Président

du Comité économique et social

Göke Frerichs

(1) Intercargo: Rapport sur les accidents de navires vraquiers, 1998.

(2) JO C 34 du 2.2.1994, p. 47.

(3) JO C 34 du 2.2.1994, p. 47.

(4) ESPO: Organisation européenne des ports maritimes communautaires.

(5) FEPORT: Fédération des opérateurs de ports privés en Europe.

(6) AISC: Association internationale des sociétés de classification.

(7) Recueil ISM: Code international sur la gestion pour la sécurité.

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