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Document 62009CJ0546

    Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 31 mars 2011.
    Aurubis Balgaria AD contre Nachalnik na Mitnitsa Stolichna.
    Demande de décision préjudicielle: Varhoven administrativen sad - Bulgarie.
    Code des douanes - Droits de douane - Dette douanière à l’importation - Intérêts de retard - Période de perception des intérêts de retard - Intérêts compensatoires.
    Affaire C-546/09.

    Recueil de jurisprudence 2011 I-02531

    Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2011:199

    Affaire C-546/09

    Aurubis Balgaria AD

    contre

    Nachalnik na Mitnitsa Stolichna, anciennement Nachalnik na Mitnitsa Sofia

    (demande de décision préjudicielle, introduite par

    le Varhoven administrativen sad)

    «Code des douanes — Droits de douane — Dette douanière à l’importation — Intérêts de retard — Période de perception des intérêts de retard — Intérêts compensatoires»

    Sommaire de l'arrêt

    1.        Union douanière — Naissance et recouvrement de la dette douanière en cas d'infractions douanières — Perception d'intérêts de retard — Admissibilité — Critères

    (Règlement du Conseil nº 2913/92, art. 202 à 205, 210 à 211, 220 et 232, § 1, b); règlement de la Commission nº 2454/93)

    2.        Union douanière — Naissance et recouvrement de la dette douanière en cas d'infractions douanières — Perception d'intérêts compensatoires — Inadmissibilité

    (Règlement du Conseil nº 2913/92, art. 214, § 3; règlement de la Commission nº 2454/93, art. 519, § 1)

    3.        Droit de l'Union — Principes généraux du droit — Principe de légalité des peines — Portée

    1.        L’article 232, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 2913/92, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement nº 1791/2006, doit être interprété en ce sens que les intérêts de retard relatifs au montant des droits de douane restant à recouvrer ne peuvent être perçus, en vertu de cette disposition, que pour la période postérieure à l’expiration du délai de paiement dudit montant.

    L’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes n’a pour vocation ni de prévenir les pertes financières subies par les autorités douanières ni de compenser les avantages découlant, pour les opérateurs, des retards intervenus, en raison du comportement de ces derniers, dans la prise en compte, au sens dudit code, de la dette douanière ainsi que dans la détermination du montant ou du débiteur de celle-ci.

    En effet, lorsque la dette douanière naît sur le fondement des articles 202 à 205, 210, 211 ainsi que 220 du code des douanes, qui visent tous des situations se caractérisant par une méconnaissance par l’opérateur concerné de la réglementation douanière de l’Union, ni le code des douanes ni le règlement nº 2454/93, fixant certaines dispositions d’application du règlement nº 2913/92, ne prévoient des mesures particulières, telles qu’une majoration des droits de douane dont le montant correspond aux intérêts de retard qui auraient été dus pour la période comprise entre la naissance de la dette douanière et sa prise en compte, ou entre la date d’exigibilité de ladite dette prise en compte à l’origine et la prise en compte a posteriori de cette dette.

    (cf. points 32-34, disp.1)

    2.        En l’absence de dispositions pertinentes dans le règlement nº 2454/93, fixant certaines dispositions d’application du règlement nº 2913/92 établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement nº 214/2007, l’article 214, paragraphe 3, du règlement nº 2913/92, tel que modifié par le règlement nº 1791/2006, doit être interprété en ce sens que les autorités nationales ne peuvent, sur le fondement de cette disposition, infliger au débiteur de la dette douanière des intérêts compensatoires pour la période située entre la date de la déclaration en douane initiale et la date de la prise en compte postérieure de celle-ci.

    L’application des intérêts compensatoires n’est prévue, conformément à l’article 519, paragraphe 1, du règlement nº 2454/93, qu’en cas de naissance d’une dette douanière pour des produits compensateurs ou des marchandises d’importation sous perfectionnement actif ou en admission temporaire.

    Dès lors, l’administration douanière ne peut pas se fonder sur l’article 214, paragraphe 3, du code des douanes afin d’appliquer un intérêt compensatoire dans le cadre d’autres régimes douaniers.

    (cf. points 37-39, disp.2)

    3.        Les principes généraux du droit de l’Union et, notamment, le principe de la légalité des délits et des peines s’opposent à ce que les autorités nationales appliquent à une infraction douanière une sanction qui n’est pas expressément prévue par la législation nationale.

    En effet, ce principe exige que la loi définisse clairement les infractions et les peines qui les répriment. Cette condition se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et au besoin à l’aide de l’interprétation qui en est donnée par les tribunaux, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale.

    (cf. points 42-43, disp.3)







    ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

    31 mars 2011 (*)

    «Code des douanes – Droits de douane – Dette douanière à l’importation – Intérêts de retard – Période de perception des intérêts de retard – Intérêts compensatoires»

    Dans l’affaire C‑546/09,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Varhoven administrativen sad (Bulgarie), par décision du 20 octobre 2009, parvenue à la Cour le 23 décembre 2009, dans la procédure

    Aurubis Balgaria AD

    contre

    Nachalnik na Mitnitsa Stolichna, anciennement Nachalnik na Mitnitsa Sofia,

    LA COUR (cinquième chambre),

    composée de M. J.-J. Kasel, président de chambre, MM. M. Ilešič et E. Levits (rapporteur), juges,

    avocat général: M. P. Cruz Villalón,

    greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

    vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 janvier 2011,

    considérant les observations présentées:

    –        pour Aurubis Balgaria AD, par Me L. Ruessmann, avocat, et Me S. Yordanova, advokat,

    –        pour Nachalnik na Mitnitsa Stolichna, anciennement Nachalnik na Mitnitsa Sofia, par Mes T. Popgeorgieva et S. Valkova, advokati,

    –        pour la Commission européenne, par M. B.-R. Killmann et Mme S. Petrova, en qualité d’agents,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

    rend le présent

    Arrêt

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 201, paragraphes 1, sous a), et 2, lu en combinaison avec les articles 214, 222, paragraphe 1, sous a), et 232, paragraphe 1, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1791/2006 du Conseil, du 20 novembre 2006 (JO L 363, p. 1, ci-après le «code des douanes»).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Aurubis Balgaria AD (ci-après «Aurubis») au Nachalnik na Mitnitsa Stolichna, anciennement Nachalnik na Mitnitsa Sofia (directeur de la douane de Sofia, ci-après le «Nachalnik»), au sujet du montant des intérêts sur la dette supplémentaire dont ladite société a été déclarée redevable au titre de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») ainsi que de la date à compter de laquelle lesdits intérêts courent.

     Le cadre juridique

     Le droit de l’Union

    3        L’article 201, paragraphes 1, sous a), et 2, du code des douanes prévoit:

    «1.      Fait naître une dette douanière à l’importation:

    a)      la mise en libre pratique d’une marchandise passible de droits à l’importation

    ou

    [...]

    2.      La dette douanière naît au moment de l’acceptation de la déclaration en douane en cause.»

    4        L’article 214, paragraphe 3, du code des douanes dispose:

    «Des intérêts compensatoires sont à appliquer dans les cas et les conditions définis par les dispositions arrêtées selon la procédure du comité, pour éviter toute obtention d’un avantage financier en raison du report de la date de naissance ou de prise en compte de la dette douanière.»

    5        L’article 222, paragraphe 1, sous a), premier et deuxième alinéas, du code des douanes prévoit:

    «Tout montant de droits qui a fait l’objet de la communication visée à l’article 221 doit être acquitté par le débiteur dans les délais suivants:

    a)      si cette personne ne bénéficie d’aucune des facilités de paiement prévues aux articles 224 à 229, le paiement doit être effectué dans le délai qui lui est imparti.

    Sans préjudice de l’article 244 deuxième alinéa, ce délai ne peut excéder dix jours à compter de la communication au débiteur du montant des droits dus et, en cas de globalisation des prises en compte dans les conditions prévues à l’article 218 paragraphe 1 deuxième alinéa, il doit être fixé de façon à ne pas permettre au débiteur d’obtenir un délai de paiement plus long que s’il avait bénéficié d’un report de paiement.»

    6        L’article 232 du code des douanes énonce:

    «1.      Lorsque le montant de droits n’a pas été payé dans le délai fixé:

    […]

    b)      un intérêt de retard est perçu en sus du montant des droits. Le taux de l’intérêt de retard peut être supérieur au taux de l’intérêt de crédit. Il ne peut être inférieur à ce dernier taux.

    2.      Les autorités douanières peuvent renoncer à demander un intérêt de retard:

    […]

    c)      si le paiement des droits intervient dans un délai de cinq jours après l’échéance prévue pour le paiement.

    […]» 

    7        L’article 519, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement n° 2913/92 (JO L 253, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 214/2007 de la Commission, du 28 février 2007 (JO L 62, p. 6, ci-après le «règlement d’application»), est libellé comme suit:

    «En cas de naissance d’une dette douanière pour des produits compensateurs ou des marchandises d’importation sous perfectionnement actif ou en admission temporaire, un intérêt compensatoire est dû sur le montant des droits à l’importation pour la période considérée.»

    8        Conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347, p. 1), les importations de biens sont soumises à la TVA.

    9        S’agissant du paiement de la TVA due lors de l’importation de marchandises, l’article 211, premier alinéa, de la directive 2006/112 dispose que les États membres arrêtent eux-mêmes les modalités de paiement au titre d’importations de biens.

     Le droit national

    10      La loi relative à la taxe sur la valeur ajoutée (Zakon za danak varhu dobavenata stoynost, DV n° 63, du 4 août 2006), telle que modifiée (DV n° 52, du 29 juin 2007, ci-après la «loi relative à la TVA»), prévoit à son article 59, paragraphe 2:

    «La naissance, conformément aux dispositions douanières, d’une obligation de payer des intérêts sur les droits de douane résultant d’une dette douanière fait également naître une obligation de payer des intérêts sur la taxe non acquittée.»

    11      L’article 60 de la loi relative à la TVA, intitulé «Paiement de l’impôt à l’importation», dispose:

    «(1)      La taxe perçue par les autorités douanières est prise en compte dans le budget de la République selon les modalités et dans les délais prévus pour le paiement des droits de douane.

    (2)      Les autorités fiscales et douanières ne peuvent compenser par d’autres créances la taxe perçue par les autorités douanières lors de l’importation de marchandises sur le territoire national.»

     Les faits à l’origine du litige et les questions préjudicielles

    12      Au cours de la période allant du 6 au 30 novembre 2007, Aurubis a importé du concentré de cuivre originaire de Macédoine. Ces marchandises ont été «mises en libre pratique».

    13      Les déclarations en douane ont été remplies sur la base d’un prix provisoire, indiqué sur la facture du vendeur et établi dans le respect de la méthode de fixation du prix prévue par l’accord commercial conclu entre ce vendeur et Aurubis.

    14      Le prix final des marchandises a été fixé par la facture définitive du 18 février 2008.

    15      Le 20 juin 2008, Aurubis a, de sa propre initiative et conformément à l’article 78, paragraphe 1, du code des douanes, adressé une lettre aux autorités douanières les informant que le fournisseur avait établi la facture finale concernant les marchandises importées et invitant ces autorités à agir dans le cadre de leurs compétences légales dans l’hypothèse où elles estimeraient qu’une modification a posteriori de la valeur douanière de la marchandise était nécessaire.

    16      Le 15 juillet 2008, le Nachalnik a adopté une décision constatant une créance supplémentaire de l’État en matière de TVA, d’un montant de 113 822,82 BGN, exigible avec les intérêts légaux à compter de la naissance de la dette douanière (ci-après la «décision de 2008»). Cette décision, qui accordait un délai de paiement de sept jours à Aurubis, a été notifiée à cette dernière le 16 juillet 2008.

    17      Aurubis s’est acquittée, par mandat de paiement du 23 juillet 2008, de sa dette de TVA telle que fixée par la décision de 2008. Cette dette a été prise en compte le 24 juillet 2008.

    18      S’opposant à l’obligation de payer les intérêts de retard, imposée par la décision de 2008, Aurubis a saisi l’Administrativen sad Sofia-Grad (tribunal administratif de la ville de Sofia), qui, par un jugement du 19 mars 2009, a confirmé la décision de 2008.

    19      Le 3 avril 2009, Aurubis a formé un pourvoi en cassation devant le Varhoven administrativen sad (Cour administrative suprême) contestant la légalité dudit jugement.

    20      En se fondant sur les articles 201 et 214 du code des douanes, le Nachalnik considère que les intérêts de retard sur des dettes douanières et de TVA acquittées a posteriori sont dus à compter de la date à laquelle les marchandises ont été «mises en libre pratique». Pour sa part, Aurubis estime que les intérêts de retard ne sont dus qu’à partir d’une date plus tardive, à savoir celle – postérieure à la prise en compte de la dette douanière et à la communication de celle-ci au débiteur – à laquelle expire le délai de paiement de la dette prise en compte tardivement.

    21      Dans ce contexte, le Varhoven administrativen sad a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

    «1)      L’article 232, paragraphe 1, sous b), du [règlement n° 2913/92] doit-il être interprété par les juridictions nationales en ce sens que les autorités douanières ne peuvent imposer des intérêts de retard sur les dettes douanières supplémentaires que pour la période qui fait suite à la prise en compte, à la communication au débiteur et à l’expiration du délai fixé par l’autorité douanière – conformément à l’article 222, paragraphe 1, sous a), dudit règlement – pour le paiement de la dette douanière supplémentaire?

    2)      En l’absence de dispositions pertinentes dans le [règlement nº 2454/93], l’article 214, paragraphe 3, du [règlement n° 2913/92] doit-il être interprété par les juridictions nationales en ce sens que les autorités nationales ne peuvent pas appliquer des intérêts compensatoires pour la période située entre la date de la déclaration en douane initiale et la date de la prise en compte postérieure?

    3)      Les dispositions du [règlement n° 2913/92] et du [règlement nº 2454/93] doivent-elles être interprétées en ce sens que, lorsqu’il n’existe pas de législation nationale prévoyant expressément une majoration des droits de douane ou une autre sanction nationale à hauteur du montant qui aurait été perçu à titre d’intérêts de retard entre la date de naissance de la dette fiscale et la date de sa prise en compte postérieure, le droit communautaire ne permet pas aux juridictions nationales de procéder à une telle majoration ni d’imposer une telle sanction?»

     Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

    22      Le litige au principal concernant l’exigibilité des intérêts de retard relatifs à une dette supplémentaire en matière de TVA, il convient au préalable d’examiner la recevabilité de la demande de décision préjudicielle qui porte sur l’interprétation des règles de l’Union en matière douanière.

    23      En effet, lesdites règles ne s’appliquent à ce litige qu’en vertu des dispositions du droit bulgare et, notamment, des articles 59, paragraphe 2, et 60, paragraphe 1, de la loi relative à la TVA qui renvoient au droit douanier, en disposant, respectivement, que la naissance, selon les dispositions douanières, d’une obligation de payer des intérêts sur les droits de douane résultant d’une dette douanière fait également naître une obligation de payer des intérêts sur la TVA non acquittée et que cette taxe est prise en compte selon les modalités et les délais applicables au paiement des droits de douane.

    24      À cet égard, il suffit de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie, la Cour a compétence pour répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi alors même que les faits au principal se situent en dehors du champ d’application du droit de l’Union, dès lors que la législation nationale s’est conformée, pour les solutions qu’elle apporte à une situation non visée par le droit de l’Union, à celles retenues par ce droit. Selon la jurisprudence de la Cour, il existe en effet, pour l’ordre juridique de l’Union, un intérêt manifeste à ce que, pour éviter des divergences d’interprétation futures, toute disposition du droit de l’Union reçoive une interprétation uniforme, quelles que soient les conditions dans lesquelles elle est appelée à s’appliquer (voir en ce sens, notamment, arrêts du 17 juillet 1997, Giloy, C‑130/95, Rec. p. I‑4291, points 19 à 28; du 11 octobre 2001, Adam, C‑267/99, Rec. p. I‑7467, points 23 à 29; du 15 janvier 2002, Andersen og Jensen, C‑43/00, Rec. p. I‑379, points 15 à 19; du 16 mars 2006, Poseidon Chartering, C‑3/04, Rec. p. I‑2505, points 14 à 19, ainsi que du 21 octobre 2010, Eredics et Sápi, C‑205/09, non encore publié au Recueil, point 33).

    25      Dans ces conditions, il y a lieu de déclarer recevable la demande de décision préjudicielle.

     Sur les questions préjudicielles

     Sur la première question

    26      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes doit être interprété en ce sens que les intérêts de retard relatifs au montant des droits de douane restant à recouvrer ne peuvent être perçus, en vertu de cette disposition, que pour la période postérieure à l’expiration du délai de paiement dudit montant.

    27      À cet égard, il convient de constater que, selon le libellé même de l’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes, un intérêt de retard est perçu en sus des droits «lorsque le montant de droits n’a pas été payé dans le délai fixé».

    28      La perception de l’intérêt de retard est par conséquent subordonnée à l’absence de paiement du montant des droits dans le délai fixé et il ne peut être procédé à une telle perception lorsque le débiteur de la dette douanière s’est acquitté de celle-ci dans le délai qui lui a été consenti.

    29      Les intérêts de retard visent ainsi à pallier les conséquences découlant du dépassement du délai de paiement et, notamment, à éviter que le débiteur de la dette douanière ne tire indûment avantage du fait que les montants dus au titre de cette dette demeurent à sa disposition au-delà du délai fixé pour l’acquittement de celle-ci. C’est dans cette perspective que l’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes prévoit que le taux de l’intérêt de retard ne peut être inférieur au taux de l’intérêt de crédit.

    30      Cette interprétation tant littérale que téléologique est confirmée par l’économie de l’article 232 du code des douanes, en ce qu’il prévoit, à son paragraphe 2, sous c), que les autorités douanières peuvent renoncer à demander un intérêt de retard si le paiement des droits intervient dans un délai de cinq jours après l’échéance prévue pour le paiement de ceux-ci.

    31      Or, puisque le paiement de la dette douanière dans les cinq jours après l’échéance habilite les autorités douanières à renoncer à la perception des intérêts de retard, le calcul de ceux-ci doit nécessairement lui aussi avoir pour point de départ ladite échéance.

    32      Dès lors, conformément à l’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes, les intérêts de retard ne peuvent être perçus que pour la période postérieure à l’expiration du délai de paiement de la dette douanière, ledit article n’ayant pour vocation ni de prévenir les pertes financières subies par les autorités douanières ni de compenser les avantages découlant, pour les opérateurs, des retards intervenus, en raison du comportement de ces derniers, dans la prise en compte, au sens dudit code, de la dette douanière ainsi que dans la détermination du montant ou du débiteur de celle-ci.

    33      En effet, lorsque la dette douanière naît sur le fondement des articles 202 à 205, 210, 211 ainsi que 220 du code des douanes, qui visent tous des situations se caractérisant par une méconnaissance par l’opérateur concerné de la réglementation douanière de l’Union, ni le code des douanes ni le règlement d’application ne prévoient des mesures particulières, telles qu’une majoration des droits de douane dont le montant correspond aux intérêts de retard qui auraient été dus pour la période comprise entre la naissance de la dette douanière et sa prise en compte, ou entre la date d’exigibilité de ladite dette prise en compte à l’origine et la prise en compte a posteriori de cette dette (voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2003, Hannl-Hofstetter, C‑91/02, Rec. p. I‑12077, points 19 et 23).

    34      Par conséquent, au vu des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l’article 232, paragraphe 1, sous b), du code des douanes doit être interprété en ce sens que les intérêts de retard relatifs au montant des droits de douane restant à recouvrer ne peuvent être perçus, en vertu de cette disposition, que pour la période postérieure à l’expiration du délai de paiement dudit montant.

     Sur la deuxième question

    35      Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, en l’absence de dispositions pertinentes dans le règlement d’application, l’article 214, paragraphe 3, du code des douanes doit être interprété en ce sens que les autorités nationales ne peuvent, sur le fondement de cette disposition, infliger au débiteur de la dette douanière des intérêts compensatoires pour la période située entre la date de la déclaration en douane initiale et la date de la prise en compte postérieure de celle-ci.

    36      Or, à cet égard, il suffit de relever que l’article 214, paragraphe 3, du code des douanes prévoit expressément que les cas et conditions d’application des intérêts compensatoires sont «définis par les dispositions arrêtées selon la procédure du comité».

    37      L’application des intérêts compensatoires n’est prévue, conformément à l’article 519, paragraphe 1, du règlement d’application, qu’en cas de naissance d’une dette douanière pour des produits compensateurs ou des marchandises d’importation sous perfectionnement actif ou en admission temporaire.

    38      Dès lors, l’administration douanière ne peut pas se fonder sur l’article 214, paragraphe 3, du code des douanes afin d’appliquer un intérêt compensatoire dans le cadre d’autres régimes douaniers.

    39      Il convient, par conséquent, de répondre à la deuxième question que, en l’absence de dispositions pertinentes dans le règlement d’application, l’article 214, paragraphe 3, du code des douanes doit être interprété en ce sens que les autorités nationales ne peuvent, sur le fondement de cette disposition, infliger au débiteur de la dette douanière des intérêts compensatoires pour la période située entre la date de la déclaration en douane initiale et la date de la prise en compte postérieure de celle-ci.

     Sur la troisième question

    40      Par cette question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union s’oppose à ce que les autorités nationales appliquent à une infraction douanière une sanction qui n’est pas expressément prévue par la législation nationale.

    41      À cet égard, il convient de rappeler que, en ce qui concerne les infractions douanières, la Cour a précisé que, en l’absence d’harmonisation de la législation de l’Union dans ce domaine, les États membres sont compétents pour choisir les sanctions qui leur semblent appropriées. Ils sont toutefois tenus d’exercer cette compétence dans le respect du droit de l’Union et de ses principes généraux (voir arrêts du 7 décembre 2000, de Andrade, C-213/99, Rec. p. I‑11083, point 20, et Hannl-Hofstetter, précité, point 18).

    42      Or, parmi ces principes figure celui de la légalité des délits et des peines (voir arrêt du 3 mai 2007, Advocaten voor de Wereld, C‑303/05, Rec. p. I‑3633, point 46). Ce principe exige que la loi définisse clairement les infractions et les peines qui les répriment. Cette condition se trouve remplie lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et au besoin à l’aide de l’interprétation qui en est donnée par les tribunaux, quels actes et omissions engagent sa responsabilité pénale (voir arrêts Advocaten voor de Wereld, précité, point 50, et du 22 mai 2008, Evonik Degussa/Commission, C‑266/06 P, point 39).

    43      Au vu de ce qui précède, il convient de répondre à la troisième question que les principes généraux du droit de l’Union et, notamment, le principe de la légalité des délits et des peines s’opposent à ce que les autorités nationales appliquent à une infraction douanière une sanction qui n’est pas expressément prévue par la législation nationale.

     Sur les dépens

    44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

    Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit:

    1)      L’article 232, paragraphe 1, sous b), du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1791/2006 du Conseil, du 20 novembre 2006, doit être interprété en ce sens que les intérêts de retard relatifs au montant des droits de douane restant à recouvrer ne peuvent être perçus, en vertu de cette disposition, que pour la période postérieure à l’expiration du délai de paiement dudit montant.

    2)      En l’absence de dispositions pertinentes dans le règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement n° 2913/92, tel que modifié par le règlement (CE) n° 214/2007 de la Commission, du 28 février 2007, l’article 214, paragraphe 3, du règlement n° 2913/92, tel que modifié par le règlement n° 1791/2006, doit être interprété en ce sens que les autorités nationales ne peuvent, sur le fondement de cette disposition, infliger au débiteur de la dette douanière des intérêts compensatoires pour la période située entre la date de la déclaration en douane initiale et la date de la prise en compte postérieure de celle-ci.

    3)      Les principes généraux du droit de l’Union et, notamment, le principe de la légalité des délits et des peines s’opposent à ce que les autorités nationales appliquent à une infraction douanière une sanction qui n’est pas expressément prévue par la législation nationale.

    Signatures


    * Langue de procédure: le bulgare.

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