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Document 62007CJ0261
Judgment of the Court (First Chamber) of 23 April 2009.#VTB-VAB NV v Total Belgium NV (C-261/07) and Galatea BVBA v Sanoma Magazines Belgium NV (C-299/07).#References for a preliminary ruling: Rechtbank van koophandel te Antwerpen - Belgium.#Directive 2005/29/EC - Unfair commercial practices - National legislation prohibiting combined offers to consumers.#Joined cases C-261/07 and C-299/07.
Arrêt de la Cour (première chambre) du 23 avril 2009.
VTB-VAB NV contre Total Belgium NV (C-261/07) et Galatea BVBA contre Sanoma Magazines Belgium NV (C-299/07).
Demandes de décision préjudicielle: Rechtbank van koophandel te Antwerpen - Belgique.
Directive 2005/29/CE - Pratiques commerciales déloyales - Réglementation nationale interdisant les offres conjointes aux consommateurs.
Affaires jointes C-261/07 et C-299/07.
Arrêt de la Cour (première chambre) du 23 avril 2009.
VTB-VAB NV contre Total Belgium NV (C-261/07) et Galatea BVBA contre Sanoma Magazines Belgium NV (C-299/07).
Demandes de décision préjudicielle: Rechtbank van koophandel te Antwerpen - Belgique.
Directive 2005/29/CE - Pratiques commerciales déloyales - Réglementation nationale interdisant les offres conjointes aux consommateurs.
Affaires jointes C-261/07 et C-299/07.
Recueil de jurisprudence 2009 I-02949
Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2009:244
ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
23 avril 2009 ( *1 )
«Directive 2005/29/CE — Pratiques commerciales déloyales — Réglementation nationale interdisant les offres conjointes aux consommateurs»
Dans les affaires jointes C-261/07 et C-299/07,
ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduites par le rechtbank van koophandel te Antwerpen (Belgique), par décisions des 24 mai et 21 juin 2007, parvenues à la Cour respectivement les 1er et 27 juin 2007, dans les procédures
VTB-VAB NV (C-261/07)
contre
Total Belgium NV,
et
Galatea BVBA (C-299/07)
contre
Sanoma Magazines Belgium NV,
LA COUR (première chambre),
composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. A. Tizzano (rapporteur), A. Borg Barthet, E. Levits et J.-J. Kasel, juges,
avocat général: Mme V. Trstenjak,
greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 juin 2008,
considérant les observations présentées:
— |
pour VTB-VAB NV, par Mes L. Eliaerts et B. Gregoir, advocaten, |
— |
pour Total Belgium NV, par Me J. Stuyck, advocaat, |
— |
pour Sanoma Magazines Belgium NV, par Me P. Maeyaert, advocaat, |
— |
pour le gouvernement belge, par Mme L. Van den Broeck et M. T. Materne, en qualité d’agents, assistés de Me E. Balate, avocat, |
— |
pour le gouvernement espagnol, par M. M. Muñoz Pérez, en qualité d’agent, |
— |
pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues et Mme R. Loosli-Surrans, en qualité d’agents, |
— |
pour le gouvernement portugais, par M. L. Inez Fernandes, en qualité d’agent, |
— |
pour la Commission des Communautés européennes, par M. W. Wils, en qualité d’agent, |
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 octobre 2008,
rend le présent
Arrêt
1 |
Les demandes de décision préjudicielle portent sur l’interprétation de l’article 49 CE et de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales») (JO L 149, p. 22, ci-après la «directive»). |
2 |
Ces demandes ont été présentées dans le cadre de deux litiges opposant, d’une part, VTB-VAB NV (ci-après «VTB») à Total Belgium NV (ci-après «Total Belgium») et, d’autre part, Galatea BVBA (ci-après «Galatea») à Sanoma Magazines Belgium NV (ci-après «Sanoma») au sujet de pratiques commerciales de Total Belgium et de Sanoma considérées comme déloyales par VTB ainsi que par Galatea. |
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3 |
Les cinquième, sixième, onzième et dix-septième considérants de la directive énoncent:
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4 |
L’article 1er de la directive dispose: «L’objectif de la présente directive est de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en rapprochant les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux pratiques commerciales déloyales qui portent atteinte aux intérêts économiques des consommateurs.» |
5 |
L’article 2 de la directive prévoit: «Aux fins de la présente directive, on entend par: […]
[…]» |
6 |
L’article 3, paragraphe 1, de la directive dispose: «La présente directive s’applique aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, telles que définies à l’article 5, avant, pendant et après une transaction commerciale portant sur un produit.» |
7 |
Selon l’article 4 de la directive: «Les États membres ne restreignent ni la libre prestation de services, ni la libre circulation des marchandises pour des raisons relevant du domaine dans lequel la présente directive vise au rapprochement des dispositions en vigueur.» |
8 |
L’article 5 de la directive, intitulé «Interdiction des pratiques commerciales déloyales», est ainsi rédigé: «1. Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. 2. Une pratique commerciale est déloyale si:
3. Les pratiques commerciales qui sont susceptibles d’altérer de manière substantielle le comportement économique d’un groupe clairement identifiable de consommateurs parce que ceux-ci sont particulièrement vulnérables à la pratique utilisée ou au produit qu’elle concerne en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité, alors que l’on pourrait raisonnablement attendre du professionnel qu’il prévoie cette conséquence, sont évaluées du point de vue du membre moyen de ce groupe. Cette disposition est sans préjudice de la pratique publicitaire courante et légitime consistant à formuler des déclarations exagérées ou des déclarations qui ne sont pas destinées à être comprises au sens littéral. 4. En particulier, sont déloyales les pratiques commerciales qui sont:
5. L’annexe I contient la liste des pratiques commerciales réputées déloyales en toutes circonstances. Cette liste unique s’applique dans tous les États membres et ne peut être modifiée qu’au travers d’une révision de la présente directive.» |
9 |
L’article 6 de la directive, intitulé «Actions trompeuses», dispose: «1. Une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses, et qu’elle est donc mensongère ou que, d’une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen, même si les informations présentées sont factuellement correctes, en ce qui concerne un ou plusieurs des aspects ci-après et que, dans un cas comme dans l’autre, elle l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement:
2. Une pratique commerciale est également réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances, elle amène ou est susceptible d’amener le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement, et qu’elle implique:
|
10 |
L’article 7 de la directive, intitulé «Omissions trompeuses», énonce: «1. Une pratique commerciale est réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et, par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. 2. Une pratique commerciale est également considérée comme une omission trompeuse lorsqu’un professionnel, compte tenu des aspects mentionnés au paragraphe 1, dissimule une information substantielle visée audit paragraphe ou la fournit de façon peu claire, inintelligible, ambiguë ou à contretemps, ou lorsqu’il n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte et lorsque, dans l’un ou l’autre cas, le consommateur moyen est ainsi amené ou est susceptible d’être amené à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. 3. Lorsque le moyen de communication utilisé aux fins de la pratique commerciale impose des limites d’espace ou de temps, il convient, en vue de déterminer si des informations ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre les informations à la disposition du consommateur par d’autres moyens. 4. Lors d’une invitation à l’achat, sont considérées comme substantielles, dès lors qu’elles ne ressortent pas déjà du contexte, les informations suivantes:
5. Les informations qui sont prévues par le droit communautaire et qui sont relatives aux communications commerciales, y compris la publicité ou le marketing, et dont une liste non exhaustive figure à l’annexe II, sont réputées substantielles.» |
11 |
L’article 8 de la directive, intitulé «Pratiques commerciales agressives», prévoit: «Une pratique commerciale est réputée agressive si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances, elle altère ou est susceptible d’altérer de manière significative, du fait du harcèlement, de la contrainte, y compris le recours à la force physique, ou d’une influence injustifiée, la liberté de choix ou de conduite du consommateur moyen à l’égard d’un produit, et, par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.» |
12 |
L’article 9 de la directive, intitulé «Utilisation du harcèlement, de la contrainte ou d’une influence injustifiée», est ainsi rédigé: «Afin de déterminer si une pratique commerciale recourt au harcèlement, à la contrainte, y compris la force physique, ou à une influence injustifiée, les éléments suivants sont pris en considération:
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13 |
Enfin, conformément à l’article 19 de la directive: «Les États membres adoptent et publient au plus tard le 12 juin 2007 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive. […] Ils appliquent ces dispositions au plus tard le 12 décembre 2007. […]» |
La réglementation nationale
14 |
L’article 54 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur (Moniteur belge du 29 août 1991, ci-après la «loi de 1991») est ainsi rédigé: «Il y a offre conjointe au sens du présent article, lorsque l’acquisition, gratuite ou non, de produits, de services, de tous autres avantages, ou de titre permettant de les acquérir, est liée à l’acquisition d’autres produits ou services, même identiques. Sauf les exceptions précisées ci-après, toute offre conjointe au consommateur effectuée par un vendeur est interdite. Est également interdite toute offre conjointe au consommateur effectuée par plusieurs vendeurs agissant dans une unité d’intention.» |
15 |
Les articles 55 à 57 de la loi de 1991 contiennent certaines exceptions à cette interdiction. |
16 |
L’article 55 de la loi de 1991 dispose: «Il est permis d’offrir conjointement, pour un prix global:
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17 |
Selon l’article 56 de la loi de 1991: «Il est permis d’offrir à titre gratuit, conjointement à un produit ou à un service principal:
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18 |
Enfin, l’article 57 de la loi de 1991 prévoit: «Il est également permis d’offrir gratuitement, conjointement à un produit ou à un service principal:
Les titres doivent mentionner la limite éventuelle de leur durée de validité, ainsi que les modalités de l’offre. Lorsque le vendeur interrompt son offre, le consommateur doit bénéficier de l’avantage offert au prorata des achats précédemment effectués.» |
19 |
Le 5 juin 2007, le Royaume de Belgique a adopté la loi modifiant la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur (Moniteur belge du 21 juin 2007, p. 34272, ci-après la «loi du 5 juin 2007») qui, conformément à son article1er, transpose les dispositions de la directive. |
Les litiges au principal et les questions préjudicielles
Affaire C-261/07
20 |
Il ressort de la décision de renvoi que, depuis le 15 janvier 2007, Total Belgium, une filiale du groupe Total qui distribue notamment du carburant dans des stations-service, offre aux consommateurs détenteurs d’une carte Total Club trois semaines gratuites d’assistance au dépannage, pour chaque plein d’au moins 25 litres pour une voiture ou d’au moins 10 litres pour un cyclomoteur. |
21 |
Le 5 février 2007, VTB, une société active dans le domaine de l’aide au dépannage, a demandé au rechtbank van koophandel te Antwerpen d’ordonner à Total Belgium la cessation de cette pratique commerciale en ce qu’elle constituait, notamment, une offre conjointe interdite par l’article 54 de la loi de 1991. |
22 |
Dans ces conditions, le rechtbank van koophandel te Antwerpen a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante: «La directive […] s’oppose-t-elle à une disposition nationale telle que celle de l’article 54 de la loi [de 1991] qui – réserve faite des cas énumérés limitativement dans la loi – interdit toute offre conjointe d’un vendeur à un consommateur, y compris l’offre conjointe d’un produit que le consommateur doit acheter et d’un service gratuit, dont l’acquisition est liée à l’achat du produit, et ce nonobstant les circonstances de l’espèce et en particulier nonobstant l’influence que cette offre particulière peut exercer sur le consommateur moyen et nonobstant la question de savoir si, dans les circonstances de l’espèce, cette offre peut être considérée comme contraire à la diligence professionnelle ou aux usages honnêtes en matière commerciale?» |
Affaire C-299/07
23 |
Le litige au principal oppose Galatea, une société qui exploite un magasin de lingerie à Schoten (Belgique), à Sanoma, une filiale du groupe finlandais Sanoma, éditrice de plusieurs périodiques dont l’hebdomadaire Flair. |
24 |
Le numéro de Flair du 13 mars 2007 était accompagné d’un carnet donnant droit, entre le 13 mars et le 15 mai 2007, à une remise de 15 à 25% sur des produits vendus dans certains magasins de lingerie situés dans la Région flamande. |
25 |
Le 22 mars 2007, Galatea a introduit devant le rechtbank van koophandel te Antwerpen une action en cessation de la pratique en cause, en faisant valoir que Sanoma avait violé, notamment, l’article 54 de la loi de 1991. |
26 |
Dans ces conditions, le rechtbank van koophandel te Antwerpen a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante: «L’article 49 CE, relatif à la libre prestation des services et la directive […] s’opposent-ils à une disposition nationale telle que celle de l’article 54 de la loi [de 1991] qui – réserve faite des cas énumérés limitativement dans la loi – interdit toute offre conjointe d’un vendeur à un consommateur dans le cadre de laquelle l’acquisition gratuite ou non de produits, services, avantages ou titres avec lesquels on peut les obtenir est liée à l’acquisition d’autres produits ou services, même identiques, et ce nonobstant les circonstances de l’espèce, et en particulier nonobstant l’influence que cette offre spécifique peut exercer sur le consommateur moyen et nonobstant la question de savoir si, dans les circonstances spécifiques de l’espèce, cette offre peut être considérée comme contraire à la diligence professionnelle ou aux usages honnêtes en matière commerciale?» |
27 |
Par ordonnance du président de la Cour du 29 août 2007, les affaires C-261/07 et C-299/07 ont été jointes aux fins des procédures écrite et orale ainsi que de l’arrêt. |
Sur les questions préjudicielles
28 |
Par ses deux questions, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que l’article 54 de la loi de 1991, qui, sauf certaines exceptions, et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d’espèce, établit un principe général d’interdiction des offres conjointes faites par un vendeur à un consommateur. |
Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle dans l’affaire C-261/07
29 |
VTB conteste la recevabilité de la demande de décision préjudicielle au motif qu’elle porterait sur l’interprétation d’une directive dont le délai de transposition, fixé au 12 décembre 2007, n’était pas encore expiré à la date à laquelle la décision de renvoi a été rendue, à savoir le 24 mai 2007. |
30 |
Pour les mêmes raisons, et sans soulever expressément une exception d’irrecevabilité, les gouvernements belge et espagnol considèrent que la directive ne serait pas applicable au litige au principal. En particulier, selon le gouvernement espagnol, une disposition nationale ne pourrait pas être écartée par un juge pour violation de la directive avant l’expiration du délai prévu pour la transposition de celle-ci. |
31 |
Ces arguments ne sauraient toutefois être retenus. |
32 |
À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales telle que prévue à l’article 234 CE, il appartient aux seules juridictions nationales, qui sont saisies du litige et doivent assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de chaque affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre leur jugement que la pertinence des questions qu’elles posent à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêts du 13 mars 2001, PreussenElektra, C-379/98, Rec. p. I-2099, point 38; du 22 mai 2003, Korhonen e.a., C-18/01, Rec. p. I-5321, point 19, ainsi que du 19 avril 2007, Asemfo, C-295/05, Rec. p. I-2999, point 30). |
33 |
Il s’ensuit que la présomption de pertinence qui s’attache aux questions posées à titre préjudiciel par les juridictions nationales ne peut être écartée que dans des cas exceptionnels et, notamment, lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée des dispositions du droit communautaire visées dans ces questions n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal (voir, notamment, arrêts du 15 décembre 1995, Bosman, C-415/93, Rec. p. I-4921, point 61, ainsi que du 1er avril 2008, Gouvernement de la Communauté française et gouvernement wallon, C-212/06, Rec. p. I-1683, point 29). |
34 |
En l’occurrence, force est de constater qu’il n’apparaît pas de manière manifeste que la présente question préjudicielle est dépourvue de pertinence au regard de la décision que la juridiction de renvoi est appelée à rendre. |
35 |
En effet, d’une part, il ressort de la jurisprudence que peuvent être considérées comme relevant du champ d’application d’une directive non seulement les dispositions nationales dont l’objectif exprès est de transposer cette directive, mais également, à compter de la date d’entrée en vigueur de ladite directive, les dispositions nationales préexistantes, susceptibles d’assurer la conformité du droit national à celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2006, Cordero Alonso, C-81/05, Rec. p. I-7569, point 29). |
36 |
Or, s’il est vrai, dans l’affaire au principal, que la loi du 5 juin 2007 modifiant la loi de 1991 et visant formellement à transposer la directive est postérieure aux faits au principal et à l’adoption de la décision de renvoi, il n’en demeure pas moins que, ainsi qu’il résulte de cette décision et comme l’a reconnu le gouvernement belge lors de l’audience, les dispositions litigieuses contenues aux articles 54 à 57 de la loi de 1991, à savoir celles posant le principe d’interdiction générale des offres conjointes et prévoyant certaines exceptions à ce principe, n’ont été ni abrogées ni même amendées par la loi du 5 juin 2007. |
37 |
En d’autres termes, aussi bien au moment des faits au principal qu’à celui de l’adoption de la décision de renvoi, ces dispositions préexistantes étaient considérées par les autorités nationales comme susceptibles d’assurer la transposition de la directive depuis la date d’entrée en vigueur de celle-ci, à savoir le 12 juin 2005, et comme relevant, dès lors, de son champ d’application. |
38 |
D’autre part, il résulte, en tout état de cause, de la jurisprudence de la Cour que, pendant le délai de transposition d’une directive, les États membres destinataires de celle-ci doivent s’abstenir de prendre des dispositions de nature à compromettre sérieusement la réalisation du résultat prescrit par cette directive (arrêts du 18 décembre 1997, Inter-Environnement Wallonie, C-129/96, Rec. p. I-7411, point 45; du 8 mai 2003, ATRAL, C-14/02, Rec. p. I-4431, point 58, et du 22 novembre 2005, Mangold, C-144/04, Rec. p. I-9981, point 67). |
39 |
À cet égard, la Cour a eu l’occasion de préciser qu’une telle obligation d’abstention s’impose à l’ensemble des autorités des États membres concernés, y compris les juridictions nationales. Dès lors, dès la date à laquelle une directive est entrée en vigueur, les juridictions des États membres doivent s’abstenir dans la mesure du possible d’interpréter le droit interne d’une manière qui risquerait de compromettre sérieusement, après l’expiration du délai de transposition, la réalisation de l’objectif poursuivi par cette directive (voir, en particulier, arrêt du 4 juillet 2006, Adeneler e.a., C-212/04, Rec. p. I-6057, points 122 et 123). |
40 |
Dans la mesure où la directive était déjà entrée en vigueur au moment des faits au principal, l’interprétation sollicitée par le rechtbank van koophandel te Antwerpen, qui porte sur des dispositions centrales de la directive, doit être considérée comme utile à la juridiction de renvoi afin de lui permettre de statuer dans l’affaire dont elle est saisie en se conformant à ladite obligation d’abstention. |
41 |
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la demande de décision préjudicielle introduite par la juridiction de renvoi dans l’affaire C-261/07 est recevable. |
Sur le fond
Observations soumises à la Cour
42 |
Total Belgium, Sanoma, le gouvernement portugais et la Commission des Communautés européennes sont d’avis que la directive s’oppose à une interdiction des offres conjointes telle que celle prévue à l’article 54 de la loi de 1991. |
43 |
À cet égard, Total Belgium, Sanoma et la Commission font valoir que les offres conjointes relèvent de la notion de «pratique commerciale» au sens de la directive. Or, étant donné que cette dernière procède à une harmonisation totale en matière de pratiques commerciales déloyales, les seules pratiques pouvant être interdites «en toutes circonstances» par les États membres seraient, conformément à l’article 5, paragraphe 5, de la directive, celles mentionnées à l’annexe I de celle-ci. Les offres conjointes n’étant pas visées par cette annexe, elles ne sauraient, dès lors, être prohibées en tant que telles, mais pourraient être interdites seulement si, eu égard aux éléments spécifiques de l’espèce, le juge devait constater que les conditions posées à l’article 5 de la directive sont remplies. Par conséquent, comme le soutient également le gouvernement portugais, une interdiction de principe des offres conjointes, telle que celle énoncée à l’article 54 de la loi de 1991, serait contraire à la directive. |
44 |
D’avis opposé, VTB ainsi que les gouvernements belge et français font essentiellement valoir que les offres conjointes échappent à la notion de «pratique commerciale» au sens de la directive et, dès lors, ne relèvent pas de son champ d’application. |
45 |
À cet égard, le gouvernement belge précise que les offres conjointes avaient fait l’objet de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux promotions des ventes dans le marché intérieur (JO 2002, C 75, p. 11), qui distinguait clairement le traitement juridique desdites offres de celui des pratiques commerciales, visées par la directive. Or, cette proposition n’ayant été retirée qu’en 2006, les autorités belges étaient fondées à croire que les offres conjointes ne constituaient pas des«pratiques commerciales». Par conséquent, le législateur belge, dans le cadre de la transposition de la directive, n’a estimé ni devoir modifier l’article 54 de la loi de 1991 ni être dans l’obligation de l’interpréter à la lumière des critères posés à l’article 5 de la directive. |
46 |
Le gouvernement français ajoute, en particulier, que, si la directive oblige les États membres à interdire les pratiques commerciales déloyales vis-à-vis des consommateurs, cela n’empêche toutefois pas ces États, afin de mieux protéger le consommateur, de prohiber d’autres pratiques, telles que les offres conjointes, indépendamment de leur caractère déloyal au sens de la directive. |
47 |
Enfin, selon VTB, l’article 5 de la directive, en tout état de cause, n’exclut pas que les États membres qualifient de déloyales des pratiques commerciales autres que celles mentionnées à l’annexe I de celle-ci. |
Réponse de la Cour
48 |
Afin de répondre aux présentes questions, il est nécessaire, à titre liminaire, de déterminer si les offres conjointes, objet de l’interdiction litigieuse, constituent des pratiques commerciales au sens de l’article 2, sous d), de la directive et sont, dès lors, soumises aux prescriptions édictées par cette dernière. |
49 |
À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 2, sous d), de la directive définit, en utilisant une formulation particulièrement large, la notion de pratique commerciale comme «toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit aux consommateurs». |
50 |
Or, ainsi que Mme l’avocat général l’a relevé aux points 69 et 70 de ses conclusions, les offres conjointes constituent des actes commerciaux s’inscrivant clairement dans le cadre de la stratégie commerciale d’un opérateur et visant directement à la promotion et à l’écoulement des ventes de celui-ci. Il s’ensuit qu’elles constituent bien des pratiques commerciales au sens de l’article 2, sous d), de la directive et relèvent, en conséquence, du champ d’application de celle-ci. |
51 |
Cela étant déterminé, il convient de rappeler, tout d’abord, que la directive vise à établir, conformément à ses cinquième et sixième considérants ainsi qu’à son article 1er, des règles uniformes relatives aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, afin de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur et d’assurer un niveau élevé de protection de ces derniers. |
52 |
La directive procède, ainsi, à une harmonisation complète desdites règles au niveau communautaire. Dès lors, comme le prévoit expressément l’article 4 de celle-ci et contrairement à ce qu’affirment VTB et le gouvernement français, les États membres ne peuvent pas adopter des mesures plus restrictives que celles définies par la directive, même aux fins d’assurer un degré plus élevé de protection des consommateurs. |
53 |
Ensuite, il y a lieu de relever que l’article 5 de la directive prévoit l’interdiction des pratiques commerciales déloyales et énonce les critères permettant de déterminer un tel caractère déloyal. |
54 |
Ainsi, conformément au paragraphe 2 de cette disposition, une pratique commerciale est déloyale si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur moyen par rapport au produit. |
55 |
En outre, l’article 5, paragraphe 4, de la directive définit deux catégories précises de pratiques commerciales déloyales, à savoir les «pratiques trompeuses» et les «pratiques agressives» répondant aux critères spécifiés respectivement aux articles 6 et 7 ainsi que 8 et 9 de la directive. En vertu de ces dispositions, de telles pratiques sont interdites lorsque, compte tenu de leurs caractéristiques et du contexte factuel, elles amènent ou sont susceptibles d’amener le consommateur moyen à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement. |
56 |
La directive établit également, à son annexe I, une liste exhaustive de 31 pratiques commerciales qui, conformément à l’article 5, paragraphe 5, de la directive, sont réputées déloyales «en toutes circonstances». Par conséquent, ainsi que le précise expressément le dix-septième considérant de la directive, il s’agit des seules pratiques commerciales qui peuvent être considérées comme déloyales sans faire l’objet d’une évaluation au cas par cas au titre des dispositions des articles 5 à 9 de la directive. |
57 |
Enfin, il importe de relever que les offres conjointes ne figurent pas parmi les pratiques énumérées à ladite annexe I. |
58 |
Dès lors, c’est à la lumière du contenu et de l’économie générale des dispositions de la directive, rappelées aux points précédents, qu’il convient d’examiner les questions posées par la juridiction de renvoi. |
59 |
Or, à cet égard, force est de constater que, en établissant une présomption d’illégalité des offres conjointes, une réglementation nationale telle que celle en cause au principal ne répond pas aux exigences posées par la directive. |
60 |
En effet, d’abord, l’article 54 de la loi de 1991 établit le principe de l’interdiction des offres conjointes, alors même que de telles pratiques ne sont pas visées à l’annexe I de la directive. |
61 |
Or, comme il a été rappelé au point 56 du présent arrêt, cette annexe énumère de manière exhaustive les seules pratiques commerciales interdites en toutes circonstances, lesquelles ne doivent, dès lors, pas faire l’objet d’un examen au cas par cas. |
62 |
Ainsi, la directive s’oppose au régime institué par l’article 54 de la loi de 1991 en ce que cet article prohibe, de manière générale et préventive, les offres conjointes indépendamment de toute vérification de leur caractère déloyal au regard des critères posés aux articles 5 à 9 de la directive. |
63 |
Ensuite, en opérant de la sorte, une règle du type de celle en cause au principal se heurte au contenu de l’article 4 de la directive qui interdit expressément aux États membres de maintenir ou d’adopter des mesures nationales plus restrictives, même lorsque de telles mesures visent à assurer un niveau de protection plus élevé des consommateurs. |
64 |
Enfin, il convient d’ajouter qu’une telle interprétation ne saurait être remise en cause par le fait que la loi de 1991 prévoit, à ses articles 55 à 57, un certain nombre d’exceptions à ladite prohibition des offres conjointes. |
65 |
En effet, même si ces exceptions sont susceptibles de restreindre la portée de l’interdiction des offres conjointes, il n’en reste pas moins qu’elles ne sauraient, du fait de leur nature limitée et prédéfinie, se substituer à l’analyse, devant être nécessairement menée au regard du contexte factuel de chaque espèce, du caractère «déloyal» d’une pratique commerciale à la lumière des critères énoncés aux article 5 à 9 de la directive, lorsqu’il s’agit, comme dans les affaires au principal, d’une pratique non visée à l’annexe I de celle-ci. |
66 |
Cette constatation est d’ailleurs confirmée par le contenu même de certaines des dérogations en cause. Ainsi, par exemple, l’article 55 de la loi de 1991 n’autorise les offres conjointes pour un prix global que pour autant qu’elles concernent des produits ou des services qui soit constituent un ensemble, soit sont identiques. Or, comme le relève à juste titre la Commission dans sa réponse à la question écrite posée par la Cour, il ne peut être exclu que, moyennant notamment une information correcte du consommateur, une offre conjointe de différents produits ou services qui ni ne constituent un ensemble ni ne sont identiques satisfasse aux exigences de loyauté posées par la directive. |
67 |
Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la directive s’oppose à une interdiction des offres conjointes telle que celle prévue par la loi de 1991. Partant, il n’est pas nécessaire de s’interroger sur une éventuelle violation de l’article 49 CE, évoquée dans la question préjudicielle posée dans le cadre de l’affaire C-299/07. |
68 |
Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que la directive doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause dans les litiges au principal, qui, sauf certaines exceptions et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d’espèce, interdit toute offre conjointe faite par un vendeur à un consommateur. |
Sur les dépens
69 |
La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. |
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit: |
La directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil («directive sur les pratiques commerciales déloyales»), doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause dans les litiges au principal, qui, sauf certaines exceptions et sans tenir compte des circonstances spécifiques du cas d’espèce, interdit toute offre conjointe faite par un vendeur à un consommateur. |
Signatures |
( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.