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Document 62007CO0175

Ordonnance de la Cour (sixième chambre) du 6 octobre 2008.
SA des sucreries de Fontaine-le-Dun-Bolbec-Auffay (SAFBA) et autres contre Directeur général des douanes et droits indirects et Receveur principal des douanes et droits indirects de Gennevilliers.
Demande de décision préjudicielle: Tribunal de grande instance de Nanterre - France.
Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure - Sucre - Cotisations à la production - Modalités d’application du régime des quotas - Prise en compte des quantités de sucre contenues dans les produits transformés - Détermination de l’excédent exportable - Détermination de la perte moyenne.
Affaires jointes C-175/07 à C-184/07.

Recueil de jurisprudence 2008 I-00142*

Identifiant ECLI: ECLI:EU:C:2008:543

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

6 octobre 2008 (*)

«Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure – Sucre – Cotisations à la production – Modalités d’application du régime des quotas – Prise en compte des quantités de sucre contenues dans les produits transformés – Détermination de l’excédent exportable – Détermination de la perte moyenne»

Dans les affaires jointes C‑175/07 à C‑184/07,

ayant pour objet des demandes de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduites par le tribunal de grande instance de Nanterre (France), par décisions du 29 mars 2007, parvenues à la Cour le 2 avril 2007, dans les procédures

SA des sucreries de Fontaine-le-Dun-Bolbec-Auffay (SAFBA) (C‑175/07),

Sucreries et Raffineries d’Erstein SA (C-176/07),

Sucreries & Distilleries de Souppes – Ouvré Fils SA (C-177/07),

Sucrerie de Bourgogne SA (C-178/07),

Sucrerie Bourdon (C-179/07),

Sucreries du Marquenterre SA (C-180/07),

Cristal Union (C-181/07),

Lesaffre Frères SA (C-182/07),

Vermendoise Industries SAS (C-183/07),

Sucreries de Toury et Usines annexes SA (C-184/07)

contre

Directeur général des douanes et droits indirects,

Receveur principal des douanes et droits indirects de Gennevilliers,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, MM. P. Kuris et J.-C. Bonichot, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. R. Grass,

la Cour se proposant de statuer par voie d’ordonnance motivée conformément à l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, de son règlement de procédure,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Les demandes de décision préjudicielle portent sur la validité du règlement (CE) n° 314/2002 de la Commission, du 20 février 2002, établissant des modalités d’application du régime des quotas dans le secteur du sucre (JO L 50, p. 40), tel que modifié par le règlement (CE) n° 38/2004 de la Commission, du 9 janvier 2004 (JO L 6, p. 13, ci-après le «règlement n° 314/2002 modifié»), ainsi que sur la validité du règlement (CE) n° 1686/2005 de la Commission, du 14 octobre 2005, fixant, pour la campagne de commercialisation 2004/2005, les montants des cotisations à la production ainsi que le coefficient de la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre (JO L 271, p. 12).

2        Ces demandes ont été présentées à l’occasion de litiges opposant les producteurs de sucre SA des sucreries de Fontaine-le-Dun-Bolbec-Auffay (SAFBA), Sucreries et Raffineries d’Erstein SA, Sucreries & Distilleries de Souppes – Ouvré Fils SA, Sucrerie de Bourgogne SA, Sucrerie Bourdon, Sucreries du Marquenterre SA, Cristal Union, Lesaffre Frères SA, Vermendoise Industries SAS ainsi que Sucreries de Toury et Usines annexes SA (ci-après «SAFBA e.a.») au directeur général des douanes et droits indirects ainsi qu’au receveur principal des douanes et droits indirects de Gennevilliers (France) au sujet des montants des cotisations à la production acquittées au titre de la campagne 2004/2005 dans le cadre du financement de l’organisation commune de marché dans le secteur du sucre.

 Le cadre juridique

3        En ce qui concerne le calcul des cotisations à la production, l’article 15, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1260/2001 du Conseil, du 19 juin 2001, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 178, p. 1), dispose:

«Avant la fin de chaque campagne de commercialisation, il est constaté:

a)      la quantité prévisible de sucre A et B, d’isoglucose A et B et de sirop d’inuline A et B produite au compte de la campagne en cours;

b)      la quantité prévisible de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline écoulée pour la consommation à l’intérieur de la Communauté pendant la campagne en cours;

c)      l’excédent exportable en diminuant la quantité visée au point a) de la quantité visée au point b);

d)      la perte moyenne prévisible ou la recette moyenne prévisible par tonne de sucre pour les engagements à l’exportation à réaliser au titre de la campagne en cours.

Cette perte moyenne ou cette recette moyenne est égale à la différence entre le montant total des restitutions et le montant total des prélèvements rapportés au tonnage total des engagements à l’exportation en cause;

e)      la perte globale prévisible ou la recette globale prévisible, en multipliant l’excédent visé au point c) par la perte moyenne ou la recette moyenne visées au point d).»

4        En vertu notamment des articles 15, paragraphe 8, et 16, paragraphe 5, du règlement n° 1260/2001, la Commission des Communautés européennes a adopté le règlement n° 314/2002.

5        L’article 6, paragraphe 4, du règlement n° 314/2002 modifié prévoit:

«La quantité écoulée pour la consommation à l’intérieur de la Communauté à constater en application de l’article 15, paragraphe 1, point b), et de l’article 15, paragraphe 2, point a), du règlement (CE) n° 1260/2001 est établie sur la base de la somme des quantités, exprimées en sucre blanc, de sucres et sirops visés à l’article 1er, paragraphe 1, points a) à d), du présent règlement, d’isoglucose et de sirop d’inuline:

a)      stockées au début de la campagne;

b)      produites sous quotas A et B;

c)      importées en l’état;

d)      contenues dans les produits transformés importés.

Il est déduit de la somme visée au premier alinéa les quantités, exprimées en sucre blanc, de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline:

a)      exportées en l’état;

b)      contenues dans les produits transformés exportés;

c)      stockées à la fin de la campagne;

d)      ayant fait l’objet d’un titre de restitutions à la production visées à l’article 7, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1260/2001.

[…]»

6        L’article 6, paragraphe 5, du règlement n° 314/2002 modifié dispose:

«Sont considérées comme engagements à l’exportation au titre de la campagne de commercialisation en cours, au sens de l’article 15, paragraphe 1, point d), du règlement (CE) n° 1260/2001:

a)      toutes les quantités de sucre à exporter en l’état avec restitutions ou prélèvements à l’exportation fixés par voie d’adjudications ouvertes pour ladite campagne;

b)      toutes les quantités de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline à exporter en l’état avec restitutions ou prélèvements à l’exportation fixés de façon périodique sur la base de certificats d’exportation délivrés pendant ladite campagne;

c)      toutes les exportations prévisibles de sucre, d’isoglucose et de sirop d’inuline sous forme de produits transformés avec restitutions ou prélèvements à l’exportation fixés à cette fin pendant ladite campagne.

Pour le calcul de la perte moyenne prévisible visée à l’article 15, paragraphe 1, point d), du règlement (CE) n° 1260/2001, sont également prises en compte les restitutions à la production pour les quantités de produits de base exprimées en sucre blanc pour lesquelles des titres de restitution à la production visés à l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement ont été délivrés au cours de la campagne de commercialisation en cause.»

7        Les montants des cotisations à la production ont été fixés, pour la campagne 2004/2005 par le règlement n° 1686/2005, en application des règlements nos 1260/2001 et 314/2002.

 Les litiges au principal et les questions préjudicielles

8        SAFBA e.a. sont soumis, en tant que producteurs de sucre, au paiement des cotisations à la production sur le sucre.

9        Estimant trop élevés les montants des cotisations qu’ils ont acquittées au titre de la campagne de commercialisation 2004/2005, ils ont sollicité un remboursement partiel de ces cotisations auprès du receveur principal des douanes et droits indirects de Gennevilliers chargé du recouvrement de celles-ci.

10      Par décisions du 4 août 2006 dudit receveur principal, les réclamations présentées en vue de ce remboursement ont été rejetées au motif que les taux des cotisations contestées résultaient de l’application de la réglementation communautaire.

11      Dans ces conditions, SAFBA e.a. ont introduit des recours devant le tribunal de grande instance de Nanterre afin que le remboursement partiel des cotisations contestées, augmenté des intérêts moratoires, soit ordonné.

12      Les requérants au principal ont fait valoir que l’évaluation des besoins de financement, obtenue selon le mode de calcul retenu par la Commission, était surestimée par rapport aux besoins réels de financement. En effet, ce mode de calcul ne tiendrait pas compte du fait qu’une partie des sucres incorporés dans les produits transformés exportés ne perçoit pas de restitution à l’exportation et ne génère donc aucun coût. Dès lors, le règlement n° 314/2002 modifié serait invalide en ce que, n’excluant pas du calcul de l’excédent à financer les quantités de sucres exportées sans restitution, il ne respecterait pas les dispositions du règlement n° 1260/2001 visant à assurer le financement des charges d’écoulement des excédents communautaires et serait contraire aux principes de proportionnalité et de non-discrimination. Or, l’invalidité du règlement n° 314/2002 modifié entraînerait par voie de conséquence celle du règlement n° 1686/2005.

13      À titre subsidiaire et au cas où le règlement n° 314/2002 modifié ne serait pas déclaré invalide, SAFBA e.a. ont soutenu que les quantités exportées sans restitution devant donc être prises en compte pour calculer l’excédent à financer, ces mêmes quantités devraient alors être également retenues pour le calcul de la «perte moyenne» par tonne, permettant de fixer le taux annuel de la cotisation à la production, de sorte que l’invalidité du règlement n° 1686/2005 entraînerait celle d’une partie de la cotisation versée au cours de la campagne de commercialisation 2004/2005.

14      C’est dans ces conditions que le tribunal de grande instance de Nanterre a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Le règlement [n° 314/2002] est-il invalide au regard de l’article 15 du règlement [n° 1260/2001] et au regard des principes de proportionnalité et de non-discrimination, en ce qu’il ne prévoit pas, pour le calcul de la cotisation à la production, d’exclure des besoins de financement les quantités de sucre contenues dans des produits transformés, exportées sans bénéficier de restitution à l’exportation?

Dans l’éventualité d’une réponse négative à cette question:

2)      Le règlement n° 1686/2005 est-il invalide au regard du règlement [n° 314/2002] et de l’article 15 du règlement [n° 1260/2001] et du principe de proportionnalité, en ce qu’il fixe une cotisation à la production pour le sucre qui est calculée à partir d’une ‘perte moyenne’ à la tonne exportée, qui ne tient pas compte des quantités exportées sans restitution, alors que ces mêmes quantités sont incluses dans le total retenu pour évaluer la perte globale à financer?»

15      Par ordonnance du 16 avril 2007, le président de la Cour a ordonné la jonction des affaires C-175/07 à C-184/07 aux fins de la procédure écrite et orale ainsi que de l’arrêt.

 Sur les questions préjudicielles

 Observations liminaires

16      Conformément à l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué ou lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, après avoir entendu l’avocat général, à tout moment, statuer par voie d’ordonnance motivée comportant référence à l’arrêt précédent ou à la jurisprudence en cause.

17      La Cour estime que tel est le cas dans les présentes affaires.

 Sur la première question

18      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l’article 6, paragraphe 4, du règlement n° 314/2002 modifié est invalide au regard de l’article 15 du règlement n° 1260/2001 ainsi qu’au regard des principes de proportionnalité et de non-discrimination, en ce qu’il ne prévoit pas, pour le calcul de la cotisation à la production, d’exclure de l’excédent exportable les quantités de sucre contenues dans les produits transformés exportés pour lesquelles des restitutions à l’exportation n’ont pas été versées.

19      Cette question porte sur des points analogues à ceux déjà soulevés dans les affaires jointes ayant donné lieu à l’arrêt du 8 mai 2008, Zuckerfabrik Jülich e.a. (C-5/06 et C-23/06 à C-36/06, non encore publié au Recueil).

20      Il y a lieu de rappeler que, au point 37 de l’arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, la Cour a indiqué que, l’excédent exportable étant constitué de la différence entre la production communautaire sous quotas A et B et la consommation intérieure, cette dernière n’a pas vocation à inclure les quantités de produits exportées, qu’elles aient ou non bénéficié de restitutions à l’exportation.

21      Ne sauraient, en effet, être considérées comme écoulées pour la consommation à l’intérieur de la Communauté, au sens de l’article 15, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1260/2001, les quantités de produits exportées (arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, point 38).

22      Au point 45 de l’arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, la Cour a jugé que, en vertu de l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 1260/2001, aux fins du calcul de l’excédent exportable, toutes les quantités de produits exportées relevant de cet article, que des restitutions aient ou non été effectivement payées, doivent être déduites de la consommation.

23      Il s’ensuit que, en ce qui concerne le calcul de la cotisation à la production, l’article 15, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 1260/2001 inclut dans l’excédent exportable les quantités de sucre relevant de cet article contenues dans des produits transformés exportés, sans que des restitutions aient été effectivement payées.

24      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que l’examen de l’article 6, paragraphe 4, du règlement n° 314/2002 modifié, en ce que cette disposition ne prévoit pas, pour le calcul de la cotisation à la production, d’exclure de l’excédent exportable les quantités de sucre contenues dans des produits transformés exportés pour lesquelles aucune restitution à l’exportation n’a été octroyée, n’a pas révélé l’existence d’éléments de nature à en affecter la validité.

 Sur la seconde question

25      Le règlement n° 1686/2005 a fixé, pour la campagne de commercialisation 2004/2005, notamment les montants des cotisations à la production dans le secteur du sucre.

26      La Cour a jugé, au point 61 de l’arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, que l’article 15, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 1260/2001 doit être interprété en ce sens que toutes les quantités de produits exportées relevant de cet article, que des restitutions aient ou non été effectivement payées, doivent être prises en compte en vue de la détermination de la perte moyenne prévisible par tonne de produit.

27      Or, il est constant que, aux fins du calcul de la perte moyenne par tonne de sucre, n’ont été prises en compte, en application de l’article 6, paragraphe 5, du règlement n° 314/2002 modifié, que les exportations assorties de restitutions.

28      Il s’ensuit qu’une telle méthode de calcul de la perte moyenne n’est pas conforme à l’article 15 du règlement n° 1260/2001 (voir arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, point 64).

29      Dès lors, le règlement n° 1686/2005, qui fait application de ladite méthode, est invalide (voir, par analogie, arrêt Zuckerfabrik Jülich e.a., précité, point 65).

 Sur les dépens

30      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit:

1)      L’examen de l’article 6, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 314/2002 de la Commission, du 20 février 2002, établissant des modalités d’application du régime des quotas dans le secteur du sucre, tel que modifié par le règlement (CE) n° 38/2004 de la Commission, du 9 janvier 2004, en ce que cette disposition ne prévoit pas, pour le calcul de la cotisation à la production, d’exclure de l’excédent exportable les quantités de sucre contenues dans des produits transformés exportés pour lesquelles aucune restitution à l’exportation n’a été octroyée, n’a pas révélé l’existence d’éléments de nature à en affecter la validité.

2)      Le règlement (CE) n° 1686/2005 de la Commission, du 14 octobre 2005, fixant, pour la campagne de commercialisation 2004/2005, les montants des cotisations à la production ainsi que le coefficient de la cotisation complémentaire dans le secteur du sucre, est invalide.

Signatures


* Langue de procédure: le français.

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